Malgré ses particularités, Mishima restait un pur lycée japonais, c’est-à-dire un établissement où l’autorité se devait d’être respectée. Les élèves turbulents étaient mal vus, et le lycée n’hésitait pas à les sanctionner. Dans ce domaine, le secrétariat jouait un certain rôle, et Shani, bien que secrétaire se chargeant de l’accueil, s’était aussi vue confier des attributions liées à la direction du lycée. Autrement dit, elle était désormais habilitée à surveiller des heures de retenues, mais aussi à s’occuper du suivi disciplinaire des élèves. Dès lors, elle s’était vue confier le suivi d’une élève en particulier, qui était accusée d’avoir agressé un professeur, Ayako Nisawa. Son dossier disciplinaire commençait à devenir lourd, et l’enseignant avait rapporté une altercation selon laquelle, après la distribution de mauvaises notes, Ayako l’avait poussé au sol. Toutefois, divers témoignages laissaient plutôt entendre que l’homme avait juste glissé au sol, et que la sanction apparaissait comme injuste. En soi, il n’appartenait pas à Shani de prendre une décision, mais de rédiger un rapport qu’elle soumettrait ensuite à la direction pour prendre d’éventuelles décisions.
Shani avait donc rendez-vous avec elle dans un bureau. Elle avait amené le dossier d’Ayako, et le regardait donc, silencieuse… Lorsqu’on toqua à la porte. Shani, qui portait son habituel tailleur avec une chemise blanche, reposa la feuille qu’elle consultait, puis se redressa.
*Bon… Et bien, en piste !*
Elle se dirigea vers la porte d’entrée, et l’ouvrit, puis sourit à Ayako.
« Bonjour, Nisawa-san. Vas-y, entre ! »
En matière d’autorité, Shani n’était sans doute pas le meilleur exemple qu’on puisse trouver. Elle avait couché avec la moitié de l’établissement, et n’avait donc rien de vraiment dangereux en elle. La jeune Française avait, de fait, toujours privilégié la discussion, le dialogue, à l’autorité arbitraire et verticale. Autrement dit, favoriser une relation la plus horizontale possible à une verticalité injuste et trop stricte.
Shani s’assit donc derrière son bureau, et ne tarda pas à entamer les choses :
« Bon… Comme tu le sais, nous sommes ici suite à l’altercation qui est arrivée hier avec Furama-sensei… Est-ce que tu as quelque chose à dire là-dessus ? »
C’était sans aucun doute pour ses talents de diplomate que la direction avait confié à Shani l’examen de ce dossier, afin de s’assurer de bien obtenir les deux versions… Shani n’avait en effet aucun a priori vis-à-vis d’Ayako, si ce n’est que son dossier commençait tout de même à devenir un peu chargé, et que cette dernière histoire avec Furama-sensei pouvait bien être la goutte d’eau de trop…