Le groupe avançait le long de l’
antique pont menant à la capitale d’Esheka, observant silencieusement les ruines antiques de ce qui, jadis, avait été l’un des grands royaumes elfiques. Aujourd’hui, il n’en restait plus que des ruines poussiéreuses, mal entretenues, faites de lézardes et de fissures.
«
Depuis la mort du Roi, Esheka est déchirée par des conflits intestinaux et des guerres civiles. Honnêtement, Maîtresse, ce n’est pas le meilleur allié dont on puisse rêver... -
C’est une question de perspective, ma chérie. Esheka dispose de technologies relativement évoluées, surtout pour des elfes. »
Menant la marche, Samara discutait avec son esclave et garde du corps, la redoutable
Kazuha. La jeune adolescente portait, comme à son habitude, une tenue très légère, comprenant uniquement un soutien-gorge renforcé et une culotte. Elle suivait sa Maîtresse, Samara, une puissante Archimage ashnardienne, mais aussi une haute-fonctionnaire impériale, et une diplomate. Samara était proche du plus influent membre du Conseil Impérial d’Ashnard, Emhyr Var Emreis, et Emhyr avait négocié, en sous-main, un rapprochement avec Esheka.
Esheka était un royaume elfique qui avait jadis connu son heure de gloire, mais qui, à l’image de la civilisation elfique, avait sombré dans la décadence. Sa chute avait commencé le jour où Nexus était tombé sous le règne des hommes, mais s’expliquait aussi par bien d’autres choses, comme les lointaines guerres avec les nains. Depuis plusieurs années, Esheka souffrait d’une importante guerre civile, résultant de la mort du dernier Roi d’Esheka. Une mort mystérieuse, qui avait plongé le royaume dans un conflit pour la succession, chaque grande famille voulant mettre la main sur le trône. Le royaume, déjà affaibli, était maintenant sur le point d’être rayé des cartes d’Histoire, et ne devait plus sa stabilité relative qu’à la présence d’un clergé qui, bénéficiant des guerres civiles, avait raffermi sensiblement son emprise sur la population.
Néanmoins, Esheka présentait, aux yeux des Ashnardiens, d’importants intérêts. L’Empire soutenait depuis des années des mouvements de rébellion qui éclataient à Nexus et dans ses royaumes alliés. Dans ces royaumes, les espèces non-humaines étaient envieuses des humains, et on pouvait les comprendre, car le racisme non-humain était une redoutable réalité. Ce racisme, ainsi que l’affaissement des anciennes civilisations, ainsi que l’esclavage des Terranides, étaient les terreaux ayant permis le développement de mouvements terroristes militant pour l’égalité des droits, l’abolition de l’esclavage, et la restauration de la grandeur passée des elfes et des nains. De tous ces mouvements disparates et peu structurés, le plus important était celui de la «
Scoia’tael », un mouvement d’origine essentiellement elfique. C’était la Scoia’tael qu’Ashnard soutenait, leur fournissant des armes, des équipements, des instructeurs, des gemmes magiques, des plans, sollicitant en retour que la Scoia’tael multiplie des attentats terroristes, des rapts, des attaques de greniers et de villages, afin de désorganiser de l’intérieur Nexus, ou encore pour leur fournir des éléments d’information.
Cependant, si, en théorie, le projet était simple, en pratique, les choses étaient difficiles, car, entre l’Empire et Nexus, il y avait tout un continent. Les Ashnardiens avaient donc besoin d’une sorte de base-relais, d’un territoire neutre qui permettrait de mieux structurer les différentes branches de la Scoia’tael, et coordonner les interactions entre l’Empire et les terroristes. C’est ce qui avait amené Emhyr à se pencher sur le cas d’Esheka, ce royaume perdu et mortifère, et, à ce titre, il avait dépêché Samara, l’un de ses plus utiles éléments, afin de rencontrer le clergé local, de parvenir à pacifier Esheka, et de faire du royaume une colonie impériale destinée à organiser une guérilla à Nexus.
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Une tâche importante, probablement impossible, vu l’arrogance légendaire des elfes...*
Le principal problème venait surtout du fait qu’Esheka était un royaume isolé. Samara n’avait que peu d’informations, et espérait en apprendre davantage de la part de la femme qu’elle était censée voir : une prêtresse du principal culte d’Esheka, le culte d’Arek... Du moins, de ce qu’elle en savait.
«
Cette région est dangereuse, les forêts pullulent de bactéries, de charançons, et de virus... -
Oui, c’est pour ça que ces ponts passent au-dessus des arbres, afin de protéger les voyageurs. »
Samara sentait de sombres magies émaner de la forêt. Très clairement, cet endroit était moribond. Pour reconstruire Esheka, il allait falloir plus que leur troupe. L’Archimage guidait en effet une compagnie de soldats, emmenant avec eux plusieurs chariots abritant des vivres : nourritures, médicaments, biens de première nécessité... De simples cadeaux pour ces gens isolés.
Et, pendant ce temps, le groupe approchait de la capitale...