L'autorisation d’entrer donnée, Kleora appuie sur la poignée pour ouvrir la porte et détaille la pièce. Le sifflement odieux attire son attention, comme désiré. Elle découvre un homme, grand et robuste avec une arbalète entre les mains, chargé d’un carreau et pointée en sa direction.
Déconcertée, surprise, profondément agacée, les sentiments se succèdent sans que la féline ne sache quoi penser de cette situation. Seule sa profonde haine immédiate envers son maître lui paraît claire.
L’envoyer dans un tel merdier ? Face à une telle brute ? Il serait peut-être temps que ce vieux con crève et qu’elle passe entre les mains d’un autre.
Dépitée, Kleora se tourne pour fermer la porte. Au moins, le sorceleur comprit vite qu’elle ne présente aucune menace, pas même pour une innocente mouche…Il existe peut-être des poisons à verser dans le verre de son maître ou peut-être peut-elle le pousser d’un haut balcon du manoir ? Quelle malheureuse perte… Un accident est vite arrivé.
« Oui, il me fait confiance. Mais de vous à moi, sa vie n’a que peu de valeur. Il vous a même menti sur son rang. Il n’est qu’un simple comte aux rêves de grandeurs et à l’égo disproportionné, presque aussi riche et influent, toutefois. »
Après l’avoir envoyé dans un tel traquenard, sa vie a-t-elle réellement de la valeur ? Décidée à faire aucun effort, Kleora continue sur la même lancée :
« Kleora, Messire. Ce que j’ai pour vous ? Mon cul, tout simplement. A l’exception de quelques éclairs de génie, le Comte pense avec sa queue. Il s’est dit que vous permettre de tirer un coup, avec moi, joyau de sa collection, vous fera changer d’avis. »
Malgré sa libido débordante et sa relation complice avec son esclave, il n’y touche pas et la réserve à ses desseins politiques ou… A sa survie, comme aujourd’hui. La féline ne peut se plaindre, le sorceleur a tout de même un charme unique ; sa compagnie sera moins désagréable que celle du Traître.
« Les hommes comme vous n’ont que rarement l’occasion d’apprécier des femmes comme moi, selon lui. »
La surprise est dépassée mais l’amertume subsiste. Elle s’inquiétait pour un stupide noble qui l’a envoyé à l’abattoir ! Sans aucune considération, il n’avait péché que par hasard le nom du mercenaire venu exécuter le contrat et avait envoyé sa belle féline à sa porte. Il avait été stupide au point de pas être capable de se renseigner, de prendre de contact pour établir un marché.
Elle l’avait été tout autant lorsque son anxiété se manifesta. Inquiète de réussir sa mission, de décevoir cet homme qui possédait pourtant son affection. Tout repose sur ses frêles épaules alors qu’une rapide fin aurait pu être donnée à cette histoire, évitant leur rencontre. Après tout, le sorceleur ne s'inquiète pas seulement du nombre de fellations qu’il peut se payer.
Son mépris se dévoile dans ses paroles.
« Vos connaissances sur les prix du marché sont impressionnantes. Avez-vous effectué le calcul ? Ou vous étiez déjà prêt à dépenser vos pièces au bordel ? On m’a toujours dit que les sorceleurs étaient… »
Sa phrase se suspend.
« Baiser comme cinq filles venues d’un bordel ? Probable. Mais donnez-moi au moins le change et montrez-vous capable de me satisfaire. »
Kleora ! Il est l’heure de se reprendre. Non seulement, la féline joue avec la vie du comte mais aussi la sienne maintenant. Quoi qu’elle en dise, sous la colère, le mépris et le dépit, le refus de changer de maître persiste. Un soupir traverse ses lèvres. Cette situation l’exaspère mais elle se doit de faire bonne figure.
Plus douce, la terranide lui offre un sourire tendre et reprend d’une voix sereine :
« Veuillez m’excuser, je me suis laissée submergée par les émotions. »
Ce qui pourtant rare, l’hybride a appris à garder sous contrôle ses états d’âme.
« Je n’ai guère envie que vous n’y touchiez. Malgré que ce soit un profond connard. Dites-moi, s’il vous plaît, que vaut sa vie ? »