L'Enfer / Lutte à mort au Pandemonium [PV Keleth]
« le: jeudi 05 août 2021, 00:50:54 »Loin en dessous de ce vivier infernal, se trouve, occupant une caverne reculée, la forteresse d'obsidienne, demeure d'Aezarath, démone de premier rang et l'une des entités les plus vieilles des royaumes de douleur. Engendrée par Satan lui-même, elle avait occupée pendant des éons les marches du pouvoir et fut en son temps, maitresse et mère des principaux démons. Couvée par son "Père" et dévouée à l'accomplissement des desseins démoniaques, elle avait guidé des armées entières à la conquête des mondes de la surface, humains comme célestes. Son nom amenait la terreur et la souffrance et au sein de la suprématie des Enfers, elle était crainte et respectée. Peu pouvaient se targuer de s'être élevés à son niveau et les pouvoirs que lui avaient conférés son géniteur dépassaient l'entendement.
Mais tout avait une fin, et lorsque Satan tomba, il entraina dans sa chute ses généraux les plus loyaux et ses proches les plus fidèles. Aezarath en faisait partie. L'Ancien, responsable de l'éviction de l'Ange Déchu, prit les rênes infernaux et purgea les Cercles de l'engeance directe de son prédécesseur. Ce fut un carnage qui alla jusqu'à déséquilibrer les fondations du Mal. Nombreux furent les démons majeurs qui virent leur immortalité réduite à néant. Le Pandémonium fut le théâtre d'une guerre qui dura des siècles et qui aboutit à une victoire totale de l'Ancien. Pourtant, Aezarath échappa à son exécution. Retranchée dans sa citadelle imprenable que même l'Ancien ne put investir, elle fut condamnée à y passer le restant de son infinie existence. Bardée de défenses magiques, protégées par des sorts antiques oubliés, occupée par des armées de morts fidèles à leur maitresse, la forteresse noire était autant un spectaculaire ouvrage de défense qu'une prison éternelle.
Et cette éternité, Aezarath l'avait mise à profit pour cultiver sa vengeance. Derrière ses murs vertigineux, elle avait vu sombrer l'Ancien, banni par ses semblables, et remplacé par le conseil des Archi-diables. Eux aussi, elle les méprisait. Ils n'étaient rien face à elle et elle aurait put les éradiquer ... s'il ne formait pas une assemblée si puissante. Toutes les tentatives de déstabilisation de ce nouveau pouvoir échouèrent. Elle œuvrait dans l'ombre et ses espions lui rapportaient tout ce qui se passait là haut, loin au-dessus de sa caverne. Et c'est en apprenant une nouvelle dont l'écho n'aurait jamais dû lui parvenir qu'elle vit un terme à son emprisonnement. Car même si l'Ancien avait été banni, le nouveau pouvoir la considérait toujours comme une menace potentielle. Une rumeur circulait, seulement connue des têtes pensantes. Cette rumeur prétendait que l'Ancien, lors de l'affrontement ayant conduit à son bannissement, avait saigné. C'était bien évidemment ridicule et inconcevable. N'importe quel démon aurait ri de cette aberration. Et la rumeur ne s'arrêtait pas là. Il se disait qu'un démon suffisamment puissant avait pu récupéré, lors du combat, cinq gouttes de sang qu'il avait réparti dans cinq fioles qu'il avait cachées avant de succomber à ses blessures. L'une de ses fioles était réapparue au Pandémonium et le Conseil activait ses agents pour la retrouver. Une goutte de sang de l'Ancien représentait une arme à laquelle nul ne saurait s'opposer. Aezarath ne pouvait ignorer ce qu'elle venait d'apprendre. Elle étendit ses réseaux d'influence et d'informateurs, dépensa une fortune pour obtenir des renseignements, et après des recherches titanesques, localisa la fiole en premier. Celui qui la possédait n'était pas puissant mais immensément riche et toujours plus avide d'agrandir sa fortune. C'était un démon-marchand de premier ordre, protégé par des hordes de monstres. Sa demeure au cœur de la citadelle maléfique, dominait le quartier qui l'abritait. Aezarath avait engagé des tractations et le négociant vit en cette éventuelle transaction le moyen de devenir l'une des premières fortunes des Cercles mais aussi se débarrasser de cet encombrant artefact qui forcement attirerait l'attention du Pouvoir. Le seul problème était qu'Aezarath ne pouvait quitter son domaine. Il lui fallait un intermédiaire, une personne qu'elle connaissait bien et qui lui serait loyale. Elle avait une idée.
La démone, assisse sur son trône d'ossements angéliques figea son regard sur l'homme qui se tenait à quelques mètres devant elle.
"Damascus ... voilà bien longtemps que nous ne nous étions vus. je ne t'ai jamais oublié tu sais."
Damascus, jadis son amant, le plus puissant démon qu'elle ait connu, à part l'Ancien. Il avait magnifié de son aura les ténèbres des Enfers et sous sa domination, les légions célestes avaient été englouties par les armées noires. Mais comme mentionné précédemment, tout avait une fin. Des millénaires plus tôt, avant la chute de Satan, le puissant démon avait sombré dans une léthargie morbide et s'était réfugié dans un univers où l'ennui le terrassa. Il avait abandonné son statut quasi divin pour une existence incompréhensible. Une existence incarnée dans l'enveloppe de l'homme qui se dressait devant elle. Aezarath avait mit du temps à le retrouver après sa fuite des Enfers et à présent, elle le tenait.
"J'ai été blessée que tu m'abandonnes comme tu l'as fait. J'ai cru mourir de douleur."
Son discours venimeux était destiné à rappeler à Damascus qu'elle pouvait l'annihiler d'un battement de cils. Il n'avait plus ses pouvoirs ni sa force d'antan et même s'il restait redoutable, il ne faisait pas le poids. Elle lui exposa ses exigences sans vraiment entrer dans les détails du pourquoi. Elle ne pouvait pas lui dire que la fiole lui permettrait de renverser le Conseil des Archi-diables, d'en prendre la place et de rétablir le dogme de leur "Père". Néanmoins, le prix qu'elle lui proposait pour rémunérer son engagement était indécent. Damascus n'avait pas besoin d'argent, ni de biens, il possédait lui-même de vastes domaines et une citadelle dans les Enfers. Ce que voulait Damascus, c'était le libre arbitre, le choix de pouvoir vivre sans suivre les règles démoniaques. Aucuns démons ne le pouvait, ils suivaient tous le chemin de la souffrance et du sang. Et seul un démon du rang d'Aezarath pouvait lui accorder ce droit. En vérité, seule Aezarath, dernière gardienne des doctrines souillées et des secrets de Satan pouvait l'exorciser de cette voie.
Damascus n'avait pas le choix. Il dévisagea son interlocutrice. La démone était toujours d'une beauté stupéfiante mais qui cachait une cruauté sans nom. Dans cette enveloppe de chair qu'il s'était créé, il ne pouvait pas lui tenir tête. Sous son antique forme démoniaque, il l'aurait vaincue mais s'il devait invoquer cette ancienne forme, l'incantation drainerait son essence vitale jusqu'à la mort. Il accepta le marché d'autant plus que la récompense était prometteuse même si il se doutait bien qu'Aezarath tenterait de l'éliminer à l'issue.
Le contrat était simple. Il devait livrer un sarcophage à une adresse et rencontrer un démon qui lui remettrait une fiole. Ensuite, il devait ramener cette fiole à sa commanditaire. Sans savoir ce qu'elle représentait, ce contenant devait avoir une valeur colossale pour que la démone se démène autant pour se la procurer. Damascus franchit un portail scintillant qui le transféra dans un quartier luxueux de la capitale des démons. Devant lui, le sarcophage, magiquement camouflé en caisse en bois lévitait et suivait un parcours défini par les mages d'Aezarath. Damascus n'avait qu'à le suivre pour arriver à destination. Le Pandémonium n'avait pas changé, il y régnait toujours un bordel absolu. Depuis longtemps passé dans le monde des humains, Damascus n'avait pas suivi tous les chamboulements qui avaient bouleversé les Enfers. Qui dirigeait à présent? Quelles étaient les factions en présence? Il s'en moquait. Cette mission terminée, il retournerait à Nexus se saouler avec Tadéus, son riche associé humain.
Le démon suivit sa caisse jusqu'à une demeure luxueuse mais discrète, le lieu du rendez-vous. Bien qu'il y ait foule, l'endroit était noyé dans la masse. Damascus repéra aussitôt les spadassins et hommes de main du marchand. Un tel déploiement indiquait la valeur de l'échange. Un minotaure géant lui indiqua une porte et il entra dans l'enceinte de la demeure. il était attendu, les gardes savaient qui il était. Son interlocuteur attendait, imperturbable. Il s'agissait d'un démon qui ne dégageait aucune aura de puissance.
"Parlons peu" croassa l'hôte "Qu'as tu pour moi?"
"Ceci" répondit Damascus en passant la main sur le sarcophage. La magie de camouflage disparue et la boite mortuaire apparut comme elle l'était, richement ouvragée, faite de métaux aussi rares que précieux. Le couvercle s'ouvrit sans bruit, dévoilant le contenu : le corps d'un Séraphin, mort depuis bien longtemps et parfaitement conservé, ses ailes intactes repliées sous lui. Même son épée sacrée reposait sur sa poitrine.
Damascus en eut le souffle coupé. Sa valeur était inestimable. Rien ne pouvait justifier le don ou l'échange d'un trésor pareil. Comment Aezarath avait-elle put se procurer un Séraphin mort? Et plus encore, contre quoi s'en séparait-elle?
Le marchand était dans le même état que Damascus. Ses yeux brillaient d'une malsaine convoitise.
"Enfin ... il est à moi. Et voici pour toi, général déchu."
Damascus tiqua, l'autre savait qui il était. On lui tendit un coffret dans lequel se tenait une petite fiole à l'effigie d'un démon majeur du passé. Damascus rendit le coffret après avoir prit la fiole. Elle était chaude, quelque chose pulsait à l'intérieur et dégageait un pouvoir contenu par une magie antique.
"Va maintenant, rejoins ta maitresse et éloigne de moi cet objet qui causera notre perte à tous."
Curieux comme discours. Damascus trouvait que tout allait trop bien, trop vite. Mais peut être était-ce aussi simple que cela. Il devait rejoindre un point d'où les mages d'Aezarath le téléporterai à la citadelle d'obsidienne. Il ajusta son équipement de cuir sombre, s'assurera que son épée passée dans son dos coulissait bien dans son fourreau et sortit de la demeure du marchand. Aussitôt les gardes postés à l'extérieur s'éclipsèrent et deux démons-mages vinrent apposer des glyphes de protection primaires sur les murs de la propriété qu'il venait de quitter. La place sur laquelle il s'engagea grouillait de créatures et d'esprits mineurs. Il se fraya un chemin des épaules, sentant pulser contre sa poitrine la fiole qu'il avait glisser entre sa peau et son justaucorps.
Soudain il s'immobilisa, une présence spirituelle monstrueuse s'imposa en ces lieux. les êtres réceptifs à la magie démoniaque gémirent de terreur et se recroquevillèrent sur eux-mêmes.
Damascus saisit la poignée de son épée. Non, tout ne serait pas aussi simple que cela ...