Le Grand Jeu - Forum RPG Hentai

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Messages - Quatre Sous

Pages: [1]
1
Merci, vraiment =^^=

2
Le coin du chalant / A tale of blood and sand
« le: vendredi 13 février 2015, 19:02:22 »
Bonjour / bonsoir !

Fraîchement validée, je cherche bien évidemment à RP ! Pour le moment, je ne cherche qu'UN unique jeu dont l'avancement me permettra de prendre, par la suite, d'autres RP. Ce RP d'intro étant un élément-clé de mon personnage, j'ai quelques obligations et demandes.

• Un scénario de départ assez imposé (vu les conditions de vie actuelles du personnage, simplement)
• Un rythme d'au moins une réponse /semaine (on est pas aux pièces non plus, ceci dit, mais plus long... c'est moins bon)
• Un RP duquel vous pouvez quasiment exclure d'office le hentaï avec Quatre Sous, que vous soyez homme ou femme (à moins de la violer, chose que je n'ai pas envie de jouer, le cul pour le cul ne m'intéressant nullement)
• Un effort minimum d'initiative dans le jeu (je vous propose une trame de départ, certes, mais surprenez moi durant le RP en mettant votre patte ! :))

Si vous vous sentez assez motivé(e) après ces petits points, voici ce que je propose (et qui peut s'adapter, viens cousin on discute)  :

Quatre Sous est devenue championne des gladiatrices du Sultanat des Sables Blancs en arrachant le titre de Chienne de Sang des mains d'une autre gladiatrice. Elle est donc devenue du jour au lendemain une marchandise prisée, qui est éprise de liberté est de vengeance. Qui que vous soyez (une adversaire potentielle, un acheteur en puissance et j'en passe), vous allez plus ou moins directement contribuer à sa libération... Qui ne se fera sûrement pas sans accrocs.


Passez par ce même sujet ou ma boîte à MP, je vous attends ! :)

3
Comme on dit, la taille ne compte pas. Je souhaite juste que le récit (et le  personnage) soient plaisants :)

Merci, une fois encore  :D

4
Merci à tous pour vos messages de bienvenue ! :) :) :)

5
Oh, tu as tout lu ? Je suis contente que cela t'ai plu !

Il me reste quelques petites choses à rajouter pour le confort de lecture, mais la fiche est complète en soi. Merci de l’accueil !

6


- Entrailles de l'arène -
Quelques minutes après le Repas

Quatre Sous avançait dans le corridor sablonneux éclairé par des torches, reniflant l'odeur de sang séché, de pisse et de mort qui régnait là. Les esclaves dévolus à l'entretien du lieu et à l'évacuation des cadavres de gladiatrices tombées au combat arrêtèrent une seconde leur tâche pour la regarder passer sans lui oser lui adresser la parole, à l'instar des gardes qui la suivaient du regard tandis qu'elle déposait bouclier et gladius sur le râtelier prévu à cet effet. Elle passa une arche de pierre pour pénétrer dans la suite de l'aile dans laquelle elle se trouvait et un tonnerre de vivas fit trembler les murs. La réaction inattendue des gladiatrices parquées dans les cellules dans l'attente de leurs propres matchs ne fut pas sans surprendre Quatre Sous, qui marqua un temps d'arrêt et son étonnement. Jamais ses "soeurs" ne l'avaient reconnue ou seulement considérée mais là, c'était tout le contraire. Avoir terrassé celle qui passait pour être la plus redoutable d'entre elles toutes était un exploit en soi, surtout que la prétendante avait livré un combat superbe. Sa victoire éclatante, elle l'avait arrachée dans la sueur et le sang et cela, les gladiateurs le reconnaissaient tous. Même les filles du ludus de Lothia Al-Akir, qui la dénigraient tant, lui offraient aujourd'hui une ovation rugissante.
Fidèle à ses habitudes, Quatre Sous n'entreprit même pas de répondre et continua sa route indifféremment, avant de finalement s'arrêter à mi-chemin pour lever le poing dans un rugissement victorieux qui fut amplifié par celui des gladiatrices. Des félicitations fusèrent, ainsi que des promesses de défi. Quatre Sous n'y répondit pas mais se dirigea vers Thetys, elle aussi victorieuse. D'un affrontement plus anodin, mais au moins avait-elle survécu. Les deux femmes se serrèrent fraternellement les avant-bras.

- J'ai parié tout mon argent sur ta victoire, Quatre ! Je savais que tu ne tomberai pas aujourd'hui !
- Alors achète ta liberté, ma soeur. C'est mon cadeau pour ton amitié.
- Je t'attendrai dehors, Quatre ! Tu entends ? J'attendrais !

La nouvelle Chienne de Sang lui répondit par un sourire avant d'être contrainte -presque poliment- par un garde de s'écarter des grilles. Elle obtempéra, pour tomber nez-à-nez avec une Lothia resplendissante et gonflée d'orgueuil qui lui asséna une tape flatteuse sur l'épaule pour la saluer. Le premier geste de considération qu'elle n'eut jamais pour celle qu'elle considérait jusqu'à aujourd'hui que comme un poids dont elle devait expréssément se débarasser. La domina entraîna la gladiatrice avec elle, écartant même ses esclaves personnelles pour lui laisser la possibilité de marcher à ses côtés. Un insigne honneur, si il en était. Quatre n'y prêta aucune attention.

- Tu as créé la surprise, Moins-qu'une-putain ! Oh, mais je dois t'appeler Chienne de Sang, à présent ! Tu as idée de l'honneur que tu fais retomber sur moi et ma maison ? Après cette victoire, tout le sultanat voudra faire combattre les filles du ludus de Lothia ! Ma fortune est assurée, championne. Et ce grâce à toi ! Selon la tradition, je te dois une faveur. Alors que veux tu ? Une femme ? Un homme ? Du vin, un festin ?
- La liberté.
- Ce n'est pas dans mes intentions, ma poule aux oeufs d'or.
- Alors je veux que vous fixiez un prix pour qu'on puisse l'acheter. Un prix immuable, voilà ce que je veux.
- Soit... Une montagne d'or sera un tarif suffisant, dans ce cas. Lothia afficha un sourire puant d'avidité. En attendant que cette fortune ne tombe du ciel, tu combattras pour moi.

La championne se contenta de sourire. Les gladiatrices percevaient toujours une somme de leurs victoires, dont elles pouvaient disposer à loisir. Elle combattrait tant qu'elle réunirait vite la somme qui lui permettrait de conquérir sa chère liberté. De là, rien n'empêcherait plus sa marche vers le Reinschafft et Raggenrave afin qu'elle se livre à une extermination pure et simple de celles qui avaient prit possession de la région et de la citadelle de ses ancêtres. Et, lorsqu'elle aurait crucifié Hégéria et ses chiennes, elle retournerait ciel et terre pour détruire également son maître, ce mystérieux Roi Cramoisi.

Et personne, absolument personne, ne pourrait l'arrêter.



- ANTAGONISTES

HEGERIA DE VALT
La grande prêtresse du culte de l'Araignée représente l'origine de tous les malheurs de Quatre Sous. Sous le couvert d'offrir la paix religieuse dans la région disputée du Reinschafft, Hégéria a approché la famille Macragge et l'a décimée au cours d'un banquet donné en son honneur. Très puissante sorcière, elle répond à un seul maître, le Roi Cramoisi. C'est aujourd'hui elle qui règne sur le Reinschafft et Raggenrave, la citadelle des Macragge. La région entière est sous son contrôle.

LYDISS
Cette nécromancienne particulièrement douée est le bras droit d'Hégéria et son élève. Elle parle peu et se consacre à l'étude des arts dominant la mort. Elle est à l'origine de la création du Roi Squelette depuis le corps du père de Quatre Sous. On sait peut de choses sur elle, si ce n'est que sa foi dans le Roi Cramoisi est aussi intense que celle d'Hégéria et confine au fanatisme.

CARTHAGAENA
La redoutable elfe sombre était une mercenaire qui s'est vite attachée au culte de l'Araignée ainsi qu'à Hégéria, qu'elle n'a pas tardé à reconnaître comme sa maîtresse. Incapable de maîtriser les magies qui bercent la foi tordu de ses soeurs cultiste, Cartha se montre toutefois une adversaire coriace grâce à sa vitesse et son habileté diabolique à l'épée. Préférant le silence aux longs discours, elle agit dans l'ombre et apprécie d'infliger la douleur.

AELIN MACRAGGE
Soeur de Quatre Sous et héritière légitime de Raggenrave et des droits seigneuriaux sur la région du Reinschafft, Aelin était une enfant naïve vite tombée sous le charme de la charismatique Hégéria, au point de tolérer l'extermination de sa propre maison. Par amour pour son frère Kay, elle a toutefois demandé qu'il soit laissé en vie. C'est indirectement elle qui l'a fait transformer en femme par cette action, créant Quatre Sous. Cinq ans après, Aelin n'a plus rien de l'enfant innocente que Kay connaissait. Son amour va à présent à Hégéria et Lydiss qu'elle considère comme ses soeurs et a sombré dans une folie qui pourrait croître en même temps que ses pouvoirs magiques.


LOTHIA AL-AKIR
Lanniste en pleine émergence du sultanat des Sables Blancs, Lothia s'est lancé dans la gladiature pour avoir de belles combattantes sous ses ordres afin d'assouvir de simples caprices sexuels. Finalement, elle s'est prise de passion pour cette lucrative affaire et tend à devenir l'une des lannistes les plus en vue du sultanat. Maîtresse dure et brutale souvent prise de coups de colère la poussant à faire un usage conséquent du fouet, elle brûle de se hisser au plus haut rang social grâce à ses filles. Curieusement, elle n'est pas ingrate et sait récompenser leurs mérites. Elle est l'actuelle propriétaire de Quatre Sous, qu'elle n'est prête à céder qu'en échange d'une montagne d'or.

7

Dans les gradins, l'excitation de la foule était palpable. La chaleur accablante échauffait les corps et les esprits, faisant trépigner les spectateurs sur leurs bancs de bois répartis montés en escaliers dans les tribunes circulaires. Leurs yeux étaient rivés sur le centre, sur le sable gorgé de sang. Là se trouvaient des corps inanimés qu'on avait pas encore daigné dégager pour les laisser pourrir sous la chaleur et la hardiesse des quelques vautours qui osaient s'aventurer jusqu'à eux entre la fureur de deux joutes. Les armes abandonnées par les morts gisaient plantées dans le sable ou allongées à côté de leur malheureux propriétaire comme de sinistres et éphémères pierres tombales, reflétant violemment les rayons de l'astre du jour.
Le colisée des Dunes Traîtresses était secoué depuis le début de la matinée par la barbarie des affrontements entre gladiateurs, qu'ils aient eu à combattre leurs semblables ou encore des bêtes féroces venues des diverses régions de Terra et ce pour le simple plaisir de spectateurs rugissant leur soif de sang et de violence. Il était à présent midi, comme en attestait le zénith du soleil. Tous savaient ce que cela signifiait : le temps du Repas était enfin venu. La championne de l'arène allait se repaître de l'inexpérience d'une novice, la massacrant lentement pour le seul plaisir de la plèbe hurlante. Au final, la championne exhiberait la tête de son opposante sur une pique qui serait placée au centre de l'arène, afin que tous puissent avoir sous les yeux  un édifiant exemple sur le sort des faibles.

L'annonceur posté sur la tribune d'honneur fit sonner les trompettes afin de réclamer un silence qui peina à arriver avant de s'installer pour de bon, ce qui lui permit d'annoncer avec une ferveur détonnante l'arrivée de la championne en titre sur le sable de l'arène, à grand renfort de larges et théâtraux gestes de bras.

"Elle n'est pas née en s'extirpant de la chatte crasseuse de sa putain de mère, mais en lui déchirant le ventre ! Ashnard  l'a vomie de ses armées car elle était trop brutale pour les légions même de Mordret ! Cette arène est la seule enclave qui lui permette d'exprimer la fureur qui lui fait bouillir les tripes et qui réclame sans cesse une quantité de sang plus grande ! Accueillez Xarkara, LA CHIENNE DE SANG !"

D'un geste de main, l'annonceur désigna les lourdes grilles de fer forgé qui s'ouvrirent sur un terriblement grincement, les ténèbres épaisses qu'elle renfermait laissant passer au pas de course la silhouette élancée d'une guerrière au visage masqué derrière un voile de cuir simple. Une clameur d'extase fit rugir les tribunes, suivi rapidement d'une seconde lorsque Xarkara leva vers le ciel sa vieille lame en dents de scie. C'était grâce à elle que la championne avait conquis son titre de Chienne de Sang, la distinction la plus honorifique pour une femme gladiatrice à travers la plupart des arènes de Terra. Son corps couturé de cicatrices se tendait sous les fripes légères dont elle était affublée. Xarkara se plaça au centre de l'arène, face à la grille depuis laquelle devait arriver la malheureuse qui allait être servie au Repas. L'annonceur ne la fit pas languir longtemps.

"Pour assouvir la soif de sang de la Chienne, il est de bon ton de lui offrir un morceau de chair sanguinolente ! Venue du ludus de Lothia Al-Akir, elle n'a pas été capable de briller à l'entraînement et doit mourir pour pousser ses soeurs gladiatrices à éviter ses erreurs ! SPECTATEURS ! Je vous donne en pâture la Moins-qu'une-putain, j'ai nommé Quatre Sous !"

Aux vivas accordés de bonne grâce à Xarkara ne succédèrent que les sifflets, les rires moqueurs et les insultes grasses. Certains lancèrent des fruits et légumes avariés en direction de la jeune femme qui sortait de derrière sa grille, qui se protégeait des projectiles à l'aide du modeste bouclier de bois cerclé de fer qu'elle portait au bras. Humiliée, la dénommée Quatre Sous l'était. Déterminée, tout autant. Et cela se lisait dans la dureté de son regard couleur de cuivre, aussi froid que le métal auquel il s'assimilait.
La Moins-qu'une-putain était une femme jeune mais faite, au corps délicieux. Ses courbes étaient flatteuses, à l'image de ses seins lourds et fermes qui tendaient le pauvre haut de cuir échancré en menaçant de le déchirer sous la pression des généreuses mamelles. Son ventre plat aux abdominaux dessinés par l'effort était exposé aux regards, ne dévoilant que la marque au fer rouge qui marquait son statut d'esclave combattante. Ses jambes étaient fuselées et se terminaient sur un derrière haut et arrogant mis en valeur par une lingerie de cuir souple. On sentait la puissance des muscles cuissardins qui se tendaient sous la peau mordue par le fouet et les coups, qui lancaient les pieds aux sandales montantes de mauvaise qualité. Quatre Sous partageait avec Xarkara les vestiges des blessures cicatrisées zébrant leurs épidermes léchés par le soleil, qui ternissait la beauté d'un corps de femme... Ou la rendait bien plus sauvage, selon les sensibilités. Belle, la Moins-qu'une-putain l'était. Son visage fin avait miraculeusement été épargné par les coups et conservait des traits agréables et juvéniles, bien qu'ils fussent durs et rarement avenants. Le portrait s'achevait sur la chevelure courte taillée vulgairement à la lame d'un couteau au fil émoussé, la conclusion passant sur les pauvres pièces d'armure qui ne protégeaient rien du corps de la gladiatrice. Le fer blanc ne faisait jamais que l'orner pour l'esthétisme, élément qui contribuait au succès des Chiennes dans les arènes. La sexualisation de la violence faisait gonfler les bourses des maîtres et des parieurs.

Quatre Sous et la Chienne de Sang  se toisèrent en commençant à se déplacer en cercle, chacune à une distance respectable de l'autre. La championne jouait des épaules, ses yeux rivés dans ceux de son Repas. Cette dernière fit un moulinet avec son gladiusde mauvaise qualité avant d'en taper la lame contre le bord de sa rondache en signe de défi. Xarkara s'en gaussa d'un rictus étouffé par son voile. Les deux attendaient le signal de l'annonceur, qui fut donné après l'assentiment d'un des seigneurs présents dans la tribune d'honneur.
L'Ashnardienne se rua sur Quatre Sous dans un mouvement brusque, dardant du bout arrondi de son épée à lame de scie le corps dénudé de la prétendante qui esquiva d'un pas de côté pour contre-attaquer d'un léger arc-de-cercle tracé à la pointe de son glaive. Xarkara ne s'en laissa pas conter et bloqua de la lame soudée à son gantelet tout en lançant son poing à l'épée dans la face du Repas qui n'eut pas le temps de relever son bouclier pour contre. Quatre Sous tituba en reculant, Xarkara continuant l'assaut dans un rire. Elle chercha à trancher dans la hauteur mais trouva la modeste rondache sur sa trajectoire, une des dents de l'épée accrochant le bord métallique de la protection. Cela surprit la Chienne de Sang le couple de secondes suffisant pour que son adversaire écarte la menace d'un coup de bras sec afin de pointer le ventre de la bête du bout de son glaive. Xarkara esquiva juste à temps pour éviter une blessure sérieuse mais y gagna une estafilade sanglante qui la poussa à laisser filer un rugissement de colère. Le premier sang était pour la novice... Une humiliation pour la championne, qui laissa l'assistance un moment interdite avant que quelques exclamations ne finissent par monter depuis les tribunes, ce qui fit sourire Quatre Sous.

Ce fut à son tour de prendre le tour d'attaque. Elle réduisit la distance en deux enjambées et se prépara au contre en se cassant en deux tout en levant son bouclier au-dessus de sa tête. La lame de scie érafla le bois en faisant voler des esquilles, mais la championne enragée cassant son élan en lui décollant un coup de pied qui força Quatre Sous à se protéger en annulant son attaque et l'avantage qu'elle avait su prendre. La Chienne de Sang enchaîna alors les coups de lame en éprouvant la solidité de la rondache et surtout son placement protecteur. Contrainte de reculer et se faire confiance tant à ses reflexes qu'à ses talents pour gérer au mieux les deux armes de Xarkara qui fondaient sur elles, Quatre Sous se retrouva tout de même couvertes d'entailles sanglantes qui firent hurler la foule de plaisir. C'est une roulade qui parvint à le faire se dégager, à peine assez vite pour éviter que l'épée dentelée ne s'abatte sur elle. Le sable vola et Moins-qu'une-putain eut la présence d'esprit de lancer sa jambe pour faucher celles de Xarkara, qui chuta lourdement sur le dos et permit à Quatre Sous de se relever en se dégageant.

La résistance de celle qui devait être la victime n'avait de cesse de surprendre tant les spectateurs que les gladiateurs et gladiatrices qui assistaient au duel depuis les soupirails grillagés aménagés pour eux. Quatre Sous n'avait jamais spécialement brillé et avait toujours été retors à l'autorité , plus familière des coups de fouets que des honneurs de l'arène. La brune n'avait jamais montré les crocs que pour mordre la main de ses maîtres qui ne l'avaient pas payé très cher, comme en attestait son nom. C'était le prix que Lothia Varolla avait payé pour son acquisition; une broutille ridicule quand les championnes se vendaient des milliers de pièces. Cette anecdote était la seule chose qu'on retenait de la combattante, avec le fait qu'elle semblait n'avoir qu'un talent très limité pour la gladiature. Elle s'était elle-même désignée comme un met de choix pour le Repas de la Chienne qui ne devait en faire qu'une bouchée... Jusqu'à ce que finalement Quatre Sous ne tienne la dragée haute à Xarkara en personne. La plèbe était divisée, à présent. Qui encourager ? La valeur sûre ou la surprise ? L'ambiance était électrique dans les gradins, mais moins que sur le sable qui ruisselait du sang versé par les deux Chiennes.

La championne était une brute écervelée, qui combattait comme un animal enragé. Cependant, même elle pouvait comprendre que Quatre Sous était supérieure à ses attentes. Cela la destabilisa et la poussa à échanger la raison contre une nouvelle dose de férocité qui se ressentit dans la puissance de sa charge. Xarkara s'acharna sur le bouclier jusqu'à ce que Quatre Sous abandonne la défense pour l'attaque, envoyant son glaive voler contre la lame dentelée tandis que son bouclier contrait les coups mal parés, quand il n'était pas envoyé vers la gladiatrice voilée comme une arme de poing. Les duellistes se retrouvèrent prises dans une chorégraphie intense et meutrière qui les accapara totalement. Leurs mouvements grâcieux permettaient l'esquive en des passes fluides. Des glissades sur le côté permettaient d'éviter les contres et de petits sauts changeaient l'ampleur des tailles. Le fil des armes se caressaient en un festival d'étincelles quand elles ne mordaient pas la chair comme le vide.
Xarkara avait en expérience ce que Quatre Sous exposait en talent brut et le prouva. S'enroulant sur elle-même, la Chienne de Sang pénétra profondément la garde de sa concurrente en évitant son gladius, sans toutefois parvenir à blesser la Moins-qu'une-putain. Ce n'était pas son but, comme elle le prouva en profitant de la surprise de la brune pour user de sa seconde arme et trancher les lanières qui maintenaient la rondache sur son avant-bras. La voilée repoussa ensuite une Quatre Sous privée de sa défense en la dégageant de son pied levé pour se loger sur son buste. La novice étouffa un cri de douleur mais ne se laissa pas démonter, usant de la puissance du coup reçu tout en donnant un violent coup de rein pour transformer sa chute en une roulade arrière. Xarkara essaya de l'épingler de sa lame de poignet mais ne rencontra que le sable une fois encore, sable que souleva Quatre Sous pour l'aveugler. Son glaive toujours à la main et la championne vacillante, le Repas se rua pour une nouvelle roulade après un saut, son acier parvenant enfin à trancher de façon significative et profonde dans le flanc de l'ashnardienne qui s'immobilisa après quelques pas. Fière et furieuse, Xarkara tenta un volte-face; exactement ce que Quatre Sous escomptait. L'entaille qu'elle avait placé était profonde et longue, la solliciter si brutalement acheva de l'approfondir. Les intestins rouge de la Chienne de Sang se firent jour et le temps fut semblable aux clameurs de la foule : suspendu dans le temps.
Quatre Sous se redressa alors, sa lourde poitrine ruisselante de sueur se soulevant au rythme frénétique de sa respiration grave. D'un pied balancé derrière le genou de Xarkara elle la força à s'agenouiller en tenant le ventre des mains, pour éviter la fuite de ses entrailles. Quatre Sous brandit alors son gladius, les doigts de sa main libre ayant saisi les cheveux de la championne. La fureur des tribunes se déchaîna à l'instant même où le fil de la lame du Repas s'abattit sur la nuque de la Chienne de Sang. A une première reprise, puis une seconde et enfin une troisième, qui permit à la tête d'être séparée du reste du corps. Le sang chaud gicla sur la Moins-qu'une-putain qui ne cilla pas, brandissant le trophée morbide à la ronde. Sous les vivas déchaînés d'une violence sans pareille, la gagnante s'agenouilla pour s'emparer de l'épée dentelée de son adversaire déchue afin de la planter en terre. Puis, d'un geste sec, la tête de Xarkara se retrouva fichée sur la garde pointue et le déchaînement hystérique fut total.
La Moins-qu'une-putain venait de devenir la maîtresse de l'arène des Dunes Traîtresses, la nouvelle Chienne de Sang.

la championne nouvellement proclamée ne goûta pas son succès. Stoïque et couverte de sang, Quatre Sous se pencha vers le sable pour reprendre sa rondache et son gladius avant de se diriger d'un pas ferme et décidé vers la grille qu'on avait ouverte à son attention. Cette victoire arrachée à une furie n'était que le premier pas sur la route qui, enfin, se dessinait face à elle. Comparée aux titans que la nouvelle Chienne de Sang s'était mise en tête de faire tomber, Xarkara n'était guère plus qu'une mise en bouche un peu trop gesticulante. Devant ses yeux, l'architecture de l'arène se tordit et dansa pour se transformer le temps d'un instant en une illusion. Le torchis sec et rougeâtre haut de trois hauteurs d'hommes se mua en une muraille de pierres grises couvertes de mousse déterminant l'enceinte d'une citadelle imprenable adossée au sommet d'une montagne embrumée. Un ensemble d'étendarts neige et azur frappé d'un heaume stylisé flottaient mollement au vent et amenaient à la vision du haut donjon rectangulaire qui dominait le lieu. Depuis l'une des fenêtres, Quatre Sous eut la certitude d'apercevoir une petite fille qui lui faisait de grands signes de main, un sourire lumineux sur les lèvres. La gladiatrice, sujette à la nostalgie poignante de ses souvenirs et victime de la chaleur ainsi que de la fatigue, leva le bras le bras pour saluer en retour la fillette. Bien que la foule prit bien naturellement le geste pour elle et y répondit d'une nouvelle et retentissante exclamation et que le bruit en tira Quatre Sous de sa rêverie en ramenant sa vision du monde à la normale, la combattante eut le sentiment de sentir de nouveau sur elle le poids d'une complète armure de plates portée sur un corps d'homme.

Alors que Moins-qu'une-putain s'enfonçait dans les entrailles de l'arène et que ses yeux fiers s'encombraient de large qui se mirent à rouler sur ses joues. Et dans ses oreilles, comme un souvenir lointain, le rire joyeux d'une enfant se mit à résonner avant de se muer en un rictus sinistre...




 
- Citadelle de Raggenrave-
5 ans auparavant

La grande salle résonnait au son des saltimbanques qui animaient le banquet donné en l'honneur de l'invitée de Markus Macragge, seigneur de Raggenrave et actuel patriarche de la famille. Comme le voulaient les codes, cet homme austère mais juste siégeait en tête de l'ensemble de tables disposées en U. Au coeur de l'espace laissé par la configuration se donnaient en spectacle deux nains bouffons qui régalaient les convives de leurs pitreries au rythme des trompettes et des violons. De nombreux notables de la région du Reinschafft où se dressait Raggenrave se trouvaient là, sous la protection de gardes disposés stratégiquement aux endroits clés de la salle de dîner pour assurer l'ordre et prévenir d'éventuels débordements. Comme personne ne l'ignorait dans la citadelle (bien que la fête tendait à obscurcir ce fait) que le domaine des Macragge était d'un pied enfoncé dans les terres de colonies ashnardiennes, bien que son allégeance s'était depuis des lustres faite à Nexus de laquelle la citadelle et le Reinschafft dépendaient. La lignée avait toujours défendu le passage montagneux qui séparait les territoires des rivaux couronnés en risquant l'extermination sans jamais céder un pouce de terrain pour autant, détermination que quelques hautes têtes militaires ashnardiennes avaient par le passé salué. Une telle abnégation forçait le respect, bien que les Macragge fussent pour eux des adversaires retors.
Avec le temps, les patriarches de Raggenrave avaient conclu quelques alliances de circonstance avec quelques uns ennemis d'autrefois géographiquement proches et par le fait isolés du centre névralgique de l'empire noir. Certains de ces hommes se trouvaient d'ailleurs attablés non loin de Markus, à trinquer entre eux et faisant l'effort de ne pas dédaigner les soutiens nexusiens qui festoyaient sur la branche opposée de la table du maître de céant.  

On honorait en cette soirée une personne qui avait su entrer dans le giron protecteur de Markus Macragge après des semaines à faire ses preuves devant ses yeux. Le Reinschafft était une région pleine de magie et très encline à plonger dans d'antiques et ténébreuses croyances qui remontaient à l'époque où les colonies ashnardiennes et nexusiennes ne sétaient pas installées de part et d'autre de la chaîne de montagnes des Arklands sur laquelle s'adossait Raggenrave. Les Macragge successifs avaient pacifié les tribus sauvages de la Reinschafft et éteint nombre d'anciens mythes dédiés à d'obsolètes divinités mais avaient été contraints de conserver le culte le plus ancien et le plus vif d'entre tous :  celui de l'Araignée. Les fidèles n'avaient jamais fait de vagues malgré les pacifications successives lancées depuis Raggenrave, aidant même la citadelle à abolir les clergés inutiles. Ces actions avaient aidé l'Araignée à garder sa toile intacte bien que réduite et l'influence des cultistes dans la Reinschafft avait été discrète jusqu'à l'arrivée à la tête du culte d'Hégéria de Valt. Cette femme -qui siégeait ce soir aux côtés de Markus en tant qu'invité d'honneur- avait su manoeuvrer habilement pour se montrer indispensable à tous, qu'ils fussent ashnardiens ou nexusiens. Le Reinschafft entier lui accordait une importance tout à fait particulière et bien qu'elle inspirait à Markus une méfiance tout à fait légitime, il avait été obligé de la laisser s'approcher de lui et de Raggenrave pour continuer à jouir de l'indispensable écoute des colonies qui trônaient de part et d'autre des Arklands dont sa famille gardait l'accès.
Markus avait commandé des recherches approfondies sur Hégéria et son culte avant de décider de lui prêter un minimum de confiance. Il n'avait rien trouvé de probant, hormis de lointaines origines qui couraient depuis la fondation d'Ashnard. L'Araignée représentait une branche mineure dans les croyances de l'empire et ne lui semblait lié d'aucune façon, révérant seulement une énigmatique Tour Sombre au sommet de laquelle devrait siéger l'Araignée Rouge lors du prologue de la fin des temps présents. N'ayant aucune raison politique de refuser le soutien d'Hégéria, le seigneur de Raggenrave avait passé du temps en sa compagnie pour définir au mieux leurs accords d'intérêts et scellaient ces derniers par le festin de ce soir.

En tant qu'héritier direct de Markus et de sa charge, Kay Macragge avait eu la charge d'étudier l'Araignée et sa Prêtresse. Agé d'une vingtaine d'années, le jeune homme avait forcé ses efforts pour convaincre son père de son utilité et de ses talents. Pourt   ant, Kay n'avait pas à rougir de ce que le ciel lui avait donné : une belle gueule d'ange aux yeux d'un vert profond, un corps forgé par ses entraînements aux armes et à la chevalerie ainsi qu'un succès incontestable auprès des femmes. Peu d'entre elles avaient échappé aux appétits charnel du rejeton de Macragge... Ce qui avait manqué de causer sa disgrâce auprès de son père. Markus n'était pas homme à apprécier pareils débordements et l'avait fait durement savoir en ôtant à son aîné ses droits légitimes à la succession au profit de sa soeur cadette, Aelin. L'amour que se portaient les deux jeunes gens n'avait pas souffert de cet état de fait, mais Kay avait depuis oeuvré à la restauration de ses droits. Non pas qu'il en voulait à sa soeur ou qu'il ne l'en estimait pas digne, mais l'adolescent était déterminé et surtout très fier. Perdre la confiance de son père avait été une épreuve et il avait depuis lors abandonné sa vie dissolue pour devenir l'héritier que Markus désirait.

Kay partageait la méfiance de son père envers Hégéria, dans une moindre mesure. Le jeune homme estimait que le culte de l'Araignée n'était qu'un reliquat des anciennes croyances claniques, qui ne perdurerait pas plus. Il avait assisté à quelques rites magiques sur la demande de la prêtresse et n'en était pas ressorti convaincu. Rien de plus que quelques prières à une divinité qui pouvait faire se mouvoir les flammes et commander aux arachnides... Kay apprenait la magie de combat auprès des enseignants mandés par son père depuis Nexus et n'acceptait de croire qu'en des forces concrètes. Hégéria lui déplaisait de façon plus personnelle, dans son comportement et l'aura désagréable qu'elle dégageait. Sa politesse froide était également une chose que Kay n'appréciait pas. Mais au-delà de tout, c'était l'influence qu'Hégéria paraissait avoir sur la virginale Aelin qui agaçait l'aîné et le poussait à se défier de la prêtresse.
Les affaires qu'elle entretenait avec Markus avait déjà conduit Hégéria à la citadelle par le passé et elle s'était vite entendue avec la cadette Macragge qui semblait subjuguée par le charisme de la prêtresse. Avec la permission donné du bout des lèvres par son père, Aelin avait obtenu de pouvoir apprendre quelques tours auprès d'Hégéria. Depuis lors, la jeune femme ne parlait que de celle qu'elle nommait professeur.

- J'aimerai que l'Araignée honore Raggenrave pour vous remercier de ce banquet sompteux, commença Hégéria en élevant la voix pour que les invités fassent silence. Avec votre permission, seigneur.

L'intervention inopinée de la prêtresse n'avait rien de particulièrement inattendu; il fallait bien qu'elle se plie à certaines convenances auxquelles jamais elle n'avait encore manqué. Kay se redressa tout en sirotant son godet de vin, observant du coin de l'oeil de sa soeur qui trépignait d'impatience. Hégéria lui accorda un regard complice tout en quittant sa place pour contourner la table afin de prendre la place des nains qui s'étaient entre-temps retirés avec la musique. L'atmosphère était devenue bien plus lourde mais les convives comme les Macragge affectèrent de ne rien ressentir. Claquant des doigts, Hégéria fit avancer les deux âmes damnées qui ne la quittaient jamais, Carthagaena la drow garde du corps et la sorcière Lydiss. Les trois s'inclinèrent face à Markus avant de se relever, Hégéria prenant à nouveau la parole face à l'assistance.

- Il est de coutume lors de la conclusion d'alliances d'échanger quelques cadeaux. Vous avez offert à l'Araignée l'hospitalité et la confiance, Elle vous offrira en retour de nouveaux bras pour la défense de Raggenrave et ce grâce à un art que Lydiss et moi maîtrisons. La nécromancie.

L'annonce suscita dans l'assemblée une rumeur de désapprobation, qui se confirma au claquement de langue agacé du maître de Raggenrave. La nécromancie était une magie plus qu'avérée, dont les conditions d'utilisation hérissaient le poil de Markus. Kay regarda son père et ne put s'empêcher de glisser une oeillade à Aelin qui semblait tendue d'excitation contenue. Se trémoussant sur sa chaise, la cadette affichait un sourire éclatant en fixant Hégéria avec adoration.

- Je croyais que cet..."art" ne se pratiquait que sur des cadavres, dit alors Markus. Ma citadelle n'en compte aucun.
- Oh. C'est vrai. Il va donc falloir en fabriquer quelques uns. Cartha ?

Avant que les propos de la prêtresse de l'Araignée ne puisse être interprétés d'une quelconque façon, la drow avait disparu des côtés d'Hégéria pour réapparaitre à côté de l'un des gardes de la grande salle. Ce dernier n'eut pas le temps d'esquisser un mouvement que déjà la lame de Carthageana lui tranchait la gorge. Les réactions, enfin, ne se firent plus attendre. On entendit de nombreuses armes jaillir hors de leurs fourreaux, comme on entendit les chaises des convives râclaient le sol alors qu'ils tentaient soit de se mettre en garde soit de fuir. Markus et Kay avaient jailli hors de leurs assises l'épée à la main, l'aîne tâchant de se placer de façon à défendre sa soeur d'un éventuel assaut porté contre sa personne. Aelin se dégagea de la prévenance de Kay tandis que les gardes filaient pour défaire Carthageana, qui fondait déjà sur un second puis un troisième. Lydiss incantait déjà dans une langue maudite, ce qui fit s'animer le premier des soldats tués. Il se releva de la mort en faisant fi de sa blessure mortelle et se rua sur l'un de ses anciens camarade qui, prit de panique, ne lui opposa aucune résistance lorsqu'il lui arracha la joue de ses dents avant de lui dévorer la gorge tandis qu'il hurlait comme un porc à l'abattoir.
Le spectacle fit souffler un vent de panique. D'un mouvement de manche, Hégéria fit se fermer d'elles-même les portes de la salle. Kay bondit pour écarter sa soeur et fondre sur la prêtresse mais Cartha fut bien plus rapide que lui. Après un saut depuis l'extrémité de la table, elle fit mouliner sa lame effilée pour désarmer le fils Macragge. Il tenta bien de récupérer un couteau posé à côté d'une assiette à portée -geste qui ne fut pas sans surprendre la drow de sa promptitude- mais elle réagit encore plus vite et dégagea le couvert du pied, qu'elle jeta à la face de l'humain. Kay valdingua en arrière et rencontra le sol dallé, ce qui le sonna.

Autour de lui, le chaos était tot   al. Les gardes morts se réveillaient sous les incantations psalmodiées par Lydiss et fondaient sur les convives du banquet comme la peste, sous le regard calme d'Hégéria qui avait été rejoint dans l'entremise par Aelin. Tremblante mais fièvreuse, la fille Macragge regardait son père se débattre avec fureur contre les agents nécrotiques désormais dévoués à l'Araignée. Seigneurs ashnardiens et nexusiens se retrouvaient dévorés vivants, certains parvenant à se défendre tant bien que mal avant de succomber à leur adversaire. Kay observait d'un oeil brouillé par la douleur, s'appuyant sur ses bras pour se relever. Il réussit à mettre la main sur le manche de son épée et entreprit de pousser sur ses jambes quand Cartha arriva, se signalant d'un rire. L'humain roula sur lui-même en fouettant l'air de son acier, qui ne rencontra que le vide mais lui permit de trouver le temps nécéssaire pour se dresser à nouveau sur ses jambes. En garde, il faisait face à la drow qui se déplaçait d'un pied à l'autre en préparant son attaque. Kay cracha à terre et lança son arme dans une pointe que l'elfe sombre évita sans mal d'un léger mouvement qui la plaça dans le dos de l'héritier, ce qui lui permit de placer sa lame sur la gorge de l'humain. Il se retrouva privé d'échappatoire, découvrant le spectacle qu'il n'avait pas vu jusque là.
Son père était retenu par les gardes morts et relevés par nécromancie. Le seigneur de Raggenrave avait beau se débattre comme un diable, il ne pouvait se défaire de la poigne terrible qui le retenait à terre. Son épée gisait à quelques mètres de lui, dorénavant incapable de le défendre. Hégéria s'avançait vers lui, les derniers survivants du massacre baignant à présent dans leur sang dont les flaques et les éclaboussures ternissaient le sol et les murs.

- Chienne traîtresse ! Je t'ai ouvert ma porte, j'ai rompu le pain avec toi comme nous avons vu le vin ! Et tu oses !
- Oui, j'ose. Raggenrave doit revenir à mon seigneur et maître... Le Roi Cramoisi. La prêtresse planta dans les yeux de Markus un regard flamboyant. Un petit seigneur mortel comme toi ne pourra rien contre Sa volonté. Au moins feras-tu un sacrifice acceptable pour la Tour.
- Raggenrave appartient à Nexus ! Le trône vous délogera, toi et des engeances ! Jamais la cour ne laissera la Reinschafft à un illégitime !
- Exact. Et mes forces ne pourraient pas repousser indéfiniment les escoudes de la Bâtarde. Si jamais elle trouvait la volonté pour s'opposer à moi, ce dont nous sommes en droit de douter. Néanmoins, mes projets sont plus subtils. L'héritière des Macragge va me choisir comme ministre et personne ne contestera sa place légitime... Et la mienne, en l'état. Une fois que tu seras mort, cela va sans dire.
- L'héri...tière ?


Markus regarda d'abord Aelin, avant de reporter son attention sur Kay. Celui-çi comprenait également les implications des propos d'Hégéria. Le jeune homme voulu se dégager de la menace du fil de l'épée drow mais n'y gagna qu'une éraflure au cou ainsi qu'un impact de genou contre son ventre. Le souffle coupé, Kay s'arque-bouta et tomba à genou. La salive aux lèvres et la main sur l'estomac, le jeune homme cracha. Il ne devait vraisemblablement pas survivre à cette nuit de cauchemar. Cela aurait pu être le cas, si ses excès n'avaient pas conduit son père à le priver de ses droits d'héritage en faveur de sa soeur pour le punir... Dès lors, la maison des Macragge revenait légitimement à Aelin, elle-même acquise à Hégéria et son culte. Tout s'accomplissait, comme une machine manoeuvrée par un système d'engrenages complexes et bien huilés.
Puisqu'il devait mourir, Kay préféra le faire debout. Ayant proféré rapidement et à voix basse une incantation magique, le guerrier libéra sur la drow un éclair bleu qui la frappa et la fit voler en arrière. L'humain se leva d'un bond en dégainant la dague qui reposait à sa ceinture et entreprit de frapper directement Lydiss dans l'espoir de faire cesser ses sortilèges et libérer son père mais Cartha ne lui en laissa pas l'occasion. L'éclair avait été mineur et les réflexes de l'elfe sombre assez vif pour qu'elle interpose son épée sur la trajectoire du sort. L'acier avait absorbé la charge et le bond forcé de la drow avait vite été mué en un rétablissement preste. Elle s'interposa entre sa soeur de culte et l'agresseur, engageant un combat qu'elle avait toutes les chances de remporter grâce à sa vitesse. Kay refusa néanmoins de lui céder un seul pouce de terrain, dressant son pauvre poignard comme le dernier rempart défendant sa vie.
Le spectacle sembla amuser Hégéria, dont l'oreille fut bientôt accaparée par les lèvres fines d'Aelin. Elle lui glissa quelques mots avant que la prêtresse ne s'adresse à son assassin.

- Assez joué, Cartha. Dans la toile.

La drow esquissa un sourire et arrêta son manège. Se glissant avec les mouvements d'un serpent à travers la garde de Kay pour se coller à lui sans qu'il ne puisse seulement tenter de la repousser, elle lui saisit le bras et le fit passer par-dessus son épaule en un habile coup de rein. Kay tomba lourdement sur le dos et se vit rapidement chevauché par la drow. Celle-çi, afin de le faire tenir tranquille, lui épingla l'épaule de la dague que le jeune homme avait perdu dans manoeuvre de chute que lui avait infligé Carthageana. Il hurla de douleur et en fut réduit à devoir se tenir tranquille, la lame tournant dans la plaie quand il essayait de bouger. Son père cria un Non ! qu'Hégéria tua d'une manière radicale; en lui enfonçant profondément un stylet dans la bouche. Markus se figea dans une expression mêlant douleur et surprise. Le nouveau hurlement poussé fut celui du fils devant le sort de son père, mais Hégéria lui imposa le silence d'un mouvement fait à Cartha. Aelin, elle, avait détourné le regard du sort de son paternel.

- La mort de Markus Macragge était nécéssaire. Il sera relevé comme l'un des vassaux du Roi Cramoisi, en reconnaissance de son glorieux passé. Ne suis-je pas généreuse, petit Kay ?
- V-va... au diable...putain...
- Mon maître est autrement plus redoutable que le diable. Tu n'iras, toi, ni à l'un ni à l'autre. Ta soeur a lourdement insisté pour que tu sois laissé en vie et j'ai accédé à sa requête. Mais vivant, tu seras toujours un problème. Emprisonné, tu finiras malheureusement par trouver du soutien à un moment ou à un autre. Ainsi ai-je dû trouver une parade qui, je crois, sera satisfaisante. Et distrayante, somme toute. En attendant, regarde son père se muer en un puissant serviteur du Roi Cramoisi.

D'un revers de la main, Hégéria désigna le corps maintenu à genoux de Markus, entouré d'une garde de soldat morts depuis de longues minutes déjà. De la bouche de Lydiss se faisaient encore entendre les prières noires prononcées dans un language sacrilège qui fit brûler plus vivement les torches qui parcouraient les murs de la grande salle. Les flammes luirent soudainement d'un éclat pourpre malsain qui baigna la scène de boucherie d'une lumière basse et irréel s'accorda aux orbites sinistres des morts-vivants. La fumée épaisse des torches se mit à décrire des formes aux arabesques grotesques et surnaturelles avant qu'elle ne lézardent de plus en plus vers le corps parcouru de spasmes du seigneur de Raggenrave. Elles le nimbèrent en écartant les gardes morbides, remontant le long des membres tremblants de Markus. Les volutes l'enserrèrent, s'insinuant entre ses lèvres et encombrant ses narines comme ses oreilles.
Les spasmes du patriarche s'intensifièrent tant qu'on entendit certains de ses os craquer sous la violence des impulsions nerveuses. Soudain, sa machoîre se décrocha et la gorge de Markus gonfla avant qu'il ne vomisse et que de ses lèvres ne sortent des doigts squelettiques qui écartèrent les chairs pour les déchirer dans un immonde bruit spongieux. Des entrailles et de la peau surgirent alors les éléments d'une ossature assemblée en un être nouveau de la couleur de la mort, qui se para des morceaux d'armure laissés par les restes éparpillés de celui qui avait été le seigneur de Raggenrave.

- Ainsi se lève l'un des plus redoutables agents du Roi... Aujourd'hui et à jamais se lève le Roi Squelette !

L'abject homoncule claqua des dents comme pour répondre à sa nomination, ployant les genoux pour prendre en main l'épée qu'avait porté jadis le vaillant Markus Macragge. Aelin, qui avait d'abord poussé des cris d'effroi en voyant le sort de son infortuné père était à présente comme séduite par la créature immonde à laquelle il avait laissé place et qui se tenait à côté de Lydiss et Hégéria. Silencieux, le Roi Squelette fixait Kay de ses orbites vides. L'héritier illégitime se débattait malgré la douleur du stylet fiché dans son épaule. Eructant de rage et de douleur, il insultait les femmes présentes dans la salle tout en pleurant la perte de son géniteur. Sous l'ordre de la prêtresse du Roi Cramoisi, la drow qui le maintenant toujours en respect lui martela la face de coups de poings. Un, puis deux, puis trois... Kay se retrouva forcé au silence, gémissant entre deux gerbes de sang passant entre ses lèvres et ses dents rougies.
Une coupe en main, Hégéria demanda à Aelin de s'entailler pour faire couler son sang. La cadette obtempéra sans se poser de question et bientôt le fluide vital fut recueuilli par sa maîtresse. Lydiss, qui avait cessé d'incanter, observa à présent la nouvelle scène. Ce fut la voix d'Hégéria qui se mit à tonner d'un ton dur vomi d'outretombe pendant qu'elle versait dans la coupe quelques autres potions et éléments qu'elle tirait d'une minuscule besace pendante à sa ceinture. L'odieux mélange se mit à tourbillonner dans son réceptacle, puis à bouillir. De grosses bulles épaisses explosaient à la surface du liquide comme autant de clapotis dans une mare ensanglantée. Quand le moment fut venu, la nécromancienne demanda à la drow de libérer Kay de son étreinte. Cartha s'écarta et le Roi Squelette attrapa le jeune homme par les cheveux, le poussa à ouvrir la bouche. Au-dessus du fils Macragge apparu Hégéria, du bout des doigts desquels une petite araignée tissa un fil pour descendre jusque dans la coupe de sang. La bestiole y fut engloutie dans une très légère détonation sèche. Kay parvint à se dégager de la poigne squelettique, ce qui lui permit de laisser exploser sa fureur.

- Je ne puis te tuer ni t'emprisonner, Kay Macragge. Mais je peux te réduire à l'impuissance et m'assurer que jamais tu ne me feras défaut.
- Tue moi, salope infernale ! Crève moi ou je te crèverai comme la chienne que tu es !
- Bel esprit, garçon. Garde ça pour la suite de ton histoire. Car, crois moi, tu vas avoir bien d'autres problèmes en tête d'ici peu de temps. Roi ! Maintiens le.

Le squelette n'hésita pas à obéïr. Les doigts de sa main droite se refermèrent sur la gorge de Kay qui ouvrit la bouche par réflexe afin de chercher sa goulée d'air salvateur. De la gauche, le Roi Squelette attrapa le nez de sa victime et Hégéria profita de l'ouverture pour verser le contenu de sa coupe sur la langue gesticulante de l'humain. Contraint à avaler le liquide épais comme le miel qui lui envahissait le palais en le chargeant d'un puissant goût de boue stagnante et de vomissure, l'héritier déshérité de Raggenrave tenta de rendre la rasade que son estomac n'acceptait pas. Le cadavre animé qui était né des entrailles de Markus lui referma pourtant la bouche de sa poigne de fer et Kay n'eut pas d'autre possibilité que de garder l'infâme mixture qui lui tordait les boyaux.
Bientôt, la potion fit effet et il se retrouva à se contorsionner sur le sol comme un cadavre agonisant, incapable de crier et peinant à trouver son souffle. Ses propres doigts se crispèrent sur la gorge que le Roi Squelette avait relâchée, la griffant jusqu'à la faire saigner. Kay avait l'impression que tout son corps fondait sous sa peau, que ses muscles coulaient à travers ses pores. Ses os grincèrent et ses oreilles furent emplis des délires sonores d'un concert de bruits spongieux et humides pendant que son coeur battait tant et si fort qui manquait de bondir hors de sa cage thoracique. Ses intestins se liaient alors que ses couilles et sa queue s'enflammaient. Ses membres fouettaient l'air dans d'anarchiques mouvements. Les dents de Kay lui donnèrent l'impression de se déchausser après avoir dansé sur ses gencives, ses yeux roulèrent violemment dans ses orbites. Soudainement, un éclair lui vrilla les sens et surchargea ses nerfs. Un flash blanc inonda le monde et sa conscience qui bascula pour de bon dans les limbes noires.

Le cliquetis des chaînes accompagna son réveil, ainsi qu'une douleur lancinante dans tout le corps. Autour de lui, Kay perçu des rires étouffés par son audition toujours endormie. Tentant de bouger, le Macragge se trouva lourd et endolori. Il secoua la tête mollement et eut le bonheur de constater que ses sensations lui revenaient et que ses sens récupéraient peu à peu leur acuité. Quand il voulu ramener ses bras vers son visage, Kay eut la surprise de trouver sur le chemin un volume qui n'existait jusque là pas. Sa réaction étonnée fit fuser de nouveaux rires de l'assistance qui l'entourait, ce qui le poussa à se reprendre d'autant plus vite pour comprendre l'ensemble de la situation. Ses mains allèrent à la rencontre de ces grosseurs inattendues pour les tâter et ses doigts se refermèrent sur ce que Kay identifia sans y croire comme des seins. Des mamelles fermes et généreuses... issues de son propre buste ! Le choc de l'improbable révélation hâta le retour de ses esprits et Macragge se retrouva à tâter son corps sous toutes les coutures pour découvrir l'incroyable vérité. Bourses et pénis avaient laissé place à un delta féminin touffu et sensible au toucher, pectoraux devenus nichons et muscles bien plus menus qu'auparavant.

- Cela te plaît-il ? C'est ton sort, Kay. Le compromis trouvé pour plaire à ta soeur et l'assurer que le Roi Cramoisi sait tenir ses promesses. Mort, tu ne l'es pas. Libre... Ma foi, tu le seras si tu parviens à sortir d'ici.

Kay leva la tête pour croiser le regard amusé d'Hégéria. Flanquée de Cartha et Lydiss, elle commandait à une équipée de cultistes qui encerclait la forme féminine complètement dénudée en la couvant d'oeillades perverses et lourdes de sens. Le jeune homme -enfin, qui l'avait été encore quelques heures auparavant- se couvrit pudiquement d'instinct le sexe de sa main sans avoir le reflexe de dissimuler sa poitrine.

- Je vais te tuer, sale putain ! Tu entends ? TE TUER !
- Sans armes, de tes seules mains ? Ambitieux projet. Il te resterait bien ta piètre magie,mais supporter l'ingestion de la potion t'en a privé pour un temps. Tu es impuissant, Kay. La prêtresse s'adressa à sa bande. Montrez lui à quel point il -pardon, elle- est faible. Elle est à vous, enfants de l'Araignée. Jouez sans la tuer, puis envoyez là aux vendeurs d'hommes des contrées du chaos. Une pièce de viande de cette qualité devrait connaître un parcours des plus... exotique.

Hégéria afficha un mince sourire avant de se détourner en faisant jouer les pans de sa robe noire, qui claquèrent derrière ses pas. Elle quitta la pièce que Kay reconnut comme étant la salle d'armes de la citadelle et eut bientôt d'autres préoccupations. Autour de lui s'activaient les premiers cultistes qui se jettèrent sur elle comme des mouches sur un étron frais, la saisissant aux poignets et par les chevilles. Le Macragge se débattit comme un diable, ruant et donnant des pieds et des poings pour repousser ses agresseurs. Il cassa le nez d'un homme sur sa droite et molesta la queue d'un autre derrière lui. On le gifla et il répondit par une morsure bestiale qui arracha un morceau de chair. Son corps était malheureusement encore faible et subissait un rude contre-coup de la transformation, les opposants étaient par ailleurs trop nombreux pour qu'il puisse seulement espérer s'en défaire. Un coup de poing le sonna et parvint à anéantir sa résistance, ce qui lui valu d'être relevé et balancé contre une table qui se trouvait là. Deux cultistes le forcèrent à rester face contre le bois poli pendant qu'un troisième se glissait contre son cul en exhibant fièrement sa queue à ses frères Ar   aignées... Et, d'un coup de butoir violent et odieusement intrusif, il réduisit à néant la fierté de Kay Macragge. La douleur de la déchirure forcée de son hymen fut moins pénible que la honte qui le saisissait au ventre à chaque pénétration que le violeur lui infligeait. Il pleura au passage de la verge dans son con étroit, comme il manqua de s'étouffer quand un nouveau vit se présenta devant son visage pour s'engouffrer dans sa bouche qu'un assaut pénien vigoureux avait fait s'ouvrir de dépit.
Quelques minutes plus tard, l'horizon à portée de vue de Kay ne fut plus qu'une vision d'horreur de ce qui lui paraissait être une véritable forêt mouvante de membres virils dressés à sa seule attention. Les larmes se mêlèrent à la semence qu'on déposa à larges giclées sur son visage déconfit et croûté de sang, sa résistance abandonnés sous la sauvagerie des hommes qui le plongeait dans la plus profonde des humiliations.
Quand le calvaire cessa enfin, après de trop longues heures de supplice, le fier Kay Macragge avait laissé place à une loque souillée et gémissante qu'un cultiste avait ironiquement décidé de payer pour sa prestation.
A côté de son corps brisé étendu sur le sol gisaient très exactement quatre ronds de cuivres.

Quatre Sous.




 

- Village de Raaz El'Anout, sultanat des Sables Blancs -
2 semaines auparavant

- Je t'ai payée moins qu'une pute, mais je t'ai payée quand même !

Le revers de la main s'écrasa sur la joue de la jeune femme, qui accusa le coup sans rien dire. Elle cracha un glaviot sanglant en gardant la tête baissée, les gladiatrices autour d'elle se gaussant de son malheur. L'esclave ne répondant rien à la maîtresse l'ayant giflée, cette dernière lui décolla une nouvelle gifle dans le sens opposé. Les lourdes bagues de la matronne éraflèrent le visage maculé de poussière et de terre séchée sans que Quatre Sous ne daigne présenter davantage de réaction. Sa maîtresse, Lothia Al-Akir, la toisait alors que les voiles légers et translucides de la tenue qu'elle portait se collaient contre son corps à la faveur d'une brise chaude et étouffante. Lothia entretenait un Ludus, une maison formant des gladiateurs. Elle s'était faite une spécialité de dresser des gladiatrices au départ pour assouvir ses désirs lubriques, avant qu'elle ne se prenne de passion pour ces très lucratifs combats. La maison d'Al-Akir n'avait pas une réputation très reluisante mais sa maîtresse oeuvrait à offrir davantage de lustre à son nom.
Elle avait acheté Quatre Sous à un marchand ashnardien qui cherchait à s'en débarasser depuis un moment. L'esclave été passée de mains en mains et refusé de se laisser dompter comme les autres. On ne pouvait la baiser qu'une fois qu'on lui avait cassé la gueule ou fouettée au sang et personne n'avait été capable d'en tirer quelque chose. Elle avait échappé à des châtiments terribles en se débattant comme une diablesse ou en se montrant assez utile au bon moment pour qu'on ne l'abatte pas comme la chienne qu'elle était.
Quatre Sous parlait peu et se défendait généralement jusqu'à ce que ses forces ne soit épuisées, seul moment où elle se retrouvait à la merci de ses adversaires. Ces façons avaient attiré l'oeil de Lothia qui avait décelé chez l'indomptée un potentiel guerrier intéressant pour la gladiature. Bonne négociante, la lanniste avait déboursé à peine quelques pièces pour Quatre Sous (qui portait décidément bien le seul nom qu'on lui connaissait) et n'avait de cesse de le rappeler.

L'entraînement voyait officier une combattante médiocre qui ne brillait pas. Quatre Sous tombait toujours et passait plus de temps à se faire recoudre chez le médecin qu'à brandir son glaive et son bouclier. Les gladiatrices la dénigraient et se moquaient sans cesse, la rabaissant dès que l'occasion s'en présentait. En pissant dans son gruau ou en chiant dans sa paillasse, entre autres civilités de ce genre. Elle ne pouvait compter que sur la complicité et la patience d'une autre guerrière qui la supportait dans son mutisme et sa passivité, Thethy. Aujourd'hui, Thethy regardait son amie se faire moraliser par leur maîtresse furibonde, qui en avait assez d'assumer la formation d'une ingrate inutile comme Quatre Sous. Après les gifles, Lothia s'était pincé le nez en soupirant, passant en revue ses gladiatrices alignées dans la cour qui leur était dévolue la plus longue partie de la journée, afin qu'elles rôtissent l'arme de bois à la main sous le soleil brûlant.
Quatre Sous recula d'un pas pour rejoindre le rang, le sang qui perlait de son nez s'écrasant sur les renflements généreux de sa poitrine, traçant des sillons depuis celle-çi jusqu'à la marque laissée par le fer rouge sur le côté de ses abdominaux lorsqu'elle avait été acquise par le ludus dirigé par Lothia.

- Moins-qu'une-putain à attiré la honte sur ce ludus, mes amazones. Cette chienne indocile s'est contenté de tellement peu que j'ai été citée, moi, pour fournir le Repas destiné à la Chienne de Sang ! Moi, Lothia Al-Akir, exemple de médiocrité !

Le fouet que la domina avait arraché des mains de l'un des gardes fusa dans un claquement et mordit la peau tannée au soleil de Quatre Sous, qui gémit en étouffant un cri de douleur. La zébrure saignait de son épaule à la naissance de son sein, mais elle se garda bien de se plaindre. Servir le Repas pour la Chienne de Sang était une honte pour un lanniste, qui avouait implicitement son incapacité à dresser une guerrière. Le Repas était toujours une novice inutile sans talent ni avenir et les maîtres de ludus redoublaient d'effort lors des entraînements pour éviter d'avoir à fournir la pitance à la gladiatrice la plus impitoyable élue par les combats. Que Quatre Sous se retrouve dans l'arène des Dunes Traîtresse était un résultat peu étonnant, vu ses capacités. Mais pour Lothia, l'humiliation était grande et elle n'espérait plus qu'une chose : que son esclave meurt dans la douleur, souhait que Xarkara saurait exaucer.
La domina vint se placer de nouveau face à Quatre Sous, lui brandissant le manche du fouet sous le nez.

- J'ai hâte que tu crèves, salope. Quand ta tête reposera sur la pique au milieu de l'arène, je ferai démembrer ton corps pour le donner aux chiens puants du désert !
- Vous nourrissez vos parents de cadavres, domina ?

Elle qui n'avait plus parlé depuis des mois se manifestait pour tenir tête à sa maîtresse. Lothia écarquilla les yeux sous la colère et fit voler le fouet pour toute réponse, cinglant le corps nu de Quatre Sous. Domina frappa tant et plus, se fatiguant à la tâche mais parvenant à faire mettre genoux à terre à l'indisciplinée. L'esclave était sillonnée de traces de fouet, inondée de sang. Pourtant satisfaite : Lothia ne pouvait pas la punir plus durement au risque de ne pas pouvoir la présenter au Repas, ce qui serait pour elle une honte plus grande encore. De rage, la maîtresse se détourna après un ultime coup de fouet et repartit en direction de sa villa.

La nuit tombait sur la ville. Le repas frugal des gladiatrices avait été distribué et avala et toutes vaquaient à leurs occupations sur les deux heures de liberté qui leur étaient accordées avant le coucher. Dans la cellule exigüe qu'elle partageait avec Quatre Sous, Thetys soignait comme elle le pouvait les blessures de son amie. Elle les nettoyait à l'eau claire avant d'y apposer un pauvre cataplasme d'herbes mâchées, ce qui apaiserait la douleur et contribuerait à hâter la cicatrisation. Heureusement pour l'esclave, la maîtresse maîtrisait mal le fouet et ne causait que rarement des dommages réellement significatifs.
Comme toujours, c'était Thetys qui faisait la conversation. Depuis qu'elle connaissait Quatre Sous, jamais elle n'avait eu un dialogue plus soutenu que sur une dizaine de minutes. Elle savait que l'esclave avait passé cinq années à être trimballée par des maîtres successifs au sein des contrées du chaos et que tous ceux qui avaient tenté de la mettre au pas s'y étaient cassé les dents et... et c'était à peu près tout. A ceci près que Thetys partageait le secret que Quatre Sous gardait jalousement : elle passait effectivement son temps à s'entraîner au combat mais durant la nuit, dans la pénombre de leur cellule. Thetys avait depuis longtemps compris que son amie disposait d'excellentes bases qui lui avaient servi pour progresser, sans compter qu'elle maîtrisait la magie de combat. En l'état, Quatre Sous était aussi redoutable que les meilleurs éléments de Lothia mais se gardait obstinément d'en faire état.

- Tu auras peut-être tes chances contre Xarkara, commença doucement la métisse. Tu pourrais créer la surprise, dans deux semaines.

Pas de réponse. Quatre Sous gardait le regard fixé sur le mur d'en face, contemplant les lézardes qui le parcouraient. Thetys soupira sans attendre la réponse, qui vint pourtant quelques minutes plus tard, la tirant de sa rêverie alors qu'elle finissait d'apposer le cataplasme sur le dos fissuré de vieille cicatrices.

- Je gagnerai le Repas. J'ai en tête de bien plus redoutables adversaires que la Chienne de Sang. Elle ne sera qu'un prologue à ma vengeance.
- Ne la sous-estime pas, Quatre. Elle a arraché son titre au prix de terribles combats. Ce n'est pas honorable de la part d'une gladiatrice, mais je crois que j'aurai peur si je devais me retrouver face à elle.
- "Et nous ne connaîtrons pas la peur", récita doctement l'esclave.
- De quoi ?
- Une vielle devise, se contenta de répondre Quatre Sous avant de replonger dans son habituel mutisme.

Les Macragge apprenaient la devise familiale dès leur plus jeune enfance afin qu'elle soit à jamais gravée dans leur coeur. Ce passé à la citadelle de Raggenrave semblait à Quatre Sous un souvenir évanescent englouti sous les cinq dernières années de misère, à vivre comme l'esclave la plus insignifiante. Alors que Kay était mort quand la Moins-qu'une-putain s'était retrouvée violée dans la salle d'arme du domaine qui l'avait vue naître, l'esprit du jeune homme avait tenté de revenir. Lentement, il s'était souvenu qu'il avait été fier et combatif. Les humiliations avaient continué mais plutôt que de les laisser glisser sur lui, Kay les avaient transformées en carburant pour alimenter un sentiment de vengeance particulièrement vif. Devenir gladiatrice avait été salutaire : il avait apprit à jouter avec un corps de femme qu'il n'avait jamais maîtrisé correctement, l'ayant toujours haï. Les coups qu'il recevait en tant que Quatre Sous lui servaient d'expiation et la douleur le motivait lorsqu'il reprenait l'essentiel de l'entraînement sur les heures normalement dévolues à son sommeil.

Sa rage était immense, toute entière tournée vers Hégéria, Lydiss et Cathageana. Alors qu'il avait cherché à excuser sa soeur cadette de son implication dans la chute de la famille et de Raggenrave, Kay avait fini par la juger coupable de la plus infâme des trahisons. Il lui revenait de la passer par le fil de l'épée et de se débarrasser du Roi Squelette pour rendre à Raggenrave son éclat passé... Ou tout au moins la brûler des fondations jusqu'aux toits afin de la purifier. Pour cela, il faudrait sortir de sa condition d'esclave qui était devenu la sienne.
Kay avait accepté de n'être plus que Quatre Sous, même si cela avait prit du temps. Parler au féminin, composer avec les phases lunaires qui indisposaient une femme.... Il avait apprit à accorder ses paroles et écrits au féminin comme il avait accepté de risquer le viol et les souillures. Que les brimades et les humiliations viennent. Elles ne feraient plus qu'alimenter une rage qui lui dévorait les tripes chaque seconde et qu'il prenait soin d'entretenir avec une ferveur obsessionnelle. Le combat du Repas ne serait que la première opportunité de la relâcher et de tester son niveau. Cette épreuve passée, Quatre Sous ferait tout pour retrouver sa liberté, quitte à la voler ou à l'arracher aux mains des dieux ou des hommes qui s'y opposeraient.
Et là, il se mettrait en route pour débusquer l'Araignée. Il se mettrait en route pour une vengeance qui rendrait au centuple la douleur et la haine.

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