Astrid était un peu bouleversée. Comprenons-là, elle venait de prendre un véritable ascenseur émotionnel ! Une minute plus tôt, elle jouissait des coups de reins de Slade donné dans son fondement, et soudain, elle se faisait surprendre par son frère dont les mots raisonnaient étrangement. Il était en colère, peut-être contre elle, mais surtout contre le chevalier. Elle se demandait d'où lui venait tant de haine envers cet homme sensé devenir son époux. Certes, il l'avait battue au combat, mais ce n'était tout de même pas si grave ! Cela ne justifiait pas cette animosité si forte ! Jubal avait toujours été très proche d'elle, et très protecteur aussi, cela avait toujours été ainsi. Il était son grand frère, c'est vrai, mais étais-ce la seule explication ? Au fond d'elle, la jeune femme savait pertinemment pourquoi il agissait ainsi. Elle refusait simplement de voir la vérité en face. Parce que ce n'était pas bien ? Parce qu'elle ne pensait pas que ces sentiments étaient réciproque ? Et parce qu'elle ne voulait pas lui faire de peine ? Oui, sans doute un peu de tout cela.
Slade se mit à applaudir, comme quelqu'un qui vient d'assister à une scène amusante, mais agaçante. Jubal tourna son regard froid dans sa direction. Le chevalier le mit alors en garde, son comportement lui avait véritablement déplu et ça pouvait se comprendre. Il les invita à s’asseoir, ce que fit Astrid, silencieuse, bien trop pensive pour penser à cacher sa nudité. Jubal, lui, hésita, restant debout quelques secondes avant de finalement opter pour s'installer non loin de sa sœur. Slade, malgré son ton posé, était menaçant. L'affront du jeune prince l'avait mit en colère et il était même prêt à mettre ce contrat de mariage en danger pour réparer cela. Cependant, il avait peut-être raison. Leur famille avait trop besoin de leur aide pour faire cesser cette tempête...
Slade se servit un verre de vin, puis en remplit un deuxième pour Astrid, oubliant certainement volontairement d'en offrir à Jubal qui ne nota pas vraiment la provocation. La jolie blonde, elle, s'empressa d'en prendre une gorgée pour tenter de masquer son anxiété. Surtout lorsque l'homme commença à parler de leur petite partie de jambe en l'air. Astrid sentit Jubal se crisper encore davantage. Il n'allait pas tarder à perdre le contrôle... Inceste... il avait dit inceste. La Princesse ferma doucement les yeux, puis regarda son frère. Il tentait de garder contenance, ne quittant pas le chevalier des yeux. Puis tout alla très vite. D'un seul coup, Slade vint planter un couteau dans la main de Jubal, tournant alors la lame dans la chair. Le jeune prince poussa un hurlement, tirant une grimace qui illustrait là la douleur qu'il ressentait. Astrid ouvrit de grands yeux horrifiés et se jeta sur son frère.
- Jubal ! Mon Dieu ! Slade, tu es complètement fou !
La jeune femme était atterrée, regardant le sang couler sur la table avec effroi. La mâchoire serrée, son frère la fixait aussi, immobile, quoique toujours un peu tremblant. Étais-ce de la douleur ou de la colère ? Un peu des deux. Il prit cependant sur lui et siffla :
- Vous vous méprenez, chevalier de l'hiver. S'il y a bien une chose que mon père déteste par dessus tout, c'est que l'on touche à ses enfants. Heureusement pour vous... je ne suis pas de ceux qui vont pleurer dans les jupons de leur mère pour si peu.
Sa voix tremblait elle aussi légèrement. Il redressa la tête, fixant Slade d'un air étonnement calme maintenant, et lança à l'intention de sa sœur.
- Tu ferais mieux de reculer, Astrid.
- Quoi ? Jubal qu'est-ce que...
- Recules, répéta t-il d'un ton plus ferme.
La jeune femme s’exécuta, se levant du canapé. Elle savait que son frère n'allait pas accepter ça, elle savait qu'il voulait s'en prendre à Slade, mais elle avait peur, car elle savait de quoi était capable son futur époux. Jubal allait-il risquer lui aussi de faire tout capoter, laissant ainsi leur pile à la merci de cette tempête ? Ça ne le ressemblait pas.
Jubal leva sa main valide et agrippa fermement celui de Slade qui tenait le couteau. A cet instant, l'air sembla se charger d'une énergie étrange, un vent se leva même d'on ne sait où, faisant voler les cheveux d'Astrid qui regardait autour d'elle sans comprendre ce qui se passait. Abasourdie, elle vit alors une étrange aura rougeâtre émaner de son frère dont le regard avait changé... un regard qu'elle ne lui avait jamais connu. Il ouvrit la bouche, mais ce fut une voix rauque et caverneuse qui en sortie, et non la voix douce de son frère.
- Vous avez la chance d'avoir obtenu les pouvoirs de votre Reine, Chevalier. Mais vous n'êtes pas le seul, ici, à qui on a offert la puissance.
Un rictus se forma sur ses lèvres et soudain, avec une force incroyable, il arracha le couteau de sa main et se libéra. Une lumière rouge extrêmement aveuglante éclata alors, obligeant Astrid à se protéger les yeux. Et lorsqu'elle les rouvrit, ce n'était plus le Jubal qu'elle connaissait. Il avait... changé. Mais d'où lui venait cette puissance ?! Elle ne comprenait pas.
- Jubal...
- Je te l'ai dit, petite sœur. Je suis prêt à tout pour te protéger. Même si cela signifie pactiser avec un démon, pour obtenir la force nécessaire.
Un démon ? Il avait fait ça ? Mais quand ? Pourquoi ?! Elle ne parvint pas à poser la question. Jubal glissa ses mains dans son dos pour en sortir deux katanas. Il fixa Slade, d'un regard mauvais et obscure, avant de se préparer à bondir sur son ennemi. Mais Astrid, ayant comprit ses intentions et reprenant ses esprits, se jeta entre eux, arrêtant son frère à temps.
- Non ! Non Jubal. Je t'en supplie. Je ne comprend pas pourquoi tu as fait pareille idiotie. Ce que je sais, c'est qu'en agissant ainsi tu met notre famille en danger.
- Pousses-toi, Astrid ! C'est entre lui et moi...
- Pour le moment, la seule chose qu'il y a entre lui et toi c'est moi, alors tu vas m'écouter !! Tu vas quitter cet endroit, tout de suite, et retourner chez nous. Tu vas sortir ta plus belle tenue et te préparer à mon mariage, est-ce que c'est clair ? Pouvoir démoniaque ou pas, tu restes mon frère. Alors, fais-moi plaisir... baisses ces armes et vas t'en. Je ne te laisserait pas tout faire foirer.
Jubal l'observa à travers ses yeux effrayants, semblant hésiter. Puis soudain, petit à petit, il retrouva son apparence d'origine. Il semblait assommé, vide et triste. Puis, sans un mot, il tourna les talons et sortit rageusement de la pièce. Astrid avait tout juste eu le temps de voir une larme couler le long de sa joue. Elle se tourna alors vers Slade, les yeux humides elle aussi.
- Voilà... tu es content ? Tu n'aurais pas du le blesser.
Elle était en colère contre lui. Mais elle était surtout dévastée par le départ de son frère... et d'avoir apprit qu'il était allé jusqu'à pactiser avec un démon, à vendre son âme... pour elle.