Le Grand Jeu - Forum RPG Hentai

Bonjour et bienvenue.

Ce forum présente des œuvres littéraires au caractère explicite et/ou sensible.
Pour ces raisons, il s'adresse à un public averti et est déconseillé aux moins de 18 ans.

En consultant ce site, vous certifiez ne pas être choqué par la nature de son contenu et vous assumez l'entière responsabilité de votre navigation.

Vous acceptez également le traitement automatisé de données et mentions légales de notre hébergeur.

Voir les derniers messages - Dextra-Senestra

Nos partenaires :

Planete Sonic Reose Hybride Yuri-Academia L'Empire d'Argos Astrya Hybride Industry Iles Mystérieuses THIRDS Petites indécences entre amis
Inscrivez-vous

Voir les derniers messages

Cette section vous permet de consulter les contributions (messages, sujets et fichiers joints) d'un utilisateur. Vous ne pourrez voir que les contributions des zones auxquelles vous avez accès.


Messages - Dextra-Senestra

Pages: [1] 2 3 ... 12
1
" On… On est enfermés ?...
 - OUAaah euh heeeey ... Euh, eh ... Eh bien ... "

Il ne s'y était pas attendu. Qu'elle se soit glissée dans son dos tandis qu'il tentait de comprendre si la porte était effectivement fermée, qu'elle se soit ainsi approchée sans qu'il ne puisse prendre les pincettes nécessaires pour lui annoncer la situation fort déplaisante dans laquelle ils se trouvaient désormais. Si la surprise l'avait amené à sursauter, à se retourner en premier lieu en battant des bras, cherchant tant bien que mal une justification à lui offrir, un mot rassurant, une note positive, Senestra avait vite dû faire le choix de se rendre à l'évidence : Si la douce demoiselle à ses côtés l'avait vue forcer de tout son poids sur la poignée de la porte afin de l'ouvrir, il était évident que mentir sur la gravité de la situation ne pourrait qu'être mal prit. Alors, d'un ton qui laissait entendre un léger sentiment de culpabilité, autant pour la situation qu'ils vivaient mais aussi son échec personnel afin de la préserver d'une source d'inquiétude supplémentaire, il se trouvât à avouer l'ensemble de ses constatations.

" Ou... Oui nous sommes enfermés. Sûrement un professeur ou le gardien de l'établissement vu... Vu qu'il n'a pas vérifié l'intérieur de la bibliothèque avant de verrouiller la porte. "

Qu'est-ce qu'il se sentait mal à l'aise. Non pas parce qu'elle se trouvait avec lui, mais bien parce que ces petites réunions à la bibliothèque, c'était un peu lui qui en avait parlé en premier lieu, du moins du plus loin que ses souvenirs le lui permettait, tant et si bien ... Qu'il était responsable de cette situation. Et puis... Que pouvait-il bien se passer si elle se mettait à imaginer qu'il l'avait fait exprès ? Et si elle se mettait à douter de lui, à croire qu'il avait demandé à un de ses amis de les enfermer, tout les deux, à l'intérieur de la bibliothèque scolaire une fois que tout le monde aurait quitté les lieux ? Cette simple idée commença à tourner et retourner dans son esprit, le pauvre damoiseau fuyant alors l'éventuel et hypothétique regard désapprobateur de la superbe compagne de ses après-midi studieuse. Mais il n'eut pas de réponses quant à ses inquiétudes. Tout au plus l'entendit-il s'exprimer d'une voix hâtive, relativement positive, comme si elle venait de soudainement penser à une solution potentielle.

" Je reviens ! "

Et la voilà qui part à toutes jambes en direction de leur précédente table. C'est à peine si le damoiseau avait eut le temps de se demander si elle lui faisait payer son manque d'assurance ou si elle avait effectivement eut simplement une idée pour les aider. De toutes manières, si il l'avait blessée par sa tentative de changer la vérité ou de manquer d'honnêteté, il était trop tard... Il fallait qu'il se reprenne, juste... Qu'il soit de nouveau quelqu'un sur qui elle puisse compter, tout simplement ! Alors, après s'être secoué l'esprit, le voilà qui fait deux grands pas pour s'élancer, puis court afin de la rattraper. Quelques courts instants le sépare d'elle, tant et si bien qu'en passant les étagères centrales, il se trouve rapidement devant l'image d'Alice qui, de manière aussi maladroite que déçue, semble faire passer son téléphone de droite à gauche au-dessus de sa tête, tentant tant bien que mal de capter la moindre petite forme de réseau. Une entreprise semblant se solder par un triste échec, la pauvre se tournant peu après vers lui en ramenant le téléphone contre elle, ce après avoir marmonné quelque chose sur le manque de réseau, un constat malheureux vis-à-vis de la situation. Allez, c'était le moment pour lui de redorer un peu son blason, de la rassurer, de... D'être le jeune homme qui allait lui donner un peu d'espoir !

" Je suis désolée, je pensais que ça serait une bonne idée... "

Il s'approcha donc d'elle pour la rejoindre, ne pas rester à distance, pris son courage à deux mains... Et passa sa main le long de sa joue. Enfin, sa main ... Plutôt le dos de ses doigts, ces derniers faisant délicatement le passage du bord de son visage avant qu'il ne se permette un propos, une douceur, un moyen de la rassurer en lui donnant la preuve qu'elle n'était pas seule dans cette galère et qu'elle pouvait compter sur lui pour trouver une solution à cette dramatique situation.

" Ne t'en fais pas Alice. Ne t'excuse pas non plus, c'était effectivement une bonne idée... Même si malheureusement j'imagine que l'équipe pédagogique s'est assurée que nous ne puissions pas utiliser nos portables ici. Je vais chercher des solutions, d'accord ? Il doit bien y en avoir ! "

Se rendant compte peu après que sa main s'attardait un peu trop sur le visage de sa superbe compagne d'infortune, il l'éloigna sans hâte, ne souhaitant pas qu'elle puisse le prendre comme un soudain rejet, ou un acte forcé. Si lui-même pouvait parfois bien se prendre la tête, une femme aussi douce qu'Alice pouvait très bien se monter les même films que lui dans son esprit, quelque-chose qui pourrait être particulièrement dramatique dans cette situation ! En revanche, afin de s'assurer que les choses puissent aller mieux, il dû entamer une vérification des environs, faisant un petit tour de vue de la bibliothèque pour commencer à lister les possibilités qui s'offraient à eux. En soi, il pouvait très bien faire le tour de la pièce, peut-être qu'il existait d'autres portes que le passage évident par lequel entrait les élèves ? Il y avait aussi les fenêtres, en soi ils se trouvaient tout les deux au RDC, donc même s'ils avaient besoin de faire un petit bond, il était possible que cette échappatoire se fasse sans difficultés. Toutefois, il savait pour avoir déjà essayé une ou deux fois que les-dites fenêtres étaient généralement bloquée par un mécanisme, moyen d'éviter que les élèves en permanences à la bibliothèque ne s'échappe sans mot dire. La question était donc de savoir s'il pouvait démonter le mécanisme afin d'ouvrir celui-ci pour leur offrir une sortie.

" Ce que je te propose Alice, je vais tenter d'ouvrir une des fenêtres, avec un peu de chance cela nous permettra de sortir sans difficultés. Pendant ce temps là, est-ce que tu pourrais faire un tour de la bibliothèque ? J'ai jamais vraiment fais gaffe, mais il y a peut-être une porte qui nous permettrais d'atteindre une pièce qui n'est pas verrouillée ? "

L'ultime possibilité, il comptait tenter pendant qu'elle ne serait pas là. Si elle acceptait de s'éloigner, il voulait essayer d'atteindre les fenêtres plus hautes, notamment en poussant et grimpant sur l'une des hautes étagères de la bibliothèque. Ces fenêtres tenaient d'ailleurs plus de l'ouverture longiligne que de la vraie porte de sortie, mais s'il parvenait déjà à les atteindre, il pourrait proposer à Alice de grimper afin qu'elle puisse sortir tandis qu'il maintiendrait le meuble en place, puis espérer qu'elle trouve quelqu'un à l'intérieur de l'établissement pour prévenir qu'ils avaient été enfermés. Mais c'était assez risqué, il ne voulait pas qu'elle soit la pemière à escalader quelque chose de potentiellement instable... Ni qu'elle s'imagine qu'il se mettait en danger pour son bien à elle. Aussi, il avait besoin qu'elle s'accorde à son plan, au moins au début, le temps qu'il vérifie si son plan tenait la route. Se rapprochant encore un peu plus, prenant l'une des mains de la belle demoiselle aux yeux d'eau profonde, il la tint délicatement tandis qu'il reprit son ton assuré, fier de lui, de manière à lui convoyer un peu de l'audace et de l'assurance qu'il possédait alors en son coeur. C'était honnêtement assez curieux comme sensation, mais maintenant qu'ils étaient en train de vivre un événement compliqué, il se sentait presque pousser des ailes. Comme quoi, il était un bien meilleur sauveur qu'autre-chose. Une pensée un peu ridicule sur sa propre manière de vivre qu'il ne manqua pas de balayer de son esprit avant qu'elle n'empoisonne tout ses bons sentiments !

" De toutes façons, je ferai tout pour toi. Alors n'ai crainte, je saurai trouver les solutions nécessaires, Alice. "

C'était ... peut-être un peu fort, cette façon de parler de sa dévotion. Au moins, le message ne pouvait pas être mal prit... si ?

2
Le Musée / Revanche en eaux profondes { Pv ~ Tayler Johnson }
« le: samedi 04 mars 2023, 17:38:07 »
Un requin dans un banc de poisson.

Voilà bien une posture qui paraît tout à fait naturelle à Dextra. Depuis qu'elle était entrée dans ses premières années d'adolescence, cette posture personnelle avait toujours été de prendre le dessus sur les autres, d'être celle qui décide pour les plus faibles. Cela pouvait d'ailleurs aussi entendre le pire, à savoir qu'elle était la personne capable de faire le choix d'exclure quelqu'un à la moindre forme d'imperfection. Elle était la créature à longue-dent qui choisit qui elle côtoie, qui elle tolère, ainsi que de qui elle dîne. Ses cheveux verts, même les professeurs ne se permettaient pas de lui en faire la remarque, certains avaient connus de bien étranges et malheureux incidents peu après. Quant au fait qu'elle était absente à plus de la moitié de ses cours, si qui que ce soit de l'administration en faisait la mention, c'était souvent à demi-ton ... Ou il s'agissaient de petits nouveaux, remplaçant tout juste le dernier malheureux qui avait osé faire un commentaire à ce propos. En soi voilà ce qui la définissait :

La crainte.

Comme le requin, ce n'était pas tant de se faire croquer qui créait la peur, ou même d'en rencontrer un ! Non, la simple idée qu'il puisse y en avoir un, quelque-part, plus ou moins proche, suffisait en soi pour que tous se racontent et fabulent les pires histoires quant à cette créature. Pour Dextra, sa réputation la précédait depuis longtemps, et les mythes étaient légions. Certains la disait sorcière des temps modernes, d'autres voyait en elle une simple délinquante avec suffisamment de mauvaise relation pour pouvoir faire sa loi. Dans les faits, les fables les plus étranges étaient les plus vrais. Toute humaine qu'elle était, la jeune femme se passionnait de magie noire et de sombre savoir, ce qui lui avait permit avec le temps de développer quelques dons. Rien de bien extravagant, elle ne pouvait pas transformer quelqu'un en crapaud, mais elle avait sous ses doigts la possibilité de maudire, condamner, perdre nombre de ses contemporains. Il ne lui suffisait que d'un coup d'humeur pour cela, de voir une crétine s'opposer à elle... Ou même, simplement, de constater que quelqu'un traîne un peu trop autour de son frère.

C'est ce qui était arrivé il y a de cela plus de trois semaines. Une jeune fille un peu trop collante, Dextra ne se souvenait même plus de son nom, avait commencée à tourner autour de son frère, au point d'aller le voir sur son lieu de petit boulot. Cette traînée lui avait fait les yeux doux, la soeur aînée s'en était rendue compte, tant et si bien que les choses durent trouver une solution rapide et violente. Cela impliqua une possession, un toit d'immeuble, ainsi qu'une fausse lettre de suicide écrite de la main de Dextra pour justifier les actes de la pauvre demoiselle. Il fallut bien sûr posséder un véritable coeur de pierre pour agir avec une telle forme de violence et de cruauté, mais si il y a bien un avantage aux arts sombres pratiqués par la demoiselle aux cheveux verts, c'est qu'il parvienne assez rapidement à vous teinter le coeur et l'esprit. Quelque-chose qui ne dérange absolument pas Dextra, se trouvant bien dans ses droits de se laisser aller à sa passion, non sans parler de condamner les traînées qui tentent de lui voler son frère en lui tendant leur petite chatte de salope en rût.

Toutefois, deux choses survinrent qui ne manquèrent pas de passer inaperçu aux yeux de la mage noire. En premier lieu, sa pauvre victime n'avait pas succombé à sa chute. Sa présence à l'hôpital lui permit lentement de reprendre des forces malgré la grave "tentative de suicide" qu'elle avait loupée, les soins prodigués lui redonnant quelques forces, suffisamment pour qu'elle récupère la voix ainsi que l'usage d'une de ses mains au bout de deux semaines. En second lieu, cette pauvre jeune femme avait gardée conscience de ce qu'il s'était passée. Du fait qu'elle n'avait plus eut le contrôle de son corps, que Dextra avait posée sur le toit de l'immeuble sa "lettre d'adieu", non sans parler du regard froid mais satisfait de cette démone au cheveux verts tandis que la pauvre étudiante se jetait malgré elle dans le vide. L'ensemble de ces instants, les souvenirs qui en restaient, tout cela appela la jeune demoiselle à chercher à se venger. Alors elle demanda à avoir le droit d'accéder à un ordinateur, sans résultat, puis parvint à quémander l'accès à un smartphone auprès d'un autre patient de son service.

Elle chercha les pires moyens de se venger de cette démone. Elle trouva l'existence d'un homme capable de remettre "les femmes à leurs places". Même si la simple idée de ce genre de personnage lui donna envie de vomir, ce fut justement cette sensation qui l'amena à choisir cette méthode pour rendre la monnaie de sa pièce à Dextra. Elle contacta l'homme par un message simple mais clair, avec tout ce qu'elle savait et pouvait lui donner, ainsi que la rémunération :

"Bonjour, je veux que vous punissiez quelqu'un pour moi.
Elle s'appelle Dextra Kurihone, c'est une élève de Mishima en dernière année, aux cheveux verts, portant souvent une veste à carreaux rouge.
Elle est dangereuse et détruit la vie des autres.
Je veux que vous la brisiez, qu'elle soit humiliée !

J'vous file 35 000 Yens pour que vous fassiez votre taff (photo à l'appui).
Le double si vous filmez ça sous tout les angles et m'envoyez les vidéos.
"


*
*   *


Tout le monde avait ses petits jardins secrets. Dans le cas de Dextra, l'un de ceux-ci était le musée sous-marin de Seïkusu. Elle appréciait ces créatures des profondeurs, ces horreurs titanesques ou monstrueuse, à nulle autre pareille. Les enfants criaient devant elles, les parents étaient souvent dégoûtés, non sans parler des faibles de coeur qui en devenaient souvent malades. Ces lieux, elle était l'une des quelques rares personnes à supporter s'y trouver, ce qui lui avait permit d'y créer pas mal de petit chose. Par exemple, elle connaissait parfaitement les entrées des différents services professionnels de l'étage, aussi avait-elle accès au pièces du personnel, cafétéria et autres bureaux compris. De même manière, elle avait un jour réussie à obtenir les plannings de la majorité des employés, donc elle savait non seulement comment faire pour entrer sans payer, mais surtout sans jamais risquer de se faire remarquer. Alors elle en avait fait son royaume.

Elle y donnait rendez-vous à ses contacts pour obtenir ce dont elle avait besoin pour ses fameux sortilèges. Elle y avait trouvé un bureau laissé à l'abandon, sûrement à cause de sa position lugubre, juste en dessous de "l'enclos" des requins gobelins, et en avait fait sa propre zone de stockage. Surtout, quand elle savait que tout le monde remontait vers les strates supérieures du musée pour rejoindre la partie spectacle, entre 17h et 21h, elle se déplaçait dans les couloirs les plus profonds, entre la salle des machines et les piscines abritant les plus étranges spécimens du musée. Elle se sentait à l'aise en ces lieux, elle se sentait... À sa place.

Encore ce soir, les cours fini, elle s'y était faufilée, avait prit l'une des entrées du personnel avec un badge récupéré dans les bureaux, puis s'était immédiatement enfoncée vers les profondeurs. Son objectif était d'observer si elle pouvait produire une malédiction à grande échelle aujourd'hui et rien au monde ne saurait l'empêcher d'atteindre son but. Alors elle ne fit même pas attention à ce qui l'entourait, ou si qui que ce soit se trouvait dans les environs. Inconsciente mais portée par un enthousiasme rare chez elle, elle dévala les escaliers de service sur plus de six étages, puis déboucha sans un bruit dans la pénombre lugubre de la zone des profondeurs. Peu de lumière, juste ce qu'il faut pour voir où l'on va... Mais il aurait put faire nuit qu'elle s'y serait retrouvée malgré tout : Elle s'enfonce jusqu'à une porte bien cachée entre un mur et une cuve gigantesque, abritant un splendide calamar des profondeurs, puis débouche alors sur une zone un peu plus lumineuse.

Deux tournant à gauche, et elle atteignait "son" bureau. Alors, elle pourra se mettre au travail.

3
Même quand ils ne discutaient pas, Senestra était dans un tel état de béatitude qu'il avait bien du mal à soutenir plus de quelques instants ses regards envers la demoiselle aux cheveux bleu nuit. C'était assez simple par ailleurs, mais la regarder quelques instants produisaient nombres d'effets qui ne le rendait que plus mal à l'aise par la suite : Son coeur qui s'emballait, venant battre comme mille tambours dans sa poitrine, ses mains qui avaient tendances à devenir moites, ce qui lui donnait l'impression d'être un peu sale, éventuellement incorrect dans le cas où il pourrait oser un geste. Quel geste d'ailleurs ? Il ne le savait même pas, mais s'il voulait lui caresser la joue, prendre sa main dans la sienne, ou tout autre chose, il ... Il ne voulait pas que ce soit avec une pogne rendue désagréable par l'humidité qui s'y était malencontreusement créé. Alors voilà, il était obligé de regarder autre part, de ne pas se laisser aller à ses désirs les plus naturels et honnêtes pourtant. Il cherchait simplement à être une bonne personne, qu'elle se souvienne de lui en bien. C'était tout ce qui comptait, non ?

" Moi aussi, j'ai été vraiment chanceuse de te rencontrer ce jour là Senestra ! "

Il eut un petit sursaut. Exactement, il s'agissait de son coeur qui venait de louper un battement face à la douceur des mots de la demoiselle, non sans parler du ton qu'elle avait employé, à la fois invitant et délicat. Non, non, il se faisait sûrement des idées. Exactement, il se voyait déjà être en train de confondre une simple sympathie avec une forme d'intérêt de la part de sa compagne d'études, tant et si bien qu'il chercha à se reprendre, se secouant d'abor un petit peu avant de lui poser d'autres questions, moins confuses et sûrement plus à même de lui permettre de comprendre que, non, il n'était pas une nécessité pour cette magnifique jeune femme et qu'elle venait simplement parce que sa présence était un prétexte au sérieux des révisions qu'elle souhaitait poursuivre. Voilà, c'était ça, elle ne pouvait qu'avoir le désir de profiter de la présence d'un autre élève pour mieux travailler. Qu'ils s'entendent bien n'était, finalement, qu'un petit bonus, un surplus de plaisir auquel il ne devait pas se raccrocher. Pourtant, il le savait, intérieurement, qu'il espérait une toute autre réponse.

" Non, bien sûr que non. je ne me sens pas du tout obligée. Ça ne me dérange pas, bien au contraire. Je suis contente de pouvoir passer du temps privilégié avec quelqu’un que j’ai- que j’apprécie. "

C'est cela, exactement. C'est le genre de phrase qu'il aimerait entendre, ce genre d'aveu sincère et délicat, teinté d'une pointe de gêne qui n'a que la merveilleuse nature de rendre l'échange encore plus poignant, encore plus doux. Mais c'était bien là un fantasme, typiquement ce genre de chose que l'on imagine en croyant que les contes de fées existent. Rien qu'aujourd'hui, ça lui était déjà arrivé, il avait crû, un instant, qu'elle s'était indignée quand il avait osée se dire un peu idiot, mais dans le fond, voilà bien encore une fois une preuve que son esprit pouvait très rapidement lui jouer des tours. Il ne fallait pas du tout qu'il confonde ses rêves avec la réalité, un peu plus et il serait même capable de sortir des idioties terribles, du genre qui brisent une relation d'amitié sincère par la démesure des sentiments qui y sont révélés.

Mais ... Attendez ... Ce n'est pas comme si il n'avait pas effectivement entendu ces mots. Perdus dans ses pensées, il n'avait même pas fait assez attention pour s'en rendre compte, mais est-ce qu'il... Est-ce qu'elle venait de ... Non ce n'était pas possi... :

" Rassure-moi. T-Toi non plus tu ne te forces pas à venir, n’est ce pas ? Je… Je m’en voudrais si c’était le cas. "

Court mais terrible silence. Normalement, Senestra serait en train de se tirer la joue pour s'assurer qu'il ne rêvait pas, mais le bruit de son coeur battant à tout rompre résonnait déjà suffisamment dans ses tympans pour qu'il en ait pris conscience. Elle.... Elle lui avait effectivement dit ce qu'il avait crû entendre ? Est-ce-qu'il... était suffisamment maladroit pour s'être persuadé qu'elle n'avait jamais prononcée les mots qu'il avait put entendre plus tôt ? La réalisation lui prit un peu trop de temps à son goût, mais cela n'empêcha pas pour autant le jeune homme de laisser son esprit faire son petit bonhomme de chemin, jusqu'à ce que la réalité se rappelle à lui. Elle avait posée son crayon, donc finie ses exercices, pourtant elle ne relevait pas son visage. Ses mèches de cheveux cachaient ses yeux et son visage, pourtant il était certain de voir le rouge de ses joues. Depuis combien de temps la fixait-il ? Deux secondes ? Dix minutes ? Il était pourtant si incorrect de ne pas lui répondre, mais le choc avait été tel qu'il était resté coi. Mais il... Il était temps de corriger cette erreur.

" Alice je ... "

Allez, il commence par l'appeler par son prénom, comment ne pas avoir l'air plus maladroit, plus idiot, plus incorrect !? Et puis pourquoi il se penchait vers elle, amenant ses doigts pour décaler les mèches qui cachaient le visage de la demoiselle, hein ? Il allait se cramer, elle allait le prendre pour un malade mental, un gosse en chaleur, le pire des connards qui tente de profiter de la moindre occasion, c'était certain ! Allez arrête-toi là Senestra, de toutes façons t'es pas fait pour avoir un intérêt amoureux, y'a pas grand monde qui ne veut autre chose de toi que ton aide désintéressé. Parce que dans le fond, tu n'es bon qu'à te faire utiliser n'est-ce-pas ?

" Excuse-moi je ... Hum, hum. Je suis extrêmement heureux de passer ces heures avec toi. Rien ne me fais plus plaisir, depuis que nous nous sommes rencontrés. "

Il tremblait. Ses doigts s'étendaient encore en direction du visage de cette précieuse amie, avant qu'il ne soit plus qu'à quelques millimètres des mèches de la demoiselle. Il ne s'en était pas rendu compte mais ... Il respirait profondément, même si silencieusement. Il manquait d'air, et pourtant il avait aussi l'impression d'en avoir toujours trop dans ses poumons. Sûrement à cause de son coeur qui battait suffisamment rapidement pour faire faire une crise cardiaque à un cycliste professionnel en pleine épreuve du Tour de France. Il avait du mal à se contrôler, alors qu'il le devrait, rien que pour elle. Sûrement ne désirait-elle pas ça, même si elle lui avait avouée le plaisir qu'elle avait de vivre ses moments à ses côtés. Bon dieu mais comment il formulait ça lui, dans sa petite tête de lycéen en plein émoi !? Il devait s'arrêter... et pourtant ses doigts vinrent enfin se glisser auprès des mèches fines d'Alice, les décalant délicatement pour révéler son visage tout aussi rougeoyant que celui de son compagnon de la soirée. Elle regardait ses feuilles avec une gêne qui lui transperçait le coeur d'une émotion vibrante... Il la contemplait avec dans les yeux une fascination à l'aune de ses sentiments.

" Alice est-ce que tu... "

Sa question resta en suspens. Car quelques horribles diablotins semblèrent avoir de biens étranges projets, ceux-ci n'attendant guère que le lycéen parvienne à s'exprimer dans toute sa peur et sa maladresse. Le silence dans la bibliothèque, hormis leurs deux respirations, n'était guère suffisant pour couvrir le son qui résonna depuis l'extrémité opposée des lieux. Le bruits de nombreuses clés qui s'entrechoquent. Le bruit d'une serrure que l'on verrouille avec un mouvement aussi rapide que maîtrisé. Deux tours des plus rapides, des plus efficaces, et qui ne laissent nulle place au doute. Comme s'ils allaient soudainement se faire prendre, Senestra se redressa immédiatement, déglutissant avant de se traiter d'idiot à avoir eut une telle réaction ! Qu'est-ce-qu'il avait à cacher ? Et si .... Et si elle prenait mal ce comportement, comme si il n'assumait pas ce qu'il allait dire au point que n'importe quel risque serait évité, et la moindre relation dissimulée. Ah merde, il avait finalement merdé de A à Z. Il le savait .... Quel nul !

" Je... Pardon je vais aller voir. Je reviens de suite, ne t'en fais pas ... "

Voilà, la fuite. Il contourna Alice et se glissa entre les étagères pour voir qui venait de rentrer dans la bibliothèque, mais fut étonné de ne voir absolument personne. Pourtant il était sûr d'avoir entendu le bruit des clefs. Est-ce que cette personne se cachait ? Instinctivement il observa l'endroit où se trouvait Alice, pour voir si elle ne semblait pas voir quelque chose qu'il n'avait pas remarqué. Non, visiblement rien. Eh bien soit, il s'avança le long des étagères puis... Une fois qu'il fut certain que personne d'autre ne se trouvait dans la bibliothèque, il commença à se passer la main dans les cheveux, nerveux. Qu'est-ce qu'il se passait ? C'est là qu'il se rendit compte de la seule autre possibilité existante. Vivement, avec un empressement inquiet, il s'élança jusqu'à la première double-porte coulissante et en attrapa la poignée latérale... Pour ensuite la tirer dans un élan un peu incontrôlé. Si la porte avait été déverrouillée, il l'aurait sûrement claquée de toute ses forces sans même s'en rendre compte. Fort heureusement, ce n'était pas le cas. Malheureusement, ce n'était pas le cas non plus.

" Oh bon sang de ... "

Il s'empêcha de jurer devant Alice... Mais là, il avait sévèrement l'impression d'être dans la mouise, d'autant plus qu'il n'était pas seul dans cette galère.

4
Dextra n'avait absolument jamais désirée cela. Enfin ce n'est pas comme si elle avait eut le choix de quelques manières que ce soit ! Mais franchement, si elle avait eut son mot à dire, elle se serait permise d'attraper son professeur par le col et lui hurler combien ce genre de puérilité lui donnait envie de vomir en premier lieu, puis de fuir en second. Pourtant, la voilà dans cette situation stupide, inacceptable, absolument insupportable : Un voyage scolaire.

Dextra ne passait pas franchement le plus clair de son temps à l'intérieur du lycée Mishima. En tantque dernière année, elle devrait pourtant s'y trouver le plus souvent possible, aller étudier à la bibliothèque, demander des conseils à ses professeurs afin d'améliorer le plus rapidement possible ses notes, mais à la place ... Elle faisait tout l'inverse. Absentéiste des premières heures, la jeune femme ne se maintenait la tête hors de l'eau que par son esprit des plus tenaces, sans parler de ses quelques triches quand elle sentait que les choses pouvaient tourner mal. Cela entendait souvent l'utilisation de ses arts sombres pour lui permettre de scruter les réponses qui se trouvaient sur les feuilles des bons élèves, un procédé suffisamment efficace pour qu'elle n'ait guère le désir de faire autrement. En tout cas, vu qu'elle n'avait absolument aucuns désirs de se trouver en la présence des professeurs, encore moins celle de ses camarades par ailleurs, elle avait tôt eut fait de rester chez elle, cloîtrée, espérant alors obtenir le minimum de tranquillité qui lui permettrait de se focaliser sur ce qui avait de l'importance pour elle.

Mais non ... On ne le lui permettait pas. Mme Shuzui, sa professeure principale, avait eut le comportement le plus direct à ses yeux, ne se laissant guère décontenancée par la langue tranchante de la jeune femme aux cheveux verts, et lui avait offert une proposition que Dextra n'avait put refuser : Soit elle participait avec sa classe et d'autres au voyage scolaire qui les mèneraient tous à Oruga-Samu, un village proche qui n'avait sûrement pas le plus petit des intérêts à ses yeux... Soit elle se retrouvait avec un motif évident d'exclusion scolaire, ce qui signait son arrêt de mort pour atteindre quelques plus hautes études dont elle allait avoir le besoin en fin d'année si elle ne voulait pas finir plus ou moins à la rue, sans bourses ni aides de toutes sortes. Autant dire que le choix, malgré le dégoût et la colère qu'elle éprouvait, avait vite été fait. Et la voilà donc, deux semaines plus tard, dans un bus bondé, en direction du fameux village. Le pire ? C'est qu'elle voyait bien que seule sa classe se trouvait être présente en tant que dernière année d'étude. Toutes les autres étaient de rangs inférieurs, un constat qui ne manquait pas de l'amener à se mâcher la lèvre avec un énervement palpable. Au moins, par chance, celle qui se trouvait à côté d'elle la fermait, ça lui évitait de l'envoyer chier.

Deux heures, c'est ce qu'il fallut pour que le bus arrive enfin à destination. Point besoin de décharger les affaires, il fut engagé par la réception du Ryôkan d'emporter l'ensemble des valises dans les chambres qui avaient été réservées, permettant ainsi aux professeurs d'emporter tout ce petit monde dans les premières visites de la journée immédiatement. Joie et bonheur, elle n'avait donc pas l'occasion de s'éclipser en douce pour l'instant. Car oui, Dextra n'avait pas du tout signée pour participer à cette farce : Tout ce qui comptait pour elle était de disparaître le plus rapidement possible. Tant qu'elle était à ce voyage scolaire, elle n'avait plus d'autres raisons de bien se comporter par la suite. Elle emboîta donc le pas de ses camarades avec la ferme intention de se glisser hors du groupe dès que le moment se présentera. Ce qui n'allait pas être une chose facile, elle s'en rendit vite compte : Le professeur référent de son groupe avait peut-être l'air détendu, mais il la gardait visiblement à l'oeil, l'empêchant de quitter le tas de gamins qui l'entourait par quelques injonctions quant elle s'y essayait.

" Putain, il va jamais me lâcher... "

Ses mots furent perçus par une camarade, qui baissa la tête immédiatement, de peur de subir la mauvaise humeur de celle que tout le monde appelait la sorcière aux cheveux verts. Et remarquant cela, ce ne fut pas sans un sourire que Dextra commença à échafauder son plan. Après tout, même si elle était connue pour son mauvais caractère, elle évitait généralement bien des problèmes. Pourquoi ? Parce qu'une bonne partie de ses camarades la craignait. Ceux qui avait osé s'attirer ses foudres finissaient généralement avec une malchance de tout les diables, comme si une mauvaise étoile couvait leur destin en permanence. Tout le monde voulait l'éviter... Ou l'aider à faire ce qu'elle avait envie, de peur sinon de se retrouver dans une fâcheuse situation. Alors la demoiselle regarda autour d'elle, à l'affut d'un visage familier qu'elle pourrait utiliser à ses fins. Ce ne fut pas sans mal, peu de ses collègues de classe aurait la malhonnêteté de la suivre dans ses mauvais comportements, mais il y en avait une dont elle connaissait la plus ironique des faiblesses, et ça allait lui être bien utile !

Malheureusement, il lui fallut attendre la pause déjeuner pour enfin la trouver, mais ce ne fut pas sans un grand plaisir. Après avoir supporté trois longues heures de visites culturelles, elle ne pouvait d'ailleurs attendre plus longtemps avant de mettre son plan à exécution : Elle s'approcha de Nita Kuboshi, une jeune demoiselle parfaitement normale, fine et élancée, avec une timidité terrible mais des sentiments aussi fort que sa personnalité était terne. Ce que cette jeune fille désirait depuis des mois, c'était son professeur principal. Ce que Dextra désirait, c'était la liberté. Et là où leurs désirs coïncidaient, c'était dans la personne qui était à la fois le tortionnaire actuel de la sorcière, et l'amour de sa vie de l'ingénue. S'approchant donc sans trop de discrétion, l'étudiante s'assied sans la moindre forme de gêne ou de réflexion à côté de la timidité incarnée, ne manquant pas de la faire sursauter par la même occasion. Puis sans plus d'introduction, elle se mit à lui parler, à voix basse, usant de ses talents naturels pour lentement rentrer dans l'esprit de la demoiselle. De sa main gauche, elle écrivait sur la chaise de sa camarade les runes qui lui permettraient bientôt de donner un coup de fouet à cette idiote, tandis que sa langue la distrayait :

" Bonjour Nita, charmante sortie n'est-ce-pas ?
 -  Qu-Qu'est-ce-que tu veux ?
 -  Droit au but, hein ? Si je m'y attendais... "

Une rune, plus que trois.

" Je crois savoir que tu as quelques désirs inassouvis ? Souhaiterais-tu un coup de main ?
 -  Comme si j'allais faire confiance à la sorcière de l'établissement, marmonna l'étudiante, le rouge au joue. T'en as rien à faire de mes désirs, je le sais, et tu vas juste me porter malheur.
 -  Mais non allons, je viens juste pour te donner un petit élan ! Après tout ... Il te regardait déjà tout à l'heure.
 -  C-C'est vrai ? "

Trahison de la demoiselle par ses propres émotions, elle s'était tournée avec espoir vers Dextra avant de se rendre compte de son engouement maladroit, et de rapidement se retourner pour adresser son nez au sol. Oui, il était évident de qui Dextra parlait, sa camarade le savait parfaitement, c'est ce qui rendait d'ailleurs la situation d'autant plus pernicieuse. La fourberie de la femme aux cheveux verts n'était pas une nouveauté, seul les plus idiots s'y laissaient prendre d'ailleurs. Et dans le cas présent... Nito était embourbée jusqu'au coup dans les mesquineries de Dextra. Il était, en soi, déjà trop tard pour elle, trois des runes étaient déjà inscrites (métaphoriquement) sur son assise, ne restait que la quatrième pour que le sort s'enclenche. Il ne manquait que quelques secondes à la sorcière auto-didacte pour atteindre son objectif, aussi ne fit-elle pas dans la dentelle : Elle attrapa sa camarade par l'épaule de sa main libre, lui intimant ainsi de ne pas quitter sa chaise, puis elle alla se glisser discrètement à son oreille, meilleure moyen de jouer la confidence pour la garder immobile :

" Allez, prends ton courage à deux mains. Tu files lui parler, tu lui touche la main, peut-être même que vous parviendrez à trouver un endroit discret pour discuter ? Y'a une heure et demi de pause déjeuner, c'est bien assez non ?
 - T'es complètement dingue ! Je .... Je peux pas faire ... Pas faire ...
 -  Oh ta gueule hein ? Tu veux juste faire la donzelle effarouchée mais dans le fond, on sait tous ce que tu veux.
 -  N-Non !
 -  Alors prouves le moi. Va le voir, dis lui ce que tu as sur le coeur... On verra bien comment tu réagira par la suite.
 -  C... Connasse ! Va te faire foutre, sincèrement ! "

Si les mots auraint put faire croire que Dextra avait échouée, c'était tout le contraire. Piquée dans son orgueil, sa camarade de classe venait de se lever de sa chaise, cramoisie, mais un feu ardent dans le regard, pour se diriger droit vers son professeur principal. Le coeur battant la chamade et l'esprit gonflé d'un désir qu'elle n'assumait pas, la petite demoiselle traversa la salle où ils déjeunaient tous pour se diriger vers la table des enseignants, tandis que Dextra jubilait. Parfait. Non seulement elle avait déjà finie de créer son sortilège, mais en plus elle avait eut le temps de le glisser de l'assise au corps de Nita. Au premier contact, le professeur répondrait positivement aux attentes de l'étudiante, trouvera sûrement une excuse pour qu'ils s'éclipsent, influencé par le sort suggestif que la demoiselle aux cheveux verts avait conçu... Tant et si bien que Dextra ne fit même pas plus d'efforts pour cacher son action suivante : Dès lors que le nouveau couple engagea la discussion, elle se dirigea vers la sortie et s'éclipsa sans la moindre forme de discrétion. Elle n'en avait juste plus besoin.

*
*   *

Aaaaaah l'air extérieur. Elle respira à plein poumon ce synonyme de liberté. Plus de professeurs pour la garder à l'oeil, plus de connards d'élèves débiles pour lui farcir le cerveau de gueulantes sottes et de réflexions stupides. Si la salle qui les avait accueillis pour la pause midi se trouvait au milieu du village, Dextra n'avait nullement perdu de temps pour s'en éloigner : Slalommant entre les vieilles bicoques et les boutiques de gri-gris d'un autre temps, elle avait rapidement remontée une des voies principales de cette bourgade pour enfin atteindre un jardin public de grande taille. Entre chemins valonnés pour la partie inférieure et flanc de colline pour la partie supérieure du jardin, le choix était vite fait par ailleurs. La demoiselle s'approcha lentement de la zone haute, se mit à se glisser entre les hauts arbres des lieux, puis se dirigea entre les rochers avnt d'y trouver un vieil escalier permettant d'atteindre les points de vues les plus élevés. La meilleure des cachettes, sans parler du plus agréable des lieux pour se reposer. Une marche après l'autre, elle atteignit la plate-forme bien dissimulée aux yeux d'autruis, et s'y installa nonchalamment. Un soupir d'aise s'échappa de ses lèvres.

" Eh bah voilà, c'est bien plus acceptable ainsi ! "

5
" Bonjour Senestra. Désolée du retard.
 - Ne t'excuses pas, allons. Installes toi donc. "

C'était étrange. Il aimerait dire mille choses, mais à part rester relativement formel, manquer même de paraître froid dans sa manière d'échanger avec elle, il ne parvenait pas à produire une autre forme de communication. Était-ce de la gêne ? Un peu de maladresse ? Il ne pouvait clairement l'exprimer, ni même se l'expliquer, et pourtant... Au moins une partie de son être savait rester plus honnête. Son visage rayonnait d'une joie sincère à la simple vue de la jeune femme, de ses mouvements délicats, de sa mine timide, de son déplacement discret, presque furtif. Honnêtement, eut-il été un autre groupe dans la bibliothèque à discuter et il n'aurait peut-être pas entendu la porte coulissante s'ouvrir sur sa délicate camarade de travail. Ce qui aurait été un de ses malheurs, car avoir le privilège de la saluer quant elle arrive lui offrait une satisfaction incommensurable, ce qui en soit était le sujet de biens des questionnements de sa part. Enfin, il n'allait pas non plus se prendre la tête de manière complètement théorique maintenant qu'elle se trouvait à ses côtés. Surtout qu'elle s'approchait désormais de lui et cette proximité commençait à nouveau à l'envoûter, comme chaque mercredi soir.

" Toi aussi tu dois rendre ce devoir ?
 - Oh euh... Oui, M.Harukate semble avoir un certain don pour réutiliser ses vieux contrôles comme devoir maison. Je crois me souvenir que ma soeur a eut exactement la même feuille l'année dernière... "

Il avait l'impression de répondre un peu à côté de la plaque, mais pour le coup, il n'avait pas trop d'autres idées qui lui venaient en tête. Ce qui était assez vexant, il perdait tout ses moyens avec elle, alors même qu'il espérait encore et toujours se présenter sous son meilleur jour. Son regard se posa un instant sur elle, tandis qu'elle avait sortie ses affaires pour entamer sa propre partie du travail arithmétique. Il fallait l'avouer, Alice était une sacrée beauté. De la longueur de sa chevelure bleu nuit à la blancheur de sa peau, de ses grands yeux aux iris profondes à la finesse de ses traits, de ses petites moues pleines de doutes au carmin de ses joues, l'ensemble avait de quoi le faire chavirer. Raaaah mais à quoi pensait-il, ils étaient là pour passer du temps ensemble certes, mais il fallait peut-être éviter de se baigner dans quelques terribles illusions, qui le laisseront faible face à la déception. Se forçant à détacher son regard de la délicate lycéenne à ses côtés, il se remet lui même sur son boulot, continuant les exercices de manière à les finir le plus rapidement possible. Cela ne lui donnera que plus de temps pour aider sa partenaire, voire peut-être de pouvoir lui parler avec tout l'intérêt du monde. Surtout qu'il ne lui restait que deux exercices sur la bonne douzaine qui leur avait été donné.

" C'est fou quand même, on se demanderait presque si il ne fait pas exprès d'en mettre toujours trop pour qu'on soit certains de louper nos prochains contrôles. "

Du meublage, c'est ce qu'il avait de mieux. Après tout il voulait tant lui parler. Et clairement pas en priorité de ces lignes incompréhensibles que le professeur de mathématique s'amusait à leur mettre dans les dents. D'ailleurs, et ce ne fut pas sans un léger amusement, mais il remarqua un ou deux regard de la part de sa compagne du soir en direction de sa propre feuille de réponses. Avait-elle des difficultés ? Si c'était le cas pouvait-il déjà l'aider ? Il hésitait, son coeur aussi. Après tout cela pouvait être mal vu qu'il se donne la place de lui donner la leçon, mais il avait tant envie de participer aux efforts d'Alice. Bon allez, un peu de courage, cela ne pouvait pas leur faire de mal. Il se tourna un peu vers elle, puis chercha le meilleur moyen de commenter la manière de résoudre l'équation de sa camarade. En fait, de sa position, avec la fine et délicate écriture de son amie, difficile de déchiffrer ce qu'elle notait, aussi ce fut par le plus grand des instincts qu'il attrapa les bords de sa chaise pour se rapprocher, sans bien se rendre compte qu'ils se trouvaient déjà bien prêt l'un de l'autre. Un petit bond, puis un second, et ses doigts viennent buter contre le pan de l'assise d'Alice.

Un court instant, ce contact eut l'occasion de bousculer ses pensées. Il y avait la douce odeur de cette demoiselle, sa chevelure qui manquait effleurer l'épaule du jeune homme, sa joue à portée de son souffle. Est-ce qu'il ne venait pas de faire la pire des erreurs au vu de l'émoi qu'elle provoquait bien souvent en lui ? C'était trop tard de toutes manières, il allait devoir jouer le jeu, et surtout ne pas se trahir, lui qui avait le don de bafouiller ou de dévoiler ses émotions avec l'empressement involontaire d'un espion au rabais. Il se pencha simplement en direction de la feuille de sa camarade, meilleur moyen d'éloigner son visage du regard enchanteur de sa compagne du soir, puis entama de lire ses réponses, les trouvant toutes ... Excellentes, même sûrement plus précises que les siennes. Aucune forme de difficulté ici, au contraire, il avait bien plus à apprendre de la précision de son amie en arithmétique que l'inverse. Et voilà, une solution pour s'échapper de son maladroit empressement qui tombait à l'eau. Bon euh ... Comment s'en sortir ? Il se redressa avec un petit air gêné, se passant nerveusement la main dans les cheveux avec un sourire qui en disait long sur sa méprise : La sincérité allait prendre le dessus tout simplement.

" Mince, j'allais dire que je pouvais te donner un coup de main si tu avais besoin d'aide mais ... Je crois que je suis plus bête que toi sur ce genre de sujet. "

Le mot bête était un peu fort, mais il se trouvait effectivement assez sot d'avoir laissé son impulsivité prendre le dessus sans même réfléchir aux conséquences de son action. Décidément elle le mettait dans tout ses états, ça allait se voir à un moment. Presque comme s'il se devait de réparer son erreur, de ne plus envahir l'espace vital de sa partenaire de travail, il reprit sa chaise et se réinstalla en face de son devoir pour le terminer le plus rapidement possible. Une petite dizaine de minutes, rien de plus, allait suffire à cela, et peut-être aussi à le calmer, parce que la vision du visage d'Alice, si proche du sien, avait eut le malheur de se greffer dans son esprit avec une précision sans faille. Finalement, allons plutôt sur quinze minutes de travail, le temps de se concentrer.


*
*   *

Il posa délicatement son crayon, sans le moindre bruit. Sincèrement, ce ne fut pas sans peine qu'il parvint à passer la mine réjouie et légèrement rougissante d'Alice en second-plan, au moins pour qu'il puisse achever son travail, mais au moins il y était parvenu. Alors il rangea quelques-unes de ses affaires et se tourna vers cette amie. Elle avançait à grande vitesse, peut-être que finalement, le fait qu'il ait déjà fait le devoir en grande partie l'avait aidée à y voir un peu plus clair ? Si c'était le cas, il aurait au moins le plaisir d'avoir été un peu utile malgré son erreur précédente. Il ne put s'empêcher de l'observer, traçant d'élégantes courbes sur le papier blanc, ne put s'empêcher de faire un rapprochement entre ces lignes délicates et la manière dont la pointe de ses cheveux descendait le long de sa nuque. Ah bon dieu il recommençait, encore ! Quel enfer, n'avait-il pas la capacité de se tenir en laisse deux petites secondes, sans finir à chaque fois par la dévorer du regard. Tant pis, il chercha un peu hâtivement quelque chose sur lequel poser son regard, puis tomba sur l'une des étagères de la bibliothèque. Là où il avait finalement trouvé le bouquin qui avait mis en place les prémices de leur relation.

" Si je me dois d'être parfaitement honnête, je crois que je n'ai jamais été aussi heureux d'avoir eut du mal à trouver un livre, en y repensant. Nos soirées ensemble sont un vrai plaisir, merci encore pour tout ces bons moments Alice. "

Le propos était sortit tout seul, alors même qu'il ne se doutait pas de l'impact que ces mots pouvaient avoir. Pour être tout à fait honnête, il ne se rendait même pas le moins du monde compte de l'intérêt que l'on pouvait lui porter. Triste chose ou non, mais sa grande soeur s'était bien assurée de faire germer en son coeur les graines du doute quant à son charme et sa possibilité de rencontrer une personne qui réciproquerait ses sentiments. Alors, presque instinctivement, il ignorait les petits détails, les messages cachés et les comportements pourtant équivoques. Ce qui l'amenait, assez souvent même, à lui faire sortir des énormités telle que celle qu'il allait oser prononcer juste après :

" J'espère que ce n'est pas trop gênant pour toi de passer tant de temps à la bibliothèque en fin de journée. Je sais que beaucoup d'autres préfèrent avoir la liberté de leur après-midi. Enfin je veux dire... J'espère que tu ne te sens pas obligée de venir me voir parce que nous en avons prit l'habitude, hein ? "

6
Senestra venait tout juste de finir ses cours. Encore une mercredi de bouclé, encore une belle journée qui se profilait à ses yeux. Il était à peine dix-sept heure, tant et si bien que mille possibilités se présentait à lui : partir faire quelques courses en ville, profiter d'un peu de temps avec des amis dans l'un des clubs du lycée, peut-être même simplement rentrer chez lui et profiter des heures qui suivent pour se détendre un peu avant d'entamer la cuisine et ses révisions. Pourtant... Rien de tout cela n'allait arriver. Depuis quelques temps, après les cours de ce milieu de semaine, le jeune homme prenait de son temps pour se diriger ... Vers la bibliothèque du lycée. Ce n'était pourtant pas dans ses habitudes. Non pas qu'il ne soit pas studieux, bien au contraire, mais généralement il n'avait pas le bonheur de se trouver assez de temps pour simplement s'installer avec les manuels prêtés par l'établissement afin de parfaire ses révisions. Plus de la moitié de ses soirées étaient dédiées au restaurant où il travaillait après tout, puis il se devait de s'occuper de la maisonnée qu'il partageait avec sa soeur. Autant dire suffisamment de raisons de ne pas s'adonner à une escale auprès des livres et du silence satisfaisant de la bibliothèque du lycée.

Mais il y a un bon mois et demi, quelque-chose avait changé. Alors qu'une de ses camarades de classe ne pouvait se libérer pour faire le rangement des ouvrages empruntés par d'autres étudiants, il s'était retrouvé à lui filer un coup de main, la remplaçant pour la fin de journée. C'est là qu'il avait rencontré Alice. La demoiselle avait eut besoin d'un manuel, et il avait eut bien du mal à le retrouver parmi les étagères, suffisamment pour que la gêne l'amène à ironiser son incompétence. Elle avait rit, lui aussi. C'était le point de départ d'une relation qui, depuis, se poursuivait chaque mercredi. Il quittait sa classe, traversait l'étage, et descendait les escaliers jusqu'au rez-de-chaussée, atteignant peu après les deux portes coulissantes qui délimitaient l'entrée de la bibliothèque, puis s'y installait en attendant l'arrivée de la charmante compagnie qu'était sa collègue d'étude. Ils parlaient à voix basse, s'échangeaient leurs cours afin de s'entre-aider, parfois même se permettaient quelques racontars afin de marquer une pause dans leurs révisions. Ce dernier point arrivait de plus en plus souvent au fur et à mesure du temps qui passait par ailleurs, mais par chance, l'approche des vacances scolaires leur offrait de plus en plus souvent la bibliothèque vide, livrée à leurs entretiens les plus anodins.

Il arriva encore une fois dans cette bibliothèque avec la solitude pour seule consoeur. Il ne s'en étonnait guère, le printemps était le temps des amourettes et des sorties, des passions qui se noue dans les parcs comme les amitiés qui se vivent dans les rues. Pour lui, ce n'était qu'une bénédiction de plus, le silence total des lieux, les tables baignées par la lumière chaude du soleil. Il s'avança entre les rayonnages et alla trouver sa place sur une chaise rudimentaire, près d'une fenêtre, avant de sortir ses devoirs de la journée. Il allait en faire un maximum avant que sa camarade n'arrive. Pour plusieurs raisons, la première étant qu'il voulait s'arroger le maximum de temps pour discuter des éventuelles curiosités de la charmante demoiselle aux cheveux couleur de nuit. La seconde qu'il lui était arrivé quelque chose d'assez... Particulier, il y a de cela deux jours, et qu'il comptait profiter de son temps libre pour réfléchir encore un peu de la manière de mettre cela sur le tapis. Surtout qu'il avait déjà passé les deux dernières journées à se creuser les méninges sans trouver de manière habile pour en parler.

LE fait est que ... Senestra était un jeune homme tout ce qu'il y a de plus normal. Passer du temps sur le net, parfois pour des recherches peu orthodoxes, ce n'étai pas une étrangeté en soi. Mais récemment, quelque-chose d'assez énigmatique avait fait une apparition sur ses forums : "Who is Sakura ?". Derrière ce titre de post se cachait une recherche peu banal, à savoir l'identité d'une jeune femme qui semblait poser dans des tenues affriolantes afin de gagner sa vie. Une parmi tant d'autres par ailleurs, mais les internautes avaient une vision différentes de ce cas. La jeunesse du sujet, le fait que son visage restait absent, ainsi que le fait qu'il semblait toujours y avoir un second partie pour la photographier. Certains jugeaient qu'il s'agissait d'une mise en scène, d'autres allaient de leur petit avis, soulignant qu'il s'agissait peut-être d'un cas d'abus. Un parent utilisant son enfant pour se faire des sous faciles, un petit ami qui prostituait sa copine. Finalement, Senestra avait mis son nez dedans et un détail assez anodin avait finalement éveillé de nombreuses questions en son esprit.

Il s'agissait d'une mèche bleu. Un bleu de nuit qu'il rencontrait tout les mercredi en fin d'après-midi. Une mèche légèrement ondulante qui n'occupait que quelques pixels d'images, mais suffisante pour amener le jeune homme à se demander si celle dont il appréciait la délicate présence chaque milieu de semaine ne pouvait pas se trouver dans le genre de situations louches qui étaient prétextés pour cette fameuse "Sakura". Problème ... Il ne pouvait définitivement pas arriver sur ses grands chevaux pour lui sortir le terme si peu habile de : "Dis moi, Alice, tu ne serais pas cette "Sakura" que l'on voit partout sur le net ces derniers temps ?". Autant se mettre immédiatement une belle dans le pied, il en avait conscience. En plus, il ne voulait ni la froisser, ni la blesser. Il ne saurait comment ne pas s'en vouloir le cas échéant.

Alors, tout en faisant ses exercices, il remuait ses idées dans sa caboche, se massait instinctivement le menton comme si cela pouvait lui permettre de mieux réfléchir. Mais un blocage est un blocage, et tandis qu'il répond automatiquement aux multiples équations sur sa feuille de cours, il bute sur chacun des mots qu'il pourrait tenter de dire à son amie. Une réflexion misérable et sans issue qu'il entretient malheureusement jusqu'à ce qu'un bruit particulier le tire de sa transe. Ce son, c'est celui de la porte coulissante, ce qui amena le jeune homme à lever la tête en direction de celle-ci. Cela pouvait être l'élève en charge de la bibliothèque comme il pouvait s'agir de celle qu'il attendait. Par pur bonheur, ce fut le second cas qui se révéla véridique. Elégante, presque à se dissimuler derrière ses affaires de classe, Alice pénétra dans la bibliothèque au rythme délicat qui la définissait, de petits gestes simples et mesurés, silencieux, qui ne manquaient jamais de charmer le jeune adulte. Afin de l'aider un peu, il se dressa de sa chaise et lui fit signe, meilleur moyen de se rendre visible.

" Bonjour Alice, je suis là. "

On ne peut pas dire... Mais rien qu'à la voir, Senestra se trouvait bien chanceux d'avoir eut le bonheur d'une telle rencontre. Il en oubliait presque sa problématique question, et d'ailleurs tant pis pour cette dernière. Il trouvera quelque chose sur le tas.

7
Est-ce que le jeune homme avait la moindre idée de ce qu’il se jouait dans son dos, alors même qu’il appréciait les plus doux et agréables moments auprès de cette jeune femme qui avait déjà quelques crochets enfoncés dans son palpitant ? Pas le moins du monde. Il ne pouvait se défaire de son regard, de sa présence, de son emprise, d’autant de choses dont elle n’avait sûrement jamais prit la décision de mettre en œuvre, mais qui s’étaient juste imposés au jeune homme au prise avec ses émotions les plus incontrôlables. Il passait juste le meilleur des moments, avant de devoir aller travailler, et préférait se concentrer pour l’instant sur la précieuse jeune femme qui semblait de plus en plus chaleureuse, de plus en plus intéressée. Pour lui, d’ailleurs, cela se justifiait sûrement par le fait que ses migraines avaient dût connaître une baisse claire et salutaire, tant et si bien que n’ayant plus à lutter, elle retrouvait enfin de son naturel, de sa franchise, autant auprès de lui que dans … ses éventuelles émotions ? Dieu il n’osait y penser, si elle pouvait être intéressée par lui, quel genre de divinité avait-il loué sans s’en rendre compte pour avoir une chance pareille ? Ou alors qu’allait-il devoir rendre comme service pour le bonheur qui se tenait alors à portée de main ? Autant de choses qui lui passaient par l’esprit mais dont le chaos n’avait d’égal que l’instantanéité de celles-ci. En fait, il suffisait parfois d’un geste de la belle Victoria pour que soudainement il se laisse envoûter, et se retrouve à perdre tout soucis, porté par la paix de ces instants.

« Tout joyau brut a besoin d'être taillé. Je suis sûre que ta soeur pourrait changer, il suffit parfois de peu. Une rencontre, un coups de chance ... ?
Je ne saurais pas dire si c’est effectivement possible. Peut-être ? Du moins je le souhaite. Elle n’est pas mauvaise, c’est juste que … enfin, ses défauts prennent parfois le dessus. Quelque-chose du genre. »

Il se confondait en explications parce qu’il ne voulait pas avoir l’air de se plaindre, ou d’être mauvais envers quelqu’un d’autre, encore plus une personne qui lui est proche. Une question de ne pas se montrer sous son meilleur jour, tout ça tout ça. Il aimait sa sœur, ce n’était pas la question, il était juste … parfois un peu fatigué de son comportement, sans trop savoir comment le lui expliquer, ou l’amener sur un chemin moins désagréable pour les autres et … et finalement, elle-même. Enfin, au moins Victoria semblait lui prêter le même fond que le petit-frère lui offrait. Elle semblait même particulièrement intéressée, ce qui était un plus, avec un peu de chance la bonne humeur ainsi que la nature généreuse de Victoria sauraient faire fondre les défenses pourtant terribles et tranchantes de l’aînée de la famille. Mais pour l’instant, il ne se mettait guère plus bille en tête que cela. La possibilité d’une rencontre entre les deux femmes était encore incertaine, même carrément peu plausible au vu des risques qu’entre-voyait Senestra. S’il devait passer du temps avec la belle anglaise, ce serait avant tout hors de sa sphère personnelle et familiale, donc il préférait encore mettre tout cela de côté. Il se contentait d’écouter la belle demoiselle parler de ses origines. Parfaitement honnête avec lui-même, ainsi que dans ses réactions, ce ne fut pas sans une mine surprise qu’il accueillit la découverte des origines nobles de sa camarade de classe. C’était …. impressionnant ? Disons qu’il y avait là, pour lui simple petit gamin du peuple qui vivait dans la sueur et la difficulté des fins de mois, une espèce d’ampleur sociale : Qu’elle soit de la haute société  était en soit une forme de puissance à ses yeux, d’avantage et d’un coup… il se sentait presque bête d’oser éprouver des intérêts sentimentaux à son égard.

Ne dit-on pas après tout qu’il faut savoir rester à sa place dans la vie? Visiblement, tandis qu’il se met lentement à se remettre en question, voire même à déprimer un petit peu face au soudain mur qui se crée entre lui et la belle Victoria, les derniers mots de la belle jeune femme viennent soudainement le bousculer. Elle … était heureuse de l’avoir rencontré ? Oh ce … c’était… magnifique ! Enfin … :

« Je… Je suis très touché par tes mots Victoria. Honnêtement je suis ravi si cela t’es agréable d’être avec moi. Et… Et je dois dire queee…. »

Un mal de tête terrible le prend soudain. Comme si quelque chose de brûlant venait d’être posé contre son front, tandis que l’on avait placé un étau glacial au niveau de ses tempes. Le tournis prends vite le dessus, horrible, puis… plus rien… sa conscience venait d’abandonner le combat, amenant une autre forme de pensées bien plus mauvaise prendre le dessus, et reprendre la discussion.

*
*   *

Dextra n’était pas une ange, c’était un fait. Aussi, c’est bien pour cela qu’elle avait prévue un grand lot de possibilités pour réagir à la présence d’une éventuelle adversaire. L’autre, celle qui était en train de prendre le contrôle de son frère, avait peut-être réussie à gagner une première manche, tout en lui jetant au visage un gant bien placé, entamant un duel des plus complexes, mais ce n’était pas pour autant que la femme aux cheveux vert allait s’avouer vaincue. Une fois qu’elle avait digérée la première situation, qu’elle avait cessée de hurler dans son oreiller pour calmer ses nerfs, reprenant alors un peu de clarté d’esprit, elle avait entamée d’observer chacune des possibilités qui se présentaient à elle. Tenter une nouvelle attaque sur le jeune femme était hors de propos. Elle n’avait ni les compétences pour le faire efficacement, ni les éléments qui lui permettraient de palier à son manque de pouvoir. L’avantage de la démonologie à l’orientale, c’est qu’elle pouvait toujours assurer des effets plus importants si elle avait une manière de cibler son adversaire précisément, sans parler de ses quelques habitudes en terme de magie animiste… Malheureusement, elle ne possédait ni mèche de cheveux, ni affaires personnelles importantes, sans parler de la possibilités de pouvoir la viser précisément par un contact visuel direct. Donc elle devait procéder d’une autre manière. Abandonner l’affrontement direct, peut-être chercher à la piéger, même si cette Victoria serait capable de faire de même à n’en pas douter. En tout cas, la première étape de son plan était simple : répondre à l’invitation que cette dernière lui avait envoyée de manière ô combien provocante, et ce de la plus rapide des manières.

Et non, il ne s’agissait pas du téléphone. A la place, elle prit en main une petite poupée de toile épaisse, dans laquelle se trouvait un léger mouchoir mauve, sur lequel se trouvait maladroitement brodé une rune ancienne. Allumant une bougie, elle attendit que la cire fonde doucement, puis en fit couler trois goutte sur cette étrange peluche rudimentaire, avant d’y tracer de l’ongle la forme d’un œil et d’un bouche. Ainsi, elle allait connecter une partie de ses sens à la personne à qui appartenait ce mouchoir, et il … n’était pas difficile de savoir de qui il s’agissait.

Ainsi, elle prononça à voix basse son incantation, se concentrant sur l’énergie sombre qui lui permettait de procéder à cette forme de possession, puis ferma l’oeil concerné par son sort, afin de faciliter la connexion. L’instant d’après, son orbite aveugle abrite doucement en son creux une image trouble, imprécise, dont les détails apparaissent au compte-goutte. Pour Victoria, elle peut alors observer le jeune homme dont la tête avait chuté vers l’avant se redresser sèchement, pour enfin aligner son regard au sien, l’oeil droit ouvert et le gauche fermé. Et quand il parla, ce fut avec la voix d’une femme, au ton orgueilleux et à l’honneur bafoué :

« C’est bon, fini les roucoulades, il est temps de parler un peu sérieusement. Je ne sais pas qui tu es, ni même ce que tu fais ici, en revanche, il y a certaines choses que je n’apprécies pas. Marcher sur mon territoire difficilement établi en est une. Alors, avant de commencer à tourner autour de mon bêta de petit-frère, ou de récupérer mes petits jouets, j’aurais bon espoir d’avoir une VRAIE présentation ! »

Elle s’arrêta un instant, puis la tête de Senestra tourna de droite à gauche, de manière à observer les lieux où ils se trouvent. Seuls, dans le restaurant, avec une petite lumière tamisée. En… En tête à tête ! L’audace de cette petite traînée n’a décidément pas de limite.

« Je vois qu’on se fait pas chier d’ailleurs ! C’est quoi l’étape d’après, lui présenter ton petit con pour te faire sauter sur la table avant l’ouverture ? Excitant dis donc ! »

Elle … avait bien du mal à se maîtriser, mais pour le coup, il fallait comprendre que ses paroles étaient encore sous son contrôle. Même si la colère pointait, il était évident qu’elle n’était pas encore à son point critique où elle risquait d’exploser. Elle n’en était pas loin, peut-être, mais elle n’y était pas encore, l’insulte n’étant qu’un simple moyen de montrer qu’elle n’était pas là pour faire preuve d’amabilité.

8
« Bonjour toi. »

Deux réactions furent provoquées par ces simples mots. L’une toute proche, l’autre bien plus lointaine, et commençant par cette dernière, elle fut tout simplement … l’expression d’une stupéfaction outrée.

Dextra, dans son petit nid personnelle, entendit ces mots avec la même clarté que le petit être qui lui servait de caméra longue distance, et manqua en tomber des nues. N’eut-elle pas eut l’occasion de remarquer que la dévergondé qui tournait autour de son frère avait le pouvoir de repérer la surveillance un peu plus tôt, elle aurait sûrement paniquée, mais là, elle fut juste prise de court. Elle avait sut le voir. Elle l’avait remarquée sans la moindre difficulté ! Ce constat était non seulement terriblement dérangeant, mais surtout lui annonçait qu’elle ne se trouvait pas en face de n’importe quelle débile qui faisait les yeux doux à son frère. Elle avait des capacités, elle pouvait peut-être même se protéger de son influence, et il s’agissait de la première à présenter ce genre de don. Elle oscillait entre l’incongruité et la colère. La jeune femme aux cheveux verts n’était pas sotte, elle savait que d’autres qu’elle avaient du pouvoir, mais elle ne s’était jamais attendue à ce qu’une autre en Seïkusu saurait en posséder, non sans compter le fait qu’il s’agisse d’une voleuse de frère ! Se mettant à serrer la mâchoire de manière incontrôlable, elle ne put rien faire contre les sortilèges de cette dernière, observant ainsi son petit familier démoniaque se faire aspirer entre les doigts de cette ennemie retord, puis se trouvant bien malgré elle obligée de l’entendre faire quelques remarques fort désagréable sur ses sortilèges de domination. Très bien, le ton était donné, il y avait dans tout cela une provocation qui ne lui allait guère, et Dextra ne comptait pas se faire fouler du pied sans répondre… Elle allait juste devoir se montrer ô combien plus intelligente que cette vile provocatrice, et c’était, en un sens, une marque de reconnaissance particulièrement rare de la part de cette jeune femme…

Mais pendant ce temps, la petite bête directement au prise avec la sorcière était complètement paniqué. Les démon servants, les inférieurs, étaient bien trop souvent de vulgaire pion, qui pouvait passer de maîtres en maîtres sans trop avoir de contrôle sur leur vie. Alors qu’il se sentait confiant, bien installé et discret dans les recoins de la petite pièce, de se faire attiré par quelques sortilèges l’avait fait passer de la confiance naturelle à cette espèce de peur incontrôlable que peuvent connaître les plus faibles des créatures en se sentant soudainement piégé. Tandis que Victoria l’attirait à elle, il se débattait comme un diable, agitant ses ailes en tous sens pour tenter de lutter contre l’attirance ésotérique qu’il subissait… Mais sans le moindre résultat positif. Captif entre les doigts de la belle jeune femme au cheveux quasiment blancs, il hésita un instant à mordre avant de se rendre compte que l’agressivité de sa part pouvait se terminer en une exécution pure et simple, aussi se laissa-t-il faire, tremblant, espérant juste que la magicienne n’allait pas le bannir par quelques sortilèges honnis dont seuls les occultistes ont le secret. A la place, elle vint à éteindre la lumière, ce qui lui fit un bien fou, le scrutateur ayant presque un soupir d’aise en sentant son être se dématérialiser légèrement, fusionnant un peu avec les ombres environnantes. Sans le sortilège d’attraction, il pourrait déjà s’enfuir en glissant, immatériel, mais elle avait convenu de sa forme en l’attirant, aussi ne pouvait-il pas se libérer de cet aspect. C’était particulièrement pénible pour ce petit être, lui, un fier démon, même parmi les plus inférieurs, emprisonné de la sorte !

« Mon pauvre, se faire asservir comme ça. Ce n'est pas très joli. »

Si le petit être ne se rend pas compte des manipulations dont il fait l’objet, de l’autre côté de la communication, la réaction est toute autre : Dextra sent bien que sa domination sur le Scruteur est en train de lentement s’évanouir, et elle n’a pas besoin d’être d’un intellect tout particulier pour comprendre ce que cela signifie. Rapidement, avant que le lien ne se brise d’une manière bien trop sèche pour qu’elle n’en subisse pas un sévère contre-coup, la femme aux cheveux verts trace dans les airs quelques glyphes, marmonnant entre ses dents plusieurs syllabes sifflantes, tâchées de la colère qu’elle ressent, afin de finalement se protéger du futur impact qui risque d’arriver. Cela l’énervait au plus haut point, car en agissant de la sorte elle acceptait d’avoir perdue cette manche, mais mieux valait agir prudemment que de se retrouver à vomir plusieurs heures d’affilées à cause d’une attaque mentale détournée. Le temps qu’elle mette le bouclier en place, elle sentait d’ailleurs que son petit observateur ne lui transmettait déjà plus que le son, chose sûrement volontaire de la part de son adversaire, cette petite engeance malsaine la targuant d’une dernière provocation avant de définitivement la renvoyer à ses affaires. Et encore une fois, ce ne fut guère pour lui plaire, même si en l’occasion, la grande sœur n’eut d’autre choix que d’accepter la situation avec toute l’aigreur imaginable en un être humain :

« Vos sortilèges sont perfectibles savez-vous ? Que diriez vous que nous ayons une discussion entre collègues à l'occasion ? Nous aurions toutes les deux à y gagner j'en suis sûre. Vous savez où me trouver. »

Et plus rien. La coupure nette et franche du lien aurait dut claquer contre le bouclier qu’elle avait mit en place autour de son esprit, et elle s’attendait par ailleurs à en subir malgré tout de légers dommages. Il n’en fut rien. Juste le manque soudain et impromptu d’informations, seul moyen de comprendre qu’elle n’était plus en communication avec la petite bête qu’elle avait invoquée. Dextra ne comprit que peu après la raison de cela : Visiblement, cette petite mégère qui tournait autour de son frère avait volontairement coupée la communication en s’assurant de ne pas le rompre de manière soudaine et aggravante. Elle l’avait… épargnée, du moins en un sens. Parce qu’à contrario, elle venait par la même occasion de l’attaquer directement dans son orgueil, ce genre de ménagement ayant sensiblement la même signification qu’une petite tape gentillette sur la tête, pleine de supériorité.

Préférant ne pas hurler, Dextra attrapa le premier oreiller qui lui passa sous la main et mordit dedans pour se taire, la rage au coeur.


*
*   *

« Merci pour ton accueil Senestra. C'est vraiment très apprécié ... Pardonnes moi si j'ai un peu baissé la lumière ...  j'ai encore ma migraine. Mais ça va rapidement passer avec ça.
Vous n’avez vraiment pas besoin de vous excuser, je suis ravi de pouvoir au moins vous emmener en un lieu qui sois plus tranquille. Tenez, votre verre d’eau. »

Bien loin de tout ce qu’il venait de se passer lors de son absence, Senestra restait digne de lui-même, un jeune homme plein de douceur, de tact et de tranquillité, veillant au bien-être de l’autre avant même de penser à son état personnel. Il tendit le verre à cette précieuse compagne de fin de journée dans un geste plein de délicatesse, et ne put qu’imaginer un court instant la possibilité que leurs doigts se frôlent, sans même avoir le temps de s’en prémunir, ses joues rosissant un court instant avant que son coeur ne s’emballe. Par bonheur, mais tristement, ce ne fut pas le cas, et il put même bénir la pénombre ambiante de lisser ses traits, de voiler son visage, de cacher avec pudeur l’ensemble de son émoi tandis que Victoria prit le verre et entama la prise de son médicament. Parfois, il souhaiterai sincèrement avoir le plein contrôle de ses émotions, mais il avait conscience que les plus grands moines bouddhistes eux-même n’en avait pas la capacité, alors autant oublier dès maintenant cette idée aussi grotesque qu’infantile. Tout au plus attendit-il qu’elle finisse son verre, obtus aux pensées et machinations de sa camarade, puis récupéra le contenant vide quand elle le lui rendit, venant installer celui-ci dans l’un des bac à vaisselle qui se trouvait près des éviers. Peut-être que l’amener ici n’avait pas été la plus sainte des idées pour lui : Seul à seul, dans un lieu faiblement illuminé, il commençait à craindre que ses intentions puissent être mal comprises. Ou même qu’il y ai là quelques formes d’aveux maladroits dont il ne s’était lui même pas rendu compte en premier lieu, et qui maintenant le mettait en danger :

« Je veux bien te suivre oui. Es tu sûr que ma présence ici ne dérange pas ?
N-non pas le moins du monde allons. Mon chef m’avais déjà dit qu’au besoin, ce n’était pas pour rien qu’il m’avait confié les clefs. Je… hum… C’est par là. »

Il prit les devants et s’avança dans les petits couloirs du restaurants pour rapidement atteindre le coeur de celui-ci, la salle de service, avec les tables biens rangées, les chaises redressées, et la pénombre absolue dut aux stores encore totalement baissés. Un peu de lumière allait quand même être nécessaire, alors tandis qu’il prenait enfin conscience qu’elle le tutoyait depuis qu’ils étaient arrivés ici, le faisait frémir imperceptiblement, il se dirigea vers l’une des fenêtres dont il fit relever les panneaux à l’aide d’une commande. Jaugeant les rais de lumière qui envahissaient la pièce avec une claire délicatesse, Dextra veilla à ne pas dépasser la quantité de lumière que sa jeune et précieuse compagne s’était imposée dans la cuisine, puis une fois satisfait, il alla immédiatement abaisser les chaises qui se trouvaient autour d’une table afin qu’ils puissent tout deux s’installer. Mais pour le coup, elle prend la banquette qui se trouve à l’opposée des chaises. En un sens, il est déçu, l’idée de se retrouver à nouveau à ses côtés faisait presque chanter son coeur de plaisir, et puis il aurait eut la position la plus agréable pour voiler ses réactions… Mais quand il se trouva devant les deux grands yeux charmeurs de la demoiselle, l’étudiant ne put s’empêcher de ne pas trouver la situation si mauvaise que ça. Il s’installa lentement, espérant que son embarras n’était pas trop évident, même aux yeux de l’intelligente demoiselle qui raffermissait, sans le vouloir, sa prise sur son coeur de jeune homme :

« C'est donc ici que tu travailles ? C'est un bel endroit. Tu as du courage de travailler ainsi en plus des cours. Ta soeur doit t'être très reconnaissante. »

Encore le tutoiement … Oserait-il ? Apparemment, oui :

« Eh bien je … Je ne crois pas que ce soit du courage. Ma sœur et moi-même n’avons pas d’autre revenu que celui que nous pouvons nous faire. Et puis … Dextra n’a plus de travail actuellement donc je dois mettre les bouchées doubles. Mais je ne crois pas qu’elle me soit si reconnaissante que ça, elle préfère vivre sa vie au milieu de ses bouquins, et me faire quelques tristes commentaires quand elle s’en sent l’envie. Visiblement vous partagez toutes les deux des intérêts communs, notamment les vieilles boutiques, mais je ne sais pas trop si … elle saurait bien se comporter avec toi si vous vous croisiez. »

Il était critique avec sa sœur, c’était un fait. En même temps, même s’il l’appréciait sincèrement, elle n’était ni la plus touchante des connaissances, ni la plus facile à vivre. Une recluse, égoïste et supérieure, qui voit les autres comme des sales types qu’il fallait écraser de sa « toute-puissance » présumée. Certain de ses amis avaient tentés une approche ou deux envers elle, vu qu’elle restait une belle jeune femme, mais les résultats avaient été à la hauteur de ce qu’il imaginait : un râteau, monumentale, avec en morceau sur le sol l’égo de ses camarades éconduits. Il reprit donc son propos, parlant à coeur ouvert, sans trop se rendre compte qu’il était en train de déraper… La faute à l’agréable et délicate situation qu’ils vivaient, et au doux visage de la belle Victoria en face de lui, qui lui réchauffait le coeur par sa simple expression de joie :

« Non pas que je n’aime pas Dextra, elle reste ma grande sœur et je dois mon hébergement à sa bonne volonté, mais … Eh bien comme dirait l’un de mes amis : « Elle est aussi belle que cruelle ». Elle n’a ni ta sollicitude, ni ta gentillesse, et manque très largement de bonnes manières. Une vraie brute avec les sentiments d’autrui, ou leurs espoirs… Mais je monopolise la parole, pardon. Tu as de la famille ? Peut-être pas ici j’imagine, mais des frères et sœurs à l’étranger ? »

Peut-être tout cela allait être un peu banale, mais ils avaient un peu de temps pour discuter, de tout et de rien. Après tout, ce n’était pas vraiment comme si un démon allait leur tomber dessus, ou quelques maléfices les séparer sans prévenir. La proximité de cet instant amenait le jeune homme à se faire un nombre incalculable de scénario en tête, mais il n’osait avoir cette maladresse pour l’instant. Qui sait, peut-être l’inviterait-il à passer chez lui ce W-E… Il aurait le devoir de gérer sa terrible sœur pour le coup, mais … si ça se passait bien entre lui et Victoria, pourquoi hésiter ?

9
« Oh je vous prie de m'excuser Senestra. Je me suis sentie mal un instant. J'avais mal à la tête avant que nous commencions notre visite ... C'est possible qu'il revienne m'importuner.
- Je comprends, bien sûr... »

Le jeune homme ne pouvait que faire démonstration de sa sollicitude. S’il l’était de toutes manières bien naturellement, empathique, cet instinct n’était que démultiplié avec la jeune femme qui avait déjà plantée ses griffes en son coeur, et maintenait désormais une emprise toute impérieuse sur ses sentiments. Il ne savait ni les sombres pensées qu’elle avait, ni ses tristes manières d’entre-voir ce monde que lui observait avec candeur et honnêteté, aussi la moindre petite forme de peine chez elle pouvait résonner en son être comme une blessure personnelle. Un mal de tête ? Autant parler d’une vrille au travers du crâne à ses yeux. Tant et si bien qu’il serait capable de tout faire pour s’assurer qu’elle n’ai pas à subir plus longtemps cette gêne, et allant avec cela, ses propositions ne firent que correspondre à son état d’esprit. Il se voyait mal l’amener sur son lieu de travail, cela faisait franchement impersonnel, peut-être même un peu tape-à-l’oeil, tout du moins lorsque l’on est un lycéen. Mais finalement, quoi de mieux en cette situation, il pourrait au moins prendre un peu soin d’elle dans ce lieu relativement intime. Par chance, tout du moins pour le jeune homme aux idées un peu perturbées au vu de la situation, il sembla que la suggestion soit au goût de sa compagne de fin de journée, celle-ci lui répondant avec l’air un peu moins souffrant :

« Je veux bien ... qu'on trouve un endroit plus calme oui. Je suis curieuse de voir là où vous travaillez. Et est-ce que j'abuserai si je vous demandais un verre d'eau ...? Pour prendre une aspirine ...  Je n'ai pas envie qu'un mal de tête nous gâche la fin d'après-midi.
- Bien sûr que non. Je vous y emmènes de ce pas Victoria. Et si votre tête vous fait encore souffrir en chemin, n’hésitez pas à me le dire, nous ferons un arrêt le temps que ça se calme. »

Point de sensation d’être leurrer, encore une fois, la serviabilité du jeune homme allant bien au-delà de la moindre considération quant à l’idée d’être trompé, ou utilisé. Le genre de chose qui, comme toujours et depuis maintenant plusieurs années, avaient toujours eut le dos de mettre les nerfs en pelotes chez sa sœur aînée. Lui, incapable de voir le mal chez autrui, et elle, incapable de ne pas remarquer quand le moindre de ces « petits idiots » qui le côtoyait trouvait une bonne occasion de faire usage de la bonté du cadet pour ses intérêts personnels. En tout cas, il fit un geste délicat auprès de la charmante blonde pour l’inviter à le suivre, le lycéen récupérant son fidèle destrier du banc où il l’avait installé pour ensuite se remettre en marche en direction des grandes rues commerciales, et leurs voisines plus curieuses mais aussi inquiétantes et étranges. Pour les habitués, il était monnaie courante de ne pas aller se perdre dans les multiples ruelles de la cité, chacune semblant avoir la capacité presque magique de mener, après quelques pas, au terrible quartier de la Toussaint, milieu des pires rencontres possibles et imaginables. En revanche, pour les néophytes ou les plus chevronnés, ces lieux étaient souvent la cachette des plus mystérieuses boutiques, et des plus beaux étals pour les passionnés d’échanges curieux ou illégaux. Senestra savait pertinemment que sa sœur, par exemple, avait l’habitude la plus sereine et maîtrisée d’aller dans certaines des boutiques ombrageuses et mal éclairées qui se trouvaient dans les ruelles et impasses de Seïkusu, y trouvant bien souvent de bien inquiétantes acquisitions qu’elle rapportait à la maison avec un sourire malsain aux lèvres. D’ailleurs, quitte à faire la discussion durant leur marche, le lycéen reprit ses allures de guide, présentant ces curiosités à la précieuse compagnie à ses côtés.

« J’y pense, mais un peu comme pour l’histoire du fondateur de la ville, il y a un certain … disons type de marché assez particulier dans la ville. Alors rien qui ne se trouve dans les grands axes que nous traversons, mais, parfois, en se baladant dans quelques coins un peu moins accessibles, on trouve des boutiques ésotériques. D’ailleurs une loi était passée il y a … Quoi, 5 ou 6 ans je crois ? En tout cas une loi qui a tentée de réguler ces commerces. Je crois que tout au plus cela les à amener à se faire plus discrets. »

Pouvait-il se permettre d’en dire plus ? Peut-être, aussi il enchaîna quasiment immédiatement en se tournant vers la jeune femme à la si belle allure qui se tenait à côté de lui, la gratifiant d’un air mêlant résignation et un peu d’inquiétude, aussi :

« Ma sœur notamment en est une cliente fidèle. Je ne saurait dire combien de fois elle à ramener ces étrangetés à la maison. Bocaux remplis d’éléments diverses, essences de bois rarissimes, ou objets prétendument maudits… Parfois j’ai bon espoir qu’elle soit économe, déjà que nos fonds ne sont pas fantastiques ... »

Il ne put s’empêcher de ponctuer cette réflexion d’un ricanement nerveux, se rappelant notamment de l’acquisition d’un crâne par sa sœur qui avait manqué leur coûter le loyer. Puis il eut le bon coup de se rappeler que ce genre d’histoire pouvait tout aussi bien sembler saugrenu pour la jeune femme qui se promenait avec lui, aussi se secoua-t-il un peu l’esprit pour en sortir ces billevesées, et reprendre peut-être la discussion sur un sujet plus banal. Il se trouvait après tout dans l’un des plus grand axe de la ville, et se baladaient actuellement entre les librairies, les restaurants, mais aussi par endroit quelques autres boutiques des plus intéressantes, allant de l’équipement urbain aux vêtements, en passant parfois par ces drôles de boutiques de confiserie qui faisait le bonheur des collégiens … et des lycéennes, du moins à ce qu’il paraît ? Alors il passa sur la présentation de ces divers lieux avec un ton un peu banal : à droite, il y avait le « Journal de Bord », spécialisée dans les récits de voyage et les romans d’aventure, puis à gauche les voilà qui passaient devant le « American’s Grill », soi-disant le meilleur burger de la ville, du moins si tu avais envie de vendre un rein au bout de deux semaine à cause du prix de leurs assiettes. Et Senestra faisait une rapide description à chaque fois, tenant à ce que la demoiselle puisse ainsi trouver ses repères, mais aussi comprendre plus tard les discussions de leur camarades ainsi que leur éventuelles invitations. Il était finalement digne de lui-même, faisant preuve d’une prévoyance et d’un intérêt sans faille pour Victoria et son intégration à Seïkusu.

Il déblatérait encore sur les environs que le « Bassin des Sables » se profila au bout de la rue, faisant  l’angle d’une petite ruelle étroite s’enfonçant au coeur des bâtisses, semblant plonger au plus profond de la cité. Il fut presque surpris que la bonne dizaine de minutes de marche se soit ainsi effacée sous leurs pas, mais ce n’était pas plus mal, au moins il allait rapidement pouvoir lui permettre de se reposer, loin de la rue et de son effervescence naturelle. Il reprit donc la parole, ce coup-ci de manière un peu moins solennelle, même si la peur de sembler parfois trop familier restait toujours dans un petit coin de son esprit :

« Nous y voilà. Ne vous en faites pas, j’ai les clefs de la boutique, juste qu’il faut qu’on passe par l’arrière. On prends la ruelle et c’est la première porte à droite. »

Passant donc par-devant la devanture, il s’avança en premier dans cette ruelle plongeante, où jamais un brin de soleil ne parvenait à atteindre le dallage misérable sur lequel ils s’avançaient. Première vérification de sa part, il constata rapidement qu’aucune tête patibulaire ne se trouvait cachée dans les ombres de ce passage. Tant mieux, en un sens, il avait croisé une fois un voyou dans ce coin et avait eut bien du mal à le gérer avant que le chef du restaurant ne fasse cas de sa présence. Deuxième observation, il vit au loin que la petite lanterne du « Croissant de Lune » était allumée, provoquant un léger frisson en son for intérieur. Il n’aimait pas cette boutique, cela en était presque maladif, aussi fit-il rapidement le choix de se presser un peu plus, posant son vélo contre le mur avant de tirer les clefs de l’arrière-boutique de sa poche, et de les glisser prestement dans l’épaisse serrure afin de la déverrouiller. Ouvrant la porte dans la foulée, d’un geste vif, il invita sa précieuse compagnie à rentrer :

« En haut des escaliers, tout droit, et nous arriverons aux cuisines. Je vous suis de prêt, juste le temps de ranger le vélo à l’intérieur. »

Il la laissa progresser à l’intérieur, tout sourire, avant de récupérer son précieux destrier et de l’installer dans l’entrée arrière. Verrouiller la porte, de manière à ce que personne d’autre ne rentre, était aussi nécessaire, et il allait perdre un peu de temps, même s’il allait rapidement la rejoindre. Toutefois… il ne se doutait pas qu’une autre petite chose s’était invitée avec eux, tandis qu’il s’occupait de cela.

Car tandis que la jeune femme progresse dans la bâtisse, monte les escaliers et passe le couloir menant directement aux cuisines, le petit Scruteur s’était retrouvé face à un dilemme : suivre les voies de sa maîtresse et rester suffisamment au loin, mais les perdre de vue, ou à l’inverse les garder à l’oeil quitte à risquer d’être repéré. Et finalement…. Ce fut son premier ordre qui prima : Passant au-dessus de la tête de Senestra, complètement aveugle à ce genre de présence, la petite chose suit à la trace l’existence de Victoria, volette par dessus les vieilles marches de bois, puis rase le plafond pour garder toujours sa cible dans sa ligne de mire. Très clairement, sa simple présence, ainsi que sa scrutation, ne devait pas donner aux lieux un air agréable, et même, au contraire, pouvait laisser stagner dans l’air une ambiance assez malsaine. Une fois en cuisine, il évita la lumière blanche qui l’éblouissait, et préféra aller se blottir dans un coin de la pièce, entre le mur et le réfrigérateur. Enfin, de cette position, il pouvait la voir. Une humaine, s’était alléchant. Mais malheureusement, il n’avait pas le droit de lui faire quoi que ce soit, ordre de Dextra. Il obéissait donc juste et vit entrer dans cet horrible endroit trop lumineux le frère de sa maîtresse, apparemment tout sourire, qui ne tarda pas de reprendre un propos simple tandis qu’il s’approchait de l’évier :

« Bienvenue là où je travaille. Donc, un grand verre d’eau et un cachet pour la tête, c’est cela ? Puis je vous propose que nous nous installions en salle, ce sera plus confortable que de rester debout ici. »

10
Eut-il même imaginé que ses explications touristique aurait eut un tel effet sur sa camarade ? Pas le moins du monde. Honnêtement il avait simplement l’impression de lui faire une démonstration un peu vague et simplette de la cité, le genre qui a plus tendance à faire roupiller les petit vieux au fond du car touristique plutôt que de les tenir en alerte. Mais loin de là, il manqua plutôt sursauter à l’instant où la belle jeune femme qui faisait palpiter son coeur lui sauta au bras, les yeux remplis de toutes les étoiles occupant le firmament. Point de mensonges ici, point de faux-semblant, ce qui fit que l’innocent jeune homme, pourtant peu au fait des cachotteries de Victoria, ne manqua pas de la trouver rayonnante, quelques milliers de fois plus charmante qu’elle ne l’était normalement. Grand dieu que cette vision s’imprima dans sa rétine, dans son esprit, dans son palpitant, image aussi soudaine et surprenante qu’elle était imprévue. Bien sûr, le flottement qui s’ensuivit cessa rapidement, le laissant perturbé par ce rapprochement, et le feu qui embrasa ses joues aurait put provenir des plus grand bûcher qu’il n’aurait pas eut aussi chaud qu’en ce moment divin qu’elle venait de lui offrir ! Malheureusement, toutes les bonnes choses ont une fin, tant et si bien qu’il remarqua la surprise sur le visage de cette dulcinée à laquelle il n’avait put avouer ses sentiments, l’amenant aussitôt à rompre le contact qu’elle avait produit dans son empressement tout naturel. De nouveau éloigné de cette passion qui l’enflamme, il ne put que se rendre compte de l’état honnête d’émoi dans lequel il se trouvait, et détourna immédiatement la tête, espérant qu’elle ne puisse lire en ses traits l’aveu de son amour.

« Enfin je veux dire ... votre ville à l'air d'avoir une histoire passionnante. »

Elle lui offrit le terrain pour poursuivre son propos, par considération ou pitié, si bien qu’il embraya immédiatement sur la suite de ses explications sans faire mention de ce qu’il venait de se passer. Mais quel andouille. De telles réactions de sa part ne sauraient que le plomber, encore plus que la belle étrangère à ses côtés était très loin d’être sotte, il en avait conscience, et à moins d’être parfaitement hermétique aux affaires du coeur, il n’allait pas lui falloir moins d’une demi-seconde pour remarquer son intérêt. Seigneur, qu’il détestait être aussi honnête malgré lui. Noyant donc cet émoi qui se trouvait sur ses traits sous un flot d’informations, il poursuivit non seulement son détail assez global des lieux avant d’enquiller sur le plus important afin de se dissimuler : Une courte mais savante question envers Victoria. Bon, il avait encore une fois loupé une occasion de se taire, vu qu’il eut le malheur de l’appeler par un terme qui laissait entendre une forme d’intérêt, même si mineure par rapport à l’échelle de ses sentiment pour elle, mais ce fut assez pour qu’il s’en veuille un peu plus. Franchement, il ferait mieux de ne plus dire un mot et de répondre automatiquement à la belle demoiselle, au moins arrêterait-il de se tirer une balle dans le pied à chaque fois qu’il osait ouvrir la bouche. Toutefois, osant tourner de nouveau son visage en direction de Victoria, pensant que la roseur sur ses joues pouvait être prise comme une forme de réaction naturelle à la chaleur de la journée, il fut cueilli par le plus étincelant des sourires. Miss Campbell, sincèrement… Vous ne l’aidez pas !

« J'avais envie ... de m'éloigner du carcan familial. Je viens d'une famille pleine de préjugés et de traditions. J'ai besoin de voler par moi-même et faire mes propres découvertes.  Découvrir de nouvelles choses n'est il pas merveilleux ? Le Japon est un pays si atypique.
- Je … Je peux comprendre, parfaitement même. Enfin, la question des parents est toujours un peu compliquée, j’imagine, cela dépends les rapports que l’on a avec... »

Ah, au moins la réponse qu’elle venait de lui donner l’avait calmé. Senestra avait un réel problème avec ses parents. Exactement, avec son père, une vision relationnelle que partageait sa sœur aînée, Dextra. C’est ce qui les avait mené, très rapidement, à fuir sa personne, et à emménager l’un et l’autre dans leur propre logis, loin de ce paternel dont la présence était largement plus toxique que celle de qui que ce soit d’autre. Et quant on voyait comment les deux frère et sœur s’entendaient, cela laissait entendre un peu la difficulté que devait être la vie avec leur parent masculin ! Enfin, le fait de penser à lui eut au moins le bon résultat de lui provoquer une belle douche froide, le ramenant du septième ciel où il voletait depuis quelques minutes pour le ramener sur terre. Merci Victoria, vous avez eut le don de le rappeler à sa bonne place, si bien que la petite taquinerie qu’elle lui lança par après n’eut pas la possibilité de le déstabiliser. Au contraire, il put même répondre avec le même ton, jouant un peu sur le même ring que la fantastique demoiselle à ses côtés, tandis qu’ils traversaient la place en direction des quartiers marchands :

« Dites-moi Senestra, c'est pour essayer de me faire peur que vous me parlez de tout ces dangers ... ?
- Oh non, je serais idiot de vous effrayer, vous ne pensez pas ? Alors que j’ai la possibilité d’être un bon camarade de classe et de vous présenter un peu les lieux intéressant de la ville à portée de marche. »

Il lui offrit un sourire délicat, maîtrisé, prouvant toute sa bonne foi en cet instant. Il prolongea d’ailleurs son propos en posant son vélo sur le bord d’un banc, ne se détournant de la jeune femme qu’un court instant, voulant avoir la possibilité d’user de ses deux mains pour lui expliquer un peu les choix qui s’offraient à eux. Pourtant, aussi étrange cela fut pour lui, quand il retrouva le regard de la demoiselle, il semblait… assombri. Il s’était détourné d’elle alors qu’elle était rayonnante, revenait en face d’elle alors qu’une forme de méfiance semblait s’être installé sur son visage, ce qui ne manqua pas de le surprendre. Cela ne dura qu’un instant avant qu’elle ne semble tiquer, reprenant rapidement des traits moins dur, ce qui manqua de faire douter le lycéen, celui-ci s’imaginant avoir put imaginer le changement de comportement. Mais cela ne semblait pas être le cas, il y avait … quelque-chose de faux désormais dans la joie de sa compagne de l’après-midi. Une ombre couvait sur ses traits … Aussi s’approcha-t-il et s’exprima-t-il à voix basse, de manière à expliciter son observation sans sembler intrusif, et surtout en cherchant une forme de discrétion :

« Il se passe quelque-chose ? Désolé si je n’ai pas remarqué ou dis quelque-chose de mal. L’on peut prendre le chemin de la bibliothèque en prenant cette rue, tandis que si nous descendons celle-ci, nous pouvons aller en direction du restaurant où je bosse. Dans les deux cas, nous pourrions avoir un lieu calme où vous pourriez vous sentir plus à l’aise ? »

Alerté, il cherchait une solution pour que cette personne chère à son coeur puisse laisser derrière elle ses soucis. Sans se douter de la provenance des quelques ennuis qui venaient d’assombrir les traits angélique de Victoria Campbell. Ce qu’une autre personne qu’il connaissait bien ne manqua pas, elle, de remarquer.

*
*   *

Même si ce n’était qu’un court instant, il était évident que cette traînée l’avait aperçue. Pourtant Dextra avait fait tout ce qu’elle pouvait pour que son petit observateur ne puisse être perceptible. Voletant à quelques mètres du couple, le Scruteur démoniaque qu’elle avait appelé était resté docile, n’avait fait aucune action qui n’aurait put le vendre au yeux d’une humaine normale, et pourtant… Alors qu’elle observait cette salope aux cheveux platine faire les yeux doux à son frère, elle n’avait pas put s’empêcher de remarquer qu’elle avait, un court instant, détournée le regard en sa direction, ou plutôt en celle de son familier invoqué à l’occasion. Qu’elle s’en soit rendue compte, qu’elle ait identifiée la source de son inconfort désormais visible, était hautement improbable, mais il fallait que Dextra le souligne : Elle en avait été capable. Et ça la gênait d’autant plus. Raaaaaah alors cette petite catin essayait non seulement de lui voler son frère, mais en plus elle avait le malheur d’être sensible aux forces occultes ? Scandale ! Ignominie ! Horreur que cela ! Non, jamais, jamais elle ne permettrait à qui que ce soit de s’approcher ainsi de son frère, de chercher à le confondre et à l’éloigner de sa sainte et saine présence. Surtout qu’elle les voyait minauder, ces deux petits idiots, au travers du Scruteur. Elle avait même osée lui sauter dessus. Petite truie sans âme, elle comptait bien lui faire payer. Mais d’abord, elle allait devoir faire un minimum d’effort pour ne pas plus éveiller les soupçons de cette « sensible » au monde occulte. Aussi, Dextra posa délicatement ses doigts sur le bol rempli d’eau clair qu’elle avait utilisé pour appeler le familier et voir au travers de son œil unique, puis elle prononça ses ordres :

« Éloigne-toi. Continue d’observer de plus loin. Et conserve ton camouflage, personne ne doit te voir. »

Invisible de nature, les Scruteurs étaient bien obligés de conserver cette capacité active afin de se déplacer dans le monde humain. Après tout, une petite orbe volante munie d’un œil et de petites ailes de chauves-souris aurait tôt fait d’attirer bien trop l’attention. Obéissante toutefois, elle s’écarta rapidement du couple, avant de prendre de la hauteur, afin de maintenir un bon trente mètre de distance, tout en ne les perdant jamais de vue. De loin, ils semblaient être collé l’un à l’autre… Et cela ne manqua pas de faire crisser les dents de l’aînée aux cheveux verts. Dextra ne savait pas encore comment elle allait s’assurer que cette dévergondée ne s’approche plus jamais de son frère, mais les idées fourmillaient en son esprit comme autant de papillons se jetant à corps perdus sur une lumière trop vive la nuit. Tant qu’ils étaient ensemble, elle ne pouvait se permettre de les perdre de vue… Mais dès lors qu’ils seront séparés, elle allait entamer un petit rituel de son crû, d’un genre suffisamment cruel pour s’assurer que cette traînée d’étrangère retienne parfaitement la leçon qu’elle allait lui enseigner, sans pour autant mettre sa vie en danger. Après tout, la passionnée d’occulte n’était pas non plus un monstre, une fracture ou un traumatisme suffirait, pas besoin d’aller jusqu’à la mort ou la folie. Elle se devait juste de protéger son frère de cette démone aux allures de tentatrice sordide et malveillante.

Oui, juste cela… et elle comptait bien le lui apprendre, qu’une seule femme pouvait se tenir auprès de Senestra. Et que ce n’était clairement pas elle !

11
« C'est entendu. »

Ces doux mots, du moins le sont-ils à son oreille, lui suffisent amplement pour ranger ses affaires le plus efficacement possible. De toutes manières, le simple fait qu’elle ne l’ait pas envoyer sur les roses, chose qu’il avait pressentie en premier lieux, était déjà suffisant pour lui pousser des ailes. Cupidon des temps modernes, la flèche avait eut le malheur de tomber de son arc pour venir se planter droit dans sa jambe, et avec elle, nourrir les espoirs les plus déraisonnables. Enfin, si cette image ne manqua pas de le faire sourire un peu bêtement, ce ne fut pas pour le ralentir, et le voilà avec son sac sur le dos pour retrouver la magnifique compagnie de Victoria. Elle-même n’a pas quittée sa place pour l’instant, aussi s’approche-t-il en toute confiance, et se retrouve immédiatement cueilli par un petit geste simple, une mèche replacée derrière l’oreille, un instant de féminité qui ne manque pas de le troubler. Dieu qu’elle est jolie. Vraiment, elle est … Enfin, il n’est sûrement pas le plus objectif au vu de son état de coeur, mais ce simple mouvement possède une grâce à ses yeux qui le mette en un plein émoi. Certains de ses amis se moqueraient bien de lui, jeune homme si innocent et transparent dans ses intentions, mais par la plus grande des chances ils ont déjà tous quittés la pièce, le lançant seule avec sa première victoire, celui d’avoir réussi à organiser une balade avec la demoiselle. Par ailleurs, suite à son terrible geste, elle lui réponds avec délicatesse, tant et si bien qu’il reste coi, pendu à ses lèvres le temps qu’elle ait fini :

« Je ne connais pas vraiment le lycée et encore moins la ville. Mais je suis curieuse de tout découvrir. Alors ... nous pouvons considérer que je vous laisse carte blanche ... ?
- T-t-très bien. Oui, je … Hum, je crois que rester au lycée alors que des cours ont encore lieu n’est pas la meilleure des idées. On a toutes les chances de déranger, et les professeurs apprécient peu ceux qui traînent trop longtemps dans les couloirs. Du coup … Eh bien commençons par nous diriger vers la sortie, je crois avoir mon idée. »

Bon, plus le temps passait, et plus il parvenait à reprendre le contrôle de ses émotions. L’amour rend sot, c’est un fait, mais si il ne voulait pas passer définitivement pour le roi des abrutis, il était temps qu’il cesse de bégayer, et surtout qu’il arrête de se figer à chacune des actions de la demoiselle. En premier lieu, ils quittèrent donc la classe tandis que le jeune homme exprimait avoir son petit avis sur la marche à suivre, et entamèrent de descendre au rez-de-chaussée pour aller récupérer leurs affaires dans leurs casiers respectifs. Rien de bien long, mais bon, les chausses de l’école étant destinées à ne pas quitter l’enceinte de l’établissement, ils n’allaient pas non plus partir avec. Et très sincèrement, le jeune homme préférait avoir ses baskets au pied pour aller travailler que les petits souliers proprets du lycée. Enfin, une fois qu’ils eurent fait cet arrêt, les voilà en train de se diriger vers le dehors, traversant la cour d’entrée. Lui récupère son fidèle destrier, un vélo qui n’a guère bonne mine, mais qu’il entretient suffisamment pour qu’il fonctionne parfaitement. Certain se permettraient de dire qu’il s’agit d’un énième exemple de sa situation précaire, lui affirmerait qu’il s’agit d’un juste comportement : on ne se permet pas d’abandonner un outil qui nous sert bien et n’a encore jamais montré de signes de faiblesse. Enfin, les deux sortent de l’établissement, et faisant signe à Victoria de le suivre, tandis que son coeur bat à tout rompre dans sa poitrine à la simple idée qu’il passe du temps avec elle hors des cours, ils s’engagent dans une rue voisine de la grille d’entrée du lycée pour prendre le chemin du centre actif de Seïkusu, le quartier commerçant.

Il ne fallut alors qu’une dizaine de pas pour que la jeune femme à ses côtés ne s’exprime :

« Vous avez évoqué un travail. Qu'est-ce qui occupe votre temps, Senestra ?
- Oh euh… Oui effectivement Victoria. Je travaille dans un restaurant. Ma famille n’a jamais été très fortunée, et mes parents … Disons qu’ils ne sont guère présents. Aussi pour assurer à ma sœur et moi-même de vivre sans que ce ne soit une galère pour manger, je me suis mis à la recherche d’un boulot. »

Son vélo d’un côté, la jeune femme de l’autre, il trouvait l’ambiance assez posée, relativement conviviale. C’était étrange de le remarquer, quand il se disait un peu plus tôt qu’elle était à la limite de l’ignorer… Sûrement avait-il imaginé cela, dans son habituelle dépréciation de lui-même et de sa capacité à plaire à autrui. Ce ne fut pas pour autant qu’il ne se félicitait pas d’avoir eut l’intelligence de prendre son vélo ce matin. Devoir tenir le guidon alors qu’il marchait le forçait à accepter qu’il ne pouvait tendre la main pour toucher la sienne, chose qui aurait assurément mal finie. Il était là pour la guider, par pour tenter un geste aussi évident et mal-venu envers une personne avec laquelle on commence tout juste à échanger. Et pourtant cette petite main fine, il n’aurait qu’un désir, pouvoir la glisser dans la sienne, lui offrir une étreinte simple, doigts entre-lacés dans une promesse muette. Ooooooh bon dieu, stop, il ne devait pas penser à ça ! Ce genre de petit film qu’il se faisait à l’esprit, voilà bien la pire des choses qu’il pourrait faire. Non seulement il se baignait dans quelques illusions qui ne sauraient lui offrir satisfaction, il nourrissait aussi des espoirs incongrus, ce genre même de désirs qui finissaient souvent par mener à la catastrophe, faut d’un mot maladroit ou d’un aveu un peu trop abrupt. Et il ne savait pas mentir, donc ces images allaient forcément finir à un moment ou un autre sur le bout de sa langue s’il continuait à les nourrir. A la place, il se secoua un peu la tête, tandis qu’ils approchaient des premières boutiques du centre-ville, et reprit son explication avec un calme tout relatif :

« Résultat, je fais mes cours la journée, le soir je travaille de 17h30 à 23h au « Bassin des Sables », où j’officie comme cuisinier et serveur, puis je rentre à la maison et m’occupe du repas et des tâches ménagères. Il est rare que j’ai du temps pour moi... »

Il hésita un court instant sur la fin de sa phrase. Est-ce qu’il se permettait de dire un truc aussi gros, ou est-ce qu’il détournait cela de manière à cacher son message derrière d’autres intentions ? Elle semblait l’écouter religieusement jusqu’ici, donc peut-être pouvait-il se permettre la plus simple et évidente des honnêteté ? Non, franchement, il ne l’assumait pas du tout … Autant cacher un maximum ce qu’il avait sur le coeur, il ne fallait pas qu’il fasse foirer cette sortie alors qu’il n’avait même pas encore passé plus d’une dizaine de minute l’un à côté de l’autre :

« … Du coup je suis plutôt content de l’utiliser aujourd’hui pour être utile. De toute manière, je ne rentre pas chez moi normalement, alors quitte à me trouver en centre-ville, autant que ça vous permette plus tard de vous y retrouver. Oh d’ailleurs. »

Il montra de la main le bout de la rue, où se trouvait visiblement une grande place. Dallée, il se trouvait au centre de celle-ci une statue de bronze à l’effigie du fondateur historique de Seïkusu, dont le visage avait depuis longtemps été abîmé par les intempéries et le temps. Une des grandes curiosité de la ville, qu’il allait s’empresser d’expliquer, de manière à ne pas rester trop longtemps sur son aveu à demi-mot :

« Voici la première place centrale de la ville. Même si il faut l’avouer, elle est maintenant à la périphérie du vraie centre. Ce drôle de bonhomme que vous voyez est, soi-disant, le premier villageois de la ville, à son commencement. Mais allez savoir comment, ni son visage, ni la plaque n’ont réussit à tenir suffisamment pour qu’on puisse l’identifier désormais. Pas mal d’historien du pays se questionne quant à sa réelle existence, et le cas échéant son identité. De certains se permettent les théories les plus farfelues, parlant d’un sorcier, d’où le fait que la ville possède le taux record de disparition au Japon. Malédiction, mauvais sort, pacte ou autre. La ‘‘terrible’’ ville de Seïkusu. »

Il ne sut réellement si cela pourrait intéresser sa jeune compagnie, mais au moins le fait de parler un peu du folklore local et de ses particularités pourrait lui permettre de voir sa réaction, et d’agir en fonction. Peut-être que la belle Victoria pourrait se trouver curieuse des légendes d’un autre pays ? C’est vrai qu’il ne lui avait pas demander pourquoi elle se trouvait ici. Peut-être cela serait trop intrusif d’oser la questionner ? Et en même temps, elle avait été la première à le faire, c’était sûrement là un signe que le jeune homme, tout inquiet qu’il était, pouvait se permettre d’en faire de même ? Toutes ces questions en tête, il ne manqua pas de se la prendre un petit moment, oscillant entre sa curiosité et sa peur de l’échec, mais tandis qu’ils approchaient enfin de la place, il ne put s’empêcher de reprendre encore la parole, ce coup-ci pour oser un rapprochement envers la belle étrangère :

« Dites moi si cela vous gêne Victoria, et je ne me permettrais pas de poser de nouveau une telle question, mais je suis curieux du coup : Qu’est-ce qui vous a amenée à venir étudier à Seïkusu ? Je ne crois pas avoir jamais entendu parler de la ville en bien, aussi je … Eh bien je suis surpris de voir une aussi jolie personne emménager dans le coin pour y faire une partie de sa vie. »

… Attendez, sa langue venait de fourcher là, non ?

12
Tandis qu’il s’approche, qu’il s’apprêtait à s’exprimer, difficile de trouver autre chose en Victoria qu’une certaine forme de désintérêt. Cela ne l’aidait pas, ni à conserver une posture logique, une certaine forme de confiance en soi qui permet aux mots de s’écouler simplement, avec clarté, mais surtout cela laissait entendre dès le départ que sa tentative de rapprochement était vaine. Le fait est qu’il pouvait aussi le comprendre : Non seulement elle n’était pas présente depuis longtemps, ce qui pouvait laisser entendre que l’esprit de camaraderie, d’appartenance à un groupe scolaire n’était pas encore présent, ce qui rendait naturellement les échanges moins cordiaux, mais il fallait aussi prendre en compte que c’était bien la première fois que lui, Senestra, lui adressait la parole. Et comment dire que l’approche d’un étranger complet, dont l’ensemble de la gestuelle et des paroles était, somme toute, assez confus, ne devait pas du tout aider à faire confiance, ou à abaisser les quelques barrières du langage et de la méfiance pour se permettre à un éventuel propos courtois, quel qu’il soit. En tout cas, là, la charmante jeune femme qui le mettait si mal à l’aise à cause de ses propres sentiments ne lui renvoyait guère l’attention qu’il lui portait. Ni signe d’une quelconque gêne, d’un petit brun de surprise, de volonté de le regarder, elle semblait tout à fait indifférente. Forcément, il en désespérait un minimum à mesure qu’il présentait sa proposition de soutien, mais vu qu’il était déjà lancé, il ne pouvait pas vraiment s’arrêter en chemin. Et quand il eut finit son propos, il s’attendait presque à se voir jeter au loin, ou parfaitement ignoré par cette si belle demoiselle. Pourtant …

« Bonjour Senestra. C'est ... vraiment très gentil de me le proposer. »

Euphorie. Du moins en son coeur, car il n’oserait montrer une telle joie naturellement, il manquerait clairement de contrôle et pourrait immédiatement se tirer une balle de pied. Non, il se contient, tout en trouvant dans le sourire de la jeune femme une beauté qu’il n’aurait sût définir avec précision. Elle était … lumineuse ? Radieuse ? Quelque chose du genre, ses pensées étaient en train de partir en tout sens, et il avait ainsi bien du mal à retrouver quelques repères pour ordonner un minimum sa réflexion. Mais elle venait de le remercier ! Alors même qu’il s’attendait à se faire envoyer paître d’un mouvement de main, accompagné de quelques propos d’une humeur exécrable ! Enfin, c’est vrai que le changement physique de la jeune femme avait été assez soudain, mais le simple fait que ce premier contact se déroule finalement de bonnes manière éclipsait toutes formes de méfiances ou de doutes de son esprit. Un simple idiot transi de bonheur, et qui s’apprêtait à tout faire pour que les événements se poursuivent de la meilleure des manières ! Par ailleurs, elle continuait de lui parler, et ainsi le jeune homme se rendait parfaitement attentif, buvant le moindre petit morceau de son verbe avec le plus grand des intérêts :

« Enchantée de vous connaître, Senestra. Vous ... pouvez m'appeler Victoria …
- Eh bien je … enchanté de même Victoria. »

Emporté par la situation, le voilà à jouer les andouilles sans charme. Ce n’était pas tant qu’il ne voulait pas dire bien autre chose, mais vu qu’elle lui avait plus ou moins fauché l’herbe sous le pied, à lui qui s’attendait à un rejet violent, il se retrouvait un peu désarmé, incapable de reprendre le contrôle de la situation. Elle-même s’était un peu abaissée, une timidité surprenante compte tenu du premier désintérêt qu’il avait crû lire sur son visage, mais peut-être devait-il prendre en compte qu’elle venait de faire un grand effort en lui octroyant le droit d’utiliser son prénom ? Bonne question d’ailleurs, mais le jeune homme ne connaissait pas l’origine exacte de la jeune fille, aussi ne connaissait-il pas non plus si, culturellement parlant, Victoria avait vécue dans un milieu où le fait d’autoriser autrui à user de son prénom était une forme particulière d’intimité ou de respect. C’était le cas au Japon, bien sûr, aussi s’en était-il sentit touché, mais il ne pouvait pas non plus omettre de se demander si elle le faisait par pure habitude ou par considération pour les us et coutumes du pays.

En tout cas, le silence se faisait long entre les deux, et il était peut-être temps qu’il se mette un petit coup aux fesses pour reprendre l’échange. Après tout, les deux jeunes gens semblaient avoir trouver un point neutre de communication, aussi se devait-il de … De quoi ? De lui proposer un moyen de l’aider ? C’était ce qu’il avait avancé, et il se questionna un court instant quant à la manière d’avancer ses idées sans qu’elle ne le prenne comme une manière cachée de la charmer. Il ne manquerait plus que ça, qu’en voulant bien faire, il ai l’air de l’attirer à lui pour mieux la confondre et la cueillir. Il sait que certains idiots agissent comme cela, mais ce n’était pas son objectif, il préférait sincèrement lui être utile et … et peut-être trouver le bon moment pour lui exprimer quelques formes d’attentions plus importantes, plus … Eh bien plus sentimentales qu’amicales. Malheureusement, il ouvrit la bouche quand le délégué principal de la classe prit parole à la table du professeur :

« Bon, on est allé demander à l’accueil, puis à l’administration, et visiblement notre prof à du rentrer en urgence pour cause de problème familial. Nous sommes donc libre pour la fin d’après-midi. Pensez juste à quitter calmement le lycée pour ne pas gêner les cours des autres classes. »

Parfait ! Bon dieu, mais tout allait en son sens ! Peut-être que finalement la malédiction qu’il avait connue pendant si longtemps était enfin en train de se lever ? Peut-être qu’il allait finalement pouvoir se montrer sous son meilleur jour auprès d’une jeune femme qui avait attirée son regard et attrapée son coeur ? En tout cas, dans le brouhaha relativement maîtrisé de la salle de cours, où chacun était en train de ranger ses affaires et de déplacer les chaises avec le moins de bruit possible, Senestra se retourna vers la jeune femme et lui adressa un air confiant, avant de nerveusement se passer la main dans les cheveux, lui proposant donc sa toute récente idée :

« Eh bien je crois que c’est parfait. En fait je … Je bosse à partir de 18h30, mais si on sort maintenant, ça nous donne … quoi, trois petites heures devant nous ? Je vais ranger mes affaires, pendant ce temps là, si tu as envie que je te montre le lycée, ou un coin de la ville, réfléchis-y et dis moi ce qui t’intéresse, d’accord ? »

Ponctuant cette proposition de son sourire le plus charmant et honnête, le voilà qui retourne à sa table, côté couloir, et qu’il récupère à la fois son sac et son matériel de classe avant de fusionner les deux dans un certain empressement. Si elle voulait qu’ils fassent le tour du complexe universitaire, ce ne serait pas compliqué, éventuellement le seul problème resterait que nombre de cours sont encore prodigués aux autres classes, ce qui fait qu’ils devraient se déplacer dans le calme le plus absolu. Sinon, ils pouvaient tout simplement quitter les lieux et se diriger vers le coeur de Seïkusu. Cela leur permettrait de faire un joli tour des différentes activités et boutiques des lieux avant de finalement se séparer quand lui partirait travailler. Il se voyait mal l’inviter au restaurant, surtout qu’il sentait venir d’ici les taquineries de son chef. Quoi de mieux en plus pour mettre une jeune femme mal à l’aise, n’est-ce-pas ? Alors que la possibilité de faire le tour de la galerie marchande, de se perdre dans les vieux quartiers médiévaux, lui offrir un petit truc à boire et éventuellement lui parler des quelques points de la ville qui pourrait l’intéresser selon ses centres d’intérêts ça … ça … ça pourrait presque avoir l’aspect d’un rendez-vous galant ? Oh bon dieu il se devait de sortir immédiatement cette image de la tête. C’était clairement le coup à ce qu’il se perde dans ses émotions et finisse par faire une connerie. Le genre de connerie dont on ne se relève pas !

Enfin, une fois toutes ses affaires bien rangée, le voilà qui rabat sa chaise et se retourne pour chercher du regard la jeune femme, puis de s’élancer afin de la rejoindre, prêt à ouïr sa décision et ses objectifs de la fin d’après-midi.

13
Les journées de cours étaient toutes semblables pour le jeune lycéen qu’était Senestra. L’on se lève le matin, on préparer le petit-déjeuner pour deux, puis on part en direction des études après avoir englouti la préparation en moins d’une minute. Finalement, rien de bien étrange pour lui. Après il en avait pour trente petites minutes de vélo, et passait la journée à attendre la fin des cours pour se diriger vers son petit boulot, seule source de revenue constante dans la maisonnée qu’il partageait avec sa sœur, Dextra. Et ainsi les journées se répétaient. De temps à autre, quelques petits événements lui provoquait une agréable surprise, des camarades de classes qui l’invitait à un match amateur dans un des clubs de sports martiaux de la cité ou bien la possibilité d’entrevoir certains de ses professeurs dans le restaurant où il officiait comme serveur et cuisinier. Dans le deuxième cas, on le taquinait sur l’alcool des lieux, bien trop proche des mains d’un mineur, mais il rappelait toujours qu’il était là pour bien faire les choses, non pas pour risquer de perdre sa seule source de revenue. Enfin… Sa vie de tout les jours était calme et il en profitait. L’éventuel point noir au tableau était son évident manque de chance avec la gente féminine. Depuis qu’il était arrivé au lycée, c’était presque comme si on le fuyait. Alors oui, bien sûr, il s’était déjà sentit l’émoi d’une passion amoureuse, mais les concernées, d’abord relativement sensible, s’était très vite retrouvée à le fuir comme la peste, sans jamais ne lui en donner la moindre justification. Dé dépit, depuis lors, il ne se laissait pas vraiment l’occasion d’y songer, jugeant que quelques mauvais esprits devaient lui tourner autour… Ça, ou un mauvais karma.

Mais pourquoi donc ces détails ?

Eh bien depuis peu, quelqu’un avait fait une petite entrée relativement candide dans cette vie paisible qu’il menait. Une personne qui n’avait sûrement pas du tout conscience de l’effet qu’elle produisait sur l’innocent jeune homme, mais qui commençait lentement à grignoter son esprit, à lui faire perdre sa concentration en cours, voire même plus, à occuper ses pensées en des instants où il n’était plus du tout au lycée. Ce dernier point lui avait occasionné une belle brûlure alors qu’il avait maladroitement penché un bac de friture, et s’était ainsi éclaboussé l’huile bouillante sur sa main directrice. Rien de suffisamment grave pour que quelques bandages ne puissent suffire à soigner, mais ce fut l’instant exact où Senestra se mit enfin à comprendre ce qui était en train de se jouer pour lui. Lui qui avait fait une croix sur les amourettes lycéennes, qui s’était bien dignement dit qu’il saurait attendre que les temps soient plus propices à ses amours et son besoin de vivre une relation sereine… Le voilà qu’il y réfléchissait de plus en plus, bien vainement par ailleurs, cherchant auprès de qui il pouvait la meilleure des manières de présenter ces sentiments à celle qui en avait plantée la graine. Ses camarades ? Disons que les quelques-uns dont il avait jugé la maturité suffisante pour lui donner de réels conseils ne semblaient pas plus capable que lui de proposer une solution, ou des indices suffisamment probants. Ses professeurs ou son chef en restaurant ? Même si il s’entendait passablement bien avec eux, il se trouvait aussi bien incapable de parler d’un sujet aussi intime avec eux, non sans parler des taquineries qui pourraient en naître.

Alors un soir, il s’était permit quelques mots auprès de sa sœur, et cela avait sûrement été la pire des initiatives qu’il avait prise. Autour de leur repas, elle s’était immédiatement empourprée, réagissant avec une vivacité qu’il ne lui connaissait que dans ses pires moments :

« COMMENT ÇA : ‘‘si tu étais amoureuse comment tu le lui dirais ?’’ !? Expliques toi !
- Non mais… Rah écoutes ce n’est qu’une supposition, je ne cherches pas à…
- ‘‘Je ne cherches pas aaaaaaa…’’ Tu me prends pour une buse ? Quoi, y’en a une des petites poufs de ta classe qui t’intéresse c’est ça ? Tu veux aller fricoter, peut-être même aller lui pilonner le jabot après les cours, HEIN !?
- Oh c’est bon ! Pas besoin de le prendre comme ça. Oui, oui, c’est vrai … Y’en a une qui me plaît mais … enfin bon, tu me connais, moi et ma chance dans le domaine. J’voulais éviter de tout faire foirer.
- Pfuuuh. Mon petit Sen, rappelle-toi : Tu es un adorable petit ange jeté au milieu d’une fosse au lion. Les gens n’ont que faire de tes bonnes volontés, tant que tu leur sert à quelque-chose. Honnêtement… Je ne crois pas que quiconque est à même de te juger aussi bien que je ne le fait, et pour tout dire, je pense simplement que les minettes de ton âge cherche simplement à se faire labourer leur minou, pas avoir un mignon compagnon de vie qui prend soin d’elles ! Fais moi confiance, c’est voué à l’échec cette histoire.
- … Merci pour tes encouragements.
- De rien, c’est honnête. »

Ce dialogue, maladroit et déplaisant au possible, lui occupa l’esprit pendant plusieurs jours. Par ailleurs, et bien malgré lui, il se rendit compte que sa chère sœur voyait désormais du plus mauvais des oeils la mention d’un de ses camarades, ou membre de sa classe, résultant en grondement sourd et en rejet complet de la discussion si il avait le malheur de le faire. En somme, Senestra se trouvait bien solitaire, avec ses sentiments pour lui rappeler que malgré les termes de sa sœur, il conservait cette petite sensation d’apaisement dès lors que les traits de la demoiselle lui paraissait à nouveau dans ses pensées confuses. Il n’avait pas trop le choix, que ce soit en bien ou en mal, il fallait qu’il parvienne à une solution. Il se devait d’aller quérir une réponse auprès de la jeune femme, même si elle allait peut-être cruellement l’éconduire, le repousser en bloc, peut-être même avoir des mots qui sauront le glacer d’effroi à leur écoute. Le plus honnêtement du monde, il avait osé imaginer la situation où, lors de sa tentative d’approche, il prendrait pour seul et unique retour un cinglant « Non, sûrement pas, tu es qui déjà ? », et cette simple idée lui avait lacéré les entrailles avec cruauté. Mais il faisait l’effort de ne pas se laisser guider par ce pessimisme navrant. Il allait y aller, avec courage, et s’il se devait de perdre pied et de chuter … Eh bien au moins aurait-il prit le temps d’agir en accord avec ce qu’il ressentait, même si cela ne devait pas durer sur un plus long terme. Le lendemain était sa chance … et il allait la prendre !

*
*   *

Dernier cours de la journée … Et il n’avait toujours pas été capable de faire un premier pas vers celle qui occupait ses pensées. Pourtant elle était là, si finement élégante, si calme et posée, avec cette moue un peu boudeuse qu’elle risquait parfois à dévoiler, sûrement par lassitude face aux longueurs de l’après-midi. La nouvelle étudiante était … Finalement très proche de tout ce qui pouvait venir le toucher, l’affecter, le séduire, il en avait conscience, et si une attirance pour elle s’était développée, ce n’était clairement pas un hasard. Sans parler du fait qu’elle semblait bien moins sotte que certaines autres gourgandines qui vivaient leur vie gaiement avec l’argent de papa et maman, ce avec pour seul objectif d’en dépenser le maximum sans jamais réfléchir aux conséquences de leurs actes. Non, effectivement, elle lui semblait … parfaite ? Peut-être trop pour un couillon gentillet comme lui, mais … mais il n’avait pas le choix, il se l’était promis, il devait au moins faire un geste, tenter une approche, quitte… Quitte à avoir le malheur de se faire jeter comme un malpropre. Tout au plus devait-il attendre la fin des cours désormais, une fin qui étrangement semblait se hâter : Le professeur était aux abonnés absents et pas la moindre information quant à ceci ne leur avait été communiqué. Tout le monde était encore dans la salle, dans un brouhaha général, et rien ne semblait pouvoir troubler ce court instant d’euphorie, encore plus après que l’un des élèves avait suggérer de partir d’ici cinq petites minutes si le prof n’arrivait pas.

Mais finalement, n’était-ce pas le genre de situation qu’il attendait ? Après tout, il pouvait aller lui parler dès maintenant, rien ne le surprendrait, personne n’y ferait attention, et au pire … Eh bien l’arrivée du prof le sauvera d’une retraite maladroite après avoir subit un rejet violent ? Quant au meilleur qui puisse survenir, il aurait un peu plus de temps pour discuter avec elle avant de devoir courir au restaurant ? Ce serait juste parfait !

Alors le voilà qui prend une grande inspiration, se redresse en faisant le moins de bruit possible, et commence à s’approcher du point central de la salle de classe, où se trouve la belle ennuyée. Allez, c’était le moment, pas besoin d’avoir l’air stupide, un propos clair, un propos net, et surtout, surtout… Ne pas regarder ses amis, qui auront sûrement les pires comportements du monde si ils l’ont effectivement vu démarrer son opération « première rencontre ». Il s’approche calmement, le bruit des battements de son coeur pulsant au creux de ses oreilles. Grand dieu elle est encore plus jolie de prêt :

« B-Bonjour mademoiselle Campbell. Je.. Hum, je m’appelle Senestra, et je … eh bien je sais que tu n’es pas arrivée depuis longtemps donc je voulais savoir si je pouvais éventuellement t’aider … pendant ou après les cours, afin que tu puisses trouver tes marques au lycée et dans cette nouvelle ville ? »

Il se détestait, ses camarades qui l’avait entendu le détestait aussi. C’était pas une déclaration ça, ni même une demande amicale… Non mais quel crétin !

14
Le coin du chalant / Re : Walk like an egyptian
« le: samedi 06 mars 2021, 16:27:59 »
Up Times 2 :

Suite à la reprise de ce compte des mains d'un bon camarade, j'ai opéré un petit changement d'avatar, simplement pour qu'il soit à mon goût. Ces deux jeunes gens attendent vos attentions, mesdames et messieurs. Et fort est encore à faire quant à leur découverte du monde !

N'hésitez donc pas à leur demander de vous rencontrer ^^ !

15
Plus disponibles / Re : Syria, la fille cachée de Tessia
« le: mardi 05 mai 2015, 10:00:08 »
les images de la forme humaine sont toutes broken !
et l'image de la galerie démoniaque donne l'image de ta préférée ^^

juste pour info

Pages: [1] 2 3 ... 12