La tendre nage poursuivait son cours, entrecoupées de caresses, de baisers passionnés, éclairée par la douce lumière du crépuscule … les deux jeunes femmes, nues dans leur univers, semblaient entourées d’une douce et chaude aura, tandis que la lumière du soleil baignait leurs corps, d’un orange doré éclatant, doux … Puis le soleil s’en alla mourir petit à petit à l’horizon, doucement, faiblement, jusqu’à ce que le ciel rosé ne soit plus qu’une sombre étendue dans laquelle brillaient quelque étoiles, et que l’obscurité de la nuit ne recouvre le monde. La lune d’argent et de lumière était venue, et renvoyait sur le monde sa lumière d’argent, sur ces deux jeunes amantes, ces deux jeunes complices, dont le monde fusionnait, ne faisait qu’un, dans cette magnifique nuit naissante. Même si cette nuit était empreinte de tristesse, de peine, et d’amour.
Férhys pleurait, collé à Naysha, qu’elle ne voulait quitter, dont elle ne désirait pas le départ, la gorge bloquée, dans l’incapacité de pouvoir prononcer ces mots d’amour qui lui transperçaient la gorge comme des lames glacées. Naysha, elle, ne versait la moindre larme, mais caressait la divinité avec une grande douceur, puis lécha avec tendresse les larmes qui partaient de ses yeux sombres pour s’en aller disparaître dans l’obscurité, et se mêler à l’eau de la piscine. Les deux jeunes femmes étaient corps à corps, poitrine contre poitrine, ventre contre ventre, et chacune percevait la respiration de l’autre. L’une, la respiration calme, l’autre, la respiration entrecoupée de ses sanglots … La langue de Naysha, chaude, douce, parcouru un chemin qui réchauffa quelque peu le cœur de la déité ; elle la sentit sur ses lèvres, sur ses joues, essuyant ses larmes … Férhys se sentait moins seule … Mais pour combien de temps encore ? Les caresses de Naysha, tant reçues de ses mains que reçues de sa tendre langue tempéraient le flot lacrymal de Férhys, et celle-ci ouvrit légèrement les yeux lorsque Naysha lui proposa de passer le nuit avec elle, d’une voix tendre, puis l’embrassa. Un court baiser comme un court rêve, qui stoppa les pleurs de la divinité des ténèbres. Lorsque leurs lèvres se décollèrent, Férhys eût un faible sourire, témoins néanmoins de son infinie gratitude.
Elle n’eût pas à répondre, son sourire en avait assez dit, et le fait qu’elle se blottit momentanément contre Naysha, lui laissant lui prendre doucement la main, et l’entraînant vers la case « habillage » de plateau de jeu. La case habillage ne passait pas par la case « départ », et par conséquent, l’on ne recevait pas 200 €. Cependant, c’était une case assez particulière chez Férhys, et tandis qu’elle regardait Naysha disparaître pour s’en aller se vêtir, elle sortit lentement de son rêve, de cette douce promenade auprès de Naysha, de la piscine aux vestiaires, nues, entourée de la douce fraîcheur nocturne … Et elle se demanda avec tout la puissance de sa divine aura dans un mouvement bref de panique la chose suivante : comment allait-elle s’habiller ? Certes, il y avait toujours son équipement habituel constitué principalement de bandelettes, mais oserait-elle se montrer ainsi accoutrée devant Naysha ? Férhys ne connaissait usuellement pas le mot honte, mais devant Naysha, elle n’avait pas les mêmes réactions qu’elle aurait eues que si elle était en face d’une humaine normale. Il faut comprendre par la que Naysha est une humaine normale, mais pour Férhys, Naysha est quelque peu le centre de son univers.
Elle entendait sa compagne se vêtir, et de fait, n’avait plus trop le choix. Elle claqua ses doigts, et, silencieusement, ses bandelettes se glissèrent à la manière des serpents, à travers les ténèbres, pour rejoindre leurs maîtresses. Ces bandelettes faisaient partie intégrante de l’âme de Férhys, et celle-ci ne s’en séparait que très rarement ; celles-ci s’en vinrent serrer sa poitrine, s’humectant quelque peu de l’eau de la piscine, son intimité, ce long « serpent » noir s’enroulant autour de sa jambe gauche, de ses bras, formant une osmose parfaite, un habit relevant plus de la lingerie extra-fine et de la censure qu’autres choses. L’inconvénient de ces bandelettes est qu’elles ne touchaient pas le sol, quoi que l’on fasse, elles restaient en suspens, bougeant quelque fois. Puis Férhys entendit Naysha revenir auprès d’elle. Elle était elle-même très jolie, dans son uniforme mouillé, laissant apparaître ses formes … Mais ce n’était pas comme Férhys, qui était nue sauf fines protections, affichant clairement le fait qu’elle ne connaissait pas trop l’utilité des sous-vêtements. Devant le regard de Naysha, Férhys eût un sourire gêné.
Leurs deux mains se joignirent de nouveau, leurs doigts s’entrecroisant, et ensemble, les deux jeunes amies, voire amantes, sortirent de l’établissement. Leur ébats semblaient lointains, mais pourtant très proche … Mais Férhys sentait la légère anxiété de Naysha : après tout, la jeune humaine ne savait pas qui Férhys était vraiment … Comment réagirait-elle en apprenant la véritable nature de Férhys, qui, aux yeux de l’humanité, des cieux, et de sa propre moitié, n’est qu’un monstre ? Une atrocité, créée dans le seul but de détruire, haïe de tous, ressentant son existence dans la solitude et la destruction … Une solitude qui pesait à présent sur un cœur de jeune femme qui avait à peine commencé à batte. Férhys leva la tête vers le ciel, et parla d’une voix empreinte de mélancolie, triste …
« Je n’ai pas d’endroits ou rentrer, ni de personnes qui m’attendent, nulle part, ni dans les cieux, ni ailleurs … Je ne connais pas trop cette ville … »
Aucuns foyers, personne pour l’attendre. En milieu inconnu. Au fond, en ces lieux, Férhys était perdue, tout comme sur Terra, qu’elle ne connaissait pas. Elle pouvait passer d’un monde à l’autre, mais elle n’était chez elle ni sur Terre, ni sur Terra. Elle conclut dans un long soupir, en souriant tendrement à sa jeune amante :
« J’irais ou tu m’emmèneras. Quel que soit l’endroit, tant que nous serons ensemble … »