Le paysage du quartier de la toussaint, à la base, ne collait pas avec la silhouette fluette de Sanna. Du centre ville à l’internat du lycée (ou Sanna dormait), il était plus rapide de passer par ce quartier, et parfois la jeune artiste s’y risquait. Ce soir était l’un de ceux ou San’ empruntait ce raccourcit. Elle était allée voir un film au cinéma, une adaptation de roman qui était à son programme de littérature et dont elle devait faire une analyse comparative. En élève sérieuse, Sanna était donc allée voir le film, pour son plus grand bonheur car elle avait réellement apprécié. A présent elle marchait, aussi rapidement que ses petites jambes maigrichonnes le lui permettait, les yeux rivés sur ses pieds et la main posée sur la lanière de sa besace. Elle n’avait pas envie de faire de mauvaises rencontre et rien qu’à cette idée elle en avait les mains moites. Défilait tour à tour sous ses yeux, sur un décor d’asphalte : des mégots, des capotes usagées, des capsules de bouteilles des morceaux de verre et toute sorte de cochonneries que l’on peut trouver sur le sol. Elle tourna dans une ruelle menant techniquement à l’internat mais sous ses yeux, le spectacle changea : l’asphalte se transforma en pavés, et il n’y avait plus aucun immondice sur le sol. Sanna leva les yeux et se retrouva dans un décors médiéval, mais pas moins glauque.
« Oh putain… » Murmura-t-elle.
Elle se frotta les yeux, se demandant si elle n’était pas victime d’hallucination. Elle avait arrêté de marcher et regardait, effarée, autour d’elle. Bordel, mais ou était-elle tombée encore ? Le vent était glaçant ici, Sanna était simplement vêtue d’une grande chemise bleue et d’un blue jean usé, comme bien souvent. Alors qu’elle croisait les bras sous sa poitrine, avec l’espoir de se réchauffer, San’ entendit des bruits. Elle tendit l’oreille. C’était quelqu’un que l’on frappait, il y avait plusieurs voix masculines qui beuglaient des termes grossiers et pour la plupart incompréhensibles. Sanna se rendit compte que ses jambes tremblaient affreusement : oui, elle était terrorisée, elle n’avait aucune idée de ce qu’elle faisait là. Elle décida d’avancer discrètement vers les voix et elle glissa sa tête dans la ruelle d’où provenaient les bruits. Elle vit alors une sorte de gang un peu moyenâgeux, qui s’acharnait sur un corps au sol. Les agresseurs - aussi invraisemblable soit-t-il pour Sanna - n’avaient pas tous l’air humains. La jeune femme sentit ses dents claquer, qu’est ce que c’était que cet endroit ? L’un des hommes levant la tête l’aperçu et à peine eu-t-elle le temps de cacher de nouveau sa tête qu’elle entendait le groupe courir dans le sens opposé à elle.
Par reflexe, l’artiste se retourna, se demandant quel monstre avaient pu les faire déguerpir, mais aussi fou soit-il, c’était Sanna qui leur avaient fait peur. Elle respira un grand coup, prit son courage à deux mains, et se dirigea vers la ruelle maintenant vidée des agresseurs, mais dans laquelle gisait encore l’agressé. La jeune femme s’approcha tremblante de la personne au sol et s’arrêta à quelque mètre, incapable d’émettre un seul son.
Le vent soufflait sur le toit des maisons, les rues étaient déserte, il n’y avait plus que cette lune qui commençait à peine à apparaître dans le ciel qui s’assombrissait. Une lune qui paraissait presque vulgaire, ou menaçante du moins. Sanna était pour ainsi dire en état de choc. Elle n’aurait sut dire par quelle force elle était arrivée, depuis coin de rue ou elle se planquait jusqu’ici, à quelques mètres à peine de la « victime ». Par quel miracle ses jambes flageolantes avaient-elles réussis à la porter sur plus de deux mètres ? C’était tout simplement impensable, et pourtant elle était là. Certainement encore plus blanche qu’à l’accoutumée, peut être les yeux simplement hallucinés et les mains agités de tremblements incontrôlés, mais elle était là. Elle regardait l’homme à terre qui commençait déjà à se relever. Il était plutôt jeune, doté de longs cheveux noirs corbeau et lorsqu’il fut debout, Sanna put remarquer un filet de sang sur son visage, il semblait glisser comme un ruisseau vermillon, rappelant la couleur rouge des yeux de l’inconnu.
Incapable de faire quoi que ce soit elle se contentait de rester figée, les yeux écarquillés, l’observant ramasser son sac puis s’approcher d’elle. Pas réellement rassurée, elle aurait reculé en temps normal, mais à cet instant précis, ses membres semblaient peser une demi-tonne et elle se sentait incapable de lever les petits doigts. L’étranger posa alors un genou à terre et lui demanda son nom dans une révérence chevaleresque. Si elle avait osé, Sanna aurait hurlé. Bon dieu de merde qu’est ce que c’était que ça ? Pourquoi sans prévenir se retrouvait-elle dans un décor moyenâgeux, en face d’une sorte de chevalier, et le pire était sans doute que tout ça semblait plus vrai que vrai. Sanna savait qu’elle devait parler, répondre, faire quelque chose. Mais sa langue aussi était engourdie. Elle finit par réussir à souffler, comme si ses mots venaient de très loin :
« Vous êtes blessé… »
Bingo ! Personne ne l’aurait remarqué ! Enfin, étant donné l’état de choc dans lequel se trouvait la jeune blonde, ce serait grossier de se moquer. Ses mains tremblantes fouillèrent fébrilement dans sa besace et elle sortit un paquet de kleenex. Après une multitude de tentatives elle réussit à sortir un mouchoir en papier de l’emballage et elle le tendit au garçon. Puis elle resta de nouveau immobile et silencieuse puis elle passa une main sur son visage, tentant de reprendre ses esprits. Lorsqu’elle fut plus ou moins calmée elle regarda le jeune homme et articula :
« Je m’appelle Sanna. Pardonnez moi mais … Où est-on ? C'est quoi...cet endroit ? »
Rester calme dans une situation aussi étrange demandait à la jeune femme toute la concentration du monde. Elle était complètement bouleversée, comme si tous ses repères avaient étés remis en cause. Et à dire vrai, c’était un peu le cas.
L’inconnu accepta son mouchoir et malgré sa blessure, il était très poli. Il la remercia et elle se sentait un peu gênée, étant donné qu’en réalité elle n’y était pour rien. Elle avait jusqu’à maintenant agit par pur intérêt. Mais elle ne comprenait toujours pas ce qu’elle faisait ici. Le jeune homme posa sa main sur son visage, à l’endroit ou était sa blessure. Ses doigts furent alors enrobés d’un halo de lumière bleutée. Sanna écarquilla les yeux. Elle avait l’impression d’être dans un film fantastique. Elle ne comprenait rien à ce qui se passait sous ses yeux depuis quelques minutes. Elle fut encore plus surprise en voyant la blessure disparaître, et laisser derrière elle une peau lisse, parfaitement neuve, toujours tâchée de sang. Il répondit à son interrogation par des mots qui semblèrent être étrangers à Sanna. Elle ne comprenait plus rien. Qu’était Nexus ? Etait-ce au japon ? Comment avait-il soigné sa plaie. La jeune femme ferma les yeux et mit une main sur son front.
« Je ne connais pas…. Nexus, je ne connais rien ici… Je ne sais pas ce que je fais là, je n’ai aucune idée de la manière dont je vais rentrer chez moi… Et vous…Vous n’êtes même pas humain. Enfin je sais pas…Ce truc avec votre main là…On dirait de la magie. J’sais pas ce qu’il se passe ici, j’ai l’impression d’halluciner… »
Sanna était pour ainsi dire déboussolée. Et pour cause ! D’une minute à l’autre et sans s’en rendre compte elle avait changé d’univers, sans avoir rien demandé. Il lui fallait une cigarette. Elle fouilla dans sa besace et s’en alluma une puis elle recracha la fumée les yeux fermés, comme pour reprendre ses esprits. Mais ça lui était malgré tout impossible. Cependant, feignant la sérénité elle regarda brièvement Siegfried.
« Pardonnez-moi, je ne devrais pas vous embêter d’avantage. Vous avez l’air d’avoir suffisamment de problèmes. Merci pour le conseil je vais… essayer de partir de cet endroit. »
Sanna regarda autour d’elle à la recherche d’une quelconque information, d’un panneau, d’une indication… Elle ne reconnaissait strictement rien. C’était normal étant donné qu’elle n’était jamais venue ici. Ses yeux parcourraient le paysage à la recherche du bon chemin. Mais toute les rues semblaient être les mêmes et s’emmêlaient dans un dédale impressionnant. Jusqu’à maintenant, San’ avait toujours vécue une vie des plus ordinaire, sans aucune bizarrerie dans le genre. Elle ne s’en ventait pas, cependant ça ne l’avait jamais déranger, et elle avait finit par s’y accommoder. Mais il avait fallut qu’un passage s’ouvre ce soir là, à cet instant précis et dans ce lieu précis.
Hj : Désolée pour le retard et pour la qualité :s
Qu’est ce qui lui prenait de jouer les durs tout un coup ? Sanna n’était - et n’avait jamais été - quelqu’un de courageux et de puissant. Elle n’avait jamais eu à l’être jusqu’à maintenant. Cependant elle était là à clamer qu’elle n’avait pas besoins d’aide, qu’elle retrouverait son chemin alors qu’elle n’avait strictement aucune idée de la nature de l’endroit ou de son emplacement. Déjà qu’habituellement son sens de l’orientation était restreint, dans une ville inconnue, San’ était incapable de faire quoi que ce soit.
Elle releva le sourire d’un jeune homme. Visiblement même lui ne croyait pas à sa détermination, et rien de plus normale puisque la première concernée n’était pas même convaincue. De plus il avait visiblement l’intention de l’aider d’après ce qu’il disait. Il lui demanda alors si elle désirait tout oublier et rentrer chez elle. San prit d’abord ça comme une manière de parler. Mais à la réflexion elle n’avait pas envie d’oublier, oui c’était flippant mais pour une artiste, un endroit comme ça regorgeait de rêves et d’histoires. Et elle n’avait aucune envie de tout oublié, elle s’en était trop vu, avait eu trop peur pour avoir ce malheureux souvenir, elle ne voulait pas l’effacer maintenant.
« Je vous remercie pour votre aide, je vous serez réellement reconnaissante si vous me rameniez chez moi mais avant j’aimerais savoir ou j’ai atterri et comment ? »
Sanna termina sa cigarette, elle écrasa son mégot par terre et le rangea dans son paquet de cigarette. Sanna allait visiblement mieux : sa curiosité maladive reprenait le dessus, c’était bon signe d’un certain côté, après tout, la curiosité était un des traits de caractères principaux de la jeune femme.