L'Océan Étincelant / Prière du matin [Ryujin]
« le: dimanche 24 août 2014, 17:37:10 »Elle luttait à peine contre la torpeur qui l'envahissait encore, et se mit à repenser aux nuits où elle dormait encore avec ses sœurs, généralement elle se cachait dans les grottes sous-marine ou dans le renfoncement d'une crique pour ne pas être dérangée par l'astre solaire. Si une de ses gentilles sœurs venaient la lever, elle pouvait sentir ses doigts lui caresser le visage et les cheveux pour l'extirper de ses rêves, si ça en était une moins conciliante il lui arrivait parfois d'être mise debout par des cris ou des farces plus ou moins drôles. Cette époque lui semblait bien lointaine, et depuis elle avait eu l'occasion de faire son réveil à mille endroits différents et de mille manières différentes. Pourtant c'est ce souvenir ''familial'' qui remontait à la surface et la replongea dans un semi-sommeil paradoxal. Elle se souvenait de la chaleur de sa place, la clarté de l'eau dans laquelle elle distinguait tout le monde aquatique, la couleur des coraux et de la peau hâlée de ses sœurs. Une nostalgie déprimante lui étreignit le cœur, et elle ouvrit les yeux pour ne plus se confronter à ses souvenirs.
L'océan si bien nommé en face d'elle, commençait à étinceler sous les bras de lumière du soleil, il s'étendait à perte de vue et elle distinguait aucun bateaux à l'horizon, pas même un crabe trottinant sur la marée basse. Ruby se releva lentement en s'étirant, la cape qui lui servait de couette glissa sur le sable et elle la ramassa pour se couvrir. La plage était vide, et elle avait le sentiment désagréable que cette image de solitude lui était offerte pour lui rappeler sa faute d'avoir quitté les siennes. Jamais elle n'aurait pu imaginer auparavant se retrouver seule lors du lever de soleil sur les mers. Bien que souvent elle l'ait loupé à cause de sa paresseuse tendance à ne pas guetter l'arrivée du jour, la néréide se souvint des rares fois où elle était à l'heure pour prier Poséidon et les divinités des mers et des océans face au disque rouge. Le visage sérieux et fermé des autres néréides, à genoux dans les vagues qui venaient caresser leurs jambes comme pour leur répondre, priant chacune les unes les autres pour la vie de leurs sœurs et en remerciement à leur père.
Ruby considérait ce moment comme étant plus jeune comme une pause solennelle avant de commencer chaque journée mouvementée qu'elle vivait, aujourd'hui qu'elle comprenait sa signification elle ignorait comment le ressentir. Sûrement que du haut de ses 17 ans elle était encore trop jeune pour devenir solennelle. Pourtant ce bref moment lui sembla soudain comme le seul lien qui restait encore avec son ancienne vie, peut-être qu'en ce moment-même son peuple regardait l'horizon comme elle le faisait, contrit dans un silence spirituel.
La jeune néréide avança vers la marée, le sable humide laissait enfoncer ses pieds à l'intérieur de lui, et le bruit des vagues lui rappela encore plus le silence de cette plage. Elle bailla longuement, ce qui lui arracha quelques perles de larmes au coin des yeux, et quand elle eut fini ce fut d'autres sillons mouillées qui roulèrent le long de ses joues. Se laissant glisser vers le sol elle s'agenouilla en fermant les yeux, repensant à ses sœurs qui devaient sûrement encore lui en vouloir, et peut-être même les divinités. Le remord ne l'étouffait pas tant vu qu'elle désirait sa liberté, mais comme il était difficile d'imaginer qu'elle pourrait être rejetée à tout jamais par son seul élément.
« Par les mers et les océans, et ses divins créateurs et régisseurs de leurs mondes visibles et invisibles, je m'en remets à ces eaux ce matin pour... » Ruby ignorait vers où diriger sa prière, ses sœurs ? Remercier sa vie encore saine et sauve ? Elle n'était même pas sûre d'encore bien s'y prendre. « Je m'en remets à ces eaux ce matin puisse-t-elle me venir en aide dans mon voyage, et les remercier d'avoir veillée sur moi et ma vie cette nuit et les nuits à venir, je suis leur servante et leur fille ainsi que mes sœurs...que nos vies soient gardées en leur sein tans que nous agirons selon leur volonté. »