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« le: jeudi 02 août 2012, 17:56:36 »
Elle se retourna pour s’avancer en direction des portes vitrées, répondant d’une simple phrase. Pendant ce court laps de temps, Peter observa les yeux, tournant la tête en tout sens, admirant le luxe de cette simple terrasse. Si le reste de l’appartement était à ce niveau, c’est que Félicia avait réussi une belle opération. Plusieurs balcons, délicieusement agrémentés. Le léger vent qui ramenait la rumeur de l’eau indiquait la présence d’une piscine, au-dessus d’eux. Plissant les yeux sous son masque, le jeune homme aperçut l’escalier qui permettait de monter. Il sourit, taquin, même si la cambrioleuse ne le voyait pas, étant de dos. Il revint sur elle, la détaillant du regard. Il ne pouvait le nier, Félicia avait toujours la même silhouette, celle dont il se rappelait, celle qu’il lui semblait avoir encore dans la peau, malgré tout, encore aujourd’hui. Il se souvenait de chaque courbe, de chaque frisson. Étonnamment, d’ailleurs. Mais même s’il avait été mariée à Mary Jane, et que sa mémoire n’avait pas à être sali, il devait bien avouer que la Chatte Noir était, à tous les niveaux, aussi attractive que feu sa bien-aimée. Peut-être même plus.
Il savait de quoi il avait l’air. Aucune nouvelle de Félicia pendant si longtemps. Il n’en avait pas réellement chercher, d’autant plus qu’elle avait disparu... Et il débarquait ici après la mort de Mary Jane. Pas franchement malin, ni vraiment sincère... Mais c’est plus compliqué que ça...
Elle ouvrit la porte, et il s’engagea à sa suite à l’intérieur de la pièce. La magie de l’électronique fit s’allumer les lumières lorsque la présence de Félicia fut reconnue au sein de l’appartement. Et encore une fois, le spectacle était incroyable. Pas celui de la jeune femme marchant gracieusement sur le sol du salon - ce spectacle-là est systématiquement incroyable -, mais celui de l’opulence de la pièce. Elle sentait le luxe, elle le montrait même, et la voix métallique qui résonna dans l’édifice ne fit que prouver que cet appartement serait à jamais au-delà des moyens de Peter. Et en plus, il était poli, cet ordinateur. Le progrès, hein ?... La belle se retourna, expliquant que l’ensemble de l’endroit était géré par l’informatique. Inclinant la tête à nouveau, elle put, cette fois, constater la présence d’un sourire, même à travers le masque de Spider-Man.
Et il lâcha, plaisantin comme à son habitude.
« Moi, j’ai une télé des années cinquante, c’est pas mal aussi. »
Il croisa à nouveau les bras sur sa poitrine, avant de hausser un sourcil en entendant plusieurs miaulements. Il vit deux chats pénétrer dans la pièce, depuis ce qui semblait être la cuisine. Et la jeune femme, souriante, s’accroupit pour leur adresser de délicates caresses, avant de s’expliquer.
« Je n’ai toujours pas changé sur eux... Je prends des chats errants, je les soigne, les nourris, avant de les revendre à des animaleries... »
Il sourit, attendri, touché malgré tout par l’image qu’il était en train de contempler. Il ne dit rien, mais elle continua avant qu’il ne puisse de toute façon prendre la parole.
« Fais comme chez toi, Peter... Tu as faim ? »
Il continuait de l’observer. De l’admirer, en un sens. Le temps avait passé, mais elle n’avait pas tant changé. C’était ça qui lui plaisait, chez elle. Là, avec ses chats, elle était douce, aimante, et ça détonnait un peu de la Félicia cambrioleuse, implacable, cynique et capable d’être beaucoup plus dure. Ce contraste était saisissant en cet instant, et il se remit, une nouvelle fois, à penser au temps qu’ils avaient passé ensemble. Quand il avait su la séduire, il ne savait trop comment, et comment il avait raté la suite des événements. À l’époque, il l’avait largué parce qu’il avait eu l’impression que Félicia aimait plus Spider-Man que Peter Parker. Et c’était peut-être vrai... À l’époque.
À l’heure d’aujourd’hui, une chose majeure avait changé. Son identité était révélée, il avait laissé le secret derrière lui, tout comme sa patrie de naissance. Aujourd’hui... Peter Parker était Spider-Man, et réciproquement. Il n’avait plus, dans son esprit, de distanciation entre son alter-égo et son identité civil. Il s’était rendu compte, au final, qu’il supportait beaucoup mieux la pression en ne faisant pas sembler d’être double. Il avait assez de force mentale - même si ça ne se voyait pas forcément au premier abord - pour porter sur ces épaules le poids de ses deux vies. C’était plus dur, évidemment, mais aussi beaucoup plus sain. Il se sentait aussi plus libre par rapport à précédemment. Il y avait moins de doutes, moins de pression, moins d’hésitations. Ou moins souvent, en tous les cas.
Mais il retombait dans ses travers depuis qu’il avait revu Félicia. Elle le ramenait systématiquement à l’homme qu’il était quand il l’avait rencontré. Et il ne savait pas vraiment si c’était un avantage ou un inconvénient... Il avait toujours un petit ersatz de sentiments pour elle, caché, tout au fond de lui. Peut-être pas si cacher que ça, au final... Là, en l’observant avec ses chats, il voyait l’image de la femme qu’il avait aimé, pour qui il avait eu peur, et c’était aussi pour cette dernière raison qu’il l’avait quitté. Une erreur, il le savait depuis le début, mais il n’était jamais revenu en arrière, même quand il l’avait revu. Il ne savait pas trop quoi faire, quoi dire. C’était juste un beau gâchis, au final. Et un passé depuis longtemps révolu... Il laissa échapper un soupir.
« Si je fais comme chez moi, ça risque d’être un beau bordel dans cinq minutes. »
Il lâcha un petit rire cristallin, avant de secouer la tête. Il retira sa capuche, entravé un peu par cette dernière, pour révéler son visage. Un petit sourire aux lèvres, craquant, toujours attendri par l’image de la jeune femme. Ses yeux malicieux, qui avait délaissé leur habituel désespoir pour montrer autre chose. Une sorte de tendresse, peut-être. Une tendresse taquine, empreinte de souvenirs qui revenaient toujours. Et cette cicatrice, qui lui barrait l’oeil, qu’il n’avait que depuis peu et qui était une autre marque de ses échecs. Mais il s’appuyait dessus. Pour ne pas réitérer les erreurs du passé. S’approchant de la cambrioleuse, il s’accroupit en face d’elle, caressant à son tour un des deux chats.
« Coucou les petits. Vous avez eu de la chance de tomber sur elle, c’est moi qui vous le dit ! »
Adressant un sourire à Félicia, il se redressa ensuite en s’étirant.
« Pour le truc à manger, je t’en serais éternellement reconnaissant. Je commence à avoir un petit creux. Et puis, si nous devons parler, autant le faire après un bon repas. Tu veux que je cuisine ? Je pourrais te surprendre. »