La jeune fille fit glisser sa main le long de la feuille à gros grain, posée doucement sur ses genoux, sur une planche de bois rude et solide. Elle reposa sa sanguine à côté de son fusain et son sépia, et releva ses yeux clairs vers le paysage muet, stoïque et poétique. Elle cligna des yeux doucement, et fit craquer un carré de chocolat noir à la menthe, ses favoris. Elle attrapa son sépia, soulignant avec douceur le soleil qui s’éteignait, les yeux droit devant elle, tremblante sous un léger vent frais qui annonçait une soirée des plus fraîche. Elle sentait l’eau, la fraicheur, mais pas la puanteur des poissonneries, non, elle sentait plutôt l’eau douce, comme un drap, légère, qui vous effleure, vous fait sourire et soupirer de plaisir. Elle remonta sa longue manche qui tombait …
Elle portait encore son capuchon rougeoyant dans la fin du jour, et arborait une nouvelle robe noire qui dissimulait ses pieds, faisant une traîne derrière elle. Sur son cou pendait un de ces colliers rouge et noir qui vous mangent l’intégralité du cou et de la nuque, semblable à ceux que portaient les riches dames de la cour. Ses cheveux blonds avaient disparus, et étaient devenus bouclés, entourant son visage d’ange de boucles blondes délicates. Elle passa sa main dans ces boucles, soupira, esquissa un sourire et signa son œuvre.
« La nuit dans mon sommeil, se glisse un homme … Sa voix éclate en moi, sa voix me sonne … Serait-ce un rêve encore ? Mais cette fois … Je sais, que le fantôme de l’opéra … Est-là, en moi … »
Nouveau sourire. Douce mélodie. Elle eut un soupir, fit claquer sa lèvre contre son palet et avala un nouveau morceau de chocolat. Depuis longtemps elle revenait ici, se remémorant avec douceur les instants où elle avait découvert cet être étrange et adorable. Elle espérait qu’il revienne, qu’il repasse la voir … Depuis le temps, elle n’avait plus cette allure de petite fille, elle avait adoptée une taille de jeune femme de 20 ans, un physique timide et tendre, des jambes longues et fines qu’elle adoptait avec difficulté quand elle sortait de l’eau … Serait-il possible qu’il la reconnaisse ? Elle eut un sourire effacé. Sûrement pas …
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La jeune fille eut un sourire en entendant ce qu’il disait. Ainsi, il était content de la revoir, tout comme elle était heureuse de revoir cet ami qu’elle avait laissé au profit de l’océan et son appel. Elle se frotta les yeux, comme pour se rendre compte de ce qu’il se passait vraiment, qu’elle était vraiment là avec lui, et eut un petit sourire. Quel bonheur de retrouver cet être mystérieux … Nombres de fois elle avait rêvée de lui, repensant à leur rencontre, à lui venait la voir sur la plage, à tout ces mots qui sortiraient, ces gestes qu’ils retrouveraient, cette émotion débordante … Elle se mordit les lèvres, et tâcha de respirer calmement. Tout était différent, mais rien n’avait changé. C’était un délice. Il était toujours le même, elle reconnaissait sa voix, son ton, son attitude, comme si il ne s’étaient jamais quittés. Elle inspira violemment, et calma sa sensibilité en calant une main contre son cou.
- J’ai encore du mal à respirer hors de l’eau, s’excusa t’elle.
Elle toussa vivement, et plongea ses yeux dans ceux de son ami, un sourire immense sur les lèvres, sentant tout un bonheur l’envahir. Elle ne venait sur terre que pour le voir. Rien d’autre ne la retenait. Le savait-il seulement ?
- Je passe mon temps à utiliser des sortilèges pour aider les requins. Je vis avec eux et quelques autres sirénes, et je peux me transformer en requin depuis peu. C’est sympathique …
Elle eut un éclat de rire, et baissa les yeux.
- Je suis … heureuse de te revoir, tu sais, lâcha t’elle. Très …
Elle releva son visage, souriante.
- Et toi ? Que deviens-tu ?