Les alentours de la ville / Et puis il y eut un bruit. (PV)
« le: vendredi 28 juin 2013, 20:05:03 »Depuis combien de temps était-elle là, prostrée, le dos appuyé contre un mur qui sentait la peinture moisie ? Je n'ai même pas envie de compter. Respirant bruyamment, les jambes pliées de sorte que ses genoux soient plaqués contre sa poitrine, Sibylle attendait. Elle attendait que ça se calme, dehors. Que les bruits se taisent, que les objets cessent de voler dans sa direction, que les ombres arrêtent de se dessiner au bout des couloirs. Il y a une heure, elle s'était pris un bottin. Bim, dans la nuque. Le coup lui avait fait voir quelques étoiles noires, et elle s'était réfugiée ici. Une chambre, dont le lit gerbait ses plumes, dont les murs étaient griffés. Et la jeune femme ne voulait même pas savoir ce qui était la cause de cette pagaille monstrueuse.
Elle n'avait pas peur, non. Non, pas elle. Pas Sibylle, dont les transes manquaient de la tuer, elle qui avait déjà croisé Cerbère, qui avait tapé la discute à Hadès, qui avait failli crever noyée par Thaumas, juste parce qu'elle avait tiré les cheveux d'une de ses sirènes. Les dieux sont au moins aussi susceptibles que les foutus fantômes qui squattent ici. La jeune femme se releva doucement, la main appuyée contre le mur. Sa tenue ne lui facilitait pas la tâche. Longs cheveux noués en une jolie tresse à peine décoiffée, avec quelques étoiles dorées coincées ici et là, toge banche* propre aux prêtresses, pieds nus ... Disons que ces vêtements n'étaient guère appropriés. Mais elle n'avait pas prévu d'être coincée ici ! La jeune femme avait juste fait l'erreur de suivre un chaton, qui était entré ici. Ses miaulements étaient tellement mignons. Elle soupira. J'en ai marre de me faire avoir. La dernière fois, c'était une jolie fleur qu'elle avait voulu cueillir, chose qui avait offensé une prêtresse d'un rang supérieur au sien, celle-là même qui cultivait ces plantes. Et elle s'était retrouvée enfermée pendant trois jours. Saloperie de châtiment. Elle s'en souvenait encore, tiens. A tâtons, elle sortit de la chambre. S'engagea dans le couloir. S'appuya sur la rambarde. Un escalier menait au premier étage. Elle ne se souvenait même pas l'avoir gravi. Sibylle releva doucement sa toge, histoire de faciliter ses pas. Chaque fois qu'elle se réfugiait dans une pièce, n'importe laquelle, elle avait des mauvaises surprises en en sortant. Comme si une quelconque force venait troubler l'ordre des chambres. La jeune femme pensait être entrée dans une chambre du rez-de-chaussée, lorsque cette ombre noire, au fond du couloir, avait rugie et que, effrayée, elle s'était enfermée. Et voilà qu'elle était maintenant au premier étage.
- Je ne trouve pas ça très drôle !
Osa t'elle crier, levant les yeux vers les cieux.
Inconsciemment, elle espérait qu'on l'ait vu. Ou que quelqu'un ait remarqué son absence. Elle ne saurait même pas dire depuis combien de temps elle errait dans ces lieux abandonnés. Me suis-je endormie ? Le seul réveil qu'elle avait trouvé, dans une des pièces, était en sale état. L'aiguille roulait dans l'autre sens. Chose qui ne l'avait pas beaucoup aidé. Et puis il y eut un bruit. Qui la fit sursauter. La jeune femme n'osait même plus remuer un muscle, tétanisée. C'était quoi, ça ? Encore un de ces esprits noirs, brumeux, qui s'amusaient à la torturer ? Encore un bottin prêt à lui voler dans la gueule ?
- Qui ... Qui est là, dites ?
Et c'est à cet instant précis, oui, celui-là, juste après qu'elle ait parlé, que toutes les portes s'ouvrirent. Toutes. En haut, en bas, à droite, à gauche. Et elles se refermèrent toutes immédiatement, dans un claquement brutal. Sibylle se jeta au sol, main sur les oreilles, couinant comme un animal blessé.
Ces saloperies de spectres allaient avoir ses nerfs.
* Ouais, Charmed, comme référence, je sais, je sais ...