Situé au milieu du vaste royaume de Millyanthir, Castamere (http://img110.xooimage.com/files/b/e/7/be766d7ca58c047fb...a1513225-52cdb32.jpg) était une belle demeure traditionnelle appartenant à la famille des Fray, actuellement dirigé par Sire Fray (http://img68.xooimage.com/files/8/a/8/commandeur-3210897.jpg). Un beau manoir situé devant une grande cascade, et qui offrait à Castamere un spectacle saisissant, et magnifique. De fait, le château se dressait dans les branches d’une sorte d’immense arbre, formant un paysage absolument unique, car Castamere se situait près de hautes-terres dangereuses, où circulaient des dragons, des courants glaçants... Ainsi que des Orcs.
Millyanthir n’était pas surnommée « Royaume du Milieu » pour rien, car il se trouvait au centre de multiples montagnes et hauts-plateaux sauvages et austères. Pourtant, c’était un royaume très fertile, en raison de ses arbres gigantesques, qui abritaient, le long de leurs branches et de leurs troncs, de grandes cités elfiques millénaires, qui, depuis des siècles, avaient repoussé les Orcs, après les avoir chassés de leurs terres, eux qui, auparavant, vivaient au niveau des racines. Les raisons du conflit étaient méconnues, tant ce dernier était vieux. Les uns soulignaient la brutalité des Orcs, et les Orcs accusaient les autres de racisme. Toujours est-il qu’une guerre avait jadis éclaté, et que les elfes avaient gagné.
Pour autant, la situation était loin d’être pérenne, car, suite à cette guerre, les elfes et les Orcs avaient rompu un équilibre précaire. Si les Orcs vivaient jadis en contrebas, c’était bien parce que leur puissance leur permettait d’y vivre, et de repousser les multiples monstres qui sortaient des profondeurs, notamment les araignées géantes, les monstres nécrophages, et quantité d’autres monstres sordides. Depuis qu’ils n’étaient plus là, les grottes qu’ils avaient auparavant condamné s’étaient rouvertes, et les monstres déferlaient à nouveau.
« Longue vie à la Reine !
- Longue vie à la Reine ! »
Les exclamations autour de la table sortirent brusquement la douce Alwën (https://s-media-cache-ak0.pinimg.com/564x/dd/8a/b2/dd8ab2d175074691bd6701dfcd8f3927.jpg) de ses pensées. Très jeune, c’était un moment important pour elle, car elle était intronisée Reine. Elle portait de ce fait sa couronne, et sourit en se levant, observant sa cour, en espérant naïvement que les tensions de ces dernières semaines s’étaient enfin calmées.
« Mes amis ! Camarades, frères et sœurs, je vous remercie chaleureusement pour cette soirée ! Et je remercie tout particulièrement le seigneur de Castamere, Sire Fray, d’avoir proposé que la célébration se fasse ici. Castamere est le manoir le plus ancien du royaume, bâti par les Orcs et les elfes, et est la preuve que nous devons laisser derrière nous des siècles de querelles fondées sur la peur, et non sur la raison, qui a toujours su guider notre peuple. »
Jadis, de tels propos auraient été qualifiés de trahison. Les aïeuls d’Alwën avaient été particulièrement cruels envers les Orcs, ce qui n’avait fait qu’engendrer davantage de haine et de colère. Régulièrement, les Orcs tentaient de revenir, car les conditions de vie dans les montagnes étaient insoutenables. Les parents d’Alwën avaient conscience de cela, et avaient lutté toute leur vie pour que les nobles acceptent la présence des Orcs. Millyanthir avait beau être un royaume, le pouvoir était partagé entre la Couronne et une assemblée de nobles, le Parlement. Et, en la matière, c’était au Parlement de se prononcer. Un premier vote, du temps de père d’Alwën, avait été négatif, mais la jeune Dauphine avait manifesté son intention de soumettre le retour des Orcs à un autre vote.
Pendant des années, elle avait traversé le royaume, et, surtout, s’était rendue dans les clans orcs des montagnes. Ce qu’elle avait vu lui avait déchiré le cœur, elle qui était connue pour sa noblesse d’âme, son altruisme, et sa générosité. Il existait effectivement des clans orcs sauvages, mais beaucoup avaient de la famille à nourrir, et en voulaient énormément aux elfes de les avoir condamnés à mourir dans ces maudites montagnes. Elle avait vu des bébés mourir de froid ou de faim, et en avait eu les larmes aux yeux. Depuis lors, Alwën avait tout misé sur le retour des Orcs, et avait réussi à obtenir que quelques clans orcs s’installent dans la lisière du royaume, ce qui avait déclenché l’ire furieuse de bien des familles d’elfes hostiles... Notamment les Fray. Sire Fray avait perdu ses fils à cause de combats contre les Orcs, et en avait lui-même été défiguré. Quand Sire Fray avait proposé de célébrer le couronnement d’Alwën chez lui, la jeune Reine y avait vu l’occasion de parvenir à ce qu’elle voulait.
« Les Orcs qui se sont installés ont permis de reboucher les mines d’Angdür, et de rouvrir les scieries locales, qui étaient fermées depuis cinquante ans. C’est bien la preuve que, malgré nos différences, nous avons besoin l’un de l’autre. »
Des musiciens dansaient et chantaient dans les mezzanines en hauteur.
« N’êtes-vous pas d’accord, Sire Fray ?
- Ce que j’en dis, Majesté, c’est qu’il est trop tôt pour tirer des conclusions hâtives... Et que j’ai moi aussi ma théorie sur la manière dont les mines ont pu se rouvrir d’un jour à l’autre... Mais buvons à votre couronnement, Majesté ! »
Les mains se levèrent. Alwën resta silencieuse pendant quelques secondes, interloquée par cette réflexion, faisant écho aux théories affirmant que des commandos orcs avaient, pour forcer la main d’une jeune Reine influençable, eux-mêmes fait sauter les murs en pierre. Quoi qu’il en soit, Alwën but de son verre, comme bien des autres convives, tandis que les musiciens cessèrent leurs accords de musique.
Et, rapidement, Alwën se sentit troublée.
« Je... Ce vin est...
- Passe encore, Jeune Majesté, que vous ayez accepté, malgré mes plus fermes contestations, l’arrivée de ces gros monstres verts qui souillent notre terre... Passe encore, même, que vous ayez accepté qu’ils patrouillent en étant armés...
- Mais que... »
Elle n’allait vraiment pas très bien, et eut des vertiges, lâchant le verre de vin, qui se fracassa sur le sol, tandis qu’elle-même chancelait, tout comme la plupart de ses hommes.
« Mais que vous ayez l’outrecuidance d’inviter chez moi ces sales monstres, eux qui ont tué mon fils, ça... Ça... !! »
Les musiciens n’avaient plus de violons entre les mains, mais des arcs et des arbalètes, tandis que des hommes en armure avaient fermé la porte d’entrée, et brandissaient les épées. Pour fêter son couronnement, Alwën avait en effet invité une délégation d’Orcs... Et prit conscience, alors que l’air commençait à lui manquer, que la colère de Sire Fray avait évolué à un point tel qu’il venait de commettre...
...Une trahison !
Fort heureusement, les Orcs étaient robustes, et ne tardèrent pas à laisser leur agressivité parler. Un Orc repoussa l’un des hommes des Fray, le soulevant à deux mains, le balançant contre un mur. En hauteur, archers et arbalétriers concentraient les tirs sur eux. Un carreau d’arbalète transperça ainsi la tête d’un Orc, crevant son œil, et lui éclatant une partie de la cervelle. Les autres hurlèrent, et plusieurs s’élancèrent vers les poutres soutenant les mezzanines, cherchant à les arracher... Ce qui amena des spadassins à se rapprocher, leurs épées tranchant dans le dos des Orcs. Les hommes d’Alwïn n’avaient aucune chance. Ils étaient venus en paix, tandis que les soldats des Fray dissimulaient des côtes de maille sous leurs vêtements. La Reine, gisait devant le trône de Sire Fray, crachant du sang en éternuant.
« Le Roi est censé protéger ses sujets. Quel genre de Reine faites-vous, en invitant ces monstres à ma table ? »
Incapable de réagir, Alwïn éternua encore, sentant sa vision s’obscurcir, et essaya de lutter. Un garde s’approcha d’elle, bien décidé à l’achever, quand une boule de feu le frappa. Il s’enflamma comme une torchère en hurlant, le tir émanant d’un des proches conseillers de la Reine. Ce dernier créa ensuite un bouclier, qui absorba plusieurs flèches, et répliqua en envoyant une onde de choc vers une mezzanine, explosant plusieurs piliers, et repoussant plusieurs archers, les ondes formant comme des lames de vent qui les coupèrent, tranchant un bras.
« Majesté, relevez-vous ! »
Dans le dos du conseiller, un elfe bondit depuis une table, et le transperça avec ses deux lames, faisant couler son sang sur le sol. Alwïn, de son côté, continuait à éternuer, ses mains cherchant à agripper une capsule qu’elle tenait sous ses vêtements, au bout d’un collier en or. La capsule abritait un élixir de soin très puissant, seul élément à même de la sauver à l’heure actuelle. En effet, le poison qui circulait dans ses veines était très puissant, trop fort pour qu’elle puisse se concentrer afin de formuler des sorts de soins.
C’est à ce moment que Garona réussit à la saisir, et à filer sous une table avec elle. Alwïn éternua encore, et cligna des yeux, en voyant le visage de l’Orc. Elle se concentra alors, puisant dans ses dernières forces. De la main, elle agrippa son collier, tirant dessus, révélant la présence de la petite capsule bleue, et remua la bouche.
« V-Vite... B... B-Boi... »
Et elle éternua encore, crachant du sang, n’arrivant pas à finir sa phrase, tant la douleur était forte, envahissant son esprit.
Autour d’elles, le chaos régnait en maître. Plusieurs des hommes et mages d’Alwïn avaient été empoisonnés aussi, et l’effet de surprise avait été tel que beaucoup des siens étaient morts. Les autres se battaient en vain, et une boule de feu fusa à nouveau, heurtant un mur, enflammant des tapisseries, le feu remontant jusqu’aux mezzanines, faites en bois.
« Tuez-les ! Et tuez la Reine, je veux la tête de cette salope ! » vociféra Sire Fray.