Malgré ce qu'il pouvait facilement laisser penser, Jace n'était ni bête ni désintéressé de tout. Dire que la légèreté d'esprit qu'il affichait 90% du temps était un leurre aurait été un mensonge éhonté purement hypocrite, mais il ne fallait pas non plus croire que Jace était le petit con surexcité qui correspondait totalement à ce profil facile. Quand il s'en donnait la peine, Fortuna se montrait réfléchi. Ainsi, quand l'inconnue commença à lui dire qu'elle savait plusieurs choses sur elle, le blond prit le parti de se méfier. Il veilla à ne rien en montrer pour ne pas alerter la femme qui s'adressait à lui et se contenta d'afficher le sourire séducteur qu'il arborait la plupart du temps. Dire à l'enfant d'une famille aussi puissante que fortunée n'était en soi pas une très bonne idée. Combien d'adversaires économiques cherchaient les failles dans la famille Fortuna pour les exploiter à leur avantage, après tout ? Si Jace savait quelque chose du monde des affaires, c'était que beaucoup de requins étaient prêts à tout pour s'imposer sur un quelconque marché. L'inconnue voulait-elle l'intimider ? L'approcher pour nuire à ses parents ? Feignant de ne pas réfléchir à tout ça, Jace répondit de la façon la plus naturelle possible.
- En même temps vous n'avez pas dû trop trop vous fouler à chercher non plus, j'ai une page Facebook, Sherlock ! Ou vous êtes plutôt Watson ?
Il pencha la tête sur le côté, amusé. Sans manquer de répondre au clin d'oeil qu'elle lui adressa, Jace écouta la suite et se perdit une vague seconde sur le renflement que formait la poitrine de la blonde sous son chemisier blanc.
- Bien sûr, que je connais Bond ! Il faudrait sortir d'une grotte pour ne pas le connaître... Mais quel rapport avec moi ?
La suite lui fit tirer la moue. Pas par incrédulité (on pouvait difficilement être incrédule quand on était capable de refroidir son bain juste en pétant) mais par déception. Le ton qu'elle avait employé était semblable à celui qu'on aurait utiliser pour un gosse un peu crétin, avec une image littéraire qui l'était tout autant. Jace ne répondit pas tout de suite, regardant la main de l'inconnue filer dans sa poche. D'une vulgaire feuille, elle fit une souris, une vraie ! Sous la surprise -non feinte, pour le coup- Jace fit un bond en arrière et manqua de tomber du bureau sur lequel il était assis. Pour un tour de magie, c'était un sacré tour de magie ! Ses yeux bleus s'écarquillèrent en grand quand il revint capter le regard de son interlocutrice. Au moins, elle savait utiliser ses effets !
- C-comment... Comment vous avez fait ça ? C'est vachement réussi comme tour de passe-passe !
Comment le prendre pour autre chose que de l'illusion, du close-up de magicien ? Même pour l'ESPer qu'était Fortuna, c'était dur de penser qu'il s'agissait là de véritable magie, comme par exemple celle des sorcières et des mages qu'on croisait dans les contes pour enfants. Le blondinet devait tout de même bien admettre que c'était bien fichu. Il prit quelques secondes pour reprendre contenance, et s'adressa à Amata après avoir retrouvé un peu de son habituelle superbe.
- Et alors, c'est quoi la suite ? Vous allez me dire que vous êtes la fille de Merlin l'Enchanteur et que vous appartenez à une organisation secrète qui emploie des gens comme vous ? Il rit, un peu hautain. Pour un peu, ça serait le scénario pour un tome d'Harry Potter ! Non, sérieusement ! Vous venez me trouver à la sortie des cours pour me lâcher un délire comme ça ? Vous avez la foi, vous !
Jace quitta le bureau sur lequel il se trouvait et fit quelques pas pour aller chercher son sac à dos, qu'il jeta sur son épaule d'un geste nonchalant avant de prendre la direction de la porte de la salle de musique, non sans se retourner pour adresser quelques mots supplémentaires à cette décidément curieuse fille en uniforme.
- Si vous voulez que je finance votre délire pour un livre ou je ne sais quoi, tentez de venir avec un décolleté plus plongeant et une jupe plus courte, la prochaine fois ! Mais je vous mets dix pour la mise en scène, c'était très réussi.
Il lui fit un clin d'oeil avant de tourner les talons, bien décidé à la planter sur place sans plus se soucier d'elle.