Alliances à Blanc-Castel [Sixtine De Crutshester]

Le marquisat de Blanc-Castel était, comme son titre l’indique, une province particulière de l’Empire. Situé près des Contrées Désolées, le marquisat abritait plusieurs baronnies et davantage encore de châtelleneries, avec plusieurs forteresses, fortins, et un fort central, Blanc-Castel, demeure de la puissante Marquise Véra. Une administration très centralisée avec une forte présence militaire, bénéficiant d’une administration particulière. Dans les marquisats, l’armée avait un fort pouvoir décisionnel. Ici, l’esprit militaire propre à l’Empire était resté intact, et Véra devait régulièrement négocier avec les militaires. Elle était Marquise, ce qui était un titre particulier, illustrant sa nature militaire.

Blanc-Castel était située le long des côtes, et affrontait régulièrement des menaces de pirates, ainsi que des invasions venant des montagnes limitrophes. Pour toutes ces raisons, la Marquise avait de multiples arsenaux le long de la mer, comme Fort-Tonnerre, un puissant fort maritime qui avait été conçu après des raids de corsaires nexusiens. Fort-Tonnerre disposait également de forteresses secondaires abritant des entrepôts de stockage et des quais supplémentaires pour permettre de soutenir le fort. C’était une vaste organisation militaire, une côte maritime lourdement armée allant de Fort-Tonnerre au Nid d’Aigle, une impressionnante construction juchée sur une montagne.

Quant à Véra, elle vivait dans la capitale du marquisat, la cité de Blanc-Castel. Une cité reconnaissable par la Tour d’Argent, un immense palais au centre de cette ville construite à l’embouchure d’un fleuve, et entourée par d’épaisses tours faisant office de phares. Ce soir, Véra était affairée à une réception très particulière. La Marquise était en train de nouer des alliances politiques, car elle avait besoin de fonds supplémentaires aux crédits impériaux pour rénover plusieurs de ses forteresses et ses navires, après une importante attaque de pirates. L’enquête de Véra confirmait en réalité à une guérilla maritime menée par Nexus, qui avait coulé à distance des navires marchands ashnardiens, et avait même attaqué plusieurs  arsenaux secondaires, lançant ensuite depuis les forteresses brisées des raids de bandits dans les terres. Des fermes avaient été brûlées, des villages pillés, avant que l’armée impériale ne repousse les bandits, et ne reprenne le contrôle des arsenaux. Véra ne pouvait pas se permettre de perdre le contrôle de ses terres, car, si elle était jugée comme inapte à ce poste par l’armée, l’Empire n’hésiterait pas à la révoquer.

*Il faut donc que je fasse le tour des alliances, et que je montre que j’ai encore de l’argent...*

Elle avait donc organisé une belle réception, avec des esclaves, de la nourriture... Des représentants du Conseil Impérial étaient présents, ainsi que de la noblesse ashnardienne, comme la sensuelle Azelia, une représentante de la Duchesse Anelia Lianor. Véra comptait nouer des alliances ce soir, en utilisant sa verve, mais aussi son corps, qui était une arme particulièrement redoutable.

Véra cherchait aussi à nouer de nouvelles alliances, ce qui l’amena à se rapprocher d’une jeune femme qu’elle n’avait encore jamais vu auparavant, Dame Sixtine Eugénie Alix De Crutshester, une élégante duchesse portant une belle tenue blanche avec un nœud papillon sur le cou.

« Bonsoir, Madame de Crutshester, la salua Véra dans sa tenue moulante noire à l’indécence indéniable, j’espère que vous avez fait bon voyage, et que le marquisat de Blanc-Castel est à votre goût ! »

Quel genre de soirée cela allait-il être?
C'est l'une des questions qui traversa l'esprit de Sixtine alors que sa voiture d'un blanc éclatant rehaussé d'un bleu argenté reflétant la lumière du soleil dans les yeux des curieux faisait route en direction du marquisat de Blanc-Castel où elle était invitée. Blanc-Castel. Un nom qui aurait fort convenu à la jeune femme. Si la conclusion de la réunion s'y prêtait, peut-être s'accorderait-elle quelques jours pour visiter l'endroit.

Pour en revenir à sa pensée principale, elle avait quelques idées sur le sujet. Avant ce genre d’événements il fallait faire ses devoirs. Puissance maritime, le marquisat avait connu quelques déboires ces derniers temps. Une réception à cet instant ne pouvait être que pour montrer que la Marquise n'avait rien perdu de sa puissance, que cela soit vrai ou non. Et c'était justement tout l'intérêt, qu'on ne puisse pas déterminer une éventuelle perte de pouvoir. Bien évidemment, cela n'était que la base, l'hôte avait certainement d'autres idées derrière la tête. Mais cela faisait partie du jeu de tenter de les découvrir au fil de la soirée.
Selon la jeune femme, la soirée serait en deux parties. Tout d'abord la réception officielle, qui serait considérée comme publique et où tout le monde se tiendrait bien. Le moment pour elle de se faire connaître et de marquer les esprits qui méritaient de l'être. Puis une deuxième partie lors de laquelle la Marquise ne recevrait que les gens de confiance ou ceux qu'elle essaye de mettre dans sa poche. Une soirée privative où la bienséance laisse place aux perversités démoniaques, tel qu'il est ancré dans la culture ashnardienne.

Si cette supposition se révélait correcte, alors un choix important s'offrait à Sixtine. Devait-elle se débrouiller pour être invitée à la seconde moitié? Devait-elle montrer aux gens qui y seraient présents que la jeune fille pure n'était qu'une façade? Ou valait-il mieux conserver les apparences? Tout cela dépendrait de qui se joindrait aux festivités, pour peu qu'elle-même en ait l'occasion, et des objectifs de la Marquise. En plus de se faire bien voir des puissants, il lui faudrait répondre à toutes ces questions pour l'éventualité où il y ait effectivement une soirée privée derrière. Il y avait fort à parier qu'elle trouverait la réception très courte...

Ceci étant dit, ou plutôt pensé, elle passa en revue les points concrets qu'elle pouvait faire jouer lors de négociations.
Le Crutshesterland était avant tout une puissance agricole. Avec une répartition calculée des diverses semences et de l'élevage, ainsi qu'avec l'apparition de l'esclavage, les terres permettaient de nourrir quatre à cinq fois sa population. Les terres avoisinant les siennes, celles qu'elle offertes à Ashnard pour son intégration pacifique, dépendaient déjà d'elle pour leur approvisionnement. Nouveauté qui restait encore à révéler, elle avait étendu la place des vignobles pour permettre son exportation. Elle savait qu'il aurait du succès auprès des riches de l'empire car il possédait les qualités d'un manipulateur: un goût doux et un peu sucré, mais capable de très vite enivrer même les habitués. Sa teinte vermeille permettait en outre d'y placer un belle variété de poisons sans que l'on ne puisse les détecter. En guise d'avant-première elle en avait amener un fût avec elle. Cadeau pour la Marquise. Et quelques bouteilles pour ce soir.
Autre point important, elle n'avait qu'un faible corps militaire local. La nouveauté de l'annexion de cinq pays d'un seul coup rendait compliquée la militarisation de ces zones devenues frontalières. Vu la puissance politique des militaires, ce seraient les négociations les plus ardues. A ce niveau, elle pouvait faire remarquer que cela s'était passé presque sans effusions de sang grâce à elle, et que sur ses terres il n'y avait même pas de résistance à écraser. Au passage elle avait récupéré entre le quart et le tiers des terres de chacun des quatre autres pays, lui donnant un territoire plutôt vaste qui aurait sans doute été scindé en plusieurs duchés si elle n'avait pas demandé la contrepartie de pouvoir tout garder pour elle. Un point négatif lors des tractations, donc, puisqu'on pouvait argumenter qu'elle avait déjà gagné bien assez dans la manœuvre. Quoi qu'il en soit, elle aurait besoin de partenaires pour mettre en place le système militaire.
Certains seraient sans doute vite enclins à lui demander sa main pour alliance, mais son ambition lui commandait de refuser. A moins bien sûr qu'il ne s'agisse de la famille impériale. De manière annexe, le sous-sol restait à explorer. Ce n'était pas à l'ordre du jour, mais elle prévoyait d'y rechercher toute matière première utile d'ici quelques années. Il y avait aussi des forêts de bonne taille, nul doute que le bois intéresserait les marins.

C'était peu, mais elle espérait que la puissance économique qu'elle représentait pèserai lourd. Elle avait tout fait pour que ce soit le cas. Il faudrait s'en contenter.


Blanc-Castel n'était pas tout près et la route connu quelques embûches. Elle avait été inspirée de partir avec une escorte d'hommes solides et loyaux. Petit comité cependant. Dix gardes, Cinq esclaves et deux servantes. A l'instar du reste de son personnel de maison ils passèrent tous dans son lit, voyant leur esprit brisé et reconstruit pour obéir au moindre de ses désirs pervers sans se poser de questions. Et surtout pour les garder secrets.
Le cortège arrivait sur le tard d'une bonne demi-heure. Elle voulait arriver la dernière, mais là c'était peut-être un peu trop. Ce n'était pas très important, les gens ici connaissaient les vicissitudes liées aux voyages.

Accueillie comme il se devait, elle ne tarda pas à se mêler aux inviter et à commencer son travail d'investigation. La bâtisse était magnifique, les esclaves faisaient leur travail à la lettre, preuve du bon dressage qu'ils avaient reçu et les mets étaient exquis.
Sans tarder, le moment qu'elle attendait arriva. La maitresse de maison faisait le tour de ses convives, et le sien était arrivé.


« Madame la Marquise, c'est une joie d'enfin pouvoir faire votre connaissance. Je n'ai pas vraiment eu le temps de visiter, problème que je compte bien remédier dans les jours qui viennent, mais si Blanc-Castel possède ne serait-ce que la moitié de votre beauté, j'ai bien peur de ne plus vouloir quitter les lieux. »

Elle rit doucement à sa propre remarque. Moitié compliment, moitié humour, un grand classique quand on ne connait pas encore la personne et que l'on veut instaurer une atmosphère un peu plus légère.

« Pour ce qui est du voyage, il semble que le vin que je vous ai amené n'attire les marauds plus que de raison. Si les disperser n'est guère difficile, cela prend toujours du temps pour enlever du passage les arbres qu'ils s'entêtent à faire tomber sur la route. Mais je ne m'en plains pas. Vous savez ce que l'on dit: pas de bandits sans richesses. »


En voyant la tenue de la Marquise, Sixtine, ou plutôt Xn'Drea fut pris d'une grande lassitude. Il se demandait pourquoi il s'embêtait tant que ça à passer pour une fille modèle alors que d'autre comme Véra semblaient assumer pleinement leur perversité. A cette vision la question se posa de savoir si ce qu'il avait supposé comme deuxième partie de soirée n'allait pas tout simplement être incluse dans la première. Cela serait des plus fâcheux. Soit il faudrait passer pour une rabat-joie et s'offusquer devant les choses impures, soit il faudrait révéler son côté caché à bien trop de monde. Pourvu que ça ne se passe par ainsi!

Sixtine était la représentante d’une récente province impériale, le Crutshesterland. Une province particulière, composée initialement de cinq royaumes de taille modeste. Ensemble, ils avaient une puissance militaire faible face à l’Empire, et la désormais Duchesse impériale, visiblement pour éviter une guerre coûteuse qui aurait été perdue d’avance, avait choisi de s’annexer à l’Empire. Administrativement parlant, le Crutshesterland formait donc une province, étant un vaste duché, les cinq pays le formant étant des comtés formant, ensemble, ce duché. Sixtine régnait donc sur une province solide, qui avait pour fonction d’être l’un des greniers agricoles de l’Empire. Fondé sur des terres désertiques et arides, l’Empire avait toujours souffert d’un manque de ressources et de vivres, ce qui avait contraint les Ashnardiens à envahir très tôt les régions alentour, non seulement afin de consolider leur position en chassant les Orcs, les barbares et les monstres, mais aussi pour mettre la main sur des terres agricoles. Véra était typiquement dans ce cas-là, car son marquisat était très peuplé, et, si elle disposait de terres agricoles, elles étaient bien insuffisantes pour nourrir toute sa population.

Véra avait invité beaucoup de monde, mais il y avait, parmi ces invités, quelques-uns qui étaient plus précieux que les autres… Comme Sixtine. Arrivée récemment, la jeune femme était très bien habillée, portant des vêtements blancs mettant en valeur son magnifique minois. Elle devait sans aucun doute avoir un peu de mal à comprendre les mœurs sexuelles de l’Empire. Contrairement aux Nexusiens, les Ashnardiens n’étaient pas sous la férule de l’Ordre Immaculé. L’Empire comprenant beaucoup de démons ayant fui les Enfers, ce qui se ressentait dans les pratiques sexuelles. C’est ce qui expliquait l’indécence de la tenue de Véra. À Nexus, une marquise comme elle, célibataire, aurait été très mal vue, car il était du rôle d’une femme de se trouver un mari, d’assurer la pérennité de la lignée. Les règles étaient différentes avec Véra, qui était une femme libre, et avait à son actif beaucoup d’amants.

*Et cette charmante demoiselle est très belle… Même si je sens quelque chose de particulier en elle…[/color]*

Un sentiment diffus, une impression ténue qu’elle ne parvenait pas vraiment à s’expliquer. Après tout, Véra avait été en Enfer, elle avait côtoyé de très près les démons, et elle maîtrisait la magie. Elle continuait régulièrement à s’entraîner, à améliorer ses sorts, et pouvait donc reconnaître des démons quand elle en voyait… Mais la chose était différente chez Sixtine, car le démon en elle était habitué à dissimuler sa présence, ce qui faisait que Véra ne sentait rien, si ce n’est cette intuition diffuse.

Véra sourit brièvement quand Sixtine lui répondit, et sa main se posa alors tout naturellement sur la joue de Sixtine, caressant sa douce peau. De la Marquise, on disait beaucoup de choses, notamment sur son sens de l’hospitalité.

« J’aurai été navrée de ne pas avoir à mon banquet une femme aussi belle que vous, Dame Sixtine. »

Véra retira sa main de sa joue, et se déplaça un peu, rejoignant un buffet avec un assortiment de petits fours et de fruits de mer. La gastronomie humaine était quelque chose de très impressionnant, surtout quand on avait goûté aux plats culinaires infernaux. Les langoustines et les crevettes grillées dans des toasts étaient bien plus agréables que le ragout de gobelin. La Marquise avala donc un toast grillé, tout en observant la jeune femme.

« Mais oui, la route est dangereuse par ici. Nous multiplions les patrouilles, mais il y a tellement de monstres et de bandits… Sachez en tout cas que Blanc-Castel est un endroit sûr, et que je me porte garante de votre sécurité… Du moins, jusqu’au palier de ma chambre. »

La Marquise laissa planer quelques secondes, montrant à Sixtine qu’elle était bel et bien ce qu’elle prétendait être, une femme qui n’avait pas froid aux yeux, et reprit ensuite :

« Je n’ai encore pas eu l’occasion d’aller chez vous, Dame Sixtine… Le Crutshesterland est-il un endroit aussi agréable et aussi verdoyant qu’on aime à le dire ? »

S'il y avait bien une chose dont on ne pouvait pas douter à propos de Véra, c'est qu'elle était entreprenante. Pour peu que sa tenue ait laissé un doute à ce sujet. Aussi lorsque cette dernière vint toucher le visage de la jeune noble de ses mains grâcieuses, une rougeur digne de la vierge effarouchée dont elle voulait donner l'impression s'imprima sur ses joues. Son regard s'écarquilla pour indiquer sa surprise, et visiblement son manque d'habitude pour ce genre de mœurs. Mais un noble se devait de savoir rester droit dans ses bottes en toutes circonstances. Aussi répondit-elle d'une voix faussement calme.


"Et j'aurai été peinée de ne pouvoir y assister."


Lorsque la Marquise relâcha son "étreinte", Sixtine reprit son souffle, redonnant à son visage un aspect normal si ce n'était la rougeur ornant l'albâtre de ses pommettes. Avec un peu de chance, son rôle d'ingénue lui permettrait de par lui-même d'en apprendre sur la raison de cette soirée. Les gens ont la malheureuse tendance à se confier assez facilement à ceux qu'ils considèrent comme naïfs ou trop innocents pour leur causer du tort. Ceux-là oublient que plus la lumière est brillante, plus les ombres qui l'accompagne sont épaisses. Quoi qu'il en soit, elle accompagna son hôte jusqu'au buffet. Après un coup d'œil rapide, elle jeta également son dévolu sur un toast. Il serait impoli de laisser Véra manger seule. Cependant, elle montra des efforts le garder en bouche lorsque celle-ci parla de sa chambre. Décidément, elle n'y allait pas par quatre chemin. Et elle ne semblait pas avoir invité Sixtine juste par politesse non plus. Tant mieux, elle n'aurait pas apprécié faire ce long voyage juste pour quelques petits fours. Une fois ses moyens regagnés et le pain garni avalé, elle put reprendre une conversation un peu plus… normale? La notion de normalité serait surement à revoir, ceci dit.


"L'ancien Crutshesterland est vert, assurément. L'un de mes récents annexions est principalement composé de marais, et avec tout ce que j'ai à faire pour assurer une bonne intégration à l'Empire, je n'ai pas encore eu le temps de me pencher sur la question de ce que je pourrais en faire. Pour le reste, oui, je peux vous montrer des plaines à perte de vue dans toutes les directions et des forêts abritant la moitié d'un comté. Si mes gens disent effectivement que la vie y est agréable, je ne sais pas si cela serait… à votre goût. c'est un endroit tranquille où il ne se passe pas grand-chose. La criminalité y est faible puisque la majorité de la population est composée de familles paysannes qui vivent dans de petits villages où tout le monde se connait, et la plupart des esclaves sont des volontaires. Des pauvres souhaitant améliorer leur condition d'un toit et d'une gamelle, des simples d'esprits incapables de s'occuper d'eux-mêmes. Le reste d'entre eux ont été offerts par les anciens pays attenants pour diverses raisons. Même eux considèrent avoir la belle vie, l'esclavage y est un choix de carrière plus qu'autre chose."


Maintenant qu'elle avait répondu à la question, il y avait un point qui la taraudait depuis tout à l'heure, et sa curiosité était à bout. Il fallait qu'elle pose la question absolument.


"Ceci dit, nous sommes également très loin de la mer. Aussi je vous demanderais de bien vouloir pardonner mon manque de culture, mais j'ai peur de ne pas connaitre ces mets que j'ai entendu être appelés "fruits de mer"? Cela ressemble pourtant plus à des animaux."


Xn'Drea avait vu la mer dans un lointain passé, mais force est d'avouer que la gastronomie n'était pas vraiment son intérêt principal à cette époque, et la jeune femme dont il avait pris possession ne savait pas non plus ce que c'était. Comme quoi on peut avoir plus de 1000 ans et continuer de découvrir des choses simples.

Véra ne faisait effectivement pas dans la subtilité. Il suffisait de jeter un œil à son look très sensuel, très ouvert et très érotique, pour comprendre que la Marquise n’était pas une femme chaste. Et cette Sixtine l’intriguait, autant par sa beauté, son origine, que par ce qu’elle ressentait chez elle, par cette étrange pulsion qui remuait dans son corps. Il y avait quelque chose d’inhabituel chez cette femme, quelque chose qui la troublait, qui la perturbait, et elle essayait de comprendre de quoi il s’agissait. Une sorte d’impression profonde, qui remontait en elle. La Marquise laissa Sixtine lui parler du Crutshersterland, un pays provincial. Elle avait récemment fait l’acquisition de marais, et confessa finalement ne pas savoir grand-chose de la mer. Sa question sur les « fruits de mer » ne manqua pas d’amener sur les lèvres de Véra un léger sourire amusé.

« Et bien, ce ne sont pas des fruits à proprement parler... Disons plutôt qu’on désigne par ce vocable tous les mets comestibles venant de la mer. Crevettes, huîtres, moules... Après, je ne connais pas l’origine de ce terme, mais on peut dire que ça venait de ce que les pêcheurs ramassaient... Entre ce qui rapporte de l’argent et ce qui est à rejeter. Ce sont les fruitsde leur travail. »

La Marquise essayait de lui faire comprendre qu’il ne fallait pas interpréter ce mot au sens végétal, mais dans un sens plus imaginé, celui qu’on attribuait également au mot fruit. Passant à la démonstration, elle s’empara de la queue d’une crevette épluchée, et approcha le morceau rose des lèvres de la jeune femme.

« Tenez, ma chère... Tout est comestible là-dedans. »

Elle laissa Sixtine avaler la crevette. Un goût différent des pommes, mais qui était très agréable... Du moins, selon Véra. Pour elle qui avait connu l’Enfer, la gastronomie de Terra était une chose très appréciable. Elle n’hésitait volontiers pas à dire qu’elle était gourmande, et qu’elle aimait beaucoup les plats de ce genre. Heureusement qu’en parallèle, elle faisait beaucoup d’exercice... Mais, de fait, Véra aimait bien manger.

Marchant ensuite le long du banquet, elle présenta à Sixtine quelques autres mets, comme les sushis, de petits carrés comprenant du riz, des fruits de mer... Un véritable assortiment, de quoi ravir les pupilles gustatives de son invitée. Véra s’y connaissait plutôt bien, et lui expliqua que ses terres abritaient des rizières et de nombreuses fermes en plus des ports et des entrepôts de pêche.

« En revanche, j’ai assez peu de vaches laitières... Et donc pas de fromagers, ce qui est pour moi une souffrance, car j’adore le fromage. Je dois donc en exporter régulièrement. Est-ce que vous produisez du fromage chez vous, Dame Sixtine ? »

Véra avait beau être une puissante magicienne, et être relativement dangereuse, sa gourmandise était l’un des points faibles lui permettant de sympathiser avec les autres...