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« le: samedi 30 mai 2020, 12:16:07 »
Le Pardon Royal obtenu, le corps d'Alecto se détendit d'un coup, un immense soulagement la gagnant. Elle souffla tout doucement une grâce à Dieu, reconnaissante de sa Clémence, et les baisers qu'ils échangèrent ensuite semblèrent plus légers. La gravité dont elle faisait parfois preuve, qui passait souvent pour un regard extérieur pour de la crainte -et bien que ce fut le cas également- s'était un peu allégée.
Bien sûr, la désormais Compagne continuait de trembler, frémir, et pincer les lèvres avec ferveur à chaque fois qu'une partie du corps de Serenos la frôlait et elle vibrait à chaque fois qu'il l'embrassait. L'attrait qu'elle percevait dans ses étreintes la bouleversait, ne pouvant encore y croire totalement. Tout ceci semblait irréel, un peu comme ce lieu magique dont elle n'aurait jamais pu rêver. Le Roi se montrait doux et délicat, bien qu'il ne put réprimer totalement le désir qui assurément avait pris possession de lui, et Alecto s'en trouvait tout à la fois flattée et paniquée. Aveuglée par son propre émoi et le bouillonnement intérieur qui la laissait brûlante, elle n'avait plus aucune notion de temps ou d'espace.
Se laissant porter, il faut l'avouer, sans être véritablement moteur de la situation, son instinct reprenait les rênes, cependant. La Domestique se découvrait la force et l'étonnante facilité avec laquelle ses mains caressait les joues et timidement ses épaules, surprise par ses propres capacités, et presque fière de ces ridicules mouvements mal assurés.
Soudain, Serenos se découvrit, veste et chemise au sol, et il fut impossible pour Alecto de ne pas écarquiller les yeux au moment où sa main guidait la sienne sur son torse. Elle parut grelotter, alors qu'elle bouillait, confuse de l'observer dans cette nudité brusque, à laquelle elle ne s'était pas attendue. A quoi songeait-elle, alors ? Oh, bien sûr, elle l'avait imaginé, en rougissant intérieurement.
Elle avait nu nombre de bustes d'hommes, et de femmes, dans le plus simple appareil. Cependant, au delà des contextes des quartiers d'esclaves dans les grandes Maisons où elle avait servi, qui la laissaient toujours mal à l'aise de pudeur, Alecto n'avait touché que des peaux souvent très immaculées, et jamais de son plein gré.
Le torse du Roi était constellé des souvenirs de ses batailles et des douloureuses épreuves qu'il avait affrontées. A mesure qu'il lui en faisait la carte en guidant sa main, la jeune femme examinait le grain de sa peau, la forme de ses cicatrices, les renflements de traces de morsures... Elle souffrit, légèrement, en songeant aux douleurs qu'il avait pu ressentir, pleine d'empathie. Il devait être si brave, pour avoir pu endurer tout ceci, et rester si digne, et bon. Son affection pleine de compassion s'en trouva décuplée, bien que ce ne soit pas son sentiment premier lorsqu'elle effleurait sa poitrine.
A mesure que le Monarque délassait ses sandales, la Compagne sentait sa respiration s'accélérer. Elle était assez naïve, mais pas idiote. Pas totalement du moins. Le feu en elle consumait tout sur son passage, faisant tomber ses barrières avec une désopilante facilité, mais il résidait une forteresse... Sa Foi. Elle avait été éduquée parmi les Soeurs, et à mesure que les mains de Serenos remontaient sur ses jambes aux genoux anguleux et fins, à mesure que sa gorge commençait à émettre de très discrets gémissements timides, alors, un sentiment pernicieux revenait.
Sa notion manichéenne de la vie en prenait un sacré coup. Était-ce... bien, ce qu'elle faisait ?
Alecto ne pouvait nier le désirer. Aimer ses caresses, et même souhaiter davantage. Elle n'avait pas souvenir d'avoir déjà ressenti un tel attrait, qui lui donnait la fougue nécessaire pour oser les demander par un langage corporel discret.
Quand les doigts du Roi effleurèrent ses hanches striées de cicatrices, elle se crispa soudainement. Impossible de ne pas le ressentir, Serenos était bien trop à l'écoute de sa Belle pour l'ignorer. Naturellement, ses précédents Maîtres et Maîtresses n'en avaient jamais tenus compte. Alors, elle ne s'attendait pas à ce qu'il réagisse, si ce n'est pour accentuer sa prise, comme ils l'avaient fait tous, excité par sa résistance.
A sa grande surprise, le Roi des Trois Royaumes se stoppa dès qu'elle plissa les yeux d'une manière évidemment mal à l'aise. Le visage d'Alecto exprimait un étrange mélange de souffrance, de convoitise frustrée, et de peine. Son esprit lui refusait ce que son corps réclamait. Elle n'osa pas le regarder dans les yeux, de peur de le décevoir, trop habituée à avoir été frappée si elle avait l'air de ne pas apprécier les assauts de ses amants.
Resserrant les cuisses sans s'en rendre compte, elle se mordit la lèvre, confuse. Elle s'en voulait, de manière violente, même. Elle s'en voulait de ne pas réussir à dépasser la peur, les mauvais souvenirs. Elle en avait tant envie... Tout son être brûlait, et sa respiration courte n'en était qu'un des nombreux signes. Mais elle en était incapable, du moins, pour le moment.
"Majesté je..." Il lui faudrait du temps avant que son prénom ne lui vienne naturellement, pour sûr. Que lui dire ? Pardon ? Que ce n'était en rien qu'elle n'avait pas confiance en lui, ou qu'elle n'éprouvait pas un puissant et viscéral désir pour lui ? Se donner au Roi était actuellement une pensée égale à un coup de marteau dans son crâne, qui résonnait dans tous ses membres. Mais elle avait trop de questions morales en tête, qui l'en empêchaient.
Penaude, un peu craintive et surtout, terriblement frustrée, ses lèvres tremblèrent.
"Je n'ai... je n'ai pas l'habitude..." Comment exprimer ses blocages sans se sentir idiote ? Le décevrait-elle ?
"C'est que. Oh, Sire..." Un flash dans sa tête lui ordonna bientôt de parler. "Il n'y... a pas de. De Temple de l'Ordre ici, n'est-ce pas ?"
Prier. Demander le Pardon Divin, faire pénitence. Au plus vite. Chercher les réponses dans la jeûne, ou la lecture de textes religieux. Demander l'aide du Très Haut. S'abîmer dans la nature réconfortante des vieilles pierres au parfum d'encens. Retrouver une sécurité émotionnelle que, toujours, ces lieux avaient réussi à lui procurer. En somme... fuir. Fuir son désir, le feu ardent de son cœur, l'appel de son corps.
Alecto fit l'erreur de relever les yeux vers son visage et laissa échapper un soupire en le contemplant. Son buste nu la fit rosir, elle sentit sa gorge sèche. "Que Dieu me vienne en aide" murmura-t-elle en l'admirant avec dévotion.