Je vais te faire bouffer les cendres de ta grand-mère, connard.
Vous avez été momentanément banni pour insultes et propos inappropriés.
Mon commentaire se succède au bannissement redouté. Après plusieurs heures de débat houleux, ma patience a atteint une certaine limite. J’ai partagé de nombreux mots doux avec mon interlocuteur jusqu’à recevoir ce message de la modération. Elle a un peu tardé à intervenir, peut-être trop divertie à nous voir se foutre sur la gueule pour une raison stupide. Mais à la fin, je paye toujours l’addition salée.
« PUTAIN ! Je vais en créer un autre. »
Ou j'attendrai. Peut-être. J’hésite. Mes jambes tremblent sous la colère et l’envie de lui foutre mon poing dans la gueule. Mais le ban sonne l’arrivée du marchand de sable. Faut que je relativise. Demain, je bosse et il est déjà trois heures du mat’ ! Je me convaincs et je me force à aller me détendre sous une douche froide. J'enfile mon pyjama habituel : t-shirt, jogging. Puis je me glisse sous la couette. La joute verbale m’a bien remué le cerveau et il me faut une bonne vingtaine de minutes avant de trouver le sommeil.
Je sombre toujours.
Je suis une de ces personnes qui rêvent presque toutes les nuits et qui se laissent emporter dans des aventures loufoques. Les événements de mon quotidien donnent toujours le ton. Cette nuit-là, ne fait exception. Je me trouve tout à coup, assise sur le lit et le dos contre le mur. Je pianote sur mon ordinateur quelques menaces supplémentaires à l’autre anomalie. Aucune conséquence.
Ça devient de plus en plus trash. Les commentaires sortent de mon écran. Il apparaît une silhouette formée par nos échanges dans son salon. Cette monstre me glace le sang et s’approche. Il parle mais ne s’arrête pas. Sa voix étouffée est difficilement audible. Les rares mots que je discerne ne sont pas faits pour me rassurer. Je saute de mon lit, m’éloigne et attrape une chaise. De l’autre main, je lance des objets mais tout lui passe à travers.
J’ai peur.
Tellement peur.
J’essaie de me réveiller mais je n'y arrive pas ! Le cauchemar continue. Mes mains tremblantes laissent la chaise tomber au sol. Mes pieds sont englués au sol et j’ai l’impression de devoir mettre une force herculéenne pour me sortir de là. Je fais péniblement un pas puis un deuxième. Le monstre est plus lent mais ce qui semble se distinguer comme un regard ne me lâche pas.
Il se situe entre la porte et moi. Ma seule porte de sortie est la fenêtre. Quand je suis enfin à portée, je l’ouvre et saute sans réfléchir aux conséquences. Je suis endormie, rien ne peut m’arriver dans le monde réel. Mais les sensations de hauteur et de tomber dans le vide pendant plusieurs longues minutes ne m’est toujours pas agréable. Le seul avantage que j’y vois c’est que la créature a disparu et ne tente plus de me courser. Mon cauchemar se transforme peu à peu.
Je me calme et j'atterris dans un monde qui m’est familier. C’est l’image de mon New York fantasmé où se déroule l’une de mes premières nouvelles érotiques. A cet époque, j’étais encore un peu modérée dans mes écrits et trop fleur bleue. Si je devais la réécrire aujourd’hui, ça serait tellement plus hot ! J’ai toujours adoré ces situations où l’héroïne se trouve pas un très heureux concours de circonstance dans un instant tendancieux avec un parfait inconnu. Mon imaginaire fait le reste. De la pleine rue, le décor change pour me coincer dans un ascenseur. Je repense tout de suite à l’amas d’écriture de tout à l’heure. Mon cœur s’emballe d’un coup. J’ai un peu peur mais je suis un peu excitée.
Je fuis ? Je reste ? Bordel ! Je fais quoi ?