Le Grand Jeu
Ville de Seikusu, Kyoto, Japon, Terre => Complexe d'études secondaires et supérieures => Salles de cours et bibliothèque => Discussion démarrée par: Yamagashi Hitomi le vendredi 01 juin 2012, 20:32:04
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J'ai toujours eu beaucoup de bol. Depuis que je suis née avec un parent à chaque bout de la planète ça n'arrête pas. La dernière bonne nouvelle est venu du proviseur en personne, bien enrobée de flatteries mielleuse à en donner la nausée à Winnie l'Ourson.
" Ce trimestre vos classes ont eu les meilleures résultats dans votre matière, Yamagashi-sensei. Vous faites honneurs à cet établissement. Et ce n'est pas passé inaperçu auprès de l'Académie... "
Sur le coup je me suis bêtement dit que ça allait me rapporter une augmentation dérisoire et deux classes de plus à gérer. Mais c'était sans compter sur le petit lutin irlandais qui me joue des farces depuis ma venue au monde, et que même la douane japonaise de l'aéroport n'a jamais réussi à arrêter. Me voilà donc partie pour donner des cours de mise à niveau... À des adultes !
C'est bien ma veine, ça ! Ils seront peut-être plus calmes que des ados bourrés d'hormones, mais dans le cas contraire je vais avoir du mal à me faire respecter. La moitié de ma classe a l'air plus vieille que moi ! Ils ne sont qu'une quinzaine mais quand même. Sans compter qu'au Japon, les jeunes femmes qui s'habillent en tailleurs, ça donne beaucoup d'idées. En plus la classe de remise à niveau se tient après les cours, histoire de bien me pourrir mes soirées.
Au moins ça se passe dans l'enceinte du lycée, donc près de chez moi. La "petite salle de cours" se trouve à la bibliothèque, pour ne pas trop donner à mes "élèves" l'impression d'être traités comme des écoliers. Dans les faits je me retrouve dans une pièce à peine plus grande que ma chambre. On a ouvert la lucarne en haut du mur du fond pour chasser un peu l'odeur de renfermé. En fait la bonne surprise a été de ne pas découvrir un squelette couvert de toiles d'araignée dans une veste en tweed des années cinquante. Je parie que depuis cette époque même les femmes de ménages ne sont pas revenues ici.
" Kojima, Yoshi-san.
- Présent. "
On ne veut pas trop les rabaisser en leur infligeant la honte de retourner dans une vrai salle de classe, mais on peut pas non plus couper l'appel. Ça m'enchante tellement de donner ces cours que j'ai attendu jusque là pour m'intéresser un peu à leurs visages. Et je ne cherche même pas à voir s'il y a ne serait-ce qu'un gars mignon dans le lot...
" Macross, Kyle-san. "
Trouvé !
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- Parti sauver le monde.
Et affalé dans sa chaise, parce que bon, merde. Je me retrouvais à des cours de rattrapage de langue SOI-DISANT parce que je peinais à aligner correctement trois mots en japonais et que ça risquait d'être pénalisant pour me trouver un travail dans le domaine du journalisme. Sans déconner, c'était moi et mon collant qui faisions généralement les unes, alors j'estimais avoir ma place dans n'importe quel canard de Seikusu. Avec la secrétaire salace et nichonnée, en plus.
D'accord, je n'avais jamais fais d'effort pour apprendre réellement le japonais. Passer par la Grèce antique et devoir en apprendre la langue m'avait fortement déplu, alors devoir m'y mettre au Japon quand l'anglais était la langue la plus parlée au monde me semblait juste inutile. Et jusque là, ça avait très bien marché pour moi ! Mais les CV et entretiens d'embauche n'avaient pas réellement porté leurs fruits et j'avais bien dû admettre qu'il y avait PEUT-ETRE un problème. Remarquez, savoir écrire en kanji pourrait avoir son utilité pour travailler dans une rédaction nippone et à part "Dragon", mon vocabulaire écrit était un tantinet limité.
Bref, je m'étais fait violence pour assister à ces cours et la pauvre nana qui les donnait allait devoir supporter l'américain à la tronche lasse assis au dernier rang. Bah, qu'elle voit le bon côté des choses : avec les muscles que mettait en avant mon tee-shirt noir un peu trop moulant, y'en aurait pas beaucoup qui broncheraient pendant ses leçons si je ne donnais pas le feu vert. Pour une fois que je m'étais habillé correctement... Un jean délavé qui soulignait mon cul ferme et tout ! J'avais chaussé mes lunettes épaisses et rectangulaires par habitude et avait attrapé un sac à dos pour y fourrer mes affaires, à savoir un trieur et une pauvre trousse. Tout ce que j'espérais, c'était qu'on aurait pas besoin d'SP le temps que je serais coincé ici.
Au pire, j'aviserais.
- ...Praisant. Ya bocoup deu kours praivhus ?*
Autant poser les bonnes questions dès le départ. Et bien signifier que je n'étais pas SI mauvais. Tiens, j'en profitais pour enfin accorder de l'attention à la prof. Plutôt pas maaaaaaaaaaaaal ! En tailleur et tout, de quoi satisfaire mon esprit de mâle, comme en témoignait le sourire que je lâchais malgré moi et qui trahissait plutôt clairement l'avis que j'avais sur mon Sensei.
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[* : histoire "d'illustrer" le niveau, bien sûr ^^]
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Musclé, le grand brun, et mignon. Les lunettes ne vont pas trop avec le reste, mais en y regardant à deux fois ça fait une chose de plus à lui enlever. Quoi ? Ce cours n'a rien d'excitant pour moi non plus, il faut que je me motive. Il a l'air aussi ravi que moi d'être ici quand il lâche sa petite réplique pour se défouler.
" ...Praisant. Ya bocoup deu kours praivhus ? "
Aïe, ça pique les oreilles ! Entre son japonais approximatif, pour ne pas dire aléatoire, et cet accent américain à moitié marmonné : je crois que pour lui il va falloir pas mal de boulot. Et je me force à ne pas trop y penser parce que m'inspire déjà quelques récréations. D'autant que lui aussi y a regardé à deux fois semble trouver le même genre d'intérêt que moi à cette classe. Je lui réponds avec un sourire.
" Deux par semaine, tout le trimestre. "
Puis je reprends l'appel. Et à chaque fois que mes yeux se lèvent de ma feuille pour voir qui répond, je ne peux pas les empêcher de dériver vers le dernier rang. Je crois que la classe n'a pas mis longtemps à trouver son "chouchou de la prof". Ça me fait quand même un peu bizarre, ce gars doit avoir à peu près mon âge.
Une fois au bout de la liste c'est à mon tour de me présenter. Pendant une seconde j'ai l'angoisse de la première impression. Et puis zut. On est entre adultes, et ce cours est une corvée pour tout le monde. Même si ça va contre la tradition japonaise qui veut que chacun reste à sa place ou s'ouvre le ventre avec un sabre, je préfère y aller franco. De toutes façons ils ne sont pas d'ici, des Américains pour la plupart. Aucun d'eux ne saute au plafond quand je passe devant le bureau pour m'y asseoir.
J'attaque en Anglais, forcément, pour que tout le comprenne bien. Le discours va peut-être sonné un peu blasé, mais avec un sourire et un peu de motivation dans la voix ça devrait les mettre à l'aise.
" D'abord bonsoir. Je suis miss Yamagashi, mais prenez tout de suite l'habitude de m'appeler senseï. Comme vous le savez on va se voir régulièrement pendant un bout de temps, alors autant vous mettre au parfum tout de suite : je ne suis pas japonaise. Un vrai senseï bien d'ici serait resté derrière le bureau, et aurait commencé à vous débiter le cours depuis trois bonnes minutes. "
Un vrai senseï m'aurait aussi déjà sortie par la peau du dos. Avec les étrangers ils sont avenants, polis, respectueux, mais certainement pas tendres. Alors aussi familiers que moi en ce moment il ne faut pas trop y compter. Je prends un pile de feuilles sur le bureau avant d'en décoller mes fesses pour commencer à distribuer.
" Normalement j'aurais du vous faire la leçon pendant une heure avant de vous donner ça. Mais comme je ne veux pas retarder le programme d'une semaine, le temps que vous me rameniez ces questionnaires et que je les corrige, on va faire autrement. Au lieu de remplir ça tout seuls chez vous avec un dictionnaire ou votre "Japonais pour les Nuls" : on va le remplir ici et tout de suite. Donc si vous bloquez sur une question n'hésitez pas à demander ! Comme ça je pourrais voir à peu près qui en est où, et ça profitera à tout le monde. "
Je profite de lui donner sa feuille pour rapidement reluquer Kyle, enfin Macross-san. Vu de plus près il a l'air encore plus serré dans son T-shirt. Mais je dois repartir aussi vite que je suis venue, en me demandant si lui aussi en a profité me mater un peu ? Et s'il en profite encore ? Après tout je vais encore lui tourner le dos pendant trois bons mètres...
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Quand elle répond à ma question, ma petite trombine perd son sourire. Deux fois par semaines pendant tout un trimestre ? Ca doit être une mauvaise blague ! Je n'aurais jamais accepté si on me l'avait précisé, sans déconner ! ...Quoi que, à bien y réfléchir, la nana du lycée m'ayant reçu pour l'inscription avait bien parlé de quelque chose que je n'ai pas compris. Trop dur de piger ce qu'elle m'avait baragouiné avec insistance et ce n'est que maintenant que je la comprends. Là, mes lacunes font mal. Je suppose que je pourrais simplement ne pas venir et m'occuper de mes patrouilles au-dessus de la ville, oui. Mais être Sentinel Prime ne fait pas gagner beaucoup d'argent et les petits boulots ne rapportent franchement pas grand'chose. Je dois penser à mon avenir, considérant que les collants ne me permettront ni d'avancer dans la vie ni de fonder une famille.
C'est que j'aimerais bien me trouver une régulière, moi.
- Ohputain.
C'est la seule chose que je trouve à rétorquer alors que mes traits se décomposent et que je me passe une main sur le visage. Si je veux rapidement me sortir de là, il n'y a pas des masses de solutions : il va falloir que je progresse TRES rapidement. Décidé et motivé à contre-coeur, je me redresse un peu plus convenablement et tend l'oreille à ma charmante prof', la couvant du regard. La seule bonne nouvelle dans cette soirée pourrie, c'est bien elle. Décidant qu'elle va devenir ma nouvelle meilleure amie (ainsi qu'un fantasme qui va me faire souvent mal à la main), je me promets mentalement de bomber tout les muscles à son attention, tout comme je ferais comprendre au premier malin qui décidera de l'emmerder pendant les cours que ce n'est pas une bonne idée.
Elle se présente donc et je bois ses paroles, tout comme mes yeux dévalent ses jambes. Yamagashi Sensei -la belle insiste là dessus- parle un anglais superbe et s'avère assez interessante pour donner envie de l'écouter. Je capte tout ses regards et je me charge de lui rendre bien volontiers. Oh, ça va, hein ! Je ne me suis pas transformé en tombeur non plus et je sais bien qu'elle se contente de jouer. Ca m'étonnerait qu'elle aille plus loin avec un type dans mon genre et ça m'arrange : je ne sais pas y faire avec les filles. Mais bon, ça rend le supplice bien plus agréable.
Voilà notre sensei qui distribue des feuilles et mon regard qui la dévore sans grande gène. Je ne regarde pas le questionnaire lorsqu'elle me le dépose, préférant m'occuper d'imaginer ses seins. Pas mal, je crois. J'espère qu'elle va faire sauter la veste à un moment ou un à un autre, histoire de nichonner allégrement.
Paf, la voilà qui repart et voilà mes yeux qui suivent le balancier hypnotique de sa chute de reins... Tout comme le font pas mal d'autres regards. Ce cul, mon Dieu, CE CUL ! Aaaaaaaaah.... Son mec doit se régaler.
Bon, Macross, occupe toi de ce questionnaire.
Je ramène enfin les yeux vers mon bureau pour les poser sur ma copie et c'est là que je comprends -en déglutissant longuement- que les cours vont devoir être assidus. C'est bien simple, je ne pige rien à ce que j'ai devant moi. La honte, putain...
- Ahem... Yamagashi sensei ? Euh... Comment dire ? Admettons que quelqu'un ne comprenne pas un traître mot de votre questionnaire, comment ça se passe ?
Si je lui jette une nouvelle oeillade, celle çi n'a plus rien de coquine mais possède tout les signes de l'appel de détresse. J'entends des rires étouffés et des commentaires désagréables fuser ça et là, mais le regard par-dessus les lunettes que je balance à la racaille inter-sidérale en guise de promesse de grandes tartines dans la gueule suffit à faire taire les rumeurs naissantes. Une fois ce détail réglé, je lance une nouvelle question avec une nette note de désespoir.
- ....Possible de s'arranger pour des cours particuliers ? Non parce que là...
Un long, long soupir. Sentinel Prime vaincu par un questionnaire scolaire, mon égo vient d'en prendre un sacré coup.
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Maintenant que tout le monde a sa feuille, je devrais avoir une minute ou deux pour me dire que je m'ennuie, et maudire intérieurement le proviseur. Je suis certaine qu'il m'a envoyée ici parce que j'ai refusé de coucher avec lui. Mais ce genre de vengeance est compréhensible : étant donné le nombre de gens avec qui j'ai couché depuis mon arrivée ici, il est dans une minorité.
Toujours est-il que je peux au moins me préparer aux trois mois de calvaire linguistique qui m'attendent, pendant que chacun écrit son nom et son prénom sur la feuille.
" Ahem... Yamagashi sensei ? "
Je me retourne vers Kyle, je veux dire Macross-san, pour le découvrir visiblement dans l'embarras. C'est pas possible, j'ai même pas eu le temps de parcourir la moitié de la salle, et elle n'est pas grande.
" Oui ?
- Euh... Comment dire ? Admettons que quelqu'un ne comprenne pas un traître mot de votre questionnaire, comment ça se passe ? "
Je reviens vers lui. Certains se moquent déjà à voix basse mais je n'ai pas le temps de m'y intéresser qu'ils se calment. Il faut dire que les bras de Kyle-Ho mais c'est pas vrai ! Macross-san ! Depuis que je suis au Japon ça me manque tellement d'appeler les gens simplement par leur prénom... c'est que j'ai pas été élevée comme ça, moi. Enfin pas tout à fait. Alors les étrangers, surtout les anglophones comme moi, je dois faire un effort pour leur parler en bonne japonaise.
Tout ça pour dire que malgré ses lunettes, quand on voit ses bras on envie d'être son ami. Question d'instinct de conservation, pour certains. En tous cas il réveille d'autres instincts en moi. Mais je ne vais pas non plus le draguer ouvertement devant la classe. Ni en dehors, franchement. Ça fait plaisir d'avoir un beau mec, ça habille le cours, et au mieux ça donne le frisson d'un petit flirt. Je le rejoins pour voir avec lui ce qui ne va pas.
Mais je penche à peine à côté de lui qu'il me parle, ou plutôt m'appelle à l'aide.
" ...Possible de s'arranger pour des cours particuliers ? Non parce que là... "
Ma raison me dit : "non !". Mes hormones me disent : "oui !". Je sourie nerveusement en essayant de cacher ma gêne. Des cours particuliers ? Autant s'enrouler lui-même dans un gros ruban rose avec joli nœud et s'accrocher une petite carte disant "Joyeux Non-Anniversaire".
" On en parlera après le... "
Je percute avant de finir. Le questionnaire que je vois posé sur sa table est en japonais. Le soi-disant test pour débutant anglophone est écrit en idéogrammes ! Cette fois c'est sûr on se venge de moi, et ces pauvre gens doivent payer les pots cassés. D'ailleurs ça ne rate pas.
" Heu, senseï ?
- C'est quoi le kanji au milieu de la deuxième question ? Bonjour ou arrête bus ? "
Et tout le monde s'y met, ce qui est normal. Mais contrairement à Kylacross-san -presque !- les autres ont au moins tenu une question ou deux... Et ils ont aussi comprit où écrire leurs noms et prénoms. Ok, je devoir me remonter les manches plus haut que prévu. mais avant ça je pose la main sur le bras de Macross-san -YES !- et lui adresse un sourire rassurant.
" On verra à la fin du cours. "
Au temps pour l'ambiance détendue que je voulais créer. Je prends un questionnaire et passe au tableau. Et en avant pour une heure de décryptage, à détailler chaque kanji, ce qui nous fait à tous perdre un temps monstre sur chaque question. Mais une fois traduites elles leur font déjà moins peur, et la plupart n'hésitent pas à participer. Si mes élèves voyaient ça ils seraient jaloux : la prof qui traduit toutes les question et les réponses.
Quand je finis par me dire que j'en vois pas le bout, quelqu'un m'interrompt.
" Désolée, sensei, mais...
- Oui ?
- Il est déjà sept heure cinq et j'ai un bus à prendre.
- Ok, on finira la prochaine fois. "
Quand il s'agit de plier le cartable ils sont aussi rapides que des ados. Et en tassant mes fiches dans ma serviette en cuir j'ai l'impression d'oublier quelque chose...
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Je ne sais pas qui est le connard qui a préparé les questionnaires, mais je lui souhaite intérieurement de rester à tout jamais anonyme, au risque de devoir retrouver sa voiture sur la lune. Alors que Yamagashi sensei s'approche de moi et qu'elle envisage de répondre à ma demande, le reste de la classe commence peu à peu à s'agiter et je suis satisfait de constater que dans les rangs, ça ricane déjà moins. J'en profite pour détailler le joli visage de la prof', qui à ce moment précis semble percuter que ça va être un peu plus compliqué que prévu. Vous voulez que je vous dise ? Vu sa tronche, j'ai l'impression qu'elle n'est pas avec nous pour le plaisir. Peut-être qu'elle doit arrondir ses fins de mois, quelque chose du genre ? Bah, je ne vais pas la plaindre d'avoir un travail et je me contente de gonfler légèrement le biceps sous ses doigts quand je sens sa main sur mon bras.
Quelque part, cette action tient plus de l'encouragement que du jeu de chat et de la souris auquel nous nous livrions à grands coups d'yeux interposés. Je ne sais pas si elle le perçoit et de toutes façons, je ne m'y attarde pas outre mesure. Décidé à lui filer un coup de pouce, je ne porte plus sur elle qu'un regard neutre. Désolé, sensei, mais vos courbes ne m'aideront pas pour trouver un job. En revanche, les mots qui roulent sur votre charmante petite langue et qui passent vos lèvres pulpeuses, c'est autre chose.
Le temps passe vite lorsque l'on est assidu et je dois dire que je me suis comporté comme un premier de la classe, à tout noter et reporter avec soin. Le questionnaire ne me semble plus si insurmontable à présent et c'est assez surpris que je relève la tête lorsque l'un de mes camarades annonce l'heure. Déjà si tard ? Merde... Bon, je prendrais un peu de retard dans la patrouille de ce soir, simplement. Le monde peut bien tourner sans SP de temps en temps, non ? En attendant, je range mes affaires avec soin et finit par me retrouver bon dernier à me lever de ma place, m'apercevant que Yamagashi sensei est encore là. Ca m'embête un peu, mais je vais devoir la relancer sur cette histoire de cours particuliers : j'en ai vraiment besoin. Mince. Hors cadre scolaire, la belle me paraît vachement plus impressionnante. Jolie et sûre d'elle dans son tailleur, tout à fait le genre de nanas que je n'ose jamais aborder de peur de me faire remballer au premier regard. Tout à fait mon style de nana, mais je doute franchement être son style de mec. Remarque, si elle joue la frigide distante dès le départ, ça m'aidera.
- Euh... sensei ?
Je m'excuse du regard de la déranger comme ça, d'autant que je me suis planté devant elle de toute ma taille. Il paraît que de pied en cap, j'ai un côté impressionnant que le collant moulant atténue de par son apparence. Là, en fringues civiles, je me demande ce que ça donne - et l'espace d'un instant, je me demande si ça lui plait.
- Excusez moi d'insister, mais j'aurais vraiment besoin de ces leçons particulières. Si... Si vous n'avez pas le temps, pourriez vous juste m'indiquer un de vos collègues, s'il vous plait ? Je peux me déplacer ou recevoir chez moi, si c'est plus agréable et facile.
Franchement, je ne pense pas une seconde à l'aspect érotique de ces cours. Le fantasme de la prof et tout... Non, d'autant que je suis persuadé qu'elle ne me trouvera pas à son goût. C'est une sacré belle femme, ce qui me fait réaliser que les rues de Seikusu ne sont pas sûres pour les jolies petites choses comme elles. Donc...
- Je peux vous raccompagner, peut-être ? Il se fait tard.
Un sourire, celui que je sors pour rassurer la donzelle fraîchement sauvée. D'habitude, ça suffit. Mais d'habitude, je vole et je sauve des vies. D'habitude, je ne me retrouve pas comme un con devant un questionnaire aux questions élémentaires. Merde, cette histoirre m'a fait perdre un peu confiance en moi.
Bah. D'ici quelques minutes, je serais redevenu Sentinel Prime et j'en oublierais cet épisode, du moins jusqu'au prochain cours. En attendant, je la fixe de mes yeux bleus, attendant qu'elle réponde.
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" Euh... sensei ?
- Hmm ? "
Je relève la tête pour me retrouver nez à nez avec un étalage de pectoraux qui se dessinent à travers le T-shirt de... Je lève un peu plus la tête... Kyle ! Avec le pépin du questionnaire je l'ai complètement oublié. Enfin pas lui, ses cours particuliers. Je me sens tellement cruche que je dois être en train de rougir. Je n'ai pas le temps d'ouvrir la bouche qu'il enchaîne.
" Excusez moi d'insister, mais j'aurais vraiment besoin de ces leçons particulières. Si... Si vous n'avez pas le temps, pourriez vous juste m'indiquer un de vos collègues, s'il vous plait ? Je peux me déplacer ou recevoir chez moi, si c'est plus agréable et facile.
- Oui. Non. Aucun problème. "
J'espère qu'il comprend quelque chose à cet suite de mots parce que c'est pas mon cas. Je devrais le rembarrer, mais d'un autre côté ce n'est pas forcément une bonne idée. Le trimestre avec ce groupe va être un vrai parcours du combattant, et je ne peux pas me permettre une perte de régime de mes lycéens. Alors si je peux remonter le niveau du dernier de la classe assez rapidement ça me simplifiera bien la tâche.
Je finis de tasser mon bordel dans mon sac.
" Désolée, ça m'était sorti de la tête. En fait je pense que ce sera pas du luxe, pour nous deux. "
Je boucle enfin ma serviette et relève encore la tête vers lui. Et remarque qu'il a de beaux yeux derrière ses lunettes.
" Je peux vous raccompagner, peut-être ? Il se fait tard.
- Avec plaisir. "
Et un grand sourire, même si la bonne réponse était "merci, j'habite à deux pas, je ne voudrais pas vous déranger". Il faut qu'on se mette d'accord sur ses leçons particulières. Ce sera vite fait, alors autant le faire en marchant. Je suis pas en train de monter une embuscade pour l'attirer dans mon lit, du moins c'est pas la priorité. Même si un grand costaud comme ça, et visiblement pas un charmeur invétéré, c'est plutôt tentant.
Je ferme bien la porte en sortant, puis direction la sortie. Il fait déjà nuit à l'extérieur. Kyle n'a pas l'air trop pressé, et c'est tant mieux parce que je n'ai pas vraiment envie de trottiner en tailleur.
" Si vous voulez des leçons je préfère vous les donner moi-même. Parce que si je vous envoie à un collègue, on devra se coordonner au programme de la classe. Ce sera un casse-tête pour nous et vous risquez de prendre trop d'avance ou de retard sur les autres. "
C'est tout à fait vrai, et logique, pourtant j'ai l'impression de me justifier. En tous cas j'enchaîne.
" Ensuite, si vous êtes libres, je pense que le mieux serait de se voir juste avant les cours. En fait j'ai au moins une heure de libre à chaque fois. On peut faire ça à la bibliothèque ? Ou chez moi si vous préférez, j'habite à cinq minutes. "
Ok, là ça commence à ressembler à une invitation. À se demander si je le fais pas exprès. Je continue de sourire, peut-être un peu trop tout à coup. Faut que je sorte quelque chose pour détendre l'atmosphère.
" Enfin, si ça vous convient. Dans tous les cas vous risquez de passer pour le chouchou de la prof. "
Epic fail...
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Mouais. D'habitude les réponses à la con comme ça, c'est moi qui les sors. Ca fait bizarre d'ailleurs de se retrouver confronter à une réaction qu'on sait nous appartenir... Je ferais attention, la prochaine fois. Ca ne fait pas avancer le dialogue, ça ! Patient, je ne dis rien. D'un côté, je la tire sûrement de sa rêverie et elle doit reposer le pied sur terre. Il me semble que Yamagashi sensei est prof au lycée à temps plein, ce qui sous-entends que le cours de rattrapage auquel je participe est une rallonge assez conséquente de son emploi du temps. C'est un rythme à prendre, c'est sûr. Pourtant, je me sens désolé de revenir à la charge avec mes histoires de cours à domicile. Elle l'ignorera peut-être tout sa vie mais mon propre emploi du temps est assez chargé, lui aussi.
Au moins, elle accepte ! Je lui adresse un sourire reconnaissant et esquisse le mouvement d'un baiser sur la joue, que je rattrape aussitôt. Mieux vaudrait que je ne m'égare pas, sinon elle risquerait de penser que toute cette histoire est un traquenard. Elle ferme sa serviette et je jette mon sac sur mon épaule avant de lui emboîter le pas alors que je suis autorisé à la raccompagner. Pfioooou, vu le smile, elle accepte de bon coeur ! Je rougis un peu et espère qu'elle ne le voit pas.
Arrivés dehors, je traîne des pieds sur le chemin qu'elle emprunte. Pas envie de me presser, d'autant que sa compagnie est loin d'être déplaisante et l'air du soir assez doux pour laisser planer un souffle détendu sur nous. En fait, c'est plutôt agréable d'être là et je l'écoute m'expliquer qu'elle préfère continuer à assurer les cours, même particuliers. Yes !
- Prendre un peu d'avance ne me dérangerait pas, pour être franc. Mais devenir votre boulet à traîner ne me tente pas... Vous êtes assez sympathique pour accepter mon appel à l'aide, je peux bien me caler sur votre rythme.
Je la regarde en lui souriant, ayant vaguement l'impression qu'elle cherche à se justifier. Mais de quoi ? En fait, je suis plutôt content qu'elle se sente obligée d'assurer elle-même les cours. Bon, j'aurais du mal à me concentrer correctement une fois seul avec elle, mais c'est un moindre mal.
- On fait ça où vous voulez, quand vous voulez, comme vous voulez.
BRAVO ! Quel con, je vous jure ! J'aurais pû tourner ma phrase autrement, mais le mal est fait et je ne peux plus que me contenter de rougir un peu plus furieusement en m'insultant d'être aussi piètre orateur. Kyle Macross, connard non-assumé et dragueur trop minable pour tenter de rebondir, à votre service.
Heureusement, elle préfère passer à autre chose et j'ai presque envie de lui rouler une pelle de remerciement.
- Le chouchou de... Ah, ouais ! Oh, je m'en fous. C'est plutôt flatteur. Par contre, vous... Enfin, vous ne risquez pas d'avoir des soucis ? Je ne veux pas devenir un problème.
Et là, je percute.
- Vous habitez à... euh... cinq minutes du lycée ?
Dans ce cas, ce n'était pas bien utile qu'elle me laisse la raccompagner, pas vrai ? Pourquoi a t'elle accepté ? Par simple politesse ? Ouais, c'est forcément ça. Où c'est parce que ça lui disait bien ? Je reviens à la réalité et me rends compte que je la scrute du regard comme si j'étais à la recherche de réponses dans le fond de ses beaux yeux. Je me rends compte, aussi, que je lui ai attrapé le bras par reflexe quand je l'ai interrogée et que maintenant elle est quasiment collée à moi.
DE MIEUX EN MIEUX, SOMBRE CONNARD !
Je relâche ma prise un peu sèchement, ne sachant plus ou me foutre. Là, j'aimerais qu'un désastre pointe le bout de son nez, ce qui me donnerait l'occassion de foutre le camp à la vitesse de la lumière.
- ...Excusez moi, je... euh...
Je baisse les yeux, déjà, les rivant malgré moi (pour une fois !) sur les monts qui tendent le tissu de son haut. Quand je m'en aperçois, je relève la tête avec l'air coupable du gamin prit la main dans le pot à cookies et je n'en rougis que davantage en attendant grosso modo une tarte en travers de la figure.
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Plus je l'entends plus je me dis qu'on est pas plus doués l'un que l'autre. Entre moi qui l'invite à la maison en essayant de retenir mes yeux de se balader sur ses muscles, et lui qui veut bien faire comme je veux, où je veux et quand je veux. Je sens que ses leçons particulières vont être assez longues et fastidieuses, vu qu'on va pas arrêter de faire ce genre de gaffes.
" Le chouchou de... Ah, ouais ! Oh, je m'en fous. C'est plutôt flatteur. Par contre, vous... "
C'est déjà ça de pris, par contre, moi ?
" Enfin, vous ne risquez pas d'avoir des soucis ? Je ne veux pas devenir un problème. "
Des soucis ? De quoi il... Ha bin oui ! Évidemment ! Je suis irrécupérable dans mon genre. Mais je n'ai pas le temps de répondre qu'il s'arrête en me retenant par le bras. Si la surprise me fait sursauter, c'est autre chose qui me fait frissonner. Il a de la poigne, même pour un gars apparemment musclé. Mais il ne serre pas au point de me faire mal. Une main de fer dans un gant de velours. Et ce regard un peu perdu qui scrute le mien.
J'ai un peu de mal à comprendre, mais il faut dire que dans son genre il tout pour me faire fondre. J'habite à cinq minutes du lycée...
" Heu... Oui... "
Et alors ? Justement, pauvre cruche ! Alors pourquoi je le laisses me raccompagner ? Le quartier du lycée n'est pas dangereux et je n'ai pas le temps de mourir d'ennui en chemin. Je voulais surtout qu'on boucle cette histoire de cours particuliers, mais en y repensant c'est trompeur. Pour imager la princesse n'accepte pas l'escorte du chevalier blanc pour rien : soit il y a des méchants sur la route, soit elle en pince pour lui. Dans les deux cas elle va bien le remercier en l'invitant à entrer... Inutile d'aller plus loin en parlant d'épée et de fourreau.
Soudain il me lâche et baisse les yeux. Mais il est plus grand que moi, ce qui limite un peu son panorama. Je suis un peu gênée de le laisser se rincer l'œil. Parce que je le laisse faire quelques secondes quand même, le temps de souffler un coup. C'est pas sérieux, tout ça ! J'amène une main devant ma poitrine pour remuer un les doigts, histoire de capter son attention, puis je pointe l'index vers mon visage. Une autre lui aurait sans doute décoché une gifle. Si j'avais dû en faire autant à tout ceux qui m'ont maté le décolleté j'aurais de la corne sur les mains : chaque jour ils défilent par paquets de trente.
Je suis quand même un peu toute chose, et je rougie.
" Je... Je ne voulais pas vous... "
Là je suis partie pour un gros mensonge. Je voulais carrément l'inviter à monter, même si je ne l'aurais sans doute pas fait. Je me racle la gorge un petit coup.
" Hum !... Je veux dire que comme on devait parler des cours particuliers, et que ça allait pas prendre des heures... "
J'ai bien des idées qui prendrait des heures, s'il est capable de tenir la longueur... Rhaaaaa ! Mais c'est pas possible d'être obsédée à ce point-là ! Cette classe de mise à niveau est vraiment une plaie ! Déjà que ça me gonflait à la base, avec les bâtons qu'on me met dans les roues ça m'énerve ! Là-dessus ce mec me tombe tout cuit dans le bec, alors forcément à quoi je pense pour me défouler ? Allez, Hitomi ! Respire, sourie, tout va bien. Et quand il viendra prendre sa leçon il sera toujours temps de craquer.
" Enfin bon ! Pour en revenir à ce que vous disiez : je ne vois pas quels problèmes ça pourrait causer. Vous n'êtes pas un lycéen. C'est même pas moi qui vais vous évaluer à la fin du programme ! Alors tant que je vous apprends à parler Japonais... "
Je me tais parce que sinon je vais encore dire une bêtise. Tant que je leur apprends à tous le Japonais je peux bien leur apprendre des contes de fée ou faire une orgie à chaque cours. Mais à ce compte-là je préfère les contes de fée, parce qu'il ne sont pas tous aussi mignons que Macross-san.
Je sens que la situation le met mal à l'aise et j'hésite à lui dire que je peux continuer seule, maintenant que la question des cours particuliers est réglée. On se contentera de la bibliothèque, ce sera moins tentant pour moi et moins stressant pour lui. Mais soudain des voix approchent au coin d'une rue. Des voix de mecs, plutôt insistantes, et une voix de fille, inquiète. Macross-san ne doit pas comprendre un traitre mot de ce qui se dit, mais quand l'équipe arrive dans notre champ de vision il faudrait être débile pour ne pas comprendre. Ils sont cinq, elle est toute seule, elle marche aussi vite qu'elle peut, et ils lui tournent autour comme une meute de hyènes.
" Allez, quoi !
- Je vous ai dit non ! Laissez-moi tranquille !
- Juste un verre, c'est pas comme si on te demandait une pipe !
- Hé ! "
L'un d'eux vient tirer sur sa jupe. Effectivement ils n'ont pas l'air du genre à demander. À peine sept heures du soir et devant le lycée en plus !
" Excusez-moi une seconde. "
Je laisse là Macross-san pour marcher à la rencontre de la petite troupe, qui ne tarde pas à me remarquer.
" Regardez ça, les gars !
- On est gâtés ce soir ! "
J'attrape la fille par le bras. Une de mes élèves, une interne. Je la tire contre moi pour lui glisser deux simples mots à l'oreille.
" Go ! Now ! "
Et elle ne se fait pas prier, mais ça me laisse seule face aux cinq jeunes hommes qui ne semblent pas se démonter. J'espère que si ça part mal mon chevalier blanc va voler à mon secours. Mais autant éviter la violence superflue. J'ai beau leur lancer des regards noirs l'un d'eux s'approche.
" Hé, mais ce serait pas la prof de Takashi-kun ? La rouquine coquine ? "
La "rouquine coquine" l'attrape par l'oreille et pince assez fort pour lui arracher une petite plainte surprise.
" Just dare to open that mouth again, and I swear I'll kick your balls so hard you'll spit them on this very ground !
- Quoi ? "
Je le repousse vers ses copains.
" Cassez-vous avant que j'appelle les flics ! "
S'ils ne se dégonflent pas, j'aurais vraiment besoin de mon chevalier blanc... S'il est toujours là.
-
Par instinct, j'avais désactivé mes pouvoirs. Si ma belle sensei avait décidé de me balancer sa main dans la figure, au moins ne l'aurait-elle pas cassée dans le mouvement alors que je n'aurais même pas bronché. Pourtant, la claque ne vint jamais et elle se contenta de faire tranquillement remonter mes yeux vers son visage d'un petit mouvement de doigt que je suivis tranquillement, rouge de honte et la bouche légèrement tordue dans une mimique de gène sincère et évidente. Honnêtement ? J'étais ridicule. En compagnie d'une femme superbe, je me comportais comme un Roméo de bas étage incapable de prendre le taureau par les cornes. J'aurais pû lui faire un peu de rentre-dedans, assumer jusqu'au bout les oeillades enflammées de la bibliothèque... Vous savez, juste pour dire que j'avais des grosses baloches et que j'étais un mâââââââle digne de ce nom. Pourtant, j'en étais incapable. Les femmes... Les femmes me faisaient peur, d'une certaine manière. Leurs réactions à mes tentatives de drague m'effrayaient à l'avance et ma piètre expérience dans le domaine ne me donnait pas vraiment d'assurance. Oh, bien sûr, il y en avait eu quelques unes quand même. Grâce au costume.
Se sentir en compétition avec son propre alter-ego avait quelque chose de ridicule, tout de même. Et puis, j'aurais voulu parvenir à "jouer" avec Yamagashi sensei en tant que Kyle. Pas forcément l'allonger ou la faire tomber dans mes bras, mais juste tisser un pseudo jeu amoureux entre nous. Ca m'aurait prouvé que je valais tant en jean qu'en collants renforcés, mais ce n'était visiblement pas pour ce soir.
Triste guignol, Macross San. Triste guignol.
Je la vois rougir et ça me tire un petit sourire. Je l'imaginais femme d'expérience et je m'aperçois que même si c'est le cas, elle réagit à mes maladresses presque positivement. Sensei, je ne sais pas si c'est un jeu pour vous, mais merci. Attention, par contre : ça risque de me plaire un peu trop.
- Je... Je ne voulais pas vous...
- Oh, euh... Je me doute, ouais.
Ben quoi ? Je ne suis pas assez imbu de moi-même pour m'imaginer qu'elle allait me proposer de rentrer, non plus. Notre désirable formatrice a juste accepté par politesse, je suppose. Je ponctue involontairement ma phrase d'un soupir nasal un peu blasé. L'habitude des vestes, en somme.
- Hum !... Je veux dire que comme on devait parler des cours particuliers, et que ça allait pas prendre des heures...
- Non mais ne vous en faîtes pas Sensei, j'ai bien compris ce que vous vouliez dire. C'est sûrement moi qui me montait des films à grands coups d'heures passées sur une surface plane ou pas. Je... pardon.
Ce n'était pas vrai. Ca ne m'avait pas effleuré l'esprit. Mais je ne voulais pas qu'elle s'approprie le mauvais rôle et c'est donc volontairement que je l'ai endossé en quelques mots, pour la soulager un peu et la laisser imaginer que je suis un pervers pas vraiment assumé. Ce sera certainement plus facile pour nous deux, bien que je réalise dans un éclair coquin qu'avec moi, les surfaces planes ne sont pas forcément nécéssaires. On peut faire l'amour en chute presque libre, vous pensez ?
La voilà qui change de sujet, ce qui me soulage l'esprit.
- Oui, c'est vrai ! Mais... enfin... Vous savez, les réputations se font et se défont rapidement. Si on apprenait que vous donnez des cours particuliers chez vous, vos élèves pourraient.. Enfin... Répandre des bruits de couloirs, ce genre de choses.
Avant de débarquer dans cette réalité, j'ai moi aussi été élève. Je sais comment cavalent les rumeurs entre les classes et je n'ai pas envie qu'on colle à une fille aussi sympathique et patiente l'étiquette de coquine facile.
Alors que je suis à deux doigts d'en rajouter une couche, des éclats de voix me font tourner la tête. Plusieurs hommes et une seule femme qui "discutent". Et bien que je ne comprenne pas grand'chose, la scène me semble d'expérience assez claire de loin et se dessine dans toute sa splendeur après que le groupe ait accompli quelques pas. J'entrave que dalle, mais j'ai vu assez de fois le spectacle pour imaginer les bulles de dialogue au-dessus des têtes présentes.
- Et voilà, pas un soir de libre...
J'ai parlé à voix basse, plus pour moi qu'autre chose. Je ne pense pas que Yamagashi sensei ait entendu, puisqu'elle m'a planté sur place dès que la jupe à été tirée. Laissé là comme un con, je ne peux que la regarder aller au charbon sans grande hésitation pour aller sauver la mise de la nana qui doit être une élève du lycée, qui file d'ailleurs sans demander de son reste alors que ma rousse volcanique se plante devant les loustics et tire l'oreille de l'un d'eux pour le faire se taire et prendre l'ascendant.
ET BAH PUTAIN ! Ce qu'elle lui balance avec assurance et une voix plus sèche que l'Arizona me scie les pattes et me fait ouvrir grand les yeux d'étonnement. Je ne sais pas pourquoi elle a choisi l'anglais pour la menace, mais le ton et l'accent parfait font leur effet. Même moi, je ne l'aurais pas ramenée, là.
Yamagashi sensei leur ordonne de dégager, et je comprends que ça va être beaucoup moins facile qu'elle ne le pense.
Ces petites frappes ne sont pas une simple bande de copains mais appartiennent au Rokuryu, une bande de Seikusu à la réputation ultra-violente. Pas difficile de le savoir, ils ont tous le dragon à six têtes tatoué dans le cou. J'en ai rossé des brassées entières ces dernières semaines, je sais donc de quoi je parle. Les lascars sont armés et dangereux... Les afficher comme ça n'était pas une bonne idée et je décide de limiter au mieux la casse, quitte à devoir baisser ma culotte devant eux. Pour Yamagashi, qui ne se rend pas bien compte de ce dans quoi elle vient de se fourrer, surtout à deux pas de chez elle.
Putain... Devoir jouer le looser devant elle, ça me fait mal au coeur et j'en aurais presque les larmes aux yeux quand je pose ma main sur l'épaule de mon sensei pour la mettre un peu en retrait, avachissant un peu les épaules et prenant l'air du mec qui ne sait plus où se foutre.
- On é désaulé lé gas... ma...euh...kopinne éme bien ce la rakontter, elle voulé pas s'oposé au Rokuryu... parddon.
Merde, merde, merde, merde. Attends qu'elle me quitte sur le pas de sa porte, que je revienne tous vous péter la gueule une fois mon costume enfilé ! En attendant, je me contente de multiplier les courbettes, avec un certain talent pour me faire passer pour un lâche. Généralement, ça suffit. J'en serais quitte pour quelques insultes, un crachat ou deux, mais ils passeraient leur chemin et en oublieraient Yamagashi en se marrant comme des cons. Donc, c'est parfait. D'ailleurs, je m'incline même à la japonaise pour fignoler l'ensemble, mais la réaction qui suit n'est pas celle que j'attends.
Un genou me percute le nez avec force et le choc brutal me fait rencontrer le sol alors que de petites étoiles me passent devant les yeux. Mes pouvoirs coupés ! Merde ! La douleur me vrille la tête et je sens les filets de sang chaud qui me souillent le visage tandis que je me tiens le nez.
Ils ne comptent pas laisser passer si facilement l'humiliation que la rousse leur a infligé et comptent bien le faire savoir, j'aurais dû y penser !
Je tente bien de me relever, mais un coup de pied dans les côtes vient me cueuillir et me coupe le souffle dans une expression etouffée.
Voilà que deux des types me martèlent généréreusement de coups de savate et avant qu'un pied ne s'enfonce dans mon estomac, je me demande avec horreur ce qu'il en advient de mon sensei, aux prises avec trois types décidés à laver leur honneur et très probablement à se vider les couilles. Si au moins j'arrivais à me concentrer !
-
Voir Macross-san s'aplatir me déçoit et me met vraiment hors de moi. J'ai même envie de lui en coller une. Mais le nom Rokuryu me fait l'effet d'un météore en pleine poire. Bien joué, Hitomi : tu laisses tomber tes petites gaffes d'allumeuse pour te jeter dans la gueule d'une meute de loups. Et aussi ce pauvre Kyle qui a au moins eu l'intelligence d'essayer de piger ce qui se passait. Ça explique au moins leur arrogance : d'après les médias ces types n'ont peur de rien. La seule chose à faire serait de m'aplatir aussi et de reculer doucement. Mais il est déjà trop tard.
Kyle se fait vite aplatir, au sens propre, par deux gars qui se mettent à le rouer de coups. Les trois autres me foncent dessus pour m'attraper. Mon esprit s'est éteint mais l'instinct me fait réagir. Le premier à arriver récolte le tranchant de ma serviette droit dans les côtes. Ça suffit à peine à le stopper. Les deux autres m'attrapent déjà par les bras, et en profitent pour me désarmer. Mais ils ne me frappent pas. Inutile de réfléchir pour comprendre ce qu'ils ont en tête.
Le premier vient m'attraper par les cheveux avec un sourire mauvais.
" Alors ? T'appelles pas les flics ? "
Son haleine pue le tabac et le saké. Il penche la tête pour venir me lécher le cou, ce à quoi je répond en lui mordant l'oreille aussi fort que je peux. Il crie et tire sur mes cheveux, j'en sens quelques qui s'arrachent. La douleur me fait serrer les mâchoire un peu plus fort. Puis rejette la tête en arrière. Il recule et porte une main à son oreille blessée alors que je crache le petit anneau que je viens de lui arracher.
" Salope ! "
Il me fusille du regard et revient d'un méchant coud de poing que je prend en plein ventre. Mon corps se plie en deux, si les deux autres ne me retenaient pas je m'effondrerais. J'ai le souffle coupé et trop mal réagir quand il vient relever ma jupe pour passer une main en-dessous. Les deux autres changent déjà de prise pour se libérer une main, et s'attaquer à mon décolleté.
" Toi tu vas prendre cher ! On va te... "
Ils vont me... Mais pas avant que j'envoie à celui-là un genoux dans les noix, pour lui apprendre ce qu'on risque à relever la jupe d'une femme sans son accord. Il ne crache pas ses boules comme je le lui ai promis, mais il recule à nouveau, bien penché en avant. J'en profite pour relancer ma jambe et le redresser d'un coup de pied en pleine tronche. Pas assez pour l'envoyer au tapis, mais ça a l'air de le sonner un peu. Les deux sont trop surpris pour me retenir quand je rue pour échapper à leur emprise.
Je me retourne pour fuir mais une main me retient par le poignet. Je reviens comme un yo-yo pour mordre, arrachant un cri de douleur et de surprise à mon agresseur. Il me lâche mais un autre est déjà dans mon dos. Il passe ses bras autour de la taille pour me soulever du sol. Je sais déjà ce qui m'attend. Ils ne laisseront pas m'échapper, plus je résiste plus ce sera long et douloureux. Mais je résiste quand même.
" Attrapez-la, bordel ! "
Les deux autres revienne, l'un d'eux repart avec l'élan de mon pied au visage. Le second arrive à attraper une de mes chevilles. Je tente de la balayer de ma jambe libre mais il arrive à me bloquer. Alors je plie les genoux au maximum et le repousse. Celui qui me tient en perd l'équilibre et part à la renverse. Il me lâche pour essayer d'amortir sa chute, mais cambré comme il était il se cogne l'arrière du crâne contre le bitume. Roule sur le côté et me tord le poignet en arrivant au sol.
Une nouvelle douleur qui me pousse à me relever rapidement. Je n'ai jamais été dans cet état, dans ma tête le tableau est flou et un vacarme assourdissant me bouche les oreilles. La douleur tire et me chauffe le poignet, me cisaille le ventre et me picote le côte de la tête. Je tremble de partout. Un mec au sol à côté de moi qui se redresse péniblement, un autre en face qui se relève, et le troisième qui se touche les dents. Un peu plus loin Kyle et les deux derniers agresseurs. Et c'est tout, la planète Terre n'est plus qu'un cercle de cinq mètres de rayon.
Je ne cherche pas à réfléchir. Serrant les dents sur un gémissement de douleur je charge l'un des adversaires de Kyle. Je lui saute dessus pour m'agripper, frapper, fouetter, mordre, griffer, saisir, tirer. Dune seconde à l'autre ils vont tous se reprendre, me jeter par terre et me rouer de coup. La suite importe peu, je ne serais sans doute plus état de m'en rendre compte.
-
Je me suis fais éclater la gueule une paire de fois dans ma vie, vous savez ? Quand j'étais môme à l'école quand je me faisais chahuter, au lycée quand je me faisais racketter, en ville quand je tentais de draguer la nana d'un costaud qui n'était jamais très loin. Une fois nanti de pouvoirs, je me suis frotté à des créatures de l'espace, des démons issus de l'Enfer, des mutants complètement cintrés, des demi-dieux frustrés et tout une pléthores d'autres cinglés qui ont prit ma carcasse pour un sac de sable. Me faire rosser ? Je connais. Les os brisés ? J'ai une belle collection de radios chirurgicales à la maison.
Mais jusque là, je m'étais toujours défendu. Je balançais mes poings comme je le pouvais, je battais des pieds, lançais des pierres ou plus tard des voitures... Bref, je ne m'étais jamais rendu. Question de fierté, question de respect de moi-même. Mes héros à moi n'auraient jamais laissé un type leur rentrer dedans sans broncher et je considérais que je leur devais bien ça. Quand je suis devenu SP, ce sentiment a été démultiplié et je l'utilisais comme prétexte pour toujours me relever.
Sentinel Prime n'a pas le droit de mettre genou à terre. Sinon, tout les gamins qui l'admirent perdront leurs repères.
Kyle Macross partage le même état d'esprit, mais Kyle Macross se fait actuellement défoncer, il n'y a pas d'autre mot. Couché à terre, je me suis roulé en boule pour diminuer l'impact des coups de pieds qui s'abattent sur mon corps et m'empêchent de me concentrer pour réactiver mes pouvoirs. Quelques chocs à la tête m'ont sonné et je ne sens plus ma mâchoire. Mes côtes me font souffrir, mes dents me donnent l'impression de danser sur mes gencives, mon oeil droit ne veut plus s'ouvrir et mon nez pisse le sang plus fort qu'une pucelle avec un mandrin de brute entre les cuisses.
Je voudrais que ça s'arrête, je voudrais avoir seulement avoir le temps de cracher l'hémoglobine qui tapisse ma bouche. Je voudrais gémir un peu, aussi. Ca me ferait du bien de pleurer, en fait.
Mes oreilles ont beau siffler, j'entends entre deux assauts sur mes flancs les expressions de fureur qui fuse d'un peu plus loin, de quelques pas à côté. Les mecs ont l'air de peiner sur quelque chose, mais quoi ? Minute. Mon esprit m'indique qu'un d'eux parle au féminin. Yamagashi sensei les fait tourner en bourrique ? Elle a du caractère et ne compte pas se laisser baiser si facilement, au propre comme au figuré. J'en rirais presque, mais ma lèvre inférieure s'ouvre lorsqu'elle rencontre la pointe d'un pied lancé si fort que le choc manque de me casser quelques dents.
Qu'on en finisse. Qu'ils m'envoient à l'hosto et qu'ils se la fassent, mais qu'on en finisse rapidement. C'est assez humiliant comme ça, c'est assez douloureux pour mon âme et pour mon corps. Si cette conne de rouquine n'avait pas ouvert sa grande gueule, on...
Minute, Macross. Tu fais quoi, là ? Tu parles de qui, là ? Tu es entrain d'attendre que ça passe et tu attends qu'ils la baisent pour aller mieux ?
C'est un coup au coeur qui me foudroie, comme si ma conscience avait décidé de poignarder ma lâcheté. D'accord, je ne suis pas un tombeur. D'accord, je ne suis pas un super coup. D'accord, je ne suis pas l'homme idéal pour les femmes que je rencontre. Mais j'ai ma fierté, j'ai un nom que je défends tout autant qu'un idéal. Je suis Sentinel Prime, MERDE ! SENTINEL PRIME !
Un des types a arrêté ses coups et l'autre aussi, presque dans la foulée. Ils vocifèrent contre une "petite pute qu'ils vont éclater" avant de la "faire tourner dans toutes les caves de la bande". J'entends qu'ils pensent en faire "le joli petit trou à bite de l'équipe", aussi. Sensei ? Elle continue de se défendre ? Sûrement. Et elle vient de me donner l'occassion de me relever, puisque personne ne me moleste plus. Un bras à terre, un crachat. Un second bras, les deux qui poussent ensemble, mes jambes qui se joignent à l'équipe et finissent par me porter. Je titube, je vacille.
Je suis debout.
Désolé, miss. Ils ont réussi à vous maîtriser quand même et vous êtes plaquée face contre le capot de la première voiture stationnée, jambes écartées et jupe relevée. Un type vous tient le bras gauche, un second le bras droit. Je crois que le troisième s'occupe de vous arracher ce qui vous servait de lingerie, puisqu'il vient à bout du tissu qui craque alors qu'il exulte.
Désolé, miss. Celui qui doit être le chef peine à déboutonner son froc mais y parvient quand même, puisqu'il glisse le long de ses jambes et qu'il exhibe sa queue bandée, prêt à la frotter contre vous alors que les deux larrons qui me tabassaient rient en l'imitant.
Désolé, miss. Vous ne pouvez pas voir la première droite que je balance et qui part comme une balle dans le visage le plus proche de ma position, envoyant valdinguer le type sur plusieurs mètres alors que mon poing lui a probablement défoncé une partie de la face. Vous n'avez pas pû voir ça, mais je jure sur tout ce que j'ai de sacré que vous allez profiter du reste du spectacle.
- Deuxième round, fils de pute.
La perte de leur copain les a forcés à abandonner Yamagashi et les deux qui la retenaient contre l'acier de la bagnole l'ont relâchée pour me foncer dessus. L'un d'eux à un cran d'arrêt dont la lame brille alors qu'il arme son geste de perforation, l'autre n'a que son poing. Les deux se brisent le poignet alors que leurs bras rencontrent mon buste chargé d'énergie et prêt à encaisser la charge d'une locomotive. Ils hurlent leur douleur mais sont coupés dans leurs exclamations par mes mains qui s'enfoncent dans leurs estomacs, avant qu'elles ne remontent pour les cogner l'un contre l'autre. Leurs caboches sonnent sinistrement quand elles se percutent et les larrons tombent à terre sous les yeux de leurs deux copains restants.
Le chef -qui a prit soin de remonter son futal dans l'action- me menace d'un flingue qu'il a probablement tiré de sa veste. Le voilà qui se met nerveusement à rire, le voilà qui me menace de tirer si je continue à avancer.
Docile, je reste donc immobile. Parce que j'ai envie de jouer.
- Voilàààààà, sage, Gai-Jin.... Tu vas aimer ça, on va baiser ta copine devant toi... Tu bronche, je t'allume, pigé ? Je vais lui défoncer le cul à ta pétasse, ouaiiiiiiiiiis..... En faire mon p'tit sac à foutre perso.... La faire couiiiiiiiiiiner !
Il se marre, son pote aussi. C'est drôle, je pensais que la démonstration de force avec leurs collègues suffirait à leur faire prendre la poudre d'escampette, mais la présence du Glock avec lequel ils me braque semble suffisante pour les rassurer. Je crache un peu de sang et m'essuie la bouche d'un revers de bras tandis que le chef fait signe à son pote de s'occuper de mon sensei.
- Le seul qui la baisera ici, c'est moi.
C'est sorti tout seul, sûrement aidé par l'adrénaline et la peur qu'il arrive quelque chose à la jolie rousse. Je n'en pense pas un mot mais pourtant je l'ai lâché sur un ton qui n'admet ni réplique ni protestation et j'ai refais un pas vers l'homme. Lui tire, mais la balle ricoche sur moi. Pas le temps pour son esprit d'analyser la situation que déjà ma main s'est refermée sur l'arme, la compressant progressivement entre mes doigts sous ses yeux terrifiés. Il cherche à s'enfuir mais je suis forcément plus rapide que lui et j'attrape son visage pour l'enfoncer dans le capot de la voiture où se trouvait Yamagashi Sensei. Le second a déjà prit la poudre d'escampette, mais je lui lance la boule de métal qui était l'instant d'avant un revolver et le voilà qui s'effondre, assommé.
Face à la prof de langue, je me sens tout penaud. Sans trop savoir pourquoi, je lisse sa jupe, tire un peu dessus comme si je voulais m'assurer qu'elle la couvre bien.
- Tu vas bi.... Pardon... Pardon... Je suis tellement désolé de...
Je ne parviens pas à finir ma tirade. Je suis désolé de ce qu'elle a failli subir, je suis désolé de l'avoir tutoyée par reflexe. Je suis désolé de n'être pas parvenu à lui épargner ces minutes menée d'un train d'enfer.
Peut-être aussi suis-je désolé de ne rien trouver de mieux que de refermer mes bras autour d'elle pour la presser contre mon corps en une présence que j'espère rassurante, tendre. Amicale, amoureuse. Peu importe.
- Je vais t'amener à l'hôpital... Je vais... oh... pardon...
Mon Dieu... Si tu m'entends, fait qu'elle ne se rende pas compte des larmes qui envahissent mes yeux avant de dévaler sur mes joues. Fait que je parvienne à ne plus m'en vouloir de ne pas avoir sû épargner à cette femme l'épreuve qu'elle vient de traverser.
D'elle si forte ou de moi si faible, Mon Dieu... Qui est le héros, en cet instant ?
-
" Sur la bagnole ! "
Ils ont fini par m'attraper, et ça n'a pas pris longtemps. Deux qui me tiennent par les bras, un autre par les jambes. Et j'ai beau remué cette fois ils tiennent bon. Ils serrent tellement fort que mes bras commencent à s'engourdir. Ils me balancent à plat dos sur le capot d'un voiture, ma tête heurte le pare-brise que j'entends craquer. Pour faire mal : ça fait mal, et ça me sonne méchamment, mais je suis encore consciente. Je n'ai pas le temps de reprendre mes esprits et de me redresser qu'il m'attrapent à nouveau et me retournent.
Cette fois ils ne se contentent plus de me tenir : deux d'entre eux sont montés sur le capot pour carrément m'écraser. Je les entends rire ou râler, me cracher ce qu'ils comptent faire de moi. Et soudain c'est comme si tout mon corps s'endormait. Cette sensation-là, je ne l'ai connu que deux fois dans ma vie. Je voudrais avoir assez de volonté pour la chasser, et continuer de résister même en vain, mais je ne peux pas.
J'en pleure de rage, de frustration et de peur. De honte aussi, parce que je me laisse charmé par cette petite voix rassurante. Elle murmure à mon oreille que je n'ai qu'à fermer les yeux et penser à autre chose, que ce n'est qu'un mauvais moment à passer. Je ne veux pas l'écouter, mais je n'ai rien d'autre à quoi me raccrocher pendant qu'un de ces gars relève ma jupe pour arracher ma culotte. Il me scie le bas-ventre et le haut des cuisses, mais je le sens à peine. Là je sais que j'ai laissé tomber, mes yeux se ferment tout doucement. J'écoute la petite voix une fois de plus. La troisième, ça fait deux de trop. Je ne veux même plus qu'on me sauve. Je veux que ça s'arrête, et que ça ne recommence jamais.
J'attends la suite, toutes les choses qu'ils ont promis de me faire subir. Mais rien. Au contraire les poids qui m'écrasaient s'envolent, je me sens glisser lourdement. Est-ce que ça y est ? Déjà ? Est-ce que c'est de ça qu'on m'a "sauvée" par deux fois ? C'était pas si terrible en fin de compte.
Soudain une détonation souffle la petite voix et me fait sursauter. Mon cœur part au galop, je sens l'adrénaline qui fuse à travers tout mon corps. Je rouvre les yeux, pousse des deux bras pour me redresser et me hisser à genoux sur le capot. Je suis encore vivante et consciente, même si je tremble de partout. Mon regard noyé et paniqué tourne dans tous les sens. Je vois quelqu'un penché près de moi, qui part en courant.
Soudain un choc près de moi fait trembler le capot, et remuer la voiture sur ses amortisseurs. Je me retourne juste à temps pour voir le haut d'un corps glisser du capot, et derrière une grande silhouette qui lance quelque chose. Je suis trop choquée pour comprendre ce qui se passe, ou ce qui vient de se passer. J'étends les jambes pour atteindre le sol. Mon cerveau n'arrive pas à faire le tri entre ce qu'il perçoit en ce moment, ce qu'il a refoulé pendant mon esprit s'est fermé, et tout ce qui s'est passé avant. Les coups, la panique, et surtout les voix. Elle se croisent, se chevauchent, se coupent les unes les autres.
" Rokuryu.
- Attrapez-là !
- Sage, Gai-jin !
- Salope !
- Tu bronches, je t'allume !
- Deuxième round !
- La faire couiiiii...
- Le seul qui la baisera ici... "
La dernière voix a dispersé toutes les autres, comme les moutons se dispersent devant un loup. Rien de ce que j'ai vu ou entendu dans ma vie ne m'a terrifiée à ce point. Et je sais qu'elle va avec l'homme qui baisse les yeux dans ma direction.
" ... C'est moi. "
J'ai tellement peur que je retiens mon souffle, pourtant mon cœur bat toujours aussi vite. Mes poumons ne se décident à se remplir à nouveau que lorsque que l'homme touche mes cuisses pour lisser ma jupe. Mais je reste assise à le fixer, pétrifiée par la terreur, les bras repliés devant moi dans une posture de défense instinctive et ridicule. Il parle, enfin je crois, un martèlement sourd et rapide m'empêche de comprendre les mots qui passent ses lèvres.
Puis je tressaille quand il passe ses bras autour de moi. Après ce que je viens de vivre je ne suis pas d'humeur câline. Le seule fait qu'il me touche me dégoûte, et me terrifie encore plus. Mais j'ai trop peur pour seulement me plaindre. Je reste prostrée contre lui. En reprenant mon souffle, j'essaie de ne pas penser à ce qu'il va me faire. Mais il ne me fait rien, il reste contre moi, il m'emprisonne de ses bras...
Il ne va pas plus loin, et mon cerveau se remet lentement en marche. Il relie les points, remet les choses dans l'ordre. La classe, les loubars et la lycéenne, l'agression, les trois que je parviens à repousser par miracle, le quatrième sur lequel je me jette comme une folle. Et autre chose, d'un bout à l'autre.
" Kyle... "
J'ai à peine soufflé son nom, comme si je n'arrivais pas à y croire. C'est le cas. Pendant que je me battais bec et ongles, il se faisait proprement démonter sur le bitume. Il n'aurait pas du être capable de se relever, encore moins de prendre le dessus à un contre cinq. Pourtant il l'a fait, pour moi. Il ne m'a pas prise dans ses bras pour me faire ce qu'ils n'a pas laissé les autres faire. Il m'a prise dans ses bras pour... s'excuser ? Et pleurer ?
Mon corps n'est pas plus à l'aise pour autant, entre les mains d'un homme. Mais je dégage doucement mes bras, vers le haut, pour poser les mains sur ses épaules. Mon regard monte en même temps pour rencontrer le sien.
" Tu... Vous... Est-ce que... ça va ? "
Mon corps ne tarde pas à me rappeler à l'ordre. Mais comme le danger est bel et bien passé c'est pour autre chose. Je suis vidée, je n'ai plus de forces et j'ai mal partout. Mais et lui ? Il ne pleure pas pour rien. Il a peut-être pris un mauvais coup ?... Ou une balle ? C'est un coup de feu que j'ai entendu tout à l'heure. Je m'écarte soudain en baissant les yeux, et les mains. Je pars à la recherche d'une blessure sur son torse ou ses bras. Si j'étais moins paniquée je me dirais que c'est pas bien malin : s'il est blessé je ne lui ferais que plus de mal. Mais je suis encore très paniquée.
" T'es blessé ? Qu'est-ce qu'ils t'ont fait ? Tu vas bien ? "
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Vous êtes vous déjà senti minable ? Je veux dire VRAIMENT minable ? Moi oui, une paire de fois. Mais ce soir, au moment où mon sensei se dégage de mon étreinte pourtant douce et pétrie de bons sentiments, j'ai l'impression de toucher le fond d'un gouffre tellement béant que je ne serais jamais capable de voler assez haut pour m'en échapper. Tout ce pouvoir, tout ce vécu pour en fin de compte laisser une situation banale pour moi m'échapper, déraper horriblement. Je me suis fais tabasser et elle... Une question percute d'ailleurs mon esprit avec force et une désagréable insistance. Tandis que Yamagashi sensei était retenue prisonnière sur le capot, y'a t'il eu pénétration ?
C'est horrible, comme interrogation. Quelques esprits pervers trouveraient peut-être la question excitante, tout comme la situation. Certains chercheraient probablement à en tirer partie, aussi. Moi, je n'ai qu'une envie : me jeter sous un train et en finir. Décidément, la lâcheté est une amante tenace et sacrément collante. La rousse me regarde pourtant et je m'efforce d'éviter avec soin la couleur de ses beaux yeux. Mon oeil valide est fuyant, l'autre est fermé par l'éclat d'un coup reçu qui doit être bien bleu à présent. Ma lèvre est éclatée, mon visage et mes fringues couverts de sang et tout mes muscles tendus au possible sous l'étoffe de mon tee-shirt. Je me connais assez pour savoir que mon corps est encore en état d'alerte et prêt à réagir à tout et n'importe quoi.
Ses mains sur moi me dégoûtent presque, me donnent simplement envie de lui balancer mon poing en travers de la gueule. Franchement, je n'ai ni envie qu'on me touche, ni qu'on me regarde. Yamagashi fait les deux et je dois me faire violence pour ne pas réagir brutalement. L'excitation et la peur sont encore mêlées dans mes veines et dans mon esprit, détonnant cocktail menaçant de faire chavirer mes réactions. Expirant bruyamment, je me concentre sur sa voix douce sans cesser de pleurer. Au mieux mes larmes se calment elles un peu, disons.
Quand mes doigts viennent à la rencontre des siens pour leur faire arrêter un peu sommairement leur inspection, la poigne est un peu plus forte que je ne l'aurais voulu. Je ne le réalise pas et je me contente de renifler un peu fort avant de prendre la parole d'une voix que j'essaie de contrôler pour lui donner le timbre un tant soit peu viril que ma perceptrice lui a connu jusque là.
- Ce... Ca va, ça va. C'est pour toi qu'il faut s'inquiéter.
Cette femme est belle. Oui, oui, je sais : ça n'est pas une nouvelle en soi. Elle même est d'ailleurs sûrement consciente de cet état de fait et il n'a rien d'étonnant mais... Comment dire ? Là, en cet instant plutôt particulier, elle m'apparaît comme l'illustration du terme "beauté". Purement et simplement. Si Aphrodite existe encore, ma prof de langue est peut-être celle qui peut lui tenir la dragée haute et l'idée me fait d'ailleurs piquer un fard plutôt inattendu. En moi se mélangent une montée brutale de tendresse à son égard, de désir charnel sauvage et un poil de honte. Comment puis-je me permettre de ressentir tout ça après ce qu'elle vient de vivre ? Je suis une ordure, qui n'a pas le temps de creuser cette révélation puisque les sirènes des voitures de police commençent à se rapprocher de nous.
La bagarre a dû alerter les riverains, ou simplement la petite étudiante par qui tout est arrivé. Ou le coup de feu, allez savoir.
On va nous trouver, nous emmener, nous poser des questions. Demander à la rousse de repasser le fil de la soirée. Je ne pense pas que ce soit le bon moment.
Délicatement, je lui attrape une main pour la faire descendre de la voiture et je mêle mes doigts aux siens tandis que je ramasse sa serviette en grimaçant sous la douleur de mon corps qui me lance de partout maintenant que la tension redescend peu à peu.
Soupirant, je me rapproche d'elle jusqu'à sentir sa poitrine s'écraser doucement contre mon buste.
- Tu as besoin de repos et d'un peu de paix, je pense. Je... fais moi confiance, d'accord ? Fais moi confiance...
La lumière des gyrophares illumine la rue par intermittence et je la serre davantage contre moi. Me baissant, je saisis ses jambes et la porte finalement comme une jeune mariée, comme un fardeau précieux que je tiens fermement contre moi.
Et je décolle. Je nous ouvre les cieux à une vitesse raisonnable, qui nous fait laisser rapidement Seikusu sous nous, réduisant la ville à ce qui semble être une construction pour enfants, sorte de cité de plastique insignifiante. Le vent fouettant mon visage me fait un bien fou et j'en profite un instant avant d'orienter mon vol vers le sud, en direction de la campagne qui borde Seikusu.
- Je répondrais à toutes tes questions plus tard.
Le ton est doux, mais assez sec pour qu'elle comprenne qu'elle n'aura rien de moi tant que je ne l'aurais pas décidé. Bon sang... J'espère que je ne vais pas regretter ce que je suis entrain de faire, j'espère que moi je pourrais lui faire confiance à mon tour.
Le reste du trajet se fait en silence. Dix minutes à ressasser ce qui vient de se passer, dix minutes à me maudire et à envisager le plus sérieusement du monde le seppuku. Et puis, je lui parle de nouveau alors que nous amorçons notre descente vers ce qui semble être une petite auberge traditionnelle perdue dans les montagnes ceignant la grande ville. Si Yamagashi sensei jette un oeil un tant soit peu attentif, elle verra facilement qu'il s'agit en fait d'un Onsen traditionel comme on en voit dans beaucoup de mangas. Un hôtel rural doté de bains chauds naturels et aménagés à la nippone, en somme.
- Je viens très souvent ici quand... quand ça va mal. Les patrons me connaissent bien et sont très prévenants, et...et...euh... je baisse les yeux, me disant que j'aurais normalement dû l'amener à l'hôpital. Mais j'ai agis comme un gosse un peu bête. Enfin, tu vas pouvoir te reposer ici, au moins cette nuit... Et..euh..enfin...euh...si tu préfères aller à l'hosto ou seulement chez toi, je... tu... ben... y'a qu'à demander...
J'ai mis pied à terre dans l'entrefait, dans la petite cour intérieure où j'ai l'habitude d'atterir. J'aimerais m'excuser de l'avoir amenée là, de faire les choses en dépit du bon sens, mais une voix de femme âgée m'en empêche. Elle s'exprime dans un japonais parfait mais prend le temps de prononcer chaque mot pour que je puisse comprendre relativement facilement ce qu'elle me dit. La petite dame qui nous fait face est jolie pour son âge, vêtue d'un hakama sobre et élégant. Ses cheveux grisonnants sont tirés dans un chignon impeccable et son visage agréablement vieilli semble catastrophé quand elle vient à notre rencontre... Nous devons faire peine à voir.
- Kyle kun, tu vas bien ? Et ton amie ? Que s'est il passé, Kyle kun ?
Déposant Yamagashi sensei sur le sol, je laisse madame Hirohito l'inspecter des pieds à la tête tout en cherchant à donner des explications du mieux que je le peux.
- On a aitai agrécé mé sa va, sa va ! On peu pacé la nuit issi et profitai dé bins ? S'il vous plé ?
Elle hoche la tête en me regardant, s'affolant de l'allure de mon sensei plus que de la mienne. Ca me fait doucement sourire et enfin, je me sens un peu plus à l'aise. Un peu.
- Vous allez devoir partager une chambre, nous sommes presques complets... Kyle kun, tu ne devrais pas arriver comme ça ! On pourrait te voir ! Nigaud !
- Parddon, madame Hirohito...
- J'emmène ton amie, Kyle kun. Je vais prendre soin d'elle, tu n'as pas à t'inquiéter. Venez, mademoiselle, venez !
Les voilà qui s'éloignent, juste après que j'ai réalisé que je n'avais pas relâché la main de mon sensei un seul instant que maintenant, l'espace entre mes doigts me semble bien vide. De là où je me trouve, j'entends notre hôtesse qui hêle son mari pour qu'il vienne à ma rencontre, ce qu'il fait rapidement. Nous nous saluons comme il se doit avant qu'il ne m'entraîne vers les vestiaires jouxtant les bains chauds, me demandant simplement de ne pas me montrer trop au reste de la clientèle afin de ne pas l'effrayer. J'obtempère en silence et me retrouve rapidement devant les casiers en osiers devant lesquels je me dévêtis totalement pendant que monsieur Hirohito s'éclipse pour revenir avec une petite boite à pharmacie, me disant que j'y trouverais de quoi me soigner. Il me signifie aussi que le bains dit "des amants" va nous être réservé, à miss Yamagashi et moi, afin que nous ne croisions personne. Notre état pourrait faire fuir sa clientèle et je le comprends bien alors que je le remercie, filant enfin vers la porte donnant accès au bassin nous étant dédié. Avant d'y accéder, je prends toutefois une douche pour me débarasser du sang me couvrant et je pénètre finalement dans l'onsen même.
L'endroit est joli, donnant une vue sur la pas si lointaine Seikusu et ses lumières, un peu en contrebas de la montagne. Des roseaux et des galets ceignent un bassin brûlant et fumant ou l'eau m'arrive au nombril et l'ensemble du lieu respire le zen, la tranquillité.
Nu comme un ver, je me pose dans un coin, les pieds dans l'eau. Je regarderais pour me soigner un peu plus tard, préférant souffler un moment, cherchant ce que je vais bien pouvoir dire à Yamagashi sensei si elle décide de me rejoindre. Bon sang, comment a t'on pû en arriver là ?
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(Le bain... ^^ (http://www.da-japon.fr/wp-content/uploads/2010/11/onsen-1.jpg))
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Quand il attrape ma main je réprime une plainte. Il m'écrase les doigts. Son visage est méconnaissable à cause des coups qu'il a reçu. Mais sa voix aussi sonne bizarrement. Après tout ça je ne sais pas comment prendre ce qu'il me dit. Pourquoi c'est pour moi qu'il faut s'inquiéter ? Je me suis déjà bien inquiétée face à ces cinq types, et finalement il n'en a fait qu'une bouchée. Face à lui je ne pourrai pas me défendre, et je n'ai pas envie de ressentir cette horrible sensation une quatrième fois. Pas déjà, plus jamais. Je commençais à peine à me sentir rassurée, maintenant je ne sais plus ce que je ressens. Il me fait peur, mais j'ai aussi peur qui m'abandonne.
Je suis bien vite obligée de choisir entre les deux. Des sirènes de police éclatent dans les rues. Il me prend par la main, mais déjà bien plus gentiment. Je me relève et le laisse me guider quand il va ramasser ma serviette de cours. Dire qu'il pense à ce détail. Une partie de moi qui se méfie, et me dit qu'il est peut-être en train de couvrir ses traces pour que personne ne parte à ma recherche. mais quand il se redresse et que je le sens tout contre moi, mon choix est déjà fait.
" Tu as besoin de repos et d'un peu de paix, je pense. Je... fais moi confiance, d'accord ? Fais moi confiance...
- D'accord. "
Je n'ai pas le temps de me demander dans quel direction il va me tirer qu'il se baisse. Son bras libre passe sous mes genoux et il me soulève du sol, visiblement sans effort. Il ne me laisse pas plus de temps pour lui dire que je peux encore marcher. Mon cœur n'en finit pas de battre la chamade. On décolle. Le sol disparaît, ne laissant que les façades des building, qui finissent par s'effacer pour ne laisser que le ciel. Il ne m'a toujours pas lâché la main, mon bras libre est dans le vide.
Kyle vole. Rien que de le penser c'est de la folie pure. L'air devient froid mais ce n'est pas ça qui me fait soudain tressaillir. Une horrible pensée vient de me traverser l'esprit. Si c'était vraiment de la folie ? Si j'étais encore sur le capot de cette voiture, à subir les pires horreurs entre les mains de ces cinq types ? Si tout ça n'était qu'un rêve, soufflé par la petite voix ? Ce serait pousser un peu loin le fantasme du héros, mais il y a une logique. Je prends l'avion dix fois par ans, quasiment depuis ma naissance. Voler ne me fait pas peur, à chaque fois c'est pour retrouver des gens et des endroit que j'aime. Et en ce moment rien ne me ferait plus plaisir.
" On... Vole ?
- Je répondrais à toutes tes questions plus tard. "
Mon sauveur qui me rembarre ? Et à moins qu'on se pose en Irlande dans les dix minutes qui viennent, devant la maison de ma mère, ce ne sera pas encore trop beau pour y croire. Si c'est réel, ça restera sans doute la plus grosse surprise depuis mon arrivée à Seikusu. Quoique dans cette ville on ne peut jurer de rien. De toutes façons je n'ai rien d'autre à faire que me laisser aller. En revanche Kyle a l'air de ruminer. Je voudrais lui caresser le visage pour le rassurer, mais j'ai peur de relancer la douleur de ses hématomes et de sa lèvre. Et je ne sais pas quoi dire. Après tout, si j'avais réfléchi avant de foncer il ne serait pas dans cet état. Je regrette presque de l'avoir laissé me raccompagner, malgré tout ce que ça m'aurait coûté.
Il finit par descendre. Je jette un petit coup d'œil vers les lumières qui s'approchent. Une petite auberge traditionnelle. Son refuge. Le mien est à des milliers de kilomètres, trop loin pour que j'y courre quand ça va mal. Comme en ce moment. Alors quand il me propose de me ramener en ville je me contente de le fixer dans les yeux en secouant doucement la tête. Non, surtout pas.
Une femme sort nous rejoindre et c'est en tournant les yeux vers elle que je réalise qu'il s'est posé dans la cour. À l'entendre s'inquiéter je me demande si ce n'est pas sa mère. Mais Kyle n'a qu'à ouvrir la bouche pour me rappeler sa mère n'est sans doute pas Japonaise. Je préfère me faire toute petites, d'autant que la scène est plutôt amusante. Ce n'est pas sa mère mais elle pourrait à sa façon de le reprendre, et celle dont il s'excuse. En tous cas la petite dame a l'air montée sur batteries.
" J'emmène ton amie, Kyle kun. Je vais prendre soin d'elle, tu n'as pas à t'inquiéter. Venez, mademoiselle, venez ! "
Elle m'invite à la suivre, en s'inclinant presque assez pour me faire une révérence. J'adresse un dernier et grand à mon sauveur, en laissant glisser ma main hors de la sienne.
" À tout à l'heure, Kyle-kun. "
Même aussi gentiment, c'est un peu ingrat de ma part de le chambrer. Au moins ça devrait le rassurer un peu. Je suis la maîtresse de maison à l'intérieur. J'en profite pour me présenter à mon tour, et m'excuser. Mais pensez-vous ! Avec Kyle-kun il en faut beaucoup plus pour être dérangé ! Bien sûr je ne dois pas le lui répéter. Elle a l'air de l'aimer, son Kyle-kun, et de toute évidence c'est réciproque. Je n'ose pas lui demander s'il vient souvent ici, parce que ça reviendrait à demander si ça va souvent mal pour lui.
Hirohito-sama me conduit à une chambre, celle que je vais partager avec Kyle. J'ai surtout besoin d'une bonne douche, ou plutôt des bains dont ils ont parlé. Je profite d'un miroir pour regarder de quoi j'ai l'air. Mon visage est encore rouge mais intact, j'ai les cheveux en pétard. La manche droite de ma veste est un peu décousue, la gauche presque arrachée. Les boutons sont partis dans la bagarre, comme plusieurs de ceux de mon chemiser. Je baisse les yeux pour déboutonner ce qui reste, remarquant au passage que mes bas sont irrémédiablement foutus.
Je découvre mon ventre, et risque un doigt sur la grosse marque violacée à côté de mon nombril. Je l'effleure à peine que je tressaille. Ça fait mal, mais pas au point de me plier en deux ou de me faire trembler les jambes. Hirohito-sama revient poser un yukatabira bleu nuit, impeccablement plié, et une paire de getas sur la commode.
" Je vais vous trouver des vêtements, Yamagashi-san.
- Merci beaucoup.
- Si vous voulez vous détendre nous avons réservé le "Bain des Amants" et... "
Et soudain son regard se fait un peu méfiant.
" Depuis combien de temps connaissez-vous Kyle-kun ? "
Question piège, même double-piège. Je le connais depuis deux heures à tout casser, ou une éternité avec ce qu'on a traversé. Quand même un peu tôt pour partager la chambre et le "Bain des Amants". Si en plus je lui dis que je suis sa professeur, un de nous deux risque de dormir sur le paillasson. Mais si je mens ce sera moi, et pas un risque. Ça ne se fait pas de mentir à son hôte, surtout quand on s'impose. Je préfère être honnête, même si je ne suis pas trop sûre de mon coup.
" Un peu moins de deux heures. "
Les yeux d'Hirohito-sama s'étrécissent, et ne me lâchent pas avant qu'elle ne quitte la pièce. Inutile de me dire de faire attention avec Kyle-kun. Je ne peux pas m'empêcher de penser que si elle avait été là, on aurait pas eu le temps de morfler. Mais bon, je poursuis mon petit examen. Aïe ! Je vais avoir une belle bosse derrière la tête, mais pas de sang dans les cheveux. En me déshabillant je découvre tous les hématomes sur mes bras et mes jambes, aux endroits où nos agresseurs m'ont agrippée.
J'en ai un frisson. D'une certaine façon leurs mains sont encore sur moi. Je ferme les yeux et porte une main à mon front. Je respire profondément. Ils sont loin, et ils ont pris une dérouillée. Mais surtout je suis ailleurs. C'est fini et bien fini, je ne risque plus rien pour le moment... Enfin rien à part me faire mettre à la porte à coups de pompes aux fesses, si je cause encore du soucis à Kyle-kun. Et avec des sandales traditionnelles en bois ça pourrait faire mal. D'ailleurs je passe mes getas, et mon yukatabira. Et comme à avec tous les kimonos depuis que j'ai six ans, je mets un temps monstre à nouer la ceinture correctement. C'est que je viens d'Irlande, les ceintures avec lesquelles on m'a élevée avaient des boucles.
Mais ça me rassure d'une certaine façon. En partant à la recherche du "Bain des Amants" je n'ai pas vraiment envie d'enlever ce kimono. Je ne veux pas que Kyle voit toutes ces marques et s'excuse encore. S'il s'en veut d'avoir laissé le temps à ces hommes de me faire le peu que j'ai enduré, alors j'ai bien le droit de penser que je ne l'ai pas volé. J'ai bien le droit prendre un peu sur moi.
Je m'efforce de retrouver le sourire en arrivant au bain. Le cadre est on ne peut plus douillet et intime, cerné d'arbre rassurants qui ouvrent sur la ville. Seikusu est toujours là, fourmillante de vie, de surprises et de menaces. Mais on est au-dessus, hors de sa portée. Je remarque tout de suite Kyle tranquillement installé dans le bain. Il est nu, l'air et chaud et humide, mais contrairement à mes habitudes ça ne suffit pas à m'émoustiller.
Je remarque aussi la trousse à pharmacie, que je ne manque pas d'attraper au passage. Tant pis pour le bain, je préfère laisser mon dos et mes muscles me tirer encore toute la nuit que d'infliger à Kyle la vue de mes stigmates. D'autant que les siens sont bien pires. Il n'a pas pu manquer mon arrivée, avec mes getas qui claquaient le parquet où je les ai laissées, et maintenant mes pied qui font cliqueter les galets.
" Je comprends pourquoi tu viens ici, Kyle-kun. "
Oui, j'en remets une petite couche en approchant. Et une petite couche de leçons particulière, même s'il sait sans doute déjà ce que je fais mine de lui apprendre.
" Kun, c'est pour les jeunes garçons. Alors comme j'ai vingt-six ans, je dois t'appeler Kyle-kun ou Kyle-san ? "
Je viens m'agenouiller au bord du bassin, près de lui, posant la boîte à pharmacie à portée de main. J'ai du mal à retenir une expression de dégoût, vivement teintée de colère, quand je vois à nouveau d'aussi près son visage. Chaque blessure que je vois me rappelle que si j'avais réfléchi avant de foncer il n'en serait pas là. Ma gorge se sèche d'un coup.
" Je... "
Je me penche vers la boîte. Je fuis son regard. Pour un peu j'allais m'excuser, mais à tous les coups il s'y serait mis aussi. Il m'a sauvé, bordel ! Du viol collectifs, peut-être même de la mort ! Qu'est-ce qu'il lui faut de plus ?
" Bouge pas... Je vais m'occuper de ça. "
J'espère que je n'ai pas l'air trop fébrile, ou que ma voix de s'étrangle pas trop. J'essaie tellement de me retenir que je ne suis pas sûre. Et à force de farfouiller dans la petite boîte, je commence à me rendre compte que ma vision se trouble.
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Hmm... La chaleur ambiante des bains est un régal qui délasse peu à peu mes muscles tendus, qui apaise légèrement le feu qui brûle mon esprit et mes pensées. Le cours de la soirée repasse inlassablement devant mes yeux, des premiers instants à poser le regard sur Yamagashi sensei à notre arrivée à l'auberge. Les pires souvenirs sont encore frais dans ma mémoire et je sens une puissante bouffée de colère m'envahir quand je la vois maintenue en respect sur le capot, livrée toute entière à ces porcs excités. L'ai-je sauvée ? Une part de mon esprit me souffle que oui, que j'ai évité le pire malgré tout. L'autre partie me flagelle de reproches en me disant que si j'avais été sur le qui-vive dès le départ, ma prof n'aurait jamais eu à subir toutes ces humiliations. Est-ce que je deviens négligent ? Moins bon ? Possible aussi que je me repose sur mes lauriers et que j'en paie ce soir les pots cassés. Enfin, que ma sensei les paye, plutôt. Je passe une main lasse sur mon visage et je grimace aussitôt, la douleur de mon cocard et de ma lèvre se rappellant à mon bon souvenir. En plus de tout, je vais avoir une sale gueule pendant quelques jours. Heureusement, la belle rousse n'a pas été touchée au visage et je m'autorise à penser que c'est un réconfort bien maigre dans le tourment de ce qu'elle a vécu. Vais-je arriver à la regarder dans les yeux, maintenant ? Pas sûr.
Me redressant un peu, je décide de m'inspecter rapidement. Mon buste musculeux est couverts de bleus, comme mes bras et mes jambes. Rien de cassé semble t'il. C'est au moins ça de prit, pas vrai ? Bon, je ne pourrais pas draguer pendant quelques temps, c'est un fait. Mais de toutes façons, Bah ! Je n'ai jamais réussi à séduire quiconque et dans un soupir las, je me dis que ce n'est certainement pas avec Yamagashi que ça commencera. C'est peut-être ça, mon lot, mon revers de la médaille : ma solitude. Tiens, d'ailleurs, je ne me souviens pas avoir entendu parler ma compagne d'infortune d'un quelconque partenaire. Dans ce genre de cas, on veille à appeller la personne qui pourrait nous attendre à la maison, non ? Elle, si belle, seule ? J'en doute. Peut-être préfère t'elle multiplier les sex-friends, un truc du genre ? D'un sens, je me dis que la tournure de cette soirée n'est pas un mal en soi : j'aurais détesté imaginer que je n'étais qu'un nom sur une liste.
Mince... Me voilà possessif ? Exclusif ? Tu divagues, Macross. C'n'est pas le moment de t'occuper de ce genre de futilités ! Je me tape le front de ma propre bêtise alors que j'entends le bruit caractéristiques de getas sur un sol boiseux. "Les Amants" nous sont réservés, donc ce n'est pas un potentiel client. Pas plus qu'un des gérants, qui s'interdisent ce genre d'intrusion sauf en cas de demande ou de force majeure. Donc... C'est elle. Yamagashi sensei.
Mon coeur fait un bond dans ma poitrine avant de me donner l'impression de ne plus vouloir battre et mon estomac se noue pour descendre plus bas que mes couilles. Que vais-je dire ? Que vais-je faire ? Je n'en sais rien, je... je...je suis perdu, en détresse. Je me sens si mal envers elle...
Lâche, comme trop souvent ce soir, je ne la regarde pas et feint de ne pas l'avoir entendu, préférant m'interesser à l'agencement des roseaux entourant le bassin. Je suis soulagé que ce soit elle qui brise le silence que je trouve un peu trop pesant, lançant une banalité avec une gentille pique. Son sourire quand on s'est quittés dans la cour me revient en mémoire, rayon de soleil dans cette soirée de merde. Instinctivement, je regarde la main qui quelques minutes plus tôt serrait la sienne. C'est drôle, cette sensation me manque. Cette proximité aussi. C'est sûrement pour ça que je pose enfin sur elle un regard doux, empreint de tendresse. Sa petite leçon de chose parvient à me faire sourire un peu et je décide de tenter de lui rendre la pareille.
- Fais simple, appelle moi "chéri" ou "mon coeur" ?
Un sourire à son encontre. Pas de piège dans mes mots, pas davantage de proposition. Juste un trait d'humour léger, pas forcément fin. Mais qu'importe ? L'air est lourd de tension entre nous et je pense qu'il faut arriver à changer ça. Je la vois changer de tête quand elle regarde la mienne et je me sens mal. Je sais que ce n'est pas la vue qui la dérange, mais plutôt les raisons de ces maux qui me défigurent. Se sentirait elle coupable ? Bon sang, mais elle est passée entre les mains de ces brutes, elle ! Je n'ai que quelques marques que le temps effacera. Elle est blessée plus intimement, et... et... Et un silence gêné se pose alors que je ne parviens plus à la regarder en face, que je me mords l'intérieur de la joue pour ne pas hurler ma peine. Celle que je ressens pour elle.
Yamagashi sensei décide de jeter son dévolu sur la boîte de premiers secours sous prétexte de m'aider et moi, je m'interesse à ses mains qui fouillent un peu trop fort le contenu pharmaceutique. Sa voix a commencé à se noyer dans les larmes et ses adorables yeux commencent à également en être envahis. Je voudrais fuir, la laisser là. Je dois lui parler, je le sais... Mais je ne vois pas comment je pourrais la calmer, la rassurer. Je suis mauvais dans tout ce qui touche le sentimental, c'est un fait avéré.
J'envisage de m'écarter d'elle, d'aller me baigner. De filer, simplement.
Pourtant, mes mains se posent avec toute la délicatesse du monde sur les siennes et leur font cesser l'inutile chambard alors que mes doigts pressent les siens, que je me penche un peu plus sur elle. Je pourrais presque l'embrasser. J'ai terriblement envie de goûter à ces lèvres qui en cet instant m'ont l'air de tremblotter un peu trop.
La pulpe ourlant ma bouche s'ouvre délicatement non loin de la sienne, à un souffle...
Et quelques mots viennent combler l'espace nous séparant.
- Ce n'est pas ta faute. J'ai choisi de me faire casser la gueule, comme à chaque fois. Je soupire et continue. Je pensais que ça suffirait pour qu'ils te laissent tranquille, c'est tout. Ce que tu as fait là-bas, c'était stupide, inconscient. Héroïque. Tu as fais face malgré tout et ça, c'est... Respectable. Si je dois me faire briser l'échine pour des femmes comme toi, ce sera sans hésiter. Surtout si c'est pour toi. Plutôt moi que toi, et ce quoi qu'il arrive. Plutôt moi que toi.
Je le pense vraiment et mon oeil valide en témoigne bien : pour elle, je pourrais me faire rosser cent fois. Ma voix s'est éteinte avec douceur, comme pour une déclaration d'amour. Ce n'en est pas une, mais il est temps que nous jouions franc-jeu après tout ce qui s'est passé. C'est pour ça que je continue à lui parler après un petit moment, collant mon front au sien par instinct.
- Je suis désolé de ne pas t'avoir sauvée. Je sais... Je sais qu'aucun mot, aucune parole ne te fera oublier... enfin... ce qui s'est passé. Tu as été forte, tu continue à l'être. Si ça peut... Si ça peut te rassurer, te consoler ou je ne sais quoi et bien... dis toi que je vais veiller sur toi. Le temps que tu me laisseras une petite place dans ta vie, je veillerais sur toi.
Ce n'est toujours pas une déclaration, même si ça en a tout les attraits, tout les atours. Je passe ma langue sur ma lèvres blessée pour l'humecter un peu, je serre un peu plus les mains de ma sensei dans les miennes. Et maintenant ? Je dois attendre quoi ? La gifle ? Je dois m'avancer un peu pour l'embrasser, comme dans les films ? Non... Je ne pense pas qu'elle ait besoin du contact d'un homme, surtout pas. Mais je sais ce qui lui fera du bien.
- Déshabille toi et profite des bains, d'accord ? Je ne vais pas te regarder, je file dans notre chambre préparer un matelas pour que je puisse dormir ce soir. Ne t'en fais pas, tu ne crains rien ,ici.
Un long regard ponctue ma dernière phrase, avant que je ne relâche délicatement ses mains dans un tout petit sourire. Je me relève doucement face à elle, déployant mon corps aux muscles dessinés par l'eau y ruisselant. La vapeur et la chaleur se sont associées pour souligner mes courbes masculines, oui. Mais je n'ai aucune envie d'en jouer, aucune envie de m'exhiber. J'avais d'ailleurs pris soin de garder une serviette pour me couvrir le bas ventre et c'est en la ceignant autour de ma taille que je prends d'un pas lent la direction de la sortie.
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Je ne peux pas m'empêcher de ravager la boîte à pharmacie. J'en suis presque à gratter au fond quand les mains de Kyle se posent sur les miennes. Je me fige avant de lentement tourner un regard tremblant vers lui. Je suis horrifiée. Sa tendresse me fait peur, et surtout elle me fait mal. Je ne la mérite pas, elle rajoute au fardeau que je m'inflige. Je crois que s'il m'en voulait assez pour me mettre la trempe que ces gars lui ont mise, je serais la plus soulagée de nous deux.
Mais ces sentiments répugnants se taisent un peu plus de seconde en seconde. Je ne pense toujours pas mériter sa tendresse, mais j'en ai tellement besoin en ce moment. Sentir ses mains autour des miennes me donne envie de lâcher prise, de le laisser enfin me soutenir comme il veut le faire depuis le début. De ne plus l'en empêcher. Je suis en ruine à l'intérieur, la seule chose qui tient debout est un gros bloc de remords. Et il ne cesse de grossir à chaque instant que les blessures de Kyle passent dans mon champ de vision, d'autant plus que son visage est si près du mien.
Il commence à parler, doucement. Je me force à baisser ma garde pour laisser passer sa voix tendre et hésitante. Je me force à vouloir le croire en espérant que ça suffira. C'est difficile de se reposer sur quelqu'un quand on ne pense qu'à encaisser connement, surtout quelqu'un qui a pris plus de coups. Mais j'y arrive, péniblement. Je lâche et je me rattrape au fil de ses mots. C'est de ma faute, mais il a peut-être vraiment préféré serrer les dents le temps que ça passe. J'ai été stupide et inconsciente, mais d'un autre côté j'ai quand même permis à cette fille de s'enfuir. Et il veut bien y repasser à ma place comme je l'ai fait pour elle, mais moi je ne veux pas. Je ne veux plus jamais voir quelqu'un dans cet état pour couvrir mes erreurs, ou juste me protéger.
Malgré son œil au beurre noir son regard me fait frissonner, de chaleur. J'ai perdu le fil de ses paroles, mais sa voix douce provoque un vrai tremblement de terre en moi. J'ai fini par me convaincre. Le gros bloc de remord commence à céder. Tout se disloque et s'effondre, tout ce qui me pèse ou qui m'entrave. Tout ce qui pourrait encore me convaincre de le fuir. Mais ce cataclysme est silencieux, je n'entends que sa voix même si je ne la comprends pas. Elle m'attire et me promet que tout va mieux. Ma bouche s'entrouvre d'elle-même, comme mes paupières qui commencent à descendre. Embrasse-moi, Kyle. Prend-moi dans tes bras et ne me lâche plus jamais.
Mais ça ne peut pas être aussi simple. Il se tait, et je manque de partir en avant quand il se relève devant moi. Je me remets debout pour le voir enrouler sa serviette autour de sa taille, puis partir. Mais pourquoi ? Il ne m'a quand même libérée tout ça pour m'abandonner dans la seconde. Pourquoi il s'inflige ça ? Pourquoi il nous l'inflige à tous les deux ? Qu'est-ce qu'il est con ! Et qu'est-ce que je suis conne de ne pas essayer de l'arrêter. Ça suffit. On en a assez bavé pour ce soir, même pour toute une vie. Remue-toi Hitomi ! Ne le laisse pas partir ! À aucun prix !
" Attend ! "
Je le rattrape aussi vite que mon kimono et mes pieds nus le permettent. C'est juste assez pour me laisser le temps de m'essuyer les yeux d'un revers de la main, et prendre une grande inspiration. Je répugne à dire ce que je vais dire, parce qu'y penser me ramène sur le capot de cette bagnole, à la merci de cinq monstres. Ma gorge se serre presque à m'étrangler et j'ai envie fondre en larme sur place, de m'écraser par terre pour le sol m'avale. Mais ça, je ne l'encaisse pas connement. Je mets toute ma volonté à rester debout, regarder Kyle en face, et lui parler d'une voix qui se veut inflexible.
" Si tu... Si tu n'avais pas été là... Je l'aurais fait quand même. "
Et pas qu'un peu, c'est justement ça qui fait trembler ma voix et perler mes larmes.
" T'as raison... J'ai été inconsciente, et stupide... Mais héroïque aussi... J'ai sauvé cette fille de ces brutes... Et je me suis pas enfuie... "
Je sais que ça va lui faire mal d'entendre ça, et qu'il risque de se fermer encore plus. Mais tant pis.
" J'aurais pu... J'ai eu une occasion... Une seule... Mais j'y ai même pas pensé... Je t'ai vu par terre, alors... Alors je... "
Je ne peux pas prononcer la suite. Je t'ai vu par terre, je t'ai vu en train de te faire massacrer. Je t'ai cru mort pendant un moment. Je pleure pour de bon, mais je tiens encore sur mes jambes. J'attrape une de mes manches pour la relever d'une main nerveuse. Et je te montre ce que je voulais te cacher. Le peu de lumière qui les éclaire rend les marques sombre encore plus effrayante, du moins pour moi.
" Regarde, Kyle !... Regarde bien !... Ça, c'est tout ce qu'ils m'ont fait... Parce que tu les as pas laissé faire plus... Tu m'as sauvée !... Tu sais que sans toi... Je serais encore là-bas !... Avec eux ! "
Ça suffit comme ça. Je sais pas si ça l'aiderait que je lui raconte tout ce qui me serait arrivé, mais moi je ne pourrais pas le supporter. Je baisse la tête une seconde. Je serre les poings et les dents, je ferme les yeux de toutes mes forces. J'ai l'impression de me battre encore, et c'est beaucoup plus difficile que contre ces brutes. C'est contre Kyle que je me bats, alors que je devrais m'effondrer à ses pieds pour pleurer ma gratitude. Je prends une grande inspiration et je relève la tête pour le dernier assaut. Le chemin que suivent mes yeux est intolérablement long, parsemé de bleus et d'écorchures. Il mène à une lèvre éclatée et un œil au beurre noir.
" Si t'avais pas été là, je serais pas restée pour essayer de te sauver... Mais j'aurais jamais eu l'occasion de fuir... Ils auraient été cinq contre moi... Et j'y serais allée quand même. "
Parce que suis stupide et inconsciente, ou héroïque si ça lui chante. Mais surtout je suis conne de ne pas lui avoir dit plus tôt ce qu'on sait tous les deux.
" Ça me fait mal de voir ce qu'ils t'ont fait... Et ce qui me fait le plus mal, c'est de te voir t'excuser comme si c'était ta faute...C'est pas ta faute... Ni la mienne... C'est leur faute, à eux... Et tout ce que je regrette, c'est de t'avoir entraîné là-dedans... Je regrette, de tout mon cœur... Mais je suis contente aussi... Que t'ait été là... Et que tu sois resté... Pour moi... "
Dit autrement, je suis contente qu'il en ai pris plein la gueule. Je devrais me sentir mal de lui avouer ça ? Ou de me l'avouer à moi-même ? Parce que c'est pas la cas. Je n'ai pas dit ça pour le rassurer, c'est sorti tout seul. Je suis vraiment heureuse qu'il ait été là tout du long. Je le suis depuis le début, j'étais seulement trop aveuglée par mes remords pour le voir. Je me sens si légère d'un coup, malgré la fatigue et la douleur qui me tirent le corps. Je baisse encore la tête, j'ai un peu honte de sourire après tout ce que je viens de lui dire. C'est plus fort que moi. J'essuie à nouveau mes larmes. Je voudrais le prendre dans mes bras, mais je ne vois pas où poser les mains sans risquer de lui mal.
Je me perche sur la pointe des pied pour lui donner un baiser, du bout des lèvres, aussi loin que possible de la blessure qui barre la sienne. Mais je dois vite reposer les talons pour ne pas perdre l'équilibre. Je n'abandonne ni ses yeux ni mon sourire pour autant. Je le prends aussi par la main, tendrement, pour la première fois.
" T'as été aussi héroïque que moi, ce soir. Alors fait-moi plaisir : retourne dans l'eau, et laisse-moi prendre soin de toi. "
Je le tire doucement pour l'entraîner vers le bassin. J'espère que je l'ai aidé à se sentir mieux, et que j'arriverais vite me débarrasser de la ceinture de mon yukatabira. Je n'ai plus rien à lui cacher, quitte à m'occuper de lui autant profiter aussi du bain. Et il n'a sans doute pas plus envie que moi de rester seul dans l'eau.
-
" Attend ! "
Le mot me fait m'arrêter alors que j'allais poser le pied en direction du vestiaire. Je n'ai pas envie de lui obéir et je préférerais tirer ma révérence pour une fois que je suis parvenu à être intelligible et cohérent face à une femme qui me plait. Aucun sous-entendu graveleux, aucune oeillade vers ses formes. Je crois que je ne me suis jamais comporté comme ça avec une femme et je crois aussi que mon sensei m'a vu sous un jour que je ne me connaissais pas moi-même. Ca me convenait, pourtant. J'aurais mille fois préférer en rester à mes derniers mots. Alors j'esquisse les premiers mouvements du reste de ma fuite mais ses pas sur les galets me font m'arrêter dans mon élan et je pose la main sur la porte que je m'apprêtais à pousser. Si je la passais, cette porte ? Si je me comportais en goujat ? Elle abandonnerait l'idée de vouloir m'adresser la parole.
Et l'espace d'un moment, la pensée me terrifie franchement. Alors je me retourne lentement pour lui faire face le plus dignement possible, pour m'assurer qu'elle est bien là.
Puis je l'écoute, je bois ses paroles.
- Si tu... Si tu n'avais pas été là... Je l'aurais fait quand même.
- Je sais, oui.
Elle n'avait pas hésité un seul instant à se mettre entre la fille et ces brutes et ma présence sur les lieux n'avait rien à voir dans l'assurance qu'elle avait démontrée au plus fort de l'action. Peut-être espérait elle légitimement que j'intervienne si ça venait à tourner au vinaigre, oui. Mais quand bien même, la prof ne m'avait à aucun moment considéré comme un atout dans son jeu et s'était contentée d'agir selon sa façon de vivre et de penser, en prenant son courage à deux mains. Elle ne s'était pas démontée.
On dirait que ça lui coûte, mais Yamagashi sensei admet qu'elle a été tant idiote qu'héroïque et je plussoie d'un simple hochement de tête. Qu'y a t'il à rajouter sur ce qui ont été mes propres mots ? Rien.
La suite... La suite est éprouvante. Horriblement dure, d'une certaine façon. Si elle est restée sur place quand elle a eu l'occassion de prendre ses jambes à son cou, c'est parce que j'étais entrain de me faire passer à tabac, de me faire défoncer par deux cinglés hyper-violents. Et croyez moi, les larmes qui accompagnent cette révélation me fendent le coeur et appellent les miennes, qui se mettent à rouler sur mes joues sans que je ne puisse vraiment les retenir, sans que j'essaie seulement de le faire. Quand elle dévoile son avant-bras, je ne parviens d'ailleurs pas à réprimer un petit sanglot qui n'a rien de viril. Voilà tout ce que j'ai été capable de faire ce soir ?
Pitoyable héros, n'est ce pas ? Qu'ai-je de super alors que je laisse une femme se faire molester ? C'est tellement pitoyable... Tellement...
- Regarde, Kyle !... Regarde bien !... Ça, c'est tout ce qu'ils m'ont fait... Parce que tu les as pas laissé faire plus... Tu m'as sauvée !... Tu sais que sans toi... Je serais encore là-bas !... Avec eux !
Mes yeux sont baissés et je me laisse totalement aller à mes pleurs d'enfant. Je ne gémis pas, mais quelques sanglots parsèment la chappe de silence qui nous entoure et je ne m'en sens que plus mal. Mon coeur est en miettes, mon coeur n'est plus qu'un reste sec qui me maintient péniblement en vie. C'est une leçon de morale, c'est un savon. Je comprends qu'elle cherche à atténuer ma peine et c'est ce qui me fait si mal à l'âme : qu'elle veuille le faire après tout ce qui s'est passé. En tant qu'homme, en tant que surhomme... Je ne mérite pas qu'on me tire vers le haut de cette façon.
Les mots de la rousse me font mal, me font du bien. Je ne sais pas trop ce qui se passe dans ma tête, champ de bataille sentimental sur lequelle ma honte et ma fierté se font la guerre tandis que les paroles de ma belle interlocutrice font office de coups de mortiers distribués au hasard entre chacun des camps.
- je suis contente aussi... Que t'ait été là... Et que tu sois resté... Pour moi...
- Je serais... je serais resté pour n'importe qui.... Parce que je suis comme ça... Plus bête encore que toi... parce que... parce que j'ai choisi de prendre les coups pour les autres... Mais... mais... je suis... content de...
Je n'achève pas tout de suite ma phrase, préférant d'abord relever la tête pour la fixer de mes yeux inondés et rougis par les larmes qui y coulent encore.
- De t'avoir sauvée... toi. Je... me faire casser la gueule pour toi... ca ne me dérange pas...
Pourquoi elle ? Parce qu'elle est jolie ? Parce que c'est ma prof ? Parce qu'elle a de beaux yeux ? Non. Parce qu'elle me plait, tout simplement. Je n'arriverais pas à l'exprimer clairement, ce drôle de sentiment. On ne se connait que depuis même pas deux heures et on ne sait rien l'un de l'autre. Pourtant, l'attirance que je ressens pour elle n'est pas uniquement physique, il y a autre chose. Quoi, je n'en sais foutrement rien mais je veux le découvrir.
Son sourire panse quelques unes de mes plaies au coeur et son baiser fugace achève de donner un intêret à la soirée, à cet instant suspendu dans le temps. Je n'ai pas le temps d'y répondre que déjà il s'achève sur sa main attrapant la mienne pour me forcer à faire machine arrière pour reprendre la direction du bain et de l'eau qui semble me tendre les bras.
- T'as été aussi héroïque que moi, ce soir. Alors fait-moi plaisir : retourne dans l'eau, et laisse-moi prendre soin de toi.
- Alors... Tu viens dans l'eau avec moi et surtout, surtout... Tu me donne ton prénom. Mais avant tout, excuse moi pour ça.
Je m'arrête brusquement et tire sur mon bras pour la ramener à moi, la coller sans vergogne contre mon corps presque nu. Ma main libre file vers la ceinture retenant son yukatabira et mes lèvres blessées se posent sur les siennes pour un baiser plus long que le premier, plus passionnel aussi. C'est loin d'être du grand art, c'est peut-être même le pire baiser qu'elle ne partagera jamais, parce que ma lèvre éclatée est gonflée et douloureuse, m'empêchant de me livrer totalement à l'échange. Pourtant, j'y mets toute la tendresse dont je suis capable afin de ne pas trop la décevoir, de ne pas trop regretter de lui laisser un souvenir qui sera peut-être amer.
La ceinture de son vêtement cède rapidement aux avances de mes doigts, mais je veille à ne pas laisser les pans dévoiler son corps et je les maintiens moi-même fermés. Il est simplement question ici de l'aider à aller se baigner, pas de la faire tomber dans de quelconques filets de séduction.
Sentant que le plaisir de la caresse de nos lèvres se perd pour moi dans la douleur, je sépare délicatement nos bouches en prenant sa main pour lui faire tenir son kimono de bain.
- Pardon.
Un simple sourire alors que mes doigts glissent délicatement sur la main que je tenais encore avant de l'abandonner pour ôter ma serviette quand j'entre dans l'eau. Je m'étonne moi-même de cette assurance un peu nouvelle, mais j'en suis fier.
Je ne demande rien de plus qu'un autre de ses sourires, à présent. Et au diable qu'elle me prenne pour un salaud : je sais que nous sommes à présent quelqu'un l'un pour l'autre.
Et ce n'est pas un baiser volé qui changera ça, j'en suis convaincu.
-
Il ne fuit pas. Il reste. Il me demande de venir avec lui dans l'eau, de lui dire mon prénom et... De l'excuser ? Je n'ai pas le temps de me demander ce qu'il va encore se trouver comme tare qu'il m'attire contre lui. Il m'embrasse. Il me serre contre lui et je n'hésite pas à m'abandonner. Je réponds à peine à son baiser, je me laisse porter. Le voilà enfin, mon sauveur. Mon héros. Pas celui qui encaisse obstinément, quitte à se frapper lui-même. Celui qui s'est relevé pour se battre, et qui se relève maintenant pour emballer la fille.
Je ne cherche pas à le retenir ou à lui disputer le contrôle. Bien sûr je pourrais, même en faisant attention à sa lèvre ouverte. La vérité c'est que je ne veux pas. Je profite de la chaleur de son corps sur le mien, et de sa main qui me débarrasse lentement mais sûrement de ma ceinture. Je sens bientôt venir la fin de ce long baiser, et j'ai toutes les peines du monde à me retenir de le prolonger. On m'a déjà embrassée bien mieux que ça, mais je n'ai jamais ressenti une telle envie, un tel besoin que ça continue. Ni une telle peur d'en demander trop.
Nos lèvres se séparent, et je garde d'une main mon kimono fermé comme il m'y incite. Il n'a pas encore vu la plus grosse marque que cette soirée a laissé sur mon corps, et j'ai encore peur qu'il en fasse un drame. J'ai peur qu'il perde son sourire pour tomber encore dans ses propres reproches.
" Pardon. "
Sa main quitte la mienne en une légère caresse qui me fait frissonner. Je reste un instant plantée là, à le regarder. Il laisse tomber sa serviette pour se glisser à nouveau dans l'eau. Et alors qu'il me tourne encore le dos je ne peux m'empêcher de murmurer ce que je pense.
" Kyle-kun... Baka... "
J'aime bien Kyle-kun, même si ce n'est pas vraiment approprié. Ça lui va bien. Je me ressaisis de mon mieux et file le rejoindre. J'hésite un instant au bord du bassin, avant de laisser le yukatabira glisser de mes épaules. Je me retiens de lever une main devant mon ventre pour cacher l'hématome. Il le verrait quand même, et pourrait croire que ça me fait encore mal. Il n'aurait pas complètement tort. En me penchant pour le rejoindre dans le bassin, je sens comme un gros pincement. Je ne peux réprimer une petite grimace. Mais l'eau chaude engourdit vite la douleur.
L'eau chaude, et seulement l'eau chaude. J'ai une envie folle de me glisser sous son bras pour me blottir contre lui. Mais je me retourne pour attraper dans la boîte à pharmacie de quoi m'occuper de sa lèvre. Un petit morceau de coton vite imbibé de désinfectant : ça va pas être aussi agréable qu'un baiser. Je reviens vers lui sans chercher à le prendre en traître, ce que j'ai pensé à faire. C'est comme les piqure, on sait que ça vient mais ça passe plus vite avec la surprise. Mais je le préviens avec un regard désolé.
" Ça risque de piquer. "
J'approche doucement le coton pour lui tamponner délicatement la lèvre. Et j'ai de quoi le distraire.
" Hitomi... Je m'appelle Hitomi. "
Je l'ai dit en rougissant, d'une voix toute fluette. J'ai même cru que les mots n'allaient pas sortir. C'est idiot. Après tout ce qui s'est passé, tout ce qu'on vient de se dire et de ressentir... Après s'être embrassés. Ce n'était pas si grand pas à franchir. C'est peut-être là qu'est toute son importance. J'aurais pu, j'aurais dû le lui dire avant, mais je n'y même pas pensé. J'en ai fait la dernière petite porte qui pouvait se dresser entre nous. Et j'ai attendu qu'il frappe pour lui ouvrir.
Je repose le morceau de coton au bord du bassin, et j'en profite pour me rapprocher encore de lui. Je viens m'asseoir à côté de lui, tout contre lui. Mon cœur s'est remis à battre fort dans ma poitrine. Mon regard et ma main viennent caresser son corps entre deux eaux, effleurer ses muscles meurtris par les coups. Je ne lui demande pas si ça fait mal, j'ai l'impression de le sentir moi-même. Tous ces bleus, toutes ces petites écorchures, je savais qu'ils étaient là quand il s'est relevé pour me secourir. J'ai du attendre pour les voir, et prendre leur pleine mesure. Et j'ai beau me les reprocher un peu moins, je souffre quand même de les voir.
Ils passeront avec le temps, comme mes bleus à l'âme commence à passer. Ma main finit par s'arrêter sur son ventre, et je lève les yeux vers le visage de Kyle. Je repense à toutes les choses incroyables que j'ai vues en si peu de temps. Comment a-t-il pu se relever après ça ? Où a-t-il trouvé la force d'étaler ces cinq hommes en un battement de cil ? Et il a volé ! D'où il peut bien sortir ? De quel planète délirante s'est-il échappé pour venir se perdre ici ? J'aurais des dizaines de questions à lui poser sur ce qu'il est, et surtout qui il est. Mais celle qui surplombe toutes les autres est bien plus simple : quelle importance ? Et j'y répond vite en chassant tout ça de ma tête.
Je passe lentement mes bras autour de lui pour venir poser ma tête sur son épaule. La chaleur de l'eau m'a bien assommée. Ma poitrine est pressée contre son torse, et j'ai même enroulé une jambe autour de la sienne. C'est bien la première fois de ma vie que je ne fais pas ça à un homme nu pour l'exciter. S'il le prend comme ça je ne dirais pas non. Mais je veux juste me blottir un peu plus contre lui, le sentir un peu plus contre moi.
-
Alors que m'étais calé contre le bord tout en m'étant immergé dans l'eau brûlante, Yamagashi senseï accepta de venir vers moi et je ne perdis pas une miette du spectacle, pour être franc. La voir se dénuder a quelque chose de très érotique, presque délicat. J'en aurais été facilement excité si les marques brunes sur son corps et son ventre n'avaient pas tâché d'auréoles désagréables le grain délicat de sa peau que je sais maintenant douce. Les bleus -et surtout celui qu'elle arbore au ventre- me rappelle à la douleur de la soirée et la voir grimacer tandis qu'elle se penche pour entrer dans l'eau me donne un coup au coeur. Je ne dis pourtant rien et me contente de la couver du regard un peu timidement. Impressionné ? Peut-être un peu. Séduit ? Totalement.
Je ne demande qu'une chose : qu'elle vienne vers moi au plus vite et que nous puissions entamer un dialogue un peu plus banal que celui que nous avons échangé quelques minutes auparavant. J'aurais parlé de n'importe quoi tant que ça m'aurait permis de la garder un instant supplémentaire contre mon coeur, contre mon corps. Etait-ce là un sentiment partagé ? Je n'en savais rien et je me surpris à l'espérer alors que je la regarder s'intéresser à la boîte à pharmacie qu'elle quitta pour me rejoindre un coton humide à la main. Prévenante... D'autant qu'elle me préciser que ça va piquer.
Effectivement, ça pique, cette merde ! Je grimace et grommelle mais me laisse néanmoins faire, l'esprit occupé par la révélation qu'elle me fait. Son prénom. C'est un petit rien, c'est un grand tout. C'est -je pense- le signe qu'elle m'accepte dans une sphère privée un peu plus intime que ce que nous avons échangé jusque là.
- Ravi de te rencontrer, Hitomi.
Je force volontairement sur son prénom en souriant, démontrant le plaisir que j'ai à le connaître et ne la quitte plus du regard. Je n'ose pas la prendre contre moi, ne voulant pas brûler les étapes entre nous. Mais elle continue de prendre les devants en s'installant au plus près de moi et je la laisse parcourir du bout des doigts les replis parfois douloureux de mon corps qui s'offre à elle sans résistance, sans hésitation. Je suis des yeux le tracé qu'elle laisse contre mon épiderme et j'accroche son regard du mien quand elle relève la tête.
Les questions qui se bousculent dans sa tête, je pourrais presque les dire à voix haute tandis que nous nous scrutons sans mot dire. Beaucoup d'interrogations restent en suspens, pas vrai ? Pourquoi je vole, qui je suis vraiment... Je me tiens prêt à lui répondre le plus franchement possible, mais rien ne vient.
A part elle, qui se love tendrement contre moi qui reste comme un con l'espace d'un instant. Je ne suis pas habitué à tout ça, j'en rougis d'ailleurs bêtement avant de me décider à abattre sur elle mes bras qui la serrent avec douceur, lui offrant un cocon protecteur délicat. Dans l'eau, la jambe qu'elle n'a pas saisi vient se caler contre celle qu'elle a posée sur moi et nous voilà tout deux livrés à une étreinte qui m'arrache un soupir de bien-être discret et plein de sens.
Je dépose un long baiser sur son front.
- Je me demandais... Si demain la magie n'est pas retombée, si on continue de se plaire après tout ça... Ca te dirait de partir en voyage ? Je sais, c'est un peu soudain, mais... Enfin, je trouve l'idée très excitante. Les vacances scolaires approchent à grands pas, non ?
Mouais. Dans le genre rouleau compresseur, on fait difficilement plus fin. Proposer à une fille dont on ne connaît le prénom que depuis trente secondes c'est soit superbement gonflé, soit carrément répulsif pour elle. On verra bien, je ne suis pas à une gaffe près quand il s'agit de femme, après tout. Et puis... Je l'ai dis, il est question de magie. Le monde semble s'offrir à nous après l'Enfer et ça joue énormément dans la perception de l'instant. Je réalise dans un brutal pincement de coeur qui me fait me raidir un peu contre elle que tout ça se terminera sûrement en quelques salutations polies. Et rien de plus.
Hitomi, un simple nom sur une liste ? Je ne veux pas de ça, non. Mais ma raison me souffle que c'est une évidence qui va vite me revenir en pleine gueule.
- Si tu as des questions, tu sais, vas y franco. Je suppose que je te dois bien quelques explications.
Et surtout, j'espère que ça va te distraire d'un petit élément qui prend doucement de la place tout à côté de ta cuisse. Parce que mine de rien, je reste un homme et sentir ta poitrine contre moi me rend progressivement dingue. Et retenir une érection de ce calibre est un excercice mental qui va me faire sauter quelques neurones, bien que je m'applique à me concentrer pour éviter un gonflement trop évident.
Parle moi, Hitomi, distrait moi. Ne me laisse pas aller à une envie primaire dont je crains surtout qu'elle ne brise ce petit rien que j'aimerais voir grandir entre nous.
-
Après l'affreux cauchemar qui finit de s'estomper, ce bain est vrai rêve éveillé. La chaleur de l'eau et de l'air humide apaise mon corps, et celui de Kyle apaise mes pensées. Je pourrais m'endormir là, blottie contre lui. Nos corps enlacés, même entrelacés, baignent tranquillement sous le ciel silencieux. Seikusu et son vacarme constant sont assez bien loin pour ne pas déranger notre petit bout de Paradis. Je repose la tête sur le torse de Kyle pour le sentir se gonfler d'air, puis s'affaisser dans un soupir qui me donne un frisson de bonheur.
Je ferme les yeux pour mieux ressentir le baiser que ses lèvres déposent sur mon front. Il me fait fondre et ses mots ne suffisent pas à me tirer de ce rêve éveillé. Je ne veux pas penser à demain. Je veux profiter de la magie tant qu'elle est là, et ne pas imaginer qu'elle pourrait disparaître.
" Ca te dirait de partir en voyage ? "
Je rouvre les yeux d'un coup sans oser les relever vers lui, espérant n'avoir pas sursauter. Soudain ? C'est le moins qu'on puisse dire. D'un autre côté qu'est-ce qui n'a pas été soudain entre nous depuis le début ? Et j'en ai soupé du Japon. Entre mon arrivée en ville, puis plus tard mes wagons de copies et de cours à préparer, je suis restée à Seikusu pendant mes dernières vacances. Depuis le berceau je n'ai jamais passé autant de temps d'affilé au même endroit, ni eu à ce point besoin de changer d'air.
Je me serre un peu plus contre lui, et relève les yeux vers son visage avec un sourire léger.
" J'ai très envie de partir en voyage avec toi. "
Maintenant que c'est réglé, il nous reste à nous envoyer en l'air et rencontrer nos parents respectifs. Après ça on aura allégrement cramé toutes les étapes d'une relation de couple qui démarre, et dans le désordre pour ajouter à la légende. Mais on peut encore attendre un peu avant de se sauter dessus. En tous cas je peux attendre, même si à force de me coller à lui, de sentir son corps contre le mien et sa cuisse au creux des miennes, je commence à en avoir envie.
Je repose la tête sur son torse pour profiter encore du calme et de la chaleur. Si j'étais une chatte je ronronnerais rien qu'à sentir sa peau contre le mienne, et ses muscles en-dessous. C'est tellement bon, tellement douillet et chaleureux que je me sens lentement glisser. Je suis comme une gamine qui lutte contre la fatigue un soir de Noël, juste voir la taille des cadeaux qu'elle ouvrira au matin. Heureusement qu'il essaie de faire la conversation, sinon je ne tarderais pas à m'endormir. Il suppose mal, mais je ne suis pas assez bête pour le lui dire. Mes yeux remontent, et je m'écarte un peu histoire de bouger, de me réveiller.
" Je n'aime pas trop poser de questions. "
Je le fixe dans les yeux, toujours avec ce sourire léger, ravi mais pudique d'une certaine façon.
" Et si demain la magie n'est pas retombée... si on continue de se plaire après tout ça... "
Ma voix ne fait que descendre, tout doucement. Son visage empli peu à peu mon champ de vision et mes yeux sont incapable de rester sur les siens. Il est toujours blessé, défiguré, mais qu'est-ce qu'il est beau malgré tout !
" On aura tout le temps pour les questions... "
Je pose les main sur ses épaules pour me hisser vers lui, combler les quelques centimètres qui séparent encore nos visage. Nos souffles se mêlent, comme nos regards à nouveau.
" Je n'ai pas peur des surprises. "
À peine plus qu'un murmure pour joindre mes lèvres aux siennes. Tendrement, pour ne pas le faire souffrir, mais intensément, il ne peut que le sentir. Je ramène mon corps vers le sien et... Surprise !... Hé ! Non ! Pas surprise ! Je suis toute nue en train de me frotter à lui depuis cinq minutes. Ce que je sens glisser sous ma cuisse n'a rien d'une surprise. Mais je ne mets pas immédiatement fin à notre baiser pour autant. Je prends le temps de le rassurer, de ne pas le laisser se mettre trop mal à l'aise à cause de son érection qui monte. Puis quand nos lèvres se séparent je dépose un tout petit baiser sur sa blessure, aussi léger qu'une plume, comme pour m'excuser si je lui ai fait mal.
Puis je repars en arrière avec un sourire amusé, pour m'asseoir sur un de ses genoux. Les choses étant ce qu'elles sont, mon sourire ne tarde pas à se faire polisson. Mais je trouve ça touchant, je vois bien que ça le gêne. On s'est mis à nu l'un devant l'autre, et plus encore, mais il trouve le moyen de rougir pour ça. Alors que c'est on ne peu plus normal. Je ne suis pas de marbre non plus, je suis seulement plus discrète. Et mon regard n'a pas quitté son visage un seul instant, malgré l'envie de descendre voir ce qui se passe en bas.
Je me mordille la lèvre inférieure pour tromper mon excitation, et sans doute aussi la trahir à ses yeux. J'hésite une seconde. Nous sommes à découvert. Il n'y a plus aucun obstacle entre nous, quelque il soit. Seulement une question : comment approcher ? Je devrais peut-être lui proposer de monter pour le ménager encore un peu ? Il n'est pas très à l'aise avec les femmes, et c'est l'une des rares choses que je sais de lui. Ou est-ce que j'y vais franchement, sans chercher à retenir les frissons qui fourmillent à travers tout mon corps ? D'une certaine manière l'un n'empêche pas l'autre. Tout ça en une seconde, pour ne pas le laisser dans le doute.
" Ça... Je peux... regarder ? "
Regarder, pas plus pour l'instant. Pas avant d'être à bout, de ne plus pouvoir réfréner mon désir... Ou qu'il ne fasse un pas.
-
...Sérieusement ? Hitomi vient de sérieusement me répondre par l'affirmative, là ? Mince, je pensais qu'elle esquiverait aimablement toute réponse par une quelconque pirouette dont j'aurais feint de m'accomoder pour ne pas sembler insistant. Au contraire, la rouquine s'est blottie davantage contre moi pour me regarder dans les yeux tandis qu'elle me désarçonnait en quelques mots.
Voilà, je ne sais plus quoi penser. Hitomi fait voler en éclats tout mes repères amoureux habituels et me laisse comme un con à la regarder comme si je cherchais la condition au départ en voyage. Mais rien ne vient, rien ne trahi une idée qu'elle aurait derrière la tête. J'en suis certain : elle est sincère. Restant interdit quelques secondes, je réalise doucement que plus les choses avançent plus nous avons l'air de nous constituer en couple. C'est hésitant et nous tâtonnons plus ou moins avec l'autre mais c'est bien ce que nous devenons, non ? C'est un peu trop soudain, c'est un peu trop beau pour être vrai. J'espère que je ne vais me réveiller sur un lit d'hôpital et m'apercevoir que je ne me suis pas fais un film pendant que j'étais plongé dans le coma. Ca a tout du roman à l'eau de rose, cette histoire ! Bon, et bien autant profiter pleinement, alors.
- Je n'aime pas trop poser de questions.
- Je devrais tout de même te donner des réponses. Il y a des choses que tu dois savoir avant... avant qu'on ne se décide à plus, ou pas.
Peut-être a t'elle déjà compris si elle s'intéresse un peu à l'actualité ? Un type qui vole et qui combat les vilains à grand coups de directs du droit, ça ne passe pas inaperçu et la presse japonaise est friande des couvertures parlant de moi, de Sentinel Prime. Possible donc qu'elle ait sa petite idée sur ma double identité, mais je devrais tout de même la lui exposer. Etre la petite amie d'un super-héros, c'est beaucoup moins fun que d'être celui d'une star à la gomme. Votre mec part pour peut-être ne jamais revenir et vous vous exposez à des représailles si on apprend que vous êtes au centre de sa vie. Il passe plus de temps à se faire taper dessus qu'à vous faire l'amour et doit jongler entre deux identités bien distinctes pour éviter de vous mettre trop en lumière. Bref, c'est un parfait prétexte pour ne PAS construire une histoire solide et c'est un état de fait que j'ai toujours gardé bien en vue dans un coin de ma tête. Aujourd'hui que j'ai envie d'avancer et d'évoluer, j'ai l'impression que c'est plutôt une chaîne qui me tient prisonnier d'une vie que je ne pourrais jamais changer. Ca me tue d'y penser et j'estime qu'il est naturel qu'Hitomi sache où elle met les pieds.
Elle n'a pas envie de s'en soucier pour le moment, apparemment. Les mots qu'elle me lance sont tendres, suaves, pleins de promesses. J'hoche la tête pour lui répondre le plus simplement du monde et je la sens se déplacer contre moi, augmentant mon érection qu'elle ne peut tout bonnement plus prétendre ignorer tant ma verge frotte obstinément la peau de sa cuisse, comme quémandant un peu d'attention.
C'est excitant mais je préfère me concentrer sur le baiser que nous partageons, voulant lui faire meilleure impression que lors du premier. Mes lèvres emprisonnant les siennes avant de s'apposer contre elles semblent dire "tu vois, on ne se débrouille pas trop mal quand même !" et mes yeux lui crient que j'ai envie d'elle. Pas dans le sens "de ton corps pour un peu de plaisir", non. Dans le sens "je te veux toute entière". La nuance et grande et je la signifie d'un léger passage de ma langue sur la pulpe rosée de sa bouche qui s'éloigne de la mienne.
Ce qui vient ensuite est une torture pour mes sens, pour mes instincts. Son regard évocateur, son adorable mordillement de lèvre qui ne trompe pas vraiment sur ce qu'elle pense (et qui me soulage, au passage)... Je devrais peut-être lui sauter dessus et la plaquer contre un des bords du bassin pour lui faire le coup du mââââââle dominant qui prend les choses en main ? Je ne sais pas si c'est ce qu'elle attends. Hitomi semble si assurée, si expérimentée... Cette fille est une montagne pour le gosse que je suis et j'ai peur de la décevoir. Oh, je sais ce qui va se passer très prochainement ! Je connais les choses de l'amour mais je n'ai jamais eu une libido virulente ou réellement sportive. Ca sent la défaite, ça me fait peur, ça fait battre mon coeur à cent à l'heure.
Si Hitomi s'avère trop entreprenante, je ne peux que craindre le pire et je sens mon visage qui blanchit à cette pensée. Je ne veux pas qu'elle me trouve mauvais, parce que j'ai ma fierté et parce que je suis persuadé qu'un mauvais amant tue rapidement n'importe quel couple. Il ne faut pas qu'elle me saute dessus -si toutefois elle était capable de le faire- mais je ne dois pas non plus rester les bras ballants.
En gros, je vais devoir prendre le taureau par les cornes en espérant qu'il ne charge pas trop fort.
- Ça... Je peux... regarder ?
- B-bien sûr... Je n'ai rien à te cacher...
J'ai tenté de laisser passer une voix assurée, j'ai tenté de lui offrir un sourire assorti. Pourtant, j'ai envie d'en faire un peu plus et je décide de prendre un tant soit peu les choses en mains... Enfin, presque. Avec douceur, j'attrape un de ses poignets et lui fait avancer le bras sous l'eau, mettant ses doigts en contact avec ma virilité. Sent elle que mon geste est tremblant et malhabile ? Je crains sa réaction mais je sais que je ne dois pas m'arrêter là maintenant que j'ai commencé, alors que guide ses attouchements afin qu'Hitomi puisse refermer sur mon dard sévèrement durçi la poigne légère de ses doigts. C'est une invitation, c'est là ma façon de lui signifier que j'ai envie d'elle. Et puisqu'elle est un peu penchée, je prends l'initiative du baiser en venant caresser ses lèvres de ma langue avant de la faire se glisser de plus en plus distinctement entre l'ourlet délimitant sa bouche. Je veux m'introduire là et m'approprier sa langue à elle, jouer à sa surface avec autant d'application que de gourmandise.
Je relâche son poignet alors que je rends le baiser plus passionel et charnel, ma main venant caresser sa joue avec toute la tendresse du monde. Tant pis pour la douleur, tant pis pour tout le reste : il n'y a qu'elle, moi et ma maladresse.
- Nous nous sommes rencontrés pour des cours de langue...
J'ai parlé doucement et j'ai souris en revenant l'embrasser, en laissant une fois encore ma langue aller chercher la sienne avec plus d'ardeur, un peu plus d'assurance.
Pour une fois, je refuse d'être ridicule. Pour une fois, je refuse de la laisser filer. J'ai envie d'elle, envie de lui faire l'amour, envie de voir beaucoup plus loin que demain en sa compagnie.
- Hitomi, je...
La phrase ne sera pas achevée. Les mots sont superflux pour le moment et mon corps qui se redresse face au sien exprime bien plus facilement que ma langue ce qui m'anime en cet instant. Laissons le futur au lendemain et contentons nous de profiter de l'instant, contentons nous de nous appliquer à l'embrasser alors que notre main libre file vers la rondeur généreuse de l'un de ses seins pour s'y poser, [/b][/size]pour l'englober au mieux.
-
Il n'a vraiment pas l'air à l'aise, et malgré l'excitation je préfère ne pas le brusquer. Mais je ne me retiens pas vraiment. Je me laisse encore porter d'une certaine manière, par son rythme. Et ce que je réfrène de mon côté, il le tire du sien. Inutile de le connaître mieux, ou de lui poser des questions. Je sens qu'il se dépasse, d'une manière ou d'une autre. Ça me fait penser à ce qui s'est passé dans la rue, mais pas à ces types qui nous ont battus. Ça me fait penser à nous, parce que les rôles me semblent inversés. Il se débat, et je me laisse faire. Notre façon à chacun de nous abandonner à l'autre, sans chercher à le conquérir. Nous sommes déjà conquis.
Je ne cherche même pas à glisser de son étreinte étreinte ne serait-ce que pour gagner une seconde. Mes doigts tendre se referment à l'aveuglette sur son membre, et ce contact fait frémir nos deux corps. À l'instant il m'a autorisée à regarder, de sa voix qui ne faisait pas illusion le moins du monde, l'envie si forte de baisser les yeux a disparu. Je crois que... Non, je sais que... J'ai encore du mal à me l'avouer à moi-même, parce que j'y crois toujours beaucoup trop vite. Mais je le sens sens au plus profond de moi, plus clairement que jamais.
Il prend à nouveau les devants pour m'embrasser, sans se soucier de sa blessure. Et comment mieux répondre qu'en chassant la moindre retenue. Nos langues se rencontrent enfin. Il libère mon poignet pour venir me caresser la joue et me faire encore frémir un peu plus. La danse entre nos lèvres ouvertes se fait plus intense, plus forte. Et s'il ferme les yeux sur la douleur qu'il doit sans doute s'infliger, je ne veux pas lui faire l'affront de m'en inquiéter. Je veux prendre tout ce qu'il me donne, sans gêne, sans pudeur, sans réserve.
Mon cœur bat la chamade, comme si lui non plus ne pouvait plus se retenir. Tant pis pour lui. Ma main libre remonte pour caresser Kyle au creux de son cou. Je remonte parfois sur sa nuque pour risquer le bout des doigts dans ses cheveux. Puis quand nos lèvres se quittent ce sont nos fronts qui se joignent. Je ne veux pas m'éloigner, je ne veux plus le quitter. Et dire qu'un peu plus bas ma main va et vient le long de son sexe tendu, mais lentement pour ne pas gâcher l'instant, la magie.
" Nous nous sommes rencontrés pour des cours de langue...
- C'est toi qui voulais des leçons particulières. "
Juste le temps de souffler, et de sourire. Puis un nouveau baiser plus intense encore, plus passionné. Assez rit. Mais on ne peut pas honnêtement dire que tout ce qui se passe est "sérieux". Toute cette soirée est de la pure folie, une tempête furieuse qui m'a emportée sans me demander mon avis. Pourtant je ne regrette rien. Mes sentiments ont rarement été aussi claire, aussi purs. Et en cet instant je voudrais le redevenir autant qu'eux, pour lui.
Sur cet unique regret nos lèvres se séparent à nouveau. Cette fois je garde les yeux fermés. Je n'ai pas besoin de le voir, je sais tout, je sens tout. Je n'ouvre les yeux qu'au son de sa voix.
" Hitomi, je...
- Moi aussi. "
Je ne sais pas si je l'ai coupé, ni même ce qu'il allait dire. Même muette cette évidence m'a prise et j'ai répondu sans réfléchir. Quoi que ce soit il ne l'a pas dit, moi non plus, mais nous le savons tout les deux. Sa main qui vient caresser mon sein n'est qu'un appel de plus à enfin céder au désire. Mais le frisson qu'elle me donne remonte dans mon comme un serpent glacé, et vient saisir ma nuque comme pour me rappeler à l'ordre.
" Moi aussi, Kyle. "
Cette fois c'est moi qui l'embrasse, espérant que ça suffira à dissiper cette sensation qui perturbe la magie. Je glisse en avant sur sa cuisse, relevant son membre contre mon ventre nu avant de l'abandonner. Puis j'avance encore pour le piéger entre nos deux corps. Ma main monte caresser sa joue. Je ne garde une jambe entre les siennes que pour me retenir de me relever. Pour partir en courant ou pour m'empaler sur lui, ça je ne sais pas. Mais l'un comme l'autre serait trop facile, trop lâche. Je sens son sexe durci et chaud qui pousse contre le bleu que enfle et enlaidi mon ventre, mais cette douleur n'est rien. Ce que ces mecs m'ont fait ne compte pas, ou plutôt si. Merde, s'ils étaient là je les remercierais, parce que sans eux je ne serais pas dans tes bras.
Ce ne sont pas mes blessures qui me font mal. Ce n'est pas cette douleur qui me fait monter les larmes aux yeux. Ce qui me fait trembler tout contre toi, c'est ce qui étrangle ma gorge au point que je n'arrive plus à respirer. Ce qui serre mes doigts sur ta peau et dans tes cheveux, au risque de te blesser, c'est ce qui emprisonne douloureusement la tendresse que je voudrais tellement te donner. Je sais que tu es mystérieux, je sais que tu es dangereux. Je sais que tu ne voulais pas, parce que tu ne pourras pas m'empêcher de souffrir. Mais je te veux tout entier, et ça me fait déjà souffrir. Pardon si je te fais du mal mais j'ai le cœur au bord des lèvres. J'ai encore juste assez de souffle, juste assez de vie, pour te supplier. Pardon si je nous condamne ou si je gâche tout, mais si je dois le retenir une seconde de plus je vais en crever.
" Je t'aime. "
-
J'ai peur. J'ai peur du mur dans lequel je vois foncer cette relation qui fait ses timides premiers pas dans la tendresse sensuelle de notre baiser, de notre étreinte. J'avais toujours pensé jusque là que si j'arrivais à me trouver une copine fixe et stable avec qui j'avais envie de construire quelque chose, ce serait une personne de mon acabit. Une héroïne, une fille qui connaissait la difficulté d'être mariée à un costume et à un pseudonyme parfois envahissant. Ca aurait rendu les choses plus faciles pour nous deux, ça aurait évité les écueuils d'une relation qui saurait malheureusement se montrer épisodique et dissolue et aidé à la compréhension mutuelle.
Or, c'était une demoiselle du commun qui était entrée dans ma vie avec fracas et que je ne voulais plus revoir partir. Je savais bien que c'était une chose qui allait être difficile, douloureuse pour elle comme pour moi. Devais-je laisser faire au risque de détruire l'un de nous à long terme, ou devais-je couper court dès à présent ? Hitomi ne comprendrait certainement pas. Parce que si mon coeur savait au moins une chose presque absolue au moment où mes doigts s'enfonçaient plus fermement dans la chair tendre de son sein pour le palper avec plus d'appréciation encore, c'était bien que l'envie était partagée. Nous avions tout les deux fait le choix de se donner la main pour la suite, quelle qu'elle puisse être.
Lorsque le baiser se prolonge, c'est Hitomi qui prend les rênes et je me contente de répondre aux avances de sa langue sur la mienne alors que ma compagne déplace son corps délicat sur moi, délaissant ma verge pour la caler entre nous. J'aurais voulu m'en montrer frustré, j'aurais voulu protester de cet abandon de mon excitation. Je n'en ai tout simplement pas le courage, trop occupé à jouir de ses doigts qui courent sur ma joue et de son coeur qui bat aussi vite que le mien. Je savoure sa poitrine contre mon buste, je me délecte du ballet brûlant de nos langues dansant un corps à corps lent de passion.
Mes doigts glissent dans sa crinière de flammes orangées, mon autre main vient se caler contre ses reins afin de les plaquer davantage contre mon bassin. Je la découvre, je me l'approprie pour faire mienne chaque parcelle de sa peau, chaque ligne de son corps. Mon membre en serait douloureux d'être tellement envieux d'elle si je n'avais pas l'esprit occupé à la chérir avec force.
Sens tu tout l'effet que tu me fais, Hitomi ? Ressens tu comme tu es maintenant nécéssaire pour chaque creux de mon âme, chaque soubresaut de mon coeur ? La chair n'a pas la parole pour l'heure, parce que l'esprit domine. Pour toi, je décide que je briserais toute mes hésitations, que je sortirais vainqueur de chaque épreuve destinée à nous éloigner. Je serais blessé, je serais peut-être détruit. Mais je ne passerais pas à côté de cette vague puissante qui me ravage alors que je capte tes tremblements, que je partage le trouble qui t'anime.
Je suis à toi. Et je veux te savoir à moi, parce que je suis égoïste, parce que je suis gourmand. Parce que je suis entrain de tomber désespérement amoureux. Parce que...
- Je t'aime.
Ca résonne, ca couvre tout le reste. Nos deux voix à l'unisson dans un souffle coordonné et voilà que le reste du monde s'efface autour de nous. Pour moi, il n'y a plus que nos corps nus entrelacés, pour moi il n'y a plus que la chaleur de ta peau et le goût de tes lèvres.
Il n'y a plus que toi.
- Je ne veux pas d'un lendemain sans toi, Hitomi.
Mon front collé au sien, mes yeux plongent dans l'iris des siens et s'y baignent tandis que je caresse sa joue et lui vole un baiser léger, emprisonnant un instant sa lèvre inférieure entre les miennes comme pour lui signifier que je compte la retenir, la garder au plus près de mon corps et de mon coeur.
C'est instinctivement que je m'anime, que je mesure chaque mouvement qui suit. Voilà qu'elle remonte un peu sur moi, relevée par un mouvement de jambe qui parvient à surélever son bassin et libérer ma fierté d'homme de la prison fragile qui l'enserrait. Naturellement, elle vient se caler contre le trésor de celle qu'il convient plus que jamais d'appeller ma compagne et qu'elle vient la découvrir tout en douceur, pénétrant en ses chairs délicates quand la belle retombe et que ma bouche vient à nouveau chercher la sienne.
Nous allons faire l'amour. Dans tout les sens du terme, nous allons faire l'amour. Cette fois là comptera pour moi comme la toute première.
Je t'aime, Hitomi. A en crever.
Et tant pis si ça va trop vite.
-
Je ne sais pas si je meure, mais je pars très loin quand j'entends voix nos se mêler, se caresser, faire vibrer l'air entre nous. Je souris en reprenant mon souffle, penchée contre son front, les yeux plongés dans les siens. On est si près qu'on louche, tentant désespérément de tout voir, de tout avoir sans s'imposer le déchirement de se séparer.
- Je ne veux pas d'un lendemain sans toi, Hitomi.
Moi non plus, pas d'un lendemain, ni d'une seconde. Il le faudra bien, mais pas encore. Pas avant qu'il ne me vole encore un baiser, et que je le suive pour lui en donner plus. Tout lui donner, tout ce que je suis, tout ce que je l'aime. Je me sens tellement légère, le dire m'a libérée comme jamais dans ma vie. Je l'ai déjà dit, je l'ai déjà ressenti, mais jamais si intensément, si clairement. À tel point que je n'ai même pas l'impression de l'avoir gâché. C'est la première fois, la seule. Je n'ai aucun doute, aucune crainte. Je me sens invincible. Tant que je reste entre ses bras rien d'autre ne peut me toucher.
Je suis pleine d'un bonheur que je n'est jamais connu, de ces sentiments qui déferlent et qui débordent entre nous. Enfin nos corps peuvent les compléter sans craindre de les gâter. Sans hésitation ni empressement je me lève puis je redescend. Tout trouve sa place comme si nous n'étions fait que pour ça, comme si nous étions enfin complet. Son sexe glisse dans le mien et me fait frémir d'un tel plaisir que j'ai l'impression de déjà jouir. Et quand il arrive enfin au bout nos lèvres se retrouvent tout naturellement, avec de nouveaux frisson qui se croisent, en nous et entre nous.
Mes mains viennent former un tendre écrin autour de son visage pour le garder près du mien. Toutes ces sensations que je croyais connaître semblent se dévoiler et je les laisse m'emporter, nous emporter. Je m'élève et je chute, comme au ralenti, sans chercher à sa savoir à quel vitesse je bouge. Je flotte sur lui aussi légère qu'une plume sur un souffle chaud et doux. Mes jambes me portent et je n'ai pas peur de perdre l'équilibre ou de tomber. Je sais qu'il es là pour me retenir. Je n'ai pas peur d'être trop lente ou trop rapide. Je... Nous faisons l'amour.
Et je réalise que je ne l'ai jamais vraiment fait. J'ai douté de le faire, j'ai cru le faire, je me suis convaincue que je l'avais fait. Avec lui... Avec toi c'est une certitude. Je ne me suis jamais sentie aussi bien, aussi heureuse, aussi comblée. Tu as tout changé. Il n'y a plus rien avant toi, et il n'y aura jamais rien après. Même le temps s'efface. Les choses ne sont pas allées trop vite, elle sont simplement allées. Elles continueront aussi longtemps que tu me voudras auprès de toi. Pour toujours, j'espère.
- Je t'aime, Kyle.
Je n'ai pas besoin de le dire pour que tu le saches, ou que tu n'oublies pas. Mais je te le dirais encore et encore, je ne m'en lasserais jamais. Mes lèvres se referment sur un gémissement silencieux pour retrouver les tiennes. Je laisse couler mes larmes sans honte ni gêne, sans tristesse non plus. Je pleure tout le bien que tu me fais, tout le plaisir et le bonheur que tu m'apportes. Avec un sourire à peine troublé par nos baiser. Avec toi je suis enfin entière, je suis enfin le tout que je n'espérais plus devenir.
Je te veux pour toujours où je te sens. Au plus profond de mon cœur qui attendais désespérément que ta chaleur vienne combler ses vides sombres et glacés. Au plus profond de mon corps qui tremble, qui jouit de sentir le tien, de plus en plus fort à n'en plus finir. Je veux que tu me prennes tout entière, que ne laisse rien. Tu es tout ce que je n'attendais plus, tout ce qui pourra jamais compter.
-
Alors que ses mains se referment sur mon visage, les miennes dévalent son corps pour trouver leur place sur sa chute de reins, se calant sur les rondeurs généreuses de ses fesses fermes que j'avais déjà sû apprécier dans la cage de tissu du tailleur qu'elle portait lors de nos premières minutes. C'est ma façon de l'agripper, ma façon de lui exprimer l'égoïsme dont je compte faire preuve dès lors qu'il s'agira d'elle. Mon moment de domination, peut-être ? Je n'en sais rien, je n'ai plus envie de penser au sens de mes gestes car mon coeur sait qu'Hitomi les interprétera avec le sens le plus juste. Mon corps qui frémit sous elle lui crie, lui hurle même que je la désire, que j'ai tant envie de son corps que de tout ce qui fait qu'elle est "elle". Je veux qu'elle partage mes draps comme chaque seconde de ma vie, qu'elle rythme cette dernière au gré de son souffle sur ma peau et de ses caresses à la surface de mon être. Je veux qu'elle soit l'air que je respire, qu'elle soit chaque pulsation cardiaque qui me fait vivre et avancer. Je veux qu'elle soit l'épicentre du séisme que sont mes années passées à exister et c'est tout ce que je demande à lui faire passer lorsque mes reins s'activent lentement pour que ma verge fichée au plus profond d'elle la flatte, la réchauffe, l'enivre.
Pardonne moi, Hitomi. Je suis un piètre amant, je le sais. Mais ce soir, je te donnerais tout ce dont je suis capable, pour que tu n'ai pas à soupirer de frustration.
Mon corps est différent, quelque chose semble s'exprimer en moi, une sensation inconnue me prend aux tripes. Je ne comprends pas ce que c'est, pas tout de suite. Mes assauts pour honorer Hitomi n'en changent pas pour autant et ma verge dure d'amour et d'excitation continue sa tendre randonnée sur le chemin du plaisir sans faiblir, pourtant je sens qu'il se passe quelque chose.
Et je comprends. Pour la première fois "Sentinel Prime" et "Kyle Macross" ne font vraiment plus qu'un. Dans les bras d'Hitomi, dans la chaleur délicate de sa matrice que j'emplis de mes centimètres avides d'elle, la dénomination ne compte plus, la pseudo shcyzophrénie qui m'anime souvent se tait et s'efface : je suis un. Je suis l'homme qui fait l'amour à la femme qu'il aime et chérit, je suis une entité qui se retrouve car elle se complète à une autre. Tu es donc ma moitié, Hitomi ? Nos mouvements mûs par le désir ne sont donc qu'une promesse de nous plaire encore ? Je ne sais pas, je ne veux pas le savoir. Je serais incapable de dire si je prends du plaisir, mais tu n'es pas en cause. Le plaisir charnel ne peut pas tenir la distance face à quelques mots que je pense si fort que j'en ai mal à la tête.
Je t'aime.
Le sens tu, Hitomi ? Le vois tu, Hitomi ? Le corps pressé contre le tien laisse échapper des volutes bleuâtres qui teintent notre scène d'une lumière douce et paisible. Ce sont des caresses sur ta peau, des frôlements de ma propre essence qui roulent contre toi avant de se sculpter en fleurs sauvages qui se déposent à la surface de l'eau, de se suspendre dans l'air pour ne laisser passer que de petites étincelles vivaces qui dressent pour nous une carte du ciel nocturne. Le bain devient une portion de la voute céleste, écrin sublimé de nos ébats lents et mesurés.
Et tu n'as rien à craindre lorsque nos corps se soulèvent hors de l'eau, mon amour. Soudée à moi qui te retient de mes bras, voilà que ce sont tes courbes qui tracent une partie de l'irréel de cette représentation. Tu es ma constellation, mon Aphrodite. Et voilà que tu tourne doucement sur toi-même, accompagnée par mon corps et les arabesques que décrivent autour de nos êtres soudés ce qui fait de moi un surhomme.
- Je n'ai que peu à t'offrir, Hitomi.
Un baiser doux, un vacillement de ma fierté en elle pour lui rappeler que je suis encore là.
- Mais tu peux tout prendre. Je n'en veux plus, si ce n'est pas pour te le donner. Je t'aime.... Je t'aime et demain peut bien venir, il n'est pas vide de promesses.
Ai-je foi en l'avenir à ce point ? Non, je ne crois pas. Je me mens plus à moi-même que je ne lui mens à elle, parce que je sais que je ferais tout pour la rendre heureuse. Me connaissant, je sais que ce simple état de fait me suffira.
Un temps, sûrement.
En attendant, je la veux et je me demande dans un souffle si on peut faire l'amour en l'air. Nous allons vite le savoir, puisque déjà je m'active un peu plus, retenant son corps par ma prise sur ses fesses.
-
C'est tellement bon de l'embrasser et de le sentir en moi. Non, pas en moi : avec moi. J'aime tout de ces instants, jusqu'à la plus petite sensation. Il y en a de grandes, bien sûr. Celle de son membre dont je parcoure toute la longueur encore et encore. Il est dur, fort, et tendre dans ses mouvements. Surtout il est chaud, et avide malgré sa langueur. Le délice de nos baiser est grand aussi. La douceur de nos lèvres encadre la danse sensuelle de nos langues, rythmée pour nos souffles qui se mêlent tout autant que nos corps.
Autour de ses lentes et puissantes explosions pétillent de petites étincelles. Au creux de ses mains sur mes fesses, qui retiennent mes chutes et guident mes ascensions. Au creux des miennes qui caressent doucement son visage et son cou, qui gardent près de moi son regard bien qu'il ne me fuira plus à présent. Entre mes cuisses qui glissent en rythme autour de ses hanches. À la pointe de mes tétons qui dévalent et escaladent son torse au fil de nos mouvements. Et partout. En moi les petites étincelles sont emportées par d'heureuses vagues de frisson. Comme si des plumes pleuvaient pour effleurer ma peau et me donner la chair de poule.
Alanguie par cette harmonie parfaite je mets un certain temps à réaliser que certaines de ces sensations sont vraiment nouvelles, et que la lumière du bassin s'est teintée de reflets bleus. Sans réfléchir je me redresse un peu, écartant mon visage du sien juste assez pour voir ce qui se passe. Je ne m'inquiète pas de briser la magie, en fait je la découvre. Des lambeaux d'une brume onirique coulent sur mon corps comme de lentes gouttes d'eau, pour s'épanouir en fleurs figées et flotter à la surface du bassin.
Je sourie sans parler, je ne fait que soupirer. Je ne trouve pas de mots pour décrire tant de beauté. Je ne veux pas savoir si ou comment c'est possible. C'est incroyable, magnifique, bleu comme ses yeux, aussi tendre que lui. Un volute brumeux vient me caresser l'épaule. J'abaisse mon bras pour l'inviter à le dévaler, jusqu'à plonger la main dans l'eau. Le lambeau vaporeux suit le chemin que je lui offre, il coule, manque de tomber d'un côté ou de l'autre. Je relève la main pour le retenir. Au contact de l'eau qui perle sur ma peau la brume se cristallise lentement, en une fleur qui glisse jusqu'au bout de mon index pour s'envoler.
Je la suis encore du regard quand je sens l'eau du bassin refluer vers le bas, et elle part sur le côté. Non, c'est moi tourne, et m'envole au-dessus de l'eau. Je baisse les yeux pour m'assurer que mes autres sens ne mentent pas. Ma main retrouve l'épaule de Kyle, et la serre instinctivement alors que mes pieds quittent la pierre puis la surface de l'eau. C'est sa voix qui rappelle mon visage face au sien. Peu à offrir ? Et qu'ai-je à offrir, moi ? Qu'ai-je demandé jusqu'ici que tu ne m'aies pas offert ?
- Sans toi c'est moi qui suis vide, Kyle... Je veux bien tout prendre, puisque tu me gardes.
Cet élan d'amour auréolé de magie vient me rappeler que si nos corps ont complété nos sentiments, c'est à leur tour de s'exprimer librement. Et mon sourire amoureux se niaise d'un détail saugrenu. Mes jambes n'ont plus d'appui. Je ne peux plus poser mes pieds, ni mes genoux pour me soutenir. Mes cuisses ne peuvent plus me pousser ni me retenir. Je n'ai même rien pour caler mon dos et me maintenir. Cette première fois est encore plus indiscutable que les autres. Ça ne va pas être facile de s'envoyer en l'air... en l'air.
D'un autre côté peu de choses ont été faciles ce soir. Entre toutes ses promesses demain porte sans doute de rudes épreuves. Faire l'amour n'en est pas une. Pour lui faire l'amour, je n'ai besoin que de lui. Ma main droite glisse, un peu nerveusement, derrière sa nuque. Je crochète mes pieds derrière ses jambes. Puis je me lance, juste pour voir. Je tire sur mes bras et mes jambes pour me soulever, décollant un instant mes fesses de ses mains. Pour une fois c'est moi qui suis au-dessus de lui, dressée aussi haut que je le peux, pour l'embrasser. Je relâche doucement pour revenir.
L'essai est fructueux. Je ne doute pas qu'il soit capable de me faire aller et venir à la force des bras, mais je veux participer aussi. Même si ça s'annonce difficile, fatiguant... physique.
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♫♪♫ (http://www.youtube.com/watch?v=-UhWQknhqBE)
Il est temps, je crois. Maintenant que nos coeurs sont plus légers et battent sur le même tempo, nous allons pouvoir nous livrer à une autre danse au rythme plus endiablé, plus sensuel et sexuel. Le maestro au corps parfait donne le ton et impose d'elle même la nouvelle mesure de notre sérénade, entamant un solo que je me satisfais d'apprécier. Hitomi s'est assurée de ses appuis et je comprends qu'elle veut elle aussi donner le La pour ne pas être qu'une des voix du choeur. Ses jambes fuselées m'emprisonnent, ses mains douces se referment un peu plus contre mes muscles et son corps se lève pour lui faire quitter mon pieu de chair et d'envie qui la prenait depuis tout ce temps.
De regret de perdre sa chaleur moite et l'étau acceuillant de sa chair intime, je gémis légèrement et proteste en pétrissant un peu plus fort l'arrondi de son fessier sans chercher à accompagner le geste que je lui devine. Quand elle retombe, j'ai l'impression qu'elle m'avait quitté depuis des heures et que je redécouvre son antre comme la toute première fois.
Et pourtant... Je n'ai fais connaissance qu'avec la caresse de sa fleur que depuis quelques minutes.
La partie ne va pas être aisée pour Hitomi et je crains que le plaisir ne soit étiolé par la frustration de son manque de possibilités dans ce domaine qui n'est pas le sien. Bien sûr, que je comblerais ses attentes au mieux ! Mais ma moitié aime visiblement avoir son mot à dire et je suis à-même de lui donner la parole.
- Je vais te donner un peu de moi, mon coeur.
Tout autour de nous, les fleurs de brume se mettent à graviter. Les pétales qui jusque là gisaient sur l'eau perdent leur forme et se dissipent pour remonter vers le ciel, leurs spirales poêtiques et gracieuses venant à la rencontre d'Hitomi. Les voilà à s'enrouler sur elle, la couvrant peu à peu d'un voile imperceptible qui se fond en elle, pénétrant sa peau. Ce qu'elle ressent, je ne peux que l'imaginer. Une chaleur délicate, comme une brise d'été qui laisserait traîner son souffle en elle, en son sein. De pénétration, ma compagne n'en connaîtra que difficilement de plus forte, de plus profonde. Car quand les brumes finissent de tapisser son être, c'est une partie de ma propre essence qui se met à battre en elle pour y diffuser une bribe infime de mon pouvoir. Comment expliquer... Si les femmes enceintes considèrent avoir un peu de leur homme en elles, Hitomi ne fait en revanche plus qu'une avec moi. Le temps d'un partage sans équivalent, la rouquine aux yeux ardents sera un peu de ce que je suis.
- Détends toi... Laisse aller, Hitomi. Ce n'est pas permanent. Ce... c'est un... cadeau. Je pense qu'on peut dire ça comme ça. Gêné, j'ai soudainement l'impression que je lui impose quelque chose. Mes yeux la fuient, mais reviennent aux siens au triple galop. Je ne veux pas me dérober trop longtemps au plaisir de la contempler. Tu n'as qu'à penser à ce que tu veux faire et... hop. La gravité ne compte plus.
J'en veux pour preuve mes mains qui ont quitté ses fesses pendant que je lui parlais et qui ont remonté son corps pour venir se caler contre ses seins pour soupéser sa poitrine, en apprécier la fermeté et le poids. Mes baisers s'appliquent à courir sur son menton, puis son cou, puis son épaule et doucement la voilà repoussée légèrement en arrière. Juste son buste, que mes lèvres viennent couvrir en de petits sillons d'embrassades délicates ponctuées par la pointe de ma langue qui dessine le vallon de ses seins afin de trouver le chemin vers ses pointes tendues.
C'est avec espièglerie que je relève les yeux sur elles quand ses tétons disparaissent entre les ourlets de ma bouche qui viennent les tirer, les agacer parfois quand ma langue daigne s'y promener. J'aspire avidement mais lentement, ne la perdant pas des yeux alors que son mamelon disparaît sous ma tétée gourmande, mes doigts continuant de palper ses rondeurs.
Plus bas, je décide de laisser à la femme que j'aime la charge des opérations. Elle doit se redécouvrir et de toutes façons, rien ne presse : mon dard est toujours là, dressé pour souder nos corps dans une pénétration pour l'heure statique mais ô combien profonde.
Montre moi, Hitomi. Fais moi goûter à cette expérience que je n'ai pas. Je t'ai ouvert une part de mon monde et à présent, j'attends comme un gosse impatient que tu fasse de nouveau de moi un homme.
Et n'ai crainte, mon amour. Ces étoiles qui constellent notre nuit brillent toujours un peu plus fort mais ne parviendrons pas à ternir ton éclat.
La vraie magie, c'est celle qui danse au fond de tes prunelles et contre ça, aucun artifice ne sera jamais à la hauteur.
Je t'aime.
-
Le désir au beau être grand il a bien du mal à percer la magie qui m'entoure. Sur l'île d'où je viens les enfants savent où regarder, et ils peuvent apercevoir des choses bien étranges. Seikusu a son lot de bizarreries surnaturelles, de Vampires, de Démons et je ne sais quoi d'autre. Rien qui soit comparable à mes souvenirs de gamine, ou à ce que je vis en ce moment. Le sexe ne gâte rien, et cette dernière petite attente est bien plus douce que celles qui ont précédé.
Les fleurs fantomatiques s'évaporent en volutes qui s'élèvent à nouveau. La brume vient me caresser, aussi légère que la première fois, presque imperceptible. Elle m'enveloppe, elle m'habille, elle m'imprègne. Un peu de lui qui se fond un peu plus en moi. Et c'est vraiment un sentiment étrange. Quelque chose change pourtant j'ai l'impression de rester la même. Comme si... Comme si rien, en fait. Pas une part endormie de moi-même qui s'éveille, ni une longue attente enfin comblée. Pas même une petite révélation. Un simple frémissement, qui me semble tout naturel.
J'en ai du mal à comprendre pourquoi il tente de me rassurer, et pourquoi il semble douter à nouveau. Quand ses yeux reviennent sur moi je remercie son cadeau d'un tendre baiser. Et je sourie, avec une pointe d'amusement due à son "et hop". Mais penser serait du gaspillage sous les caresses de ses lèvres et de ses mains. Je n'ai pas à penser, pas même à vouloir. Encore heureuse : je serais bien fichue de m'envoler sans faire exprès, déjà que je suis maladroite quand j'ai les pieds sur Terre...
Je ne suis plus sur Terre, je suis à des années-lumière, très loin au-dessus, au-delà. Je suis dans un autre tout petit univers où deux galaxie entrent en collision. Des milliards et des milliards d'astres se percutent. De puissants soleils explosent en tournoyant à tout vitesse. Leurs lambeaux étreignent furieusement de leur chaleur insoutenable des trous noirs, suppliant la fin de leurs ténèbres glaciales. Un chaos colossal, explosif et primordial qui ne trouve pour limite que le néant. Ces cataclysmes dantesques ne sont que des grains de sables secoués par la tempête. Dans le noir absolu deux nuages étincelants s'enlacent, ils dansent et se mélangent, constellés de poussière de diamant.
Non, je n'ai rien à penser quand plus rien ne compte que nos corps. Quand tu te te gorges de ma poitrine comme un enfant affamé, mais que tu joues avec en me fixant d'un regard qui brûle de désir. Je suis toute entière à ma place. Je n'ai pas à commander mes muscles pour qu'il se mettent en mouvement. Je n'ai plus à m'agripper même si mes mains refusent de te lâcher. Mon corps ne pend plus pitoyablement au tien, il est libre de te donner enfin ce que nous désirons tous les deux.
Mes hanches ne cherchent pas prudemment la bonne manière pour s'activer, entraîner le bas de mon corps le long du sexe qui le pénètre. C'est un plaisir et un bonheur de le sentir glisser en moi, une sensation et une émotion indicibles, absolus. Tout ce que j'ai à faire c'est promener mes doigts sur ta peau. En amener une dans tes cheveux pour encourager l'appétit avec lequel je veux que tu me dévores. Et ne pas te quitter des yeux pour que tu manques aucun des mes soupires et de mes gémissements. Pour que tu me vois sourire et pleurer de plaisir et de joie.
Voilà mon cadeau, et j'espère qu'il est à la hauteur du tien.
Est-ce que je bouge trop vite, mon amour ? Est-ce que je retiens trop mon corps de se cambrer et mes muscles de se bander ? Tu me fais jouir encore et encore, mais je me retiens de crier pour t'attendre. Est-ce que je suis trop experte, par habitude ? Est-ce que je trahis trop le nombre de ceux que j'ai accueilli avant toi ? Ils n'ont pas su me faire croire à ce que je sais grâce à toi. C'est tout ce que je t'ai gardé, et je ne l'ai sauvé que malgré moi. Pardon. Même si ce n'est pas vrai, laisse-moi encore croire que ça ne compte pas. Laisse-moi encore un peu de temps pour t'emporter à mon tour.
-
Je suis exactement où je veux être.
Comment te le dire, Hitomi ? Je n'ai jamais été à ma place dans la grande équation de l'univers, j'ai toujours été cette donnée qui finissait par fausser l'opération, ce grain de sable qui faisait grincer la machine. Des gens sont destinés à perdre quoi qu'ils fassent et je m'étais persuadé faire partie de cette catégorie. Parce que tu sais, Hitomi, posséder de grands pouvoirs ne fait pas de toi un homme meilleur ou un homme plus mauvais. Ca fait simplement de moi un homme un peu différent.
Alors je me suis scindé en deux. Au monde et à ses malheurs, en réponse à ses troubles, je me suis improvisé solution en rouge et bleu, prêt à mourir pour les autres, prêt à toujours subir sans rien attendre en retour et je me suis fais appeler Sentinel Prime. Parce que je ne suis qu'un homme, je me suis dis que ce monde devait me donner envie de le sauver, de le fouler. Ainsi donc s'est présenté Kyle Macross, simple quidam au chemin parfois douloureux sur la randonnée de la vie. Ensemble et main dans la main, Prime et Macross ont cherché à avancer malgré les cahots de la route, malgré les déboires subis par ce moteur que l'on nomme Coeur. Souvent, les deux conducteurs n'ont pas réussi à s'entendre et se sont fait du mal, séparant de plus en plus leurs égos derrière un costume dont le logo diamantin dissimulait de petites joies et de grandes peines.
Et le monde continuait de tourner.
Parce que le chemin est devenu petit sentier rocailleux, Sentinel et Kyle ont décidé de garder le sourire, de ne pas se prendre au sérieux. Et parce que le ridicule ne tue pas, Hitomi, ils se sont dit en riant qu'ils étaient immortels. Main dans la main mais de plus en plus lointains, les compères ont fait quelques haltes avec plus ou moins de bonheur. Une jolie blonde leur a rappelé qu'ils cherchaient l'amour et la compréhension, qu'ils cherchaient une épaule à laquelle se tenir. Parce que, mon amour, on ne peut jamais rester seul très longtemps. Une curieuse brune les a rabibochés un temps, a rafistolé leur couple bringuebalant avec des morceaux de bric et de broc. Un peu plus loin, une femme aux allures de panthère leur a donné le sein avant de les fuir pour se protéger d'eux et les a laissés à genoux, affamés de cette envie de faire l'amour pour l'amour.
Mais tu sais, ils se sont relevés. Et encore plus souvent, ils se sont disputés.
Et le monde continuait de tourner.
Quand le sentier s'est mué en vague passage escarpé à flanc de montagne, une main s'est tendue pour chacun d'eux avant qu'ils ne chutent si fort qu'ils s'en seraient brisé tout les os et les a secourus tout deux. Une main au bout d'un bras qui remontait vers ton minois doux et tes grands yeux brillants. Lorsque ce fût toi qui manqua de chuter, c'est ensemble qu'ils s'envolèrent pour te porter secours.
Tu peux me croire, ma princesse : jamais ils ne t'auraient laissée choir. Car tu possède un pouvoir que tu ignore, un pouvoir qui te rend à leurs yeux plus puissante que n'importe qui, n'importe quoi. Tu es capable de les aimer ensemble, d'en faire un tout. D'en faire quelqu'un.
Moi.
Et le monde soudain s'est arrêté.
Je peux accomplir de grandes choses, Hitomi. Plus qu'on ne se plaît à l'imaginer. Je suis un surhomme aux pouvoirs bien plus grands que moi. Mais une voix susurre à mon oreille qu'il me faudra bien plus que ça pour te combler, te rendre heureuse. Ton corps qui glisse contre le mien et enserre mon étendard viril, je le sais déjà terre visitée. Je le sens. Tes mouvements qui font monter lentement la marée de mon désir qui afflue contre le barrage de mes sens, je les comprends plus experts que mes coups de reins qui ouvrent tes chairs palpitantes. Plus assurés que ma langue qui sollicite l'attention de tes tétons pointant sous mes assauts humides, avides.
Est-ce que c'est cette révélation qui fait rouler sur mes joues de nouvelles perles salées dans lesquelles se reflètent les étoiles que notre amour à fait s'élever dans ces cieux qui habillent nos corps en harmonie ? Est-ce pour ça que mes mains font fusionner davantage ta peau contre la mienne alors que mon bassin jaloux entame de plus vifs estocs destinés à graver mes allées et venues au plus profond de ton corps. Mon glaive ne cesse de plonger dans cette plaie béante qu'est ton fruit, ton Jardin plus si secret.
Devrais-je t'en vouloir ? Les jalouser ? Non. Car je suis exactement où je veux être : en toi, entre tes bras. Le reste ne compte plus vraiment tandis que mes gémissements que je cherche à retenir emplissent parfois l'air.
Ils pourraient avoir été des millions, je sais que cette nuit n'est pas à eux. Qu'elle est à moi, à nous. Je peux bien tomber après ça, je peux bien me faire arracher les ailes pour ne plus jamais chérir ce ciel que j'aime tant, je n'en aurais cure.
Car tu m'auras aimé. Et pour moi je le crois, rien ne vaudra jamais plus autant que ces minutes.
Je cède, Hitomi. Je me déverse en toi sans honte, dévorant tes lèvres après avoir goûté à ta lourde poitrine, au sel de ta peau. Je te serre fort contre moi, si fort que j'en ai mal de te rechercher autant, de t'imposer ma présence avec autant de puissance. Je ne veux que t'approprier, t'affirmer mon envie de t'avoir avec moi. Mes larmes en disent plus long mais mes mots restent longtemps coincés dans ma gorge, noyés par des pleurs que je remercie d'être silencieux.
- Maintenant, le monde peut bien s'arrêter pour de bon, je sais que je pourrais quand même le tenir contre mon coeur.
L'univers qui se déroule autour de nous ne cesser de danser, ses petites étoiles de frôler nos silhouettes alors que les volutes tournoient paresseusement à la surface de l'eau. C'est un écrin pour nous, qui avons le droit de nous montrer un peu égoïste. Je n'ai peut-être pas été à la hauteur de tout les autres m'ayant précédé, je n'ai peut-être pas été le plus enflammé ou le plus à même de t'ouvrir au plaisir que tu étais en droit d'attendre. Tant pis, je ne m'en excuserais pas. Si tu accepte de me prendre tout entier, ces défauts seront aussi ton lot.
Toutefois, quoi qu'il puisse se passer plus tard, sache une chose, mon amour : tu m'as sauvé.
Alors demain, le monde pourra bien faire ce qu'il veut.
-
Je n'en peux plus, Kyle. Mon corps que je croyais à l'épreuve de tous les plaisir cède sans me demander mon avis, comme il ne l'a plus fait depuis une éternité. Et je ne me reproche pas ma faiblesse. Je ne tremble pas pour feindre le plaisir, et mes gémissements ne s'emplissent pas l'air pour te rassurer. Je suis incapable de te mentir ou de me retenir, comme si tu m'avais rendu ma virginité pour que je puisse te l'offrir. Chacun de tes coups de reins me fait sentir la force avec laquelle tu veux me posséder. Chaque retour de ton sexe en moi me prouve la fureur de ton amour. Tu effaces tous les autres, des plus plus maladroits aux plus experts, des plus sauvages aux plus sensibles. Tu me laves de leurs souvenirs, par lesquels je me ne m'étais jamais sentie si souillée.
Tu me libères. Tu me sauves encore, de moi-même. Tu dépasses déjà toutes tes promesses, jurées ou silencieuses. Ce que tu me donnes, c'est plus qu'il n'en faut pour mon cœur et beaucoup trop pour ma raison. Mais j'en veux plus. Autant que tu pourras, que tu voudras m'en donner. Bien plus que je ne pensais être capable de recevoir. Mon seul regret est de ne pouvoir te le dire entre deux gémissements de plaisir. Tu n'as pas à douter, ni même à penser. Abandonne-toi, libère-toi, et donne-moi tout.
Si tu ne me retenait pas d'un baiser je hurlerai ton nom en te sentant exploser au fond de moi. Serre-moi encore plus fort, je veux m'imprimer dans ton corps comme tu t'es imprimé dans le mien. Nous sommes enfin liés, scellés l'un à l'autre. Tu le ressens aussi, je le sais. Et quand nos visage se quittent, mon corps n'est plus qu'une épave brisée qui se languit les abysses du repos. Mais il tient, et il sourit à ta voix.
" Maintenant, le monde peut bien s'arrêter pour de bon, je sais que je pourrais quand même le tenir contre mon coeur. "
Mes mains remontent vers ton visage pour en chasser doucement tes larmes. Mon amour, je ne sais toujours pas qui tu es. Il faudra en parler. Il faudra trouver des mots qui vont tout compliquer, et nous mettre à l'épreuve. De nous deux c'est sans doute toi qui souffrira le plus. Je devrais te prévenir. Tout est encore si simple et beau, je ne veux pas encore gâcher ça. Mais je veux que tu me promettes quelque chose. Et si mon regard est déjà un peu inquiet de chercher la réponse dans le tien, c'est que ça me coûte de t'imposer ces mots.
" Ne laisse jamais le monde s'arrêter. "
Pas pour moi. Je garde un main sur ton visage pour le caresser. L'autre passe dans ton dos alors que je repose ma tête sur ton épaule. Je veux te garder encore un peu, parce que je sais que je pourrais pas toujours t'avoir. Je devrais te partager avec le reste du monde, mais je t'aime assez pour supporter cette idée qui me glace le sang. L'amour n'écarte pas les sacrifices, il les rend plus grands et douloureux. Je veux croire qu'il nous donnera la force de les endurer.
" Tient-moi contre ton cœur aussi longtemps que tu le pourras. Quand tu devras me lâcher je ne t'en voudrais pas. Je sais que tu reviendras, Kyle. "
Que tu sois ou non celui que le monde réclame, je ne te demanderai rien.
-
- Ne laisse jamais le monde s'arrêter.
- Pas tant que tu le fouleras, c'est promis.
Ca ne me coûte pas de le dire, en vérité. Pour une fois, j'ai envie de penser à moi avant de penser aux autres et ça me fait du bien de l'admettre dans cette promesse. La Terre ne cessera pas sa rotation, quand bien même je serais redevenu poussière. Elle me survivra sûrement et je ne l'aide pas à garder son axe. Moi, je ne fais que tenter de la rendre plus vivable tout en sachant que si il le fallait, je me tuerais pour qu'il puisse continuer sa révolution lente et tranquille. Il vaut la peine qu'on se batte pour lui, ce caillou ingrat. Parce qu'Hitomi y existe, dorénavant.
Quand elle repose sa tête contre moi après avoir promené sa main sur ma joue, je glisse mes doigts dans ses cheveux et reprends mon souffle après notre union dans laquelle je suis encore plongé puisque je n'ai pas tout à fait quitté la matrice de ma compagne et que je me délecte de la sensation de la ressentir encore alors que peu à peu mon volume cesse de se montrer prétentieux. Ma respiration est encore lourde, mais paisible et ma poitrine se soulève discrètement contre la sienne alors qu'au fil des secondes qui s'égrènent le paysage onirique s'efface de lui-même, mon pouvoir commençant à décliner sous la fatigue qui me saisit tout le corps presque aussi fort que l'amour que j'éprouve pour la femme qui à nouveau me parle et qui m'arrache un sourire flatté qui vient mourir sur sa tête.
- Bien sûr, que je reviendrais. Mon coeur est à toi et je devrais m'assurer que tu en prenne soin. Et en retour, je prendrais soin de toi, Hitomi.
Doucement, notre vol cesse et nous redépose dans le bassin d'eau chaude qui a reprit son aspect originel, quelques petites étoiles fugaces scintillants encore ça et là restant dernières témoin de l'irréel de notre première fois. Au rythme de leur disparition, je sens mes pouvoirs qui s'endorment et deviennent muets mais je n'en ai cure : pour ce soir, ils ne seront plus utiles. Relâchant doucement ma bien-aimée, je mêle mes doigts aux siens et l'entraîne hors de l'ondée, à la douche que j'actionnne et qui nous accueuille tout deux pour un moment, le temps de se laver entre deux baisers longuement partagés. Puis vient le temps de quitter le bain qui ne portera jamais mieux son nom, vêtus de nos yukatabiras respectifs.
Dans le casier où se trouvaient mes vêtements, je trouve un mot rédigé en japonais que je tends à Hitomi. C'est sûrement de la part de madame Hirohito à propos de mes fringues qui ont disparus, ainsi que ceux de la belle rousse. La seule phrase que j'arrive à déchiffrer s'avère être le nom de la chambre nous étant allouée pour la nuit, la "Songes du Levant". D'un sourire, je remercie notre hôtesse : cette chambrée est la nuptiale. Nous dormirons comme des rois.
Après avoir arpenté rapidement les couloirs de l'auberge, nous arrivons finalement à notre nid d'amour et je laisse celle qui m'accompagne en découvrir le luxe discret mais raffiné. L'endroit est grand, aménagé avec goût dans un pur style traditionel nippon qui inclut nombre de facilités modernes. Et le futon, mes aïeux... Assez grand pour acceuillir un second couple et plus confortable qu'un nuage. Rien qu'à le voir, je sens les avances persistantes de la déesse du Sommeil je crois bien que malgré mon engagement tout récent aux côtés d'Hitomi, je vais céder aux charmes de cette délicieuse femme dont l'appel me fait bailler allègrement. Le couvrant d'une main, je me déshabille et invite rapidement la femme que j'aime à me rejoindre tandis que je file dans les draps que je garde ouvert afin qu'elle s'y glisse au plus près de moi.
- Bientôt, nous serons demain. Je l'embrasse longuement, une fois encore, reprenant la parole alors que mes lèvres caressent sciemment les siennes. Je t'aime, Hitomi.
C'est lourd de sens pour nous deux mais pour une fois, mon coeur se sent libre, se sent chez lui entre ses mains.
Au réveil, elle ne me trouvera pas à ses côtés. J'aurais de longues explications à donner aux Hirohito à propos de notre arrivée un peu impromptue chez eux, et mes faiblesses (dont ils sont pourtant coutumiers) ne m'aideront pas à aller plus vite. Mais je ferais en sorte qu'elle n'ait pas à s'inquiéter : un mot glissé avec un plateau petit-déjeuner et disposé bien en évidence lui signifiera où me trouver, probablement à l'acceuil de l'Onsen.
-
Alors que nous retombons doucement avec la magie de cette soirée, une inquiétude me prend déjà. Rien ne me rendra plus heureuse que de prendre soin de son cœur, et je lui fais confiance pour prendre soin de moi. Mais qui prendra soin de lui ? Il me reviendra sans doute dans des états pires encore que celui où nous nous sommes trouvés. Ce sera sans doute la plus dure épreuve que j'aurais à supporter, et elle se répétera. Je ne sais pas si je serais assez forte mais je serais là, à chaque fois. Ce qui m'inquiète c'est qu'il ne vienne pas, qu'il reste loin de moi pour me préserver. Je préfère ne pas lui en parler, il sera toujours bien assez tôt.
Malgré la disparition des volutes la "Bain des Amants" a gardé son cadre enchanteur, mais nous n'y faisons pas long feu. Une petite douche à l'air libre, nous rappelle qu'il est plus que temps de nous reposer de toutes ces émotions. Elle nous donne aussi l'occasion de nous toucher et nous embrasser encore. D'après un petit mot que me tend Kyle notre suite chambre est prête, et bien sûr offerte. Ça me gêne énormément, mais je peux largement attendre jusqu'à demain pour remercier nos hôtes. Et en découvrant la chambre un peu plus tard je me dis que des remerciements ne seront pas superflus.
Mais rien dans cette pièce ne vaut l'homme qui se glisse sous les draps et m'invite à l'y rejoindre. Avec un autre cette belle chambre et cet énorme futon bien douillet seraient prétextes à de nouvelles galipettes, ne serait-ce que pour le principe. Pas avec lui. Je ne sens pas le besoin de me trouver des raisons de le faire, ou ne pas le faire. Après toutes ces émotions qui nous ont épuisés, m'endormir blottie contre lui sera un cadeau de plus.
- Bientôt, nous serons demain.
Bientôt nos vies reprendront leur cours, et le rêve devra se fondre dans la réalité pour ne pas mourir. Supportera-t-il le poids du monde qui nous a fait tant de mal ? Les lèvres de Kyle ne cessent de me promettre qu'il tiendra, que nous tiendrons tous les deux.
- Je t'aime, Hitomi.
- Je t'aime, Kyle.
Si seulement on pouvait le dire en s'embrassant. Malheureusement il faut attendre d'avoir fait l'un pour faire l'autre. Un long et tendre baiser de plus, un comme j'en veux encore beaucoup. Puis je m'écarte un peu, le sourire aux lèvres pour le regarder. Je fixe ses yeux qui clignent de plus en plus souvent, de plus en plus lentement, comme les miens. Nos mains fatiguées liées entre nous, nos regard croisés quand nos paupière toujours plus lourdes le permettent. Je ne veux pas m'endormir. Je veux encore le voir et le sentir près de moi. Comme si tout n'était vraiment qu'un rêve qui me laissera seule dans mon lit au matin, sans autre chose à chérir que des souvenirs trop beaux pour être vrais.
Et cette crainte est en partie justifiée, car je me réveille seule. Il a disparu. Ça n'aura pas pris longtemps. Mais je sourie en m'étirant dans le grand futon. C'est allé aussi vite que tout le reste. Je suis encore dans cette belle chambre qui n'est pas la mienne. Tout mon corps est perclus de courbatures, et de douleurs. Mon yukatabira est encore au pied du lit, à côté d'un plateau chargé d'un petit déjeuner. Ça tombe bien : j'ai une faim de loup.
Mais en découvrant le petit mot plus question de manger. Je manque de renverser la plateau en le repoussant pour me lever. Kyle est allé expliquer aux Hirohito ce qui nous a amenés ici. Il parle Japonais comme un buffle chinois, il en a pour des heures. Il est sans doute encore dans l'hôtel et je ne vais pas rester là. J'ai trop envie de le voir et de l'embrasser. Je couvre mon corps nu du yukatabira, et cette fois je n'attends pas d'avoir noué la ceinture pour filer. Je coure pieds nus dans les couloir et dévaler les escaliers.
Quand je retrouve enfin Kyle à l'accueil de l'hôtel plus rien ne compte. Je coure me pendre à son cou pour lui donner un long baiser, tendre et passionné. Je suis tellement heureuse. C'est la meilleure nouvelle de toute ma vie.
- Ça y est, mon amour ! On est demain !
Je l'embrasse encore. On est demain. Le rêve a rejoint la réalité. Pour satisfaire à cette dernière je vais devoir me perdre en excuses et en remerciements aux propriétaires de l'hôtel, qui sont juste à côté de nous. Alors je fais durer le rêve autant que possible.
-
J'étais levé depuis une bonne heure et vêtu de mon yukatabira de la veille, j'étais descendu à la réception pour échanger quelques mots avec les Hirohito. Ce fût laborieusement que j'expliquais les cours de langue, l'agression, mon envie de venir ici pour oublier ce mauvais moment et mettre Hitomi à l'abri. J'avais pris le temps d'articuler comme ma compagne l'avait expliqué lors de ses leçons et la patience du couple de personnes âgées avait été précieuse, comme d'habitude. D'autant qu'ils me reprenaient lorsque je butais sur des mots ou des tournures un peu plus complexes et que parfois, madame Hirohito me faisait recommencer toute une tirade du début en me disant que ses ramens au porc avaient plus de connaissance en conjugaison que moi.
Debout face au bureau sur lequel se trouvait tout leurs registres et autres dossiers, j'en étais à expliquer qu'Hitomi n'était pas une femme comme les autres, pas plus qu'elle n'était une de ces collégiennes gesticulantes que j'aimais regarder dès qu'elles passaient à portée d'yeux. Hitomi avait de la classe et de l'élégance, Hitomi était une jeune femme peu expansive et Hitomi arrive pour me sauter dans les bras, me coupant au moment où je vantais son savoir-vivre et sa politesse. Je ne manquais pas de répondre à son baiser passionné pour autant, veillant même à glisser furtivement ma langue entre ses lèvres avant de sentir madame Hirohito me fusiller du regard. Délicatement, je me défis donc de l'étreinte de ma douce et passait mes mains à sa taille.
- Ça y est, mon amour ! On est demain !
- ...Et c'est pour ça qu'il est temps de dire bonjour à monsieur et madame Hirohito, mon amour.
Je lui offre mon plus beau sourire, qui assortie d'une oeillade, lui signifie qu'en fait ce serait mieux qu'elle entame les courbettes tout de suite, dans l'intêret de notre survie immédiate. Ceci étant, je presse davantage sa taille entre mes mains pour lui signifier que je suis là, que je suis heureux de la retrouver au réveil.
Et pendant qu'Hitomi se débat avec les intrangiseants hôteliers qui ne cessent de pincer leurs lèvres tandis qu'elle parle, ma tête se tourne vers une cliente au décolleté plutôt prononcé que je suis bien volontiers. Et ça balance sacrément, pour des nichons japonais, ce qui m'empêche de réaliser assez vite qu'il plane un silence de mort sur l'acceuil. Quand je tilte, il est trop tard et je sens deux doigts pincer mon oreille avant que je ne sois forcé de courber l'échine pour descendre ma tête au niveau de madame Hirohito, qui a coupé Hitomi d'un geste juste pour faire le tour du bureau afin de m'attraper.
- On garde ses yeux dans sa poche, Kyle-kun. Tu veux faire pleurer Hitomi-chan alors que tu viens de la conquérir ? Hmmmmm ?
- N-non madame...
- Bien. Apprends à te tenir, Kyle-kun ! Et la voilà qui fixe Hitomi, comme un rapace prêt à piquer sur sa proie. Il t'en fera voir de belle, Hitomi-chan, mais c'est un bon garçon. Et j'ai décidé que tu étais une bonne demoiselle, puisqu'il semble sincèrement épris. Attention à te tenir aussi, Hitomi-chan. Hmmmmmmmmmmm ?
Elle me secoue la tête avant de daigner me relâcher, retournant à sa place tandis que je me masse l'oreille en me retenant de gromeller. Madame Hirohito entame en solitaire un couplet sur la vie dissolue des jeunes de maintenant, sur les tentations de la télé et du net, espérant que de bons gamins comme nous en sont préservés. J'acquièse dans un pieu mensonge avant de reprendre la parole.
- Et pour nos vêtements ?
- Tout crottés de sang. Je les ai jetés ! Je vais donner un kimono à Hitomi-chan.Quant à toi... Elle hésite et penche la tête sur le côté avant de continuer. Il y a toujours la tenue que tu m'as demandé de garder pour le jour où tu pourrais en avoir besoin.
Le regard que j'échange avec elle est entendu. Cet ensemble dont elle parle est précieusement rangé, car il est moulant et orné d'un symbole arborant fièrement un large S sur la poitrine. Vu comment nous sommes arrivés là, Hitomi sait que je ne suis pas n'importe qui. Mais comme madame Hirohito l'avait deviné tandis que nous parlions, elle n'en prend pas encore la pleine mesure. C'est peut-être l'occassion d'aborder le sujet. Doucement, mes lèvres se déposent contre l'oreille de ma compagne et je lui souffle quelques mots en passant mes mains tendres sur son ventre dans une caresse lente et mesurée, mais appuyée.
- Je vais te laisser te changer, mon amour. Quand tu reviendras dans notre chambre... je soupire et cherche un peu mes mots. Quand tu reviendras, avant de pousser la porte, sois consciente que tu en sauras plus sur moi. Que tu comprendras certaines choses, que notre couple prendra une dimension supplémentaire.
Doucement, je libère celle que j'aime de l'étreinte de mes bras et lui vole un dernier baiser avant qu'elle ne soit entraînée par madame Hirohito dans les coulisses de l'hôtel. De mon côté, c'est avec monsieur que je me retrouve et c'est très solennement qu'il me remet le petit carton à chaussures qui contient ma tenue "professionelle". Tandis que je saisis la boîte et que je le remercie d'une courbette respecteuse, je ne peux m'empêcher de me dire qu'une fois endossée, elle me paraîtra différente.
M'éloignant à travers les couloirs et remontant à l'étage jusque notre chambre, je ne peux empêcher mon coeur de battre furieusement. Si Hitomi se braquait ? Si elle me trouvait ridicule, surtout ? La question m'obsède alors que je m'enferme dans la suite pour me dénuder avant de lentement revêtir mon collant.
Je n'avais jamais eu peur d'être jugé, jusque là. Mais aujourd'hui, un regard compte vraiment pour moi.
Alors, une fois prêt et dans la peau de Sentinel Prime, je me mets face à la porte et attend. Le coeur battant à tout rompre et la gorge sèche. L'avis qui compte.
Le sien.
La suite.
L'éventuelle conclusion.
Demain, encore une fois.
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Se faire passer un savon par des Japonais de la vieille école c'est déjà très difficile à supporter quand on a des racines occidentales. Comme tout, ça répond à des codes. Il faut tout encaisser avant de pouvoir s'excuser, seulement s'excuser, et ne surtout pas chercher à se défendre. Vu que mes hôtes se sentent visiblement offensés je vais devoir en faire des tonnes, sobrement même si ça semble paradoxal. La seule chose qu'ils pourraient faire de pire que de me réprimander sèchement serait de se taire... ce qu'ils font, bien évidemment. Ça me coûte mais je dois lâcher Kyle et m'écarter d'un pas pour joindre les mains et m'incliner un peu. Et je débite comme une mitrailleuse.
- Hirohito-san, Hirohito-sama ! Merci de nous avoir accueillis si généreusement ! Je suis désolée de m'être donnée en spectacle devant tous vos clients.
Pour un peu de m'aplatirait au sol devant nos hôtes. Je ne me cherche pas d'excuses et je préfère assumer simplement que leur dire à quel point je suis désolée. Comment je pourrais regretter d'avoir embrassé l'homme que j'aime ?
- Je sais que je me suis mal conduite envers vous et votre maison. Et que c'est un affront inexcusable à votre hospitalité. Ça ne...
Soudain Hirohito-sama me coupe dans mon élan. Je ne l'ai pas vue bouger mais j'ai entendu son kimono se froisser. Quand je relève la tête elle est déjà à côté de Kyle et sa main file pour l'attraper. Et voilà que la petite femme nous réprimande comme des gamins avant de nous sermonner. Je ne sais pas pour Kyle, mais moi ça me met franchement mal à l'aise. Si elle apprenait la moitié de mes frasques, je finirais enterrée jusqu'au cou dans le jardin.
Quand vient le moment de se séparer à nouveau pour satisfaire à la réalité, je suis notre hôtesse en silence. J'essaie de ne pas trop pensé à ce qu'a dit Kyle, et la façon dont il l'a dit. Je ne veux pas imaginer quelque chose d'assez fort pour me faire reculer, autant revenir à hier pour refuser qu'il me raccompagne. Mais il est trop tard pour ça. Et avant qu'il ne soit à nouveau trop tard je veux parler à la petite dame qui me cherche un kimono. Même si au fond, c'est surtout moi que je veux rassurer.
" Hirohito-sama.
- Hmm ?
- Je sais que Kyle-kun m'en fera voir de belles. Et que, même si c'est un bon garçon, ce sera parfois difficile. Mais... "
C'est dur de le dire à quelqu'un, mais sans doute pas autant que de le lui dire quand il le faudra bien.
" Ce qui me fait peur, c'est que moi aussi je lui en ferais voir. Je ne suis pas une bonne demoiselle, Hirohito-sama. Mais pour lui j'ai envie de l'être. "
Je sens que je vais en prendre pour mon grade, mais j'aurai au moins eu le mérite d'être franche. Je sais déjà ce qui m'attend. Si fais souffrir Kyle-kun je ne serais plus jamais la bienvenue dans cette maison, et la réalité tuera le rêve. Je me prépare déjà à encaisser à nouveau quand, à ma grande surprise, Hirohito-sama me sourie. Ce n'est pas un grand sourire joyeux, au contraire il porte les menaces que j'imaginais. Pourtant c'est une preuve de confiance.
" Permet-moi d'être franche, Hitomi-chan, et pardon si je t'offense.
- Allez-y.
- Je ne suis ni aveugle ni idiote. Tu es une belle jeune femme, qui porte des sous-vêtements indécents... Et tu es une gaijin. Si Kyle-kun étais mon fils je te chasserai de cette maison et je lui trouverai une fille comme il faut. "
Ça fait mal, ça. D'autant qu'elle insiste bien. Mais elle n'est pas la première japonaise à me sortir un couplet de ce genre. J'ai pris autant que mon père, et aussi pour ma mère qui ne met pas souvent les pieds au Japon. Pas encore assez pour que ça ne m'atteigne plus.
" Kyle-kun fait partie de la famille, même si ce n'est pas mon fils, et que c'est un gaijin lui aussi. Il mérite une fille comme il faut, qui ferait une bonne épouse. "
Ça fait encore plus mal. Quand son sourire s'élargit je sens venir le coup de grâce qui va me pousser à fuir en courant, quitte à nager jusqu'en Irlande pour chercher un refuge bien douillet.
" Tu n'es pas une fille comme il faut, Hitomi-chan, nous le savons toute les deux. Mais nous savons aussi que tu es la fille qu'il lui faut. "
J'ai à peine le temps de comprendre qu'elle me donne son approbation, et de sourire, qu'elle enchaîne en se retournant pour fouiller ses armoires.
" Ne va surtout pas le lui répéter ! Et ce n'est pas une raison pour vous croire tout permis !
- Bien sûr que non. Merci, Hirohito-sama.
- Ne me remercie pas ! Ce grand nigaud t'as choisie et c'est tant pis pour lui !... Ça tu peux le lui dire. "
J'encaisse la suite avec plaisir, même si Hirohito-sama n'arrête pas de pester et de râler. C'est elle qui m'habille, d'un kimono bleu avec une ceinture rouge. Je ne comprends pas trop pourquoi elle y tient, c'est loin de la sobriété à laquelle je m'attendais. Et elle prend aussi le temps de me coiffer pour me faire un beau chignon, que j'ai au moins l'air d'une fille comme il faut. Puis elle me relâche dans les couloirs pour retourner s'occuper de son auberge, après avoir perdu autant de temps à s'occuper de moi et me l'avoir bien précisé une fois de plus. Je lui pardonne son énervement, après tout Kyle-kun est de la famille et il a peut-être enfin trouvé celle qui manquait dans sa vie.
Mais en remontant vers la chambre je commence à me dire qu'il n'y a peut-être pas que ça. Ce que je vais découvrir, et comprendre en poussant la porte. Mon cœur par au galop quand ma main se pose sur le panneau coulissant. Je n'hésite pas, je prends juste une seconde pour respirer. Qu'est-ce qu'il y a à l'intérieur ? Qu'est-ce qu'ils savent et que je sais pas encore ? Est-ce que ça pourrait vraiment bouleverser ce qui s'est passé cette nuit entre Kyle et moi ? Je ne vais pas tarder à le savoir. Je prends une grande inspiration, je me vide les poumons un coup, j'ouvre et... une bombe nucléaire explose dans ma tête.
" S.. Sentinel Prime ? "
Le justicier en lycra moulant qui vole entre les buildings pour coller des trempes aux méchants ? Le surhomme qui fait rêver tous les geeks et fantasmer toutes les minettes à qui je donne des cours d'Anglais ? Mais au-dessus de son costume c'est bien le visage de Kyle que je vois. les questions que je ne lui ai pas posées hier, je ne me les suis pas non plus posées à moi-même. J'avais vaguement envisagé un truc de ce genre. Mais de le voir, de le découvrir comme ça. C'est tout simplement trop délirant pour que je m'en fasse une idée... Ou que j'en ai quelque chose à battre, en fait.
Hier il a décollé les tympans de cinq types en trois secondes, et on a volé, deux fois. Après tout ça ce n'est pas une paire de collants qui va m'impressionner ou me pousser à la fuite. Si c'est ça, son terrible secret, alors je n'ai pas à hésiter : je le prends avec tout le reste. Je sourie d'autant plus facilement que je comprends la couleur de mes vêtements. Plus rigolote qu'elle veut bien le laisser voir, Hirohito-sama. J'entre en prenant soin de tirer le panneau derrière moi pour ne pas qu'on nous, ou plutôt qu'on le voit.
" On vous a déjà dit que vous ressemblez à Kyle Macross ? "
Et je me fonce me pendre à nouveau à cou, cette fois il n'y aura personne pour me le reprocher. Je suis toute excitée. je penserai plus tard aux monstrueux problèmes que ça pourrait nous causer. Mon mec est un super-héros ! Mais c'est avant tout mon mec... Mais c'est un super-héros !
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♫ ♪ (http://www.youtube.com/watch?v=X69if5C3i9o)
- S.. Sentinel Prime ?
- En personne.
La réponse n'a pas tardée, pas plus qu'elle n'a été voilée par une quelconque once d'émotion forte. Dans ce costume et même face à Hitomi, j'acquière facilement une assurance qui me manque parfois la plupart du temps. Mon sourire assorti était celui qui rassure les gens que je sauve et mon rôle tenu jusqu'au bout. Je ne pense pas que ma compagne fasse une grande différence entre les deux prestations qui sont en temps normal plutôt dissociables l'une de l'autre, mais l'illusion aurait été là pour n'importe quelle personne qui aurait assisté à la scène. Pourtant, je n'avais pas porté hier mes lunettes factices ou une de mes tenues destinées à me faire passer pour un marginal de la société.
En silence et surtout sans la lâcher des yeux parce qu'à l'affût de la moindre de ses réactions, j'attends qu'Hitomi digère la scène et la révélation. C'était peut-être un poil trop théâtral, je veux bien le reconnaître. Mais c'était la seule façon de faire les choses sans passer par des centaines de chemins détournés, comme je le fais souvent lorsqu'un sujet me dérange ou me gêne.
Son sourire me fait du bien et la vision de sa beauté soulignée par le kimono -sacrée madame Hirohito- et le chignon élégant ne me donne que de plus en plus envie de la prendre dans mes bras. Je ne presse rien et la regarde nous couper du monde en fermant la porte en dotant mon visage d'une mimique sincère et aimante. C'est fou ce que je peux l'aimer, en fait.
La voilà qui file vers moi pour me sauter au cou, se perdant entre mes bras qui la reçoivent bien volontiers pour se refermer sur ses fesses alors que nos souffles se mêlent, nos bouches se retrouvant à un baiser l'une de l'autre. Je prends un moment pour darder mon regard azur dans ses yeux, les découvrant pétiller d'excitation. Une gamine devant la rock-star du moment, on dirait ! Je ne peux m'empêcher de rire légèrement à sa petite question.
- On vous a déjà dit que vous ressemblez à Kyle Macross ?
- Non, pas si souvent que ça. Mais vous savez, on nous confonds parfois : nous avons la même superbe femme pendue à notre cou. Vous lui ressemblez un peu, d'ailleurs. Je vais devoir vérifier si vous n'êtes pas un horrible clone, question de sécurité nationale.
Mes lèvres se déposent sur les siennes pour y goûter, avant que ma langue ne vienne doucement s'immiscer entre les ourlets pulpeux à la recherche d'un peu de répondant pour une danse sensuelle, papilles contre papilles. Le baiser se fait passionné, enflammé et mes mains l'accompagnent d'une descente vers ses fesses que je saisis sans hésitation avant de parler à nouveau.
- C'est bien toi, personne ne saurait embrasser à ta façon... Je colle mon front contre le sien. Donc, tu prends tout, Hitomi ? Je serais franc... Ce ne sera pas toujours facile, mon amour.
Loin de là, même. Les absences, les départs en catastrophe, les cinglés affrontés... Sans compter les demoiselles qui jonchent ma vie héroïque avec une proximité dont je n'imaginais pas qu'elle puisse être un jour une source de problème. Je décide de garder ça pour moi, pour le moment. Ca viendra, quand nous aurons un peu plus de bouteille.
- Un mois. C'est ce qui nous sépare des vacances scolaires, de NOS vacances. Si nous tenons jusque... je m'arrête et la fixe avant de secouer la tête. Non, non ! Quand nous en serons là -car c'est évident qu'on y arrivera !- nous prendrons le temps de vraiment tout nous dire. Nous saurons si cette vie nous plait, si l'autre est bien qui il nous faut. Alors nous pourrons nous livrer à lui sans mensonge ni cachotterie. Tu es d'accord avec ça ?
De ses rondeurs aguicheuses, une de mes mains remonte le long de son dos pour venir se loger sur sa nuque afin d'y apposer mes doigts avec tendresse, caressant les quelques mêches qui n'ont pas été prises dans la coiffure. J'attrape sa lèvre inférieure de ma bouche et la garde pour moi un moment avant de la relâcher, appréciant au passage la pression de ses seins lourds et généreux contre moi.
- J'ai envie de plein de choses avec toi, Hitomi. Je suis quelqu'un de...hm...d'enflammé, je le sais. Je ne veux pas te faire peur, je veux te plaire. Tout ce que je sais, c'est que je t'aime aujourd'hui et que je t'aimerais demain.
-
Je n'arrête pas de sourire, de bonheur et d'excitation. Et je rougie un peu aussi. Moi, superbe ? Oui, c'est vrai. Mais un clone, ça non. Quel parano, mais si c'est une question de sécurité nationale...
" Laisse-moi te convaincre... "
Je ferme les yeux pour mieux apprécier sa tendre vérification. Et je les rouvre en sentant ses mains glisser dans mon dos. On dirait qu'il est bien moins timide une fois en costume. C'est avec joie que je le laisse se rassurer ainsi, et que je plaide ma défense en caressant sa langue avec la mienne. Je suis également rassurée qu'il me reconnaisse aussi vite, mais un peu déçue qu'il ne pousse pas la prudence plus loin. Déception qui s'évanouit d'elle-même quand nos fronts se rejoignent.
" Donc, tu prends tout, Hitomi ? Je serais franc... Ce ne sera pas toujours facile, mon amour.
- Je sais. Je prends tout. Les absences, les secrets, les urgences, les risques... Je supporterai tout ça pour toi. "
Je dois aussi le prévenir. De nous deux c'est lui qui en sait le moins sur l'autre. J'ai beau l'aimer à la folie, je n'ai jamais été fidèle que de cœur. Mon secret n'est pas aussi spectaculaire que le sien, et il est honteux plus qu'autre chose. Je me suis offerte toute entière à lui, mais je ne peut pas lui jurer de n'être qu'à lui. Quand il commence à parler de vacances j'ai à peine le temps de faire une petite joie. Puis un "si" vient faire retomber un peu mon sourire.
" Non, non ! Quand nous en serons là -car c'est évident qu'on y arrivera !- nous prendrons le temps de vraiment tout nous dire. Nous saurons si cette vie nous plait, si l'autre est bien qui il nous faut. Alors nous pourrons nous livrer à lui sans mensonge ni cachotterie. Tu es d'accord avec ça ? "
Est-ce que je suis d'accord ? Est-ce que je sais seulement de quoi on parle ? Qu'on ne se presse pas pour se livrer, ça je veux bien. Mais une échéance aussi claire, après la façon dont tout s'est enchaîné. Ça me fait peur. Il me laisse un mois pour apprendre ce que ça fait de l'attendre et de m'inquiéter pour lui, de dormir et me réveiller sans lui alors qu'il devrait être là. Mais c'est aussi un mois pour remettre en question la décision que j'ai déjà prise. Me connaissant c'est aussi un mois pour tout foirer et m'enfuir, même si je ne fuirai jamais assez loin. Un mois garanti, qui sera peut-être le dernier.
Non ! Ça : pas question ! Jamais de la vie !
" D'accord. "
Va pour un mois, même le dernier. Tu risques de ne pas aimer tout ce que j'aurais à te dire, j'en aurais peut-être plus qu'aujourd'hui. Ça me fera mal de te le dire. Je le dirai quand même, quoi qu'il puisse m'en coûter. Profite bien de ces trente jours, Kyle, pour moi ils seront un supplice mais je te les offre. Et si dans un mois tu le veux encore je serais celle qu'il te faut, plus rien dans ta vie ou la mienne ne pourra me faire peur. Plus rien au monde ne pourra nous séparer. J'ai un mois pour me le prouver à moi-même.
Mais pas encore. Pour l'instant je suis encore dans ses bras, ma lèvre est entre les siennes. Et à nouveau le temps ne compte plus.
" J'ai envie de plein de choses avec toi, Hitomi. Je suis quelqu'un de...hm...d'enflammé, je le sais. Je ne veux pas te faire peur, je veux te plaire. Tout ce que je sais, c'est que je t'aime aujourd'hui et que je t'aimerais demain. "
Dans un mois il faudra que je lui fasse promettre de ne pas me promettre ça. En attendant il y a bien quelques petites choses que je peux lui révéler. Et rien que d'y penser ça me fait rire alors je me presse contre lui, mes lèvres à un cheveux des siennes.
" Je n'ai pas peur, mon amour. En fait... C'est toi qui devrais avoir peur. "
Et c'est au tour de mes mains de se glisser sur ses fesses. Me mettre un corps pareil sous le nez, dans un truc aussi moulant, il faut vraiment ne pas me connaître. Je ne palpe pas trop longtemps de peur de déstabiliser le grand Sentinel Prime. Et je dois bien remonter dans son dos pour l'attirer un peu plus contre moi, et l'embrasser encore. Enflammé, qu'il disait ? Ma langue vient danser contre la sienne comme pour lui demander ce qu'il entendait par là. Fougueux, passionné ? Ou langoureux, fiévreux ?
Je masse son dos à travers son costume, et n'hésite pas à pousser un peu mon bassin contre le sien. Il y a bien un point sur lequel il devra toujours me rendre justice, et je serais plus qu'heureuse de le lui prouver. Une de mes mains reviens caresser son torse, et je me penche un peu en arrière pour rompre notre baiser.
" Je t'aime, Kyle. Et je veux qu'on s'enflamme et qu'on fasse plein de choses et tout... Mais d'abord je dois te poser une question, et ça ne peux pas attendre un mois... "
Juste le temps d'un regard, et aussi de relever la main de sa poitrine, en gardant l'index pointé vers le symbole qui orne son uniforme.
" Comment je t'enlève ça pour qu'on s'enflamme et qu'on fasse plein de choses ensemble ? "
Je suis méchante de lui faire peur comme ça. Mieux vaut qu'il le sache tout de suite et prenne un mois pour s'y habituer. Et avec la vue que je lui ai offerte sur mon décolleté, il ne doit pas me trouver si méchante...
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Un mois. C'est court, c'est long. Un mois, c'est un repère dans le temps que je nous impose alors que j'ai moi-même un mal fou à m'organiser sur une semaine. Ces quatres semaines vont passer très vite mais paradoxalement je vais avoir le temps de bien y penser. Serais-je capable de tenir la distance avec la vie que je mène ? Hitomi aura t'elle la patience nécéssaire pour chérir un courant d'air ? Bien qu'elle me l'assure et que je sente la sincérité ponctuer chacun de ses mots, mon estomac se noue un peu et le sang fuit quelque peu mes joues. Qu'elle ne m'en veuille pas, mais j'ai tendance à imaginer Hitomi comme une femme gourmande qu'il faut combler le plus possible. Sexuellement, sentimentalement... Ce ne sera pas aisé que de m'y prêter avec tout ce qu'être Sentinel Prime nécéssite de faire, sans compter que je suis bien décidé à me lancer sérieusement dans la vie active le reste du temps. Pour résumer, ça va être chargé, comme planning.
Faible que je suis, la présence d'Hitomi contre moi me rassure vite et je me dis rapidement que quoi qu'il puisse se passer pendant le compte à rebours, tout ira bien. Si elle m'offre ses lèvres pour me rassurer, son corps pour me convaincre et son coeur pour me garder, rien ne pourra m'atteindre, pas vrai ?
Son avertissement me déstabilise et je me demande ce qu'elle peut bien vouloir dire par là. Est-ce une plaisanterie ? Un sous-entendu que je peine bêtement à comprendre ? Mes reflexions vont bon train et mon cerveau s'emballe sur un peu tout ce qui lui passe dans les neurones : peut-être qu'elle est mariée, peut-être qu'elle est mère, peut-être que c'est un homme opéré, peut-être qu'elle a également une seconde identité, peut-être que... Je me mords l'intérieur de la bouche afin de faire taire mes délires anxieux et son passage sur les muscles fermes de mes fesses anesthésie rapidement mes divagations, au même titre que le baiser qu'elle amplifie et auquel je réponds sans me soumettre. C'est une danse nuptiale appuyée que nos langues partagent, envahissant la bouche de l'autre, la repoussant pour mieux s'y engouffrer, y creuser son trou. J'adore conquérir ses papilles lors des virées sensuelles des miennes et décide de me montrer plus hardi et goûlu, abandonnant un temps la tendresse pour la bestialité encore en demie-teinte.
Pour voir ce qu'elle en pense.
...En fait, non. La voilà qui interrompt cet emportement en se décalant légèrement de moi pour me fixer avant de prendre la parole, faisant battre mon coeur à cent à l'heure en me demandant quelque chose qui ne peut pas attendre. Ca y est, j'imagine le pire, la question piège, le traquenard vocal, le... Quoi, c'est tout ?
J'éclate de rire sans hésiter, sans ombrage. Elle m'a fait peur mais me fait du bien. C'est avec un large sourire que j'attrape doucement sa main posée sur moi et la fait lentement glisser sur chacun de mes muscles sur le trajet qui sépare ses doigts de mon poignet droit. Arrivé là, profitant durant de petits coups d'oeil de son décolleté honteusement généreux dans lequel je vais prendre le soin de me perdre juste après, je pose sa phalange sur un des petits bracelet doré pour lui faire presser un petit bouton.
Lentement, la tenue se décolle de ma peau jusqu'a devenir si flottante que je parviens rapidement à la faire glisser à mes pieds. Nu devant elle, déjà correctement excité, je lui rend la pareille en ouvrant son kimono.
- Comme ça. Dites voir, Senseï, j'aimerais qu'on revoit les leçons d'hier un peu plus en profondeur. Certaines parties n'ont été que survolées et j'ai peur de ne pas réussir aux examens...
Mon bassin se colle à elle et ma bouche revient chercher la sienne. La journée commence à peine, notre compte à rebours aussi. Tout le jour nous appartiendra et cette chambre sera le théâtre de nos ébats.
Pour une fois, vous n'en saurez pas plus. Parce que je veux que ce moment n'appartienne qu'à nous seuls.
Toutefois, je dois vous faire une confidence avant le baisser de rideau. Je n'ai plus tellement peur de l'avenir. Car si j'ai appris une chose récemment, c'est qu'il n'appartient qu'à nous de le construire et de ne pas le subir.