Des excuses... Pour Miya, ce Quetzalcoatl ne faisait que ça, se chercher des excuses pour justifier l'injustifiable. Le coeur de Miya battait de cette rage sourde, cette haine qu'elle avait toujours voué aux divinités. En plus d'avoir vécu dans un monde où ces dieux géants se fichaient pas mal des fidèles qu'ils écrasaient parfois, la chanteuse était immortelle à cause de la stupidité de l'un d'eux - un dieu mineur, certes, mais qui avait voulu jouer à "qui a la plus grosse" avec les plus grands. La stupidité d'Harumiya ne cessait de lui faire bouillir le sang. En tout cas, Miya était presque fière d'avoir fait sortir la colère chez cette femme, cette déesse qui se mélangeait aux mortelles. Elle n'avait pas peur des Dieux, et Quetzalcoatl aurait pu abattre toute sa divine puissance qu'elle s'en serait bien moqué, et qu'elle en aurait peut-être même ri, juste pour le plaisir de lui lancer : "Tu vois, tu ne vaux pas mieux que les autres."
Mais non, le serpent à plumes ne lui fit pas ce plaisir, préférant rendre les armes. Décevant, vraiment. Cette espèce de victoire a un goût bien amer, mais elle reste une victoire quand même : Miya ne va pas cracher dessus ! Elle finit son thé, en demande un autre. Sa voisine ne se laisse pas abattre malgré tout, et remet sur le tapis qu'elle n'est pas forcément humaine, elle aussi. La demi déesse leva les yeux au plafond, et entoura sa nouvelle tasse brulante de ses doigts fins, pour s'y réchauffer.
- Je suis différente, oui, sans doute. Différente de vous, et de ces gens qui nous entourent. Je viens d'un endroit, où des divinités géantes ont fait de la terre un champ de bataille. D'un monde où les humains devaient se terrer sous des globes de verre pour que ces monstres les voient, et évite de les piétiner dans leur combat. Mais croyez bien que non : ces idiots de mortels priaient pour apporter force à l'un ou l'autre des clans, mais les dieux s'en fichaient pas mal. Ce n'est pas parce que vous êtes là, à un comptoir, parmi des humains, que cela va faire de vous quelqu'un de bien. Croyez bien que je n'ai jamais vu la moindre divinité qui puisse se montrer autre chose qu'égocentrique. Regardez vous, malgré tout ce que vous pouvez dire : vous êtes ici, et non avec quelque vestige de vos fidèles - si vous êtes vraiment celui que vous prétendez être. Plutôt que d'apparaître à une tribu qui doit être encore assez folle pour vous vénérer, vous perdez votre temps ici, à un bar, pour vous mettre en avant le temps d'une chanson.
C'est qu'elle avait la ridicule rancune tenace... Miya se permettait de juger, de déverser sa haine sur cette femme qui ne devait chercher qu'un peu de calme, et elle se faisait un plaisir de lui pourrir ce moment.