Centre-ville de Seikusu / Re : Drag me to Hell [Emilia Deneville]
« le: mercredi 21 février 2018, 10:54:27 »Je pris une grande inspiration et patientai quelques secondes, le temps de trouver mes mots. Pendant ce temps, je refermai la grande armoire murale et me retournai pour faire face à mon amante. Je plongeai mon regard dans le sien, tout en m'approchant, et posai un genou au sol une fois devant elle. Je me saisis de l'une de ses mains que je serrai alors fermement entre les miennes, toujours sans la lâcher du regard.
– C'est effrayant de mourir, Desmina. Je t'avoue que cette clause est sans doute celle qui m'enchante le moins. Mais c'est tout aussi effrayant de faire face à la dure réalité de la vie sans pouvoir y faire quoi que ce soit.
J'y crois pas. Personne n'avait eu droit à ce genre de morales de ma part, absolument personne. Non seulement je n'aimais pas me confier ainsi mais j'estimais également que personne n'en avait jamais valu la peine. Comme quoi les choses changent, les gens aussi. Ils font des rencontres qui bouleversent leur quotidien. Serait-ce mon tour ? Je ne le savais pas vraiment. En tout cas, la simple utilisation de ces mots alignés de telle sorte me rappela immédiatement tout ce que j'avais pu subir. Je n'étais certainement pas la personne la plus malheureuse du monde mais j'estimai au moins avoir du vécu dans le domaine. Entre mes échecs scolaires, ma vie dans la rue et le fait que mon connard d'ex ait failli me tuer au beau milieu d'un viol, je me pensais comme expérimentée en terme d'effroi et de difficulté. Quelques années plus tôt, j'aurais sans doute pleuré à la simple idée d'évoquer mon passé. Heureusement pour moi, ces épreuves m'ont en quelques sortes endurcie, et c'est notamment ce qui me permit d'encaisser la réalité que me décrivit Desmina avec tant de calme apparent. Pourtant, j'étais humaine. La démone devait être en mesure de ressentir mon hésitation ; autant que je ne me mente pas à moi-même.
– Quant à cette sorte de compétition malsaine qui pourrait me détruire, c'est la chose que je crains le moins. Tu sais, elles sont beaucoup, les pimbêches qui me jalousent et tentent de me faire les pires crasses pour prendre ma place. Ce ne sont pas des créatures infernales assoiffées de pouvoir, je suis d'accord, mais elles ont au moins le mérite de m'avoir habituée à cette ambiance nocive.
Il ne fait aucun doute que je cherchais à relativiser. J'en avais bien besoin, mieux vaut ne pas le cacher. Cependant, je devais prendre une décision. Là, ce n'était vraisemblablement pas du même acabit que choisir une tenue pour plaire à une personne particulière, ça non ! Ce choix pouvait ne rien changer à ma vie ou, au contraire, la faire basculer de façon irréversible. Je déglutis une nouvelle fois, n'ayant certainement pas l'habitude de devoir faire face à un tel dilemme. D'un côté, je voulais goûter à l'éternité en compagnie de Desmina, je voulais devenir quelque chose que je n'étais pas et qui me fascinait. De l'autre, j'avais toujours aussi peur, en particulier de la mort. J'aurais presque préféré ne pas connaître cet aspect, pour ne pas hésiter ainsi sur quelque chose que je désirais.
Une nouvelle fois, je pris une grande inspiration et soufflai longuement. Je me redressai quelque peu, prenant un appui fébrile sur les jambes de la démone pour me rehausser. Et finalement, j'osai afficher ma faiblesse pour la première fois en m'élançant et me jetant littéralement contre mon amante, cherchant du réconfort en son sein. Je la fis doucement basculer sur le lit, me posai doucement sur elle et calai ma tête entre l'une de ses épaules et son cou.
– Est-ce que tu peux me promettre... que tu feras tout ce qui est en ton pouvoir pour que j'aie une mort immédiate et quasiment indolore ?
Dit comme ça, cela aurait pu paraître morbide. Néanmoins, j'avais besoin de l'entendre pour me décider, j'avais besoin de réconfort pour faire face à la chose qui effrayait le plus les humains. Je trouvais tout de même ça ironique ; la personne avec laquelle je voulais paraître la plus forte possible était également celle qui, d'une certaine manière, venait de parvenir à me faire me révéler sous mon véritable jour.
– Mieux encore, c'est une des choses que je vais te demander de réaliser pour moi, en plus de rester avec moi quoi qu'il arrive. C'est évident, je veux être avec toi.