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1994. En orbite autour de la Terre, le vaisseau IP-2241 gravite, tranquille, OKLM. A son bord, toute une équipe de scientifiques ont fait le choix de quitter leur planète natale. Les étoiles, les satellites, les planètes rondes et folles, c'est mieux qu'une terre qu'ils connaissent tous déjà. Ils aspirent tous à découvrir l'univers et tout ce qu'il contient. Certains étudient les animaux depuis longtemps déjà, d'autres connaissent tous les minéraux ou végétaux terrestres, tandis qu'une petite poignée est fraîchement diplômée et avide de découvertes fabuleuses. Parmi toute cette troupe qui vient de décoller se trouvent Léa et Bryan. Elle, c'est une scientifique française d'une trentaine d'années qui a sauté sur l'occasion pour quitter toutes les merdes qu'elle a emmagasiné là-bas, sur Terre. Lui, il a sensiblement le même âge, et étudie le cosmos depuis qu'il a appris à lever la tête et regarder le ciel. Ils se sont rencontrés en rave, sous un pont parisien, enivrés par la musique électronique, la techno et son rythme qui colle au corps. Une nuit grandiose, où ils ont appris à danser plus vite que leurs ombres et à courir plus vite que les flics. Depuis cette nuit, ils sont ensemble, et ne se lâchent plus. Ils passent leurs soirées à écouter de la musique et à rêver de la galaxie, grande, immense. Ce voyage est une aubaine. Ah, et elle est enceinte. 'fin, ça, ils ne le savent pas encore. Il l'apprennent … un mois après leur départ.
Enfermés dans leur cabine, aucun des deux ne panique. La mission est lancée, et pas question pour eux de faire demi-tour. Leur enfant sera élevé là, dans ce vaisseau. Tant pis s'ils galèrent, si l'éducation qu'ils réservent à leur progéniture n'a rien d'habituel. Ils sont dans l'espace, et ils y resteront. Et l'enfant qui dort dans ce corps, ils en feront quelqu'un de bien, malgré tout ce qu'on dira.
Bon, ils se font un peu engueuler parce qu'une môme lâché dans l'espace, c'est moyen-moyen niveau hygiène et sécurité, mais il n'y a pas cent solutions : ils doivent continuer. Une gamine de vingt piges accro aux étoiles sera sa marraine, et un vieux plongeur que le monde sous-marin fascinera éternellement sera son parrain, histoire de lui offrir une famille de substitution. Elle vivra dans la cabine de ses parents jusqu'à ce que soit trop insupportable pour elle et pour eux, et sera la mascotte du vaisseau. Elle sera humaine, terrienne, plus ou moins française.
Au bout de neuf mois, ZI.UA naît. Un nom curieux, qui n'a rien de très terrestre, me direz-vous. Bah oui. Oui, c'est vrai. Mais c'est pas moi qui ait choisi de nommer une gamine comme une planète découverte le jour de sa naissance.
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2000. C'est à six ans que ZI.UA voit, pour la première fois, une créature extra-terrestre (voir ci-dessous). Sa mère la porte dans ses bras quand elle la fait entrer dans le vaste laboratoire où sont emmagasinées de multiples créatures récoltées ici et là, le temps de quelques expériences, avant d'être relâchées sur leurs planètes. ZI.UA est une enfant assez agitée, et ses parents s'arrangent pour la garder près d'eux, dans ces moments-là. Pas question qu'elle réagisse comme une hystérique et se mette à briser des bocaux, des échantillons, ce genre de trucs qu'il ne vaut mieux éviter d’abîmer. Dans les bras de sa mère, elle s'approche de l'immense tube dans lequel se trouve cette créature. Elle pose ses toutes petites mains sur le verre, les yeux rivés sur cette chose sur laquelle elle ne peut pas mettre de nom. « C'est un Acnéon » lui dit sa mère tendrement, alors que ZI.UA ne quitte pas des yeux cette créature qui flotte dans sa cage de verre. Elle la trouve immédiatement belle, d'une attractivité étrange. Elle ne ressent aucune répulsion vis-à-vis de cet Acnéon. La façon qu'il a de se mouvoir dans les airs, de respirer, de la regarder, la marque à jamais. Il y a donc autre chose que des humains perchés sur leurs deux jambes. Il y a cet être inconnu, et elle veut tout savoir de lui.
Ce jour-là, elle décide de marcher sur les traces de ses parents. Le cosmos est son monde, elle en fait partie. Elle était née au milieu des étoiles, entre des planètes, des univers insoupçonnables. Cet extra-terrestre, comme tous ceux qu'elle croisera au fur et à mesure de sa vie, ZI.UA l’intègre à sa famille. Une famille immense et composite, une famille incroyable que personne d'autre n'a, à part elle. Cette galaxie qu'elle parcoure chaque jour sera son monde à elle, et pour toujours. Elle se jure de ne vivre qu'ici, dans le ciel au-dessus du ciel, un monde gigantesque. Elle n'a pas besoin de contes de fées, et se fout des princesses et de leurs sommeils éternels, de leurs vœux ridicules, de leur naïveté suintante. Son imaginaire se nourrira de toutes ces formes de vies inconnues, à découvrir, à retenir.
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2004.
- ZI.UA, ta … ta combinaison, elle est fermée ? Elle est bien fermée ? Candice, regarde, s'il te plaît.
Candice, la marraine de cette charmante gamine excitée à l'idée de sortir du vaisseau après dix ans à y traîner les pieds, remonte la fermeture de la combinaison de la petite jusqu'à son menton. Elle ferme la sangle autour de sa taille, les petits boutons qu'elle a aux poignets et aux chevilles. Une bulle de verre est posée sur ses épaules, et sa tête se retrouve dans un bocal alimenté en oxygène par une bouteille, calée dans son dos. Elle est prête. Elle trépigne d'impatience. Son père la prend sur ses épaules, et elle rit très, très fort, sous le regard à moitié inquiet de sa génitrice.
- C'est bon, la p'tite est prête !
Candice, enthousiaste, l'installe dans le petit vaisseau qui s'apprête à l'emmener sur une planète découverte depuis une poignée de jours. Inhabitée, elle est sans dangers pour la môme.
- Bon, alors, ça va secouer, pour le décollage, mais rien de grave. Tu vas voir, ZI.UA, tu vas voir de très belles choses. Tu ne les oublieras jamais.
Le ton de Candice est un peu solennel, mais très rassurant. Son père s'installe aux commandes, et sa mère, à côté d'elle. Ils y vont à trois, en famille. Léa serre la main de sa fille au décollage, parce que ZI.UA commence à grimacer. Leur vaisseau s'arrache au vaisseau-mère. Elle le voit s'éloigner dès qu'elle tourne un peu la tête. Il ne forme plus qu'une tache blanche, tandis que la planète, face à eux, enfle petit à petit. Elle commence à discerner les détails de ce qui n'était qu'un tas de couleurs informes. Elle a dix ans, mais n'oubliera jamais la sensation qui s'est imprimée dans tout son corps au moment où ce globe se rapprochait d'eux et qu'elle pouvait compter les lacs, les montagnes, les plaines, les mers. C'est beau. C'est foutrement beau. Entrer dans l'atmosphère de cette planète lui arrache un rire nerveux.
Le vaisseau se pose dans un spasme, et la capsule de verre qui les englobait se soulève. Sa mère la porte, la pose. Ses petits pieds foulent une poussière verte, qui se soulèvent en petits nuages.
- Ne cours pas trop vite, ou on te met ta laisse, lui souffle son père.
Ils ont dû lui inventer une laisse pour éviter qu'elle ne mette un bordel monstre dans le vaisseau, c'est véridique. Même s'ils trouvaient ça rabaissant, au début, ça s'est avéré nécessaire le jour où elle a voulu boire dans les tubes à essais qui traînaient au labo. Aucune remontrance n'impressionne ce petit bout de vie.
Elle court quand même, mais reviens vite vers ses géniteurs, histoire de monter sur leurs épaules. C'est une gosse, hein. Et puis, de haut, elle admire mieux les roches millénaires et les plantes tentaculaires. ZI.UA découvre une foule de couleurs qu'elle ne connaissait même pas, et qu'elle ne reverra quasiment plus.
C'est donc ça, l'univers. Voilà ce qui résonne dans sa tête tandis que ses parents parlent de choses et d'autres. Elle comprend à peu près leur jargon, mais l'émerveillement ne lui donne pas envie de s'attarder sur les termes techniques qu'ils emploient. Elle voit un ciel, elle touche une terre, et c'est la première fois que ça lui arrive pour de vrai. Elle descend des épaules de sa mère une fois arrivée face à un paysage rocheux, dans lequel elle vagabonde pendant une heure, avant de s'endormir dans les bras de son père. Elle se réveillera dans vaisseau, pleurera un peu, avant de répéter en boucle qu'elle veut y retourner.
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2012. La valise de l'adolescente se referme dans « clac ! » tranchant. Elle compte dans sa tête tout ce qu'elle a pris, fouille ses poches et son sac à dos. C'est bon. Ça fait au moins quinze fois qu'elle compte et recompte ses affaires. Son MP3 vissé sur les oreilles, elle danse un peu, avant de sortir la tête de l'encadrement de la porte. Mh, c'est bien ce qu'elle pensait, ses parents l'attendent. Depuis six ans, elle a sa chambre, aménagée dans un ancien laboratoire, en face des cuisines. Le manque de place fait qu'elle n'a pas pu s'installer à l'étage où sont toutes les chambres. Et c'est tant mieux. A ses parents qui écarquillent les yeux pour exprimer leur impatience, elle répond d'un sourire gêné, avant de fermer la porte à clé et de charger sa valise à l'arrière d'un vaisseau gros comme un bus.
C'est bon, c'est parti, ils décollent, et elle jubile.
Comme tous les ans, l'équipage s'offre des vacances sur une planète. Deux semaines, pour fêter un Noël qu'ils ne connaissent que sur leur calendrier. La planète d'Ex-Nybos (http://img4.hostingpics.net/pics/510644AndreiSokolov.jpg) les accueille pour la seconde fois. Un endroit que ZI.UA trouve « putain de sublime », et où elle suit ses parents dans des clubs où elle ne comprend pas toujours la musique.
C'est une planète essentiellement marine. Son parrain l'emmène plonger, le soir, et elle fait des courses de vaisseaux qu'elle gagne presqu'à chaque fois.
C'est juste avant de quitter leur gîte pour une énième course que ses parents l'arrêtent. Sa mère a ce sourire qu'elle aime beaucoup, celui qui dit « Tu vas adorer », et son père cache quelque chose derrière son dos.
- ZI.UA, tu sais, chez nous, en France, sur Terre …
- … C'est Noël. Les parents utilisent l'excuse d'un p'tit vieux pour offrir des cadeaux à leurs gosses.
- Nous, on a pas envie que, tu vois, tu crois que ce soit un petit vieux qui t'ait offert ça.
- Non, non, on veut que tu saches que c'est nous. Et que tu t'en souviennes à chaque fois que tu l'utiliseras.
- C'est quoi ? C'est quoi ? Dites-moi.
C'est pour toi.
Et son père lui jette des clefs dans les mains. Elles tintent joliment.
- Va sur le balcon, idiote, chuchote sa mère, ne reste pas plantée là.
- Oh, si c'est ce que je crois que c'est …
Elle se précipite sur le balcon – qui donne vue sur toute la ville – et s'agrippe à la rambarde. ZI.UA n'en croit pas ses yeux. Il est là. Le vaisseau dont elle a toujours rêvé. Il est beau, il brille putain, il flotte dans les airs, il n'attend plus qu'elle (voir le vaisseau doré et orange, ci-dessous).
- Oh putain de bordel de …
- Il s'appelle Ludwig.
- Il fonctionne par commande vocale et, parce qu'on sait que tu adores ça, grâce à plein de petits boutons, des manettes, un volant, tout ça.
- Il ne répondra qu'à toi, et toi seule.
- Sauf si tu lui donnes l'ordre d'obéir à quelqu'un d'autre, bien entendu.
- On est sûr qu'ensemble, vous gagnerez toutes les courses.
Ce jour-là, la petite ZI.UA, alors âgée de 18 ans, fut la jeune fille la plus comblée de la galaxie.
2013.« J'sais pas bien ce que je fous là. » inscrit-elle, le jour de la rentrée à l'Académie, sur ce morceau de papier blanc où elle devait inscrire passé, présent et futur.
Ses parents l'avaient laissée là. Dans une école, une structure qu'elle ne connaissait même pas, dont elle n'admirait pas vraiment le principe. Ils lui avaient dit qu'ils devaient repartir pour une mission, mais que, cette fois, elle ne serait pas de la partie. Non, non, pas de larmes, pas de crise. Il lui fallait un enseignement, il fallait qu'elle vole de ses propres ailes, et eux aussi. Elle ne pouvait pas se permettre de jouer l'autodidacte dans un monde aussi strict que celui du cosmos. Elle avait besoin de vrais cours, de vrais professeurs, de vrais diplômes. Fini les voyages et les découvertes. Finie, la chambre avec vue sur la galaxie. Finie, cette liberté qu'elle aimait tant, et cette sensation de n'être attachée à rien, électron libre enthousiaste et un peu fou. Désormais, elle allait avoir un appartement, pas loin de l'Académie - structure où elle allait étudier - et devoir vivre au même endroit pendant près de cinq ans. Elle ne verrait plus ses parents, ni toute l'équipe qui les accompagnait. Elle ne verrait plus la galaxie, mis à part via des photographies et des petits voyages de classe timides.
Bah putain, imaginez sa joie.
Comme compagnie, ils lui laissèrent Ludwig, Deirdre et Alma (présentés plus haut), avant de repartir, pfioooou, là-haut dans l'espace. Et, même si son appartement était au douzième étage d'un putain d'immeuble, avec toute une face en baie vitrée, elle tirait la gueule. Désormais, elle était une étudiante, coincée sur une planète dont elle ne connaissait rien. Elle se sentit immédiatement prisonnière, et en colère.
Elle était déçue et enragée. Et elle l'est toujours.
A U T R E S
... Ouais, ouais, je suis de retour avec mon dernier petit bébé (elle est belle, hein ?). Ça me fait, quoi, maintenant, 50 personnages ?
Bref, tu m'avais manqué, LGJ !