Le break estival. Quel formidable moment.
Changer d’air, faire bronzette, glander à n’en pas finir… et ne faire que profiter de ce moment de répit attendu tout le reste de l’année. Un moment qui passe toujours bien trop vite, mais qui n’est jamais vide en souvenirs. De ceux qui perdurent longtemps, sinon pour toute la vie.
Évidemment, en cela comme en toute autre chose dans la vie, nous ne sommes pas tous logés à la même enseigne, ça va sans dire.
Les mains serrées avec fermeté sur ses genoux, Takezo, lui, contient du mieux qu’il peut son excitation, impatient qu’il est de pouvoir enfin profiter de ses vacances, même s’il sait que celles-ci ont un prix.
Les yeux brillants d’émotion, assis à l’arrière de la voiture, tandis qu’Oko et Tomie -ses deux grandes soeurs- sont à l’avant, il observe, ravi, le paysage qui défile sous ses yeux.
Voilà quelques minutes que leur petit convoi borde la côte, signe qu’ils ne devraient plus tarder à arriver. Le soleil brille, si haut. L’eau est si bleue. Plus de doute permis, cette fois ça y est, c’est les vacances !
Trépignant d’impatience, le garçon entrouvre à peine la bouche pour faire part au monde de toute son émotion qu’un regard de sa soeur, lancé depuis le rétroviseur intérieur, le rappelle à l’ordre et le coupe dans son élan.
C’est vrai, de toutes ces règles qu’avaient pondu Oko et Tomie quant au bon déroulement de leurs vacances ensemble, la première stipulait ceci : « Takezo, la route va être longue, on ne veut surtout pas t’entendre. »
C’était… dur, mais assez commun, dans la famille.
Entre frère et soeurs du moins. D’ailleurs faut-il le préciser, ces règles ne s’appliquaient évidemment qu’à lui, pour leur assurer, à elles, quiétude et tranquillité.
Avec pareille ambiance, vous vous demanderez sûrement pour quelle raison les deux jeunes femmes avaient, et de leur propre chef, proposé à « leur boulet de frère » de passer avec elles une semaine entière, et à leurs frais, au bord de la mer…
Eh bien voyez-vous, le deal était plutôt simple :
Oko et Tomie ayant réservé une véritable et gigantesque villa, en compagnie d’une amie qu’elles avaient toutes deux en commun, s’étaient vues plutôt gênées quand vint l’heure pour elles d’emprunter à leurs parents la somme colossale qui leur était demandée en guise de caution. Comme à leur habitude, les deux starlettes avaient vu trop grand, et bien au-delà de leurs moyens.
Aussi, quand leur mère leur fit promettre de restituer jusqu’au dernier centime de cet argent une fois leur semaine de farniente terminée, se trouvèrent-elles encore dans l’embarras, aucune d’entre elles n’ayant dans l’idée, bien sûr, de faire le moindre brin de ménage qui soit dans ces 300m2 de luxe pur.
L’idée dut germer dans leurs têtes à ce moment-là et ne tarda pas à faire son petit bonhomme de chemin, avant qu’elles ne surprennent leur petit frère chéri avec cette proposition, dernière chose à laquelle il s’attendait de leur part :
Et si en échange du ménage, de la cuisine, de la vaisselle, du linge, du nettoyage de la piscine et… et de tout ce qui s’en suit, ses deux formidables soeurs lui offraient l’occasion de profiter de vraies vacances, dans un cadre dépassant le cinq étoiles ?
Et si… il les passait, en plus de ça, en compagnie d’une vraie bombe, qu’elles pourraient lui présenter ?
Elles rirent évidemment entre elles à ce sujet, mais surent d’emblée qu’elles viseraient juste. De ce côté là, Takezo n’était pas bien compliqué à convaincre. Lui montrer quelques photos d’Emi suffit, bien sûr.
Et donc, quelques photos et… quelques centaines de kilomètres plus tard…
*CLANG*, fit la portière en se refermant après que Tomie, au volant depuis des heures, soit sortie de la voiture.
« Waaaaaaaaaaaah ! », s’exclama Oko qui passait l’énorme portail en courant, gagnant vite l’entrée de la demeure d’architecte devant laquelle ils venaient de se garer.
Une autre voiture prenait déjà place face au garage dans l’allée. Celle d’Emi, sûrement.
« Tomi, t’as vu ? C’est comme sur les photos. T’as vu, t’as vu ?! »
Après qu’elles aient versé un acompte astronomique quelques mois plus tôt, les deux soeurs avaient douté, un temps, et eu peur de se faire arnaquer.
« Eh, Take ! », lança Tomie, l’aîné, quand elle remarqua son frère en train de flâner, impressionné par la taille de la bâtisse.
Sursautant comme s’il venait de se faire reprendre par un supérieur à l’armée, le grand dadais se reprit et s’en alla ouvrir le coffre de la voiture.
Tandis qu’Oko avait contourné la maison pour aller vérifier si la piscine était, elle aussi, comme sur les photos, Tomie rejoignit l’entrée de la maison.
Et… elle sonna, sonna et sonna encore, tenta d’ouvrir, mais resta sans réponse, pendant que Takezo, seul, s’évertua à amener jusqu’à la porte les valises de ses soeurs, qu’elles avaient évidemment prises en nombre avec elles.
« Yaaaaaaaaaaaaah ! Emiiiiiii ! », put-on entendre hurler Oko, depuis l’autre côté du jardin. Sans doute avait-elle trouvé la piscine, aussi.
« Allez viens. », soupira Tomie à l’intention de son frère qui peinait à tout porter en une fois pour s’économiser des trajets superflus.
La maison contournée et les valises enfin posées, Takezo reprit son souffle une seconde, avant qu’il ne puisse enfin admirer la vue. L’immense piscine, donnant elle-même sur l’océan.
Les yeux brillants, il le lâcha enfin, son :
« Waaaaaaaw »
« Tss. Hey, les chambres c’est à l’intérieur, Takezo. », reprit Tomie comme pour briser de son plein gré son tout petit moment de bonheur, avant de se retourner vers son amie, qu’elle apercevait enfin.
« Hey, salut Emi. »
« Ravie de te rencontrer, j’espère que tu te plairas ici ! N’hésite pas à profiter de la piscine, et fais comme chez toi. »
Ces mots font à Takezo l’effet d’une bombe quand, après avoir salué ses soeurs, la jeune femme qui vient de se joindre à eux s’élance dans sa direction pour lui faire la bise.
Déjà décontenancé par les ordres de Tomie, qui l’ont extrait à ses pensées, le jeune homme n’a-t-il même pas le temps d’apercevoir vraiment cette inconnue qu’elle fond sur lui, comme il n’en a que peu l’habitude. Le rouge lui monte aux joues, comme ses yeux s’ouvrent bien grand, de surprise comme de panique. Presque.
« A-ah, euh… merci. », lâche-t-il d’un air timide qu’il ponctue d’un hochement de tête bien plus formel qui trahit son évidente gêne.
« Waaah… », continue-t-il tout bas alors qu’Emi s’éloigne, aussi vite qu’elle lui était apparue, pour aller chercher ses affaires.
La main posée sur sa joue comme pour imiter de nouveau la sensation que lui avait offerte celle d’Emi, et pour mieux en imprimer le souvenir dans sa peau, il reste un instant pétrifié.
Elle aussi, était comme sur les photos, s’était-il dit. Plus belle encore, peut-être. Mais qu’est-ce qu’elle était grande, aussi. Ça, il n’aurait pu le deviner, aux clichés qu’elle et ses soeurs avaient pris ensemble. Sans doute se baissait-elle à chaque fois, ou bien Oko se mettait-elle sur la pointe des pieds, comme elle le faisait avec lui, sur la plupart de leurs photos de famille, depuis qu’ils sont enfants.
Emi était… un véritable mannequin.
Tout pouvait en tout cas le faire penser. Du fait qu’elle lui semblait parfaite, même dans pareille tenue, jusqu’à sa démarche, agile et… étonnamment, affreusement, sensuelle. De son point de vue adolescent du moins.
Ses yeux faillirent glisser un peu trop bas, cherchant à se faire une vue d’ensemble, complète de la jeune femme, que Takezo fut encore une fois sorti de ses pensées. Heureusement d’ailleurs sinon qui sait ce que ses soeurs seraient allées raconter à Emi à son sujet.
« Reste pas planté là, qu’est-ce que t’attends ? »
Attrapant entre ses bras les valises de ses soeurs, le garçon alla les porter jusqu’au seuil de la porte, avant que Tomie ne l’interrompe encore.
« Pas ça, crétin. Tu le fais exprès ? Va l’aider. Je te dirai où poser mes affaires. »
« Oh… ok. D’accord. », fit-il en reposant sur le parquet lustré les nombreux sacs qu’il avait sur les bras.
Au même moment entendit-t-on Oko s’extasier de nouveau, de sa toute petite voix aiguë et particulièrement désagréable pour beaucoup.
Sans doute s’était-elle trouvée une chambre à son goût. La plus grande assurément, celle dotée d’une immense salle de bain ouverte, et donnant une vue imprenable sur l’océan.
Tomie l’avait évidemment compris et s’en était allée rejoindre sa petite soeur aussitôt. Il y aurait assurément lutte et dispute entre toutes les deux mais… comme à chaque fois, c’est bien l’aînée qui sortirait victorieuse.
À pas de loups, Takezo entreprit-il donc de traverser la maison d’un bout à l’autre, pour rejoindre l’entrée. De ses grands yeux émerveillés détailla-t-il tout l’impressionnant mobilier, l’immense cuisine aménagée, le poêle à bois qui l’hiver devait réchauffer celles et ceux qui devaient s’asseoir sur ce canapé qui, à vue d’œil, pouvait bien compter douze à quinze places…
Il faillit faire tomber un vase, qui trônait sur un piédestal, comme s’il appartenait à un musée… mais le rattrapa de justesse. Ouf.
Ressortant de la villa par son autre côté, par la porte principale, le jeune homme finit bien par tomber de nouveau sur Emi, qui semblait peiner avec ses affaires, en nombre conséquent elles aussi.
« Hey, hum… »
Il rattrapa aussitôt un petit sac qui faillit lui tomber des bras.
« Oh ! U-un… un coup de main ? », finit-il enfin par dire malgré son embarras. Quand bien même lui adressa-t-il un sourire, la regarder en face lui semblait encore impossible.
Empoignant quelques sacs dans une main, en posant un autre sur son épaule et s’occupant de tirer une autre valise à roulettes par sa poignée, avant même qu’elle ne lui ait répondu, Takezo indiqua à la jeune femme l’entrée, d’un simple mouvement de tête semblant vouloir dire qu’il fermerait la marche.
À entendre les éclats de voix qui leur parvenaient même d’ici, depuis l’intérieur, il semblait qu’Oko et Tomie n’aient pas encore fini de se chamailler. Takezo le savait très bien… quelle que soit l’issue, comme le sujet de leur dispute, ce serait lui qui finirait par trinquer. Il en frémit d’avance.
« Je crois bien qu’on devrait se dépêcher si tu veux pouvoir choisir une chambre. »
Le garçon connaissait bien ses soeurs.
Vexée de ne pas avoir la plus belle de toutes, Oko aurait bien été capable de s’approprier jusqu’à cinq chambres juste pour elle.
Sans doute en laisserait-elle une à Emi, pour cela, il ne se faisait pas de souci. Mais en laisserait-elle une pour lui ?
Bonjour, canapé king size.
Fermant la marche après Emi, Takezo regagna donc la villa les bras chargés, accueilli par les incessants braillements d’Oko et Tomie, toujours à se chamailler.
À les entendre ainsi, et comparées à la première impression que lui laissait la jeune femme, à première vue bien plus facile à vivre, le garçon en vint à se demander, l’espace d’un court instant, ce qui pouvait bien les lier toutes les trois. Emi lui paraissait si calme en comparaison. Normale, pour le dire vite. À moins qu’elle ne cache bien son jeu.
Ce qu’il n’espérait pas.
Cela le rendait curieux et, surtout, emplissait ses méninges d’appréhension. Intérieurement se répétait-il sans cesse telle une prière adressée à il ne savait trop qui : « faites qu’elle ne soit pas comme elles, faites qu’elle ne soit pas comme elles… ».
Ensemble, ils traversèrent à nouveau ce gigantesque couloir reliant les chambres, les passant en revue une à une. De son côté, Takezo dut contenir un soupir, quand Emi, elle, se mit à rire. Voilà même pas dix minutes qu’ils étaient arrivés que déjà le parquet était jonché ça et là des vêtements de ses soeurs. De quoi lui donner bien du boulot déjà.
S’il ne s’en chargeait pas vite, il le savait, il le paierait au prix fort.
« Euuuuh… »
Déjà préoccupé par ses corvées avant même d’avoir pu dire ouf se laissa-t-il guider sans vraiment faire attention à rien les quelques secondes qui suivirent. Ses yeux se posant partout où le bazar s’était déjà installé ne se rendit-il compte qu’il avait changé de pièce qu’en constatant l’absence de vêtements sur le sol.
Acquiesçant d’un hochement de tête courtois, il déposa les affaires d’Emi et la gratifia d’un bref sourire. Sa vue n’étant plus obstruée par le moindre sac se surprit-il une seconde à redécouvrir sa beauté, avant que le rouge ne lui monte de nouveau aux joues.
Les bras ballants, le jeune homme resta planté là quelques secondes, à ne savoir que faire, la fuyant du regard pour observer la chambre.
Fort heureusement, Emi ne resta pas silencieuse et cet instant, aussi court fut-il, ne parut pas aussi gênant qu’il aurait pu l’être. Gentiment tiré de sa courte rêverie, Takezo tourna donc les talons, prêt à aller explorer la chambre voisine.
« Oh, hum… toi aussi. Si t’as besoin de quelque chose, je veux dire. »
Sorti au son du zip que fit l’ouverture de la valise d’Emi, le jeune homme fit quelques pas et passa dans la pièce d’à côté, un peu songeur. Mis à part avec ses soeurs, évidemment, il n’avait pas l’habitude de devoir faire la conversation à une femme, et cela le rendait nerveux.
Ses soeurs avaient dû lui en raconter, des choses, à son sujet. Oko avait dû lui dire comme il était bête, et Tomie, comme il était empoté…
Ça aurait été sympa, qu’on ne le voit pas comme ça.
Poussant un profond soupir, Takezo se laissa tomber sur l’épaisse literie de son lit double et fixa le plafond. Sa tête bascula doucement, tout doucement en arrière, jusqu’à ce qu’il aperçoive le mur, et pense : « elle est… juste là ».
Les murs n’étaient pas bien épais, avait-il remarqué, alors que depuis son perchoir, il put encore entendre le zip de sa valise. Voilà qui, dans certaines situations, pourrait s’avérer fort gênant. Aussi se répéta-t-il plusieurs fois qu’il lui faudrait faire attention à ne pas faire trop de bruit, la nuit.
Se souvenant que de toutes les affaires à sortir de la voiture, son sac manquait encore à l’appel, il se releva, et repassa par le couloir, commençant déjà à rassembler sous son bras les fringues de ses soeurs, qu’il lui faudrait encore plier et trier avant d’aller les ranger dans les chambres de chacune.
Les posant dans un coin pour plus tard, entre sa chambre et celle d’Emi, son regard se posa furtivement par l’encadrement de cette dernière, restée à demi ouverte après son départ. Son visage changea une fois de plus de couleur et Takezo tourna très vite la tête, un peu honteux.
Par-delà cette porte, croyait-il l’avoir vue presque nue.
Son dos, du moins, de trois quart, et la silhouette parfaitement ronde de l’un de ses seins. Ses superbes hanches, marquées des ficelles noires de son très fin dessous, et débarrassées de ce jogging que la jeune femme portait encore quelques secondes plus tôt.
Son coeur se mit à battre à tout rompre alors que, hésitant mais curieux, il revint porter un regard discret en direction de la chambre occupée.
Il ne la revit pas, mais entendit plutôt une porte s’ouvrir, puis se refermer aussitôt.
Très vite, il recula, et reprit le cours de ses occupations, avant que quelque chose de terrible n’arrive. Comme par exemple… être surpris par ses mégères de soeur, qui ne devaient pas être bien loin.
La gorge serrée, il traversa le couloir à vive allure et s’en alla chercher son sac dans la voiture. Il en sortit également le vélo d’Oko, censé lui servir pour faire les courses dans le centre-ville, et le laissa contre un mur, près de l’entrée. Ceci fait, il prit une grande inspiration, et traversa la maison dans le sens inverse, nerveux, comme si tout le monde connaissait déjà son terrible secret.
Il ne ralentit pas devant la chambre d’Emi cette fois, et se précipita plutôt jusqu’à son lit sur lequel il vida le maigre contenu de son sac.
Cherchant des yeux où ranger les quelques shorts et t-shirts qu’il avait prévus pour la semaine, Takezo tourna sur lui-même, et faillit ouvrir ce qu’il pensait être un placard, avant qu’un petit quelque chose ne le retienne.
Il crut d’abord à une erreur de calcul, mais comprit vite en repensant à cette porte par laquelle Emi avait disparu. S’il entendait de l’eau couler, depuis ce fameux placard, c’est évidemment parce que ce n’en était pas un. Derrière cette porte se trouvait probablement une salle de bain. Sans doute la même que celle qu’occupait la jeune femme à cet instant, mitoyenne aux deux chambrées.
Son coeur ayant fait un nouveau bond dans sa poitrine, Takezo laissa ses vêtements lui glisser des mains et s’enfuit vers le reste de la maison. Le plus loin possible espérait-il, avant que son cerveau ne se transforme en bouillie. Bien des choses lui passaient par la tête à cet instant. Bien TROP de choses.
Les longues minutes qui suivirent, le garçon les passa donc à remettre de l’ordre dans les affaires de ses soeurs. Comme si faire ça pouvait aussi lui permettre d’en remettre dans sa tête.
Il fuit comme la peste Oko et Tomie, qui connaissaient bien assez ses réactions et ses changements d’humeurs pour les remarquer, de peur qu’elles n’arrivent à lui tirer les vers du nez, et chercha à se faire tout petit, passant d’une pièce à une autre dès lors qu’il entendait l’une d’entre elles arriver.
Repassant enfin de la cuisine au salon, désormais inoccupé, entreprit-il de faire là encore un peu de rangement tandis que toutes ses colocataires avaient rejoint la piscine.
Faisant semblant de rien, il écoutait les plans de ses soeurs pour la semaine, sans pour autant s’en mêler (son avis n’était pas non plus demandé), et se contentait de replier serviette après serviette, avant qu’Emi ne l’invite à participer.
« Moi ? », demanda-t-il tout en se désignant du doigt, alors qu’il rejoignait la baie vitrée pour s’approcher.
Avec tout ce qu’avaient prévu ses soeurs, Takezo n’avait pas vraiment pris la peine d’y penser. Hormis jouer les domestiques, il avait espéré se baigner, se balader à vélo peut-être, flâner dès qu’il en aurait l’occasion… mais n’avait pas songé à ce qu’il pourrait faire pour s’amuser. À dire vrai, il pensait surtout qu’aucune de ses soeurs ne lui en laisserait vraiment le temps.
« Eh bien… »
« Super idée. », dit Tomie, avant de se tourner vers son petit frère « Évidemment, t’auras le droit de venir si t’es sage. »
Oko pouffa, moqueuse, avant que quelque chose ne la stoppe complètement. Du rire, passa-t-elle à la curiosité, tandis qu’elle cherchait à voir ce que pouvait bien regarder son frangin, au loin, et l’air fuyant.
« Le marché ça me dirait bien, ouais. »
Oko donna un coup de coude à sa soeur.
« Eh, tu le trouves pas un peu bizarre, là ? »
« C’est vrai, ça. Qu’est-ce que tu regardes, comme ça ? »
Ne s’étant même pas tourné vers elles, Takezo fuyait surtout Emi qui, à peine aperçue dans sa vision périphérique, lui semblait trop dénudée pour qu’il ne repense pas à ce qu’il croyait avoir vu quelques minutes plus tôt.
« Rien… Rien du tout.»
« Vraiment ? »
« Je réfléchis, c’est tout. »
Et… comme si elle avait soudain tout deviné, Oko fit un « o » de surprise avec sa bouche, tout en secouant l’épaule de Tomie. Désignant Emi du regard, sa soeur comprit d’instinct.
« Ooooh. Emi ? Je crois que t’as une touche. », fit-elle avant d’éclater de rire, vite accompagnée par Oko.
« Quoi ?! Mais p-pas… pas du tout ! »
Son teint virant pivoine, Takezo ne sut soudain plus où se mettre. Alors qu’il voulut s’expliquer, son regard croisa vite celui d’Emi, mais se porta vite ailleurs, alors qu’il se trouvait irrémédiablement attiré par le haut de son maillot.
Mal à l’aise, les bras croisés, le pauvre cherchait désespérément un point auquel ancrer son regard, quelque chose, n’importe quoi, pour fuir ce calvaire.
« Je pensais juste aller me baigner, d’accord ? »
« Hahahahaha, mais oui, c’est ça. T’es pas gonflé, toi. Tu doutes vraiment de rien. », lui répondit Tomie en agitant la main, incapable de s’arrêter de rire.
« Raaah, lâchez-moi, d’accord ? », pesta-t-il entre ses dents, crispé, avant de faire volte-face, sur le point de retourner s’enfoncer dans la maison.
« Je vais faire les courses en ville. T’auras qu’à m’envoyer la liste. »
Takezo traversant une énième fois la maison, d’un pas décidé et quelque peu en colère, ses soeurs reprirent, Tomie se tournant vers Emi, plus grave :
« Nan sérieusement… même si t’as envie de t’amuser, évite. »
« Puis il est puceau. »
« Après… puceau, mais…. »
« Roh, ouais. », finit par lâcher Oko les yeux grands ouverts, alors qu’elle écartait les mains bien grand pour décrire des mensurations que n’importe qui aurait pu trouver fantasque.
Mais l’air sérieuse, Tomie la corrigea, lui écartant un peu plus les mains. Oko acquiesça, avant d’attraper son téléphone, posé sur le rebord de la piscine.
« Attends, tu veux voir ? », renchérit Oko en tout en scrollant inlassablement.
« Nan, sérieusement, dans le genre douloureux, quoi… attends Oko, quoi ? T’as vraiment ça sur ton téléphone ? »
« Pour la bonne cause. C’est Kimie qui m’avait demandé des preuves. Me regarde pas comme ça, j’y peux rien, moi. »
« Eurk… »
« Ah, voilà ! Tu veux voir ? »
« Ah, arrêtes, tu me dégoutes. »
De l’autre côté de la maison, agacé par les rires de ses deux folles de soeur, Takezo enfourchait son vélo en ronchonnant.
Sur le point de partir, il envoya juste un message à Tomie : balance la liste, je m’en vais. »