Le Grand Jeu

Plan de Terra => Ville-Etat de Nexus => Discussion démarrée par: Lyra Scytha le jeudi 06 juin 2019, 21:21:18

Titre: Where the fuck am I ? || Pv. Zorro Wolfen
Posté par: Lyra Scytha le jeudi 06 juin 2019, 21:21:18
La pluie tombe sur les toits, la tôle résonne. Les éclairs jaillissent et le tonnerre tonne. L’orage gronde et bientôt, les rues sont emplies d’hommes et de femmes grouillant. La foule s’épaissit à cette heure de pointe, ils se bousculent. Fendant la foule, un homme en costume noir s’avance rapidement, une mallette dans la main droite. Et elle passe de mains en mains cette belle mallette noire. Suivie de près par l’ombre, sa position est tracée et annoncée chaque croisement. En effet, plus loin, cette ombre murmure à l’oreillette les tournants, les rues, les boulevards, ses pas se font plus pressants chaque fois. Sa hantise ? Perdre le sujet de sa mission. Elle a le don de s’attirer des ennuis et pourtant, elle le fait, cette belle ombre. Elle suit cette pochette de cuir qui circule, qui danse en rythme avec les pas des passants. Les regards s’échangent, des poignées de mains également. Les sueurs se mélangent à force, la petite fouineuse pense que sur cette valise se trouve plus de liquides corporels que dans n’importe quel utérus de prostituée. Cette image lui semble étrange. Elle étire un sourire sous sa capuche et continue sa poursuite. Soudain, la valise est emportée dans un bâtiment. Privé. Elle devait certainement avoir une autorisation, un passe pour entrer. Comme le témoigne d’ailleurs le lecteur de carte à l’entrée. Elle serre les poings et fait son rapport. Le résultat fut sans appel. Suis cette foutue mallette.

Lyra baissa le regard vers ses mains trempées. La foule s’était dissipée, elle attendit un moment et soupira. Avait-elle vraiment le choix ? Bien sûr qu’elle l’avait. Elle avait toujours le choix. Soudain, son visage se fit plus froid, elle repéra un homme qui s’avançait vers le bâtiment. L’homme fut soudain interpellé par une belle voix enivrante. L’homme étira un sourire bête, la bête étira un rictus carnassier et resserra ses filets sur sa proie. En l’entraînant à l’écart, elle l’assomma sans difficulté et enfila ses vêtements. Elle mit des lunettes de soleil. Woman in Black. How entertaining. En entrant dans le bâtiment, elle sentit soudain un courant d’air chaud passer dans ses cheveux. Bon. La valise. Ce n’était pas une bonne idée d’être ici et elle le savait. Elle le savait même très bien ! La silhouette eut bientôt tous les gardes à ses trousses. Echec cuisant de la mission. Elle écrasa avec rapidité l’oreillette et le micro. Dans son infiltration, elle avait tout de même réussi à aller au cinquième étage sans se faire repérer. Au cinquième, elle s’était faite attraper. La belle brune avait alors sourit et s’était enfuie. Dans les couloirs, elle était ralentie par les hommes qui discutaient en buvant un café. Bientôt acculée dans une salle de réunion, entourée de vitres, elle recula. Les homme s’avance. Pas d’échappatoire. Elle le craint. Elle le sait. Courbée vers l’avant, bien ancrée sur ses appuis, la voilà qui pose son dos contre la vitre. Ils s’avancent, vainqueurs. Elle recule. Piètre femme face à des hommes forts. HA. Qui pense sérieusement cela d’elle ? Elle vivante ? Jamais personne ne l’enverra en prison. Elle fait volte-face, donne un coup de pied dans la baie vitrée en son plein centre. Pas d’effet, cette fois, c’est son épaule qui cogne le verre. Alors, il cède. Un homme tente de l’attraper, mais sa main se referme sur du vide. Un courant d’air emporte le verre, les documents et laisse la salle bien vide d’un coup. Elle observe le sol s’approcher bien vite. Il vient. Elle sourit. Il est là pour elle. Et l’étreinte de la mort également, une seconde fois. Ses yeux se ferment.

Pas un bruit. Juste le vent qui caresse ses cheveux. Sous ses pieds, des pavés s’étendent de part et d’autre d’une rue. Mais la pauvre ne voit plus rien. Le bruit d’un trot est de plus en plus proche et, finalement s’éloigne. Elle est consciente, ses yeux sont ouverts, mais elle ne voit rien. Son visage est couvert de sang. Lyra entend ses oreilles bourdonner. Elle se couche sur le côté droit, ses côtes effleurent le sol. Les mains posées sur ses oreilles, elle se tord atrocement. Pas de parole, pas de son, pas de bruit, ni un murmure, ni un cri. Seul le silence l’envahit. Incapable de parler. Elle veut hurler et pourtant elle ne s’entend pas. Le sang coule de son visage, ses yeux ont une pupille blanche. Elle est livide, presque maladive. La belle reprend son souffle… Tout se stabilise, sa vision également… Ses oreilles se débouchent. Elle peut sentir sa respiration, son corps mouillé au contact d’un sol froid. Elle est dans une ruelle, silencieuse… Lyra se relève… Les bâtiments ont l’air d’un âge ancien… Où est donc Seikusu ? Amusant, est-elle enfin morte ? Son père serait certainement très heureux de l’apprendre. Voilà la belle qui s’avance dans une rue passante, commerciale, habillée étrangement. Elle allait vite s’attirer des emmerdes ici. Une habitude, certes, mais elle n’avait pas vraiment compris ce qui venait de se passer… Elle essuya son visage d’un revers de manche. Les vêtements de l’homme qu’elle avait volé étaient trop grands pour elle, alors, elle avait serré la chemise blanche avec sa ceinture, à sa taille. La veste noire avait été abandonnée. Elle releva le regard vers le ciel… Où était-elle ? Elle posa sa main sur sa tête… Voilà la douleur qui reprenait. Elle posa son dos contre le mur d’une maison… Un bruit sourd l’assaillit, elle posa ses mains sur ses tempes, se massant douloureusement le crâne…

Où était-elle ? Quand la douleur fut calmée, elle déglutit nerveusement en croisant les regards interloqués. Loin de sa zone de confort, dans un monde qu’elle ne connait pas, elle se glisse dans une ruelle et essaie de raisonner.

“Okay… Alors je suis tombée. Et je suis morte. C’est sûr et certain… Mais alors… où est-ce que je suis ?”

Pourquoi parler seule à voix haute ? Se rassurer ? Possible.
Titre: Re : Where the fuck am I ? || Pv. Zorro Wolfen
Posté par: Zorro Wolfen le mardi 02 juillet 2019, 00:45:21
Le soleil était haut dans le ciel, écrasant le monde en dessous sous une chape de plomb d’une chaleur étouffante. Ce qui n’empêchait pas les rues de Nexus d’être bondées ! D’innombrables passant déambulaient dans les rues, d’étales en bâtisses, de bâtisses en fontaines. Les établissements de bains et les glaciers, en particulier, étaient pris d’assaut.

Perdu dans cette foule dense à l’âcre odeur de sueur et de pavés surchauffés, Zorro se faisait balloter de droite à gauche, résigné à suivre le mouvement de la foule. Pourtant il ne rêvait que d’une chose : se rendre à l’auberge du Cochon Doré, qu’il avait adopté depuis sa première visite dans la cité-état tentaculaire, et s’affaler dans la chambre qui l’attendait sans doute avant de prendre un bain.

C’était d’ailleurs une chose qu’il regrettait beaucoup de son ancien monde, entre autres choses. Là d’où il venait chaque ville, chaque village avait au moins un lieu dédié aux ablutions, où le voyageur fatigué par la route comme le travailleur perclu de courbatures après un dur labeur pouvaient aller se laver et se détendre dans une eau chaude gratuitement. Seuls les soins de "luxe", tels les massages, les huiles parfumées ou les bains spéciaux étaient payant, souvent à prix d’or d’ailleurs selon le lieu et le soin attendu. Mais dans ce monde pourtant plus avancé technologiquement parlant, en particulier certains continents, les bains, sans être un luxe, n’était pas quelque chose d’ouvert à tous. Enfin, il n’avait pas trop à se plaindre.

En effet, il revenait à Nexus après une longue absence, la bourse bien rebondie suite à ses dernières missions. Il avait escorté une caravane pour un aller-retour de plusieurs mois entre la cité-état et le territoire de Tekhos et le voyage s’était révélé particulièrement enrichissant, tant en terme financier qu’en évènements et enseignements. Avec la somme amassée, il avait pu améliorer son équipement, abandonnant enfin les nippes qu’il avait ramassé ici et là, et il envisageait d’acheter un petit logement quelque part en ville. Ou peut-être de louer une chambre à l’année au Cochon Doré, il hésitait encore.

Plongé dans ses pensées, il en fut tiré par un soudain attroupement. S’approchant il vit un jeune homme, la vingtaine peut-être, entouré par une foule dense.

- … elle est apparu comme ça, d’un coup, comme surgie du néant ! Elle bizarrement attifée, les yeux tout blancs comme une aveugle et plein de sang sur la gueule ! J’vous jure j’ai cru que c’était un de ces démons d’Ashnar qui attaquait. Pourtant elle avait l’air bien humaine. Et foutrement bien fichue, parole !

Autour de lui la foule le pressait, avide d’en apprendre plus.

Zorro hésita. Dans ce genre de situation, deux solutions étaient possibles. Soit il ignorait la chose et passait son chemin. C’était la voix de la sagesse ; éviter les ennuis potentiels, se mêler de ses affaires. Soit il cherchait à en savoir plus et à retrouver ce "démon" aux yeux blancs. Finalement la curiosité fut la plus forte. Ça, et le fait que cette histoire ressemblait étrangement à son propre cas.

Jouant des coudes, il écarta la foule jusqu’au jeune homme. Malgré quelques difficultés, celui-ci répondit à ses questions, lui donnant une vague description de l’apparition et la direction dans laquelle elle était partie. Suivant ces maigres indices, le mercenaire se mit en chasse.

De longues minutes plus tard, tandis que les ombres commençaient à s’allonger, à force de patience et d’acharnement, il parvint dans une ruelle étroite. Le soleil peinait à y entrer, tant et si bien qu’elle était plutôt fraîche. Elle s’étirait entre le mur aveugle d’un ancien temple réaffecté en marché couvert et l’enceinte d’un jardin public et était déserte. Ou plutôt quasi déserte. A l’autre bout de la rue une silhouette blanche, accroupie, était visible, telle un fantôme fuyant l’éclat aveuglant du soleil.

Doucement, aussi silencieux que les ombres environnantes, il s’en approcha jusqu’à entendre ce qu’elle disait.

- ...certain… Mais alors… où est-ce que je suis ?
- Vous êtes à Nexus, cité-état d’un monde nommé Terra.

La précision était peut-être inutile, mais si son intuition était exacte, la jeune femme, puisqu’il s’agissait manifestement d’une jeune femme, venait, tout comme lui, d’un autre monde. Peut-être depuis l’un de ces "portails" ?
Penché en avant, la main tendue pour l’aider, un sourire qui se voulait rassurant plaqué sur son visage, il se présenta d’une voix douce, en dépit de l’épée qui dépassait de son dos et des poignards qui pendaient à sa ceinture.

- Je m’appelle Zorro. Zorro Wolfen. Avez-vous besoin d’aide ?

La question était sincère : il n’avait pas encore vu le visage de la personne, étant arrivé dans son dos, mais il sentait l’odeur métallique du sang frais, ainsi que l’avait décrit l’homme du marché.
Titre: Re : Where the fuck am I ? || Pv. Zorro Wolfen
Posté par: Lyra Scytha le mercredi 10 juillet 2019, 14:00:02
Putain de ville. Putain de vie. Putain de soleil. Putain de crâne… Voilà que la douleur la reprend… Un bruit sourd couvre son audition entièrement, un tremblement, elle vacille. Une voix. Bien silencieusement, elle se crispe. Son dos se contracte jusqu’à la tétanie, quelqu’un la suit ? Ca commence bien. Elle se mord les lèvres contre elle-même… Pourquoi faut-il toujours qu’elle ouvre sa satanée gueule ? … Minute. Nexus ? Jamais entendu parlé. Terra, encore moins. L’homme est dans son dos. Elle est accroupie… Son visage s’assombrit. Il a été si discret que ça ? Putain, elle qui se pensait discrète.

Elle redevient bien pâle, soudain. A nouveau elle tangue. L’homme décline son identité. A-t-il vraiment envie de voir son visage couvert de sang? Elle saisit sa main, sans se retourner, elle se redresse en se tournant, ses cheveux devant le visage. Ce dernier est contrit, tout à fait crispé, sa mâchoire est serrée. Elle passe une main dans ses cheveux et, dès lors, ses yeux se ferment, mais ses belles joues maculées sont visibles à présent. On dirait que quelque chose a explosé sur son visage, que ses entrailles ont été jetées à sa belle figure. Elle se crispe à nouveau, ses mains cette fois, elle a lâché celle de l’homme. Pourquoi être aussi tendue ? La peur de l’inconnue. Tout le monde à peur de l’inconnue. Même le pire des menteurs en a peur. … “Nexus…?” Elle répète stupidement ces mots entre ses dents serrées, secoue la tête ensuite. “... ‘Connais définitivement pas.” Elle ouvre les yeux.

L’océan se pose sur l’inconnu, elle le détaille enfin. Les poignards. Sur ses gardes, elle recule d’un pas en silence. L’épaule gauche tournée vers lui, la jambe gauche en appui, le bras droit presque armé. Elle essaie de rester tout à fait droite, tout à fait en mesure de contrer une potentielle attaque et pourtant… Il semble gentil. Incertaine. Elle tente de stabiliser ses yeux, vertiges, elle pose sa main sur sa tempe… “... … … Zorro Wolfen. Enchanté. Vous m’excusez je n’ai pas l’habitude d’avoir en face de moi quelqu’un … d’aussi... armé.” Ses yeux se figent dans ceux de l’homme. Il n’a pas l’air menaçant, loin de là même. Mais elle ne peut pas s’empêcher de faire confiance à sa prudence, serrant les poings, elle étire un sourire crispé. Déjà que son visage est couvert de sang, maintenant il se déforme en un rictus semi diabolique… Une créature des limbes ? Hm, l’enfer c’est pas son truc. Et puis tout le monde sait que ça n’existe pas… Quoi que. Elle a déjà rencontré des démons…

Lyra n’aime pas se perdre dans ses pensées, alors elle se reconcentre et détaille l’homme devant elle. Grand, fort, sans nul doute qu’à mains nues il lui met la misère. La seule solution est la fuite s’il s’avance trop. Secouant la tête, retrouvant un visage paisible, elle se détend un peu. “... Lyra Scytha. J’ai aucune idée de ce que j’fous là.” En détournant le regard paisiblement, elle observe les alentours, fort heureusement, rien n’est dérangé, personne d’autre ne les entend. Elle observe au-dessus d’eux, d’autres pourraient venir des toits…? Elle ne tient pas en place, se mordant l’intérieur de la joue, elle grogne légèrement, sourdement. “... Vous n’auriez pas une idée d’un endroit où je pourrai… Me nettoyer le visage et avoir de nouveaux vêtements par hasard ?”

Faire confiance à un inconnu, de mieux en mieux Lyra. La dernière fois que tu as fait ça, tu as non seulement failli te faire violer mais en plus tuer. Boarf, ça fait bien deux fois qu’elle échappe à la mort, peut-être… trois ? Elle ne sait plus… Sa tête tourne à nouveau, elle pose son index à nouveau sur sa tempe pour la masser doucement… Beaucoup de questions lui viennent en tête. Ce gars doit certainement être une sorte… de… Guerrier ? Hm, elle voyait ça avec de plus grosses armures… Peut-être un assassin. Décidément. Elle espérait qu’il ne soit pas hypocrite dans ses manières parce qu’elle n’était pas vraiment en état de se défendre de quoi que ce soit. “... Je crois avoir suffisamment attiré l'attention ici…”

Le soleil s’insinuait lentement, elle n’avait pas envie d’être éblouie, alors, elle colle son dos contre le mur, soupirant longuement, pas de capuche malheureusement… Pas moyen de cacher son foutu visage… Pas moyen d’éviter ses regards, elle détourne les yeux et écoute les passants… Ceux qui marchent, ceux qui courent, ceux qui crient… Sans savoir vraiment pourquoi, elle soupire tristement en se demandant… Si elle allait un jour retourner chez elle… Lui demander ? Il est bien trop tôt pour ça… “... Quel… est le niveau de technologie ici ?” Avec un peu de chance elle a du réseau. C’est beau de rêver, elle saisit son téléphone portable, pas de réseau, impossible de choper une barre. Ses muscles tirent… Elle a vraiment l’impression d’être dans un bad trip assez puissant, ses pupilles sont encore un peu pâles, et ça… c’est étrange. Des pupilles blanches. Livides. Elle ne sait pas qu’elle a de tels yeux en ce moment… Mais ils redeviennent peu à peu… Normaux. Fort heureusement.
Titre: Re : Where the fuck am I ? || Pv. Zorro Wolfen
Posté par: Zorro Wolfen le vendredi 19 juillet 2019, 02:10:09
Toujours penché en avant, un léger sourire rassurant plaqué sur son visage, il observe l’air de rien l’inconnue accroupie devant lui, attendant patiemment qu’elle réagisse.
De longs cheveux aux reflets mordorés, une silhouette élancée, fine et musclée comme celle d’une panthère, la peau d’une blancheur de nacre, elle ne semble pas bien vieille, tout au plus une vingtaine d’années. Du moins en apparence ; l’hybride étant particulièrement bien placé pour savoir que le physique ne reflète pas toujours l’âge réel.
S’attardant sur la tenue de la jeune femme, il fronce les sourcils. Sa mise est … étrange. Pas tant dans sa conception qui bien qu’inhabituelle ne se démarque pas trop par rapport aux vêtements que l’on peut trouver à Nexus, mais plus par son tissage, sa matière, étrangement souple et fine. En soit, le tissu pourrait ressembler à ceux qu’il a eu l’occasion de voir à Tekhos, tout en restant différent … Baaah ! Il hausse mentalement les épaules. Qu’importe après tout. Si elle vient effectivement d’un autre monde, hypothèse qui semble se confirmer devant son incrédulité à l’entente des noms de Terra ou Nexus, il est tout à fait vraisemblable, normal même, que sa tenue soit étrange !

Son examen n’a duré qu’une seconde, une seconde suffisante pour que l’étrangère lui saisisse la main et se relève, son visage toujours masqué par un rideau de cheveux qu’elle soulève et replace, dévoilant un visage tout à fait charmant, en dépit des tâches rouges qui lui maculent les joues.
Brièvement, le mercenaire ferme les yeux, donnant peut-être l’impression qu’il essaye d’absorber le choc provoqué par l’image de ce visage de poupée souillé de sang. Il n’en est pourtant rien, d’autant qu’il a vu bien pire au cours de sa longue existence. Humant l’air, ses narines sensibles frémissantes, il tente d’identifier la provenance de ce sang. Son odorat sensible sépare sans peine l’odeur de la jeune femme, une douce fragrance fraîche et sucrée comme un bosquet d’arbres fruitiers après une pluie estivale, de celle, lourde, métallique, du liquide pourpre. Une… oui deux effluves se distinguent l’une de l’autre. La première, le sang de la voyageuse, émane d’une multitude de petites plaies éparpillées sur son visage et dans son dos, semblables à celle que ferait des éclats de verre. L’autre, plus âcre, doit provenir d’un homme. Peut-être a-t-elle été poursuivie et a tenté de s’échapper en se défenestrant ? Mais trêve de spéculations !

Zorro rouvre les yeux, en même temps que l’égarée. Choc ! Un océan de saphir rencontre une forêt d’émeraude. L’espace d’un instant, le mercenaire perçoit le cœur de la jeune femme, tourmenté, blessé. Ce n’est pas la première fois qu’une telle chose lui arrive, mais cela se passe généralement durant un combat, lui permettant de deviner les intentions de son adversaire.
Le temps que le lien se rompe, la femme s’est reculée. Le sang-mêlé la regarde, réprimant un sourire : l’épaule en avant, légèrement tournée, elle a adopté une garde de combat. Loin d’être parfaite, mais pas si mauvaise que ça. Soudain elle vacille et porte la main à sa tempe. Il retient un geste pour la soutenir. Il n’est pas si loin de la réalité, quand il la compare à une panthère. Elle se comporte comme un fauve aux abois, blessé mais non moins dangereux. Inutile de la stresser davantage. Son commentaire suivant lui donne raison et lui arrache un sourire alors qu’elle grimace face à lui, son visage dégoulinant ressemblant à celui d’une diablesse.

- On vit une époque dangereuse, et je fais un boulot qui ne l’est pas moins. Certaines … précautions sont nécessaires.

La demoiselle semble alors se détendre, bien que les mouvements de son regard n’échappent pas au mercenaire, démentant son air paisible. Zorro hoche doucement la tête.

- Si fait. Mais avant de te laver et te changer, je te propose d’aller voir un médecin. De toute évidence tu es blessée, il vaut mieux s’en occuper. On ne sait jamais.

Étrangement, alors qu’ils parlent, les yeux de Lyra, puisque tel est son nom, perdent peu à peu cette espèce de voile blanc qui les recouvrait, titillant la curiosité du demi-elfe. Dans son monde natal, il avait déjà vu un phénomène similaire, lorsque certains mages invoquaient une puissante magie. Serait-il possible que … ? Hmmm, peut-être …

- Mais avant ça …

Lentement, délicatement, il porte les mains aux manches de ses deux poignards, prenant garde à l’affoler le moins possible, et les dégaine avant de les lui tendre, les lames courbes et effilées pointées vers lui.

- Comme je disais, on vit une époque dangereuse, mieux vaut être armé. Et puisque tu sembles vouloir rester dans l’ombre … Voilà pour toi.

Posant genou à terre, il dépose son havresac et fouille un instant dedans avant d’en ressortir une longue cape de voyage. Sombre, épaisse, elle est sans doute chaude pour la saison mais a le mérite de posséder une profonde capuche et de vastes pans qui dissimuleront efficacement la silhouette et les traits de la terrienne.

- Maintenant si Madame veut bien me suivre … dit-il en s’inclinant légèrement, une moue quelques peu moqueuse mais non insultante aux lèvres.

Marchant aux côtés de la jeune femme, la surveillant du coin de l’œil, il la guide à travers les places et ruelles, essayant au maximum, tâche oh combien difficile, d’éviter les zones trop densément fréquentées. Après plusieurs minutes, ils débouchent finalement dans une étroite ruelle, presque la jumelle de celle qu’ils ont quitté plus tôt, et l’arpentent jusqu’à une porte à l’aspect minable, en comparaison des devantures chatoyantes des grandes places.

- Ça ne paye pas de mine, mais la femme qui travaille ici, le docteur Wezbah, s’y connait comme personne quand il s’agit de recoudre quelqu’un. Juste … elle a un physique … particulier et assez peu féminin. A vrai dire, c’est une femme dans la peau d’un homme, et elle opère ses transformations elle-même. Évite juste de le lui faire remarquer. Tes soins seraient toujours parfaitement exécutés, mais avec nettement moins de douceur.

Après quoi il l’invite à rentrer, indiquant qu’il l’attendrait à l’extérieur _ la salle étant assez petite.

Une fois soignée, il compte l’emmener chez Fringue Ila, une boutiquière vendant des vêtements de seconde main mais de qualité, un endroit où il a lui-même acheté ses premières tenues. Ensuite ils pourraient aller aux bains …
Il regarda sa bourse. Hmmm, à ce rythme sa solde risque de diminuer bien vite, surtout avec les bains. Peut-être qu’il lui proposera plutôt de venir se laver dans sa chambre à l’auberge du Cochon Doré … cela serait nettement moins cher et leur permettrait de manger. Ensuite viendra la question du logement… Mais une chose à la fois !