Il faisait tellement froid, ce matin... étrange. Nous étions pourtant en plein milieu de l'été. Rexia, la jeune dragonne rouge, avait du mal à reprendre ses esprits. Elle vivait depuis plus de cent ans, et pourtant c'était la première fois de sa vie qu'elle avait le réveil aussi lourd. Et puis, elle se sentait bizarre, tout patraque... elle avait l'impression qu'un serpent géant était en-train de s'enrouler autour d'elle et de lui couper la respiration. Pourtant, même dans son monde, il n'existait aucun reptile assez grand pour s'en prendre à un dragon... enfin, tout-du-moins, pas à sa connaissance. Après la sensation de froid et d'étouffement, ce qui frappa la créature, ce fut l'odeur... ça ne sentait pas comme d'habitude, ici, ça ne sentait pas l'or et les diamants qu'elle utilisait pour faire son nid, ça ne sentait pas la forêt qui se trouvait face à son antre ni la roche chauffée par le soleil... les odeurs des fleurs, des bêtes, de la nature, tout-ça avait disparu, remplacée par une odeur qu'elle trouvait vraiment horrible, entêtente, une odeur qui lui donnait à la fois envie de dormir et envie de se boucher les naseaux... elle l'ignorait encore, mais c'était les odeurs habituelles que l'on sentait dans un laboratoire. Et le vent ? Où était le vent ? Elle était toujours caressé par le vent, le matin, lorsqu'elle se révaillait, car il circulait facilement au milieu des galeries de sa caverne. Elle essaya de se mouvoir... mais elle n'y arriva pas. Ses ailes restaient obstinément clouées sur son dos, sa queue n'arrivait plus à gigoter, elle n'arrivait même plus à ouvrir la gueule... elle n'arrivait qu'à pousser de petits cris qui sortaient de sa gorge. Elle ne savait pas ce qu'il se passait, ni où elle était, mais une chose était maintenant clair, pour elle : elle n'était pas dans sa caverne. Au bout d'un moment, elle trouva enfin la force d'ouvrir les yeux...
Tout était noir, autour d'elle... elle était éclairé par une froide lumière grise venant du plafond, dont elle n'arrivait pas à voir la source, mais tout le reste de la pièce était plongé dans l'obscurité, elle ne pouvait voir ni ce qui l'entourait, ne où elle se trouvait. Et elle comprit bien-vite pourquoi elle ne pouvait plus bouger : elle était enfermée dans... et bien, en réalité, elle n'avait jamais vu de cage de sa vie, mais elle en avait déjà entendu parler. C'était surement ce qui s'en rapprochait le plus, pour elle, sauf que ce n'était pas vraiment une cage. Elle était couchée sur le ventre, droite, sur une sorte d'épaisse plaque en métal, et, directement reliés à cette plaque, elle était entourée par des barres d'acier qui la plaquaient sur ce sol de métal avec force. Deux plus larges que les autres lui entouraient le corps, lui plaquant les ailes contre les flans et les pattes à-terre. Trois autres lui maintenaient la queue en place, ainsi que trois qui lui entouraient le cou. Et une dernière, qu'elle considéra comme une sorte de coque-muselière, lui enfermait le museau, de manière qu'elle ne pouvait plus l'ouvrir, parler, ni même sortir la langue... elle ne pouvait même plus souffler de flammes par les naseaux sans risquer de se blesser. Un même genre de coque lui entourait également chaque griffe et le bout de la queue. Ainsi arnachée, elle n'était même plus capable de bouger une écaille, elle ne pouvait que bouger les yeux et essayer de déterminer où elle se trouvait...
Sa respiration se faisait forte tendis que la peur commençait à lui enserrer le ventre... mais enfin, comment était-elle arrivée ici ? Elle essaya de réfléchir, de se remémorer ses derniers souvenirs... elle se souvenait qu'elle était en train de chasser dans les landes dévastées des contrées du chaos, son royaume natal. Ces terres chaudes et son vol sous le soleil de plomb lui avait donné soif... elle s'était posée près d'un lac et elle avait bu... et après, que c'était-il passé ? C'était flou... une piqûre ! Oui, elle se souvenait avoir ressentit une piqûre au niveau de sa cuisse gauche. Ce ne pouvait pas être un insecte, ses écailles étaient trop épaisses, généralement ils s'attaquaient surtout à ses naseaux et à ses oreilles. Mais alors, c'était quoi ? Elle se souvenait s'être tourné, avoir vu des ombres de créatures humanoïdes... et puis plus rien. Sans le savoir, elle s'était faite tirée dessus par un fusil aux fléchettes à l'aiguille solide, pouvant traverser les écailles, et elle s'était faite injecter une dose suffisante de tranquillisant pour endormir un jeune dragon de sa taille. Elle réussit cependant à deviner qu'elle venait de se faire capturer... mais par qui ? Et par quoi ? Et surtout : qu'allaient-ils faire d'elle ?
Alors qu'elle se sentait déroutée à l'idée d'avoir perdue sa liberté, il y eut comme un bruit de cliquetit, puis les néons au-dessus d'elle se mirent à clignoter, et enfin, la pièce s'alluma. Mais la lumière fut si puissante, d'un-coup, qu'elle lui fit mal et qu'elle dut fermer les yeux... il lui fallut un moment pour réussir à les réouvrir, et pour pouvoir regarder ce qu'il y avait autour d'elle...