La situation serait presque amusante si il ne s'était pas agit aujourd'hui, d'un entretien d'embauche et que je n'étais pas justement celle qui devait arborer le visage de la bienséance et de l'autorité. J'aurai été lui, je me serai présentée à un entretien trempée jusqu'aux os, la pluie officiant à merveille sur mon petit corps pour le rendre aussi désirable que jamais, j'aurai certainement marquée des points face à mon éventuel employeur. Mais là, c'est moi qui perd la face en me présentant de la sorte. Aussi, tentant de reprendre ma contenance légendaire, je me redresse lentement, de toute ma hauteur - au demeurant pas bien grande.
Et là, c'est une vision on ne peut plus délicieuse qui s'offre à moi. L'homme se présentant devant moi se voit couvert de la même flotte que moi et la représentation qu'il présente est on ne peut plus exquise. Les fines gouttelettes d'eau glissent le long de sa chevelure pour venir mourir au creux de sa nuque et la pluie n'a pas manqué de venir souiller sa chemise, collant celle-ci sur ses muscles saillants, qui se soulèvent sous une respiration désordonnée. Merde alors, qu'est-ce qu'il est beau !
Lorsqu'il me regarde dans les yeux, je fronce un instant les sourcils. Etrange, ce regard ne me semble pas inconnu et je penche légèrement la tête en tentant de me remémorer où j'aurai pu déjà le rencontrer. Jouant avec ma lèvre, je réfléchis un instant, mais rien ne me vient en mémoire. Je finis donc par hausser les épaules et pousse un soupir en entendant ses derniers mots.
- Effectivement oui... Elle ne m'a pas épargné. J'en viendrai presque à rougir, si c'était dans mes habitudes, de me montrer aussi débraillée face à vous. Mais je vous en prie, entrez et prenez place sur le fauteuil face au bureau.
Je m'écarte alors du passage, me délogeant de ma place d'un coup de hanches et je contourne le bureau pour atteindre rapidement le coin de la pièce où j'avais pris soin d'envoyer valdinguer ma mallette trempée. Je l'ouvre et fouille à l'intérieur un instant pour retrouver son CV qu'il m'avait adressé, accompagné de sa lettre de motivation. Je me retourne alors de nouveau vers lui, un léger sourire sur les lèvres et lui présente les documents brièvement avant de gagner ma place.
C'est en tirant sur ma chaise que je marque un temps d'arrêt en faisant la moue. Le cuir luxurieux ne supportera certainement pas que je reste assise sur lui, les fesses trempées comme si je venais de prendre un bain toute habillée. Je repousse donc la chaise sous le bureau et tout en relevant le regard vers l'homme assis en face de moi, je le rejoins et reprends ma place contre le bureau. Au point où nous en sommes de toute façon, je peux bien me permettre de donner à cet entretien, une allure bien moins conventionnelle. Nous perdons de toute façon toute crédibilité l'un et l'autre en se présentant de la sorte. Alors merde !
- Permettez-moi, le temps de me sécher, de commencer l'entretien ici même. Si vous ne vous en voyez pas incommodé bien sur. Je ne voudrai pas avoir à faire rendre l'âme à mon fauteuil. J'y tiens suffisamment pour ne pas avoir à le faire courir au supplice de mes fesses complètement trempées.
A mes mots, je lève les yeux au ciel. S'il n'y a pas phrases avec le plus de sous-entendus possible, je veux bien que l'on me jette la première pierre.
Je me contorsionne un instant sur le bureau et me saisis du téléphone, sur lequel j'appui brièvement avant d'enclencher le haut parleur.
- Mademoiselle ?
- Jane, apportez-nous une cafetière et deux tasses s'il vous plait.
- Des serviettes éponges peut-être également ?
Je note l'ironie dans sa phrase et je me mords légèrement la lèvre en posant mon regard sur mon vis à vis.
- Très amusant... Mais oui, tant que vous y êtes.
- Bien Mademoiselle Burton. Je vous apporte ça tout de suite.
Et je raccroche en posant mon regard sur mon siège. Effectivement, les serviettes ne seront pas du luxe. Je pourrai ainsi, en les déposant soigneusement pliées sur l'assise, pouvoir reprendre la place qui m'est due.
En attendant, je place alors mon poing devant ma bouche et m'éclaircis la gorge en reprenant contenance, avant de plonger mon regard dans les documents que je tiens entre les mains, croisant mes pieds l'un sur l'autre pour me donner un meilleur appui sur le bureau.
Je parcoure des yeux les premières lignes et hausse un sourcil. L'OVNI ? Tiens, un passionné de paranormal ? J'esquisse un sourire. Si il savait devant qui il se trouve...
Je continu donc ma petite lecture et repose les papiers sur la table avant de croiser les bras sur ma poitrine, un frisson me parcourant au contact froid de mes bras sur ma peau.
- Pourquoi vouloir quitter votre emploi actuel ? Je n'ai entendu que brièvement les élucubrations contenues dans votre journal et je dois avouer que c'est certainement pas choses qui alimentent mon quotidien, mais là, vous postulez pour un poste tout autre, vous en avez conscience Monsieur - nouveau coup d'oeil sur la feuille - Macross ?
Mon ton n'est en rien condescendant, je m'enquière juste de connaître ses motivations. Je plongerai plus assidument dans le sujet, lorsqu'il aura répondu. Et c'est lorsqu'il s'apprête à le faire que l'on frappe à la porte et que Jane entre, les bras chargés de ce que je lui ai demandé. Elle dépose rapidement la cafetière sur le bureau, avec les tasses et me tends les serviettes avant de jeter un rapide coup d'oeil au jeune homme assis face à moi. Le sourire qu'elle m'adresse alors ne peut pas être plus clair et le clin d'oeil qui s'en suit encore moins. Je lui rend un sourire plein de malice, que je m'empresse d'effacer de mon visage avant que mon vis à vis ne le remarque et elle quitte la pièce non sans rajouter en sortant :
- Bon entretien, monsieur Macross...
Ajoutez à cela le ton mielleux qu'elle emploie et vous comprendrez aisément qu'elle n'est pas insensible au charme du garçon. Je me retiens de rire et recentre mon attention sur les serviettes que je tiens entre les mains, en tendant une au concerné avant de me relever et de me diriger vers mon bureau, tirant sur cette foutue robe qui tente à trop vite remonter et je pose les serviettes sur l'assise de mon siège, avant de m'asseoir convenablement. Par Merlin, cet entretien est d'un ridicule ! Je rêve.
Dernière disposition, je nous sers un café et prends le mien entre mes mains, avant de m'adosser plus confortablement à mon fauteuil, soufflant légèrement sur le liquide brûlant, mon regard planté dans celui du garçon, avant de le gratifier d'un léger sourire.
- Bien. Entamons les hostilités à présent....