Les alentours de la ville / Re : Aokigahara [Pendulum]
« le: lundi 09 février 2015, 01:20:49 »« Ne vous en faites pas, j’ai un permis pour cette arme. »
L’archéologue savait les Japonais assez réticents sur l’utilisation des armes à feu, mais, pour Lara, tout était clair et limpide. L’arme était légale, et elle se mit à marcher, remontant le long de la piste. Pour elle, il était encore trop tôt pour hurler au loup. Autour du Mont Fuji, et dans une forêt aussi dense, il y avait beaucoup de phénomènes électromagnétiques. Le fait que la voiture ne fonctionne plus devait venir de la batterie, qui avait dû s’épuiser. D’aucuns auraient pu croire Lara butée dans son cartésianisme, a fortiori quand, comme elle, on avait exploré tous les recoins du monde... Mais c’était justement pour ça que Lara était sceptique. Elle avait vu tellement de phénomènes prétendument surnaturels ne s’avérant n’être que des supercheries ou des arnaques qu’elle ne se faisait plus avoir si facilement. Elle marchait d’un pas décidé, mais guère serein. Aokigahara était une forêt sombre, épaisse, et cette brume matinale se refusant à partir ne faisait que rendre l’endroit encore plus nerveux. Halana y était visiblement sensible, regardant autour d’elle à chaque fois.
Ce qui, surtout, surprenait Lara, c’était l’absence de bruits émanant de la forêt. Où étaient les oiseaux ? Le son des criquets ? Le gazouillis joyeux ? Seul le sifflement du vent suintant entre les arbres leur parlait, et, très rapidement, la brume engloutit sa voiture, lui donnant l’impression qu’elle ne retournerait plus jamais par ici... Comme si Aokigahara venait de les avaler, et ne les recracherait plus. Des esprits superstitieux et crédules pouvaient très facilement se laisser embarquer par le charme et l’atmosphère surnaturel se dégageant de cette forêt. Le duo marchait donc, foulant un sol terreux et parfois boueux. Lara avait l’impression de revenir dans cette forêt de la jungle équatoriale, qu’elle avait exploré avec sa moto, avant de s’aventurer dans la jungle, seule, au milieu d’animaux mortels, jusqu’à rejoindre une crypte souterraine l’amenant dans les profondeurs du monde.
Alors qu’elle continuait à marcher, un curieux bruit attira son attention... Vers la droite. Il y avait comme un bruit de corde en train de bouger, poussée par le vent, un grincement sinistre, le couinement des nœuds et de la corde. Lara fronça lentement les sourcils, et Halana en profita pour lui parler un peu, ayant plusieurs questions à lui poser. Lara, qui observait alors l’origine de ce son, retourna sa tête vers elle.
« Oui, cela m’est déjà arrivé... Mais, quant à croire à ce qui se passe ici... Vous savez, Halana, plus on rencontre le surnaturel, plus on réalise qu’il est là où on ne l’attend pas. Prenez le cas de toutes ces maisons prétendument hantées le long des États-Unis... La plupart du temps, il ne s’agit que d’esbroufe pour attirer des gogos afin de leur vendre des grigris, ou de leur faire visiter des manoirs hantés. Le véritable surnaturel est bien plus obscur, et bien moins dangereux que l’image qu’on en donne. Croyez-moi, Halana, il n’y a pas pire prédateur pour l’Homme que l’Homme lui-même. Les fantômes et autres spectres ne sont rien de plus que des manifestations résiduelles. »
Tout le long de ses voyages, le pire ennemi de Lara avait toujours été les hommes, que ce soit des rivaux potentiels, des mercenaires, ou encore des dictateurs menant des putschs dans des parties du monde défavorisées où le système légal avait du mal à s’instaurer dans des régions ancestrales et encore très sauvages. Lara ne dit rien de plus, et reporta son attention vers le bruit de la corde.
« Il y a quelque chose là-bas... Tâchez de vous détendre, Halana, n’oubliez pas que vous êtes une policière, et que cet endroit est parasité par son passé, et par le Mont Fuji à proximité. Les ondes radar sont perturbées, et il y a beaucoup d’interférences électromagnétiques. Pour moi, cette forêt n’est rien de plus qu’un Roswell japonais. »
La comparaison était un peu forte, mais avait surtout pour but de rassurer Halana. Les Japonais étaient des êtres très superstitieux, et, pour le coup, c’était à la civile de rassurer la policière, figure d’autorité et de rationalisme. Lara s’avança entre plusieurs arbres, et continua à marcher, jusqu’à entendre les bruits de corde sur sa gauche... Et c’est ainsi qu’elle put voir le sinistre spectacle.
« Seigneur... »
Un homme avait été pendu à un arbre. Une odeur nauséabonde s’échappait de son corps. Il était pendu depuis visiblement assez longtemps, son corps commençant à être en putréfaction. Le plus troublant, c’était qu’un écriteau était placardé sur son torse, avec des lettres de sang. Lara leva la tête, et vit la corde retenant l’homme, qui était attachée au tronc de l’arbre. Elle sortit son couteau de la poche arrière de sa minijupe, puis découpa la corde. Le corps tomba lourdement sur le sol, et elle put lire l’inscription sur le panneau :
Lara fouilla rapidement les poches intérieures de la veste de l’homme. Aucun papier d’identité, et elle remarqua quelque chose de plus... Sinistre. Son visage... Il avait été scarifié, et on lui avait arraché ses yeux. En fait, son visage lui avait été enlevé, comme si Leatherface lui était passé dessus, et on avait aussi retiré ses yeux...
« On dirait un meurtre rituel... »
Qu’est-ce qui se passait ici ?