Le Grand Jeu

Plan de Terra => Les contrées du Chaos => Discussion démarrée par: Serenos I Aeslingr le mardi 26 novembre 2013, 04:26:34

Titre: Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le mardi 26 novembre 2013, 04:26:34
Un mois s’était écoulé depuis le jour où le Roi et Wallin, sans vie, sortirent de la Crypte. Par un procédé connu de lui seul, le Roi avait réussi à recoudre l’âme et la chair du mercenaire pour l’empêcher de mourir, malgré son état apparemment irrécupérable. Avec la magie, il avait réussi à restaurer les fonctions vitales du mort et ainsi lui donner une nouvelle vie, un acte qu’il ne pouvait produire que lorsque le mort n’en était pas un depuis longtemps. Alors qu’il portait Wallin sur son dos, il tenait dans sa main droite un papier contenant les lettres O-NLPR-E. Il ne comprenait pas la signification de ces mots, et puisque son camarade n’était ni mort ni conscient, il ne pouvait lui soutirer ces informations; un homme dans le coma est un homme sans souvenir et sans connaissance, aux yeux de la magie, ce qui l’empêchait de pénétrer dans sa tête.

Le 32e jour après le raid, aux environs de midi, le dirigeant Meisaen cessa de veiller son camarade, à défaut d’être un ami. Assis sur une chaise au chevet du mourant, son espoir fragile de le voir sortir du monde des morts s’effrita davantage. Il passa une main sur la tête du souffrant et songea à abréger ses souffrances. Après tout, cet état n’était d’aucun confort pour une âme, et trente-deux jours était une période d’attente raisonnable pour un homme de son âge; étirer le traitement reviendrait à se montrer plus têtu que nécessaire, et cruel par la même occasion. Mais il ne pouvait pas le laisser mourir maintenant. Au pire, cela reviendra à Lysia de décider si oui ou non Wallin devrait accéder au grand repos de l’au-delà.

La veille, son diplomate lui avait informé que sa demande de rencontrer le Roi Tywill de Sylvandell avait été acceptée, et il savait que s’il voulait revoir Shunya, il ne devait pas perdre un instant de plus; pour briser l’âme d’un Innocent et la pervertir, il fallait un minimum de trois mois, et sur trois, il en avait déjà perdu un en préparatifs. Et connaissant Sérénité et son aptitude remarquable pour atteindre ses objectifs, il savait qu’il ne partait pas en mission de recouvrement; l’enlèvement de Shunya relevait de la déclaration de guerre, et le Roi y était préparé. Ses navires étaient déjà chargés de soldats prêts au combat, ainsi que des magiciens les plus talentueux du Royaume, ne laissant derrière lui que le strict nécessaire pour enrayer les derniers vestiges de la Peste, ainsi que, par mesure de sécurité, Aglaë, son apprentie, à qui il avait donné l’autorisation de se servir d’Eglendal pour combattre les menaces qui se présenteraient dans son absence. Il aurait souhaité que Wallin l’accompagne, mais dans son état fragile, un rien suffirait à réduire ses efforts à néant. Il prit une grande inspiration et frôla doucement la tête de l’homme.

-« Je ne sais pas si tu peux m’entendre, Wallin », murmura-t-il avec une voix calme. « Mais j’espère que tu le peux. Je pars en guerre, ce soir. Je ne sais pas ce qui m’attend, mais je demande pardon pour tes peines. Lysia est guérie, mais elle me juge responsable de la mort de son père. Quand tu ouvriras les yeux, tu pourras décider de t’installer avec elle dans une maison de ma capitale. Nous manquons de bras armés, et si tu penses pouvoir contribuer à cette société, j’aimerais que tu les rejoignes. Sinon… essaie de me retrouver. Et peut-être aurais-je retrouvé Shunya… Repose-toi bien, l’ami. »

Sur ces paroles, le Roi se sépara de l’homme et le recouvra des draps rouges qui lui servait de couverture, s’assurant qu’il ne s’affaiblisse pas davantage avant de se diriger vers la porte. Une fois hors de la chambre du mercenaire, le Roi se prit la tête à deux mains et inspira avec frustration, relâchant ensuite son souffle comme s’il cherchait à évacuer une colère trop longtemps contenue. Le Roi se mit à marcher dans les longs couloirs qui sillonnaient le siège de son pouvoir en méditant sur sa prochaine course d’action, se dirigeant vers ses propres appartements. Les pouvoirs exécutifs et administratifs seraient délégués à ses conseillers pendant son absence, ainsi que les Lois de Gestion qui seront imposées pour protéger la population au cas où des abus de pouvoir se feraient, et Raphaelle avait réussi à obtenir des Dragons Noirs la promesse de protéger Meisa en cas de siège, ce qui garantissait la sûreté du Royaume. Des Peuples alliés, le Roi avait obtenu plus de deux cents archers elfes, cent combattants Orcs, cent cinquante fantassins nains et cinq sirènes, qui s’assureraient que les voyageurs ne manqueraient pas de nourriture au cours de leur voyage. De ses propres forces, on retrouvait  trente magiciens, dix Meisaennes en pleine forme et très mécontentes, deux cents soldats et lanciers, ainsi qu’une équipe d’ingénieurs pour la fabrication d’armes de siège au cas où la Sorcière Grise aurait établi une forteresse qui réclamerait ces mesures. Il n’aimait pas organiser des déplacements militaires à l’aveuglette, mais faute de pouvoir envoyer des espions sur le terrain, Arthuros étant toujours en plein rétablissement après sa convalescence, il ne pouvait pas se permettre de manquer de préparation. Il avait néanmoins ordonné à ses troupes de trouver refuge en terre nexienne pour éviter les disputes de territoire, et de rester sur la côte, pour ne pas laisser croire à une tentative d’invasion.

Le Roi n’eut pas une transe bien paisible, cette nuit-là, et même la présence normalement réconfortante de sa Maîtresse Royale ne semblait pas arriver à le débarrasser de son sentiment grandissant d’inquiétude. Il ne doutait pas de ses capacités à ramener Shunya en terre sûre, mais il n’arrivait pas à se débarrasser du pressentiment que lorsqu’il la retrouverait, il ne se trouvera probablement pas devant une jeune fille impatiente de le revoir, et il ne douta pas un instant que s’il le fallait, il lui faudrait la combattre, et si cette éventualité semblait parfaitement ridicule du point de vue d’une guérisseuse, le Roi savait qu’autant les pouvoirs bienfaiteurs d’un Innocent étaient impressionnants, lorsqu’il était corrompu, il devenait tout aussi menaçant dans sa maîtrise des arts maléfiques. Allongé sur le dos, la ravissante demoiselle bien endormie, la tête posée sur son torse, le Roi  fixait le plafond en coupole de sa chambre, incapable de s’abandonner à la transe salvatrice qui remplaçait son sommeil inaccessible depuis l’éveil de ses pouvoirs. Il finit par se redresser doucement pour ne pas réveiller la jeune demoiselle et se dirigea vers le balcon, nu, et observa la mer. Quelque part, de l’autre côté, une jeune femme aussi douce et tendre qu’une brise d’été était à la merci d’une créature abjecte qui en ferait une arme. Il ne connaissait pas les plans de Kayla à l’endroit de sa nouvelle protégée, mais il savait que quoi qu’elle ait en réserve pour elle, ce n’était rien de bon, et le Roi trouvait son impuissance actuelle absolument insupportable. Sylvandell et ses secrets étaient sa dernière chance de sauver Meisa, et probablement tous les royaumes présentement en paix, ainsi que l’âme d’une femme au potentiel incommensurable, et même si son espoir était fin, il irait jusqu’au bout, aussi loin que cela fut.

***

Kyrian n’avait jamais réellement vu sa seconde moitié, depuis le jour où son âme s’était brisée en deux au moment même de sa naissance et qu’il avait été envoyé dans le monde des morts. En théorie, il est la partie d’âme qui a suivi le rythme normal de la vie en trépassant, et cela l’incitait parfois à penser que celui qui vivait en Meisa n’était qu’une façade, une personnalité fictive créée par son âme pour se protéger et continuer d’évoluer dans le monde. Un peu comme une personne saine qui développe une seconde personnalité après avoir vécu une expérience traumatisante. Selon son maître, lui et Kah’mui étaient comme deux verres d’eau tiré du même seau; entiers même si séparés, ils ne referaient un qu’une fois qu’il aura trépassé. Althenos lui avait avoué que si sa femme ne s’était pas interposée et conservé la fraction d’âme du Roi dans sa chair, leur âme aurait été détruite, car une âme incomplète ne pouvant être restaurée n’avait pas lieu d’être, et que Kyrian, autant qu’il avait le droit de reprocher à la Déesse sa décision d’enfreindre ses propres règles en maintenant en vie une créature qui aurait dû mourir, autant il devrait la remercier car sans son intervention, il aurait disparu dans le néant. Lorsque Sérénité fut ramenée du monde des morts par un groupe de cultistes, faisant d’elle la Sorcière Grise, Kayla, Althenos vit une occasion de faire progresser à l’avance son plan de lancer la seconde Purge avant qu’il n’ait fini de forger l’âme de son nouveau Champion; il attacha l’âme de Kyrian à celle de Kayla et le désigna comme le protecteur de la Sorcière, lui ordonnant de faire tout ce qu’elle lui ordonnerait, de la considérer comme sa maîtresse et de tout faire pour réaliser ses projets.

La fille se montrait déjà sous le charme de la Sorcière, mais il s’y attendait; une femme comme Kayla n’aimait pas perdre de temps, et même s’il la suspectait d’user de ses capacités de suggestion pour accélérer l’approfondissement des sentiments, il devait admettre que cette fille n’était pas vraiment maligne; d’un homme qui avait voulu la sauver, elle était passée entre les mains d’une sorcière qui n’avait eu aucun scrupule à abandonner une population de pestiférés. Il n’avait pas vraiment d’estime pour elle, mais de toute façon, le Chevalier n’avait d’estime pour personne. Il servait Kayla parce que tel était son devoir, et il était trop honnête pour la délaisser sans avoir été informé de le faire, bien que dans un coin de son esprit, il débattait encore pour savoir si oui ou non il quitterait cette femme si on le lui demandait, car autant il lui était aussi loyal qu’un chien dressé, il ne pouvait pas approuver ses méthodes déloyales pour gagner la partie. Et le kidnapping, bien qu’il y participe, ne lui faisait aucun plaisir.

Un beau soir, lorsqu’il fut relevé de ses tâches de veilleur par le Chasseur, le Chevalier regagna l’antre de la Sorcière. Dans les galeries souterraines menant à celui-ci, beaucoup de ses servantes lui jetaient des regards rempli d’animosité. Il savait que si la Sorcière ne l’appréciait pas autant, elles n’hésiteraient pas un seul instant pour lui sauter à la gorge et essayer de le tuer pour se rapprocher de leur maîtresse. Néanmoins, faute de ne pas être une femme sous l’emprise de la Dame Grise, il restait son plus habile et puissant combattant, ce qui le rendait un peu intouchable par le commun de ces femmes. Hormis Meg. Meg était la dame de compagnie de sa maîtresse, et probablement l’une des meilleurs assassins du monde. Meg adorait le Chevalier pour deux raisons; la première, parce qu’il était doté d’une personnalité très loyale et honorable, et aussi parce qu’il acceptait souvent d’être sa cible d’assassinat, pour « l’empêcher de rouiller », selon ses dires, mais il la suspectait de surtout avoir envie de le tuer pour le plaisir de la chasse.

Il gagna ainsi la demeure de sa maîtresse et la trouva paisiblement allongée dans son lit. Malgré leurs âmes entachées par les ténèbres et leurs corps ne nécessitant pas de sommeil, elle semblait faire de très beaux rêves. Peut-être rêvait-elle de son passé, ou alors de ses prochaines grandes réalisations. D’une manière ou d’une autre, l’homme retira son casque, s’approcha du lit de sa maîtresse et mit un genou en terre. Lorsqu’il ne s’apprêtait pas à combattre son deuxième lui-même, il optait pour une armure plus légère qui lui donnait les proportions d’un grand homme, mais non d’un colosse, bien qu’il resta fermement musclé. Elle lui avait un jour demandé pourquoi il ne se montrait jamais sans son armure, cela à quoi il répondit qu’il se sentait à nu lorsqu’il n’était pas protégé par ses armures.

« Tout est calme, ma Reine. Mon Maître m’a assuré de l’arrivée future de quelques-uns de Ses serviteurs. Il m’a chargé de vous rappeler son bon sentiment et son approbation. »

Le Chevalier avait tout dit sur un ton plutôt mécanique, comme s’il répétait un message appris par cœur. Après tout, Althenos n’avait pas vraiment dit ces mots; une conversation avec une divinité qui ne communiquait que sous forme de sentiments n’était pas aussi simple à traduire qu’une conversation normale. Il savait simplement que le Dieu était satisfait, et lorsqu’il avait demandé de l’aide supplémentaire pour la réalisation de certains projets, il avait démontrer une forte approbation, que le Chevalier assuma comme étant un « oui ».

L’homme en armure jeta soudainement un coup d’œil aux environs et haussa un sourcil.

« Où est la fille? »

***

Un homme cracha à ses pieds en lui adressant une insulte dans un jargon incompréhensible, mais le Roi leva simplement le bras pour empêcher une de ses protectrices de lui faire ravaler son insolence. Malgré leur haine et sa propre animosité envers le peuple habitant Ashnard, il savait que les petites gens n'étaient que les victimes de la guerre, et non pas de vrais ennemis. Beaucoup d'entre eux avaient perdus des amis aux mains des troupes de Meisa, et pour cette raison, il comprenait leur rengaine; dix générations ne suffiraient probablement pas à effacer des siècles de rengaine et d'adversité, même s'il en aurait souhaité autrement. Il regarda doucement l'homme et pencha la tête sans la moindre trace de sarcasme; simplement de la sympathie. L'homme ne lui pardonnerait certainement pas pour ce simple geste, mais cela éviterait les écarts de conduite; il n'était pas là pour déclencher un incident diplomatique. Il venait en paix pour sauver une personne.

Suivi par deux Meisaennes ainsi que deux de ses conseillers (de simples assistants, rien à voir avec le Conseil), il prenait la route vers le Pont menant au château de son homologue. Les Dragons fixaient l’intrus avec un mélange d’intérêt et d’excitation; ils avaient soudainement très envie de jouer avec lui; peut-être que Tywill le leur donnerait après leur entretien. Une fois devant la porte du palais, ses compagnons s’immobilisèrent et se retournèrent pour surveiller la porte pendant que leur seigneur entrait dans le vestibule menant à la salle du trône. Une fois devant le Roi Tywill, le Roi de Meisa s’immobilisa au centre de la pièce et dévisagea son égal sans ciller, avant de mettre lentement un genou en terre, sans détacher son regard du sien.

« Je vous salue, Roi Tywill de Sylvandell de la Lignée d’Erwan Korvander. Je viens ici témoigner mon respect envers votre famille et humblement solliciter votre aide à la recherche d’une criminelle, une sorcière aux pouvoirs dont je ne connais pas les limites. Cette femme a causé grande souffrance à mon peuple, et j’ai des raisons de croire qu’elle serait venue ici pour se préparer à de nouveaux outrages, et je crois qu'elle ne vise pas que Meisa, mais tous les peuples, incluant le vôtre. »

Bien qu’il fut très respectueux, il avait eu vent de la réputation bouillante et impatiente du fougueux monarque de Sylvandell, aussi se montra-t-il bref pour ne pas abuser de son temps. Si Tywill jugeait que cette affaire l’affectait, peut-être qu’il lui offrirait son soutien, et s’il n’y trouvait aucun intérêt, il pourrait au moins lui demander l’autorisation de poursuivre ses recherches seul, mais il espérait également qu’il n’avait pas été manipulé par la Sorcière de façon à devenir l’allié de cette dernière, car avoir une sorcière sur les bras, passe encore, mais un royaume rattaché à l’Empire Ashnardien risquait de devenir un souci, et hormis Kayla, le Roi ne voulait aucunement se battre avec quelqu’un, et la guerre l’intéressait encore moins. Il attendait donc patiemment la réponse de Tywill, bien qu’il eut un bref regard pour les gens qui l’entouraient. Il nota la présence de gardes, évidemment, et quelques ambassadeurs venant des autres contrées Ashnardiennes.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le mercredi 27 novembre 2013, 02:08:26
« Allons, Princesse ! Ne me dites pas que c’est tout ce dont vous êtes capables, si ?! »

À terre, à genoux, Alice soupira, en sueur, et releva la tête, se frictionnant le poignet, sous le regard amusé de sa formatrice. Alice soupira à nouveau, et écarta quelques mèches de cheveux qui se plaquaient contre son front, avant de se relever, lentement. Elle attrapa sa dague, une belle arme dont le manche était incrusté d’une pierre précieuse, et entreprit, sans trop y croire, de se remettre en position de combat. Elle portait une armure légère, et Ciri’ connaissait suffisamment bien la Princesse pour savoir qu’elle avait une sainte horreur des exercices manuels. Elle faisait preuve d’une mauvaise grâce, et, à vrai dire, c’était surtout ça qui agaçait Cirillia... Ainsi que ses piètres talents. Si, au moins, la Princesse daignait se forcer et se concentrer, Ciri’ était sûre qu’elle saurait réaliser quelques passes, mais elle voyait ce genre d’exercices comme du temps perdu. Dans un sens, la Princesse disposait déjà de tant de gardes du corps qu’elle ne devait pas voir en quoi essayer inutilement de s’entraîner à se battre pourrait l’aider si on tentait de la tuer. Son petit esprit devait estimer que, si des meurtriers étaient suffisamment forts pour venir à bout d’Hodor ou des Commandeurs, les mêmes assassins n’auraient aucune difficulté à se débarrasser d’elle. Malheureusement pour elle, Tywill Korvander, le Roi de Sylvandell, ne l’entendait pas de cette oreille-là, et tenait à ce qu’Alice, périodiquement, s’entraîne à manier l’épée, ne serait-ce que pour donner l’apparence de savoir se battre.

La théorie, Alice la comprenait, Ciri’ le savait, mais la pratique, c’était une autre affaire. Elles s’exerçaient depuis une heure, maintenant, et les deux femmes en avaient marre. Ciri’ n’avait jamais été une femme patiente, reconnue pour ses capacités d’instruction, mais voir toute la mauvaise volonté déployée par la Princesse l’agaçait au plus haut point.

« Je fais de mon mieux, okay ?! »

Ciri’ ne put s’empêcher de sourire devant les joues rouges de la Princesse. En colère, elle était presque encore plus belle qu’au calme. Il fallait bien reconnaître que Cirillia était assez ingrate avec Alice, mais c’était dans son tempérament. Si Alice n’avait pas été là, les Sylvandins l’auraient tué. Au lieu de ça, son père avait imposé à Alice de la corriger, en espérant qu’un tel exercice suffirait à la motiver un peu. Très motivée, Alice avait libéré Cirillia, et cette dernière l’avait violé, puis, au fil du temps, avait fini par s’attacher à elle. Ciri’ ne l’aurait jamais avoué, mais, quand elle était revenue à Sylvandell, revoir cette belle petite tête blonde l’avait soulagé. Pour elle, qui avait quasiment perdu toute sa famille, elle se demandait si elle ne voyait pas inconsciemment en Alice sa petite sœur. Cette idée était absurde, pour elle, mais Cirillia savait aussi que, sous sa carapace de fermeté, de dureté, et de colère, elle était encore capable d’éprouver des sentiments.

Elle attaqua encore Alice, et frappa sa dague. La Princesse essaya de s’opposer, et le coup ne fut pas très fort. La Princesse bondit en arrière, et essaya de l’attaquer, levant gauchement son bras. Ciri’ soupira, et renversa Alice en lui fauchant les jambes. La Princesse poussa un hurlement en tombant sur le sol, et se retrouva avec la lame froide de l’épée de Ciri’ sur sa gorge, caressant sa peau, tandis que l’autre main de Cirillia se posa sur sa tête, continuant à l’immobiliser.

« Et zou, vous êtes encore morte, Princesse...
 -  Comme ça, on ne m’embêtera plus avec ce genre d’inepties ! »

Cirillia sourit. Elle était assise sur le corps de la Princesse, son visage proche du sien, et écarta le tranchant de son épée.

« Sa Majesté serait-elle en colère ? rigola doucement la femme.
 -  Sa Majesté n’aime pas perdre son temps avec ces imbécilités ! »

Cirillia se mit à sourire, et rapprocha son visage de celui d’Alice, avant que l’une de ses mains ne vienne titiller le nez de la Princesse, appuyant dessus.

« Tu es craquante quand tu es en colère, tu sais... »

Alice rougit, visiblement perturbée, et Cirillia se redressa, avant de récupérer son épée. La Princesse entreprit de se relever, mais Ciri’ posa alors son pied sur son ventre, près de ses seins, la rabaissant sur le sol.

« Il va falloir faire mieux que ça, Princesse... Tu sais te battre mieux que ça, je le sais. »

Alice soupira, sans rien dire. Cirillia entendit alors des bruits de pas, et libéra la poitrine de la Princesse. Des gardes leur annoncèrent que la délégation de Meisa était arrivée, et Ciri’, comprenant que ceci sonnait la fin de leur entraînement. La chasseuse de monstres était au courant de la venue prochaine d’une délégation émanant de Meisa. Cette annonce avait suscité une certaine controverse à Sylvandell, car Meisa n’était pas un royaume allié de l’Empire, ce qui, partant de là, en faisait donc un ennemi potentiel. Sylvandell avait donc hésité. Le Roi ne voulait pas entendre parler de ces gens-là, mais sa fille avait fermement insisté pour que la délégation de Meisa soit admise. Le Roi avait fini par se plier à la volonté de sa fille. Le moins qu’Alice pouvait faire était donc d’assister à leur venue.

Se relevant, la Princesse se mit à marcher, suivant Cirillia, jusqu’à rejoindre la salle de banquet.

Le Roi était là, assis sur son trône, et Kah’mui de Meisa se mit à parler. L’homme était là pour poursuivre une femme. Alice s’assit sur un siège, en clignant des yeux, rabattant quelques mèches de cheveux derrière ses oreilles.

« Allons, allons, Sieur Kah’mui, vous ne me prenez tout de même pas pour l’une de ces gonzesses nexusiennes qui caracolent avec la bouche ouverte comme un cul devant les fleurs qu’on leur lance ? Passons de cette politesse mielleuse et casse-couilles. Si ça n’avait tenu qu’à moi, j’aurais offert votre tête aux Ashnardiens, j’aurais cru comprendre qu’ils avaient envie de l’exhiber au-dessus de leurs cheminées... Ma fille m’a convaincu que ce ne serait pas très diplomatique, ou une autre connerie du genre. »

Alice rougit légèrement.

« Maintenant que vous avez fait le voyage jusqu’ici, parlez-nous donc de cette femme qui a causé le bordel chez vous... Histoire de voir comment empêcher ça chez nous. »

Tywill, au moins, avait le mérite d’être honnête.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le vendredi 29 novembre 2013, 00:27:03
Au moins, Tywill n’aimait pas y aller par quatre chemins, et le Roi appréciait cela avec la plus grande sincérité. Il apprécia un peu moins qu’il lui parla de son intention de lui séparer la tête de son corps, même s’il notait l’absence de conviction dans le ton de l’homme; s’il l’aurait fait, ce serait avec le même intérêt que celui de la chasse d’un gibier très prisé, tout comme il le faisait pour les reliques anciennes de la Première Race. Néanmoins, il ne prit pas la peine de lui dire que pour un être humain tel que lui, cet acte resterait toujours impossible, parce que le Roi ne laisserait personne avoir sa tête, pas avant le bon moment. Lorsqu’il lança ces mots, il y eut des encouragements de la part des ambassadeurs et autres représentants étrangers, et il dût surmonter ses propres démons pour ne pas succomber à son désir de les faire taire. « Ne cause pas d’incident, Kah’mui, ou tu le regretteras » se répétait-il à chaque fois qu’il rencontrait des gens particulièrement désagréables qui lui donnaient une franche envie de montrer l’étendue de son pouvoir, qui restait, même en dehors de Meisa et loin d’Eglendal, plutôt impressionnant. En se répétant mentalement cette phrse, il parvint à résorber sa colère, récupérant une certaine sérénité d’âme et la capacité de conserver un ton poli et de bonnes manières. Il regarda alors la Princesse. De par les royaumes, il devait admettre qu’il n’avait que rarement vue une femme de son calibre, et puisqu’elle était également celle qui avait pu insuffler un peu de bon sens à son père, il pencha poliment la tête en sa direction en signe de gratitude avant de se tourner vers le père.

« Elle se nommait Sérénité. Du temps de votre ancêtre Erwan, elle fut mon épouse, et mon apprentie. Cependant, elle a été tuée, puis ramenée à la vie par un tiers parti dont le nom m’est inconnu. Ses intentions sont encore très vagues, mais l’essentiel est qu’elle compte causer des ravages. En Meisa, elle a déclenché une Peste altérée par magie pour la rendre plus infectieuse et surtout plus mortelle, et ce qu’elle réserve à Sylvandell serait certainement quelque chose de similaire, si ce n’est pire. Je suis ici pour la retrouver, et la ramener dans sa tombe, de gré ou de force. »

Certains pourraient qualifier le Roi de fils de pute insensible, et en un sens, ils auraient raison. Malheureusement, pour comprendre son sentiment, il fallait savoir que le roi considérait la réanimation des morts ayant accédé à la Paix comme étant l’acte le plus vil et cruel qui soit, et pour cette raison, que ce soit pour son épouse ou pour qui que ce soit d’autre, il ne tolèrerai pas qu’une âme troublée arpente le monde en semant la mort et la destruction autour d’elle, et beaucoup de personnes chérissaient leurs morts avec une telle tendresse que parfois, ils en oubliaient que la Paix était la récompense promise à ceux qui ont mené une bonne vie, et que ramener une âme sur Terre revenait à non seulement les corrompre, mais possiblement leur empêcher de regagner cette état de grâce pour les envoyer ensuite dans le monde plus sombre et froid d’Althenos, et c’était probablement l’expérience la plus douloureuse pour une âme.

« Je sais que vous ne faites pas confiance aux étrangers, rajouta-t-il en rivant son regard à celui de son semblable. Et je sais que vous ne ferez pas bouger vos hommes sur ma parole. Je ne requiers qu’un guide, un combattant compétent que je n’aurais pas à surveiller. »

Ne connaissant pas vraiment Tywill, faute de l’avoir vu plus d’une demi-douzaine de fois pendant des pourparlers, il ne savait pas que s’attendre de lui. Si Tywill était un peu comme lui, il ne devait pas s’attendre à le voir rester là les bras croisés pendant qu’un Roi d’un autre Royaume venait foutre le bordel chez lui. Il savait qu’il devrait trouver un peu plus d’arguments, ou peut-être même une compensation pour sa présence. Une généreuse somme d’or pourrait suffire, mais les gens de Sylvandell étaient reconnus pour avoir peu, et du coup, ils pouvaient se permettre de réclamer BEAUCOUP, et tous savaient que Meisa avait énormément de ressources, qui incarnaient la principale raison du pourquoi Ashnard n’avait pas encore réussi à mettre la main dessus. Le Roi prit une grande inspiration puis il fit son offre.

« En échange de votre participation, je ferai venir des armes faites de l’alliage Meisaen ainsi, trois cent pièces de platine et l’ouverture de routes commerciales entre nos deux royaumes. Je vous offre ainsi la possibilité d’acheter des biens que même l’Empereur ne peut se procurer. »

C’était la meilleure offre qu’il pouvait faire. Les armes faites de l’alliage du fer et de la gaërite n’existaient normalement pas en Ashnard, ni même en Nexus, car Kah’mui interdisait l’exportation de ces objets et que les navires étaient sous un contrôle assez invasif pour éviter la contrebande. Seuls les Meisaens possédaient ces outils de guerre, en raison de leur résistance surnaturelle aux chocs et à l’usure et surtout pour leurs propriétés tranchantes ou perforantes bien supérieure à la plupart des métaux connus. Pour trois cent pièces de platine, ce qui incarnait une bonne portion du trésor royal de Meisa, le Roi Tywill peut faire concurrence à la richesse de quatre duchés réunis, et cela sans même avoir à décroiser les bras. Pour les routes commerciales, puisque Sylvandell était plutôt loin de tout, c’était une offre généreuse telle que le Roi n’en faisait pas souvent; avec l’aide des mages de Meisa, le transport lui-même n’était plus un obstacle, et l’importation de matière première serait un nouvel avantage pour Sylvandell. Et puis, si sa relation avec Ashnard restait assez glaciale, quelques royaumes sous la direction de l’Empire ne s’empêchaient aucunement de faire du commerce avec les artisans et fournisseurs Meisaens.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le samedi 30 novembre 2013, 15:31:57
Croisant les bras, Ciri’ s’était adossée dans un coin, observant ce petit bout de Roi qui se dressait face à cette masse de chair et d’acier. Du peu qu’elle savait de Sylvandell, Tywill était une sacrée pointure, une véritable masse dans l’histoire des Korvander. Comme il le disait lui-même, qu’il ait pu chier d’une crevette comme Alice était un coup du sort. Ciri’ comprenait souvent mieux pourquoi Alice était si découragée à l’idée de se battre, quand elle était à côté de son père. Au combat, ce type était une véritable machine de guerre. Avec son marteau de guerre, sa charge était impossible à arrêter, car, malgré sa masse, il était très rapide, et les pouvoirs magiques de son marteau décuplaient sa force. Cirillia l’avait déjà affronté, et elle avait perdu... Rares étaient les hommes qui pouvaient pourtant se targuer de l’avoir vaincu. Elle n’avait juste rien pu faire contre lui, contre cette masse invincible, et sa victoire était d’autant plus grande que le duel avait été individuel, sans que le Roi ne soit aidé de qui que ce soit. Elle avait donc respecté cette victoire, qui était plus ou moins la raison l’ayant encouragé à rester dans ce putain de royaume gouverné par des saloperies de dragons... Ça, ainsi qu’une belle petite tête blonde qui rechignait à faire ses exercices.

Le Roi de Meisa leur parla d’une femme qui risquait de déclencher une épidémie à Sylvandell, comme elle l’avait fait dans son royaume. Les différents membres de la Cour observaient Kah’mui. Un élément allant en faveur de sa théorie était que le Roi s’était déplacé en personne. S’il racontait des histoires, il aurait probablement envoyé un ambassadeur. Tout ce que le Roi demandait était quelqu’un pour l’accompagner dans ses explorations. Le Roi restait silencieux, sans rien dire, tandis que Cirillia continuait à réfléchir, bras croisés. Ses épées étaient jointes dans le dos. Les étrangers n’avaient pas spécialement le droit d’aller dans le Territoire des Dragons, mais Ciri’, qui avait étudié la région, savait que le massif montagneux ne se résumait pas qu’au Territoire, et qu’il existait également, dans les profondeurs du champ de montagnes, des tribus sauvages, arriérées et reculées. S’il fallait enquêter, il allait probablement falloir aller là-bas.

Le Roi de Meisa poursuivit en proposant aux Sylvandins l’ouverture de voies commerciales, ainsi que des armes. Le Roi se mit à sourire, et attendit quelques secondes, avant de lui répondre :

« Conservez votre camelote et votre matos hors d’usage, mon bon petit Roi, nous forgerons des armes et des armures en écailles de dragons depuis le Premier, et elles ne nous ont jamais fait défaut. Qu’un magicien fasse des grimoires et un forgeron de belles armures, et personne ne chiera dans le lit des épouses le soir de noces. »

Indéniablement, Tywill avait un talent indiscutable pour trouver des formules qui faisaient mouche.

« Si votre histoire est vraie, alors je vais charger mes Commandeurs d’enquêter. N’ayant pas eu vent de vos histoires, j’en déduis que votre cocotte doit planquer ses miches dans les montagnes. Aussi faudra-t-il contacter l’une des tribus pour retrouver vôt’donzelle. »

Tywill se redressa un peu.

« Et, n’en déplaise à votre gueule d’amour, les tribus n’aiment pas les étrangers. Aussi, je vous enjoindrais dans la journée une équipe qui sera chargée de vous accompagner. Vous respecterez consciencieusement leurs directives. Que vous soyez Roi de Meisa ou de je ne sais quel autre patelin ne change rien. Votre bled n’est pas reconnu par l’Empire, et, votre titre, je m’assois dessus en chiant une bonne pelletée. »

Ça avait le mérite d’être clair. Échanger des biens avec Meisa n’intéressait nullement les Sylvandins. Sur ce point, Tywill était un grand têtu, du genre obtus. Négocier avec lui était toujours assez difficile, mais Ciri’ estimait que sa décision était de bon sens. C’était une application de ce principe si cher aux États : la souveraineté. Tywill ne comptait pas laisser quelqu’un faire des recherches chez lui sans l’encadrer un peu.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le dimanche 01 décembre 2013, 01:19:18
[J’adore Tywill; même devant un magicien qui pourrait le tuer en pétant, il arrive à trouver suffisamment d’indifférence pour lui balancer des insultes à la gueule xD]

Kah’mui avait près de mille ans, ce jour-là, bien que certains passage de sa vie aient été sautées à cause d’un quelconque sortilège ou sceau qui l’aurait privé de sa conscience pendant quelques années. Pendant ces longs siècles, il avait vu beaucoup de gens, du petit paysan au puissant Roi ou tyran, il avait beaucoup appris et surtout beaucoup subis. Pour un être aussi âgé et expérimenté, on pourrait croire que la patience est un gain acquis. Terrible erreur de croire qu’une telle chose était naturelle pour une personne dont la vie ne semblait qu’être une corde sans fin qu’il fallait escalader jour après jours.

« Conservez votre camelote et votre matos hors d’usage, mon bon petit Roi, nous forgerons des armes et des armures en écailles de dragons depuis le Premier, et elles ne nous ont jamais fait défaut. Qu’un magicien fasse des grimoires et un forgeron de belles armures, et personne ne chiera dans le lit des épouses le soir de noces. Si votre histoire est vraie, alors je vais charger mes Commandeurs d’enquêter. N’ayant pas eu vent de vos histoires, j’en déduis que votre cocotte doit planquer ses miches dans les montagnes. Aussi faudra-t-il contacter l’une des tribus pour retrouver vôt’donzelle. Et, n’en déplaise à votre gueule d’amour, les tribus n’aiment pas les étrangers. Aussi, je vous enjoindrais dans la journée une équipe qui sera chargée de vous accompagner. Vous respecterez consciencieusement leurs directives. Que vous soyez Roi de Meisa ou de je ne sais quel autre patelin ne change rien. Votre bled n’est pas reconnu par l’Empire, et, votre titre, je m’assois dessus en chiant une bonne pelletée. »

Cracher sur son offre, passait encore, mais lorsque le Roi de Sylvandell multiplia les insultes, celui de Meisa se sentit soudainement plus échauffé que jamais. Il aurait voulu tendre la main vers cet arrogant petit personnage et lui montrer que devant lui, il n’était rien d’autre qu’un insecte à grande gueule. Le Roi avait tenu tête à l’empereur lui-même, dans ses propres cachots, sans même trembler, alors qu’il avait été torturé de telles façons que Tywill lui-même n’aurait pas l’imagination suffisante pour les penser. Le Roi dévisagea froidement son homologue en relevant le menton, de façon à montrer sa nouvelle hostilité. Soudainement, ses problèmes avec la sorcière noire lui semblèrent bien superflus; il y avait une règle entre monarques, c’était de ne pas se provoquer inutilement entre eux à moins de vouloir se faire un ennemi. Il lui aurait bien rajouté quelques cicatrices sur sa gueule de bourrin en manque de bonne vieille violence, mais plutôt que de s’en prendre à son rival, il se contenta de se fendre dans une révérence polie.

« Votre générosité m’honore, seigneur Tywill, lâcha-t-il d’une voix mordante. Je ferai comme vous dite. Je vais prendre congé et me préparer. »

Sur ces mots, le Roi se retourna sans plus de façon, son manteau se soulevant derrière lui, laissant entrevoir brièvement sa main ensanglantée posée sur le pommeau de son épée; dans son effort incommensurable de combattre ses propres désirs de combattre cet idiot, qui venait de se mettre à dos l’un des Rois les plus dangereux de l’histoire de Terra toute entière, il ne s’était qu’à peine rendu compte qu’il venait de s’enfoncer le pieu servant de pommeau de son épée dans la main. Sur le sol, alors qu’il partait, il laissa sur son sillage quelques gouttes de sang. Alors qu’il quittait le palais royal de Sylvandell, sa délégation se reforma autour de lui, alors qu’il reprenait le pont pour regagner la ville. Alessa, la Matriarche, posa alors une main sur l’épaule de son souverain.

« Qu’a-t-il dit? Demanda-t-elle calmement.
-Qu’on serait accompagné dans nos recherches par des gens de chez lui.
-Mais ils vont nous ralentir…
-Je sais.
-Sire, il faut faire vite, sinon ces gens vont…
-Silence! S’emporta le monarque, finalement à court de patience, en chassant la main de la Meisaenne de son épaule. Pour l’amour du ciel, femme, ne vois-tu pas que ce n’est pas le moment de me harceler de questions et de commentaires!? Au diable la Sorcière, au diable le Roi, au diable tous ces inconscients, qu’ils brûlent tous autant qu’ils sont, pour ce que j’en ai à faire!

Alessa n’était pas blessée. Être blessé aurait été déplacé quand on connaissait le tempérament du Roi. Elle était tout simplement triste de le voir dans cet état. Il n’était pas Roi de naissance, il était avant tout un homme du peuple ayant eu le désir de protéger des gens au point de les rallier sous un nouveau régime, sous sa régence, que beaucoup pouvaient affirmer juste et équitable pour tous, et lorsqu’il avait été éduqué par la Reine de Corven au monde de la cour et des jeux du trône, il avait tout de suite su qu’il n’aimerait pas cette expérience, et il faisait semblant de faire partie de ce monde parce que c’était une manière pour lui de protéger ses gens. Lorsqu’il voyait des gens comme Tywill, qui avaient hérité d’un royaume par les liens du sang, il s’attendait, allez savoir pourquoi, qu’ils aient à cœur la paix entre les peuples et le bien-être de leurs gens, Mordred étant une exception puisque ce crétin n’avait d’autre but que de saigner le monde. Parfois, il se demandait même si Mordred ne serait pas un Champion d’Althenos que celui-ci aurait renié à cause de son manque d’empathie. Et voir Tywill se comporter de la sorte, voilà qui le faisait fulminer. La Sorcière Noire était peut-être remplie de haine et de sarcasme, mais elle ne se laissait pas aller à la grossièreté gratuite des simples d’esprit. Le Roi n’était pas à cheval sur le protocole, mais il essayait toujours de se montrer respectueux envers les autres, et il s’attendait à la même politesse.

Le Roi finit par se calmer alors qu’ils regagnaient la sortie de la ville, où les attendaient quelques serviteurs ainsi qu’un campement installé un peu plus loin des portes. Le monarque de Meisa s’empara d’un bol chaud de soupe à l’oignon dans lequel il trempa les lèvres, marmonnant des mots qu’Alessa ne comprenaient pas, probablement de l’Ashansha. Elle ne comprit que quelques mots, « pourrais tous les raser », « une question de jours », « autre chose à faire » et aussi « meilleur que ça ». Elle comprenait le dilemme de l’homme; lorsqu’une personne accumulait trop de pouvoirs et qu’elle savait que tout lui était possible, il était parfois difficile de retenir ses désirs de destruction, car le pouvoir corrompait facilement les êtres vivants, au point de leur faire perdre de vue quel genre de personnes ils sont. Il voulait faire payer Tywill pour son effronterie, mais en même temps, il savait qu’il ne pouvait pas déchainer sa colère sous risque de se lancer dans un massacre, ce qui irait à l’encontre de ses objectifs premiers. Elle lui fit venir un autre bol de soupe alors qu’il avalait d’une traite le bouillon de celle qu’il venait de finir, et il recommença à manger frénétiquement, mâchant si agressivement sa nourriture qu’elle remercia le cuisinier de ne pas lui avoir donné de la viande; il aurait eu l’air d’un animal sauvage. Lorsqu’il eut fini de manger, elle glissa doucement une main dans la sienne, et lorsqu’il referma ses doigts, elle sentit ses muscles tendus et ses tentatives de contrôle qui le retenait de lui faire du mal. Elle posa alors sa tête sur l’épaule de son Roi et chanta doucement à son oreille une petite mélodie des temps anciens, alors qu’ils étaient tous deux jeunes et plein de bons sentiments. N’importe quoi qui puisse le pousser qu’il ne pense plus à Tywill et à ses désirs de carnage était une bonne chose. Et cela fonctionnait. Il relâchait un peu plus les muscles et décrispait la mâchoire. Elle sût donc qu’elle pouvait lui adresser à nouveau la parole sans risquer de subir un nouvel éclat de colère.

« Que fait-on, maintenant?
-On attend.
-On pourrait se trouver une bonne auberge et dormir au chaud…
-Pas question. Les Sylvandins n’auront pas une seule pièce de mon argent. S’ils crachent dessus, ils n’en auront pas.
-Vous êtes encore fâché…
-Non. Je suis vexé. Et je suis Roi, donc, quand je me vexe, j’en fais payer le prix à tout le monde, c’est comme ça. »

Le pire dans tout ça, c'est que le Roi était parfaitement conscient qu'il pourrait très bien simplement ignorer les directives de Tywill et mettre son royaume à feu et à sang, à commencer par ses fraudes de Dragons d'Or déifiés avant d'enfin retrouver la sorcière en rasant les montagnes par magie, mais il y avait une loi à toujours respecter lorsqu'on avait un pouvoir pareil, c'était les répercussions de ces actes. Lorsqu'on déchainait trop de pouvoir, cela intéressait rapidement les magiciens et autres personnalités qui se mettaient ensuite à la recherche d'un sceau ou un sortilège pour mettre la nouvelle menace hors d'état de nuire. Il était ensuite impossible de conserver la paix, car une personne capable de raser un royaume sera toujours perçue comme un danger par les autres, ce qui mettrait fin à son rêve bien innocent de collaboration internationale. Parfois, il aimerait simplement priver les crétins dans le genre de Tywill de leur libre arbitre et de les forcer à faire selon ses directives... mais comme on dit, pour manipuler un cerveau, il faut que la cible en ait un.

***

Le Chevalier laissa tomber cinq feuilles de papier sur la table de chevet de sa maîtresse. Le premier était un rapport des éclaireurs en territoire de Nexus, et les autres étaient des confirmations venant des différents points de contrôle dispersés sur la carte pour signaler que le contenu du premier rapport était véridique et important. Kyrian savait que la Sorcière n’en aurait probablement rien à faire de ces bouts de papier, mais en tant qu’homme de main, il était de son devoir de s’assurer qu’elle soit au courant de tout ce qui se passait concernant ses ennemis

-Nous avons repérer des troupes venant de Meisa en position sur la côte Est du Territoire de Nexus, ma Dame. Le Roi est introuvable pour le moment, mais il y a fort à parier qu’il est sur notre trace. Je recommande une plus grande vigilance dans les prochains jours.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le dimanche 01 décembre 2013, 16:23:11
[HS – Ton magicien n’aurait absolument pas la moindre chance contre Tywill ^^ Son Marteau absorbe les attaques magiques, et ne répond qu’à la volonté du Roi.]



Toute la question était de choisir le Commandeur qui allait se charger d’escorter les Meisaens dans leur exploration de la région. Cirillia était bien placée pour savoir que c’était une région dangereuse, puisqu’elle avait failli y laisser sa peau. La petite Princesse assista silencieusement aux discussions se déroulant autour de la table entre le Roi et ses Commandeurs. La confiance des Sylvandins à l’égard de Meisa était plus que limitée. Si jamais les Ashnardiens apprenaient que des ennemis de l’Empire étaient venus ici, ils risquaient d’avoir des problèmes. Tywill ne voyait personnellement aucune objection à venir arrêter Kah’mui, et à le traîner pieds et poings liés devant les geôles de l’Empire. De manière générale, il n’avait jamais aimé ceux qui pétaient plus haut que leur cul et étaient incapables de découper un tronc d’arbre avec une hache. Toute la magie de cet individu lui était bien égal, car il disposait du Marteau de Guerre de Sylvandell, une arme enchanteresse aux propriétés magiques terribles, une arme que seul un légitime descendant d’Erwan Korvander, dont le sang était béni par le Premier Dragon, pouvait porter.

« Il y a eu des problèmes à Meisa, expliqua l’un des Commandeurs. L’Ordre a bloqué toutes les voies de circulation vers le royaume quand j’ai voulu y aller, il y a quelques semaines. C’était une épidémie de peste.
 -  Un tel risque ne peut pas survenir à Sylvandell, notre royaume est sain, objecta un autre Commandeur. Meisa fait partie des royaumes ennemis de l’Empire. Ce type veut juste se servir d’un prétexte fallacieux pour étudier notre royaume, ainsi que le lien magique qui nous unit aux dragons, et tenter de les saborder.
 -  On ne peut pas non plus négliger ces rapports sur la troupe de Gregor à proximité. Ce rascal erre dans la région. »

Gregor Clegane... Cirillia avait entendu parler de lui. C’était un ancien Commandeur, qui avait trahi le Roi, et qui était encore plus massif et plus grand que Tywill, si c’était possible. Une véritable montagne qui avait rejoint une bande de tueurs, de violeurs, et de mercenaires de basse besogne. Il était avéré que Gregor était l’un des grands ennemis du royaume, et plusieurs soldats affirmaient avoir vu des hommes de sa bande dans des villes à proximité de Sylvandell. Une telle proximité n’était jamais bon signe. Gregor connaissait Sylvandell, et connaissait surtout les petits chemins montagneux permettant d’entrer sans tomber sur les dragons, ou sur les tribus. La chaîne de montagnes jouxtant Sylvandell était un long massif s’étalant sur plusieurs centaines de kilomètres, et qui débouchait sur un désert particulièrement long. Il y avait quantité de petits sentiers que des clandestins, notamment des contrebandiers, essayaient de prendre pour rejoindre Sylvandell. Ciri’ elle-même s’y était essayée jadis, et était tombée sur ce qu’elle cherchait : un dragon.

S’aventurer dans les montagnes sans les connaître équivalait plus ou moins à un suicide, car les dragons de Sylvandell n’étaient pas particulièrement amicaux envers les étrangers.

« C’est la raison pour laquelle on va encadrer cet étranger, intervint Tywill. Il me semble qu’on pourra amener Hodor, si ma chère demie-portion de fille n’y voit aucun inconvénient.
 -  Non, Père, je...
 -  À la bonne heure, foutredieu, pour une fois qu’elle me fait pas chier à faire sa mijaurée ! » s’exclama Tywill en donnant un grand coup sur la table.

Alice rougit jusqu’aux oreilles, et Tywill observa ses Commandeurs.

« Je vais m’en charger », finit par annoncer l’un d’eux en se levant.

C’était Kynarth (http://88grzes.deviantart.com/art/The-last-soldier-of-the-Empire-404719458?q=gallery%3A88grzes%2F2851871&qo=5), un Commandeur assez jeune, relativement poli et humble, qui, à ce qu’on en disait, en pinçait pour la Princesse. Kynarth s’était illustré sur le champ-de-bataille en affrontant, tout seul, de sauvages barbares dans des contrées glaciales. Il s’était battu vaillamment, au milieu de son escouade décimée, contre des ennemis maintes fois supérieurs en nombre. Les innombrables coups qu’il avait reçu l’avaient laissé pour mort, mais il avait été sauvé in extremis par des renforts ashnardiens, qui avaient pu profiter de sa diversion pour emboutir les barbares, et les occire, permettant ainsi de sauver un bastion ashnardien. D’origine sylvandine, Kynarth avait fait ses classes dans l’Empire, et avait fini par être nommé Commandeur, un immense honneur pour tout Sylvandin. Sa mère avait pleuré de joie lors de la cérémonie d’intronisation, et on disait qu’il avait eu une éjaculation précoce en étant dans la même pièce qu’Alice, le « Joyau de Sylvandell », pour la première fois de son existence. En réalité, comme beaucoup de jeunes hommes, Kynarth avait un béguin d’enfance pour la belle Princesse.

« Tu es sûr, mon p’tiot ? le nargua Tywill.
 -  Je connais très bien cette région, je suis né ici. Et puis, si Hodor est avec moi, on ne craint rien. »

Hodor était un demi-géant, simple d’esprit. Les Sylvandins l’avaient récupéré dans la forêt, il y a longtemps. Hagard, couvert de sang, il ne répétait qu’une seule chose, inlassablement : « hodor ». Comme c’était la seule chose qu’il disait, les Sylvandins avaient pris l’habitude de l’appeler ainsi : Hodor. Ne supportant pas les espaces clos, Hodor s’était lié d’admiration pour Alice, et était, depuis longtemps, son garde du corps. Son agoraphobie et sa claustrophobie empêchaient toutefois de conduire Hodor dans des endroits où il y avait trop de monde. Quand Hodor s’énervait, ce n’était pas beau à voir.

Ciri’ intervint alors, en s’avançant lentement.

« Je vais t’accompagner, Kynarth. Un peu de marche à pied me fera du bien. »

Devant le regard dubitatif de la tablée, elle haussa les épaules :

« Je ne toucherai pas à vos petits dragons, si ça peut vous rassurer. »

Tywill soupira.

« Soit. Vous constituerez un nombre bien suffisant, inutile d’amener plus de gardes. Je ne veux pas que les tribus pensent que nous venons les assiéger. Et... Si jamais vous trouvez des traces de Gregor, appelez-moi. Je ne remets pas en doute tes compétences, Kynarth, mais on ne peut pas combattre Gregor en étant seul. »

Kynarth hocha la tête. Humble, il comprenait. Il regarda brièvement Cirillia, et cette dernière esquissa un sourire, en comprenant que le blanc-bec devait aussi avoir le béguin pour elle.

*Ne me dites pas qu’il est puceau, Tywill ne le supporterait pas...*

Ciri’ voulait aussi sortir du palais pour ne pas rester indéfiniment avec l’un des récents gardes du corps d’Alice, un bel elfe nommé Melendil (http://omupied.deviantart.com/art/FENWYN-293743851), tellement beau que Ciri’ avait été jusqu’à rêver de ses belles lèvres, et à ressentir un léger brin de jalousie en sachant qu’Alice passait de longues nuits avec lui. Mieux valait fuir les yeux romantiques de cet elfe et ses maudites lèvres tendres et charnues, ou Cirillia en perdrait son âme.

« J’vais dire à l’un des garçons d’aller chercher Sa Bonne Majesté, et de lui dire de déplacer ses miches à la Griffe. Vous l’attendrez là-bas. »

Kynarth hocha la tête. La Griffe (http://img74.xooimage.com/files/8/9/6/sylvandell---la-pointe-304c1aa.jpg) était un petit château en hauteur. C’était plus un avant-poste qu’un château, et c’était, officiellement, la limite, la frontière entre Sylvandell et le Territoire des Dragons. C’était donc le meilleur endroit pour commencer à explorer le Territoire, d’autant plus que, parfois, on avait la chance de tomber sur des guides, et que, en toute matière, il y avait des cartes très complètes... Et des tonneaux de bières.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le lundi 09 décembre 2013, 03:05:37
Les nerfs du Roi ne semblaient pas sur le point de se calmer. Et il en avait plus qu’assez d’attendre qu’on lui donne les « renforts » dont il avait été question. Tywill lui avait manqué de respect, et non content de lui balancer des piques inutiles, il s’arrangeait pour déclencher des hostilités. Et lorsque le Roi avait envie de mettre un royaume à feu et à sang, il n’y avait qu’une chose pour lui rappeler que les victimes de la guerre n’étaient pas que les soldats et les militaires; les enfants aussi souffraient des batailles de leurs parents. Pour cette raison, le Roi décida d’aller se procurer quelques jouets et cadeaux pour enfants avec l’argent qu’il avait offert à Tywill, et malgré l’air agressif du marchand, celui-ci ne se sentait pas d’humeur à refuser des belles pièces sonnantes et trébuchantes, et il lui donna même un chariot pour transporter les biens nouvellement acquis que le Roi apporta avec lui vers un des orphelinats de la capitale. Dans un état aussi rude et militarisé que Sylvandell, et dans un empire où presque toutes les ressources sont concentrées sur l’Armée, il était rare de trouver des orphelinats, surtout que la plupart de enfants étaient rachetés par des nobles ou des militaires en recherche de main d’œuvre, mais Sylvandell étant un pays très reculé, même pour Ashnard, la conscription ne semblait pas s’appliquer aussi rigoureusement, et du coup, quelques orphelins de guerre et de malchance trouvaient un toit au-dessus de leur tête.

Une fois dans l’orphelinat, il se surprit de voir à quel point l’endroit était délabré, pour un établissement en plein cœur de la capitale. Constitué d’une seule et grande pièce mal isolée, le Roi se sentit légèrement fâché de voir que les enfants vivaient dans un débarras plus que dans une résidence temporaire. Deux gardiennes s’approchèrent alors de lui et lui demandèrent s’il était venu rencontrer un enfant en particulier, s’il comptait adopter ou s’il venait simplement regarder les enfants. Le Roi sembla les décevoir lorsqu’il leur dit qu’il ne pouvait pas adopter d’enfants, mais leur regard reprit une étincelle de bonne humeur lorsqu’il leur avoua qu’il avait une généreuse donation à faire pour l’orphelinat. Les deux vieilles dames réunirent les enfants, réveillant ceux qui étaient déjà couchés, et le Roi fit venir ses compagnons, les bras chargés de jouets et de nourritures. Les enfants semblèrent néanmoins montrer de la réserve, regardant le monarque avec circonspection, comme s’ils s’attendaient à ce qu’il leur fasse du mal. Après tout, n’était-il pas un ennemi de l’État? Sa tête était affichée dans les livres d’histoire, dans les légendes des vieilles guerres entre l’Empereur et le grand Royaume par-delà la mer? Mais pourtant, il ne semblait pas bien méchant. Plutôt que de s’approcher avec les cadeaux, il demanda à Alessa de déposer les présents devant les enfants, sans les leur donner directement, comme pour leur faire comprendre qu’il ne s’agissait pas d’une dette, mais bien d’une offre sans arrière-pensée. Aucun petit n’osa bouger, mais bientôt, une gamine dans les environs de trois ans s’approcha d’une petite poupée de chiffon et s’en empara avec empressement, comme de peur qu’on la lui reprenne, et se retira un peu plus loin avec son jouet. Les autres suivirent son exemple et se penchèrent pour ramasser des jouets qui leur convenaient. Certains garçons choisirent des épées de bois, alors que d’autres s’emparèrent plutôt de vêtements propres, et les filles s’approprièrent simultanément des peignes et d’objet d’entretien corporels. En Meisa, les orphelins étaient pris en charge par le Roi lui-même, et ils devenaient les pupilles de Sa Majesté, obtenant des soins et une éducation plus qu’acceptables, à défaut d’avoir une famille, du coup, lorsqu’il visitait ces endroits, il pouvait un peu voir de quoi avait l’air le royaume.

Les enfants se mirent donc à jouer, et le Roi s’installa sur une chaise de la table à manger pour les observer. Une des gardiennes s’installa sur un siège à son côté et le dévisagea.

« Avez-vous des enfants, sire? Demanda-t-elle gentiment.
-Probablement plus que je ne le pense, admit-il, avec un brin d’embarras.
-Où sont-ils?
-Morts, pour la plupart. J’ai un fils illégitime en Meisa, mais je ne l’ai jamais vu grandir, bien que je lui ai donné du travail et qu’il me sert maintenant en tant que Conseiller.
-Vous aimez les enfants?
-On pourrait dire que je m’entends mieux avec un enfant de cinq ans qu’avec la plupart des adultes. Un enfant essaie de vous comprendre, et il a l’esprit ouvert, parce qu’il est conscient de sa propre ignorance, alors qu’un adulte pense tout savoir.
-Et vous?
-Probablement encore plus qu’eux, avoua-t-il dans un soupir. Mais je suis conscient de mes failles. Je n’ai pas la paresse de les laisser comme elles le sont. »

De ses nombreuses failles, sa grande connaissance le laissait croire par moment qu’il n’ignorait que très peu de choses, alors qu’il lui restait encore des millions de phénomènes sans explication à étudier et comprendre, et surtout, à sa grande tristesse, sa faiblesse auprès des femmes. La plupart du temps, il essaie d’ignorer les appels de la chair, mais parfois, il ne pouvait que céder aux promesses de chaleur et de tendresse qui faisait défaut à son univers particulièrement solitaire. Il ne comptait plus le nombre de charmantes assassins qui avaient tenté de se glisser dans son lit pour lui donner le coup fatal, et celui de celles qui rentrèrent chez elles physiquement satisfaites, mais horriblement humiliée quand, à la fin de l’acte, elles tentaient de le poignarder, sans succès. Et malheureusement, il ne comptait plus les femmes qui avaient, à un moment ou un autre, donné naissance à un enfant de lui. Tristement, lorsqu’il n’était pas présent pour subvenir au besoin d’énergie de l’enfant, qui se nourrissait avidement de celle de sa mère, la plupart de ces femmes ne survivaient pas à l’accouchement, tout comme l’enfant, ce qui ne lui laissait qu’une approximation du nombre d’enfants qu’il pourrait bien avoir.

La vieille dame semblait comprendre, hochant la tête avec un sourire sympathique. C’était agréable de pouvoir parler et de se sentir entendu. Le Roi était conscient de sa propre immaturité, et ce défaut semblait ne pas vouloir disparaitre avec les années; il restait toujours aussi énergique et fonceur que dans sa prime jeunesse. En contrepartie, néanmoins, il était également beaucoup plus conscient de ses actes que bien d’autres, incluant Tywill. « Je crois que je l’aime encore moins que Mordred » remarqua le monarque en se massant la nuque. Mordred, au moins, était foncièrement mauvais, et du coup, il ne se sentait nullement coupable de se servir des stratagèmes les plus vicieux pour le mettre en échec, mais Tywill?  Tywill n’était pas l’engeance d’un démon. Tywill avait une famille, une fille qu’il aimait sincèrement, bien qu’il ne semblait guère comprendre le concept d’aimer. S’ils étaient en guerre, le Roi serait bien capable de faire assassiner la jeune dame, ou même de le faire lui-même, s’il désirait une meilleure chance de réussite. À cette pensée, une image de Shunya lui vint en tête. Elle aussi, il aurait pu la tuer, et ainsi peut-être la sauver. Un frisson de dégout lui parcourut l’échine alors qu’il se rendait compte de sa propre inhumanité. Tuer des innocents pour arriver à ses fins, voilà les méthodes des tyrans et des démons, pas d’un Roi qui se pavanait sous le titre du Protecteur.

Après une heure, quelqu’un débarqua enfin dans l’orphelinat. Un messager. Il annonça au Roi qu’il était convoqué à la Griffe, mais le mauvais choix de mot lui attira un sourire menaçant de la part du monarque. Personne sur cette planète, pas même un Dieu, pouvait se vanter de pouvoir convoquer le Roi à sa guise. Le Roi se redressa alors de sa chaise et alors qu’il passait devant lui, le jeune homme sentit étrangement tous ses muscles inférieurs lui faire défaut, au point qu’à la simple proximité du Roi de Meisa, il sentit ses jambes trembler pour finalement le laisser s’effondrer sur le sol,  Le monarque poursuivit son passage sans lui accorder plus de considération, alors qu’Alessa se permit tout de même de lui écraser les noix sous son talon en lui intimant de se montrer beaucoup plus courtois à l’adresse des visiteurs de marque, car si Tywill pouvait se permettre une familiarité grossière, il n’allait certainement pas se laisser insulter par un jeune coq. L’homme croisa donc les mains dans son dos et se mit à marcher en direction de la Griffe. Pour avoir régulièrement regardé les cartes dessinées par ses espions et cartographes, il connaissait plutôt bien le territoire Sylvandin. Ses espions n’avaient, en fait, d’espion que le nom; il s’agissait surtout de collaborateurs; aucun de ses contacts ne s’aventurait à espionner les châteaux, car pour un homme comme Tywill, il avait l’impression que la torture n’était pas une pratique bannie, voire même appréciée.

Marchant seul sur le chemin menant à l’avant-poste, le Roi ne put s’empêcher de croire que les terres de Sylvandell ne semblaient pas très propices à l’agriculture. Montagneux, sans grand pré pour cultiver la terre, il lui semblait presque inconcevable que des êtres humains puissent vivre dans ces conditions, mais il pouvait mettre cela sur le compte de l’entêtement général Sylvandin; très attachés à leur héritage et à leurs dragons, ils refuseraient de considérer le déménagement même si l’occasion se présentait. Le Roi n’avait jamais visité la Griffe, même lors de ses quelques visites du temps du père et grand-père de Tywill, mais lorsqu’il la vit, là-haut, perché sur une falaise qui semblait prête à s’effondrer à tout moment, il eut un léger sentiment d’agacement. Il poussa un soupir et décida de ne pas considérer la chose comme une offense, se contentant de se hisser lentement le long du sentier qui menait vers le petit château.

« Les Sylvandins ne vous aideront pas, sire, vous savez?

Surpris par cette voix, qu’il ne reconnaissait que trop bien, il se retourna brusquement en tirant Ehredna de son fourreau. Le Chevalier se tenait là, les bras croisés, sans son casque. Il le dévisageait calmement, sans son arme, car il ne craignait rien et il le savait. Ne sentant aucune intention agressive venant de son rival, le Roi rengaina son épée, sachant que le temps de l’affrontement n’était pas encore arrivé.

« Que voulez-vous?
- Je ne fais que porter un message. Ou plutôt attirer votre attention dessus. »

Le Chevalier leva alors un doigt de sa main gantée et pointa vers le ciel. Malgré la clarté relative du jour, tout près du soleil, il brillait maintenant dans la voûte céleste un astre porteur de mauvais augure. « L’Étoile Sanglante? » s’étonna le Roi. L’Étoile Rouge, communément appelée l’Étoile Sanglante, n’était pas une étoile à proprement parlé. Bien qu’elle en ait effectivement l’apparence, il ne s’agissait pas d’un astre, mais d’une lueur intense causée par le contact entre le monde des morts et celui des vivants. Les conséquences de ce contact n’étaient pas immédiates, car le contact ne se produisait pas nécessairement dans le ciel de la planète, mais cette étoile annonçait deux choses bien inquiétantes; la première qu’une menace imminente était en route, et la seconde que des changements drastiques et prochains allaient se produire dans peu de temps.

« Qu’avez-vous fait? L’interrogea le Roi sur un ton accusateur. Est-ce vous qui l’avez invoquée?
- Lorsque l’Innocente sera entre les griffes du Mal, Roi des Gardiens et Roi des Dragons verront leurs peuples disparaître à l’arrivée de la Calamité lorsque brillera au firmament l’Étoile des Présages. La Messagère fera venir de l’Outremonde la Championne, et marquera de ce jour le commencement de l’Anéantissement. récita le Chevalier d’une voix monotone. Telle fut la prédiction de Jekhelv le Puissant. Ma Dame m’envoie également vous informer que dans trois jours à compter de maintenant, à cette heure précise, nous serons prêts, et que nous vous attendrons sur le champ de bataille.

Sur ces mots, le Chevalier salua le Roi d’un coup sur son plastron, à l’endroit de son cœur, et se détourna avant de disparaître dans un éclair de lumière bleutée. Le Roi le regarda faire, ne faisant pas un geste pour le suivre ou l’arrêter. Il ne put s’empêcher d’essayer de retracer la trace de magie laissée par le Chevalier lorsqu’il disparut, mais cet homme avait déjà réussi à brouiller les pistes; plutôt que son repère, le Roi entraperçut des plaines florissantes, avant que le tunnel magique se referme d’un coup brusque. Le Chevalier était aussi doué que lui. Malgré lui, le défi de combattre un égal lui arracha un sourire de satisfaction, ce qui le poussa à passer rapidement une main sur son visage pour en chasser cette grimace plaisante. Le monde était en crise et lui, il était content. Il avait même hâte de voir la fin de ces intrigues. Mais une nouvelle fois, le visage de Shunya lui apparut brièvement. Cette fois, il perdit bien son sourire, qui se remplaça par une franche inquiétude. Il supplia secrètement la jeune femme d’être saine et sauve. Ou sauve. Oui, sauve, ce serait déjà bien.

Lorsqu’il arriva devant le commando envoyé par le Roi de Sylvandell, il n’était pas au meilleur de son humeur, et la tension était palpable. Il avait compris que pour les Sylvandins, la gentillesse et la politesse n’étaient que des démonstrations de faiblesse, aussi se débarrassa-t-il de son manteau de bonté pour revêtir celui de la plus profonde froideur. Il déboucla le fourreau de son épée de sa ceinture et la positionna pointe vers le sol pour s’appuyer dessus, son regard parcourant les trois membres de cette nouvelle équipe. Un soldat, une duelliste et un demi-sang de Géant. Il était encore loin du quatuor qu’il avait formé avec Mélisende la Sorcière, Chaos au bras infaillible et la petite voleuse Mégane, mais au moins, ils étaient quatre.

« J’imagine que vous êtes déjà au courant de qui je suis, dit-il directement. On m’a demandé de venir ici pour rencontrer ceux qui m’accompagneraient pendant mon enquête et qui me guideraient dans les montagnes. Êtes-vous ceux dont il s’agit? »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le mardi 10 décembre 2013, 01:19:35
La route vers la Griffe n’était pas une route que Cirillia appréciait beaucoup. Elle serpentait le long de la montagne, et vous amenait à croiser des dragons, qui volaient parfois de très près. Or, Ciri’ aimait relativement peu les dragons. Voire même pas du tout. Elle s’avança donc, pressant le mouvement, Kynarth derrière elle. Le jeune Commandeur était visiblement fier d’accomplir une mission pour Sylvandell, mais Ciri’ se doutait aussi qu’il avait des hormones. L’amoureux transi de la Princesse de Sylvandell semblait aussi apprécier l’idée de faire route avec Cirillia. Ils s’étaient battus ensemble à plusieurs reprises, à l’entraînement. Kynarth avait un style de combat très académique, manquant encore de cette fluidité qui caractérisait les bretteurs d’expérience. Pour autant, il était adroit, et endurci. La plupart des feintes de Ciri’ ne l’avaient pas eu, et, quand il se battait, Kynarth perdait cette espèce de timidité naturelle qui semblait le caractériser face aux femmes. C’était un combattant valeureux et redoutable. Qu’il ait choisi de se porter volontaire était une bonne initiative, car ce serait pour lui l’occasion d’acquérir un peu d’expérience. D’aucuns auraient sans doute pu trouver la décision de Tywill assez souple, mais les Commandeurs étaient tous des hommes de confiance, et, de manière plus générale, Tywill ne pensait pas vraiment qu’il y avait une menace pesant sur son royaume. Le dragon d’Or les protégeait, et, tant que ses immenses ailes continuaient à flotter dans le ciel, Sylvandell ne craignait rien.

Ciri’, quant à elle, était soulagée de ne plus croiser les beaux yeux bleus de Melendil. Avoir le béguin pour quelqu’un... Ridicule, clairement. Elle avait l’impression d’être la farce d’un de ces stupides contes pour adolescents sur le pouvoir de l’amour. Cirillia n’était pas vraiment le genre de femmes qui croyaient à ces fadaises et à ces fariboles. Elle croyait à l’acier, elle croyait en son armure, en son arbalète. Le reste était sans importance. C’était d’ailleurs son armure qu’elle portait, alors que le duo rejoignait ce sinistre poste-frontière que constituait la Griffe. Un endroit assez sobre, qui se composait d’une grande pièce menant à une terrasse, et à des chambres en hauteur, ainsi qu’à une armurerie sommaire. Le duo le rejoignit assez rapidement, et saluèrent les gardes en faction. La Griffe comprenait généralement toujours une garnison, et on leur expliqua qu’il y avait, fort heureusement, un guide : le sage et fort respectable Nyoron (http://img98.xooimage.com/files/2/4/0/nyoron-42a18c1.jpg).

La région de Sylvandell comprenait, outre le royaume lui-même et le Territoire des Dragons, plusieurs petites tribus isolées. Partiellement autonomes, elles étaient rattachées à Sylvandell, et avaient généralement pour objectif de surveiller l’activité dans la région. Ces tribus préexistaient à la création de Sylvandell, et, d’après la légende du Premier Roi, les tribus avaient aidé Erwan et les premiers Rois à bâtir Sylvandell. La Griffe était le lieu où ils venaient déposer des biens, et en récupérer d’autres. Il ne viendrait jamais à l’esprit des Sylvandins d’aller les chasser. Ils connaissaient cette région comme leur poche, bien mieux que les Sylvandins eux-mêmes, et étaient les principales barrières contre les flux de migrants cherchant à entrer clandestinement à Sylvandell.

« Il reste donc juste à attendre le Roi de Meisa, commenta Kynarth.
 -  Ouaip.
 -  Je vais aller m’entretenir avec Nyoron, voir s’il ne serait pas au courant d’activités suspectes dans les montagnes. »

Cirillia hocha la tête. Plusieurs gardes jouaient au poker, mais elle se rendit vers la terrasse... Où des gardes jouaient à des jeux plus physiques, plus intéressants : un entraînement musclé sur la base de paris.

*Voilà qui me parle mieux !*

Cirillia se rapprocha, et entreprit de défaire son armure, finissant dans son pantalon en cuir avec son corset. Elle se frotta les poings, puis entra en piste. Kynarth, quant à lui, entreprit de dialoguer un brin avec Nyoron.

« Un Roi, hein ? Rien que ça ? Ma foi, si les étrangers ont envie de visiter notre région… »

Nyoron n’était pas opposé à l’idée de guider un Roi dans les profondeurs des montagnes. En revanche, il n’était pas au courant d’une quelconque activité, mais avait entendu parler, au village, de problèmes. Du gibier en moins, des histoires comme ça. Les gens de la tribu soupçonnaient le froid ambiant, mais Nyoron n’en savait pas plus. Il était guide, après tout, pas chasseur, et son rôle était de vérifier que les chemins étaient toujours praticables, que les ponts ne s’étaient pas brisés, et qu’on pouvait continuer à se promener sereinement dans la montagne. Nyoron et Kynarth finirent par se pencher sur une carte très précisé de la région, et Nyoron indiqua la destination à prendre, la trajectoire.

Cirillia venait de rétamer le second garde quand le Roi finit par arriver, avec ses hommes. Hodor était dans son coin, silencieux, jouant avec ses doigts, répétant de temps en temps « hodor », « hodor », « hodor »...

Le Roi se salua, et Kynarth hocha la tête.

« Enchanté, Roi de Meisa. Je suis le Commandeur Kynarth. Voici Hodor, le demi-géant qui nous accompagnera, Nyoron, notre guide, et Cirillia, qui est en train de s’occuper sur la terrasse. Nyoron et moi inspections le trajet à prendre sur cette carte. »

De la tête, Nyoron salua rapidement le Roi.

« Comme je l’ai dit, les routes sont sûres, mais, vu le nombre que nous serons, il faut s’attendre à ce que des monstres nous tombent dessus.
 -  Ça tombe bien, j’avais justement besoin d’un peu d’échauffement. »

L’homme observa le Roi.

« Vous avez des questions avant le départ ? Il y en a pour un ou deux jours avant de rejoindre la tribu. Il y a des refuges un peu partout, nous nous reposerons sur place. »

Kynarth se tut en entendant le mouvement rapide d’un dragon. Il survola de très près le toit de la Griffe, le bruit de ses ailes se répercutant dans tout le modeste poste-frontière.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le lundi 23 décembre 2013, 04:41:22
« Les monstres seront bien le moindre de nos problèmes lors de notre traversée. »

Contrairement à ce qu’il aurait pu s’attendre de ses nouveaux compagnons, il ne se confronta pas à un rassemblement de miniatures de Tywill, arrogantes et insolentes, aussi le Roi sentit un nœud dans ses épaules se dénouer doucement, lui permettant de relâcher quelques muscles douloureux. Le jeune Commandeur prit même la peine de présenter ses compagnons et lui-même. Il salua le Commandeur plus sincèrement, puis se tourna vers le semi-géant pour lui présenter sa main. Le jeune géant hésita un moment, mais le regard insistant de son interlocuteur eut raison de sa réserve et il lui serra la main avec une poigne qui aurait brisé les os d’une personne normale en le temps de le dire. Un faible sourire apparut sur les lèvres du Roi, qui connaissait beaucoup de personnes qui, comme Hodor, ne pouvait que se réduire à quelques formes de communications à cause de leur simplicité d’esprit, puis il relâcha la main d’Hodor (ou plutôt s’en extirpa) avant de se tourner vers Nyoron. Cette homme le frappa surtout par son étrange ressemblance avec son propre père Darimon Sombrechant; des cheveux encore bien garnis, une bonne barbe, une posture encore droite malgré le poids des âges, un regard vif et malin. Il serra la main de l’homme en le regardant droit dans les yeux, visiblement étonné, avant de se secouer mentalement et s’autoriser un sourire plus agréable.

Il reprit sa place par la suite et regarda les personnes présentes.

« Je vous remercie de votre présence. Je dois cependant vous informer que je ne crois pas que les monstres communs en Sylvandell seront nos seuls problèmes pendant cette traversée. »

Le Roi inspecta rapidement la pièce et aperçut un banc non loin. Il s’éloigna un moment pour aller en faire l’acquisition et revint pour pouvoir s’y installer; avec cette longue marche, il avait mal aux jambes et il ne voulait pas rester debout plus longtemps car il savait que ses explications seraient plutôt longues.

« Avant d’arriver ici, j’ai reçu des informations venant d’une source plus ou moins fiable. Savez-vous qui est Althenos? »

Sachant qu’ils ne répondraient pas, car Althenos était une divinité propre à une race qu’aucun citoyen de Sylvandell avait bien pu entendre parler, le Roi ne les laissa même pas le temps d’y penser.

« Nous n’avons pas de divinité en Meisa. À la place, nous avons deux Êtres Originaux, des Créateurs, qui incarnent un concept bien défini. Althenos est le concept de la Mort, de la Destruction et du Renouveau sous forme astrale, ou un dieu. Il serait chez vous probablement connu comme « l’Oeil Aveugle », « Celui qui Voit dans l’Ombre » ou même « l’Inconnu ». Il fut l’instigateur d’un instant précis de l’histoire où le monde fut « nettoyé» de ses êtres vivants, ou du moins d’une grande partie. La plupart des religions en parlent comme le Déluge, mais je l’appelle la Purge. Dans notre histoire, une purge s’est produite, il y a très longtemps, à l’époque où toutes les races connus n’étaient encore qu’une petite poignée des habitants de ce monde. Pendant des décennies, les troupes d’Althenos, guidées par Jekhelv, dit le Roi Noir, ont harcelés les membres de la Première Race et les autres participants de la Résistance. Elle a été finalement évitée grâce aux actes héroïques commis par Uther, le tout premier Roi des Hommes. Il y a peu, suite à la Guerre des Trônes où nombre d’atrocités magiques et militaires ont été perpétrées, une seconde Purge a été lancée, mais grâce à une certaine compagnie de héros, Althenos a dû reporter ses plans à plus tard, car son commandant en chef a été prématurément renvoyé dans le monde des Morts, son domaine. »

Il regarda les trois membres présents de sa nouvelle compagnie, certains qu’ils ne l’écoutaient que d’une oreille; qui aimait les cours d’histoire qui relevaient plus du conte épique que de faits vérifiables? Cependant, après une telle introduction, il serait insatisfaisant qu’il se taise de suite. Il prit donc une nouvelle inspiration puis recommença à parler.

« L’Étoile des Présages est apparue, enchaina-t-il en faisant machinalement coulisser Ehredna dans son fourreau. Vous la verrez lorsque vous sortirez du château. À l’image d’une étoile à souhait, l’Étoile réalise la plupart des légendes folkloriques sillonnant le monde. Une fois qu’elle apparaît, l’Ogre des Collines descend pour dévorer les enfants dans leur lit s’ils ne sont pas couchés avant la tombée de la nuit, des vieilles sorcières apparaissent dans les bois et s’attaquent aux voyageurs égarés, les Sirènes charment les marins et provoquent les naufrages et la noyade des voyageurs de la mer et passer sous une échelle peut effectivement vous porter la poisse. Une poisse mortelle. »

Il se redressa enfin et fit disparaître le canapé avant de remettre Ehredna à sa taille et de réajuster son manteau sur ses épaules, posant son capuchon sur sa tête. Le pire, dans cette histoire, c’était que pour garder les enfants en laisse, beaucoup de parents transmettaient volontairement des contes et légendes à ceux-ci pour se faciliter la vie, et finalement, la peur qu’ils cultivent en eux risque de causer leur décès. Lors de la première apparition de l’Étoile Sanglante, le Roi lui-même avait été confronté à un Dévoreur des contes de son enfance, une créature particulièrement vicieuse qui avait une apparence bien innocente, mais qui se nourrissait avec  voracité de la magie de n’importe quel mage à proximité, et puisqu’il s’agissait d’une créature agréable, il était d’autant plus difficile de se décider à la tuer.

« Plus les légendes sont répandues et répétées, plus les atrocités de l’Étoile se multiplient et deviennent plus dangereuses.

Sur ces mots, le Roi regarda le guide.

« Avant de partir, connaîtriez-vous un érudit connaissant quoi que ce soit au sujet du Roi Cramoisi? Aussi, j’aimerais savoir si ceci vous évoque quelque chose. »

Le Roi glissa alors une main dans son manteau et fouilla à sa ceinture une des nombreuses poches qui contenaient ses quelques effets personnels, et il en tira un morceau de tissu qu’il présenta par la suite au guide. Il s’agissait du message que Wallin lui avait laissé avant d’être enseveli sous les débris des galeries sous la Crypte. O-NLPR-E. Il avait passé des semaines à réfléchir sur la signification de ce message, mais rien ne lui venait, malgré son grand savoir. Il avait même parcouru la liste complète des codes militaires nexiens, mais il n’y avait rien qui pouvait l’aiguiller. Il espérait qu’un érudit sylvandin pourrait le guider, mais malheureusement, il n’en connaissait personnellement aucun. Les rares sylvandins étaient qu’il avait croisé étaient soit assez vieux pour lui reprocher la perte d’un parent ou assez jeunes pour avoir entendu d’horribles histoires à son sujet. Les conteurs avaient la fâcheuse habitude d’exagérer les histoires et transformer même les victimes en terribles monstres qu’il fallait éradiquer. Ainsi, plutôt qu’un monarque habile à défendre son Royaume, Kah’mui était devenu un tyran sanguinaire qui maintenait son peuple en esclavage, qui s’appropriait de terribles armes magiques pour agresser les membres de l’Empire. Des foutaises, bien entendu. À l’exception peut-être des armes magiques; les reliques Ashanshas étaient, selon le Roi, beaucoup trop dangereuses pour être laissées entre les mains de créatures sujettes à la guerre de procuration. Quoi qu’un bon conteur pourrait facilement transformer la peste de Meisa en punition divine contre un peuple impie, ce qui lui rapporterait certainement beaucoup de pièces d’argent.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le mardi 24 décembre 2013, 02:28:38
Avant d’y aller, le Roi de Meisa crut bon de divertir ses hôtes en leur racontant une histoire concernant Althenos et l’Étoile des Présages. Bras croisés, Kynarth écoutait ce qui ressemblait à un assemblage de contes pour enfants. Où voulait-il en venir ? Tout ce que Kynarth retint fut que le Roi était une personne superstitieuse. Kynarth ne croyait pas aux présages, ni aux divinations, ou aux incantations. Les hommes forgeaient leurs destinées eux-mêmes, et, quand bien même ils étaient prédestinés à devenir quelque chose, ils conservaient toujours leur libre-arbitre. Dès lors qu’un individu avait la possibilité d’avoir le choix, un présage n’était rien de plus qu’une coïncidence. Il n’y avait pas lieu d’y prêter foi, d’y accorder la moindre importance. Kynarth interpréta ce monologue comme une manière de leur dire de se méfier... Ce en quoi Kynarth comptait, de toute façon, s’y employer. Si Gregor se trouvait bel et bien dans les montagnes, alors il avait intérêt à redoubler de prudence. Nyoron, de son côté, restait silencieux. Kynarth avait du mal à l’imaginer superstitieux.

Kah’mui leur demanda ensuite s’ils savaient des choses au sujet du Roi Cramoisi, et leur présenta ensuite un mot... Ou, plutôt, quelque chose qui ressemblait à un mot : O-NLPR-E. Kynarth allait dire quelque chose lorsque Cirillia se rapprocha du groupe.

« Alors, les gars, on y va, ou vous comptez vous astiquer le poireau en matant mon cul ? »

Hodor restait dans son coin, essayant visiblement de compter ses doigts, ou de dessiner avec eux des figures dans le ciel. Kynarth résuma brièvement à Ciri’ ce que Kah’mui avait dit, mais Cirillia manifesta son vif intérêt en s’asseyant sur une chaise à côté, plantant ses pieds sur la table.

« Appelez-moi quand vous aurez fini de discuter comme des grands-mères acariâtres. »

Kynarth esquissa un léger sourire, sans rien dire, puis reporta son attention vers le Roi de Meisa.

« Le Roi Cramoisi... Ce n’est pas un mot à prononcer à la légère en Ashnard, vous savez. Il n’est pas étonnant que vous ne connaissiez pas cette histoire, l’Empire n’aime guère en parler. Le Roi Cramoisi était jadis un Empereur. Un Empereur fou qui a transformé la capitale en un bourbier infâme, torturant, tuant, massacrant n’importe qui, instaurant un régime paranoïaque et totalitaire. Il dilapidait le trésor de guerre et l’armée impériale en organisant des expéditions dans les quatre coins du monde, à la recherche d’artefacts magiques. »

L’Aballah, comme l’expliqua Kynarth, avait été à l’origine d’une guerre civile visant à le destituer. Les Sylvandins avaient soutenu les insurgés dans la guerre contre le Roi Cramoisi. Elle avait résulté par l’exil du Roi Cramoisi dans ses terres natales, qu’on appelait désormais les Malterres de la Discorde, et qui se situaient à l’extrémité de l’Empire.

« Je ne saurais que trop vous déconseiller cet endroit pour vos vacances, Seigneur Kah’mui, poursuivit Kynarth. Le Roi Cramoisi y rôde, et l’Empire, à plusieurs reprises, a organisé des croisades pour l’achever. Elles ont toutes échoué. Le Roi se terre dans son château, le Casse-Roi russe, et n’y tolère aucun étranger. Les Malterres sont un endroit sinistre, près du sentier menant au Mont Olympe. Vous qui êtes amateurs de légende, je suppose que vous connaissez celle-ci, n’est-ce pas ? L’endroit le plus hostile de tout Terra, où les monstres les plus rudes errent... On dit que quiconque réussit à traverser ces terres arrive aux pieds de l’Olympe, où des temples d’éternel beauté l’attendent, et que, s’il réussit à s’en extirper, et à gravir le mont Olympe, il côtoiera les Dieux. Gare à ne pas se tromper de chemin, ou, faute de Dieu, c’est le Roi fou qui vous accueillera. »

D’autres légendes affirmaient que le Roi Cramoisi veillait sur son trésor, une tour magique... Mais Kynarth n’y croyait pas trop. Le Roi Cramoisi était un sorcier qui, terré dans son château, s’était isolé du monde, après avoir été chassé. Il n’y avait rien de plus à en tirer. Un jour viendrait où il finirait par périr.

« Quant à votre énigme... Navré, ça ne me dit rien. Si vous voulez vous adresser à un érudit, c’est à la cathédrale de Sylvandell qu’il faut s’adresser. Vous avez remarqué la colonne de feu verte qui brille dans le ciel en vous approchant ? C’est le Feu de la Cathédrale. L’Omniprêtre, voilà à qui vous devez vous adresser. Ce vieil elfe est le chef de notre clergé, et, accessoirement, existait à la fondation de Sylvandell. »

Nyoron se mit alors à grogner.

« Bon. Je ne voudrais pas vous presser, mais, si on ne veut pas se geler les miches dehors en avançant dans la montagne, il vaudrait mieux se dépêcher. »

Kynarth hocha silencieusement la tête à l’attention de Nyoron.

« Pourquoi ces histoires vous intéressent-il ? Quel rapport avec cet... Althenos, ou cette étoile ? »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le dimanche 29 décembre 2013, 18:12:32
S’il n’avait pas été confronté à Kyrian, le Roi aurait pu croire que son homologue cramoisi était l’autre partie de son âme, égarée lors de sa venue au monde, car ils étaient tellement différents qu’ils semblaient avoir vécu la vie de l’autre dans un miroir. Le Roi avait écouté le jeune Commandeur parler avec attention, se tenant le menton entre le pouce et l’index, visiblement songeur. Le Roi Cramoisi n’était pour lui qu’un vieux souvenir du temps où il n’était qu’un jeune coq en amour avec l’aventure, mais il n’avait pas vraiment pu participer à cette révolution, car des affaires pressantes gardaient son attention rivée sur le Continent Inconnu; la Rébellion venait d’attirer les Arans dans un assaut inutile alors que ses troupes, pendant son temps en tant que Général de l’Armée Corvenienne, les prenaient à revers à grands tirs de flèches et de sortilèges de type mortier.

Ce qui le chiffonnait davantage, c’était les histoires de recherches d’artéfacts. Il n’était pas nécessairement au courant de la situation psychologique du tyran, mais quelque chose lui disait que pour un exclu de la descendance Ashansha, il était rare qu’une personne soit assez folle pour partir à la recherche des objets de puissance; surtout parce que les rares possesseurs de l’Héritage prenaient eux-mêmes des années à développer la capacité de ressentir les traces d’ancienne magie, et que pour les simples humains, c’était une tâche à la limite de l’impossible. Si quelqu’un était aussi désespéré à trouver les reliques, c’est qu’il était au courant de quelque chose et qu’il devait craindre que quelqu’un apte à s’en servir ne les utilise contre lui. Kah’mui lui-même recherchait ces objets, parfois légendaires comme Gungnir la Lance d’Odin, mais il les recherchait seul. Sur quelques dizaines d’objet, il en avait déjà récupéré une demi-douzaine, en comptant Eglendal et Ehredna.

À la fin du discours du jeune homme, le Roi avait retenu plusieurs informations, mais une seule lui semblait avoir une véritable importance pour le moment; l’Omniprêtre. La réputation du chef de l’étrange culte que vouaient les Sylvandins aux Dragons d’Or était pour la plupart digne de louanges; grand sage et conseiller éclairé de la cour de Sylvandell, il aurait été l’un des compagnons d’Erwan Korvander du temps de sa conquête du Royaume et depuis un fidèle ami de la famille royale. Hormis Nahayiel, l’énorme Dragon Noir de Meisa, le Roi ne pouvait se vanter d’avoir un allié particulièrement fidèle à sa lignée, qui d’ailleurs s’était plutôt dispersée depuis la fondation du Royaume. Il avait pensé consulter l’Elfe de Sylvandell au départ, mais il ne savait pas où le trouver, et puisque Tywill s’était fait une joie de le faire sortir de ses gonds, il n’avait pas trouvé en lui l’énergie nécessaire à lui demander la position du sage. Il s’apprêta à interroger le commandeur quand celui-ci le devança d’une nouvelle question.

« Pourquoi ces histoires vous intéressent-il ? demanda le jeune commandeur. Quel rapport avec cet... Althenos, ou cette étoile ?
- Pourquoi me poser des questions alors que vous savez que la réponse ne vous semblera pas crédible, Commandeur Kynarth?

Aucun signe qu’il puisse être en train de chercher à l’offenser ne se glissa dans son ton de voix. À la place, un sourire chaleureux se trouvait sur le visage du monarque. Kynarth démontrait un raisonnement plus qu’acceptable et un respect suffisant pour satisfaire le Roi, qui lui trouvait même un certain côté sympathique, mais son incrédulité risquait de lui coûter la vie

« Mais puisque cela vous intéresse; si l’Étoile est dans le ciel, je commence à me dire que l’arrivée de la Sorcière, la Peste en Meisa, l’implication des fanatiques du Roi Cramoisi dans les événements ont probablement tous un lien. Je n’ai pas encore toutes les informations pour confirmer mes théories, mais quelque chose à très grande échelle se prépare, et cette chose ne fera aucune distinction entre les nations, les races, l’âge ou le sexe. »

Il était fin prêt à partir; tout avait plus ou moins été dit, et pour ce qui restait à clarifier, ils pourraient discuter en route. Il comprenait qu’aucun de ces braves gens ne croient ses paroles, et il ne leur demandait pas leur compréhension; il avait besoin de leurs armes et de leurs cerveaux, de leurs connaissances. Le reste viendrait bien assez tôt. Il demanda à Nyoron s’il était possible d’ajouter un détour de dernière minute à leur trajet; il aimerait rencontrer l’Omniprêtre dont parlait le jeune Commandeur, et lui poser quelques questions. En tant qu’Immortel, il se doutait que cet Elfe avait déjà eu vent de sa venue; ceux qui comme lui bravaient le temps tendaient plus attentivement les oreilles lors de la venue de certaines personnes dans les environs. Il sentit quelque part dans un coin de son esprit une subite excitation; si l’Omniprêtre pouvait confirmer ses soupçons, il pourrait déjouer les plans de son ancienne épouse avant que celle-ci ne puisse réaliser ses plans, et la simple idée de réussir à lui voler dans les plumes le motivait; cette femme, autant en stratégie qu’en diplomatie, était l’une des rares personnes à pouvoir se vanter de supplanter les capacités du Roi de Meisa. L’idée de la vaincre lui donnait davantage l’envie de réussir.

Il adressa alors un regard à Cirillia. Elle était probablement le genre de femmes à avoir du mal à se faire des amies de son sexe en dehors de ses comparses militaires faute d’une personnalité plus féminine, mais dans son regard, il pouvait voir une femme en qui il pouvait avoir confiance. C’était peut-être son instinct d’ancien vagabond qui parlait, mais en cas de pépin, elle serait probablement l’une des rares personnes à qui il se sentirait confortable de confier ses arrières, alors qu’il ne la connaissait pas du tout, quoi que quelque chose dans ses traits lui rappelait quelqu’un, mais il ne pouvait dire qui; sa tête était tellement remplie d’informations qu’il en oubliait parfois quelques-unes. Alors qu’il passait à son côté, il répondit à la perche monumentale qu’elle avait pris soin de lui tendre avant son arrivée.

 « Votre offre est tentante, mais on s’en reparlera une autre fois, si le cœur vous en dit. En route, maintenant. »

Il n’était pas tout à fait au courant de la position des Sylvandins vis-à-vis de sa propre situation; combien exactement savaient qu’il était certainement plus vieux que leur arrières-arrières-arrières-grands-parents? Du coup, il avait été un peu pincé quand elle l’avait traité de grand-mère acariâtre. C’était une blague, il n’en doutait pas un instant, mais comme chaque fois que quelqu’un soulignait, volontairement ou pas, son complexe d’immortalité, il se sentit prendre à nouveau un coup de vieux. Finalement, en compagnie de Nyoron, il se dirigea vers la porte et ils quittèrent enfin la griffe.

Une Fois La Nuit Tombée

« Bon, inutile de se faire de faux espoirs; nous n’irons pas plus loin ce soir. »

C’était Serenos qui avait parlé. Traverser les montagnes à la nuit tombée était une erreur que beaucoup de voyageurs regrettaient une fois qu’ils l’avaient faite. Aucun membre de la compagnie n’était réellement épuisé, puisque ce n’était qu’une petite marche par rapport aux longs et pénibles déplacements de troupe militaire. Néanmoins, ils n’étaient pas au bout de leurs peines pour autant, car devant leur maigre progression de la journée, puisqu’ils étaient partis en retard par rapport à son échéance, ils allaient devoir accélérer le pas dès le petit matin pour pouvoir rattraper leur retard. En retirant cette journée du compte, il avait encore trois jours pour trouver la sorcière et prévenir les atrocités qu’elle manigançait. Entretemps, il devait comprendre la signification du message de Wallin, en espérant que ce mercenaire ne lui ait pas fait une dernière farce avant de mourir, et il était donc impératif qu’il rencontre l’Omniprêtre. Si Sylvandell était concernée et que Wallin était sur la même longueur d’onde que lui alors qu’il voyait sa dernière heure arriver, il n’y avait aucun doute possible; s’il y avait une seule personne en Sylvandell capable de comprendre ce message, c’était ce vieil Elfe. Peut-être que Wallin avait trouvé quelque chose qui leur assurerait un pas vers la victoire. Ou alors peut-être mettait-il trop de foi dans ce message et qu’au final, il faisait fausse route depuis le début; peut-être devrait-il délaisser ce message et ne rien en faire. Il ne pouvait s’empêcher de douter du mercenaire qu’il n’avait rencontré que trop brièvement pour pouvoir lui faire entièrement confiance, à lui ou à son jugement.

Le Roi n’emportait jamais rien avec lui. Ni tente ni couverture. À la place, il chercha un arbre avec de bonnes grosses racines près du lieu de campement pour ne pas se retrouver à l’écart et s’installa au creux de celles-ci, s’emmitouflant confortablement dans son manteau. Alors qu’il s’installait, il aperçut une nouvelle fois du coin de l’œil l’Étoile des Présages et il maugréa quelque chose qui s’étouffa dans son manteau avant de lui tourner le dos, mécontent, et de regarder les autres membres de sa compagnie. Hodor était de loin le moins encombrant de la compagnie; fort et beaucoup plus endurant que les humains, le géant portait les bagages du groupe aussi aisément que s’il ne s’agissait que d’oreillers de plumes. Nyoron pour sa part avait un sens de l’orientation et une mémoire impeccable, ce qui était quand même deux qualités requises lorsqu’on était guide, et il ne s’inquiétait pas de se perdre, même en territoire inconnu. Cirillia et Kynarth ne lui parlaient pas beaucoup, certainement parce que lui-même ne faisait la causette qu’avec Nyoron, mais ils lui semblaient digne de confiance, et la perspective de se retrouver face à des monstres ne semblait même pas les rendre anxieux le moins du monde.

« Je n’ai pas eu la chance de vous le demander… mais pourquoi avez-vous accepté de m’accompagner? Je ne crois pas que le Roi Tywill vous ait tordu le bras, sinon vous auriez été beaucoup plus désagréables, donc, j’en déduis que vous avez accepté de votre plein gré. »

[Je propose un assaut nocturne de monstres ou de Gregor, si tu veux o/]
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le mardi 31 décembre 2013, 01:59:15
L’eschatologie n’était pas un discours auquel Kytharn adhérait. Si on s’en référait aux prophètes, le monde aurait du disparaître depuis quelques milliers d’années. Or, force était de constater que cette bonne vieille Terra tournait toujours, et qu’elle ne risquait rien. Il ne dit rien suite à la remarque de Kah’mui, restant silencieux. Chacun avait le droit d’avoir ses propres opinions, après tout, et lui n’était pas venu ici pour débattre de la Fin des Temps. Le Roi se tourna vers Nyoron, afin de discuter de la possibilité de faire un détour pour aller voir l’Omniprêtre... Ce que ce dernier rejeta assez rapidement.

« Vous voudriez peut-être aller faire des emplettes à Nexus après ? rétorqua-t-il. Je m’en vais dans la minute, le trajet est long, et il nous faut rejoindre un refuge avant la nuit. »

Kytharn ne dit rien. Le Roi verrait l’Omniprêtre en revenant de son périple, on ne pouvait effectivement pas se permettre d’attendre plus longtemps. Il fallait y aller, et la route, effectivement, était longue. Dangereuse, serpentée, et délicate. Il s’avança vers la sortie. Cirillia, elle, jouait avec un couteau, le faisant tournoyer entre ses doigts, en attendant que le groupe démarre. Il fallait bien reconnaître que la parlotte la fatiguait, surtout si c’était pour parler d’astres, ou de conneries du genre. La remarque du Roi la fit sourire. Ciri’ planta ensuite le couteau dans l’écorce de la table, puis se releva.

Le groupe se mit ainsi en marche, Nyoron en tête. Hodor fermait la marche, les mains jointes dans son dos, ou pendant le long de son corps. Ils se retrouvèrent rapidement à longer un précipice vertigineux et gigantesque. Ils avançaient sur le flanc de la montagne, sur un sentier escarpé. C’était la route où on balançait généralement les plus terribles criminels sylvandins. Ils étaient enfermés dans des cages austères, et les corbeaux venaient lentement les dévorer, les cages pendouillant dans le vide. C’était le sort qu’on réservait aux traîtres. À droite, la roche ; à gauche, une vue improbable sur la chaîne de montagnes, qui s’étendait au loin, avec un ravin gargantuesque entre les deux. C’était ici, dans ce ravin, que le fleuve de Sylvandell prenait sa source. Il y avait ainsi un énorme lac, le lac de Sylvandell. L’eau avoisinait les 0° Celsius, toutes saisons confondues, rendant toute baignade improbable. Plusieurs dragons volaient paisiblement, et le soleil était haut dans le ciel.

Ils longèrent ensuite une forêt, à la lisière du Territoire des Dragons, pour rejoindre une grande plaine. Les paysages étaient magnifiques ici, même Ciri’ devait bien le reconnaître. Elle était toutefois nerveusement braquée sur les dragons. Elle avait rejoint Sylvandell en essayant de tuer l’un d’entre eux, après tout. Ce n’était pas le genre de choses qu’on pardonnait aisément, et son traumatisme d’enfance lui revenait fréquemment à la figure. Quand les dragons se rapprochaient de trop près, elle portait la main à la garde de ses épées, prête à agir. Un réflexe idiot. Face à un dragon, une arbalète était bien plus efficace qu’une épée, mais Ciri’ avait surtout l’habitude d’affronter des ennemis au sol. Son arbalète à répétition était avec elle, attachée le long de sa ceinture, ses deux épées jointes dans le dos, en croix. On avait pour habitude de porter les épées à hauteur de la ceinture. Ciri’, par ce choix, adoptait le style de combat de ces guerriers mutants chasseurs de monstres, les sorceleurs.

« Ne vous en faites pas, lui glissa Kynarth, ils ne nous feront rien.
 -  C’est pour eux que je m’en fais, si jamais ils devaient tenter quoi que ce soit... »

Les dragons volaient assez près, et certains, juchés sur des pics rocheux en hauteur, les observaient silencieusement, montant la garde. C’était leur territoire, et quiconque osait s’y aventurer risquait l’hostilité des dragons. Il n’y avait pas vraiment de sentiers ici, rien d’autre que la nature sauvage, et il fallait donc se fier à Nyoron pour ne pas se perdre. Le groupe s’enfonça dans la forêt, à nouveau, avançant le long des arbres, suivant des chemins en pente. Nyoron semblait avancer totalement à l’aveugle, se fiant à d’obscurs points de repère. Ils arrivèrent finalement au-dessus d’une petite cascade, utilisant un pont en bois bâti là il y a fort longtemps. Des cervidés gambadaient dans cette forêt, constituant le mets de choix des dragons. Cirillia crut également voir, brièvement, des lapins et des écureuils. Il faisait relativement froid, et le groupe continuait à avancer.

Ils s’enfoncèrent dans la forêt pendant plusieurs heures, et, quand ils en ressortirent, ce fut pour arriver dans un petit espace clos, une sorte de clairière d’où on ne pouvait voir le soleil. Deux épais murs les entouraient, et il y avait une faille permettant de passer. Le groupe s’enfonça dans un long corridor escarpé et étroit. Cirillia devait faire attention, car certains rochers étaient glissants, et elle s’appuya à plusieurs reprises sur le mur pour éviter de glisser. Après ce dédale rocheux, une autre forêt s’annonçait, et un dragon vert apparut soudain, poussant un rugissement.

« Les dragons veillent sur nous... » commenta Nyoron en souriant.

Le soleil commençait à se coucher, et ils s’avancèrent dans la suite de la forêt. Nyoron pressait le pas, visiblement soucieux de rapidement atteindre le refuge. Malheureusement, le froid s’abattait, et la luminosité déclinait de plus en plus. Continuer ne serait guère prudent. Nyoron rejoignit donc l’avis du Roi par un grognement.

« On va camper dehors. »

Hodor leur ramena assez rapidement de grosses bûches, que Nyoron alluma. Ils s’étaient arrêtés à une petite clairière dégagée. Les murs épais de la roche couperaient les vents froids, les protégeant du froid nocturne de la montagne. Ciri’ se malaxa les mains, et s’assit à côté du feu, dont les hautes flammes dansaient dans le ciel. C’est à ce moment que le Roi de Meisa la rejoignit. Kynarth était à côté d’elle, et elle ignorait pour qui la question était adressée :

« Je n’ai pas eu la chance de vous le demander… mais pourquoi avez-vous accepté de m’accompagner? Je ne crois pas que le Roi Tywill vous ait tordu le bras, sinon vous auriez été beaucoup plus désagréables, donc, j’en déduis que vous avez accepté de votre plein gré. »

Kynarth esquissa un sourire, et répondit rapidement :

« Bien que je sois Commandeur, je manque encore un peu d’expérience. Et je connais bien ces montagnes. Je me suis porté volontaire pour ces raisons, et parce que je n’avais pas envie de m’ennuyer, ou de me lancer dans une nouvelle quête qui m’emmènerait loin d’ici. »

Des raisons tout à fait avouables. Ciri’, elle, se contenta de hausser les épaules.

« Je n’avais pas envie de me faire chier à continuer à essayer vainement d’entraîner la Princesse à manier l’épée. Elle fait preuve d’une mauvaise volonté qui est tout simplement exaspérante. »

C’était aussi simple que ça. Cirillia se réchauffait les mains, quand, soudain, elle entendit les branches craquer. Hodor, qui était lourdement assis, se mit alors à grogner, et se releva lentement, attrapant une énorme bûche, au bout enflammé.

« Des Wargs ! »

On entendit alors des bêtes rugir, débarquant rapidement. Hodor se retourna subitement, et sa bûche heurta la gueule d’une redoutable créature, plus grande qu’un loup. Le Warg (http://img98.xooimage.com/files/1/8/7/warg-4303cc1.jpg) bondit en arrière, et sauta sur Hodor, plantant ses crocs dans sa chair.

« Hoooodooooor !! » hurla le demi-géant.

Le sang du demi-géant jaillit, mais sa peau était tellement épaisse que les crocs du monstre n’avaient fait qu’entailler légèrement sa peau. Son autre main saisit le Warg par la crinière, et le balança contre un arbre. Cirillia et Kynarth ne pouvaient toutefois guère lui venir en aide, car d’autres Wargs les attaquaient, fonçant rapidement, et sauvagement. Des Wargs sauvages.

Il y avait aussi de ça, dans les hauteurs de Sylvandell.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le mardi 31 décembre 2013, 05:48:15
« Bien que je sois Commandeur, je manque encore un peu d’expérience, répondit le jeune homme à sa question avec un brin d’humilité qui n’échappa de faire plaisir au monarque étranger. Et je connais bien ces montagnes. Je me suis porté volontaire pour ces raisons, et parce que je n’avais pas envie de m’ennuyer, ou de me lancer dans une nouvelle quête qui m’emmènerait loin d’ici. »

Le Roi comprenait ce sentiment. Jeune, il avait lui-même quitté le foyer de son père dans l’espoir de voir de nouvelles choses. Mais quand il examinait plus attentivement les raison de son départ, il se surprenait à croire qu’au fond, il ne voulait que fuir ses devoirs de sorcier, devenir quelqu’un de « normal », car chez lui, les Sorciers étaient souvent des parias, des hommes et des femmes qui étaient regardés de travers lorsqu’ils marchaient dans la rue, et qui restaient pour la plupart du temps enfermés dans leur académie pour y développer leurs dons. La différence entre eux, c’est que Kynarth restait sur un chemin légitime et honorable; celui de l’expérience par le vécu. Pour sa part, c’est au contact de la magie noire et des arts occultes qu’il avait développé ses capacités, dans l’espoir de gagner la puissance nécessaire pour vaincre son oncle adoptif Owen le Nécromancien, qui devint plus tard une puissante liche au service d’Althenos. C’est d’ailleurs à cause d’Owen que celui-ci a trouvé dans les massacres perpétrés par ses suppôts la puissance de créer sa championne. Aujourd’hui, il avait tourné le dos à la plupart des facettes de la magie noire pour se concentrer sur une très ancienne forme de magie, oubliée depuis des millénaires à l’époque, que Mélisende lui fit autrefois le privilège de lui enseigner; la magie des Ashansha. Passé maître dans l’art d’user des différentes sources d’énergie et plus apte que quiconque à se servir des artéfacts anciens, il était aujourd’hui l’un des mages jugés les plus puissants de l’histoire, même si quelques-uns de ses accomplissements étaient hautement exagérés pour renforcer l’aspect « légendaire » de ses dons.

Il tourna alors la tête vers Cirillia, intéressé à entendre également sa réponse. Elle ne semblait pas avoir compris, au départ, qu’il s’adressait également à elle, mais elle lui offrit tout de même une réponse satisfaisante.

« Je n’avais pas envie de me faire chier à continuer à essayer vainement d’entraîner la Princesse à manier l’épée. Elle fait preuve d’une mauvaise volonté qui est tout simplement exaspérante.
-  Vous auriez dû voir la tête de feues mes filles lorsque je leur ai annoncé qu’elles devaient apprendre à se défendre. Mon maître d’armes m’a menacé plusieurs fois de démissionner, par leur faute. Finalement, cet entrainement, malgré leur mauvaise volonté, leur sauva la vie. Deux ans après, Ashnard envoyait ses soudards sur mes côtes.

Ce n’était pas un souvenir particulièrement joyeux pour le Roi de Meisa. À peine venait-il de mettre fin aux révoltes tribales de l’Île-Mère avec ses hommes qu’il devait regagner Eist’Shabal de toute urgence parce que le Général Arthas et ses hommes venaient de poser le pied sur la plage de la ville et massacraient tout le monde. À cette époque, il n’avait même pas encore commencé le développement de l’armée navale car les problèmes internes persistaient malgré le siècle passé, et donc comme toute forme de résistance maritime, il y avait quelques bêtes marines, dont un poulpe géant, qui avaient acceptés de défendre l’Île des bateaux ennemis. Après la trahison de son amante de l’époque, la Sorcière Ashansha Mélisende, avec qui il venait de renouer une relation amoureuse après des années de séparation, qui le dépouilla de ses pouvoirs avec un sceau Ashansha, Meisa fut brièvement occupée par Ashnard, à l’exception du Palais des Anciens, où ses enfants conservèrent une certaine forme de résistance, mais dès qu’il se libéra de la capitale Ashnardienne, échappant à Denna la Mord-Sith et les Forces Spéciales Ashnardiennes, il regagna l’Île, massacrant de ses pouvoirs nouvellement retrouvés les occupants Ashnardiens et en représailles, il avait regagné le continent avec cinq mille cinq cents soldats et massacré une bonne partie de la population côtière Ashnardienne et volé un grand nombre de leurs navires de guerre. Entretemps, Nexus avait déjà affaibli Ashnard par un assaut sur ses postes avancés, ce qui avait forcé Mordred à rappeler ses troupes pour défendre le cercle intérieur de son royaume, et du coup, celui-ci se trouvait incapable de répliquer davantage. Sans raison, Kah’mui avait néanmoins rapatrié ses hommes en Meisa en ne laissant qu’un seul avertissement à Mordred, qui signa l’arrêt des hostilités mais également un grand ressentiment à l’endroit du Roi de Meisa; « La prochaine fois, je ne m’arrêterai pas à de simples raids côtiers », faisant comprendre que si Mordred tentait à nouveau un assaut militaire sur Meisa sans être absolument certain de son coup, son adversaire mettrait tout en œuvre pour saboter son pays, et la magie dont il était doté n’était pas non plus à prendre à la légère. Il avait les moyens, et il avait prouvé par ses massacres qu’il était capable de cruauté s’il le jugeait nécessaire.

Il adressa un sourire à la jeune femme quand des grondements attirèrent son attention. Instinctivement, il ne s’empara pas de son épée, mais plutôt d’un de ses longs poignards. L’objet, mesurant près de soixante-quinze décimètre, était anormalement long et visiblement utilisé pour les combats très rapprochés. Sa lame blanche aux reflets bleutés confirmait qu’il s’agissait d’une des incroyables armes produites en Meisa dont la vente était interdite dans les pays étrangers; plus solide encore que les écailles d’un dragon adulte sans perdre son tranchant impitoyable, c’était une arme d’une incroyable facture, forgées par les mains de maître des nains du Clan des Forgerons.

« Des Wargs ! »

À peine fut-il confirmé sur leurs assaillants que ceux-ci émergeaient rapidement de leurs cachettes et se précipitaient sur eux. Le Roi ne connaissait pas bien les Wargs, sauf ceux qui étaient spécifiquement dressés par les armées ashnardiennes comme combattants de première ligne, mais il savait d’avance qu’ils étaient beaucoup plus forts et dangereux que les loups de Meisa, qui étaient déjà de sacrées bestioles eux-mêmes.

« Hoooodooooor ! »

Le Roi eut tout juste le temps de se baisser pour éviter une énorme masse de poils puante qui passait justement au niveau de sa tête, s’écrasant brutalement contre un arbre. Il lança un regard chargé d’avertissement vers le géant avant de sentir quelque chose lui foncer dessus pour de bon, le faisant décoller du sol. Il fut entrainé quelques mètres plus loin de ses compagnons avant que son sauvage assaillant le plaque brutalement contre le sol de terre. La bête tenta ensuite de le mordre, mais le Roi lui planta un pied dans la gorge pour le maintenir en respect, et il referma sa gueule à quelques centimètres de son visage, laissant au passage remarquer au monarque à quel point les membres de son espèce avaient une haleine nauséabonde. Le Roi posa une main sur la truffe de la bestiole et la chargea d’énergie incandescente, et une odeur de chair brûlée empuantit l’air bien assez vite alors que la créature reculait en gémissant de douleur. Kah’mui en profita pour se redresser et de faire voler son poignard vers sa main avant de le ranger. Étant immortel, il ne craignait aucune blessure, mais naturellement compétitif, il trouva soudainement plus intéressant de combattre la bestiole à main nues. Lorsque la bête se sentit prête à nouveau à combattre, le museau moins endolori, elle se prépara à charger. Le Roi se tenait devant lui, bien en garde et patient. Quand la bête se jeta sur lui, il sauta de côté brusquement et l’agrippa par la fourrure avant de se servir de sa force magiquement amplifiée et le balancer contre l’un des murs de pierre et la bête se retrouva écrasée contre celui-ci, avant de s’effondre sur le sol, sans vie.

Il se tourna alors vers deux autres Wargs qui venaient de sortir des bois et il tira Ehredna de son fourreau, en garde. Évitant le premier d’une roulade sur le côté, il profita qu’ils soient côte à côte pour trancher la patte avant droite du deuxième, qui, faute d’une patte, se retrouva désarçonné et il s’écrasa sur le sol, tête la première, et fonça dans un autre mur. Il n’était pas mort, mais privé d’une patte, le Roi étranger ne doutait pas un instant qu’il venait de ruiner son esprit combatif pour de bon, se tournant vers l’autre membre de la meute qui venait vers lui à toute vitesse, ignorant superbement la blessure de son compagnon.

«Des Dragons, des Wargs et puis quoi encore? Vous avez vraiment de sales bêtes en Sylvandell! commenta-t-il en évitant la morsure de la bête, contre-attaquant d’un coup de pommeau sur la truffe, brisant celle-ci sous l’impact. La prochaine fois, ce sera quoi? Des femmes-araignées? »

En Meisa, les créatures les plus dangereuses n’étaient pas les Dragons. Ceux-ci étaient certes très menaçants, mais ce n’était rien en comparaison d’une certaine espèce qu’on ne retrouvait que dans quelques rares endroits du monde dont faisait partie Meisa; dans les cavernes isolées, par-delà les forêts touffues se cachaient le Domaine des Araignées. On ne parlait pas des petites bébêtes innocentes qui se promenaient sur les murs, non, on parlait d’énormes bêtes. Les mâles ressemblaient tous à d’énormes tarentules, mais les femelles… les femelles étaient dotés d’un tronc de femmes, pour la plupart sublime comme le Roi a pu le constater lors de son arrivée en Meisa, et la Reine en était certainement la plus belle et la plus venimeuse, ainsi que d’un abdomen d’Araignées doté de huit horribles pattes. Si Merigia ne s’était pas prise d’affection pour le Roi, la cohabitation entre les peuples aurait été impossible. Il les aurait probablement anéantis dans ce cas, mais présentement, elles représentaient surtout l’une des rares sources de médicamentations; si leur venin était fatal, une fois bien traité, il formait un formidable remède à la plupart des maladies, et Kah’mui s’était toujours arrangé pour en obtenir quelques fioles par semaine, au prix de la compagnie fortement particulière de la Reine des Araignées, dont l’humour macabre et le charme ravageur ne cessait jamais de le mettre très inconfortable.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le jeudi 02 janvier 2014, 01:51:21
Tomber sur des Wargs à Sylvandell n’était pas chose impensable. Connus pour être les montures des Orcs, les Wargs étaient de grands loups sauvages. Perçus par certains comme des anomalies de la nature, des sortes de mutations génétiques des loups, croisement improbable entre le chien et le loup, les Wargs étaient vus, par d’autres, comme de simples prédateurs, s’inscrivant dans la chaîne alimentaire. Les Wargs chassaient les biches, et les dragons chassaient les Wargs, s’en nourrissant. Parallèlement, les Wargs, comme les loups, étaient aussi susceptibles de chasser les hommes. Si Nyoron avait voulu rejoindre un refuge pour passer la nuit, ce n’était pas uniquement pour se protéger du froid, ou disposer de draps propres, mais aussi pour pouvoir échapper aux prédateurs de la forêt, en disposant d’un abri.

Un Warg bondit sur Cirillia, qui l’esquiva en roulant sur le sol. Ce faisant, l’une de ses mains attrapa son épée d’argent, et elle se releva rapidement, avant de frapper le Warg avec sa lame enchantée. La bête pousse un hurlement de douleur quand la lame s’enfonça dans son torse, formant une longue ligne pourpre qui fit éclore son sang. Le Warg bondit en arrière, rebondissant sur le sol, et se releva rapidement, crachant et sifflant, une lueur de haine dans les yeux. Ciri’ esquissa un léger sourire, jambes écartées, attentive, en position de combat.

« Viens... Viens, petite pute » lâchait-elle.

Les flammes du feu étincelaient sur son épée, et le Warg, blessé, entreprit de se replier prudemment. Un autre Warg jaillit sur la gauche de Cirillia. Il était massif, et sa gueule plongeait vers sa nuque. Ciri’ l’évita en tournoyant sur elle-même, les griffes du Warg effleurant son corps, entaillant ses vêtements résistants. Elle brandit bien haut son épée, et l’abattit sur le flanc du monstre. La blessure n’était pas très profonde, du fait de l’épaisseur du Warg, mais amplement suffisante pour le faire saigner, sa fourrure se dardant de gouttes de sang.

Les deux épées de Cirillia avaient deux fonctions différentes : une épée en acier, contre les humains, et une épée en argent, contre les monstres. Ainsi fonctionnait le style de combat des sorceleurs. En ayant les épées croisées dans le dos, lors de sa roulade, Ciri’ avait aisément pu récupérer son épée, et être ainsi prête au combat en se relevant. Ce simple geste lui avait permis d’économiser de précieuses secondes, secondes qui lui avaient permis de frapper le premier Warg, une blessure fatale, probablement létale. L’autre Warg se voulait un peu plus prudent, rugissant devant Cirillia. Kynarth, de son côté, affrontait également des Wargs. Hodor en affrontait trois d’entre eux. Sa taille massive en faisait naturellement, aux yeux des monstres, l’ennemi principal. Leurs solides dents peinaient à pénétrer sa résistante peau. Hodor en attrapa un par la queue, et l’envoya se fracasser sur le sol, avec une force colossale. Le doux semi-géant, calme et paisible, d’allure enfantin, face à l’adversité, devenait une bête de guerre furieuse et invincible. On comprenait mieux pourquoi il avait fallu toute une garnison pour maîtriser Hodor, la première fois que les Sylvandins l’avaient croisé.

L’un de ses pieds heurta le flanc d’un Warg, alors que l’un d’entre eux bondit dans son dos. Il enfonça ses griffes contre sa chair, tout en mordant dans son cou. Hodor hurla de rage, et tituba. Sa main gauche heurta un arbre, et il se retourna, son dos longeant le tronc. Le Warg se reçut ainsi l’arbre, et tomba sur le sol. Le sang s’écoulait de la nuque d’Hodor.

« Ils sont toute une meute ! » s’alarme Kynarth.

Ciri’ voyait bien la situation. Nyoron, bizarrement, n’était attaqué par aucun Warg. Son bâton était planté dans le sol, et l’extrémité brillait étrangement, ainsi que le talisman sur sa poitrine. Ses yeux étaient clos, et, quand il les rouvrit, ils étincelaient. Le guide-magicien prononça alors une formule magique, et l’orbe magique incrustée dans son bâton résonna, formant un cône lumineux qui se leva en hauteur, s’érigeant à quelques mètres de hauteur de Nyoron, avant d’exploser en une myriade de cônes lumineux tournoyant sur eux-mêmes, et qui frappèrent les Wargs, les faisant hurler de douleur.

Les cônes lumineux étaient de redoutables arcs électriques qui heurtèrent les adversaires, formant une zone défensive de protection. Ils irradiaient d’une blancheur éblouissante, ce qui contraint peu à peu les monstres à partir, poussant de furieux rugissements. Le sort magique décrut peu à peu, jusqu’à ce que le talisman magique de Nyoron ne cesse de briller. L’homme rouvrit alors les yeux, et, peu à peu, on n’entendit plus que le grésillement du feu.

« Voilà pourquoi nous devions nous hâter de rejoindre un refuge, annonça alors Nyoron. Ces bêtes ne reviendront plus. »

Ciri’ soupira silencieusement. Sa lame était baignée de sang, et son corps avait également reçu quelques éclaboussures. Elle reprenait lentement son souffle, aux aguets. Hodor, de son côté, était blessé, et Nyoron se rendit vers lui. Il leva son bâton de magicien vers lui, et utilisa sa magie blanche pour le soigner, ce qui apaisa progressivement Hodor, évitant ainsi de le voir attaquer ses propres camarades. Quand Hodor était en état de rage profonde, il n’y avait qu’Alice qui, pour une raison qu’on ne s’expliquait pas, parvenait à le calmer. Le seul autre moyen était de l’assommer.

« Saloperies de bêtes, grogna Kynarth. Au lieu de les repousser, le feu les attire. »

Il secoua la tête. Des gouttes de sang perlaient également son visage, et il entreprit de lentement s’essuyer. Son regard croisa ensuite celui de Cirillia, et les deux s’observèrent, silencieusement. Sous le reflet chatoyant du feu, il y avait une sorte d’excitation bestiale qui remontait entre eux, excitation accrue par l’adrénaline qui battait encore dans leurs veines. S’il n’y aurait eu leurs autres camarades, ils auraient probablement sauvagement fait l’amour.

Au lieu de ça, Kynarth tourna la tête vers le Roi de Meisa.

« Sylvandell est une région dangereuse, en effet. Ce n’est pas pour rien que nous en interdisons l’accès aux non-initiés. »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le samedi 11 janvier 2014, 17:57:22
« Sylvandell est une région dangereuse, en effet. Ce n’est pas pour rien que nous en interdisons l’accès aux non-initiés.
-  Sage initiative, cracha le Roi en se redressant, avant créer une zone sans oxygène pour étouffer le feu.

Le Roi allait leur lancer une réplique cinglante comme lui seul savait les faire, mais quelque chose le retint. Comme si d’un coup, le monde entier lui donnait une impression d’hostilité, il se sentait épier de tous les côtés. Sa sensibilité très poussée face à la magie l’informait que quelque chose de puissant et de profondément malveillant avait posé son regard sur eux. Kynarth et Cirillia n’en ressentaient probablement pas les effets, mais même si son sens magique n’était pas près de celui du Roi, Nyoron devait avoir également ressenti cette oppressante atmosphère. Le Roi se redressa et sonda les environs d’un regard inquisiteur, mais aucune vie intelligente ou même animale ne s’était approché d’eux après l’assaut des Wargs. Quelque chose les étudiait, et le Roi reconnut l’aura malveillante d’une créature qui cultivait dans les ombres une haine infinie pour tout ce qui vivait depuis des millénaires. Le Roi fit signe à ses compagnons de se baisser le plus près possible du sol puis il relâcha son contrôle sur son corps astral, s’éveillant à l’entremonde.

Une fois éveillé, il vit qu’il n’avait pas tort; dans le plan astral, plusieurs milliers d’yeux le fixaient; les arbres, les pierres, les insectes, tous le regardaient avec leur sombre énergie sous l’influence de l’aura malveillante. Visiblement, son opposant cherchait à l’intimider, mais le Roi de Meisa n’était pas le genre d’homme à se faire avoir par de simples démonstrations d’illusions. Le Roi leva alors les mains et le vent, dans le monde réel, se mit à tourbillonner autour de son corps. Plus sa concentration augmentait et plus le vent devenait puissant, jusqu’à ce que, soudainement, le monarque de Meisa ouvre les yeux et tend une main devant lui dans un geste d’agrippement et resserre les doigts.

« Je te vois. »

Dès qu’il prononça ces mots, le vent s’écarta brusquement et un puissant son de tonnerre se fit entendre alors que le Roi déchainait son pouvoir dans le plan astral pour assaillir son opposant avec toutes ses forces. Il s’attendait à le voir désintégré sous cet assaut, mais l’entité se contenta de se volatiliser, échappant quoi que gravement touché à cet assaut magique. Lorsqu’il revint au monde de la matière, il lança un regard à ses compagnons. Ils devaient le prendre pour un fou, mais que lui importait. Son air grave, voire furieux, laissait présager que le moindre commentaire désobligeant ne resterait pas impuni, peu importe les conditions politiques qui restreignaient les actes des étrangers. Fatigué par l’usage de la magie, il rabattit sur son visage sa capuche pour masquer les cernes qui naissaient sous ses yeux ainsi que ses traits de plus en plus creusés par le manque de sommeil et de longues périodes d’effort qu’il s’imposait. Sans un mot, il se mit à marcher devant la troupe. Ses yeux, normalement d’un bleu pur et magnifique, étaient maintenant rouges comme des braises de flammes. Il ne savait pas ce que voulait son ennemi, mais devant tant de malveillance, il ne contenait presque plus sa propre noirceur, et il ne voulait pas alarmer ses compagnons; les gens avaient tendance à se montrer plutôt hostile devant les créatures dangereuses, et déjà que marcher près d’un sorcier de son calibre n’était pas particulièrement rassurant, s’ils pouvaient voir le mal qu’il contenait en lui, ils auraient tôt fait de se retourner contre lui.

Après quelques lieues de marche en silence, le Roi cessa d’avancer. Le refuge ne devait pas être bien loin, cependant, il n’était pas plus motivé que cela à aller le rejoindre. Il se tourna vers ses compagnons et leur fit signe de poursuivre devant lui.

« Prenez un peu de repos, à l’abri. J’ai besoin d’un peu de solitude. »

Les « accompagnateurs » du Roi n’avaient pas de doute à se faire; il n’était pas du genre à attirer des problèmes à autrui si cela ne servait pas ses intérêts. Le Roi avait une excellente réputation à ce niveau. Il regarda une dernière fois ses compagnons, sans les laisser voir ses yeux, avant de rebaisser la tête et se marcher en direction opposée du refuge. Comme gage de son honnêteté, il pressa contre la poitrine de Kynarth la garde de l’Épée Royale, avant de se pencher sur son épaule et lui murmurer à l’oreille.

« Ne la dégaine sous aucun prétexte, Commandeur. Cette Épée a en elle une haine cultivée soigneusement pendant des millénaires pour pouvoir terrasser n’importe quel ennemi. Sans le Sang, tu es sans défense contre son pouvoir; elle te dévorerait et ferait de toi son esclave jusqu’à ta mort. »

Ce n’était pas une menace, mais une mise en garde; étant porteur d’Ehredna depuis plusieurs siècles, il connaissait mieux que quiconque le pouvoir qui se cachait derrière cette lame noire. Dans les veines du Roi de Meisa se trouvait un sang beaucoup plus ancien que celui des Premiers Nés; non seulement descendant d’Uther le Gardien et d’Ehredna, il était le seul être sur cette planète à avoir eu la chance de recevoir le sang d’une authentique Ashansha; la Sorcière Mélisende. Sans la protection de ce sang magique et très puissant, un être humain normal ne pouvait manier l’Épée du Roi sans être presque instantanément subjugué par son pouvoir et perdre sa volonté au profit de celle de l’Épée. Une fois qu’il fut sûr que le Commandeur avait compris ses ordres, il relâcha l’Épée, posa une main sur son épaule avant de se diriger vers le sentier en silence.

La magie en lui était agitée par cette confrontation inattendue, et le désordre intérieur était l’ennemi de tout bon magicien, et c’était d’autant plus vrai pour les sorciers comme le Roi, qui avaient une plus grande affinité avec les ténèbres que leurs compères magiciens. Pour regagner son calme, il avait besoin de quiétude, et la proximité avec des Sylvandins ne cessait de ramener à son esprit l’arrogance de leur monarque. Aux yeux de ses compagnons, il disparut dans la forêt. Une fois à bonne distance de tout être susceptible de le déranger, sachant que les bêtes ignoraient pour la plupart jusqu’à son existence, il s’immobilisa et ferma les yeux, s’efforçant de réguler sa respiration et de penser à quelque chose de positif. Au début, rien ne lui vint. Puis, en cherchant plus loin dans sa mémoire, un souvenir, aussi précieux qu’un diamant à ses yeux, lui revint en mémoire.

A -16 et quelques mois
Nexus

Les doigts de Nöly serrèrent les siens contre son ventre arrondi, dans une zone précise de son ventre. Ne sentant rien sur le moment, il crut un moment qu’il n’aurait pas la chance de constater par lui-même le changement qui s’opérait en elle, quand tout à coup, un petit coup frappa contre sa paume; quelque chose avait remué sous la peau de la noble femme. Un sourire ravi se dessina sur le visage du Roi de Meisa alors qu’il se penchait sur sa si chère amie pour la serrer dans ses bras avec chaleur, lui faisant part de ses félicitations et de sa propre joie de voir enfin un des nombreux rêves de la grande dame se réaliser, après autant d’années d’effort. Le Roi savait que la conception d’un enfant ne se faisait pas toujours aisément, mais il avait trouvé curieux qu’un couple aussi sain et solide que celui du Lion de Nexus n’avait pas encore réussi à produire un héritier, et lorsque Nöly s’était enfin annoncée comme étant enceinte, il fut l’un des premiers soulagés; il commençait à craindre que quelqu’un ou quelque chose neutralisait volontairement la fécondation de la Reine, ce qui l’aurait amené à faire enquête pour chercher un responsable. Visiblement, cela n’avait pas été nécessaire.

« C’est merveilleux, Nöly. Je suis très heureux pour toi.
- Merci, Sombre… Liam insistait pour que je vienne en Meisa avec lui, mais avec le bébé, je craignais devoir prendre le bateau.

Le Roi comprenait cette anxiété. Les enfants à venir étaient rarement très résistants, et la vie en bateau n’était guère appropriée à leur bon développement. Ils auraient pu lui épargner un voyage en bateau, mais en tant qu’expert, il savait que la magie et les bébés faisaient rarement bon ménage, surtout que téléporter une personne qui n’était pas soi-même était déjà très difficile, il devait avouer qu’il n’oserait pas tenter l’expérience avec une femme enceinte; une erreur de calcul ou même de prononciation et l’enfant risquait de ne pas atterrir au même endroit que sa mère. Il prit doucement la main de son amie, mettant un genou en terre et posa son front sur ses doigts. Dans sa tradition, ce geste démontrait à la jeune femme son estime et surtout sa profonde affection. Avec Liam… une bonne bagarre suffisait à démontrer son respect; il n’avait pas besoin de chercher dans le protocole Meisaen pour trouver une méthode plus civilisée. Et de toute façon, s’il cherchait à faire du protocole devant lui, il risquait fortement de le vexer.

Présent
Sylvandell, près du Territoire des Dragons

Le souvenir s’effaça tranquillement de sa mémoire, laissant place à l’habituel calme qui habitait son âme. Une culpabilité sans fond lui saisissait pourtant le cœur. Liam avait toujours été au courant de l’amour profond qu’il avait voué à son épouse, et plutôt que de lui en tenir rigueur, il avait considéré la chose comme la garantie de la loyauté de son ami envers sa femme, et il savait que quoi qu’il puisse lui arriver, Nöly aurait été en sécurité si le Roi de Meisa devait la prendre sous son aile. Il n’en eut jamais l’occasion, car très peu après la naissance d’Elena, Nöly et Liam lui avaient été ravis, et malgré son désir de se mettre lui aussi à la recherche d’un coupable, il fut lui-même considéré comme l’un des suspects, ce qui l’empêcha de se lancer sur la trace du possible régicide. Il se heurta même au refus de l’ensemble de la noblesse Nexusienne lorsqu’il demanda le droit de recueillir Elena en Meisa, où elle aurait pu être en sécurité jusqu’à sa maturité. C’est environ à ce moment-là que Meisa brisa ses ententes envers Nexus, et lorsque le Conseil de Régence lui demanda de leur ouvrir ses voies commerciales sous peine d’être considéré comme un ennemi de l’État, il n’eut droit qu’à une seule et unique réponse : « Venez, je vous attends ». Et Nexus ne s’en prit, finalement, jamais à Meisa.

Une fois de « meilleure » humeur, il quitta la forêt et reprit la route en direction du refuge. Il était presque arrivé, à une dizaine de mètre tout au plus quand, inexplicablement, une douleur intense lui prit la tête et il posa un genou en terre en se la prenant à deux mains. Une voix fantomatique s’éleva dans sa tête, hurlant une phrase, qui lui donna un énorme frisson.

« ALL HAIL THE CRIMSON KING! »

La douleur décupla soudainement et une vision horrifiante s’imposa à l’esprit du monarque de Meisa. Il vit d’abord Shunya, l’appelant à l’aide alors qu’un homme la violait et la tailladait d’un couteau alors qu’une dizaine d’hommes en capuchonnés s’abreuvaient de son sang. Il ne reconnut pas la silhouette en rouge qui l’agressait ainsi, mais lorsqu’il tourna la tête, il vit deux yeux d’un rouge de braise qui le fixaient. Selon l’angle des paupières, il pouvait aisément deviner le rictus qui s’y cachait, et cela en rajouta davantage à l’horreur qu’il en tira et sa colère. Puis, il vit la Sorcière Noire, le visage ensanglanté, accompagnée de Nyoron, Kynarth et Cirillia, et tous assaillaient une forme en rouge. La vision fut ensuite suivi par une autre, mais pas d’un futur possible; d’un passé bien réel; le visage sereinement résigné de Nöly alors que l’énorme raz-de-marée s’approchait du Royal Wing.

Lorsque la douleur s’estompa enfin, après les visions, le Roi toucha instinctivement ses yeux et sentit quelque chose de chaud sur ses doigts; il avait du sang sous les yeux. Saisissant une gourde d’eau, il se rinça les mains puis se nettoya le visage en vitesse avant d’entrer dans le refuge. Il n’était pas quelqu’un de particulièrement sujet aux visions et aux prophéties; de toute sa vie, il en avait eu trois. La première fut lors du décès de son père, la seconde une semaine avant la mort de Nöly et Liam et finalement ce jour-même. Ce qui l’angoissait, c’est que ces trois visions s’étaient réalisées, et ils avaient tous un rapport très puissant avec la magie noire. Une fois entré, il s’attabla et fit apparaître sur la table un réel buffet comme aucun voyageur n’aurait eu l’imbécilité de trimbaler avec lui. Et la nourriture était encore chaude. Le Roi agrippa immédiatement une miche de pain, le trempa dans une espèce de sauce rouge clair et l’enfourna violemment dans sa bouche avant de faire voler une cruche de vin vers lui et s’envoyer une bonne gorgée du liquide.

« Venez manger aussi, si vous avez faim, grogna-t-il sans vraiment s’adresser à personne. Il y en a assez pour tout le monde. »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le lundi 13 janvier 2014, 02:31:33
« Drôle de type, non ? »

Kynarth haussa les épaules. Ils se trouvaient dans le refuge de Nyoron. Dehors, la nuit s’était abattue comme une chape de plomb, et, en tendant l’oreille, Ciri’ pouvait presque entendre les hurlements des loups et des Wargs. L’épée du Roi de Meisa gisait dans un coin de la pièce, contre le mur, tandis que Nyoron vérifiait la consistance d’un feu. Le guide aurait bien utilisé sa magie, mais il faisait partie de ceux qui considéraient que, dans la mesure du possible, il fallait laisser les forces naturelles agir, afin de ne pas dépendre de la magie. Un feu déclenché par magie tiendrait, de fait, moins longtemps, qu’un feu naturel. Dans l’absolu, il utiliserait la magie pour faire démarrer les flammes. Près de l’âtre de la cheminée, il empilait de grosses bûches sous des brindilles et des morceaux de bois.

Ciri’ était assise à même le sol, dans un angle de la pièce, tandis que Kynarth nettoyait ses lames. Un léger silence planait dans le refuge, rompu par les craquements du bois quand Nyoron déplaçait les branches dans la cheminée. Il était tout à fait possible que les Wargs attaquent encore le Roi de Meisa, bien que ce soit, concrètement, peu probable. La meute qui les avait attaqués avait souffert, et il était peu probable qu’une autre meute ne débarque.

Hodor, quant à lui, était au fond de la cabane, pansant ses plaies avec des chiffons et des serviettes. Il avait saigné de manière impressionnante, mais la vitalité et la constitution du semi-géant étaient époustouflantes. Une véritable machine de guerre. Pour autant, Ciri’ sentait bien qu’il avait besoin de repos. La chasseuse de monstres ferma les yeux, en laissant ses pensées vagabonder. Du Roi de Meisa, elle passa vite aux Wargs. Elle en avait déjà affrontés plusieurs, au cours de ses pérégrinations, et ils étaient souvent utilisés par les Orcs. Ces derniers, curieusement, savaient comment les apprivoiser, et les utilisaient come montures. Ils étaient l’équivalent des chevaux, attrapant les pattes des étalons pour les déchiqueter. Des montures puissantes, rapides, et mortelles. Les Wargs existaient sous des pelages différents, et, dans la tradition de nombreux clans orcs, le chef d’un clan chevaucheur de Wargs portait un Warg blanc, créature massive, si lourde que certains conteurs affirmaient qu’on pouvait les confondre avec des ours.

« Tout ce que je sais, c’est que nous n’avons pas été assez rapides. Faire un feu en pleine nuit constituait une très mauvaise idée.
 -  Vous comprenez mieux pourquoi je vous enjoignais à partir le plus vite possible. Ces terres sont longues et périlleuses. »

Ciri’ se pinça les lèvres, et se releva alors. Elle remisa sa ceinture, tout en déambulant lentement. Le refuge comprenait une seule pièce : une table, et des lits de camp. La décoration était sommaire, presque inexistante. Il y avait un tonneau de provisions dans un coin, et une carte de la région. Ciri’ se rapprocha de cette dernière, tandis que Kynarth, de son côté, loucha sur le postérieur de la femme. Il rougit légèrement, et manqua de peu de se couper à l’une de ses dagues. Il grommela, espérant que personne ne l’avait vu. Nyoron pestait contre son feu, Hodor s’essuyait en baragouinant une comptine, et Ciri’ était occupée à regarder la carte. Avec un peu de chance, personne ne l’aurait vu.

En réalité, il ne pouvait pas voir que la jeune femme était en train de sourire.

Le feu se mit soudain à démarrer, et Nyoron se redressa, en souriant.

« Voilà qui fait plaisir ! »

La porte s’ouvrit alors. Les regards se tournèrent. Kynarth rangea sa dernière dague dans son encoche, avant de voir le Roi de Meisa... Qui n’était visiblement pas d’humeur à discuter. Ciri’, bras croisés, se rapprocha de la table. L’heure de manger allait sans doute venir, mais elle craignait que les denrées du tonneau ne soient vides ou épuisées. Une inquiétude bien fausse, en réalité, car Nyoron s’était chargé de les réapprovisionner, et s’imaginait déjà faire cuire la viande qu’il avait entreposé dans ce tonneau.

Comme pour empêcher Nyoron d’aller piocher dans ses provisions, Serenos tendit la main, et des denrées apparurent, comme par enchantement, sur la table.

« Sympathique, votre besace magique » commenta Kynarth.

Les quatre s’attablèrent. Hodor, de son côté, irait certainement manger un ou deux Wargs ce soir. Ils étaient plus consistants pour son estomac que la boustifaille étalée devant lui.

« Que pouvez-vous me dire sur Gregor, Kynarth ? demanda soudain Ciri’.
 -  Cette histoire vous intéresse ?
 -  Je vous avouerai ne pas savoir grand-chose là-dessus. »

Kynarth hocha lentement la tête, comme s’il comprenait la question de la femme, et entreprit de lui faire un compte-rendu. Gregor était le frère aîné de Sandor, et les deux étaient des Commandeurs. Ils étaient tous les deux nés à Sylvandell, et Sandor assurait la fonction de « Limier », un terme pour désigner le seul Commandeur qui devait perpétuellement rester à Sylvandell, afin qu’il y ait toujours au moins un Commandeur à Sylvandell. Gregor était un être massif, une véritable montagne, d’où son surnom de « Montagne ».

« Il est encore plus grand que notre Roi, c’est vous dire. Il porte un énorme maillet dans son dos, et se bat avec deux claymores.
 -  Deux claymores ?
 -  Gregor est tellement massif que cette longue épée, qu’on porte normalement à deux mains, peut être tenue dans une seule de ses mains. J’ignore ce qui a poussé Gregor dans la démence, mais ses exactions lors des raids et des campagnes militaires menées par Sylvandell irritaient de plus en plus la Commanderie Noire. C’est un être cruel et pervers, qui prenait un malin plaisir à égorger les civils. »

Kynarth lui expliqua ensuite que Gregor avait définitivement chuté quand la milice de Sylvandell avait réalisé qu’il avait commis plusieurs meurtres à Sylvandell, chez de jeunes femmes. Des femmes qui avaient disparu, et qu’on avait retrouvé dans sa maison. La milice avait tenté de l’arrêter, avec l’aide de deux Commandeurs, dont Sandor, mais Gregor avait réussi à s’enfuir.

« Il s’est enfui dans les terres sauvages, après avoir tué un Commandeur, et blessé Sandor... Sans parler des soldats. C’est une véritable brute, un monstre de guerre. En utilisant ses compétences et ses anciens contacts, il a fondé une compagnie de mercenaires. Je ne serais pas étonné qu’il ait juré allégeance à quelques forces obscures. »

Dit comme ça, ça paraissait presque aller de soi.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le lundi 13 janvier 2014, 22:08:10
« Tiens, Hodor, mon ami. J’ai pensé qu’un peu de jus de pomme te conviendrait. »

Le Roi avait déposé devant le colosse un grand tonneau bien lourd. Il ne savait pas si le demi-géant appréciait l’alcool, mais après ce qu’il l’avait vu faire lorsqu’énervé, l’Immortel ne désirait pas réellement le voir perdre son inhibition et qu’il ne perde plus facilement patience, donc, du jus de pomme devrait lui faire plaisir. Il adressa à l’être un sourire aimable avant de revenir à table. Il ne s’offenserait pas si le demi-géant dédaignait son présent, mais il s’en voudrait de ne pas au moins lui montrer une pensée; un fier combattant devait être aussi bien nourri que désaltéré après être allé au-devant de ses ennemis, et après ce qu’il venait de dépenser comme énergie, il ne doutait pas un instant que le brave garçon aurait besoin de se rassassier. Et puis, du jus de pommes était toujours goûteux que de l’eau, et plus nutritif aussi.

Malgré son humeur, il ne désirait pas démoraliser ses compagnons outre mesure, aussi tenta-t-il de s’armer d’un sourire qui se voulait sympathique. Une fois à nouveau à table, il écouta ses camarades parler tout en agrippant une saucisse qu’il piqua du bout d’un bâton en fer pour la faire griller sur le feu. Il n’avait pas réellement besoin de se nourrir, et il le savait, mais il pensait que la nourriture, outre son côté nutritionnel, était extrêmement importante pour la santé mentale. Du moins, il était sûr qu’elle l’était pour la sienne, car manger était une fonction propre au genre vivant, et cela lui donnait l’impression de ne pas être complètement indifférent aux beautés de la vie. Alors qu’il faisait lentement tourner la saucisse au-dessus du feu, il écoutait les histoires de ses camarades. Gregor Clegane. Serenos ne connaissait pas beaucoup de choses au sujet des Sylvandins, mais il ne pouvait ignorer la réputation d’un être aussi exceptionnellement puissant dont le nom suffisait à faire lever les voix dans une discussion. Il avait déjà affronté des êtres puissants au cours de sa vie, des trolls et des orcs bâtis comme pas deux, mais si les rumeurs concernant la Montagne n’étaient pas que des exagérations voire des bêtises, il aurait apprécié affronter en combat loyal cet humain d’exception. Mais les gens comme Gregor ignoraient tout de l’honneur et la droiture, ce qui forçait leurs opposants à requérir à toute leur ruse et leur savoir du combat pour se tirer d’un duel contre lui sans trop de souffrance.

Lorsque Kynarth acheva de décrire l’infâme personnage, Serenos jugea approprier de prendre à son tour la parole.

« Parfois, lorsqu’une personne sent que ses talents ne sont pas suffisamment pris en considérations, ou lorsque plus aucun défi ne lui semble suffisamment demandant pour avoir son attention, il se peut qu’il décide de prendre des décisions aux répercussions dramatiques pour que par la suite, il puisse prouver sa supériorité. Mais je doute qu’une personne comme Gregor Clegane ne se lie à l’Obscurité, en partie par fierté, et aussi parce que l’obscurité est la voie de la facilité, et si son but est de prouver sa force, de prouver qu’il est au-dessus de tous, il veut également le faire par lui-même, pas grâce à une quelconque force magique ou subtile. Et puis, les mercenaires détestent l’idée d’avoir à rendre des comptes à qui que ce soit, c’est déjà étonnant qu’ils arrivent à se rassembler sous les ordres d’une personne. »

La démence était souvent une notion très subjective. Les fous étaient simplement ceux qui dérogeaient aux règles de la norme, ou qui n’avaient aucun contrôle sur leurs décisions, alors que pour eux, c’était les autres qui étaient fous en raison de leur conformisme et leur soumission. Serenos, par exemple, refusait d’entrer officiellement dans la guerre entre Ashnard et Nexus, tout en restant ouvertement hostile à l’Empire. Cependant, il n’hésitait pas à s’aventurer en territoire Ashnardien s’il le jugeait bon, et parfois même d’engager des combats en territoire ennemi. Certains donc le considéraient comme fou, mais de son côté, il avait ses propres motivations pour agir ainsi, et plus souvent qu’autrement, ses décisions étaient menés par des raisonnements parfaitement logiques, quoiqu’ils restaient difficiles à expliquer à autrui.

« Ce ne sont, malgré tout, que des spéculations, je l’admets. Peut-être que Gregor a effectivement perdu la raison et qu’aucune logique ne puisse expliquer ses actes. Mais d’expérience, ce genre de personnes est tout aussi difficile à cerner que rare en ce monde. Tout le monde veut quelque chose, et cette simple volonté suffit à expliquer pourquoi cette personne n’est pas folle, simplement différente. Pour les Sylvandins, -encore une fois, pardonnez-moi si je parle en stéréotype, je ne suis pas très informé sur vos lois et votre religion plus que ce qu’il ne s’en dit hors du territoire- il vaut peut-être mieux être tué par un Dragon que tuer un Dragon. En Meisa, si un Dragon s’en prend à une personne, cette personne a parfaitement le droit de lever les armes contre la créature qui en veut à sa vie. Cependant, il est interdit de tuer librement un dragon doté d’intelligence. Les Wyrms, par exemple, sont chassés pour leurs écailles et leur langue, qui secrète un venin qui est utilisé dans la plupart des médicaments, mais comme elles sont principalement guidés par leur instinct et sont parfaitement incapables d’un raisonnement logique, elles ne sont pas protégées, alors que les Senryus, les Longs Corps, sont parfois même beaucoup plus intelligents que bien des êtres humains, et donc protégés par la loi. »

Il avait fait la remarque sur les dragons en regardant Cirillia. Il savait reconnaître une chasseuse de dragon lorsqu’il en voyait une, et il ne doutait pas un seul instant qu’une personne comme elle, qui gagnait sa vie ou prouvait sa valeur en combattant les reptiles géants, avait été regardée, ou même continuait d’être regardée, comme une parfaite cinglée dans une société où les dragons étaient considérés comme sacrés. Il lui adressa néanmoins un sourire, comme pour l’assurer qu’il ne lui adressait aucune offense. Il continua un bon moment à parler avec ses camarades avant de remarquer que la nuit commençait déjà à décliner et qu’il serait important qu’ils prennent un peu de repos. Il annonça donc qu’il allait prendre le premier tour de garde et les encouragea à manger à leur faim pour aller dormir par la suite, avant d’agripper Ehredna et de s’installer devant le refuge.

Dehors, il déballa quelques petits bijoux de surveillance qu’il avait monté lui-même; il posa au sol de petites billes, difficilement visibles au milieu des feuilles, qu’il avait enchanté, autour du refuge, puis il alla se chercher une bonne grosse pierre qu’il installa près de la porte pour s’y asseoir et tirer de son manteau un petit paquet de tabac ainsi qu’une longue pipe qu’il avait acheté à un petit groupe de marchants semi-hommes. Enfournant le tabac dans la petite chambre, il se servir d’une petite flamme magique pour embraser les herbes. Fumer la pipe était une activité qui ne réclamait pas beaucoup d’énergie, mais qui, étonnamment, permettait de passer le temps, surtout lorsque le Roi s’amusait à faire des formes avec la fumée qui jaillissait de sa bouche après chaque bouffée. À la base une invention des Ashnardiens, la pipe s’était retrouvée comme étant un objet majoritairement masculin avant l’invention de la pipe à opium, où les femmes de la noblesse y trouvèrent l’addiction parfaite à leur position des plus oisives.

Seul, il se mit à réfléchir à sa progression. Malgré sa préoccupation à l’égard de la Sorcière Noire, il se rendait graduellement compte que beaucoup de problèmes qu’il n’avait pas envisagés entouraient le retour de son ancienne épouse dans le monde des vivants. Le Roi Cramoisi semblait avoir aussi trempé dans les troubles qui avaient frappé son royaume. Une fois qu’il aurait réglé le problème avec sa défunte femme et récupéré Shunya, il pourrait s’intéresser plus sérieusement aux anciennes menaces qui continuaient leurs méfaits dans le monde. Tout ce qui pouvait potentiellement affaiblir les forces d’Althénos était un point gagné en sa faveur et celle du monde des vivants. Il aurait voulu tout régler d’un coup, mais il connaissait les méfaits de l’empressement; plus on manquait de patience, moins on voyait le tableau d’ensemble, et des erreurs fatales étaient commises à ce moment-là.

Il décida de changer de sujet de réflexion pour se tourner vers celui de Cirillia. Une femme comme elle ne se marierait certainement jamais, beaucoup trop amoureuse de sa propre liberté pour laisser qui que ce soit lui mettre des chaines, sauf peut-être à un guerrier aussi farouche que brûlant de passion sauvage. Il ne put s’empêcher de se dire qu’elle et son propre fils Alexander, tout bâtard qu’il soit, formeraient un duo des plus intéressants. « Par contre, s’ils devaient s’engueuler, je n’aimerais pas être à la place de celui qui serait chargé de les séparer… Douce Althéa, j’aurais pitié du mobilier… ». Il se surprit à ricaner, mais il s’arrêta très vite pour ne pas alarmer ses compagnons; déjà que beaucoup doutaient de sa raison, il aimerait éviter de leur confirmer leurs pensées.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le mercredi 15 janvier 2014, 02:15:58
Gregor préoccupait assez peu l’esprit de Cirillia. Elle ne l’avait jamais rencontré, et ce n’était pas un homme qui avait ravagé son village natal. Les dragons, voilà de sacrées bestioles... De vraies saloperies. Se promener à côté de toute une meute n’était pas pour rassurer Ciri’. Si ça ne tenait qu’à elle, elle les chasserait tous. Certes, Cirillia était suffisamment alerte pour savoir que tous les dragons ne réagissaient pas pareil, et que celui qui avait ravagé son village natal appartenait à une catégorie spécifique de dragons, les dragons noirs. Les plus fourbes, les plus cruels, des êtres pervers et abominables, qui crachaient un souffle noir, à l’image de leur haine. Des flammes noirâtres, magiques, beaucoup plus corrosives que le feu habituel des dragons. Les dragons dorés étaient leur opposé, car, comme en chaque chose, la Nature se voulait duale. Une force négative s’opposait à une force négative. Ciri’ avait traversé une grande partie de Terra pour retrouver le dragon noir. Elle avait entendu parler des légendes sur les redoutables dragons. Il y avait Fafnir, mais aussi la Calamité de Gilead, un terrible dragon noir qui sommeillait dans les profondeurs du royaume-charnier. Cirillia avait hésité à se rendre à Gilead, et avait choisi .Entre Sylvandell et Gielad, elle avait préféré un royaume vivant, plutôt que cette terre maudite.

*Je me demande si j’ai bien choisi...*

Les Sylvandins lui avaient dit qu’il y avait peu de chances qu’ils arrivent à retrouver ce dragon noir. Avec un peu de chance, il était mort, ou avait choisi d’hiberner, et ne se réveillerait que dans quelques siècles, pour envahir à nouveau des régions désolées, répandant son souffle meurtrier et abominable. Cirillia y songeait, alors que le Roi de Meisa l’observait, en lui parlant. Ilparlait de dragons. Elle ne répliqua pas, estimant que lui dire d’aller se faire foutre avec ces sourires à la con ne ferait pas très respectable.

De son côté, Hodor avait inspecté le jus de pomme offert par Serenos. Il avait trempé un doigt avant de lentement le lécher du bout des doigts. L’alcool était une chose qu’Hodor appréciait, mais, effectivement, la liqueur de cerise lui menait rapidement à la tête, et il pouvait alors causer quelques dégâts matériels. Pour le décourager de boire, il avait fallu qu’Alice le gronde. Ce phénomène amusait toujours les gardes. Hodor, ce mastodonte invincible, s’affaissait devant la petite Alice, qui ressemblait à une espèce de gamine. Hodor, quand il se sentait coupable, tombait sur les fesses en tortillant ses doigts, regardant partout, la tête basse, sauf dans les yeux d’Alice. Même Ciri’ trouvait ce spectacle... Troublant. Surtout quand elle voyait les piètres performances guerrières de la Princesse.

Après avoir trempé son doigt, Hodor attrapa le tonneau entre ses doigts, et le but cul sec, en reversant une partie sur son pull. Il balança ensuite le tonneau vide, qui ricocha contre le mur, et se donna une grosse claque sur l’estomac, avant de roter.

« Hodor ! Hodor ! »

Hodor n’était effectivement pas un semi-géant très éduqué. Cirillia émit un soupir, tandis que le Roi annonça qu’il sortait monter la garde.

« Ce n’est pas nécessaire, glissa Nyoron. Je dispose de glyphes protecteurs... Et, de toute manière, il y a Hodor. »

Hodor, en entendant son nom, le répéta à plusieurs reprises. Il était évident qu’il allait dormir dehors, tout simplement parce qu’il préférait l’herbe au bois ou à la pierre. Nyoron posa son bâton sur le sol, et murmura une mélopée, puis le bâton émit une lueur bleuâtre, une sorte de vague circulaire, qui dressa autour du refuge un glyphe de protection. Si un individu s’approchait, le bâton les avertirait, et lancerait des sorts de paralysie, plus ou moins efficaces. Ciri’ retira son corset ainsi que son pantalon de cuir, puis se glissa dans l’une des couchettes, sous le regard admiratif de Kynarth, qui loucha sur les magnifiques jambes de Cirillia, ainsi que sur ses belles fesses musclées.

Elle avait décidément tout pour plaire.

Ensuite, la nuit s’abattit.



« Oui, Maître... Naturellement, Maître... Je traverserais Sylvandell, comme vous l’aviez exigé... »

Dans les terres sauvages de Sylvandell, dans les profondeurs d’une grotte sombre, la Dame Grise (http://nsa34.casimages.com/img/2013/11/17/131117052019589999.jpg) parlait, jambes fléchies, devant une sorte de boule de cristal d’où s’échappait une vive lueur rouge pourpre. Elle était seule dans les profondeurs de la grotte. Celle qui avait un jour servi Meisa, avant de choisir de prêter sa cause à un maître infiniment plus puissant, s’entretenait avec un être malfaisant et cruel.

« Malrünn sera réveillé bientôt, glissait une voix jaillissant du cristal. Versez le sang de l’Innocente pour alimenter le Cocon.
 -  Je veille sur elle, il ne lui sera fait aucun mal avant notre arrivée à Tor-Karath.
 -  C’est dans votre intérêt. »

La Dame Grise hésita encore un peu. Elle avait accompli ce que son Maître lui demandait, car elle savait que tout ceci était nécessaire pour permettre l’éclosion du Cocon, la Grand-Œuvre du Maître. Pour autant, elle restait, malgré tout, assez nerveuse. Se pinçant brièvement les lèvres, elle réfléchit, avant de poursuivre.

« J’ai... J’ai ressenti une présence familière. Le Roi de Meisa me poursuit... »

L’image dans le bocal se troubla, montrant une image troublante. Son passé, le passé commun qu’elle avait partagé avec Serenos...

« Ne soyez pas ridicule. Vous fûtes jadis impressionnée par la force de cet homme, mais elle est insignifiante, maintenant.
 -  Je m’étonne juste de sa capacité à me poursuivre.
 -  Les représentants de l’ordre ancien se noieront dans un océan de sang et dans les larmes écarlates que le Ciel versera lorsque nous l’ouvrirons en deux. Rejoignez Tor-Karath avec l’Innocente, et versez son sang. »

L’image disparut rapidement. Le brouillard rouge s’effaça pour ne révéler rien de plus qu’une boule de cristal. Lentement, la Dame Grise se redressa, se retourna, et s’avança dans un coin de la grotte. Deux hommes apparaissaient silencieusement dans son dos, louchant sur le confortable corps de la Dame Grise. L’Innocente était là, endormie dans un sarcophage en verre, entourée de fleurs. Elle était nue, et la Dame Grise promena sa main sur le verre, un sourire sur les lèvres.

« Bien, bien... Venez à moi, mes hommes... »

Et ils vinrent, obéissant sans difficulté.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le vendredi 17 janvier 2014, 05:46:16
L’hostilité de Cirillia n’échappa pas au monarque. Il laissa donc tomber l’idée de faire la conversation avec cette personne. Ou avec un Sylvandin point. Meisa n’était peut-être pas le royaume le plus dangereux ou le plus hostile, mais au moins, les gens pouvaient discuter sans se faire lancer des regards agressifs pour une phrase. « Douce Althea, je croyais que les Nexusiens étaient hautains et les Ashnardiens agressifs, mais ces gens combinent les deux. » Il se contint dans un nouveau silence et se leva.

Malgré les dires de Nyoron, le Roi préférait veiller un temps à l’extérieur. Malgré les connaissances de l’homme, qu’il savait futé, il n’était pas sans connaître les nombreux défauts de la magie. Celle-ci était excellente lorsqu’il s’agissait de pièges mortels, car à moins d’être incroyablement chanceux, un sortilège meurtrier ne ratait jamais sa cible, mais lorsqu’il s’agissait de protéger des gens, il préférait ses propres yeux et son épée. Alors qu’il s’attendait à être encore un moment tranquille, Hodor sortit de la cachette et regarda autour avant d’aller se chercher un Warg mort quelque part plus loin. Le Roi étira malgré lui un sourire; la force phénoménale des géants mais l’intelligence des enfants. Les gens devaient croire ce grand nigaud dangereux, et même le rejeter, mais aux yeux de Serenos, il s’agissait d’un être dont la vie se résumait aux plaisirs simples et à une joie durable. S’il se fiait à son impression du géant, celui-ci ne devait probablement donner absolument aucune valeur à l’argent, et sa loyauté à toute épreuve envers sa Princesse en faisait une créature impossible à soudoyer. En tant que tel, Hodor était le meilleur protecteur qu’une personne puisse rêver d’avoir. Lorsque le géant revint après son casse-croûte, le Roi plongea sa main sous son manteau et en tira une énorme couverture en laine, la déposant près d’Hodor.

« Tuer ».

La vision du Roi se troubla et un voile rouge s’abaissa sur sa vue. Étourdi par une soudaine douleur au crâne, il porta la main à ses yeux et respira un peu plus fort, essayant de faire passer le mal de tête par l’oxygène. Aussi rapidement que la douleur apparut, elle se volatilisa, comme un mauvais souvenir. Le Roi secoua négativement la tête et laissa le géant seul à monter la garde, revenant à l’intérieur. Voyant que tout le monde était déjà couché, il s’approcha simplement du feu et continua de fumer la pipe. Il tira alors de sa poche un petit journal, une plume et un petit encrier. S’appuyant un bras sur la table, il se mit à écrire sa mémoire de ce jour. Il y fit un bref résumé des risques à rencontrer et de ses propres conclusions. Il avait la ferme conviction que si le Roi Cramoisi avait quelque chose à voir avec les récents événements, et que Kyrian lui prêtait main forte, c’est que ses intérêts, qu’il le sache ou pas, servait également les buts de l’Incarnation de la Mort. Il commençait même à se demander si le Roi Cramoisi n’était pas un Ashansha, ou du moins un des rares hybrides ne faisant pas partie de la Lignée du Sombrechant. Cela n’était pas complètement impossible, même si peu probable en raison du désir particulier des Ashanshas de ne laisser derrière eux que des héritiers mortels, et non pas des créatures comme Serenos qui survivraient et souffriraient des affres du temps. Une fois lassé de ses écritures, il laissa tomber sa plume, attendant que l’encre ne sèche, puis il referma son carnet avant de le ranger dans son manteau. En s’approchant d’une des couches libres, il accrocha celui-ci à un crochet avant de défaire les courroies qui maintenaient la partie supérieure de sa tenue de combat, révélant une musculature surprenante compte tenu de sa taille et surtout un nombre impressionnant de cicatrices. Certaines, profondes, formaient un relief sur sa chair. Pour un œil connaisseur, la plupart avaient été faites par de longues et laborieuses séances de tortures, alors que d’autres avaient été faites sur un champ de bataille. Il étira ses muscles endoloris par la route, puis il se laissa tomber assis sur le lit avant de retirer ses bottes et ses chaussettes, s’allongeant ensuite sans avoir réellement l’intention de dormir.

***

Du fait de sa carrière de serviteur du monde des morts, Kyrian était accoutumé à d’incroyables atrocités. Il avait même réalisé certaines d’entre elles sans même avoir ressenti le besoin de s’arrêter ne serait-ce qu’une fois parce qu’elles assuraient la progression de ses objectifs. Cette fois, par contre, cela n’avait rien à voir avec ses projets de prolonger sa propre existence en dehors du monde des mots; c’était du pur meurtre, une atrocité qui ne faisait que nourrir les dessins d’un homme purement malveillant, un être qui n’aurait même pas sa place dans le royaume du maître. Il avait regardé la Dame Grise un long moment parler avec cette maudite sphère pourpre avant de lui offrir son bras pour l’aider à se relever. Elle annonça qu’ils se mettaient en route et des huit êtres encapuchonnés qui les accompagnaient, quatre délaissèrent la formation pour s’emparer du sarcophage de verre et le soulever de terre, se flanquant sur les talons de leurs semblables. Quand ces derniers prirent la liberté de regarder le corps de sa maîtresse, le Chevalier leur adressa un regard particulièrement menaçant qui les dissuada de se permettre davantage. Une fois assuré de leur bon comportement, il dévisagea la Dame.

« Avec toutes ces discussions magiques, ma Dame, je crains que nous ne tombions très bientôt sur Serenos. Nous avions l’avantage en Meisa car il était seul, et que vos serviteurs ne sont pas de simples menus fretin, mais nous avons profité des effets de l’oisiveté de Meisa sur lui. Avec les embuches du chemin, il y a de grands risques qu’il nous pose de véritables problèmes à notre prochaine rencontre. S’il récupère sa vigueur combattive, je doute pouvoir lui tenir tête bien longtemps. »

Kyrian n’était pas d’un naturel nerveux. Ce qui arrivait à autrui ou même à lui-même ne lui importait que peu, mais il supportait très mal l’échec, et avec toutes ces conversations et l’usage constant de la magie, Serenos finirait par balayer le terrain et il n’aurait aucun mal à trouver le rassemblement de personnes mal intentionnées, même si grâce à la pureté de l’âme qui l’habitait malgré ses actes maléfiques, Kayla passait relativement inaperçue au radar de son ancien amant. Lorsqu’il regardait cette femme telle qu’elle était, le Chevalier semblait hésiter à la considérer comme une victime. La nécromancie était l’art de soumettre à son contrôle l’âme d’une personne, mais il était toujours possible à cette même âme de combattre le contrôle. Or, l’Âme de la Reine Sérénité ne luttait pas dans son armure de chair, elle attendait, patiemment, que le moment vienne. Quel moment? Il ne pouvait en être parfaitement sûr.

« Dites-moi. Que ferez-vous lorsque vous croiserez Serenos? Il ne reculera devant rien pour récupérer l’Innocente. Avez-vous élaboré une stratégie pour le neutraliser?

***

Le lendemain, le Roi maintint un silence de mort. Aglaë dirait que ce n’était que son humeur massacrante du matin, mais en toute honnêteté, il avait épluché tous ses sujets de conversation la veille, et avec les réponses qu’il recevait, il avait compris qu’il était inutile pour lui de chercher à se faire des amis en Sylvandell. « Je pourrais inventer des dictons, après cette expérience… » ronchonna-t-il mentalement en fixant le sol, la capuche sur la tête. Entre Tywill la brutasse, Kynarth le jeunôt, Nyoron le direct et Cirillia la susceptible, il n’y avait finalement qu’Hodor qu’il arrivait à apprécier. Mais il était inutile d’essayer d’engager une quelconque conversation avec celui-là; il n’était pas la Princesse; ses répliques basées sur son surnom ne pouvaient pas consister à une réponse à ses yeux. Pour une personne extérieure, lui adresser une parole reviendrait à essayer de lui parler au travers d’un mur de béton armé, et lorsqu’il était interrogé, il n’offrait qu’une réponse monosyllabique ou un grondement approbateur ou désapprobateur. « Tu es en territoire ennemi », voilà ce qu’il comprenait, et voilà tout ce que cette terre maudite par les Dieux lui faisait ressentir.

Silencieusement, et ce jusqu’à ce qu’ils atteignent les tribus, le Roi rêvassa du temps béni où Liam et lui parcouraient les territoires encore inexplorés de Meisa pour y découvrir soit des trésors incroyables ou des dangers des plus intenses, ce même temps où il serrait les doigts de Nöly ou parlait avec Jamiël et la petite Aglaë de la magie et des belles réalisations qu’il avait accompli à l’époque. Maintenant, le voilà qui courait derrière le fantôme d’une épouse défunte pour sauver une inconnue qui lui a préféré une traitresse pour arrêter une catastrophe dont il ne pouvait qu’entrevoir la gravité. Tout ça parce qu’une fois, Liam et Nöly lui avaient fait jurer de protéger Elena si quelque chose leur arrivait, et que du coup, tout ce qu’il pouvait faire pour protéger Elena, c’était éviter qu’une dégénérée ne mette le monde à feu et à sang simplement parce qu’une petite voix dans sa tête lui a dit de le faire. « Je croyais m’être débarrassé des nécromanciens depuis Owen… » grogna-t-il en pensée, alors qu’ils arrivaient à une première tribu. Soudainement, il s’immobilisa et renifla l’air.

« Ça sent le Sorceleur...  fit-il remarquer à mi-voix. »

Au cours de sa vie, le Roi de Meisa n'avait fait la rencontre que de trois sorceleurs, mais tous lui avaient rendu un fier service, avant de disparaître à la recherche de monstres à tuer. Ces moines guerriers aux capacités surhumaines avaient les compétences martiales presque qu'égales à ceux d'Alessa, la Matriarche de ses Meisaennes, mais possédaient un savoir, bien que réduit, de la magie, ce qui en faisaient des combattants redoutables. Des chasseurs de monstres professionnels, qui passaient leur vie sur les routes pour débarrasser le monde des créatures nuisibles, suivant un code relativement simple par rapport à qui et quoi ils étaient autorisés à tuer, ainsi qu'à des procédures de chasse particulièrement poussées. Si Serenos n'avait pas été Roi, il se serait peut-être même porté volontaire pour rejoindre cet ordre, qui remplissait parfaitement son rêve secret de liberté et d'excitation, mais Roi il était, Roi il resterait.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le dimanche 19 janvier 2014, 02:07:52
Ils partirent de bonne heure. La route était encore longue, et Nyoron ne voulait pas perdre trop de temps en palabres inutiles. Il espérait bien pouvoir regagner la tribu en fin de journée, en se dépêchant bien. Ciri’ fut également prête assez rapidement. Elle avait le sommeil léger, et il en fut de même pour Kynarth. Le Commandeur était aussi un militaire, et ces gens-là savaient se lever rapidement, sans faire traîner les choses.

« Vous pardonnerez votre odeur, vous pourrez prendre un bain une fois au village, annonça Nyoron. Pour l’heure, il nous faut avancer. »

Et ils avancèrent donc. Hodor avait dormi près de la cabane, et ferma, comme à son habitude, la marche, suivant le quatuor. Ils parlèrent peu, suivant Nyoron. L’homme connaissait la route, et, après plusieurs heures, le groupe quitta la forêt, pour s’engager le long de plaines glaciales, de sentiers escarpés filant le long de versants montagneux vertigineux. Cirillia finit par apercevoir des pics enneigés pointant dans le ciel. La température continuait à décroître, la faisant frissonner. En contrebas, au loin, par moment, elle pouvait apercevoir la rivière qui tirait sa source depuis le Lac, et qui serpentait à travers la montagne.

Le groupe traversa un pont à la fin de la matinée, les amenant, pendant de nombreuses minutes, à avancer dans un étroit dédale rocheux. Le vent sifflait le long des rochers, résonnant dans cette faille rocheuse. Mieux valait ne pas être claustrophobe. Hodor dut parfois se contorsionner pour réussi à passer, raclant la paroi, poussant des grognements, mais, après une demi-heure, le groupe réussit à passer. La faille rocheuse menait sur un autre sentier, au milieu des montagnes. Des dragons voletaient encore dans les airs, et Cirillia était de plus en plus convaincue qu’on les suivait. D’autres Wargs ? C’était tout à fait possible. Ce n’était pas dans leur style d’abandonner si facilement. Ces sales bêtes étaient têtues. Nyoron descendit un peu le sentier jusqu’à une sorte de plateforme avec des rochers, où ils firent la pause, se nourrissant rapidement de sandwichs.

« Votre connaissance de la région est fascinante, Nyoron.
 -  Il n’y a pourtant rien d’exceptionnel, rétorqua l’homme, modeste. J’ai grandi toute ma vie ici. Je connais ces sentiers comme ma poche. Nous menons bonne allure, c’est très positif. »

Ciri’ hocha la tête, rassurée. Nyroon avait confiance, et pensait qu’ils y iraient avant la fin de la journée. Lorsque le repas fut terminé, ils reprirent leur route, descendant le sentier. Ils longeaient un épais canyon, et empruntèrent un autre pont, qui semblait daté de plusieurs millénaires. Nyoron s’appuyait de sa canne, mais n’était pour autant guère lent, avançant sur une marche soutenue. L’air qu’il exhalait semblait lui faire du bien, et il ne s’inquiétait nullement, conservant une allure soutenue. Ils empruntèrent un long sentier filant le long de la montagne, en pente, particulièrement long. Le sentier les amena à apercevoir une autre forêt, où plusieurs dragons tournoyaient.

« Ils sont en train de chasser. »

On pouvait entendre les dragons rugir, forçant ainsi les animaux à sortir de la forêt, d’où ils venaient les faucher entre leurs serres, avant de remonter en hurlant, leurs griffes ensanglantées happant les bêtes capturées. Le groupe observa la scène, avant que Nyoron ne reprenne.

« Il nous faut traverser cette grotte. »

La route débouchait sur une grotte silencieuse. Nyoron se concentra, et le cristal de son bâton magique se mit à nouveau à luire, permettant de les éclairer. Ils avancèrent à travers une galerie glaciale, entendant le bruit d’une eau souterraine qui semblait jaillir des murs. La traversée de la grotte fut plus longue que ce que Cirillia pensait. Ils traversaient toute une montagne, et, parfois, des failles dans le plafond permettaient de voir des rayons de soleil. C’est ici qu’ils firent une pause, reprenant leur souffle pendant quelques minutes, avant de reprendre, jusqu’à pouvoir sortir de la grotte.

Le soleil avait alors bien diminué, mais, en sortant, on pouvait apercevoir, à proximité, un village. Il était entouré de murs en bois avec des miradors, et était à l’entrée d’une plaine enneigée. La température avait encore baissé, et la forêt s’arrêtait devant la neige, quelques arbres poussant lentement. De la fumée montait des cheminées, et, en observant bien, on pouvait voir des chariots traîner des rondins de bois.

« Nous y sommes » annonça fièrement l’homme.

Serenos se permit alors une remarque sur un sorceleur, ce qui amena Cirillia à tourner sa tête vers lui.

*Qu’est-ce qu’il veut dire par là ?*

La jeune femme en avait plein les bottes. Nyoron se mit à descendre, et elle le suivit, espérant bien pouvoir se reposer cette nuit. Le soleil était en train de descendre, et il leur fallut encore une demi-heure pour descendre le sentier, traverser la forêt, et se rapprocher ainsi du village, dont les portes étaient ouvertes.

Ils étaient arrivés.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le mardi 21 janvier 2014, 05:53:08
Et ils n’y virent que la mort.

Le pressentiment de Serenos se démontra être véridique; quelque chose d’inhabituel devait se produire ou s’être produit dans ce village avant leur arrivée pour qu’un Sorceleur juge qu’il y avait du pognon à se faire. Le Roi devança ses camarades et s’approcha d’un cadavre, qu’il retourna prestement pour voir son visage. Lorsqu’il vit les traits du mort, tirés vers l’arrière comme sous une bourrasque de vent, et la façon dont son visage était écrasé sur lui-même, il sût que cette mort n’était pas de cause naturelle, mais bien magique; quelqu’un lui avait magiquement écrasé le visage pour l’empêcher de respirer. Et qui que ce soit, il se fichait bien de ceux qui pourraient découvrir ses ravages; il n’y avait aucune tentative de masquer les traces. Il se redressa puis observa les vêtements de l’homme avant de hausser un sourcil, puis d’agripper l’homme par le bras et de le tirer vers le centre du village. Il s’empressa de rejoindre un autre cadavre à grandes enjambées, de s’emparer de lui et de le ramener au centre à son tour, juste à côté de son concitoyen. Il répéta le processus avec plusieurs cadavres puis il leva les mains avant de magiquement faire disparaître les vêtements de ces pauvres bougres, révélant alors leurs corps ensanglantés. En suivant les blessures, ses camarades constatèrent par eux-mêmes la raison de son étrange comportement. Sur le cadavre de ces gens se trouvaient un message inscrit dans le sang des victimes.

« All Hail the Crimson King… » Prononça le Roi, les bras croisés sur sa poitrine. « C’est d’un mauvais goût… »

Le Roi regarda ses camarades et leur demanda de rassembler les morts au centre du village et si possible de préparer des rites militaires pour les défunts; ces rites étaient normalement les plus rapides et moins propices à la perte de temps, mais cela ne les privaient en rien de l’hommage adressé. Pour Serenos, ces funérailles étaient l’équivalent d’une poignée de main au moment d’un départ; c’était poli, mais sans plus, et adapté à ceux qu’il ne connaissait pas ou qui ne le connaissaient pas. Le Roi était néanmoins très strict sur les massacres; il ne fallait oublier personne; trouver chaque victime pour que tous aient droit à ces adieux. C’était une tâche laborieuse, qui nécessitait de considérer aussi les trajets de fuite de ceux qui auraient tenté de partir avant d’être sauvagement tué. Le Roi s’affaira, avec entêtement, à cet ouvrage, ignorant superbement ceux qui voudraient qu’ils pressent le pas. Une fois que tous furent rassemblés, incluant quelques chiens et chats également massacrés, le Roi éleva magiquement un bûcher funéraire, fournissant des vêtements aux morts ainsi qu’un sommaire nettoyage magique pour les rendre présentable, et il les plaça sur le bûcher. Grâce à différentes énergies, il put même reconnaître certains couples, bien que parfois, à son grand embarras, un homme ou une femme se retrouvait étrangement avec deux partenaires. Il grommela d’agacement et embrasa sommairement les cadavres.

Après plusieurs minutes de réflexion, le Roi établit qu’aucune de ces gens n’était le Sorceleur, ce qui voulait dire que celui-là devait encore être en train de rôder dans les environs. Il pourrait décider de le pourchasser pour lui arracher ses informations, mais il ne voulait pas perdre plus de temps que ce qu’il en avait déjà perdu pour chercher un tueur de monstres qui n’aurait rien à gagner dans un tel massacre, sauf de l’argent, mais très peu vont jusqu’à blesser des humains pour s’approprier leurs biens légitimes, quoiqu’ils n’avaient que très peu voir aucun scrupule à s’emparer des biens volés, soit pour en récupérer la récompense. Le Roi se tint debout devant les cadavres restants puis alors qu’il allait en faire glisser un autre dans les flammes, un objet tomba au sol. Surpris, l’homme se pencha pour récupérer ledit objet et l’examina. Il s’agissait d’un petit médaillon. Mais il n’était pas attaché au coup de celui qu’il allait balancer aux flammes; il l’avait dans la main au moment de mourir. Il fit tourner l’objet entre ses doigts pencha la tête pour poser l’objet contre son front. Il y détecta immédiatement de la magie, mais pas seulement; cette magie était très puissante, mais pas en elle-même; quelque chose lui donnait une intensité considérable. Il ouvrit alors son esprit à cette force étrange et capta une âme d’une incroyable pureté, sans être celle d’une Innocente. Le Roi blémit puis serra le collier contre lui, comme pour rassurer la malheureuse enfermée.

Il regarda alors les ravages environnants et comprit que ce n’était pas l’œuvre d’un seul mage noir; un véritable Confrérie s’était rassemblée sur ce territoire et s’était servi de ce village comme le fermier de sa ferme; ils avaient récupéré toutes les âmes qui y vivaient. Il comprit alors que quelque chose de sinistre se tramait, et pas simplement à cause de son ex-femme et de sa troupe de malfaiteurs; quelque chose de noir se tapissait en Sylvandell, quelque chose que les Sylvandins ne pouvaient ignorer mais qu’ils ne considéraient pas à sa juste valeur la menace que ce « quelque chose » représentait. 

Le Roi avait une véritable haine pour la magie noire, spécialement celle utilisée dans l’optique de faire le mal; lui-même avait déjà utilisé l’occulte pour saper les efforts de ses ennemis ou changer l’issue d’une bataille, mais jamais pour simplement faire le mal. Lorsqu’il voyait de tels massacres sous ses yeux, il n’arrivait pas à croire que tous les pays n’étaient pas fournis en magiciens compétents capables de tenir les mages noirs en respect lorsqu’ils tentaient une catastrophe. Même à Nexus, malgré la gestion horrible du Conseil de Régence, Serenos n’avait pas à faire trois descentes par semaine pour éliminer un mage noir, alors qu’en Ashnard, c’était presque une prérogative de magicien d’être capable d’infliger d’horribles supplices à ses ennemis. Mordred passait encore, mais il avait espéré qu’Altarmaroth était le seul endroit où les mages noirs proliféraient librement. « D’un côté, ceux qui asservissent les corps des hommes et des femmes, et de l’autre, ceux qui asservissent les âmes de ces mêmes personnes. Ce monde est une vraie manufacture, gérée par des monstres assoiffés de pouvoir. Et parfois, lorsqu’il se regardait lui-même, il se demandait s’il était réellement différent des personnes qu’il pourchassait.

Il se tourna alors vers ses compagnons et les regarda, froidement, aussi impérieux que possible, les poings serrés. Ils pouvaient remarquer ses efforts pour contrôler sa colère, mais il ne pouvait pas trouver de paroles moins glaciales pour s’adresser à eux. Il commençait sincèrement à suspecter les Sylvandins de ne pas être que des fanatiques de Dragons.

(http://i56.servimg.com/u/f56/13/46/97/89/cavali10.jpg)
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le mercredi 22 janvier 2014, 01:06:50
Les chariots, en réalité, ne traînaient pas des rondins de bois. Ils étaient à l’arrêt, et c’est ce que Cirillia nota en se rapprochant. Il y avait des cadavres sur le sol, probablement les bûcherons du clan.

« Seigneur, non ! » s’exclama Nyoron.

Ciri’ se rapprocha, la main sur la garde de son épée. Kynarth se sentait également nerveux. Devant la porte d’entrée du village, deux hommes avaient été crucifiés contre le mur en bois, et un sinistre drapeau flottait à l’entrée. Un drapeau blanc avec un signe et des lettres tracées avec du sang figurant dessus. Un signe qui fit frissonner Kynarth, car il lui évoquait bien des légendes ashnardiennes, des contes dont on n’osait pas parler trop, de peur d’effrayer ceux qui les entendaient :

(http://files.myopera.com/rexbones/albums/9948132/All%20Hail%20the%20Crimson%20King.jpg)

Hommes, femmes, enfants, vieillards... Le clan était un mausolée, la ville un cimetière. Ils avaient tous été tués, massacrés par une quelconque force obscure. Vu les traces de sang coagulé, le massacre remontait à plusieurs jours, probablement juste après le trajet de Nyoron. Affecté, ce dernier avançait dans les maisons, observant les corps. Ciri’ et Kynarth s’approchèrent d’un cadavre dans une ruelle. Ils l’inspectèrent, et constatèrent rapidement qu’il n’avait pas été tué par des couteaux, ou par des poignards.

« C’est la magie qui les a tués... La magie noire est à l’œuvre ici, une magie puissante et sinistre. »

Cirillia sentit un frisson la traverser. La magie était un élément avec lequel elle était peu familière. Elle savait qu’elle avait des affinités magiques, comme en témoignait le fait qu’elle avait pu ingérer l’âme d’un dragon, afin de renforcer ses capacités, mais, pour autant, elle était loin d’être une magicienne. Kynarth, en tant que Commandeur, avait des affinités magiques renforcées, et maîtrisait même certains sorts. Lentement, il entreprit de rassembler les cadavres. Ciri’ décrocha ceux à l’entrée. Si certains avaient été égorgés, la plupart avaient tout simplement été tués par la magie noire, qui avait du faire rage ici. Le clan comprenait une cinquantaine d’âmes, et était désormais une ville fantôme, une ville qu’il allait falloir repeupler.

Nyoron était lourdement affecté, mais il savait qu’il fallait organiser un charnier. Les cadavres des morts ne pouvaient pas rester hors d’une tombe, car ils attireraient les créatures nécrophages. Il était, de fait, tout à fait possible qu’il y en ait déjà qui soient là, vu que les cadavres pourrissaient depuis plusieurs jours. Les cadavres regroupés, Kynarth et Cirillia essayaient également de savoir si les ennemis n’avaient pas laissé d’indices. Ils trouvèrent, dans la salle municipale, des coffres percés, ceux abritant les cartes de la région. Les agresseurs avaient du les ravir. Cependant, pourquoi avoir massacré tous ces gens ? Était-ce simplement par plaisir ? Kynarth semblait y réfléchir.

Le soleil vint à se décliner lorsque les cadavres furent empilés au cœur du village, sur un bûcher.  Malgré le froid ambiant de la région, Kynarth était tout de même en sueur. Cirillia déposa le dernier cadavre, le visage fermé. Cette scène lui rappelait une autre scène de son enfance, où les maisons brûlaient, et où il en restait plus que des cadavres et des cendres. Une image traumatisante, qu’elle retrouvait ici. Ces gens qu’ils traquaient étaient bien réels, et constituaient une menace sérieuse.

« Il va nous falloir des renforts, glissa-t-elle à Kynarth.
 -  Nous allons envoyer un corbeau pour avertir le Château de ce qui se trame ici. Ce ne sont pas que de simples brigands, des mages noirs sont impliqués dans un quelconque rituel sinistre. »

Kynarth allait poursuivre lorsque le Roi marcha vers eux. Nyoron était en train de réciter une prière pour les gens morts, et tourna la tête quand le Roi s’adressa à eux. Il semblait manifestement furieux, mais son ire n’était pas pour plaire à Kynarth. Devant le sous-entendu chargé d’accusation résidant dans ses mots, il se leva promptement, et posa une main sur son torse :

« Qu’osez-vous insinuer ? Que nous tuons nos propres hommes ? Les clans ont toujours été loyaux envers Sylvandell ! Il ne s’agit pas de ça.
 -  Ils n’ont pas été massacrés ainsi sans raison... Que cherchaient donc ceux qui ont commis ces atrocités ? »

Kynarth soupira, et secoua la tête.

« Kor-Tarath, lâcha-t-il. Je ne vois pas quel autre motif aurait pu les pousser à commettre telle abomination… »

Cirillia se mit à froncer les sourcils.

« Kor-Tarath ?
 -  Commençons par brûler les morts, et par nous assurer que le village soit vide. Ils sont là depuis plusieurs jours, il serait étonnant qu’il n’y ait pas des goules dans les environs. »

Cirillia n’avait jamais entendu parler de ce nom. Qu’est-ce que ça voulait dire ? Kynarth semblait savoir des choses, mais, pour le coup, se refusait à en parler, et préféra plutôt se diriger vers Nyoron. Ce dernier fit appel à sa magie, et une orbe de feu se matérialisa, avant de heurter les branches de bois, se mettant à répandre des flammes, qui se mirent à se répandre. Avec la magie, Nyoron s’assurait que les flammes ne débordent pas du bûcher. Et, tout en les brûlant, il se mit à prier à nouveau, priant pour que les aides des dragons guident les âmes des défunts vers les paradis éternels.

Il ne pouvait guère faire plus, de toute manière.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le vendredi 24 janvier 2014, 05:37:18
Les tuer tout simplement? Non. Mais peut-être les sacrifiez-vous pour alimenter les pouvoirs de vos mages noirs. Voilà ce que Serenos s’apprêtait à dire avant de percevoir dans le regard de Kynarth ce même désarroi, cette même colère que ce massacre lui suscitait. Le Roi savait qu’aucun dirigeant n’attaquerait son propre peuple sauf en cas de rébellion, car peu importe le pays, la caste ouvrière et marchande sont des parts importantes de la société. Seul Mordred avait suffisamment d’indifférence en lui pour sacrifier en vain ses gens pour des expériences de magie noire. Cependant, autant les Sylvandins étaient un peuple distinct, autant ils appartenaient à l'Empire Ashnardien, ce qui suffisait aux yeux du Roi à les considérer comme non seulement dangereux, mais également dénués de scrupules. Malgré toutes ses tentatives de voir quelque chose de bon, de positifs en Ashnard, il lui semblait que pour eux et leurs alliés, il n’y avait rien d’autres que de la corruption, de la malveillance pure et dure, ainsi qu’une bonne part de cruauté. Son regard se défit de ceux de ces gens avant de s’éloigner vers le cimetière du village. En cas de massacre, il n’y avait pas que les goules qu’il fallait suspecter, mais bien d’autres créatures, et particulièrement une qu’il n’était pas pressé de revoir en pleine puissance. Et ce n’était pas des goules qui l’inquiétaient; avec la forte concentration de magie noire qui résultait du massacre, et l’Étoile Sanglante dans le ciel, il sentait en lui la forte présence de la Mort. Dans ses veines, il sentait le sang de ses ancêtres brûler comme des flammes, et ses sens entrèrent en état d’alerte.

Lorsqu’il arriva à proximité du cimetière, ses oreilles captèrent un son de mastication, ainsi qu’une série de grattements sur le sol. En entrouvrant son esprit au flux de la magie, il détecta une puissante corruption. Il s’immobilisa devant le portail dudit cimetière et lâcha un soupir, un son de profond découragement et peut-être même de désespoir. Dans le cimetière, haut de trois mètres et demi, fouillant dans les tombes sa noire pitance, se trouvait un Dramkhër.

Les Dramkhëri ne sont pas une race. Il s’agit plutôt d’une catégorie des nombreuses créations d’Althenos, que le Grand Archimage Darimon Sombrechant avait répertoriées dans le Livre lors de la première tentative de la Seconde Purge, arrêtée prématurément par le Roi de Meisa lorsqu’il avait tué Owen Sombrechant, empêchant l’invocation qui aurait permis à la Championne du monde des morts de rejoindre la terre des vivants avec son armée. Le Dramkhër ci-présent ressemblait vaguement à un homme, à l'exception de bras plus massifs et des jambes courtes, ainsi qu’une mâchoire difforme qui lui donnait un profil allongé. De la tête à la moitié du dos, il arborait une crinière noire, par-dessus une peau grise légèrement violacée. Dramkhër se traduisait dans la langue commune comme un « Écraseur », dû à son habitude d’écraser les gens avec ses bras puissants; leurs victimes étaient ensuite dévorées encore chaudes et parfois encore vives, régénérant les forces de la bête de leur sang.

Serenos dégaina lentement Ehredna, sans détacher son regard de la bête. Celle-ci se retourna vers lui brutalement, grondant sourdement en le fixant.

« Dés…hé…ri…té… » Gémit-elle en s’approchant de lui, l’air soudainement très motivée.

Le Roi hocha de la tête, se reconnaissant dans cette appellation, avant de commencer à marcher vers elle à son tour, le regard franchement attristé, mais pas pour la créature; son apparition approfondissait son malaise, car elle annonçait la venue de d’autres problèmes qu’il aurait souhaité ne pas avoir à gérer sur le moment.

La bête poussa un rugissement semblable à celui d’une banshee avant de se jeter sur le Roi, qui s’élança pour sauter sur le bras de la créature au moment où elle s’apprêtait à frapper. Son pied se posa, léger comme d’une plume, avant de le propulser une nouvelle fois dans les airs. Il abaissa sa lame sur l’épaule droite de la créature, mais Ehredna rebondit sur celle-ci sans réussir à la percer. Sans Chaos à ses côtés, ce combat promettait de ne pas se solder par une victoire éclatante; il n’y avait que son vieux compagnon pour arriver à fendre la chair épaisse de cette créature. Le Roi leva l’autre main et invoqua une boule de flammes qu’il envoya s’écraser sur le dos de la bête. La chaleur intense sembla faire son effet, car la créature gémit de douleur et se mit à chercher l’endroit atteint de ses grosses mains, tombant sur le torse car ses jambes ne supportaient pas seules son poids. Elle se mit à gémir en tapotant son dos enflammé alors que le Roi se posait derrière elle, sur ses pieds. Il regarda sa lame et ferma les yeux. « Straghëré » ordonna-t-il mentalement. Aussitôt, répondant à sa commande, Ehredna changea de forme pour devenir une lance de deux mètres. Le Roi fixa son adversaire et se mit en garde.

Le monstre s’était déjà relevé quand le Roi reporta enfin son attention sur elle, et elle n’était visiblement pas très contente d’avoir été ainsi brusquée, mais le Roi ne se sentit nullement affecté par sa colère. Il se sentait en fait… plus calme, plus en contrôle, plus fort. Si serein que lorsqu’elle se rua sur lui pour l’attaquer, cette fois en refermant sur lui ses deux énormes mains, il ne se sentit aucunement alarmé; d’un pas sûr, il recula puis dressa devant lui, à la hauteur des épaules, Ehredna, à l’horizontale. Emportée par son élan, si la créature s’était rendue compte de ce qui se passait, elle n’avait pu empêcher ses mains de se refermer à temps, si bien que plutôt qu’écraser le monarque, qui avait relâché justement son arme pour faire un bond vers l’arrière, elle s’enfonça elle-même l’arme dans la main, comme un marteau sur un clou dans une planche de bois. La bête hurla de douleur, mais également de surprise; la première fois, elle avait été étonnée, mais la seconde, cela dépassait sa compréhension. Le matériau dont était composé Ehredna n’était rien qui puisse être trouvé sur cette terre, et elle était imprégnée d’une telle magie qu’elle en devenait très efficace contre toutes les créatures du monde des morts. Le Dremkhër tenta de retirer la lance de sa chair, mais rien n’y faisait; sa simple force brute l’avait fichée dans son os, ce qui rendait l’opération impossible. Mais le Roi leva la main et invoqua la magie qui unissait le Roi et son arme, et celle-ci s’extirpa dans un énorme bruit de l’os, des muscles et de la chair, arrachant au passage une bonne part de celle-ci. Lorsque les lambeaux se déchirèrent, un espèrerait voir un peu de sang, mais à la place, une épaisse fumée noire jaillit de la plaie, alors que les morceaux de peau se désintégraient en poussière. Le Roi fit tournoyer sa lance et frappa le sol du manche. Il attendait la prochaine attaque de la bête, mais plutôt que de reprendre les hostilités, le monstre se dressa sur ses bras avant et le fixa, avant de prendre la parole, surprenant légèrement le Roi de Meisa.

« Tu es bien changé, Déshérité.
-Althenos, cracha le monarque de Meisa en dressant sa lance devant lui, mesure plutôt vaine.
-Ah, enfin! Tu entends de nouveau le son de ma voix? J’en suis fort aise, mon enfant. »

La voix du Seigneur du monde des morts trahissait sa satisfaction, mais il ne faisait visiblement aucun effort pour cacher ce contentement. Tous deux savaient ce que signifiait le retour du talent unique que possédait Serenos de pouvoir converser avec l’Incarnation de la Mort, et cela signifiait que celui-ci avait gagné beaucoup plus de puissance, suffisamment pour se faire entendre dans le monde de sa rivale, et que le Roi perdait foi en les êtres dudit monde. Un autre aurait été étonné de voir le calme du roi, mais celui-ci n’ignorait d’aucune façon les changements qui se produisaient en lui, et spécialement le retour de son pouvoir d’antan, preuve indiscutable du retour de sa propre noirceur. Le monarque haussa les épaules, démontrant sa propre indifférence devant sa situation, avant de dévisager les yeux vides de la créature.

« Pardonnez mon insolence, mais ce plaisir n’est pas partagé, rétorqua froidement le Roi.
-  Vaines paroles, descendant des Ashanshas. Aussi vaines que ton obsession à me résister.
-  Je l’ai bien fait autrefois. Qu’est-ce qui vous fait croire qu’il en sera autrement cette fois-ci?
-  Autrefois, tu étais jeune. Ton désir de découvrir, ta curiosité et ton enthousiasme te protégeait de mon influence. Regarde-toi aujourd’hui. Tu es amer, désabusé, froid et méprisant. Tu t’accroches à ton passé pour justifier ton présent, plutôt que de te tourner vers l’avenir. Parce que tu sais qu’il n’y en a aucun pour toi. Laisse la Grise et ton autre moitié accomplir ce qui doit l’être, et je t’ouvrirai les portes du Repos Éternel, comme tu t’en languis.
-  Peut-être le ferez-vous, mais je ne coopérerai jamais avec vous, Althenos. Je ne suis pas un Ashansha; je ne suis loyal ni à vous, ni à votre compagne. Mais je refuse de laisser vos disputes de couple impliquer la vie des plusieurs milliards de personne qui vivent dans ce monde ou dans l’autre.
-  Pense à ce que je t’ai dit, mon garçon. Ma patience est infinie, j’attendrai que tu voies les choses telles qu’elles le sont.

Le Roi savait qu’au moment où Althenos relâcherait son contrôle sur la bête, celle-ci allait se jeter sur lui comme un chien enragé, donc il tourna les talons avant de partir au pas de course. Il n’eut pas fait dix pas que le Dramkhër se mit à sa poursuite. Le Roi ordonna à Ehredna de reprendre sa forme originelle et il la rengaina dans son fourreau avant de se concentrer sur sa fuite. La bête gagnait rapidement du terrain, mais le Roi étant plus petit et plus léger, il lui était nettement plus facile de changer de direction, aussi bifurqua-t-il vers la droite, alors que la masse de son ennemi l’entraina droit devant, heurtant une des granges du village alors que le Roi revenait rapidement vers ses compagnons. Il n’eut pour eux qu’un seul ordre; fuir. Les Écraseurs n’étaient pas les plus forts représentants des forces du monde des morts, mais ils restaient de redoutables adversaires en dehors de Meisa où le Roi peut accroître ses pouvoirs, et difficilement abattus par des gens ne possédant pas des caractéristiques hors du commun. Il aurait peut-être dû les propulser plus loin, mais le Dramkhër venait de se tirer de la grange. Au même moment, il sauta dans les airs, se maintenant brièvement en hauteur avec la magie, se retournant pour lancer un sort. Jaillissant de ses deux doigts tendus, un éclair de lumière pure frappa la bête en plein visage, alors qu’elle s’apprêtait à reprendre sa charge. Il se posa alors à la suite de ses camarades. Il comptait discrètement sur leur instinct de survie pour trouver l’intelligence nécessaire pour s’abstenir d’essayer d’opposer une force de résistance à cette créature surhumaine.

« Vous vouliez savoir ce qu’Althenos avait à voir dans cette histoire, Commandeur? s’exclama-t-il sans stopper sa course. Disons que notre ami ici présent nous prouve que son maître n’a pas l’intention de nous laisser nuire aux projets de la Dame Grise! Nyoron! Si vous en êtes capable, lâchez des runes piégées au sol! Ça devrait le ralentir! Mais surtout, ne vous arrêtez pas; il ne le fera pas, lui! »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le dimanche 26 janvier 2014, 02:16:22
« C’est par ici, de mémoire. »

Se juchant sur sa canne, Nyoron s’avançait à travers le bâtiment central du village : la mairie. Une sorte de manoir avec une salle de réception, et des pièces annexes menant aux salles où on entreposait les documents administratifs, à savoir les cartes de la région. Des instruments dont Kynarth avait besoin pour déterminer la route à prendre afin de rejoindre Kor-Tarath. Cirillia suivait les deux hommes, suspicieuse. Il régnait une belle odeur de moisissure et de renfermé dans la mairie. Une belle accumulation de poussière. Elle remarqua la présence de bûches près d’une cheminée, et supposa que les villageois avaient été tués au moment où l’un d’entre eux avait escompté allumer un feu pour se réchauffer. Ciri’ suivit le duo dans une pièce. Il y avait une grande table au centre, et une bibliothèque remplie de rouleaux et de parchemins dans un coin. Nyoron posa son bâton sur le sol, qui se maintint en équilibre, sans que la gravité ne semble l’affecter. Son orbe magique diffusa alors une lumière blanche. Dehors, le bûcher crépitait. Ciri’ le vit farfouiller parmi les parchemins et les rouleaux, jusqu’à en sortir un, qu’il déposa sur la table, avant de le déplier.

C’était une carte assez précise de la région, relativement illisible, montrant une multitude de sentiers escarpés, de forêts, de pics montagneux. Nyoron et Kynarth l’observèrent silencieusement, avant de baragouiner entre eux.

« La route passe par là...
 -  Il nous faut monter le long du sentier... Ce pont-ci peut être praticable, mais j’ai des doutes, avec le temps...
 -  Il serait risqué de passer par les hauteurs, il vaut mieux rejoindre les cavernes du volcan.
 -  Le plus troublant est que la fumée noire n’ait pas encore émergé, si Kor-Tarath s’est réveillé...
 -  Voyez-vous une autre explication ? La Porte s’est ouverte, ce doit être l’œuvre de cette sorcière dont ce maudit roi nous a conté l’histoire... »

Cirillia n’y comprenait rien, si ce n’est que ces deux cinglés avaient visiblement envie d’aller se perdre dans un volcan. Autant dire que cette perspective n’enthousiasmait pas vraiment Cirillia, qui n’avait pas vraiment envie de se faire griller les fesses en venant au soutien de ces deux malades.

*Des dragons, de la magie noire, un volcan... La prochaine étape, c’est quoi ? Défier un Balrog au bras-de-fer ?*

Les deux hommes continuaient à parler, lorsque Cirillia leur rappela qu’elle n’était pas une plante verte. Elle s’éructa la gorge en croisant les bras, mettant un peu plus en valeur ses seins, délicieusement comprimés sous son corset. Kynarth releva la tête, et loucha à nouveau sur les magnifiques seins de la femme. Commandeur ou pas, il restait un homme encore fort peu aguerri de ce genre de choses.

« Et si vous arrêtiez votre délire, Messieurs, et que vous m’expliquiez clairement à quoi tout ce bordel rime ? »

Kynarth remua lentement ses lèvres, comme s’il était en train de réfléchir, avant de se redresser.

« Je suppose que vous avez droit à quelques explications. Kor-Tarath est un endroit maudit, qui a été scellé par Erwan Korvander lorsque ce dernier a fondé Sylvandell. C’est une forte... »

Kynarth s’interrompit en entendant des bruits de pas précipités. Il porta la main au pommeau de son épée, tandis que le bâton magique de Nyoron lévita comme par enchantement, afin d’atterrir dans le creux de sa main. Ciri’ se retourna.

« Qu’est-ce que c’est ?! »

Le trio sortit de la mairie, s’avançant sur le sol enneigé, pour voir le Roi de Meisa débarquer vers eux... Poursuivi par une sorte d’affreuse bête. Ciri’ n’y connaissait peut-être pas grand-chose sur les volcans, mais elle avait exploré Terra depuis suffisamment longtemps pour connaître la plupart des abominations qui vivaient ici. C’était un Écraseur. Il avait de puissants bras, qui étaient suffisamment puissants pour s’enfoncer dans une armure en plates. On en rencontrait généralement près de charniers, même s’ils étaient plutôt rares. Le défier au corps-à-corps serait pure folie, et le trio s’élança donc à la suite de Serenos, tandis que l’Écraseur s’avançait avec rage, bien décidé à les massacrer.

« Vers la sortie, vite ! »

Nyoron, malgré son âge avancé, ne les perdit pas de vue. Dehors, sur un terrain dégagé, il serait plus facile de défier cette créature. Kynarth fut le premier à sortir. Cirillia le suivit, avant d’utiliser, à défaut de ses épées, son arbalète à répétition. Son chargeur de carreaux se trouvait dessous, et elle se plaça sur ses deux jambes, tenant l’arbalète à deux mains, et balança une série de carreaux, qui atteignirent le monstre au torse. Plusieurs carreaux le frappèrent de plein fouet, mais sans vraiment l’arrêter. Nyoron attrapa alors son bâton, et visa l’entrée du village, envoyant alors une violente onde magique qui souleva la neige sur son passage. L’onde frappa le monstre de plein fouet, le repoussant comme un fétu de paille.

Cirillai entendit alors des grognements, et se retourna. Des bruits sauvages et précipités venaient de la forêt, faisant remuer les arbres.

« Merde » jura-t-elle.

Les Wargs qu’ils avaient chassé cette nuit étaient revenus, et jaillirent des arbres, se ruant à toute allure vers leurs proies.

C’est à cet instant que Cirillia remarqua qu’Hodor n’était plus là.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le jeudi 30 janvier 2014, 19:46:06
Le Dramkhër était énervé par les attaques de ses proies, ce qui le motivait davantage à les consommer et s’abreuver de leur sang. Mais le Roi et l’étrange magicien refusaient de le laisser gagner le moindre carré de terrain en le bombardant de ses projectiles magiques, lancés pour la plupart au jugé pendant qu’il poursuivait leur course. La bête avait donc abandonné l’idée de s’attaquer au puissant homme pour se tourner vers une proie plus humble, mais tout aussi appétissante; la jeune Cirillia. À nouveau debout, l’Écraseur s’élança à nouveau aux trousses du groupe, mais son regard rempli de malveillance s’était déjà fixée vers sa proie. Déviant légèrement sa trajectoire pour ne pas perdre son fragile équilibre de course, le monstre fonça droit sur la belle guerrière.

« Cirillia! »

Serenos savait qu’elle ne survivrait pas à un assaut direct avec la grosse bête, aussi avait-il cessé sa course pour laisser la jeune femme le dépasser alors qu’il levait une main en l’air, l’autre en diagonale en bas, offrant son dos à la bête, et invoquait un puissant bouclier magique sous forme de cercle arcanique. La bête fonça dans l’obstacle, incapable de s’arrêter, et le Roi, par un procédé magique connu de lui-même, renvoya toute la force cinétique produit au moment de l’impact contre la créature. La peau de celle-ci se déforma subitement sous la vague de puissance, alors qu’une onde lui parcourait la chair comme sur l’eau, la renvoyant une bonne trentaine de mètre vers l’arrière. Il se tourna alors vers Cirillia, ses yeux brillants plantés dans les siens l’espace d’un moment, avant de lever subitement la main dans sa direction et libérer un nouvel éclair qui frappa un Warg en pleine tête, le tuant sur le coup. Il fit signe à la jeune femme d’aller aider les autres avant de se tourner à nouveau contre la créature. Celle-ci, malgré ses dommages visibles par les nombreux trous provoqués par l’assaut magique, était à nouveau prête à combattre, et maintenant que les Wargs empêchaient ses cibles de fuir aussi aisément qu’elles l’avaient espéré, elle cessa sa poursuite et s’approcha lentement, se servant de sa masse pour heurter le sol à chaque pas, dans le but plutôt inutile d’intimider le Déshérité, qui tenait d’une main sa puissante épée alors que de l’autre, il avait invoqué un nouveau projectile enflammé.

Le combat reprit de plus belle lorsque le Roi balança une boule de feu dans le visage de la créature. À défaut de la blesser, il sût qu’elle aurait le réflexe naturel de fermer les yeux lorsque la lumière serait trop intense pour son regard. La bête se protégea le visage de ses mains, et le Roi y vit le moment parfait de passer à l’assaut. Le Roi profita de ce manque d’attention pour charger sa main d’une nouvelle énergie et la dressa brusquement devant lui, comme dans un coup de paume. Une légère explosion d’énergie bleutée se produisit alors au bout de ses doigts, et sous l’impact, la bête tomba sur le dos. Le Roi en profita pour bondir sur le ventre de la bête, son épée dressée en direction de l’abdomen à l’aide de ses deux mains, mais, comme prévu, son épée n’arriva pas à percer la peau, et il fit un bond vers l’arrière. Il éplucha rapidement toutes les options qui lui venaient en tête, passant d’un sort plus puissant à la tentative d’user de la magie noire pour en finir avec cette maudite créature. Finalement, décidant qu’il ne devait pas se reposer sur ses capacités les plus noires pour satisfaire son but de tuer cette sale créature, il rengaina son épée et joignit les mains. Autour de la bête, au sol, apparut alors un cercle magique. Des chaines apparurent alors, au-dessus des épaules, sur les flancs et entre les jambes, et se joignirent sur le ventre de la bête, avant de se resserrer d’elles-mêmes pour l’empêcher de bouger. Ce n’était qu’une solution temporaire, mais cela devrait suffire pour que le Roi et ses camarades pensent à ce qu’ils pourraient faire de cette abomination.

Le Roi se tourna alors vers les Wargs et en attrapa un qui s’apprêtait à sauter sur Kynarth à mains nues, le plaquant au sol avec force avant de poser sa main sur sa tête et imposer sa volonté à l’esprit de la bête. Sous le charme, la créature se calma et se redressa avant de regarder les trois compagnons du Sorcier avant de sauter avec colère sur un des camarades de celui-ci. Il examina alors les créatures et en compta plus d’une dizaine. Mais c’était sans compter les goules qui, attirées par le carnage, apparaissaient lentement parmi les assaillants. D’expérience, il savait que les goules n’étaient pas une menace lorsqu’elles étaient seules, car entre une cible vivante et capable de combattre et un cadavre, ces bêtes préféraient se tourner vers la seconde option, moins nutritive, mais leur sale habitude de sauter sur leurs proies et de les griffer pour leur arracher des lambeaux de chair les rendaient redoutables lorsqu’elles étaient en groupe. Le Roi jura en voyant le nombre d’opposants augmenter, et en évaluant la situation, il opta pour une autre option.

« Couvrez-moi une minute! » les commanda-t-il en prenant position au centre de ses camarades.

Le Roi leva les bras et invoqua le cercle de magie servant à canaliser son pouvoir. Avec la bête maitrisée pour le moment, malgré ses martellements et ses tentatives de force pour se défaire de ses liens, ils ne devaient que s’assurer que les goules et les Warg à maîtriser. Le Roi n’avait pas formé de clan avec qui que ce soit depuis Liam, et la douleur suscitée par sa mort avait été si écrasante qu’il s’en était abstenu par la suite, mais il savait que s’il voulait sauver ces gens, il n’aurait d’autre choix que de se soumettre à la nécessité. Alors, il ferma les yeux et tendit son esprit vers les leurs, avec la douceur d’un joaillier avec ses bijoux, il les toucha. Et lorsque leurs esprits s’effleurèrent, il laissa son incroyable pouvoir se déverser dans leurs corps, dans leurs esprits. Il leur donna sa force, son énergie, et quelque part, une partie de lui-même.

Le clan est une capacité propre aux sorciers d’autrefois, leur accordant la capacité d’améliorer les capacités d’un groupe cible. En temps de guerre, un mage était souvent attribué à un bataillon, ou à un commando suicide, pour obtenir un maximum de dégâts possibles avant l’éradication des forces. Les sorciers devaient se montrer aptes à gérer l’attribution des forces de façon à complémenter les défauts de chaque soldat; les plus forts devenaient plus rapides, les plus agiles plus puissants, les jeteurs de sort voyaient leurs besoins en énergie se réduire et les archers arrivaient à viser des cibles très éloignées avec beaucoup plus de précision. Cependant, dans le cas de Serenos, avec la réserve écrasante de pouvoir qu’il contenait dans son corps astral, ce n’était plus qu’une simple amélioration, car son pouvoir était également réparti entre quatre personnes.

« Quatre? »

L’absence d’Hodor rendait impossible la formation du clan en l’incluant, et pour que son pouvoir se retrouve vers une personne qu’il n’avait pas visé signifiait qu’il s’agissait d’une personne avec qui il avait déjà été lié. Le Roi de Meisa suivit alors le fil liant son âme à l’inconnu qui lui drainait à ce moment-là son énergie. Dans une des maisons du village, un homme laissait tomber un morceau de viande avant de sortir. Homme colossal s’il en était un, il dût se pencher bien bas pour pouvoir passer sous la porte. Suivi par un énorme loup blanc, qui mâchonnait encore un morceau de viande rouge, l’étranger se redressa une fois à l’extérieur. Facilement, ce type faisait près de deux mètre trente à tout casser, et encore, ce n’était pas une mesure exacte. L’homme tenait dans sa main droite une énorme épée en argent, l’autre tenant encore une pinte de cidre de pomme pleine, et à son cou pendait un médaillon représentant une tête de Dragon Noir. Les yeux inhumains des sorceleurs, brillants d’une couleur d’argent plutôt que d’or, se posa sur Serenos, dont le cœur s’emplit d’un profond sentiment de joie lorsqu’il le capta. Lorsque l’être souleva sa puissante arme, un seul mot vint aux lèvres du Roi. Un nom.

« Cahos! »

L’homme, suivit de son compagnon à fourrure, se jeta à son tour dans la mêlée, assénant sur le dos d’un Warg un coup d’épée qui le sectionna en deux aussi facilement qu’un couteau dans du beurre, avant de tourner à quatre-vingt-dix degrés en balancant son arme pour frapper un autre monstre sur la truffe du plat de la lame, l’envoyant valser contre un comparse alors qu’il venait prendre formation autour du Roi pour le protéger de ses assaillants. Le loup gronda à l’attention de ses opposants, attirant vers lui leurs regards et leur animosité. Le corps tendu, prêt à bondir sur un de ces hybrides monstrueux, le loup attentait impatiemment le moment du combat.

Des centaines de question affluaient dans l’esprit du Roi de Meisa. Cahos était mort il y a bien longtemps de vieillesse, dans une hutte loin de toute civilisation qui, de toute façon, n’avait plus besoin de ses services de chasseur de monstres; le Continent Inconnu était maintenant en paix, et suffisamment de guerriers et de mages pouvaient remplacer les chasseurs comme lui. Et pourtant, le voilà, aussi beau et fort que dans sa prime jeunesse, comme si toutes ces années de combat contre la maladie et la mort avaient été effacées de son corps.

« Serenos de Meisa. Même après ma mort, te voilà à attirer les foudres du Maître des Morts!
-  La mort ne semble pas t’avoir dépourvu de ton sens incroyable des circonstances!
-  Ha!
-  Occupes-toi du Dramkhër! Nous nous chargerons des Warg et des goules! »

Le colosse éclata d’un rire franc alors qu’il brisait déjà la formation pour se diriger vers l’écraseur. Le sort du Roi se brisa alors, laissant le monstre libre. Il s’apprêtait à se relever quand Cahos lui balança un coup de pied d’une force phénoménale dans le flanc, l’envoyant rouler plus loin comme s’il s’agissait d’un énorme caillou. En sifflotant, le revenant fit tournoyer son énorme épée avant de se mettre en garde et d’attendre que le Dramkhër se relève pour le charger, arborant un énorme sourire. Il regarda la sale bestiole en bandant les muscles de son bras, et lorsque la bête s’élança, le monstre de muscles sauta droit devant lui en propulsant son arme  vers la bête. La zweihander passa au travers des bras de la bête, puis de son abdomen avec aisance. Ceci était un fait réalisable que pour un homme possédant la force physique de manipuler une arme aussi lourde sans l’usage de la magie.

Pendant ce temps, le Roi s’acharnait à éliminer les goules grâce à ses éclairs de lumière, s’assurant qu’aucune n’arrive à s’attaquer à ses compagnons, mais leur laissa le plaisir de se faire des wargs par eux-mêmes; le plaisir du combat passait par sa propre participation, et non pas par la victoire. L’opposition n’était pas énorme, mais avec des Wargs, pour un humain normal, le manque d’attention pouvait s’avérer fatal. Le monarque espérait que ses compagnons appréciaient le petit coup de main magique qu’il leur offrait.

[HRP : Libre à toi de décider ce qui est amélioré par le clan. Le buffing dans les RPG est une bonne comparaison ^^]
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le samedi 01 février 2014, 01:43:24
La bataille contre l’Écraseur dégénérait face aux Wargs, qui avaient rejoint les fuyards. Pris entre le marteau et l’enclume, les guerriers envisagèrent de se battre. Kynarth accueillit un Warg en fléchissant les jambes. Le Warg avait tenté de l’attraper à la tête, de lui sauter dessus. Par conséquent, afin de l’éviter, Kynarth se pencha vers le sol, et leva son épée, qui trancha la fourrure du monstre à hauteur de son ventre, faisant couler son sang. La bête blessée s’affala dans la neige. Kynarth se releva alors, tandis que le Warg se relevait lentement, sa fourrure écarlate, les mèches de poils tâchées par le sang. L’épée de Kynarth tournoya dans ses mains, et frappa un autre coup, tuant le monstre. Cirillia, quant à elle, constata l’inefficacité de ses carreaux d’arbalètes sur l’Écraseur. Quand les carreaux ne se brisaient pas contre l’épaisse carapace du monstre, ils ne semblaient guère le retenir. Elle se retourna contre les Wargs, balançant à nouveau ses carreaux. Un carreau atteignit ainsi la patte avant droit d’un Warg, l’envoyant rouler dans la neige, tandis qu’un autre se reçut un projectile dans l’œil, l’arme mortelle perforant sa rétine pour se planter dans son cerveau, tuant la bête sur le coup, qui dévala dans la poudreuse.

Cirillia tourna alors la tête en entendant des grognements, et vit plusieurs créatures supplémentaires s’avancer rapidement, leurs pas s’enfonçant dans la neige. Ils venaient depuis les cavernes : les goules (http://static3.wikia.nocookie.net/__cb20120829202510/witcher/images/9/91/Ghoul2.jpg). De sinistres créatures nécrophages attirées par les morts, et par la chair des vivants. Nyoron utilisait son bâton magique, alternant entre le combat à distance et à proximité, utilisant ce dernier pour repousser les Wargs. Fort heureusement, il n’avait pas vraiment à les affronter à proximité, car Kynarth le couvrait bien. Le jeune Commandeur était rapide et meurtrier. Cirillia vit alors un Warg foncer droit sur elle. Elle n’avait pas le temps de le tuer avec son arbalète, étant concentrée à tuer les nombreuses goules qui s’approchaient.

Elle ne ressentit pas le sort magique du Roi de Meisa... Pas consciemment, en tout cas. Le Warg était rapide, et Cirillia bondit dans les airs, l’évitant de justesse. Elle tournoya en hauteur, et en profita pour ranger son arbalète dans son dos, tirant pour cela sur la ficelle qui reliait l’arbalète à son corps, puis attrapa son épée en argent. Le Warg s’arrêta sur place, et se retourna en hurlant... Mais se reçut la lame à hauteur du museau, le fendant en deux. La bête s’affala sur le sol dans un couinement.

« Du vent, créatures du Diable ! »

Nyoron envoya une onde de choc qui repoussa trois Wargs, soulageant ainsi Kynarth, dont l’armure avait été entaillée de plusieurs griffes. Des éclaboussures de sang revenaient sur son visage et ses cheveux, lui donnant un air sauvage délicieusement excitant. C’est à cet instant qu’un nouvel individu se joignit à la bataille : une sorte de géant accompagné d’un loup blanc. Ciri’ vit ses pupilles : les yeux d’un sorceleur ayant utilisé un mutagène (http://i243.photobucket.com/albums/ff199/Bloodhnd/OldGeraltEyes.jpg).

*Voilà qui n’est pas banal...*

Cahos ne lui disait rien, et elle soupçonna que cet homme devait appartenir à un ordre de sorceleurs qu’elle ne connaissait pas, elle-même ayant reçu une formation de leur part. Le sorceleur se heurta à l’Écraseur, tandis que Serenos essaya de repousser les goules. Malheureusement, la partie ne jouait pas en leur avantage, car les ennemis étaient nombreux, et les Wargs prudents. Ils avaient déjà affronté ce groupe hier, et savaient donc comment ils réagissaient.

Un Warg heurta Ciri’ sur le flanc, la couchant sur le sol, et elle roula sur le côté, évitant de justesse les crocs tranchants du monstre. Elle allait se relever, mais la patte avant du Warg la frappa à l’estomac, formant cinq lignes ensanglantées. Cirillia poussa un gémissement en sentant une onde de douleur la traverser, et le Warg la heurta alors, la couchant sur le sol. Elle vit sa gueule édentée, furieuse, ses babines claquantes, sa salive tombant sur son visage, et réagit par réflexe. Sa main attrapa la dague qu’elle tenait à a ceinture, et elle réussit in extremis, alors que les pattes du monstre l’écrasaient et la meurtrissaient, à la planter dans sa gorge, tranchant la carotide. Le sang jaillit de la gueule du monstre et de la plaie, éclaboussant le visage de Cirillia, qui usa alors de ses forces pour repousser la bête.

Nyoron se concentrait, yeux clos. Tandis que la bataille dégénérait, il murmurait des incantations, faisant trembler son bâton. Lorsqu’il les rouvrit, ses pupilles devinrent brièvement incandescentes, et il poussa un hurlement dans une langue arcanique, avant de taper le sol de son bâton. Ceci déclencha une réaction immédiate. La neige devint folle, et s’agita autour du groupe, avant de former comme un blizzard, une épaisse tornade qui se mit à les protéger, frappant les Wargs, les forçant à reculer. Dans des piaulements furieux et plaintifs, ces créatures s’enfuirent, retournant dans la forêt.

Cirillia, de son côté, s’était relevée, et attrapa une fiole d’Hirondelle, un élixir qui soignerait ses plaies. L’une de ses mains tenait les plaies. Elles étaient peu profondes, ne nécessitant pas de soins urgents, et elle avala tout le contenu de l’élixir, avant de jeter la fiole sur le sol.

Elle soupira lentement, retrouvant ses forces, et récupéra son épée.

« Vous savez où est passé Hodor ?
 -  Sûrement pas loin, le connaissant. »

Ciri’ ne pouvait que l’espérer.

C’est que le semi-géant était tout de même bien pratique.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le lundi 03 février 2014, 23:34:24
Le sortilège était suffisamment stable pour que le Roi s’autorise à l’automatiser, créant ainsi un effet continu qui ne nécessitait pas qu’il accorde sa concentration mais qui consommait tout de même une part donnée de son énergie. Il pouvait ainsi se joindre à la mêlée sans risquer de dépouiller ses compagnons de leur maigre avantage sur leurs ennemis. Chargeant sa main gauche d’énergie purificatrice et agrippant Ehredna de la main droite, il s’élança sur une première goule, se séparant de ce fait du groupe pour attirer davantage l’attention des comparses de sa cible. Il l’agrippa à la gorge, et au contact de ses doigts, la créature damnée se mit à geindre de douleur et à se débattre, mais pas assez vigoureusement pour s’arracher à la prise du Roi, avant de tomber en poussière. Il fléchit subitement des genoux, évitant une de ces vicieuses sauteuses, mais ne fut pas assez rapide pour en éviter une seconde, qui s’agrippa alors immédiatement à sa tête et à ses cheveux. Le Roi la repoussa de son bras valide et lui tailla le dos, faute de pouvoir lui donner un bon coup de lame dans l’abdomen, et la douleur suffit à faire lâcher prise à la sale bête. Il l’agrippa alors par la peau et la plaqua sauvagement sur le sol dans une succession de coups, jusqu’à ce qu’elle se démontre incapable de bouger, posant sa main sur la tête du revenant pour la renvoyer dans sa tombe. Une autre de ces créatures se rua dans sa direction, et il exécuta un arc de cercle de sa lame, lui tranchant la tête à la moitié du visage. Pris de cours par un Warg, il fut sauvagement mordu au bras gauche, rendant celui-ci inutilisable alors que les os cédaient sous les puissantes mâchoires du cousin du loup géant. Il hurla de douleur, mais cela ne l’empêcha pas d’asséner à la boule de poils de bons coups d’épée sur le crâne, jusqu’à atteindre le cerveau, le tuant après le quatrième coup d’épée. Malgré la douleur, le Roi réussit à rester sur ses jambes, mais les Wargs avaient remarqué sa vulnérabilité et trois d’entre eux le ruaient déjà. Il put tout juste éviter les crocs du premier pour parer les griffes du second, alors que le troisième le mordait à la jambe, lui arrachant un nouveau cri. Incapable de bouger, le deuxième n’eut qu’à bondir une nouvelle fois pour arriver à le mordre à l’épaule, manquant de justesse son cou. En rugissant de rage et de douleur, il planta alors son épée dans l’abdomen de celui-ci, avant de lâcher Ehredna et de s’emparer de son poignard de ceinture pour trancher la gorge du troisième. Le premier lui sauta dessus, le renversant. Il n’eut néanmoins pas le temps de le mordre car Serenos lui asséna un puissant choc d’énergie électrique d’un contact de la main, grillant immédiatement les organes du monstre. La bête s’effondra alors sur le côté, libérant le Roi de sa prise. Lorsque son adversaire poussait son dernier soupir, ses compagnons prenaient la fuite, cédant la victoire au groupe des Sylvandins.

Peut-être avait-il surestimé ses capacités. Il ne connaissait pas de mortels qui pouvaient le vaincre en combat singulier, mais il se rendait graduellement compte que toutes ces années de réclusion en Meisa, dans l’oisiveté du Palais des Anciens et loin du monde, l’avait affaibli, comparativement au temps de la guerre, où ses journées étaient occupées par une seule pensée; comment il allait vaincre et ramener le plus grand nombre de ses hommes sains et saufs auprès de leurs familles. Ses réflexes étaient émoussés, ses mouvements étaient beaucoup moins rapides qu’auparavant et il ne jouissait plus de cet état de concentration brute, que certains guerriers appelaient la « zone », où tous ses gestes n’avaient qu’un but; frapper, tuer et vaincre. Se trainant sur sa seule main encore capable de supporter son poids, il se traina contre la carcasse de sa dernière victime et s’y adossa en grognant, les yeux clos. Il n’ouvrit les yeux que lorsqu’il constata que ses blessures ne se refermaient pas comme elles le faisaient normalement; plutôt que de reformer une peau lisse et nette, le sang continuait de couler et les ouvertures ne se cicatrisaient pas. Il aurait pu s’en inquiéter, mais son état d’Immortel le rendait particulièrement insensible à son état physique; il savait que peu importe combien de sang il perdrait, il ne gagnerait pas le repos, car son moment n’était toujours pas arrivé.

Cahos essuya son épée sur la fourrure d’un Warg pour la débarrasser du sang qui la souillait, évaluant d’un coup d’œil l’état des environs. Une fois assuré que la menace ne risquait pas de revenir de si tôt, il s’approcha du Roi et posa un genou en terre pour se mettre à son niveau. Le Roi n’ouvrit pas les yeux, pas même pour l’identifier, essayant de se reposer et de régénérer son pouvoir pour réparer manuellement les dommages de son corps; loin d’être un guérisseur de talent, il savait manipuler sa propre énergie pour accélérer les mécanismes de guérison; l’évacuation de l’infection, la coagulation du sang et la fermeture de la chair. Les dommages étaient considérables du point de vue d’un humain, mais pour avoir côtoyé le Roi pendant ces années folles où ils parcouraient les chemins, incessamment pourchassés par un ennemi qu’ils ne pouvaient combattre, l’ancien paladin ne considéra pas les blessures comme étant particulièrement importantes. Il lui asséna une petite tape sur le crâne avant de le laisser seul pour panser ses blessures; lui-même ne pouvait rien y faire.

« Connaissant la réputation de cet homme pour s’attirer les ennuis, je vous dirais bien de rentrer chez vous tant que vous le pouvez encore, mais après vous avoir vu vous défendre, je crois bien que ce ne sera pas nécessaire. Mon nom est Cahos Shermalam, un Sorceleur. Du moins en partie. »

En bon expert de monstres en tout genre, il leur expliqua alors ce qu’il savait sur la tragédie qui avait frappé le village. Deux jours avant leur arrivée, il était parti à la chasse aux monstres, des Stirges, plus exactement, qui sévissaient dans les environs depuis une petite période de temps en attaquant les villageois et les gens qui se promenaient dans les environs. Le maire lui avait promis une récompense de son choix à son retour, et il s’était donc hâté à la tâche pour toucher sa prime plus rapidement. Il avoua avoir été absent au moment de l’attaque, mais il les assura d’une chose; qui que fut celui qui avait « moissonné » ces gens, il était suffisamment habile pour l’avoir fait en moins de trois heures. Il leur déclara aussi qu’il n’était pas seul; les nombreuses traces de souffre et des traces de pas carbonisées indiquait que le mage noir était accompagné d’au moins un élémental de feu.

Il leur révéla également qu’il avait remarqué un plus grand nombre de monstres dans les environs. Sylvandell contenait son lot de créatures dangereuses, mais outre celles qui se reproduisaient à un rythme particulièrement effarant, certaines, annonça-t-il, n’avaient absolument aucune racine sur ces terres; il avait noté l’apparition d’un serpent géant quelque part dans les régions de l’Est, et surtout, l’arrivée surprenante de chauve-souris Sanguiris, créatrices de Goules Vampiriques, qui sont normalement trouvée dans les régions particulièrement froides du continent.

Après un long moment de silence, le Roi tourna la tête vers ses compagnons. Toujours incapable de bouger, il ne pouvait pas se rapprocher d’eux. Il tenta alors de les frôler de son esprit, seulement pour être sauvagement repoussé, mais pas par ses camarades; quelque chose le bloquait. Inquiet que quelqu’un tente d’entrer dans sa tête pendant que son esprit était ailleurs, il regagna immédiatement son territoire spirituel et s’y barricada solidement, à l’affût. Il se sentait étrangement vulnérable. Malgré l’effort que cela lui demandait, il étira le cou.

« Est-ce que quelqu’un pourrait aller chercher Hodor?... Je ne parviens pas à le capter, ca m’inquiète. Moi, je… je vais faire un petit somme, je crois. »

Il ne pouvait pas se mentir; il ne ferait pas un pas dans ces conditions. Cahos pourrait le porter, mais sa fierté ne lui permettrait pas de telles largesses. Il préférait rester là, au milieu des cadavres, et se reposer un peu.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le mercredi 05 février 2014, 01:37:35
La bataille avait été aussi rude qu’inattendue. Cirillia reprenait lentement son souffle, tout en se remettant de sa blessure. La guerrière avait mal au ventre, et il était certain que cette blessure ne disparaîtrait pas avant quelques heures. Le groupe allait maintenant sûrement se reposer dans le village. Se promener pendant la nuit était bien trop risqué pour être tenté. Cirillia finit par se relever, tandis que le sorceleur qui venait de débarquer, le géant Cahos, leur expliqua sa présence ici, et ses découvertes. Il était venu chasser des Stirges, probablement dans le cadre d’un contrat avec un mage ou un alchimiste, ce qui était le plus courant pour les chasseurs de monstres. Cahos continua à leur parler, à leur expliquer qu’il avait vu de curieuses choses ici, la présence de monstres qui n’avaient rien à faire ici, qui déréglaient l’écosystème... Il leur indiqua que les individus ayant massacré le village avaient du le faire simplement en trois heures. Cirillia exprima son scepticisme. Trois heures, seulement ? Tout ça lui semblait un peu rapide. Entre-temps, le Roi de Meisa restait silencieux. La lourde attaque avait également blessé l’homme, qui n’était plus trop en état de parler, et se reposait.

Cirillia écouta donc l’homme parler, puis allait ouvrir la bouche. Une question, en effet, continuait à la turlupiner : qu’était Kor-Tarath ? Pourquoi Nyoron et Kynarth en avaient-ils parlé ensemble ? Quel était le lien entre ce massacre de villageois, la recrudescence de monstres, et Kor-Tarath ? Alors que Ciri’ réfléchissait, Serenos demanda à ce qu’on aille retrouver Hodor.

« C’est inutile, répliqua rapidement Kynarth. Hodor connaît ces montagnes comme sa poche, et nous le retrouverons certainement sur notre route.
 -  Que veux-tu dire ? »

Kynarth se pinça les lèvres.

« Commençons par retourner au village, je dois m’enquérir de quelque chose. »

Cirillia le regarda en fronçant les sourcils, en croisant les bras. Il ne s’en tirerait pas aussi facilement, mais elle s’inclina, pour le moment. Le groupe remonta dans le village, et Kynarth s’avança dans un coin, vers une tour. Nyoron, de son côté, pénétra dans ce qui faisait office d’auberge, afin de l’allumer, et de la préparer pour le soir qui tombait. Cirillia, de son côté, suivait Kynarth, s’avançant dans de petites rues sombres et sinistres, maintenant que le village était mort. Elle arriva à côté du cimetière, et vit la tour. Une belle tour montée sur pilotis. Un escalier menait à une porte, et cette dernière était ouverte. Elle y alla également, grimpant le long des marches en bois, et pénétra dans une grande pièce avec de nombreuses cages... Et des corbeaux morts. Des plumes noires reposaient un peu partout sur le sol, et un tas de cendres dans un coin était tout ce qu’il restait du papier figurant dans le village.

« Qu’est-ce que ça signifie ? » s’étonna Cirillia.

Kynarth restait au milieu de la pièce, sur les planches branlantes en bois, et regarda autour de lui.

« Chaque village élève des faucons ou des corbeaux. Ils leur permettent de transmettre rapidement des messages vers Sylvandell, quand il y a une urgence à signaler. Nos meurtriers les ont massacrés, et ont, par mesure de précaution, au cas où il resterait encore des corbeaux dans la nature, brûlé les réserves de papier.
 -  De cette manière, nous ne pouvons pas demander des renforts...
 -  En effet. »

Ciri’ se pinça les lèvres, commençant à comprendre. Les ennemis étaient avisés, et ils ne pourraient pas bénéficier de renforts.

« Retournons voir les autres. Il est temps que je vous offre quelques explications. »

Dans l’auberge, Nyoron avait allumé un feu près d’une cheminée, en utilisant sa magie. Le soleil commençait à se coucher. Cirillia s’assit sur une chaise, et Kynarth, sans attendre plus longtemps, commença à s’expliquer.

« Je pense que nos ennemis se rendent vers le volcan de Sylvandell, un volcan éteint se trouvant au cœur de la chaîne de montagnes. Dans ce volcan, il existe une forteresse, Kor-Tarath. Pour comprendre ce fort, il faut remonter aux fondations de Sylvandell. »

Erwan Korvander, le Premier Roi, le fondateur de Sylvandell, avait conclu une alliance avec le Patriarche des dragons de Sylvandell, mais chacun avait du remplir des obligations. Le rôle fondamental de Sylvandell, comme l’expliqua Kynarth, était de défendre le royaume des menaces qui y résidaient, notamment Kor-Tarath. Le fort noir, à l’époque d’Erwan, était le refuge d’un puissant mage noir, quelqu’un qui envisageait d’utiliser Kor-Tarath pour ouvrir une faille vers les profondeurs du monde, afin d’y libérer un terrible fléau : un Dragon Ancestral, un dragon noir immense, qui aurait ravagé la région, et massacré tous les dragons dorés, et qui aurait assurément constitué une Calamité.

« Les dragons ne pouvaient pas venir à bout de ce mage, car il possédait un pouvoir magique extrêmement fort, et des sorts contre les dragons efficaces. De plus, il contrôlait, depuis Kor-Tarath, la lave du volcan, et toute attaque massive depuis le cratère aurait résulté en une éruption volcanique. Quand Kor-Tarath est habité par une force noire, le volcan fume continuellement, et creuse pour atteindre la prison du Dragon primordial. Erwan avait su cet éveil en tuant le mage noir, et en scellant Kor-Tarath. »

De cette époque, il ne restait qu’un seul survivant, l’Omniprêtre. Il avait secondé Erwan et les autres Sylvandins dans le siège de Kor-Tarath, et parlait assez peu de cette époque, si ce n’est pour en dire que ce siège avait été redoutable, et avait constitué l’ultime bataille d’Erwan Korvander. Le Premier Roi avait succombé à ses blessures en affrontant le seigneur de Kor-Tarath, mais ce dernier avait été terrassé. Cette bataille originelle avait été à l’origine du lien étroit unissant les dragons dorés aux Sylvandins, et le fort avait été abandonné, sombrant dans l’oubli.

« Donc, ces gens veulent réveiller Kor-Tarath ? En reprendre le contrôle ?
 -  Pas uniquement, nuança Nyoron. Tous ces gens n’ont pas été tués sans raison. Un puissant sortilège leur a ôté la vie... Je pense qu’ils ont été sacrifiés.
 -  Sacrifiés ? Dans quelle mesure ?
 -  De puissants sortilèges ont scellé Kor-Tarath, mais, le plus important à noter, c’est que ce fort se trouve au croisement de deux puissantes lignes cardinales magiques qui traversent Terra. C’est un haut lieu de résonance magique, et, comme notre ami sorceleur l’a mentionné, nous affrontons des ennemis puissants, bien organisés, et visiblement dotés d’un mage particulièrement puissant. Je pense que ces gens se rendent vers Kor-Tarath pour y accomplir un quelconque maléfice. »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le mercredi 05 février 2014, 17:19:43
Lorsque le groupe se dirigea vers la tour aux messages, Cahos s’était plutôt tourné vers Serenos, qui ne semblait toujours pas capable de se lever. Cahos nota que le visage du Roi s’était étrangement émacié, comme s’il avait pris un coup de vieux. Le Sorceleur grommela de désapprobation avant d’agripper le Roi et de le charger sur ses épaules. Son ami s’apprêta à protester quand il le fit taire d’une secousse des épaules et lui fit comprendre qu’autrement, il ne pourrait pas se déplacer. La faiblesse actuelle du Roi s’avérait plus préoccupante que ce que le chasseur de monstres l’avait d’abord pensé, et grand peine fut-il de se retenir de l’interroger sur son équilibre intérieur. Le puissant homme examina son ami et lui rabattit sa capuche sur la tête pour cacher son visage en le portant vers l’auberge, passant récupérer Ehredna dans la fourrure d’une de ces saloperies de Warg au passage. Une fois sur place, il parut presque surpris, limite offensé, que ces gens parlaient entre eux sans vraiment inclure le Roi dans leurs discussions. Il allait attirer leur attention sur eux pour signaler leur intérêt quand le Roi posa une main sur son épaule et lui fit signe qu’il était inutile d’essayer de les apostropher. Acceptant de se retenir, à contrecoeur, il se contenta d’écouter ce qu’ils se disaient. Ils en étaient à parler de Kor-Tarath, un nom qui semblait évoquer vaguement quelque chose au Roi, car il avait relevé la tête pour regarder ses compagnons parler entre eux.

Pour Serenos, Kor-Tarath tenait beaucoup plus de la légende qu’autre chose, qu’il avait pu lire une ou deux fois dans les nombreux livres traitant de lieux mythiques et maléfiques. Le rapport Édifications et Institutions des Mages Anciens, rédigé par le Conseiller de la Reine Maïwen de Nordgarde, Atius Pailethium, lui avait fournis quelques informations sur les sceaux anciens qu’Erwan Korvander avait mis en place pour protéger le monde d’une certaine menace, classée parmi les nombreuses « Calamités » supposées apporter une destruction massive sinon totale au monde si elles venaient à être libérées. Le Dragon Ancestral. Sincèrement, le Roi n’aimait pas l’idée qu’un Dragon puisse être enfermé dans les entrailles de la Terre, mais apparemment, celui-ci n’avait d’autres buts que de causer la destruction autour de lui, ce qui en faisait un ennemi du monde, un indésirable et un être dénué de raison. La puissance de la bête l’empêchait néanmoins d’être détruite par des moyens conventionnels, ce qui pouvait expliquer en partie la raison pour laquelle Erwan ne put s’en débarrasser définitivement. Ou alors le Premier n’osait pas mettre fin à un être aussi vieux et puissant, aussi maléfique soit-il. En cela, les deux monarques se ressemblaient beaucoup; combien de fois Mélisende s’était-elle retrouvée entre ses mains sans qu’il ne puisse se résoudre à lui planter sa lame dans la gorge et la laisser mourir une bonne fois pour toute?

« C’est un haut lieu de résonance magique, et, comme notre ami sorceleur l’a mentionné, nous affrontons des ennemis puissants, bien organisés, et visiblement dotés d’un mage particulièrement puissant. Je pense que ces gens se rendent vers Kor-Tarath pour y accomplir un quelconque maléfice. »

Subitement, le Roi s’agita vivement, incitant Cahos à le déposer sur le sol. Il laissa donc son ami se poser sur ses jambes. Son équilibre semblait vacillant, ce qui l’inquiétait beaucoup, s’empêchant à grand peine de lui offrir de l’aide. Marchant d’un pas chancelant, semblant sur le point de s’effondrer à tout moment, le Roi s’approcha d’une table. Cahos s’apprêta à lui donner à nouveau un coup de main quand il atteignit enfin une chaise et poussa sur la table un petit objet sphérique qui se positionna au centre de la table avant de s’envoler à quelques centimètre de celle-ci et d’irradier une puissante lumière qui finit par s’estomper, laissant place à une multitude de petits points lumineux partout dans la pièce. Le Roi agita rapidement les doigts en l’air et les petits points se déplacèrent à toute vitesse avant qu’une grosse sphère en forme de globe apparaisse devant les Sylvandins. Aucun doute possible, il s’agissait bien de Terra vue de l’espace. Grâce à la magie, la civilisation de Terra savait depuis déjà un bon moment que la planète était ronde en raison de la force gravitationnelle, et même les cultes les plus archaïques du monde reconnaissaient ce fait, pour la simple et bonne raison qu’il était impossible de l’ignorer une fois que la preuve visuelle était fournie. Le Roi s’adossa à la chaise et indiqua la boule d’une main.

« Voici Terra tel que nous la connaissons, les informa-t-il d’une voix rauque. Beaucoup d’eau, très peu de terres, mais nous avons compensé le manque de terrain par la création magique d’archipels flottants et cetera. Maintenant, Nyoron, je vous prie de m’assister dans mon discours en corroborant ou infirmant ce que je dirai. »

Le Roi, une nouvelle fois, agita les doigts et de nombreux petits points blancs se mirent à se manifester sur le globe, certains tout petits, d’autres beaucoup plus importants.

« Ces points représentent les points de concentration d’énergie magique naturel. On parle d’énergie vitale. Cette forme d’énergie est naturellement neutre. Cette neutralité est souhaitée par tous les magiciens dits mages blancs car l’équilibre est une variable très importante dans la magie, qui permet aux magiciens l’usage de sorts défensifs, offensifs ou même curatifs. Maintenant, voici une nouvelle information. »

Cette fois, aux gestes du Roi, plusieurs voiles noirs tombèrent sur les petits points blancs, qui devinrent noirs au contact de cette étrange matière.

« Ces voiles noirs sont la représentation que je me fais des endroits où la magie naturelle est déstabilisée par la magie noire. Nyoron, vous n’êtes pas sans connaître les règles de la magie, donc, corrigez-moi si je me trompe, mais cette magie noire est causée principalement par des massacres, les viols, les pillages, bref, des activités mordrediennes typiques. Et vous savez donc également qu’il est possible, en étant particulièrement habile, de concentrer cette énergie noire et la canaliser pour réaliser un fait magique hors du commun. »

Si Nyoron comprenait ce qu’il disait, le Roi ne lui donnait pas longtemps à comprendre également la nouvelle ampleur de la menace. Le Roi passa brièvement une main sur son visage en analysant les informations présentes devant lui. Il aurait voulu savoir combien de menaces exactement leurs opposants comptaient ramener à la vie et comment ils étaient supposés empêcher la réalisation de leurs plans. Il avait beau retourner la question dans tous les sens, mais à chaque fois, il se frappait aux différents murs qui se dressaient sur son chemin; leurs ennemis étaient organisés, rapides et surtout, ils ne perdaient pas de temps en provocations inutiles; ils ne cherchaient pas à les narguer; ils avaient un but, et ils comptaient bien le réaliser, ce qui les rendaient d’autant plus dangereux. Le Roi prit une grande inspiration et regarda Nyoron.

« Une cabale, mon ami. Nous faisons face à une cabale dont les nombreux membres ont dans leurs projets de réveiller le Mal sous toutes ses formes. Et ils se croient capable de le maîtriser et le garder sous contrôle. Mes démons, vos démons, ceux des Nexiens ou des Ashnardiens, cela n’a aucune importance pour eux; s’ils peuvent mettre la main dessus, ils le feront. Kynarth, vous vous souvenez de ce que je vous ai dit sur Althenos? Que je croyais qu’il était le maitre derrière les marionnettes? Eh bien, je n’en suis plus aussi sûr, désormais. Je crois plutôt que plusieurs entités maléfiques bien distinctes cherchent à se libérer de leurs liens et recommencer à sévir sur le monde. Et avec l’arrivée récente de mages noirs et la corruption qui gangrène le monde, ils ont les outils nécessaires à l’accomplissement de leurs objectifs. »

La fin du monde n’était pas vraiment ce que le Roi cherchait à sous-entendre, mais ce qui était sûr, c’est que s’ils n’arrivaient pas à reprendre les choses en mains très vite, sur plusieurs êtres du mal absolu, ils ne pourraient en prévenir que quelques-uns. Le Roi Cramoisi, Ankh’Anvrheim, le Dragon Ancestral, Mélisende et les dieux seuls savent encore combien d’êtres d’une puissance démesurée seraient libérés s’ils n’arrivaient pas à refermer la porte que cette cabale cherchait à enfoncer, et si l’inévitable devait se produire, ils devraient être préparés, ils devaient connaître ce qu’ils s’apprêtaient à affronter. Le Roi se tourna alors vers Cahos, un moment, et les deux amis, sans un mot, hochèrent de la tête. Pour avoir déjà affronté un Mal absolu à leur époque, ils savaient qu’ils ne pourraient pas faire front avec les ressources seules de Meisa. Il se tourna vers les trois Sylvandins et joignit les mains, s’accoudant sur la table.

« Nyoron, je sais que vous ne voulez pas faire tout le chemin vers l’Omniprêtre et risquer de ralentir notre progression, mais si le Commandeur Kynarth me donne l’autorisation d’user d’un sort de téléportation en territoire Sylvandin, je pourrai obtenir de votre mémoire les informations nécessaires à un déplacement instantané de notre groupe et nous économiser plusieurs jours de marche. Hodor est présentement absent, il nous faudra donc le retrouver avant de lancer le sort, mais si Kor-Tarath est sur le point d’être remis en état de fonctionnement, l’Omniprêtre est le seul érudit capable de nous dire ce que nous devons savoir pour être capable de l’arrêter; et nous gagnerons un temps considérable. Si nous atteignons Kor-Tarath avant nos ennemis… peut-être que nous pourrons les arrêter, avec une force suffisante … Et… »

Cette fois, il se tut. Pas qu’il ne savait pas ce qu’il voulait dire, mais sa vue s’était embrouillée et il avait perdu tout contrôle sur sa parole. Les derniers mots de sa phrase s’étouffèrent dans un étrange gargouillis avant qu’il ne se dégage la gorge d’une bonne toux, souillant la table d’une tache de sang. Cahos s’empressa de le rejoindre et de le remettre en position verticale. Le Sorceleur lui enfonça alors un fortifiant dont il avait le secret dans la bouche et le força à le boire, malgré les visibles protestations du monarque. Une fois qu’il eut ingurgité, le Roi fit une grimace incroyable de dégout; cette mixture avait une texture et un gout exécrable pour son palais. Il adressa un regard furibond à Cahos, qui lui souriait avec provocation. Les deux amis se dévisagèrent un long moment dans leurs airs respectifs avant qu’un rire ne raisonne dans la pièce; le Roi avait perdu son air froissé pour laisser place à un nouvel enjouement qui plaisait à voir. Le rire fut bref, mais il avait suffisamment allégé l’atmosphère pour que le Roi semble hors de danger. Le fortifiant lui avait rendu un peu de force physique, sans affecter son état magique, ce qui lui permettrait à plus d’autonomie.

Il ne s’attendait pas à beaucoup de collaboration de la part de ses camarades Sylvandins, mais il savait qu’ils ne laisseraient pas Kor-Tarath être réactivé les bras ballants. Si Erwan avait jugé nécessaire de conserver le Dragon Ancestral enfermé, c’est qu’il y avait une bonne raison qui ne laissait de doute pour personne. Et puis, de toute évidence, le Roi ne serait pas capable d’endurer un plus long voyage; il lui fallait récupérer des forces au plus vite sous peine de devenir complètement inefficace, et avec l’actuelle aura qui entourait cette partie du royaume, il ne risquait pas de récupérer de sitôt. Il avait juste assez d’énergie pour le sort de téléportation, mais il refusait de laisser Hodor seul dans les montagnes pendant qu’ils faisaient un bond magique à plusieurs lieues de distance.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le vendredi 07 février 2014, 00:40:12
Les flammes crépitaient dans l’âtre de la cheminée, formant un apaisant rideau de feu. Cirillia s’y réchauffait. On pouvait entendre les sifflements du vent. Le groupe parlait d’un fort maudit, Kor-Tarath, et elle, elle se demandait dans quelle histoire de cinglés elle avait encore débarqué. Ciri’ était chasseuse de monstres et de dragons, elle gagnait sa pitance à la manière des sorceleurs, en tuant des monstres, et éventuellement en remplissant des primes. Sa seule motivation était de retrouver le dragon noir qui avait ravagé sa ville natale, afin de pouvoir définitivement l’occire. Cette histoire de Dragon Ancestral avait l’air de légèrement dépasser ses attentes. Elle se moquait bien de ces vieilles prophéties ridicules. Pour elle, ce n’était que des contes et des fariboles qu’on inventait aux jeunes enfants pour les forcer à dormir la nuit et à faire leurs études. Il n’y avait là-dedans aucun fondement rationnel. Pour elle, il était plus logique de penser qu’il y avait une sorte de puissant pouvoir endormi dans ce putain de fort, et que les types qui avaient massacré ce village le recherchaient.

Le Roi de Meisa créa une représentation virtuelle de Terra, faisant flotter une petite boule avec d’autres petits points qui parcouraient sa surface, formant une série de lignes. La magie... Un art qui avait toujours été inconnu pour Cirillia. Elle avait rencontré bien des « mages » qui étaient en réalité des charlatans, et ne pratiquait pas la magie elle-même. À quoi bon vouloir se battre avec un bâton ? Une bonne arbalète, et un carreau bien placé, ça valait tous les sorts du monde. La magie était trop fluctuante, trop imprécise, pour qu’elle daigne lui faire confiance.

Serenos parlait d’une « cabale », et mentionna ensuite la possibilité de se téléporter pour rejoindre rapidement Kor-Tarath. Nyoron, qui s’était assis près du feu, son bâton planté devant lui, écoutait silencieusement. Kynarth se réchauffait les mains devant l’âtre de la cheminée.

« Si c’était si simple, nous n’aurions pas traversé cette région, nous nous serions directement téléportés depuis la Griffe. Bien trop de critères et de paramètres rentrent en jeu pour se risquer à une téléportation. Nous ne sommes pas au niveau du sol, il suffit d’une variation de quelques millimètres dans le transfert pour que nous nous retrouvions encastrés dans un élément de décor. De plus, vous ignorez tout de la topographie de la région. Se téléporter à l’aveuglette est le meilleur moyen de se retrouver dans un mur. »

Encore un domaine qui passait largement au-dessus de la tête de Cirillia. Il était absolument hors-de-question qu’elle laisse un mage la téléporter. Elle se souvenait de faits divers sinistres, où des mages s’étant risqués à la téléportation n’avaient pas transféré tout leur corps, et se retrouvaient avec une jambe en moins, ou se trompaient de quelques centimètres. Leurs pieds se retrouvaient alors là où la roche aurait du se trouver. Les membres éclataient alors. Ce genre d’accidents était souvent normal, et c’était la raison pour laquelle les mages préféraient se déplacer à travers des portails de téléportation, le long de couloirs sécurisés : les fameux miroirs des mages. Ils permettaient de transiter sur de grandes distances, conduisant d’un point A à un point B. La téléportation manuelle ne pouvait s’élaborer que dans des endroits parfaitement connus du mage, ou dans des espaces très clos. En tout cas, c’est ce que Cirillia avait retenu. Cependant, pour elle, ça ne changeait pas grand-chose. Miroir ou pas, elle ne faisait pas confiance à ces trucs de mages, et préférait la bonne vieille marche, à pied, ou avec un cheval.

« Vous savez comment vous rendre dans ce volcan ? demanda alors Cirillia.
 -  Le volcan se trouve dans le Territoire des Dragons. Nous pourrions y aller par la surface, mais les dragons nous attaqueraient. Et, vu l’endroit où nous sommes, seul un héritier d’Erwan pourrait les raisonner pour qu’ils ne nous attaquent pas.
 -  Donc, il faut passer par les grottes...
 -  C’est le seul moyen. Nos ennemis ont une légère avance, mais ces grottes sont un vrai labyrinthe, et je ne pense pas qu’ils aient avec eux un guide de la région. Ils doivent se repérer à l’aide des signaux magiques que Kor-Tarath émet. En d’autres termes, en choisissant soigneusement les bons passages, nous pourrons les rattraper. »

Cirillia hocha lentement la tête, se pinçant les lèvres.

« Des passages que vous connaissez, je présume ?
 -  Je ne les ai jamais empruntés, mais je les connais, oui, reconnut Nyoron.
 -  Et vous pensez que ces types cherchent à réveiller le dragon situé sous Kor-Tarath, Kynarth ? »

Kynarth était toujours près du feu, et se retourna. Son regard croisa celui de Cirillia. Le jeune homme était visiblement affecté. Il venait de voir tout un village mourir, il venait de voir la cruauté et la malfaisance à l’œuvre.

*Estime-toi chanceux, petit homme... Je n’avais pas une épée quand je ‘lai senti, et je sentais les flammes me picorer les cheveux...*

Kynarth hocha lentement la tête, réfléchissant.

« Je n’en ai pas la moindre idée. Les légendes disent que, jadis, quand le monde n’était que flamme et soufre, les Dragons vivaient, et alimentaient ce feu. Avec la transformation de la planète, ces immenses volcans se sont enfouis sous terre, emmenant avec eux les créatures des anciens temps. Ces antiques légendes justifient ainsi les éruptions volcaniques, en considérant que, quand un volcan entre en éruption, c’est parce que le souffle d’un de ces vieux dragons nous parvient. La vérité, c’est que nous ignorons si ces dragons ancestraux existent ou non, si ce ne sont que des fossiles dans la roche, ou des créatures réelles, emprisonnées dans les profondeurs du monde. La science tekhane a permis d’expliquer la création des séismes par les mouvements de plaque tectonique, et non par de quelconques Titans enchaînés par les Dieux, qui feraient tinter leurs chaînes au point d’en faire trembler le monde. »

Le Commandeur secoua la tête, en marchant lentement.

« L’expédition d’Erwan Korvander à Kor-Tarath n’est pas un récit historique avéré, vous savez. Il s’agit d’un genre de conte, et l’Omniprêtre n’est pas très prolixe sur ce genre de choses. Il est possible qu’il n’y ait même plus de fort dans le volcan, ou que cette histoire autour d’un Dragon Ancestral, d’une calamité, ait été inventée de toutes pièces... Ou soit une sorte de métaphore pour désigner le risque d’une éruption volcanique. J’ignore ce que ces gens veulent, mais, ce dont je suis sûr, c’est qu’un maléficien est avec eux, et qu’ils n’ont pas commis ce massacre gratuitement. »

Ciri’ hocha lentement la tête. Tandis que Kynarth parlait, elle avait sorti un couteau de chasse, et l’avait planté dans la table, jouant avec en le remuant, en le faisant tournoyer sur lui-même.

« Vous pensez à un sacrifice rituel ?
 -  C’est possible. »

Cirillia n’avait plus rien à dire, et s’humecta les lèvres.

« Nous partirons demain matin, de bonne heure. »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le mercredi 12 février 2014, 17:45:06
Le Roi avait décidé de laisser ces gens se conforter dans leur crainte de la téléportation. Il ne prit même pas la peine d’établir avec eux que le sortilège qu’il avait lui-même confectionné requérait certes plus d’énergie que la téléportation normale, mais qu’il permettait au jeteur de s’assurer que toute l’espace nécessaire était disponible à l’aide d’un repère magique, peu importe le nombre de « passagers ». Lorsque Nyoron leur signala qu’ils passeraient la nuit dans cet auberge, le Roi hocha simplement de la tête. Après tout, il leur restait encore deux jours, selon les dires de l’acolyte de la Dame Grise. S’ils venaient prendre du retard, Serenos leur fausserait simplement compagnie pour aller à sa vitesse habituelle; il foncerait droit vers ses ennemis, en passant outre des pièges et embûches, taillant son chemin au fil de son épée. Agrippant Ehredna comme une canne, il se redressa de son siège, souhaitant au passage la bonne nuit à ses compagnons avant de se diriger vers les escaliers. Il parut un peu découragé face à l’entreprise que consistait l’ascension de ces maudites marches, mais lorsqu’il était épuisé à ce point, il ne se voyait pas user de la magie pour se porter en haut; il les monta donc une par une, en s’appuyant à la fois sur son épée et sur la rampe pour supporter son poids et en délester ses jambes qui, de toute évidence, ne le portaient qu’avec peine. Cahos, pour sa part, annonça à la troupe qu’il prendrait les devants; fort de sa formation, il ne craignait pas les monstres et il préférait voyager de nuit, pendant que les monstres les plus sauvages rôdaient, pour avoir la meilleure chasse possible jusqu’au moment de gagner le sommeil. Il les assura néanmoins qu’il les retrouverait sur le chemin. La voie des sorceleurs réclamait que ceux-ci se donnent à corps et âme à l’extermination des créatures nuisibles et, bien qu’il se garda de le leur dire, il n’aimait pas être dans un groupe; même pendant la Guerre Continentale, il avait préféré mener ses combats de son côté. C’était bien ancré en lui, et il ne se sentait pas de quitter ses habitudes. Il prit la peine de poser une main amicale sur l’épaule de Cirillia, qui pouvait se traduire par un salut envers un autre « sorceleur », puis prit la porte.

Dans sa chambre, le Roi prit place au centre de la pièce puis planta son épée dans le bois du sol avant de s’asseoir, face à la fenêtre, et de joindre les mains, les avant-bras posés sur les jambes dans une prière négligée. Bien que n’étant pas un homme pieux ou de prière, il trouvait dans la méditation spirituelle quelque chose de profondément religieux, qui lui semblait ancré au plus profond de son être. Il prit plusieurs inspirations et laissa autant d’expirations profondes dans l’espoir de réguler le rythme de sa respiration. Lentement, sa perception du monde se brouilla. En plongeant dans cet état de transe, il se retrouva dans un espace blanc. Il ne ressentait plus la douleur de ses membres, ou la fatigue de son esprit; il n’y avait que la quiétude. Il ouvrit alors la porte à ses souvenirs, et alors entrèrent dans cet endroit paisible le Roi Liam, la Reine Nöly, l’Archimage Darimon et la Sorcière Mélisende, ces quatre personnes qui furent autrefois ses guides, qui avaient rendu sa vie un peu plus supportable. Bien que n’étant pas les gens tels qu’ils étaient mais tels qu’il les connaissait, il savait que dans ce recueillement, il ne s’adressait pas réellement à eux; ils représentaient en quelques sortes des facettes de sa propre personnalité. En Liam, il voyait le Roi juste et inébranlable, son modèle en tant que dirigeant. En Nöly, il voyait la sagesse, le renouveau et la modération, car grande réformatrice, elle avait aidé à la renaissance de Nexus en tant qu’état de liberté et de justice pour tous. Darimon était et resterait toujours son guide dans le monde chaotique de la magie; c’est avec lui que le Roi pesait le pour et le contre de chaque décision d’origine magique qu’il prenait. En Mélisende, par contre, il voyait sa propre faim de pouvoir, son besoin irrépressible d’être au-dessus de tout. Lorsqu’il discutait avec elle, la prenant en modèle, il voyait jusqu’où sa propre insatiabilité s’étendait, et c’est là où il voyait où il devait mettre ses limites.

Pendant une bonne heure, le Roi délibéra avec les quatre mentors pour la bonne marche à suivre. Liam lui conseillait une plus grande assurance, recommandant qu’il conserve une attitude de dirigeant face à la situation; s’il n’en prenait pas contrôle, elle prendrait contrôle de lui. Avec Nöly, il eut droit à un sermon sur son insensibilité face à ses compagnons, qu’il traitait comme des poids morts. Elle lui inspira un peu de compréhension et de prévoyance envers eux, et s’il se montrait bon avec eux, ils le lui rendraient. Il doutait honnêtement de cette dernière partie, mais il ne se permit pas de fermer son esprit à cette possibilité. Lorsque vint le tour de Melisende, il vit son désir de délaisser ses compagnons, favoriser ses objectifs et faisant fi de leurs conseils et de leur peur générale. Sylvandell, disait-elle, était un pays de rustres peureux, qui se confortaient dans leur héritage et leurs vieilles croyances. Elle le confronta à sa propre avidité, à son empressement et à l’urgence d’être toujours un pas devant ses adversaires, et de profiter au maximum des avantages offerts par ses alliés. Elle établit également que leur manque de foi en leurs propres mythes et légendes mettaient leur royaume en péril. Pour des gens qui vénéraient des dragons, ils ne semblaient incrédules quant aux histoires d’autrefois sur les guerres qui les concernaient. Devant ces arguments, le Roi se sentit sourire alors qu’il quittait cet espace blanc de son esprit pour regagner son corps physique.

« C’est mon rôle de leur ouvrir les yeux, déclara-t-il dans un lent soupir de détente. C’est pour ça que je suis ici; pour qu’ils comprennent le danger, non pas pour créer un état de panique, mais pour qu’ils soient prêts, le moment venu. »

Fort cette conviction, le Roi se releva enfin, délogeant Ehredna du bois avant de gagner le lit. Magiquement, plus par hygiène que dédain, le Roi chassa la poussière et la cendre qui couvrait les draps avant d’ouvrir la fenêtre et évacuer les immondices de la pièce. Une fois acceptable, le Roi se débarrassa de son manteau, puis défit la fermeture éclair de sa tenue pour se libérer la partie supérieure du corps avant d’aller s’allonger sur le matelas, serrant son arme contre lui. Il n’aimait pas reposer sans son équipement en terrain inconnu. Naturellement, il se positionna sur le dos, sans les couvertures qui risquaient de le gêner si quelque chose se produisait.

Au milieu de la nuit, le Roi fut réveillé par ses sens magiques qui l’alarmaient d’un danger. Les émanations magiques, naturellement captées par les mages, étaient relatives à la menace que représentait celui ou celle qui les produisait. Et cette menace, bien que dépourvue d’intelligence, recelait bel et bien un pouvoir redoutable. Méfiant, le Roi se redressa discrètement de son lit et passa sa combinaison sur ses épaules avant de remonter la fermeture éclair et se diriger vers la porte, Ehredna tirée du fourreau. Se servant de l’épée comme d’un levier, le Roi écarta lentement la grande planche de bois qui séparait la pièce du corridor et jeta un coup d’œil. Il vit alors une ombre furtive passer au travers de la porte. Kynarth. Le Roi se rua alors dans le couloir, glissant sa lame dans l’interstice de la porte et il tira d’un coup sec pour briser le mécanisme de fermeture, s’élancant à l’interieur juste à temps pour lancer vers l’ombre un jet de lumière. Il se précipita alors vers le jeune homme et tâta son pouls à toute vitesse, lâchant un soupir de soulagement lorsqu’il comprit que le monstre n’avait pas eu le temps de l’attaquer. Il secoua alors l’homme par l’épaule en l’appelant par son nom pour le réveiller.

« Kynarth, réveillez-vous! Réveillez-vous! murmura-t-il d’un ton pressé. Nous sommes attaqués. Nous n’aurions pas dû rester dans ce village; les Ombres nous guettent. Allez, debout, maintenant!
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le vendredi 14 février 2014, 01:33:02
Kynarth prit une chambre dans un coin de l’auberge, et y alluma un feu de cheminée dans la petite cheminée fournie dans la pièce. Le Commandeur était éreinté et épuisé, et se retrouvait torse nu quand il entendit du bruit dans son dos. Sursautant, l’homme se retourna, et sentit son trouble s’accentuer en voyant Cirillia, accoudée contre le rebord de la portière, jambes croisées. Elle avait un léger sourire sur les lèvres, et ses bras étaient également croisés.

« Nerveux, Kynarth ?
 -  Nerveux, moi ? Alors que je vais me coucher dans un village qui a été entièrement massacré par des forces obscures ? Il n’y a vraiment pas de raison... »

Il s’assit sur le rebord du lit, et Cirillia s’avança dans la pièce, faisant craquer le bois, refermant lentement la porte derrière elle. Elle avait aussi sa propre chambre, mais, en se rapprochant de la pièce de Kynarth, Ciri’ avait fait sa curieuse, et avait vu que le dos de l’homme était orné de quelques cicatrices. Son torse était glabre, délivrant une belle masse musculaire. Un corps de guerrier, le corps d’un homme qui entretenait sa force physique. Cirillia s’avança lentement, restant debout devant lui. Elle était suffisamment intelligente et clairvoyante pour deviner le trouble qui agitait le Commandeur. C’en était amusant, et elle se surprit à lentement sourire.

Kynarth finit par relever la tête.

« Et... Et vous ?
 -  Et moi ?
 -  Ben… Est-ce pour ça que vous êtes là ? Parce que vous êtes... Inquiète ? »

Restant face à l’homme, Ciri’ sourit, croisant à nouveau ses bras.

« Oserais-je vous rappeler que j’ai connu, étant jeune, le massacre de toute ma ville par un dragon ? Je ne vous cacherais pas que je ne trouve pas cet endroit lugubre, mais quelque chose me dit que le courageux Commandeur que vous êtes n’est pas uniquement troublé par ces lieux... »

Kynarth se racla la gorge, reprenant son souffle. La chasseresse vit ses mains. Elles tremblaient lentement, et il les posa à plat sur ses cuisses. En relevant la tête, il avait une formidable vue sur les seins de Ciri’, qui décroisa les bras pour ça, tout en se penchant légèrement vers lui, offrant ainsi à l’homme la vue d’un superbe décolleté. Kynarth réussit à ne pas rougir, mais ne put empêcher son regard d’observer la poitrine de la belle. Il cligna des yeux, et, comprenant alors qu’on l’observait, les rabaissa.

« C’est là quelque chose qui me dépasse... Si prompt à manier l’épée, mais si incapable face à une simple femme... »

Kynarth se releva alors, faisant légèrement grincer le lit, et son torse frôla les seins de Ciri’.

« À quoi est-ce que tout ceci rime ? Êtes-vous venue là pour me narguer ?!
 -  J’admirais vos cicatrices... Et je me demandais une chose... Pourquoi les Dieux ont-ils créé les cicatrices ? »

Décontenancé par cette question, Kynarth secoua la tête. Le pauvre Commandeur ne voyait pas l’évidence, alors qu’elle pendait sous son nez. Comme quoi, les hommes n’étaient parfois pas très doués. Elle était sûre qu’il était encore puceau. Cirillia savait que Kynarth éprouvait un béguin d’enfance envers la Princesse de Sylvandell, tout comme elle savait que la Princesse aurait laissé à Kynarth le soin d’accomplir ses rêves, s’il n’avait pas été aussi timide. C’était là un troublant paradoxe, car, au combat, Kynarth était un bretteur redoutable, habile et vif. Cependant, sans son armure, c’était le fermier qui revenait, un jeune homme impressionné par les belles robes des dames de la Cour, par leurs parfums, et les mots savants. S’il avait été moins empoté, Cirillia était sûre qu’il aurait forniqué avec bon nombre de femmes durant ses instructions militaires.

Elle poursuivit rapidement, tout en retournant Kynarth, et en embrassant son dos, à l’emplacement des cicatrices, ses mains glissant sur ses hanches. L’homme sursauta, son pouls s’accélérant, mais il n’osait rien faire.

« C’est pour que leur femme puisse les embrasser le soir, afin de les soulager de leur affliction. »

Kynarth se surprit à sourire, alors que les mains de Cirillia venaient caresser ses tétons. Il sentait avec délice les seins de la femme s’enfoncer contre son dos, mais se retourna.

« Honnêtement, Cirillia, j’ai du mal à vous imaginer en tant que femme au foyer... »

Devant cette réplique inattendue, Cirillia faillit pouffer. Elle resta proche de lui, un sourire amusé sur les lèvres.

« Vous maniez à merveille l’épée, Kynarth, mais vous n’êtes guère doué avec les femmes...
 -  Je ? Quoi ?!
 -  Vous restez convaincu que la Princesse vous considère toujours comme un bon petit fermier, et, ce faisant, vous vous convainquez que les femmes ne voient pas en vous le bel homme que vous êtes devenu... Votre humilité confine au ridicule, Commandeur.
 -  Mais... »

Il ne put pas achever, car, d’une pousse, Cirillia le renversa sur le lit, et se mit à califourchon sur lui.

« Vous êtes l’une des principales raisons m’ayant poussé à ce trekking dans ces montagnes infernales, Kynarth...
 -  Ah... Ah bon ?! »

Cirillia sourit lentement, caressant le visage de l’homme, tout en sentant sa virilité poindre entre ses cuisses.

*Ah, tout de même, j’aurais fini par m’inquiéter !*

Les yeux de Kynarth étaient exorbités, comme si l’homme ne comprenait pas ce qui lui arrivait.

« Maintenant, et pour résumer... C’est l’heure de passer à la casserole ! »



Le soir, des vents glaciaux s’abattaient dans la chaîne de montagnes. Sans la lumière du jour pour éclairer ces monts élevés, le froid s’abattait, et on pouvait entendre les sifflements du vent. Depuis les points les plus élevés des montagnes, là où gisaient d’anciens temples, on pouvait même voir, par-delà les ruines, au milieu d’un océan d’étoiles, des aurores boréales. Kynarth dormait couché sur le dos, d’un sommeil de plomb, Cirillia posée à ses côtes, sa tête sur le côté de son corps, une main caressant ses omoplates. Les deux amants dormaient tendrement. Pendant un bref moment, Cirillia avait réussi à faire oublier à Kynarth sa morosité, ce en quoi il lui en était infiniment reconnaissant.

Dehors, le vent sifflait. Nyoron se trouvait au rez-de-chaussée, et ne dormait pas vraiment. Il méditait, pour être plus exact. Yeux fermés, assis en tailleur, la magie vibrait intensément autour de lui, et il rectifiait son équilibre magique. Néanmoins, quand il sentit une présence sombre approcher, ses cercles de perception s’en retrouvèrent modifiées, perturbées. Une puissance phénoménale approchait, et il se releva subitement, tandis que les volets se mirent à claquer, sous l’effet d’un vent particulièrement fort. Il entendait des mugissements glauques, ainsi que de sinistres reflets se découlant sur la lumière de la Lune. Percevant des bruits contre la porte d’entrée, Nyoron attrapa son bâton magique, et le brandit vers cette dernière, envoyant des sorts magiques pour repousser les apparitions.

En hauteur, Kynarth et Cirillia furent subitement réveillées de leur sommeil. Kynarth entendit parler d’Ombres, et une force souleva alors le Roi, l’écartant pour l’envoyer heurter le mur d’en face.

« Mais que... ?! »

Kynarth sentit soudain une forme au-dessus de lui, et bondit de côté. Quelques instants plus tard, le lit fut découpé en deux, envoyant voler des plumes. Il se retrouva sur le sol, tout nu, et attrapa son épée, tandis que des ombres noires volaient dans les airs, semblables à des Poltergeist. Une chaise dans un coin de la pièce fut alors soulevée, et s’envola, frappant Kynarth à la tête. Ce dernier poussa un hurlement de douleur en s’affalant sur le sol, alors que la pièce était en train de se déchaîner.

En contrebas, tous les objets de la pièce principale de l’auberge tourbillonnaient dans les airs, essayant de frapper Nyoron, tandis qu’une épaisse fumée noire le recouvrait. Ce dernier se protégea avec un solide bouclier, un dôme magique, mais la magie noire l’effritait à chaque coup, le faisant saigner du nez.

Une force maléfique était à l’œuvre entre ces murs, et elle était puissante.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le vendredi 14 février 2014, 21:30:44
« Kynarth! Argh! »

Le Roi venait de se faire brutalement repousser par une Ombre, qui l’envoya contre un mur. Le bois sec céda sous l’impact, mais le craquement que tous entendirent ne provenaient pas de celui-ci; les os du Roi avait manqué de peu d’être brisés par la brutalité de l’arrêt. Cloué au mur par cette force étrange qui les prenait d’assaut, le Roi ne put pas s’élancer, comme il l’aurait voulu, au secours du trio. Il dut rassembler beaucoup de force pour arriver à rejeter à la force de son énergie pure le maléfice qui le maintenait en place. L’étranger se jeta alors devant les ombres et se mit à irradier de la lumière, effrayant un moment les ombres avant qu’un ne le frappe à la tête avec un pied du lit. Il vit passer des étoiles devant ses yeux, tombant presque au sol sous l’étourdissement soudain, mais il parvint à reprendre ses esprits assez rapidement pour prévenir la chute. Des décombres du lit, les ombres avaient graduellement tiré le corps de Cirillia, mais Serenos ne comptait pas les laisser filer aussi facilement avec le corps d’une de ses accompagnateurs. Il se jeta alors sur les créatures de ténèbres, invoquant une nouvelle fois la lumière dans la paume de sa main et les aveugla juste assez longtemps pour récupérer la jeune femme de leurs griffes. Il fit plusieurs bonds vers l’arrière pour éviter les pics d’ombres que les créatures formaient avec leurs corps sans forme, bien qu’il dut encaisser une entaille au dos alors qu’il se retournait pour épargner les dommages à la jeune femme. Il la déposa dans les bras du Commandeur puis il se releva.

Au moment où une ombre reculait pour s’élancer à toute vitesse vers le commandeur, Serenos fit apparaitre du bout de ses doigts un fil doré qu’il fit claquer dans l’air, avant de l’envoyer s’enrouler autour d’une des formes de ténèbres; la créature émit un son, mais qui n’en était réellement pas un; leurs esprits avaient captés ce cri dans le vide. Cet usage de la magie causa néanmoins un saignement de nez au Roi; il n’avait pas encore récupéré ses forces, et chaque appel de la magie provoquait chez lui de nouveaux maux. Le Meisaen tira brutalement sur le fouet de magie, tranchant net la créature qui disparut dans une volute de fumée. Devant la disparition d’une des leurs, les ombres comprirent que le Roi représentait une menace pour les êtres de leur espèce, aussi se penchèrent-elles plus sérieusement sur son cas. Le Roi les regarda un bon moment puis il tourna la tête vers Nyoron.

« Je vais faire diversion… profitez-en pour sortir de la zone. Vers Kor-Tarath. Allez! »

Serenos leva alors les mains vers les créatures, cette fois bien décidé à leur donner une vraie résistance, mais dans sa distraction, il n’avait pas remarqué qu’elles s’étaient mises en amas pour former une forme indistincte de magie noire avant de se propulser comme une volée de chauve-souris contre lui avec une telle force qu’elles emportèrent le Roi au travers du mur, avant d’obliquer légèrement vers le haut pour le pousser en hauteur. La voix du Roi se fit entendre alors que sa surprise se laissait entendre dans un grand cri. Une fois assez en hauteur, les ombres s’écartèrent pour laisser le monarque chuter vers une mort qui aurait dû être certaine, mais au prix d’une immense douleur dans la poitrine, le Roi parvint à se stabiliser dans les airs et d’invoquer les Sylphes pour le porter. Les petites fées vertes s’amassèrent sous les vêtements du Roi et le soulevèrent de tous leurs petits corps lumineux, alors que le Roi tirait son épée. Les ombres avaient disparu, et il parcourait les alentours du regard. Il sentit un mouvement derrière lui, mais encore trop faible pour pouvoir contrôler adéquatement les petites fées, il dût encaisser un nouveau coup aussi brutal et douloureux qu’un coup de masse. Les Ombres enchainèrent dans un succession violente d’impacts brutaux, ce qui agitait le Roi dans tous les sens sans lui laisser le temps de répliquer. C’était un lynchage pur et dur. En temps normal, il aurait pu à nouveau irradier la lumière, mais dans son état actuel, ses forces au déclin ne lui permettaient qu’à peine de voler. Comme ultime coup, les ombres se glissèrent derrière ses jambes avant de les pousser brutalement vers le haut, prendre ensuite de la hauteur et se propulser sur le roi, maintenant dos au sol, le forçant alors à un atterrissage des plus brutales sur le sol de pierre dur. Les ombres s’acharnaient sur lui de façon à être entièrement sûres qu’il ne pouvait plus s’opposer à elle, et du coup, une fois le Roi à terre, malgré ses os brisés et le sang qui coulait, les ombres se divisèrent en petites sphères noires et entreprirent de massacrer leur ennemi au sol tant qu’il ne pouvait pas se défendre.

Au bout d’un moment, la douleur était telle que Serenos ne les sentit plus que comme des mouvements contre sa peau. Sombrant lentement dans l’inconscience, il s’apprêtait à s’y abandonner quand brièvement, le visage de Shunya apparut dans un recoin de son esprit. Elle avait besoin de lui. S’il ne lui portait pas secours, qui le pourrait? Il leva alors la main, et malgré les ombres qui grugeaient sa chair, il parvint à en agripper une et il planta ses dents dans l’immonde masse noire avant d’en arracher un lambeau. L’énergie dont était composé ces monstres étaient souvent d’origine maléfique, car elles n’apparaissaient que dans des zones où de morts violentes et inhumaines s’étaient produites, mais Serenos, qui était un être entre deux mondes, ne craignaient plus la puissance des ténèbres; cette fois, il prendrait aux ténèbres ce qu’elles lui avaient volé, et il absorba l’énergie noire de bon cœur. Très bientôt, il eut dévoré trois ombres. Sur les dix qui les avaient attaqués, il n’en restait plus que sept, et elles avaient compris que si elles ne le relâchaient pas, il les dévorerait également. Elles entreprirent donc de s’échapper et de trouver une proie plus adaptés à leur niveau, et ils se dirigèrent vers l’auberge, mais alors qu’elles allaient s’engouffrer dans l’ouverture qui aurait dû être une porte, ils frappèrent un mur immatériel. Derrière elles, le Roi était à nouveau debout; ses vêtements avaient été déchirés par les nombreux coups qu’il avait essuyés, et il laissa tomber le haut de sa combinaison qui, de toute façon, ne le protégeait plus; de son corps musculeux et couverts de cicatrices s’ajoutait maintenant une impressionnante collection de bleus. Vivifié par son nouveau pouvoir, le Roi leva une main. Des décombres de la chambre de Kynarth jaillit alors l’Épée Royale, qui regagna sa main. Le Roi leva une main et fit signe aux ombres d’approcher.

« Venez voir, mes jolies. Ehredna a faim, elle aussi. »

Se sachant piégées, les créatures se mirent à hurler de colère et se lancèrent aux trousses de Serenos, qui se mit alors à courir vers la sortie du village. Les Ombres ne pouvaient survivre en dehors d’une atmosphère viciée par la mort. Une fois en zone saine, elles ne pourraient plus le suivre, car si elles tentaient cette chance, elles se verraient dépouillé de l’essence même de leur existence, ce qui les tuerait presque sur le champ. Fendant ses ennemis de la pointe de sa lame pour repousser celles qui s’aventureraient à s’approcher de lui tout en gardant les vêtements retirés par-dessus son épaule, il fit sa course jusqu’à la sortie du village. Il se sentait étrangement bien, comme s’il venait d’avaler une bouteille complète de Jÿgmelröm à lui seul; ses forces étaient de retour, et il se sentait à son pic physique et mental. Pas de la même manière qu’il l’est en Meisa, mais cela restait une expérience des plus particulières; il était en pleine forme!

Mais les ombres n’étaient pas les seuls prédateurs qui rodaient dans les lieux de carnages; à la petite troupe de monstres maléfiques se mêla même de petits démons mineurs, surnommé les Charognards, et quelques goules. Rien à voir à ce qui s’était produit plus tôt, mais cela rajoutait quand même du challenge à cette course-poursuite. Décidant de poursuivre un peu le jeu, le Roi bifurqua sur la droite plutôt que de gagner la sortie et décida d’amasser le plus grand nombre d’opposants possibles pour porter un coup destructeur aux forces ennemies. Le Roi attirait le plus de monstres négatifs des environs, puis il se mit à les bombarder de projectiles enflammés pour les énerver davantage et garder leur attention rivé sur lui. Difficile de le croire pour lui-même, mais il s’amusait follement de les voir redoubler d’efforts pour l’attraper; plus ils accéléraient et plus il faisait de même, gardant éternellement une distance entre lui et ses poursuivants. Ces monstres n’étaient pas sujets à la fatigue, et lui non plus; il était bourré d’énergie comme il ne l’avait pas senti depuis bien longtemps. Cet état d’ivresse le rendait joueur, et comme à l’époque de la Tour Noire, il avait fait des créatures dangereuses ses jouets pour se distraire. Heureusement, il remplissait son devoir de diversion à merveille; Nyoron et les deux amants n’auraient pas trop de problèmes à passer vers la sortie du village.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le dimanche 16 février 2014, 02:20:43
Cirillia sentait une sorte de force surnaturelle la tracter, juste au-dessus d’elle. L’esprit encore enfariné, embrumé de la sueur et du corps de Kynarth, elle émergeait rapidement, mais peinait clairement à comprendre ce qui lui tombait dessus. Le Roi de Meisa intervint alors, et repoussa l’ombre, libérant Cirillia, qui se retrouva sur le sol, près de Kynarth. Les deux étaient nus comme des vers, et le Roi leur ordonna de partir.

*À poil ?!*

Les ombres tournoyaient follement, semblables à des espèces de nuages sombres, mais, avant de partir, Cirillia prit quand même ses vêtements, et se retrouva dans le couloir avec le Commandeur, laissant Serenos jouer avec ces monstres. Dans le couloir, l’homme et la femme se rhabillèrent rapidement, ne pouvant décemment pas espérer se battre avec les fesses à l’air. Ciri’ se mit à courir, dévalant les marches, et eut droit à un singulier spectacle en descendant. Kynarth l’attrapa par l’épaule, la basculant en arrière, ce qui permit à Ciri’ d’éviter un morceau de table qui s’explosa contre le mur. Une espèce de tornade se déchaînait à l’intérieur de l’auberge, soulevant et renversant tous les objets, qui fonçaient vers un dôme lumineux, au centre duquel Nyorkin lançait des imprécations runiques, brandissant son bâton, envoyant des ondes magiques qui faisaient gonfler le dôme, repoussant les objets et les ombres dans tous les sens. Cirillia se tenait en haut, accompagnée par Kynarth, médusée. Qu’est-ce qui était en train de se passer ici ?! Elle n’arrivait pas à le comprendre, ni à le réaliser. Tout ça était bien trop dangereux, et la magie noire était à l’œuvre.

« Il nous faut aider Nyoron !
 -  Et comment comptes-tu t’y prendre ? C’est l’enfer, là-dessous ! »

Nyoron semblait de plus bien s’en sortir, mais Ciri’ parlait avec l’œil d’une profane. En réalité, Nyoron était en grosse difficulté, et était en sueur. La magie qui était à l’œuvre ici était bien trop forte pour lui, et il n’arrivait pas à la repousser, submergé par cette dernière. Parfois, son dôme se réduisait à sa stricte personne, avant de repartir dans un flamboyant éclat, brisant alors brièvement le sortilège qui animait les objets. Les poutres de l’auberge tremblaient également, des lézardes traversant leur surface, faisant tomber des volutes de poussière depuis le plafond. Les flammes dans la cheminée et les torchères vacillaient. Kynarth hésitait, tandis qu’on entendait l’auberge craquer longuement, tremblant sur ses fondations.

Kynarth bondit alors, et atterrit au bas de l’escalier. Une chaise volait vers lui, et il invoqua sa magie, envoyant une onde de choc qui repoussa la chaise, tout en la faisant exploser. Cirillia le rejoignit alors, restant dans son dos. Les Commandeurs maîtrisaient la magie, et elle avait l’impression de voir deux amants s’avancer ensemble. Kynarth envoya une autre onde de choc, ce qui déchiqueta plusieurs planches sur le bois, explosant une table. Il continua à courir, et le duo traversa le cône lumineux.

« Nyoron ! Il faut partir ! »

Nyoron allait dire quelque chose, lorsque la double porte d’entrée explosa subitement. Le choc renversa Nyoron, livrant passage à plusieurs hommes aux yeux luisants. Il y avait également des femmes, l’ensemble dans des armures légères et élégantes. Nyoron saignait du nez, et se releva, tendant son bâton. Il allait le lancer quand une forme arriva à côté de lui, et envoya une onde de choc. C’était une femme, qui sourit légèrement :

« Du calme, papy, détends-toi ! »

Le choc renversa Nyoron, qui en lâcha son bâton. La femme fit apparaître une épée, et allait frapper, lorsque la lame de Ciri’ se heurta à la sienne. La lame de la sorcière se mit à luire, et elle tenta de la déborder en pivotant sur elle-même, mais Cirillia para, et la repoussa du pied.

« Rapide !
 -  Vous êtes qui, connards ?
 -  Baise-moi la chatte, et je te le dirais ! »

La femme poussa un hurlement, et sa lame heurta celle de Cirillia, dans une danse endiablée. Kynarth, de son côté, avait sorti son épée, mais l’un des hommes tendit sa main vers lui, et envoya une flopée d’éclairs étincelants. Rapide et vigilant, Kynarth para en mettant sa lame de côté. Les éclairs rebondirent dessus, tournoyant dans les airs, alors que Kynarth serrait des dents, pliant lentement le genou, ployant sous l’impact de cette intense magie. La sorcière, quant à elle, continuait à frapper avec rage la lame de Cirillia. Cirillia réussit à contrer, et sa propre épée heurta le plastron de la femme, avant qu’elle ne se reçoive un coup de boule. Ciri’ grogna en heurtant le front de la femme, qui tomba sur le sol. Elle allait l’empaler quand un autre ennemi tendit sa main, et envoya des espèces de tentacules noirs qui saisirent la femme, la soulevant.

« Nous ne sommes pas là pour ça, Sonia.
 -  J’vais la buter, cette pute !
 -  Calme-toi ! »

Sonia se releva, du sang s’échappant de sa narine gauche, alors que Ciri’, elle, continuait à se débattre, tirant sur les liens qui la retenaient. Elle grognait et éructait, furieuse. La jeune femme était immobilisée, mais elle forçait sur les tentacules, et fut alors repoussée. Elle s’envola à travers une fenêtre et atterrit dans la rue adjacente, s’étalant lourdement sur le sol.

« Qui... Qui êtes-vous ? grogna Kynarth.
 -  Quelle résistance ! »

Le sorcier intensifia ses éclairs, et Kynarth serra les dents, tout en continuant à plier les genoux. Il s’en servit alors pour bondir sur le côté, évitant de peu les arcs électriques. Quelques-uns le touchèrent, mais furent absorbés par son armure. Il courut alors rapidement vers l’homme, maintenant son épée, et donna un coup sec, qui le décapita rapidement. Les doigts du sorcier lâchaient encore des éclairs quand sa vie le quitta. Il courut vers un autre homme, mais une onde de choc le frappa alors, le renversant. Kynarth en lâcha son épée, s’étalant sur le sol.

« Quelle force ! C’est stupéfiant...
 -  Serenos continue à se débattre...
 -  Tant pis pour lui. Prenez ces deux-là. »

Nyoron avait été assommé. Kynarth se releva en grognant, et entreprit de courir , mais plusieurs attaques magiques le frappèrent à nouveau. Il cracha du sang en s’écroulant sur le sol, tandis qu’un sorcier était en train d’utiliser une orbe magique, prononçant une mélopée, afin d’ouvrir un portail de téléportation avec une autre orbe similaire. Kynarth se releva, et un des sorciers le chargea. Il l’accueillit par un uppercut, puis envoya une boule de feu vers un sorcier. Le sorcier réussit à éviter l’impact, et la boule de feu explosa dans le vide. Des arcs électriques jaillirent alors, atteignant Kynarth au torse. Les éclairs galopèrent sur son armure, et il grinça des dents, avant que d’autres attaques magiques ne le heurtent encore.

« Allez, vite, on décarre ! »

Plusieurs des tueurs réussirent à saisir un Commandeur qui se débattait encore, avant de le balancer dans le vortex magique. Ils s’en allèrent ensuite tous, sauf Sonia.

« J’ai un compte à régler avec cette traînée. »

Le sorcier qui l’observait grogna, puis sortit à son tour, partant. Le vortex se referma pile au moment où Cirillia débarquait.

« Où sont passés tes petits copains, salope ?
 -  Comme je te l’ai dit... Baise-moi la chatte, et je te le dirais. »

Cirillia sourit nerveusement. Elle courut alors vers Sonia, qui l’accueillit en envoyant une onde de choc, repoussant la femme hors de l’auberge. Cirillia roula sur le sol, dans la neige, et se releva rapidement, sentant alors une présence à côté d’elle. Sonia venait d’apparaître, et essaya de l’attaquer avec sa lame. La sorceleuse l’évita en roulant sur le côté, le bout de la lame tranchant une mèche de cheveux, et Ciri’ se releva, attaquant rageusement avec sa lame. Quels que soient ces gens, elle était convaincue qu’ils étaient responsables de l’apparition de ces ombres, et étaient liés au massacre qui avait eu lieu ici. Ciri’ réussit à nouveau à décocher un coup de poing à son adversaire, mais, avant de pouvoir lui porter un coup fatal, elle se téléporta.

« Peuh ! Tu te caches derrière ta magie comme une gosse dans les jupons de sa mère... Tiens-tu à m’effrayer, ou à me faire rire ?! »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le dimanche 16 février 2014, 18:08:37
Serenos ne comptait pas laisser ces monstres avoir le dernier mot; leurs rangs devenaient graduellement plus petits au fur et à mesure qu’il les bombardait de projectiles magiques. Même pour un maître nécromancien, ce genre d’invocation demandait tellement de magie que tôt ou tard, la magie noire environnante viendrait à manquer, et le sortilège s’affaiblirait. Derrière lui, il y avait maintenant, sur la trentaine de monstres et les ombres invoquées, qu’une petite poignée, six ou sept tout au plus; ces monstres étaient du menu fretin pour la plupart, ce qui ne posait pas de problème particulier au Roi pour s’en débarrasser. Il en venait finalement à comprendre que ce qu’il tentait de distraire était peut-être elle-même la distraction. Pour l’éloigner de son groupe. Il cessa alors sa course et se tourna vers ses ennemis, toujours aussi énergiques. Il dégaina alors Ehredna d’une main, alors que de l’autre, cette fois, il fit apparaître une lame de flammes. Tournant sur lui-même, il se servit de la force centripète pour porter des coups plus puissants, tranchant au travers des ombres avec Ehredna, qui les absorba immédiatement, alors qu’il embrasait deux goules au vol. Il s’élança alors vers un Charognard et lui envoya un puissant coup de pied pour l’envoyer vers un autre, exécutant ensuite un cercle complet à l’aide de ses deux armes pour trancher pattes et abdomen de ces ennemis, puis dans un grand rugissement, il déballa le pouvoir des ténèbres qu’il venait d’absorber sous forme de quatre pals noirs comme l’abysse, qui jaillirent du sol pour empaler les plus massifs de ses opposants. Lorsque les derniers poursuivants cessèrent de bouger, le Roi résorba les pals, grondant un peu en ressentant la perte d’énergie qui suivit.

Ne repérant plus d’opposant lui étant hostile, il prit une grande inspiration avant de regarder en direction de l’auberge et il vit Cirillia se battre contre une inconnue. Il se mit alors à courir dans leur direction dans l’intention de se faire une captive à interroger à la bonne et barbare méthode de la torture. Lorsqu’il sentit qu’elle invoquait la magie, il décocha un trait de lumière du bout des doigts, mais plutôt qu’atteindre sa cible, la flèche magique alla plutôt heurter un des murs de l’auberge, disparaissant à l’impact en laissant un mur partiellement défoncé derrière elle; c’était une flèche de percussion. Il lâcha un juron et passa à côté de Cirilla. Il leva une main dans les airs et tenta de repérer la faille dans l’espace-temps ouverte pour la téléportation, mais il ne la trouva pas. Ces types étaient des professionnels, certainement entrainés dans l’art de l’assassinat et de l’enlèvement furtif. Il lâcha un nouveau juron, cette fois en Ashansha, pour bien démontrer son agacement, avant de se tourner vers Cirillia. Il s’approcha d’elle et la toisa un long moment avant de se pencher sur elle, inspectant les quelques blessures qu’elle avait essuyée. Il passa ses doigts dessus en murmurant des incantations curatives pour réduire la douleur et la sensibilité, ne pouvant pas guérir la jeune femme sans le temps et la concentration appropriée. Il la regarda et un éclair d’imagination la représenta nue, dans les bras de Kynarth, et il dévia le regard en grommelant. Il marmonna quelque chose, comme quoi il avait hâte que cette histoire soit terminée pour qu’il puisse rejoindre les bras de ses jolies maîtresses. Il avait été trop longtemps sans sentir la présence réconfortante d’une femme pour s’empêcher de voir Cirillia comme telle. Il surmonta néanmoins cette difficulté parce qu’il avait maintenant deux nouvelles personnes à sauver, et que la jeune femme était probablement hors d’elle maintenant que quelqu’un lui avait ravi son amant. Du moins, Serenos savait qu’il serait furieux, à sa place.

« Ne vous inquiétez pas. Nous les retrouverons. Et nous les tuerons tous. »

Elle ne voulait pas être rassurée. Elle ne voulait pas qu’il la prenne dans ses bras et qu’il la console. À la place, il lui offrait simplement ce qu’elle pourrait bien convoiter d’autre; sa vengeance. Elle voudrait faire payer à cette femme et ses camarades l’humiliation qu’ils avaient fait subir à son équipe. Et probablement qu’elle en tirerait un immense plaisir. Et si le Roi désapprouvait la vengeance, il ne laissait jamais un crime impuni, et la seule sentence qu’il pouvait bien imaginer pour des gens aussi lâches, c’était la mort par la main de ceux qu’ils avaient offensés. Il se détourna alors de la belle jeune femme et se mit à inspecter les environs à la recherche d’un indice quelconque. Il trouva alors le sorcier mort au sol et il étira un sourire de satisfaction. Il se pencha alors sur lui et leva une main au-dessus de son corps.

« Rashal. Sarth. Mër. Kirshem. Montre-moi ce que tu sais. »

Il s’ensuivit alors d’un long moment de silence pendant lequel le Roi plongea dans la connaissance corporelle du mort et dans sa mémoire. Malgré la disparition de toute forme de conscience, il était impossible, que ce soit pour un mage ou un mortel, de faire disparaître la mémoire d’un corps. Il capta alors de brefs signaux sensoriels; cet homme avait eu très chaud il y a peu de temps. Ensuite, il avait fait un bond dans une faille spatiale pour gagner l’auberge où le Roi et ses compagnons se reposaient. En calculant la quantité d’énergie requise à l’usage de ce sortilège par rapport à la distance qu’il avait pu effectuer, le Roi fit apparaître magiquement une carte de Sylvandell sous forme astrale et ajouta cette nouvelle information à son analyse. Un cercle apparut alors, encerclant leur zone sous un certain rayon. Cette fois, le Roi se mit à rire, et il frappa ses mains ensemble avec plaisir. Kynarth, pensa-t-il avec un sourire approbateur. Je lèverai ma coupe en votre nom! Vous n’auriez pu me faire un plus beau présent! Grâce au lien qu’il avait auparavant établi entre lui, Nyoron, Kynarth et Cirillia, en plus des informations laissées derrière par le Commandeur en ayant tué un de leurs adversaires, il pouvait maintenant établir la position exacte de leurs ennemis, et même un trajet pour s’y rendre; il s’agissait d’un volcan.

Une fois son repère établit, le Roi sortit un petit miroir de sa poche et il l'enchanta d'un geste de la main. Aussitôt, le visage familier d'Alessa apparut sur le cadran, visiblement irritée. Le Roi plaça cette frustration sur le fait qu'il n'avait pas cherché à la contacter depuis son départ, ce qui avait tendance à l'énerver au plus haut point. Avant qu'elle ne lui adresse le moindre reproche, le Roi la fit taire d'un geste de la main.

« Paix, Alessa, lui dit-il calmement. Nous avons eu des complications. J'aimerais que tu fournisses un rapport de la situation au Roi Sylvandin. Le magicien Nyoron et le jeune Commandeur Kynarth ont été capturé par l'ennemi dans le village appartenant à une tribu Sylvandine, et quelque chose me dit que le demi-géant Hodor a subit le même sort il y a un moment déjà. Je m’apprête à leur porter secours, mais je manque de temps et d’informations sur le terrain. Il faut que tu demandes au Roi Tywill de faire déplacer l'Omniprêtre; dis-lui que nous nous engageons sur le chemin de Kor-Tarath, et que nous avons de bonnes raisons de croire qu'un des Premiers-Nés se cache derrière les récents excès de magie noire dans les environs. Selon Nyoron, l'Omniprêtre est le seul à savoir ce qui nous attend sur place. Il est primordial qu'il nous fournisse ses conseils. Dis à Tywill que nos ennemis visent principalement les magiciens; ils n’ont pas pris la peine d’enlever Cirillia.
Mon Roi, est-ce que...
Je n'ai pas le temps de discuter, Alessa. Va! »

Le Roi interrompit la communication en rangeant le miroir dans sa poche. Bien que son côté masculin désapprouvait le transport d'un miroir où qu'il aille, son côté pratique devait bien admettre que les miroirs étaient beaucoup plus faciles à manipuler au niveau magique qu'un liquide. Il se releva finalement et sortit de l’auberge, satisfait, bien qu’il s’arrêta un instant pour se tourner vers l’établissement et lever une main pour attirer le baton de Nyoron; il en aurait besoin pour sa revanche. L’objet s’envola et gagna sa prise.

Il ne pouvait pas mentir, cependant; il se faisait du souci pour ses compagnons, car dans la base ennemie, il ne pouvait être assuré qu’ils seraient indemnes lorsqu’ils seraient à nouveau réunis. Mais il ne pouvait s’empêcher de croire que cela n’était qu’une provocation pour les attirer dans un piège. Il se demanda alors si l’ennemi savait ce qui les attendait. Fort de son pouvoir renouvelé, le Roi ne craignait plus de faillir à sa tâche, et leurs opposants lui avaient offert leur base sur un plateau d’argent. Si leur piège ratait, c’était le Roi qui se retrouverait avantagé, et leur plan tomberait à l’eau, même si ce n’était qu’un échec sur un nombre plutôt indécent de problèmes qu’ils pourraient ramener en ce monde. Pour réussir, il aurait besoin d’un allié, quelqu’un qui le suivrait jusqu’en enfer si telle était leur destination. Liam… pensa-t-il avec un pincement au cœur. Il soupira et regarda la Sorceleuse.

« Je sais que vous ne m’aimez pas, établit-il dès le départ. Au mieux, vous n’avez aucune estime pour moi, au pire, vous me méprisez. Mais que cela vous plaise ou pas, nous allons devoir collaborer. »

Et vous allez commencer par me montrer du respect, manqua-t-il de lui lancer, avant de le ravaler avec force. Cette femme avait une langue aussi sale qu’un troll des cavernes, le lui rappeler reviendrait à en faire les frais pour le reste du voyage. Il espérait sincèrement qu’elle arrangerait son caractère dans l’avenir, pour son propre bien, mais elle n’était pas qu’une adolescente; c’était une adulte au caractère bien trempé, qui ne changerait pas sans voir une excellente raison de le faire. Et il doutait pouvoir lui en trouver une. Aux yeux de la jeune femme, elle lui montrait tout le respect qu’il méritait, en tant qu’étranger, inconnu et ennemi de l’État. Il attacha le bâton de Nyoron à son dos, qui se couvrit alors de son manteau blanc, alors qu’apparaissait ensuite une protection frontale dont la courroie disparaissait dans sa tignasse. Il partait en guerre; le temps de l’enquête était terminé. Seul, il se dirigea vers la sortie. Devant eux apparut alors un vortex noir, où des millions de petites étoiles brillaient. Il ne s’attendait pas à atteindre sa cible, mais au moins, ils pourraient s’économiser quelques heures de voyage en gagnant au moins le pied du volcan. Avec les données recueillies sur le corps de l’assassin et sa propre évaluation du terrain, il ne craignait aucunement de rater son coup; le Roi était très doué dans cet art. Comme tout encouragement, il fit signe à la jeune femme de le suivre et il entra, confiant, dans le vortex, et disparut derrière.  La porte resta néanmoins ouverte pour Cirillia.

***

« Je suis désolé, madame, mais vous ne pouvez pas entrer. Le Roi Tywill ne… H-hé! »

La Meisaenne passa simplement devant le soldat sans même lui prêter la moindre attention. À la place, elle se dirigeait vers l’enceinte du château royal de Sylvandell. Lorsque le jeune homme tenta de l’arrêter en posant une main sur son épaule et la renvoyer vers la porte, elle lui agrippa simplement le bras et avec une force et rapidité telle qu’il n’eut même pas le réflexe de le retirer, elle le fit passer par-dessus son épaule et l’écrasa lourdement au sol. Le jeune homme, abasourdi, regarda la dame à la peau brune se pencher sur lui, l’examiner avant de l’enjamber avec désinvolture, reprenant sa marche vers la salle du trône. Les Meisaennes, contrairement au Roi de Meisa, n’obéissaient pas au protocole. Natives de l’archipel bien avant l’arrivée de Serenos sur leur territoire, elles étaient l’une des principales raisons pour laquelle les Nexiens n’avaient jamais pu établir de colonies sur l’île; incapable de communiquer ou même de pacifier ces étranges créatures, les rares équipes qui devaient établir un contact avec elles étaient souvent retournées au bercail sans le moindre succès et très souvent dans un état déplorable. Les Meisaennes ne reconnaissaient que la force brute et la puissance à l’état pure.

La Matriarche Alessa zen Meisa était une femme magnifique. Dotée par la nature d’un corps athlétique tout en restant bien féminin, elle arborait avec fierté une épaisse chevelure d’argent et, fait rare chez les Meisaennes reconnues pour leurs pupilles dorées, elle arborait un œil de couleur or alors que l’autre était clairement bleu ciel, ce qui lui donnait un certain air intriguant, même pour le Roi qui se demande encore comment une Meisaenne de sang pur pouvait avoir une telle particularité. Vêtue de son habituel uniforme Meisaenne, une armure intégralement noire, le casque coincé sous son bras, elle ne passait pas facilement inaperçue devant ces gardes équipés d’une armure en écaille de dragon, qui se tenaient maintenant en travers de sa route. Alessa n’était pas comme son Roi; en dehors de Meisa, elle avait les compétences requises pour combattre des groupes réduits et mal formés, pas des gardes d’élite qui ne la laisseraient pas passer sans qu’elle ne prenne leur vie. Plutôt que d’engager les hostilités, la Matriarche dévisagea le Roi sur son trône.

« Vous êtes bien Tywill, n’est-ce pas? demanda-t-elle sans prendre la peine de l’appeler par son titre. Mon maître m’envoie vous informer que deux de vos hommes sont portés disparus après un assaut, et qu’un troisième ne répond pas à l’appel. Il vous fait savoir que l’ennemi que nous pourchassions ici cible principalement les magiciens ou les doués de magie. Mon Roi s’engage maintenant sur la route de Kor-Tarath, et il demande l’assistance de l’Omniprêtre en tant qu’informateur. Il a aussi dit… »

Elle s’interrompit brusquement et pencha la tête sur le côté, visiblement troublée par quelque chose. Elle pencha ensuite la tête de l’autre côté, toujours muette, avant de regarder le Roi de Sylvandell. Avec une franchise désarmante, la Meisaenne avoua son trouble.

« J’ai oublié. »

C’était probablement le pire défaut d’Alessa; elle ne pouvait répéter les discours oraux à moins de prendre note de ce qui se disait. Au moins, elle avait transmis la plupart de l’information, mais elle regrettait honnêtement de ne pas pouvoir retransmettre le message en entier. Sans être nécessairement concernée par le protocole, elle attendait néanmoins l'autorisation de Tywill pour partir; peut-être lui demanderait-il de transmettre quelque chose au Roi. Elle regarda un moment les gardes et croisa les bras, très peu impressionnées par les armes qui étaient pointés dans sa direction. Cette situation ne l'empêcha même pas d'être soucieuse devant la possibilité de rater le porc que les autres gardes Meisaens faisaient griller sur la broche ce soir, au campement.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le mardi 18 février 2014, 01:41:35
DAME GRISE

« Que nous voulez-vous, sorcière ?! »

L’homme avait beau être vaincu, menotté, et en position d’infériorité, il continuait à se débattre. La Dame Grise appréciait cette vigueur. Ce n’était pas un Commandeur pour rien. Ils étaient dans l’un des grands halls de Kor-tarath, et, autour de la Dame Grise, il y avait ses disciples. Elle se redressa lentement, descendant les marches du trône.

« Lâchez-moi, pleutres, couards ! »

Il envoya sa tête dans la figure d’un homme, l’envoyant s’étaler sur le sol. La Dame Grise leva alors la main, et envoya une onde de magie qui frappa Kynarth, l’envoyant s’étaler sur le sol.

« Il suffit ! Attachez-le. »

Ses hommes obtempérèrent, et Kynarth se retrouva attaché par de lourdes chaînes contre le mur. La Dame Grise croisa ensuite les bras, en attendant. Théoriquement, si elle avait bien calculé, son piège devrait fonctionner. Elle savait comment Serenos allait réagir, et elle savait ce qu’il allait faire. Initialement, l’attaque n’avait eu que pour but de capturer Nyoron, mais, quand la Dame Grise avait constaté que Kynarth était un magicien, et avait fait l’amour avec la femme, elle avait affiné sa stratégie. Entre les deux, il y avait un lien, un bref lien, que la magie de Kynarth alimentait. L’homme restait à côté d’elle, tandis que d’autres emmenaient Nyoron dans une autre pièce. La Dame Grise n’eut plus qu’à attendre quelques secondes supplémentaires avant de sentir une disparité se creuser. Des cristaux violets s’allumèrent dans les coins, le long des piliers situés de part et d’autre de ce vaste hall, et un vortex apparut devant elle.

C’est ainsi que le Roi de Meisa se retrouva pile devant la Dame Grise. Dès qu’il apparut, le vortex se referma instantanément, et les cristaux violets envoyèrent chacun des rayons, qui frappèrent Serenos de plein fouet, agissant comme des entraves magiques.

« Heureuse de voir que tu as su suivre mes miettes de pain, Serenos. Nous n’attendions plus que toi. Le rituel va maintenant pouvoir commencer. »



CIRILLIA

Cette salope était partie. Avec l’arrivée de Serenos, elle avait probablement estimé plus prudent de foutre le camp. Il ne restait rien de plus que le vent. La neige remuait dans tous les sens, et le Roi de Meisa ne tarda pas à se pointer, l’assurant qu’il l’aiderait à retrouver Serenos. Quand il la toucha, elle réagit assez vivement, en s’écartant. Elle n’avait effectivement pas besoin de son aide. Ses blessures étaient superficielles, et elle cicatriserait rapidement. Ciri’ était plus résistante que ce qu’on pouvait penser. N’avait-elle pas ingéré l’âme d’un dragon, il y a de cela plusieurs années ? Elle laissa l’homme parler avec son miroir, tandis qu’elle regardait autour d’elle. Il y avait encore des traces de pas, qui s’enfonçaient dans la neige, et qui, selon elle, fourniraient une piste beaucoup plus sûre que ces histoires de magie.

Ainsi, quand Serenos lui proposa de filer dans un vortex, elle pesta en haussant les épaules.

« Libre à vous d’aller vous perdre dans vos couloirs magiques, je pisterai ces bagnards à l’ancienne. »

La magie... Ciri’ ne l’aimait pas, et elle ne se cachait pas pour qu’on le voie. C’était une relative faiblesse, selon beaucoup, mais Ciri’ avait occis bien des magiciens. Tout ce dont elle avait besoin, c’était de son arbalète à répétition, et de ses épées. Elle vit Serenos disparaître dans le vortex. Ce dernier se ferma alors instantanément. La jeune femme était bien loin de se douter que, si elle avait accepté l’offre de Serenos, elle aurait probablement connu l’un des effets ratés de la téléportation : finir en plusieurs endroits différents en même temps, ce qui aurait équivalu à une mort instantanée. Au lieu de ça, elle retourna dans l’auberge, et trouva un solide manteau de fourrure, dans lequel elle s’emmitoufla, avant de suivre les traces, s’enfonçant dans la forêt.



ALICE KORVANDER

« Alors, vous ne savez vraiment pas où ce corniaud a pu fourrer ses miches ? »

Les deux gardes secouèrent négativement la tête. Tywill poussa un grommellement, et leur indiqua qu’ils pouvaient décarrer. Il retourna à son morceau de pain. Assise dans un coin de la salle de banquet, Alice ne disait rien, découpant proprement ses tranches de pain, déposant ensuite du beurre dessus, puis des tranches de jambon. Elle se faisait ses petits sandwichs. Le jour venait de se lever, et une tempête de neige tombait sur Sylvandell. Ceci expliquait pourquoi la Princesse s’était levée si tôt. La neige, elle adorait ça, et elle s’imaginait déjà revenir à l’époque de l’enfance, quand elle filait dans les plaines, et jouait à des batailles épiques de boules de neige. Il était probable qu’elle continuerait à le faire, même si elle était assez inquiète.

Normalement, Kynarth, Cirillia, et le reste de la petite expédition, auraient du rejoindre la ville, et envoyer des nouvelles. Or, ils n’avaient rien reçu. Et, pour ne rien arranger, cette nuit, l’Omniprêtre avait disparu. Tywill, son père, avait envoyé des hommes inspecter de fond en comble la Cathédrale, mais ils n’avaient rien vu. L’Omniprêtre s’était volatilisé. Les soldats de la Griffe ne l’avaient pas vu venir, ce qui, en soi, n’était pas particulièrement étonnant. L’Omniprêtre était à Sylvandell depuis sa création, et même avant. Il en connaissait les moindres recoins. La Princesse se demandait bien ce qui avait pu pousser le fidèle conseiller royal à quitter son poste, mais ce n’était pas ça qui l’empêcherait de beurrer ses sandwichs. Elle les mangeait rapidement, léchant ses lèvres pleines de beurre, utilisant des serviettes par la suite. Son estomac avait laborieusement gargouillé quand elle s’était réveillée, surprenant sa servante, qui était alors en train d’alimenter le feu. La Princesse était connue pour ses grasses matinées, et, à chaque début de matinée, une servante entrait dans sa chambre, afin d’alimenter le feu de la cheminée, pour qu’elle ne prenne pas froid.

« Il a certainement du se passer quelque chose, maugréa Tywill. Ce n’est pas dans le genre de ce vieux sorcier de se carapater comme un jeunot à la recherche du cul de sa grosse. »

Le Roi marmonnait dans sa barbe. Il ne portait pas sa lourde armure, mais une simple chemise en laine avec un pantalon, permettant de voir à quel point il était massif. Un tas de muscles et de graisse, avec une barbe et des mains interminables, faites pour étrangler des adversaires. On entendit soudain un remue-ménage, et la porte s’ouvrit en grand. Alice tourna la tête, tandis que les gardes présents autour de la tablée dégainèrent leurs armes. Une femme débarqua alors. Musclée et belle, elle observa Tywill, visiblement indifférente à l’armada d’épées, d’arbalètes, et d’hallebardes déployées autour d’elle. Dans son dos, d’autres gardes s’avançaient, et elle s’exprima, mentionnant la quête de Kynarth. Alice sursauta lentement, tandis que le Roi restait silencieux.

« Neutralisez-là ! ordonna un soldat.
 -  Calmez vos miches ! » gronda alors le Roi en se relevant.

Il s’avança lentement vers la femme. Même sans son armure, il était assez grand, comme une espèce d’ogre.

« C’est le blanc-bec qui vous envoie, hein ? Comment qu’y s’appelait, c’ui-ci... Serenos, ou quelque chose comme ça. Et Kor-Tarath... Hnn... Se pourrait-il que... ?! »

Alice ne comprenait pas trop ce qui se passait, mais Tywill semblait alors réfléchir. Il frappa alors du poing sur la table.

« Faites sonner la garde ! Il nous faut immédiatement préparer une expédition. Remuez-vous le cul, et prévenez la Commanderie. Dites-leur ‘‘Kor-Tarath’‘, ça suffira. »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le mardi 18 février 2014, 03:51:04
« Faites sonner la garde ! Il nous faut immédiatement préparer une expédition. Remuez-vous le cul, et prévenez la Commanderie. Dites-leur ‘‘Kor-Tarath’‘, ça suffira!
-  Dites, je peux vous piquer un sandwish? Ils ont l’air drôlement bon.

Malgré le géant se trouvant devant elle, la Meisaenne dont deux repas venait d’être annulé fixait avec une envie très franche de s’emparer d’un des délicieux sandwish préparés par la Princesse.

***

« Heureuse de voir que tu as su suivre mes miettes de pain, Serenos. Nous n’attendions plus que toi. Le rituel va maintenant pouvoir commencer. »

Maîtrisé au centre  de cinq chaines magiques émanant des cinq cristaux violets, le Roi se trouvait à quelques décimètres du sol. Il ne semblait même pas surpris d’être ainsi emprisonné. Lorsqu’il comprit que Cirillia, dans sa couardise, ne l’avait pas suivi, il eut quand même la triste réalisation que son plan venait également de tomber à l’eau. C’était probablement trop lui demander… mais elle aurait au moins pu briser les cristaux… songea le monarque visiblement déçu. Néanmoins, dans sa position, il pouvait au moins voir Nyoron et Kynarth. Il les aurait bien salués, mais dans sa position, il ne pouvait même pas bouger le petit doigt sans se causer une douleur particulièrement vive. Il se contenta de leur sourire, comme pour leur dire qu’il n’y avait aucune raison de s’inquiéter, que tout allait bien se passer. Il se tourna alors vers la Dame Grise, comme s’il venait tout juste de se rendre compte de sa présence. Elle parlait d’un rituel. Depuis le temps, il s’était habitué à l’idée qu’il aurait son rôle à jouer dans cette partie du plan de sa rivale; sans une quantité hors du commun de pouvoir, ranimer le pouvoir enfoui de cette forteresse était impossible, car pour briser un enchantement d’une puissance pareille, il fallait accumuler une puissance bien supérieure, et ça, c’était sans compter les enchantements qui avaient été mis en place au cours des années, qui, selon les estimations du Roi, pouvait prendre une bonne décennie à défaire un par un, à moins d’user d’un artéfact particulier qui se trouvait, pour le moment, entre les mains de Thamir, le Roi des Haut-Elfes du Bosquet. Le Roi le savait, parce que Thamir lui avait interdit de s’en emparer, lorsqu’il avait voulu vérifier la véracité des légendes. Il les lui avait simplement confirmé en stipulant l’avoir fait tester. Enfin, ça, c’était en espérant que les compagnons d’Erwan savaient comment verrouiller définitivement un secret magique. Enfin, tout ça, c’était de la théorie, en pratique, le Roi ne savait fichtrement rien de ce que ces gens avaient pu faire AVANT de s’attaquer à Meisa.

«  Je suis plus que convaincu du fait que tu n’es pas la principale actrice de ce grand spectacle que vous essayez de mettre en mouvement, Sorcière. Dis-moi; depuis quand la grande Dame que tu fus autrefois fais des bassesses devant les forces du mal? C’était avant ou après que les Rebelles ne t’ouvrent la gorge? Et surtout, depuis quand travailles-tu avec celui-là? »

Du bout du doigt, Serenos indiqua un jeune homme qui se tenait parmi les serviteurs de la Dame Grise. Le jeune homme s’approcha alors et révéla son visage; âgée d’à peine une vingtaine d’années, si le Roi avait eu un frère, il se trouvait devant lui. Mais plus que son frère, le Roi ne pouvait l’ignorer, il s’agissait de la seule personne que le Roi pouvait assurer qu’il détestait le plus dans ce monde, ou dans l’autre.

« Xeos Sombrechant. Petit fumier. Je te savais vide de toute moralité, mais de là à t’associer avec des ordures de dernier rang!  Toi et ta salope de mère!
-  Bonsoir, très cher Père. Toujours aussi sympathique. Parlant de Mère, il m’incombe de vous assurer de son bon souvenir. De là où elle est, elle savoure pleinement votre acharnement à une tâche qui vous dépasse.


De tous les enfants du Roi de Meisa, Xeos, né de son union avec la sorcière Mélisende au même moment que sa sœur jumelle, se distinguait comme étant le seul à avoir reçu les pouvoirs phénoménaux de son père et l’héritage unique de sa mère. Démuni néanmoins de l’Immortalité de son père, ce fils prodigue n’a jamais été capable de répondre aux espérances du Roi, n’hésitant pas à se servir de ses énormes dons pour causer du mal à autrui. Magicien doué d’un talent unique en son genre, il s’était très tôt détourné du chemin que Serenos avait espéré lui donner; celui du trône de Meisa. Pas parce qu’il n’était pas intéressé par le pouvoir, simplement parce qu’il ne respectait rien d’autre que ses propres désirs et intérêts. Pour cette raison, il fut non seulement écarté du pouvoir, mais banni à tout jamais de Meisa, où il revint pour défier son père, assassinat au passage ses deux frères aînés par duperie; les provoquant dans un duel, il usa de la magie plutôt que de son épée pour porter un coup fatal à Grymauch, et lorsque Kaëlin se précipita pour sauver son frère, il fut décapité par son cadet  sans la moindre hésitation, et le tout devant les yeux du Roi de Meisa.

Le jeune homme vint se positionner près du trône, passant aux côtés de la Dame Grise devant laquelle il s’inclina avec une galanterie qui arracha un haussement de sourcils au Roi, avant de regarder son père une nouvelle fois.

« Kor-Tarath. Si vous saviez, père, ce que cet endroit recèle de plus qu’une simple malédiction, ou un sceau mineur qui maintiendrait un soi-disant Dragon. Les légendes semblent toujours empressées de masquer le plus fantastique des détails des choses. Comme la fontaine de jouvence, qui devrait simplement rendre la jeunesse aux mortels, mais qui en fait nécessite le sacrifice d’une autre au bénéfice du premier. Le Roi Cramoisi...
-Silence, Xeos,
l’interrompit Kyrian, dont le visage était masqué derrière son casque. Il n’a pas besoin d’en savoir plus. Il verra de lui-même.
-J’en sais déjà bien assez.
»

Le Roi dévisagea successivement son fils déchu, son autre moitié puis finalement la Dame Grise. L’espace d’un instant, il souhaita l’avoir simplement incinérée plutôt que d’avoir confié son corps à la mer, et avoir ainsi permis à un nécromancien de la ramener parmi les vivants. Il tira un peu plus fort sur les liens qui le maintenaient en place et un grondement sourd se fit entendre dans toute la salle. Quelques apprentis se mirent à inspecter les murs et le plafond, mais ne semblèrent rien remarquer d’anormal. Le Roi cessa alors son effort et se laissa simplement tomber, pantelant, au bout de ses chaines. À sa taille, Ehredna se mit à luire d’une lumière sanguinaire, menaçante, visiblement furieuse de son impuissance. Sans les pouvoirs de Serenos, elle n’était rien d’autre qu’une épée, à moins que quelqu’un ne prenne possession d’elle. Serenos regarda un instant ses ennemis et se mit à tirer encore plus fortement sur ses liens. Il se mit à se tordre, cherchant dans ses muscles la force requise au bris de ses liens, mais plus il se débattait, plus son irritation grimpait.  Il adressa un regard rempli de haine sur ses ennemis et lâcha un rugissement de rage, à la fois puissant, bestial et profondément mauvais; une menace de mort à ceux qui s’opposaient à lui.

« Je vous tuerai! Je vous tuerai tous! Je repeindrai ces murs de votre sang, vermines! »

Et sa menace n’avait rien de paroles en l’air; s’il se libérait, il y avait fort à parier qu’il tiendrait parole. Et ses liens ne pourraient pas le retenir indéfiniment; le Roi était reconnu pour développer des ressources impressionnantes lorsqu’il s’agissait de se tirer d’une mauvaise situation, qu’elles soient intellectuelles, physiques ou magiques. Qu’importe ce que préparaient ces gens, il valait mieux qu’ils se dépêchent.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le mardi 18 février 2014, 18:50:53
« Je vous tuerai ! Je vous tuerai tous ! Je repeindrai ces murs de votre sang, vermines !
 - Je vois que tu n’as rien perdu de ta fougue... Tant mieux, tu en auras besoin. »

La Dame Grise s’amusait de la résistance de cet homme. Lui qui avait été son ancien amant ne pourrait rien faire contre les liens le retenant. Kor-Tarath était animé par d’anciens sortilèges très puissants, suffisamment forts pour permettre à cette forteresse de se maintenir, alors qu’elle se situait dans un lac volcanique. De la main, la Dame Grise fit signe à ses hommes d’agir. Ehredna, l’épée de Serenos, lui fut retiré, les sorciers agitant des cristaux en dymérite, qui annihilaient la magie, pour s’en emparer, et l’enfermer. La femme ne voulait prendre aucun risque. L’heure du rituel était proche, mais elle n’ignorait pas qu’il y avait encore une inconnue en mémoire. La petite femme, celle qui avait forniqué avec le Commandeur. La Dame Grise se tourna vers l’un de ses hommes, qui comprit le fond de sa pensée.

« Sonia est restée sur place, afin de se débarrasser de cette femme, ma Dame. »

Sonia était une sorcière-guerrière un peu emportée, très vive. Néanmoins, elle restait une très bonne élève, une amante sauvage et passionnée, et elle était probablement jalouse que la femme rousse se soit faite le Commandeur, ce qui expliquait pourquoi elle avait tenu à rester derrière. Tout se passait plutôt bien. Le Roi avait certainement envoyé un messager pour prévenir les Sylvandins, mais, le temps que ces derniers arrivent, le rituel serait prêt. Il n’y avait pas une minute à perdre, et la Dame Grise s’avança lentement, le long d’un immense couloir, suivie par ses hommes, ainsi que par leurs prisonniers. Ces derniers pouvaient voir que, outre les sorciers et les sorcières, la Dame Grise disposait d’autres gardes, de redoutables golems (http://static2.wikia.nocookie.net/__cb20091119155755/dragonage/images/3/38/Golem_concept_art.jpg), des créatures particulièrement puissantes, animées par la magie, et qu’on ne pouvait détruire qu’en effaçant les glyphes qui les animaient. Ils poussaient les prisonniers en grommelant, incapables d’intelligence, se contentant béatement de suivre les ordres de leur créatrice.

Le couloir les conduisit à un vaste escalier circulaire, où ils descendirent, semblant s’enfoncer dans les profondeurs de la terre.

« Kor-Tarath est un château partiellement bâti à l’envers. Son donjon s’enfonce sous le sol, et forme une pointe qui s’approche de la croûte terrestre. »

Des peintures étaient dressées le long des couloirs, montrant des scènes indescriptibles, des hurlements de douleur, des monstres abominables, des scènes de torture. Au centre de l’escalier, il y avait une énorme chaîne noire. Kor-Tarath disposait de quatre escaliers similaires, et les chaînes filaient hors du château, pour soutenir la pointe du donjon. Le groupe continua à descendre pendant plus d’une dizaine de minutes, jusqu’à atteindre un couloir arrondi avec des vitres circulaires. On aurait presque dit un hublot, permettant de voir l’extérieur. Ils avaient atterri sous le château, une sorte de masse noire filant au-dessus de leurs têtes, tandis que, en contrebas, un enfer de flammes et de lave s’étalait à perte de vue, avec des failles infernales, plongeant dans une lumière jaune aveuglante. On voyait parfois des serpents de feu jaillir hors de la lave, avant d’y replonger. Devant le groupe, il y avait une sorte de pyramide noire inversée.

C’est là-bas qu’ils se rendirent. La pyramide était une pièce unique, et ils arrivèrent par le haut, voyant, en bas, Shizuka. Nue, elle était allongée sur une table, au centre d’une grande pièce, où un vaste glyphe magique avait été dessiné sur le sol. Des chaînes retenaient Shizuka, et son tatouage brillait dans son dos, tandis qu’on avait tracé des lignes magiques sur son corps.

« Comme tu peux le voir, Serenos, ce glyphe comprend plusieurs catalyseurs. C’est à ça que vous servirez. Votre magie alimentera le glyphe... Et je suis sûre que tu n’as jamais vu un glyphe comme ça... Matériellement, en tout cas. »

Un golem poussa Kynarth.

« Quelle est cette diablerie ? Mais qu’avez-vous donc l’intention de faire ?
 -  Rien de bien méchant... Et tout à la fois. »

Kynarth nota alors qu’il y avait, en hauteur, une immense coupole en or. Des gouttes de sang s’en échappaient parfois.

« Attachez-les... Et déshabillez-les. Ne t’en fais pas, Serenos, il ne s’agit que de tracer des lignes sur ton corps. Tu as dit vouloir te débattre ? C’est très bien, c’est exactement ce que nous attendrons de toi. »

La Dame Grise continuait à expliquer, tandis qu’on poussait à nouveau les hommes.

« Ce que nous allons réaliser n’est rien de plus qu’un transfert magique. Au-dessus de vous se trouve le résultat de l’épidémie de peste déclenchée à Meisa : un empilement de cadavres que nous avons récupéré des fosses septiques de Meisa, marqués par la peste, une peste magique, une peste noire. Ils ont été imbibés de sang. Ces corps sont souillés par la corruption et par le vice. Ce glyphe-ci servira à transférer ce vice. Le rituel prendra des heures, et vous servirez de catalyseurs. C’est par votre magie que le transfert s’effectuera. Vous serez notre carburant, en somme. »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le mardi 18 février 2014, 22:09:05
[HRP: je ferai la modification au BBcode une fois à la maison. Mal à la tête. Désolé pour une réponse aussi mauvaise :( ]

« Ce que nous allons réaliser n’est rien de plus qu’un transfert magique. Au-dessus de vous se trouve le résultat de l’épidémie de peste déclenchée à Meisa : un empilement de cadavres que nous avons récupéré des fosses septiques de Meisa, marqués par la peste, une peste magique, une peste noire. Ils ont été imbibés de sang. Ces corps sont souillés par la corruption et par le vice. Ce glyphe-ci servira à transférer ce vice. Le rituel prendra des heures, et vous servirez de catalyseurs. C’est par votre magie que le transfert s’effectuera. Vous serez notre carburant, en somme. »

C’était un plan plutôt simple. Le Roi arrêta même de se débattre pour bien l’écouter. En bon expert de magie, il prêtait attention au moindre détail, à la moindre faille possible du discours de cette femme. Les hommes de main de la Dame Grise s’approchèrent alors de lui, et au moment de le toucher, un éclair de lumière illumina un instant un point de son corps; quelqu’un avait fait l’erreur de lui toucher la peau. Un des hommes encapuchonnés recula brusquement en hurlant, se tenant une main carbonisée. Le Roi lâcha un ricanement moqueur qui lui attira un crochet à la mâchoire; ayant compris l’erreur de son camarade, un autre homme s’était empressé d’enfiler un gant, s’évitant ainsi d’être foudroyé par la magie du Roi. Ce n’était qu’un changement de propriété au niveau personnel, ce n’était pas une expulsion d’énergie. Alors qu’ils lui retiraient ses vêtements, le Roi leur répéta sa menace de tous les tuer, ajoutant la méthode qu’il emploierait pour tuer chacun d’eux, malgré les sommations de silence qu’ils lui lançaient. Ils lui retirèrent son manteau, tout en faisant bien attention de ne pas le toucher directement sous risque de subir le même sort que leur collègue, puis ils lui retirèrent sa combinaison de combat, et même ses sous-vêtements. Le Roi ne se montra nullement embarrassé de sa nudité. Au contraire, sa collection impressionnante de cicatrices, dont certaines formaient des crevasses profondes sur sa peau, lui donnaient un air encore plus menaçant. Devant un tel spectacle, certains détournèrent le regard. Voilà le corps d’un Immortel, disaient-ils. Voilà ce que la vie éternelle garantissait. Le monarque bombait le torse avec fierté, les muscles crispés pour combattre la douleur que cette position lui infligeait, alors que deux acolytes venaient le rejoindre et levaient chacun leur bâton vers lui et le posèrent contre sa peau. Cette fois, il ne put retenir un hurlement de douleur.

Le dessin de glyphe était normalement réservé aux objets qui ne pouvaient ressentir la douleur, car elle nécessitait une grande quantité d’énergie pour que les lignes magiques soient efficaces. Sur de la peau vivante, la douleur était comparable à se faire poser un métal au fer rouge sur la peau. Sous la douleur, le Roi se mit à se tortiller tout en hurlant, tirant plus fort sur les liens qui le maintenaient en place, mais plus qu’un cri de douleur, il hurlait de rage, car seule la rage pouvait maintenant emporter avec elle une partie de la douleur. De ses lèvres, accompagnant ses rugissements, jaillissaient maintenant des malédictions dans la Première Langue. Même s’il n’avait pas la magie pour alimenter ces sortilèges, les prononcer lui fit le plus grand bien, parvenant presque à lui faire oublier qu’il subissait une horrible torture. Fort heureusement, ces marques ne resteraient pas la pour toujours; les glyphes finissaient toujours par s’effacer, à moins d’être gravés dans la chair. Certains, lorsque faits trop rapidement, s’effaçaient au simple contact d’un liquide. Ce supplice dura une bonne vingtaine de minutes, plus cinq autres pour les finitions; ces gens ne voulaient surtout pas que leur œuvre soit défaite par simple mégarde. Ils s’assurèrent que les lignes magiques fonctionneraient à pleine efficacité, alors que le Roi se laissa simplement pendre au bout de ses liens, pantelant.

Il avait espéré arriver à éveiller le pouvoir des Ashanshas, mais avec Xeos dans les environs, il se doutait que le jeune homme avait déjà prévu le coup, et pour la peine, il avait modifié le sortilège pour pouvoir aussi altérer les capacités du Roi, le rendant aussi vulnérable que le reste de son équipe. Les mages décrochèrent le Roi, puis par un procédé qu’il ne comprenait que trop bien, ils modifièrent les liens pour qu’il puisse se déplacer, sans jouir de ses pouvoirs. De toute façon, avec sa puissance ainsi réduite et après avoir passé sous leurs bâtons, il ne pourrait pas opposer de résistance digne de ce nom. Le Roi fut donc placé près de ses compagnons, et leur adressa un bref clin d’œil, imperceptible pour leurs ennemis mais plein de confiance; il ne doutait pas un seul instant qu’ils n’échapperaient pas à cette situation. Ils mettraient fin aux plans de leurs ennemis. Il se tourna alors vers la Dame Grise, ou Kayla, comme elle aimait maintenant s’appeler. Le Roi lui adressa alors une grimace, preuve faible mais bien évidente qu’il mettrait tout en œuvre pour ralentir leurs projets. Il lui témoignait sa rébellion contre son plan.

« Se débattre, sorcière, peut prendre de multiples visages. »

Le Roi regarda ensuite ses camarades.

« Faites comme moi. Et n’oubliez pas; qu’importe ce qu’ils nous feront, vous ne devez absolument pas coopérer. Les renforts arriveront bientôt, ne perdez pas courage. »

Serenos pris une longue inspiration, puis expira, répétant le processus une bonne dizaine de fois. À chaque expiration, il s’assurait de bien vider ses poumons, et il se concentra sur sa respiration. Lentement, mais surement, il réduisait toute la magie qui se trouvait en lui, l’enfermant dans son corps. Les glyphes utilisés le dépassaient, bien qu’il soit un expert en la matière, car il ne pouvait les étudier dans cette situation; une partie du sortilège de transfert se trouvait dans son dos, et il ne pouvait pas les voir clairement. Il lui faudrait un miroir, ou quelque chose du genre. Tout ce qu’il trouvait à faire, c’était empêcher leurs geoliers d’obtenir quoi que ce soit d’eux. Il regarda avec Shunya, et il tendit doucement l’esprit vers elle, frôlant le sien avec tendresse. Vous voyez, Shizuka? Je suis là. Je suis là pour vous. Je vais vous ramener à la maison, je vous ramènerai à Edoras. Ne désespérez pas. Il ne savait pas si elle pouvait l’entendre, mais il espérait au moins qu’elle se sentirait apaisée; il avait tenu sa promesse, bien que la situation ne fut pas telle qu’il l’aurait espéré.

***

Alessa

Les Meisaennes n’étaient pas les plus nombreuses, mais elles avaient toutes été entrainées à pouvoir s’adapter à toutes les situations et à les tourner à leur avantage. En le temps de le dire, à peine eut-elle envoyé le message aux troupes Meisaennes qui se trouvaient en dehors du territoire Sylvandin que quatre de ses consoeurs, trois sorciers et six soldats en armure noire apparurent dans la capitale de Sylvandell. Alessa dévisagea un moment ses compatriotes et les mit au courant des dernières informations; leur Roi était en ce moment en territoire ennemi, et il y avait maintenant de grandes chances pour qu’il soit également entre leurs mains. Les Sylvandins ne devaient pas être au courant de leur implication dans cette expédition, et pour cette raison, ils éviteraient de voyager par les routes, et toujours à couvert pour éviter d’être repéré par leurs ennemis et aussi par leurs alliés. En tant qu’unité militaire, leur présence en territoire Sylvandin pouvait signifier un incident diplomatique majeur, et être considéré comme une intrusion sur leur territoire. Cependant, ils ne pouvaient pas non plus ignorer que leur monarque, qu’ils avaient juré de protéger, était dans une situation périlleuse, qui nécessitait une intervention de masse. Suivant les consignes d’Alessa, les quatre Meisaennes et leurs compagnons affirmèrent d’un hochement de tête qu’ils avaient compris les directives et qu’ils s’emploieraient à faire preuve d’autant d’efficacité que de discrétion avant de se mettre en route au pas de course. Les sorciers grimpèrent sur le dos des soldats et marmonnèrent des sorts de célérité pour accélérer leur progression vers le dernier endroit où le Roi de Meisa avait été repéré; le village tribal dans les montagnes.

Alessa ne voulait pas l’admettre, mais elle était anxieuse. Elle ne se faisait pas de souci pour le monde en général, car c’était contraire à sa nature, mais elle avait pour son maître une sincère préoccupation qui pourrait s’apparenter à l’amour si elle avait une traitre idée de ce que pouvait bien être ce sentiment. Les Meisaennes n’étaient pas dénués de sentiments, loin de là, mais très rares étaient celles qui parvenaient à ressentir un sentiment au-delà de celui du lien fraternel, ce qui dénaturait, en quelque sorte, toutes les relations à but procréatif auxquelles certaines devaient se soumettre pour perpétuer leur lignée. Le Roi prenait beaucoup de place dans les pensées de la Matriarche, et elle considérait comme étant son devoir de ramener le Roi sauf en Meisa, puisque sa sainteté, elle avait déjà fait une croix dessus lorsqu’il s’était lancé seul contre l’armée Rebelle, le jour du trépas de la Reine Sérénité.

« Pourquoi est-ce que le Roi ne se contente-t-il pas de raser cette montagne? demanda une des Meisaennes. Avec Eglendal, il pourrait…
-  Est-ce que tu sais comment réagirait les Ashnardiens et les Nexusiens s’ils venaient à apprendre que le Roi possède une telle arme à sa disposition? répliqua un des sorciers. Fini les traités de paix, nous serons la première menace mondiale!
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le jeudi 20 février 2014, 01:29:48
Les rayons de l’aube sortirent Cirillia de son bref sommeil. Elle ne dormait pas vraiment, en réalité, mais était plutôt assoupie, quand le soleil l’éclaira. L’aube venait de se lever, et elle leva la tête. Depuis une faille dans le toit de cette grotte, elle voyait un ciel bleu. Quelques gouttes d’eau tombaient lentement, formant un *PLOUIC ! PLOUIC !* de plus en plus insupportable. Assise contre le mur, Ciri’ soupira légèrement, avant de considérer les restes de son feu, puis reprit sa route, en se relevant, écrasant du pied les dernières flammèches. Elle s’était assez reposée, et il était temps de poursuivre sa traque. Sans guide, sans aucune aide, Ciri’ ne désespérait pas. Elle était plus maligne que ce qu’on pouvait croire, et elle savait se repérer. Elle cherchait le volcan, et, en traversant la plaine, elle avait pénétré dans un épais système de galeries souterraines. Les traces de ces bagnards s’étaient perdus, et elle avait poursuivi sa route, suivant les traces de chaleur. Le volcan se rapprochait de plus en plus, mais marcher toute la nuit l’avait fatigué, et elle avait estimé nécessaire de se reposer en approchant, afin d’être en pleine mesure de ses capacités. L’esprit de camaraderie était assez bien développé chez Ciri’ dans ce genre de circonstances, ce qui était curieux, car, de manière générale, elle n’était pas très solidaire, et avait plutôt tendance à être franchement égoïste.

Elle avait utilisé un élixir pour se reposer, et suivit un long chemin, faiblement éclairé par quelques trous. La température globale montait, et, au bout d’une vingtaine de minutes, Ciri’ finit par descendre, sautant de pierre en pierre, sentant la chaleur continuer à croître, jusqu’à descendre un conduit très glissant. Lentement, elle descendait, s’appuyant sur les cailloux... Quand l’un d’eux se brisa sous son poids.

« Meeeeerde !! »

Elle se mit à glisser, sans pouvoir se retenir, ne trouvant aucun appui… Un peu comme si elle était dans un toboggan. Le bout du conduit se rapprochait à vive allure, et elle bascula par-dessus bord, voyant, en contrebas, de la lave. Usant de ses réflexes, Ciri’ se retourna, et planta le bout de son épée dans une faille filant le long de la paroi. Son épée réussit à se planter, et elle s’écrasa contre la paroi, maintenue par le bout de son épée, la lave brûlant en contrebas. Ciri’ soupira lentement, tandis que son épée tremblait lentement, et regarda autour de lui, étudiant la paroi. Elle aperçut d’autres endroits où s’appuyer, des petites failles avec des interstices, et s’y rapprocha, se plaquant contre la paroi. Elle récupéra son épée, et se déplaça sur sa gauche, longeant le précipice. Elle avait affreusement chaud, et se félicitait d’avoir bu son élixir tantôt, qui avait en outre pour effet de rafraîchir son corps face à ce genre de situations. L’un des meilleurs mécanismes du corps, face à la chaleur, était de suer. C’était ce qui arrivait à Cirillia, et qui lui permettait de ne pas tomber dans les pommes. Elle finit par trouver une sorte de plateforme rocheuse en contrebas, et s’y laissa tomber, puis, de là, bondit sur un chemin de pierre central.

En hauteur, on pouvait voir la sortie du volcan, le cratère, et, au fond... Ciri’ déglutit en voyant le fameux fort dont elle avait tant entendu parler.

« Alors, c’est donc toi, Kor-Tarath... »

Un château des plus sinistres se dressait devant elle, planté dans le mur.

(http://nsa31.casimages.com/img/2014/02/19/mini_14021903004423037.jpg) (http://nsa31.casimages.com/img/2014/02/19/14021903004423037.jpg)

Cirillia s’avança lentement, le long du pont. Des flammes jaillissaient continuellement de certains points du fort, mais il n’y avait a priori aucun garde. Difficile de dire s’il était vivant ou pas. Le fort se perdait en contrebas, et elle ne pouvait pas trop baisser la tête, la lave étant aveuglante. Ciri’ marchait vers les portes du château... Quand elle entendit des bruits de pas derrière elle. Elle se retourna subitement, et vit la femme qui l’avait attaqué la veille.

« Tu en as mis du temps...
 -  Tu n’avais qu’à venir me voir.
 -  J’ai un compte à régler avec toi, ma chérie.
 -  Va te faire sucer, salope, j’ai d’autres chats à fouetter que foutre une branlée à une incapable. »

Sonia bouillonna sur place.

« Qu’est-ce que vous fabriquez ici ?
 -  J’en ai jamais rien eu à foutre. Un transfert d’énergie noire, ou je sais pas quoi... Ça pas d’importance. J’ai accepté de rejoindre l’École Discordia pour pouvoir me mesurer à des gens comme toi.
 -  Discordia ?! J’en ai jamais entendu parler.
 -  Et tu n’en auras plus jamais l’occasion. »

Ciri’ comprit que Sonia n’allait pas lui donner les informations qu’elle recherchait. Elle tira sur sa corde, et son arbalète à répétition, logée dans son dos, fila devant elle. Elle balança un carreau en visant Sonia, qui se téléporta sur la droite. D’autres carreaux suivirent, mais la sorcière, dans un gloussement, se téléporta encore, et arriva pile devant Ciri’.Dans son dernier geste, elle avait amorcé un mouvement circulaire avec son épée. Cirillia sentit le coup venir, et lorsque la femme se matérialisa, Ciri’ bondit de justesse en arrière, surprise par cette téléportation. Le bout de la lame trancha la corde retenant son arbalète, et Cirillia roula sur le sol. Il y eut un déclic, et, tout en roulant, elle attrapa la manche de sa lame en acier. Lorsqu’elle releva la tête, Sonia l’attaquait, et elle para avec son épée, tout en restant agenouillée sur le sol. Les deux lames s’entrechoquèrent, et Ciri’ réagit en bondissant en avant, puis donna des coups de lame, essayant d’atteindre son adversaire. Attaque à gauche, puis à droite. Elle tourna sur elle-même pour augmenter la force de l’impact, mais Sonia para également. La sorcière leva alors une jambe pour l’envoyer dans le corps de Ciri’, qui sentit le coup venir, et para avec son genou, déstabilisant la femme. Elle la gifla alors avec sa main libre, sonnant Sonia, et tenta un coup avec son épée.

La sorcière choisit de se téléporter, mais Ciri’ savait où elle allait venir, et, quand la femme se matérialisa à nouveau, dans le dos de Cirillia, ce fut pour être accueillie par son coude, qui se logea dans sa joue.

« Tu es rapide, mais tu manques de confiance en toi.
 -  ’Va chier ! »

Sonia attaqua à nouveau, rageusement, et tenta une onde magique. Ciri’ se mit sur le côté, évitant l’impact, et sa lame frappa Sonia, à hauteur de son plastron, entaillant son armure, en faisant couler un peu de sang. Sonia bondit en arrière, un rictus de rage déformant son visage sombre, et envoya alors des arcs électriques. Ciri’ brandit son épée en avant, et les arcs dansèrent sur la lame, la faisant rougeoyer, la lame les renvoyant. Le manche était fait dans un matériau qui ne conduisait pas l’électricité, et Cirillia, si elle n’était pas magicienne, avait une lame dans un acier aux propriétés particulières. Les éclairs rebondirent dessus. Sonia grogna, en accentuant leur intensité. Ciri’ dut ployer le genou, en sentant les éclairs lui lécher les joues. Son adversaire, cependant, était en train de se dépenser énormément en effectuant ce sort. La guerrière tenait le coup, jusqu’à ce que le sort cesse.

Les doigts de Sonia fumaient, et Ciri’ tremblait. Elle en lâcha son épée, qui vibrait sur place, crachotant des éclairs, et dégaina sa seconde lame, une épée en argent, qu’elle utilisait préférentiellement contre les monstres.

« Tu... Tu es forte... »

Cirillia ne dit rien, tout en se rapprochant. Ses mains lui faisaient mal, mais Sonia était épuisée.

« J’ai tué un dragon. Tes petits tours de magie ne fonctionnent pas contre moi. »

Un léger sourire éclaira les lèvres de Sonia.

« Cela fait plusieurs heures que le rituel a commencé. Ce château est rempli de trolls et de sorciers. Seule, tu n’as aucune chance, si tu fonces dans le tas. »

Ciri’ s’arrêta, fronçant les sourcils.

« Que suggères-tu, exactement ?
 -  Je t’ai vu grimper... Ceux que tu recherches sont en bas du fort. Tu peux y accéder en longeant le château, par ici... Il faudra faire attention aux jets de feu et aux clapets, mais je pense que tu devrais t’en sortir.
 -  Ah... Et pourquoi m’aiderais-tu ? »

Elle haussa les épaules, essuyant une traînée de sang couler de ses lèvres.

« Je te l’ai dit, non ? Je me fous de toutes ces conneries. Nous nous reverrons, Cirillia... Si tu as la folie d’entrer dans le château, bien sûr. »

Sonia se retourna alors, et plongea dans le vide. Ciri’ rejoignit rapidement sa position, mais ce fut comme si la femme avait disparu.

Et, devant elle, Kor-Tarath se dressait.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le vendredi 21 février 2014, 22:41:42
« Ma Dame, on ne peut pas tirer de magie de lui. Nous ignorons pourquoi, mais il reste insensible à nos tentatives d’extraction. »

Xeos grogna en passant une main sur son menton. Décidément, cet entêté de géniteur ne faisait jamais rien d’autre que lui mettre des bâtons dans les roues. Il lança un bref regard à Kyrian et Kayla avant de s’approcher du mage noir et se pencher sur son oreille.

« Attachez-le sur le glyphe. Qu’il coopère ou pas, son sang nous suffira pour avancer. Si on ne peut pas lui retirer la magie, celle qui se trouve dans ses veines devrait satisfaire les besoins du sort.
-  Et les autres, Seigneur Xeos?
S’ils ne coopèrent pas non plus, torturez-les.
-  Bien, monseigneur.

L’homme en cagoule leva un bras vers ses camarades pour leur faire signe de se mettre à l’ouvrage. En usant de la magie, les mages élevèrent un pilier au-dessus de la tête de Shizuka. Lorsque les hommes s’approchèrent du Roi, celui-ci les repoussa d’un coup de pied et tenta de les frapper à la tête pour en assommer un ou deux. Il fut rapidement maîtrisé par trois femmes qui, pour le rendre plus souple, lui flanquèrent une bonne série de coups dans l’abdomen et au visage. Sous la douleur, le Roi cessa de se débattre, des étoiles plein les yeux, pendant que les étranges personnages enroulaient autour de ses bras et jambes d’épais cordages. Ils le poussèrent alors sans la moindre précaution vers le pilier de pierre et l’y attachèrent. Une fois le Roi en place, Xeos s’éloigna de Kayla et Kyrian pour s’approcher de son père. Des alliés de Kayla, il était le seul à parler couramment le langage des Ashanshas, ce qui en faisait également le seul, hormis l’ancienne reine, à pouvoir temporairement priver Serenos de son incroyable pouvoir de régénération, sans pour autant pouvoir le rendre mortel. En marmonnant ses sortilèges, la dague qu’il tenait dans la main s’enflamma d’une étrange flamme verte, et il s’arrêta devant le Roi de Meisa. Les deux hommes se dévisagèrent, et l’espace d’un instant, Xeos hésita. Ce ne fut qu’un bref instant, mais Serenos le remarqua. Il passa quand même à l’acte en plantant la lame dans le cœur du Roi de Meisa, qui lâcha un grondement sourd de douleur, ses doigts se refermant sur le cordage avec la même brutalité que l’impact. Il resta crispé un long moment, jusqu’à ce que son fils retire enfin la lame de sa poitrine, moment pendant lequel il prit une grande inspiration, comme s’il venait de sortir de l’eau. Lorsqu’il vit le sang couler sur sa poitrine, il eut beaucoup de mal à conserver son calme, ce qui aurait accéléré le flux de sang. Il ferma un instant les yeux puis il se pencha, légèrement, vers la jeune Shizuka.

Bonsoir, très chère, fit-il en esprit, un sourire tendre sur les lèvres. Je me posais la question; comptes-tu laisser ces gens souiller une âme aussi belle ou vas-tu la défendre dûment? Une Innocente. Si seulement le Roi avait compris l’importance de cette demoiselle plus tôt, il l’aurait probablement envoyée au Palais des Anciens plutôt que de le trainer avec lui sur toute la surface de l’île. En la voyant ainsi endormie, il se demanda si elle avait peur, si elle savait ce qui se passait autour d’elle. Il aurait voulu tendre la main, toucher sa peau et lui ouvrir les yeux en brisant le sortilège, mais il avait une nouvelle tâche. Il releva alors la tête et se mit à regarder le glyphe, ses yeux suivant avec attention chaque trait et chaque écriture se trouvant dessus, prenant un air soudainement plus sérieux. Lentement, dans son esprit, il se représentait le glyphe en entier, décortiquant la signification de chaque trait et les interprétant, puis il traduit les lignes, qui étaient un rassemblement de langue morte. En temps normal, tous les glyphes, selon leur taille, possédait une puissance incroyable, car ils se nourrissaient généralement de la vie environnante, ou de la plus puissante source de vie la plus proche. Mais ils venaient tous avec un mot de passe qui permettait la désactivation immédiate du sceau, et bien qu’il ne soit pas indiqué, une fois le glyphe traduit, il suffisait de penser à tous les mots pouvant lui faire une réelle opposition (le noir du blanc et le blanc du noir, pas de demi-mesure), et le Roi se mit à remuer indistinctement les lèvres. Bien que n’étant pas complètement sûr de ce qu’il faisait, l’art des glyphes et leur fonctionnement dépendant des intentions de ceux qui l’avaient créée, le Roi ne pouvait pas se permettre de laisser ce glyphe corrompre la jeune femme sans rien faire. Il faisait néanmoins bien attention de ne pas être repéré par ses ennemis, qui risquait de le priver de sa seule chance de regagner l’avantage. Ce contretemps avait déjà bien assez duré.

Dans l’ombre de sa maîtresse, Kyrian semblait pourtant tendu. Pas seulement par la faute de son pressentiment de danger approchant, mais aussi à cause de Xeos. Malgré la sincère malveillance et corruption de son âme, cet homme faisait preuve d’un tel manque de foi qu’il craignait qu’il ne cache son propre agenda derrière ce sourire satisfait. Il ne croyait pas un seul instant qu’il ne s’était joint à la Dame Grise par désir de servir une cause; il n’avait d’autre intérêt que lui-même. Un membre de ce genre dans un groupe n’était pas digne de confiance. Kyrian état chargé de protéger Kayla à tout prix dans la réalisation de leur projet, et celle-ci semblait étrangement faire la sourde oreille dès que la possibilité que Xeos soit un traître à leur cause ne soit mise sur le tapis, comme si ses propos ne méritaient même pas de la considération, ce qui le poussait à croire qu’ils avaient une entente qu’ils se gardaient bien de lui divulguer. Xeos était un excellent maléficien, le genre d’homme qui pouvait raser un village sans même laisser couler une goutte de sueur, et comme il l’avait prouvé dans le village Sylvandin, il était capable d’user d’une magie de très haut niveau avec aise, mais autant il ne rechignait pas à la tâche quand on lui demandait quelque chose, il avait avec beaucoup trop de facilité gagné le cœur de leurs hommes, qui l’appelaient maintenant « Seigneur Xeos ». En même temps, il était facile d’être séduit par un homme qui montrait autant de prestance. Contrairement à ce qu’il semblait croire, il partageait beaucoup de traits communs avec son père. La seule différence était leur façon de s’en servir. Xeos se servait de ses dons pour son propre bénéfice, alors que son père usait des siens pour celui du monde en général, bien qu’il ne refusait jamais un butin s’il pouvait gagner quelque chose dans le feutré. Et il avait noté l’hésitation du jeune homme, et il commençait vraiment à croire que quelque chose de louche se produisait, et il n’aimait pas cela du tout.


***

ALESSA

« On y est… reprenez votre souffle. »

La troupe d’élite cessa son mouvement et entreprit de se reposer au commandement de la Matriarche. Alexei, Kara et Jim, les trois sorciers qui accompagnaient le groupe, étaient visiblement hors d’haleine; ils n’avaient que rarement eu l’occasion de maintenir des sortilèges aussi longtemps, surtout qu’ils devaient suppléer les guerriers en énergie pour qu’ils ne perdent pas le rythme de leur course. Les trois sorciers se retirèrent un peu du groupe et s’agenouillèrent ensemble avant de se prendre les mains et de murmurer une longue litanie magique supposée les aider à récupérer en force et en énergie. Les six soldats (nommés Lestat, Nassam, Gareth, Leon, Hubert et Daniel) qui avaient accompagné les Meisaennes se libérèrent un instant de leurs armures et sortirent leurs provisions pour reprendre un peu de force et surtout pour se détendre; après avoir parcouru en une demi-journée un tel chemin, ils ne se sentaient pas des plus frais. Pour se changer les idées un moment, ils sortirent même un petit jeu de dés et, tout en mangeant, ils jouèrent à un jeu qu’eux-seuls saisissaient vraiment les règles, lâchant par moment des exclamations dans le dialecte particulier parlé au pays, la seule Meisaenne se mêlant à eux étant Mist, compagne du Lieutenant Lestat.

Alessa et ses consoeurs se tenaient maintenant sur le bord du volcan, inspectant le terrain avant de se mettre à parler de stratégie. Les Meisaennes étant à la base une race de chasseuses, elles ne voyaient pas la stratégie de la même façon que les humains; elles ne considéraient pas l’option de fuite ou de retraite; leur stratégie n’avait qu’un but; s’assurer d’un succès éclatant ou d’une défaite tout aussi éclatante. Elles inspectèrent rapidement les différents points de garde, ainsi que les mouvements des troupes de l’ennemi; elles notèrent trois gargouilles dans les « tours de garde », armées de cloches, ainsi que d’autres postés devant les accès extérieurs de la tour. Il y avait donc fort à parier que ces créatures n’étaient non seulement pas enchantées, mais elles n’étaient pas seules; il y avait d’autres gardes positionnés à l’intérieur du fort. Lorsqu’elles convinrent à un plan d’attaque, elles regagnèrent le campement temporaire. Alessa s’approcha de Gareth et posa un genou en terre avant de lui demander s’il serait capable de faire tirer une flèche à 300 mètres et toucher la cible. L’homme sembla réfléchir un moment avant de donner sa réponse, puis il hocha de la tête, signalant qu’il serait capable. Les Meisaens n’étant pas reconnus pour se vanter de capacités qu’ils n’avaient pas, la Matriarche lui frotta affectueusement la tête avant de lui embrasser la joue, provoquant le rougissement du soldat. Dès que la belle dame disparut, les autres hommes de son équipe se mirent à lui lancer de petits bouts de pain en le taquinant, mais l’homme n’en avait que faire; il était l’un des rares hommes à avoir été bécoté par la Matriarche, ce qu’il considérait comme une victoire en soit.

Après une trentaine de minutes de repos, les membres de l’Armée Meisaenne se relevèrent et se rééquipèrent avant de se placer sur le bord du volcan. Gareth tira alors son arc de son étui, agrippant ensuite une flèche dans son carquois pour l’encocher et tendre la corde de l’arc au maximum. Visant une cible particulièrement éloignée se trouvant sur une des tours de garde, il cessa un moment sa respiration puis il relâcha la flèche. Le projectile quitta l’arme à une vitesse phénoménale avant de se ficher dans la gorge du garde de la tour. La tête de la gargouille se sépara immédiatement du corps dans une grande explosion de pierre. Soudainement, celles aux autres tours se mirent à gémir de colère. L’homme répéta le processus et priva les trois tours de garde de leur gardien, évitant ainsi l’alerte, avant de ranger son arme et de regarder la Matriarche pour lui donner le signal. Aussitôt, les quatorze Meisaens descendirent en rappel sur la surface intérieure du volcan, descendant vers le pont principal. Les gardes se tenant devant la porte sonnèrent immédiatement l’alarme, mais les Meisaens avaient déjà le pied à terre, avec les Meisaennes en première lignes, talonnées par des Meisaens armés de lance et finalement les sorciers en pleine forme qui fermaient la marche.

Sortant de la porte, trois énormes trolls s’avancèrent sur le pont. S’il ne s’agissait pas d’une construction renforcée par la magie, Alessa aurait pu s’inquiéter du poids de ces monstres, mais comme ceux-ci devaient se promener régulièrement en ces lieux, elle sût que les preuves de ce pont n’étaient pas à faire.

« Gardez cette position, soldats, et surtout, ne vous faites pas tuer! Nous devons gagner du temps. Sorciers, faites attention; rester hors de portée de ces monstres, ou vous ne reverrez pas le soleil se lever. »

La diversion des Meisaens commençaient. Et les Ashnardiens seuls savaient à quel point ces gens pouvaient être tenaces. Les Trolls poussèrent un grand rugissement de guerre avant de s’élancer vers les Meisaens. Déjà, les six lanciers se séparèrent du groupe et, d’une vitesse surnaturelle, ils passèrent derrière l’ennemi avant de leur planter leurs lances dans les reins. Ils savaient qu’ils n’avaient aucune chance de percer la chair avec leur maigre force, mais plutôt que de chercher à forcer l’accès, ils plantèrent simultanément le manche de leur arme dans le sol alors que les Meisaennes fonçaient à toute vitesse vers les trolls et de les pousser dans un tacle violent. Sous l’impact, les trolls titubèrent et, dans leur perte d’équilibre, tombèrent sur les lances qui s’enfoncèrent enfin dans leur chair. Le premier troll eut cependant la chance que l’une des deux lances ripe et tombe. Il délogea la première et abattit son énorme poing vers une des Mist, mais la Meisaenne avait déjà élevé un bouclier d’énergie au-dessus de sa tête, immobilisant le coup dans les airs. En attentant, Shara dégainait sa masse d’arme et la levait avec brutalité vers le coude de la créature, le poussant dans un ordre non-naturel dans un énorme « crac » sonore. La bête hurla de souffrance et recula, laissant la place à un de ses frères qui attrapa les deux Meisaennes dans ses énormes poings, mais un puissant jet de lumière projeté par Jim et Kara l’aveugla. Il gronda en se frottant les yeux, ce qui permit à Lestat et Leon de lui sauter dans les jambes et de lui marteler l’arrière des genoux à coup d’épée. La chair y étant plus tendre, mais pas les muscles ou les os, ils n’espéraient pas à un vif succes, mais cela sembla suffire, car dans la surprise, le Troll trébucha et s’effondra sur le dos, relâchant les deux Meisaennes qui s’envolèrent, mais la plus jeune passa par-dessus le pont, plutôt que tomber dessus.

« Mist! »

Shara agrippa immédiatement son fouet et l’abaissa violemment, alors que Mist tendait le bras. La corde de cuir s’enroula autour du membre et la Meisaenne put s’y accrocher à deux mains. En usant d’un mouvement de balancier, elle passa sous le pont et revint de l’autre côté pour s’agripper à la pierre et se hisser à nouveau dessus. Pendant ce temps, Irène et Alessa repoussaient le dernier à l’aide de leurs énormes épées, supportées par Shakti qui balançait à répétition six couteaux magiques qui revenaient directement dans sa main après avoir frappé leur cible, visant spécialement les yeux et les orteils. Les deux femmes parvinrent, avec leur force titanesque, à sectionner les bras du monstre, puis à le décapiter. Les six soldats, entre temps, venaient de balancer un deuxième par-dessus la rambarde du pont, vers le fond du cratère. Le dernier, pour sa part, eu droit à une pétrification à cause de la lumière intense que dégageaient les mages en sa direction. Les Meisaens reprirent leur formation et se mit à avancer très lentement vers le château. Alors qu’ils s’avancaient, ils se mirent à chanter l’hymne des batailles de Meisa, supposé redonner du cœur au ventre des soldats. Ils ne savaient pas si ce n’était qu’une rumeur, mais ils semblaient tous s’entendre sur un fait; cette chanson avait du rythme.


[Non mais faut pas croire; ce sont des gros cons, les Meisaens. Premiers sur le champ de bataille, derniers à en partir.]
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le dimanche 23 février 2014, 02:15:27
CIRILLIA

Observant le prochain interstice, Ciri’ prit lentement son souffle. Accrochée contre la paroi, uniquement retenue par ses mains, dont les doigts étaient posés sur le petit muret, elle compta jusqu’à cinq, puis bondit dans les airs, tendant sa main droite. Elle réussit à s’agripper à la prochaine rambarde, et ses seins heurtèrent le mur, avant qu’elle n’utilise aussi sa main gauche pour soutenir son corps, ramenant ses jambes pour poser ses chevilles sur cette paroi. Cirillia soupira lentement, puis regarda autour d’elle, cherchant ses prochains appuis. Elle avait fait tout le tour de Kor-Tarath, et continuait lentement son approche furtive, évitant les langues de feu qui jaillissaient parfois de certaines ouvertures du château. Tout ça puait méchamment la magie, mais c’était sans doute préférable que de tomber sur une armée entière, et de mourir bravement au combat, dans un baroud d’honneur aussi ridicule qu’inefficace.

*Allez, on continue...*

Ciri’ avança sur sa gauche, lentement. Elle finit par atteindre une rangée circulaire de colonnes, qui filaient le long de la paroi. Elle atterrit sur une sorte de balcon, et constata que l’espace derrière les colonnes n’était pas un couloir, mais une série de trappes recrachant des jets de feu. Vu la lave qui brûlait en contrebas, ce système devait sans doute permettre au château de ne pas être détruit sous l’effet de la forte chaleur qui régnait... Ou alors, c’était simplement parce que cet endroit était infernal. Les trappes s’ouvraient alternativement, les unes après les autres, pour libérer des jets de feu. Cirillia hésita un peu, le temps de trouver le bon timing, puis se mit à courir. Les flammes jaillissaient dans son dos, et elle courut rapidement, essayant de traverser cette distance le plus rapidement possible. Le feu se rapprochait, au fur et à mesure que les grandes trappes libéraient des rideaux de flammes.

Atteignant le bout de ce chemin, Cirillia bondit dans les airs, s’envolant en sentant des braises tournoyer dans ses cheveux. Elle s’écrasa contre une paroi rocheuse se trouvant face à elle, et essaya de s’appuyer sur un interstice, mais, après son plongeon, un peu trop rapide, elle lâcha prise, et tomba dans le vide. Si la corde de son arbalète n’avait pas été tranchée, elle aurait pu s’en servir comme appui. Au lieu de ça, Cirillia se servit à nouveau de ses bras. Quand elle glissa de son appui, l’un de ses pieds frotta brièvement le long de la paroi, et elle s’en servit comme appui, pour bondir en avant, ce qui lui permit de s’écraser sur une poutre flottant le long du château. Il y en avait toute une série devant elle, servant probablement à accrocher des drapeaux. Ciri’ s’avança lentement, en sueur, les doigts égratignés de sang. Utilisant ses muscles, elle passa d’une poutre à l’autre, jusqu’à atteindre la dernière, et se mit à se balancer, d’avant en arrière, remuant son corps. Son cœur commençait à tambouriner dans sa poitrine, et, si elle n’avait pas une constitution améliorée par le dragon qu’elle avait jadis tué, la chasseuse pensait bien qu’elle aurait déjà lâché prise. Elle continua à remuer, accélérant le rythme, et s’en servit pour bondir par-dessus la poutre. Elle fit un bref salto dans les airs, et se reçut sur la poutre, sur ses pieds.

La jeune femme n’eut ensuite plus qu’à remonter lentement la poutre, en équilibriste. Telle une funambule, elle tendait les mains de gauche à droite, afin de conserver son équilibre. Si elle baissait la tête, tout ce qu’elle voyait était un enfer de flammes. La poutre l’amena à une sorte de balcon avec une balustrade et un petit escalier en pierre qui menait vers une porte. Elle descendit sur ce balcon, descendant rapidement les marches. Elle se rapprocha de la porte, mais, juste avant de l’ouvrir, préféra plutôt regarder ce secteur... C’est ainsi qu’elle aperçut une ouverture dans la balustrade, menant à une échelle noire.

*Bingo ! Un raccourci !*

Il devait probablement s’agir d’une sorte d’échelle de maintenance. Ciri’ se rapprocha, et agrippa le barreau, brièvement, juste afin de constater qu’il n’était pas brûlant. Elle entreprit ensuite de descendre, évitant ainsi d’affronter toute la garde de Kor-Tarath, l’échelle conduisant vers les profondeurs du château.



DAME GRISE

La résistance de celui qui, dans une autre vie, fut son époux, amusait la Dame Grise plus qu’autre chose. À vrai dire, la participation de Serenos n’était que du confort. Tous les ingrédients du transfert étaient réunis : les âmes damnées étaient en haut, le glyphe était prêt, et c’était bien dans le bon endroit. Kor-Tarath était comme une flèche plantée dans le cœur du monde. La Dame Grisse laissa Xeos s’amuser avec Serenos. Elle-même avait bien trop à faire, et ne pouvait pas lui répondre. Elle était dans un mode de concentration intense, plongée dans la magie, ses mains posées sur le corps de Shizuka, dont les glyphes vibraient et scintillaient. L’Innocente était nécessaire, car sa pureté était comme un guide, qui permettrait de conduire toute cette force malfaisante dans le glyphe, et d’être transférée là où elle devrait l’être. Shizuka et la Dame Grise fonctionnaient dans un autre monde, un autre mode de conscience, un abîme noir qui, peu à peu, se matérialisait, sous la forme d’une multitude de plateformes circulaires au-dessus du vide.

« J’ai peur... lâchait la voix de Shizuka. Tout est si froid ici... »

Au-dessus d’elle, elle voyait les âmes des damnés, et elle leur faisait peur. Ils n’étaient que haine, colère, frustration... Et souffrance. Leur souffrance était déchirante. Peu à peu, la Dame Grise acquit suffisamment d’emprise pour apparaître dans le dos de Shizuka. Elle posa ses mains sur ses hanches, et, quand la jeune guérisseuse se retourna, la Dame Grise la prit dans ses bras.

« Il faut les guider, Shizuka... Accorde-leur le repos, qu’ils ne deviennent pas des ectoplasmes.
 -  Mais... Les guider où ? En faire quoi ? Je ne comprends pas... »

La Dame Grise tendit sa main, et un chemin de plateformes se matérialisa, menant jusqu’à une sorte de gigantesque portail circulaire, avec, au centre, un vortex orangé, qui formait comme une sorte de soleil.

« Les âmes te suivront... Tu dois aller jusqu’ici... J’aimerais t’accompagner, mais je ne le puis pas...
 -  Non ! Je ne veux pas... Je ne veux pas être seule... »

Shizuka se resserra contre la femme, qui posa tendrement une main sur ses cheveux, les caressant.

« Malheureusement, mon âme n’est pas aussi pure que la tienne... Laisse-moi te montrer... »

La sorcière se concentra, et prononça une mélopée, puis une vive lueur blanche se mit à irradier tout autour de Shizuka, formant comme une grosse torchère blanche, qui éclaira tout son corps.

« Un phare dans la nuit... Voilà comment ils te voient. Moi, je ne serais qu’une tâche sur ta magnificence. Tu es forte, Shizuka... Suffisamment pour avoir rejoint Meisa, si éloignée des vertes prairies d’Edoras. Sens leur douleur, sens leur souffrance. Tu dois les libérer. Conduis ces âmes damnées auprès du portail, et sache que je veille sur toi. Il ne t’arrivera rien. »

Shizuka sembla hésiter un peu, puis commença à s’avancer. Elle se rapprocha vers l’autre plateforme, et, comme par enchantement, un couloir magique se forma au-dessus de ses pieds. La Dame Grise, légèrement nerveuse, l’observa s’éloigner, puis décida de revenir dans le monde réel, là où elle aurait plus d’influence pour protéger Shizuka, et empêcher son âme d’être détruite. Cependant, quand elle revint à elle, elle perçut les échos d’une intrusion ennemie.

*Les Sylvandins, déjà ?! Impossible !*

Mais non, ce n’était pas eux. Elle reconnut des Meisaens, et esquissa un léger sourire.

« Il semblerait que tes hommes soient rapides à venir défendre leur Roi. Je doute toutefois qu’ils te soient d’un grand secours. »

La sorcière ferma les yeux, et chargea une femme de venir accueillir les Meisaens à l’entrée : Elkantar.



ELKANTAR

(http://img108.xooimage.com/files/0/f/a/elkantar_head-4411188.jpg) (http://th06.deviantart.net/fs71/PRE/i/2013/130/d/a/dark_elf__color_version__by_chekydotstudio-d64qno1.jpg)

Depuis le pont, on entrait dans une grande pièce, qui était la première salle accessible de Kor-Tarath, un vaste hall en deux parties : une partie haute, qui faisait face à la partie basse, par laquelle on entrait. En empruntant la grande porte, les Meisaens tomberaient directement ici. Elkantar était sur la balustrade de la partie haute, une main en appui sur la hanche, et attendait la venue des dh’oines, afin de les massacrer. Il n’y avait pas qu’elle. À gauche comme à droite, il y avait des rangées de colonnes, et, entre ces dernières, des golems étaient là, sans compter les autres sorciers qui accompagnaient Elkantar. Comme Sonia, Elkantar faisait partie de l’Ordre des Sorciers de Discordia, et était plutôt douée dans son genre. C’était une sorcière-guerrière, l’une des élèves de la Dame Grise, et cette dernière venait de lui donner pour ordre d’appréhender les agresseurs. Des trolls avaient été envoyés pour les contenir, et, sans surprise, ces imbéciles avaient été massacrés. D’autres trolls se tenaient dans cette pièce, mais ils n’étaient plus tout seul. Elkantar avait bien plus confiance envers les golems, qui étaient massifs, et aussi résistants que la pierre, n’étant eux-mêmes qu’un tas de pierre.

La main en appui sur sa hanche se mit à luire d’une intense énergie violette. Le combat allait bientôt commencer.

Naturellement, elle en était follement excitée.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le mardi 25 février 2014, 22:35:45
Le sang qui coulait de la blessure du Roi tâchait maintenant le sol de sa couleur, lorsque le Roi cessa enfin de marmonner ses étranges paroles. Grâce à l’implication de la Sorcière Grise dans le sortilège et leur petite discussion, Serenos avait maintenant une façon d’atteindre définitivement la jeune femme, de s’introduire dans la magie qui faisait fonctionner ce maudit glyphe. Peut-être trouverait-il une manière de briser les sceaux qui le formaient. Laissant son esprit quitter son corps en prenant bien évidemment les précautions nécessaires à ne pas être perçu par sa rivale, le Roi se glissa discrètement dans la petite brèche que la magie avait maintenu ouverte pour la Sorcière, gagnant maintenant l’étrange monde où l’esprit de la captive était maintenant enfermé. Le Roi se retrouva alors dans un espace où il captait maintenant une terrible concentration d’âmes souillées par le mal. Son visage s’adoucit de tristesse devant le supplice que devait être la compagnie d’une telle corruption pour l’âme d’une innocente. Mais maintenant, les intentions de la Dame Grise ne lui semblaient plus aussi noires qu’elle le prétendait. Quelque chose dans cet endroit rappelait étrangement l’abysse calme où Sérénité aimait bien enfermer son esprit lorsqu’elle était inquiète ou troublée, qu’elle était en proie à l’incertitude. Le Roi se tourna alors vers Shizuka et la regarda avec une infinie douceur. Comme elle lui semblait fragile, cette petite lumière, perdue dans l’obscurité sinistre. Et c’était sur elle que cette femme basait tous ses espoirs de destruction? Laissant son instinct le guider, le Roi s’enfonça plus profondément dans ce monde artificiel, jusqu’à venir se positionner près de la jeune femme. Il la regarda un long moment, et voici comment il la perçut; effrayée, confiante, pourtant, de faire quelque chose pour son monde, alors qu’elle contribuait à sa perte. Il passa lentement à son côté et glissa une main sur les yeux de la jeune femme, voilant sa « vue » à ce monde écœurant.
   
« N’aie pas peur. Tu n’es pas seule. Tu ne seras plus jamais seule. Shizuka. »

Peut-être ne pouvait-il rien faire pour elle autre que ce simple geste, étant privé de ses pouvoirs magiques par les cristaux. Il lui fit doucement détourner le regard vers lui et posa son front contre le sien. S’il l’avait pu, il lui aurait donné son courage et son assurance, pour qu’elle n’ait plus à trembler devant ses ennemis, mais tout ce qu’il pouvait maintenant lui céder, c’était une part de sa chaleur. Une main doucement glissée dans ses cheveux, une autre glissée dans sa main, leurs « visages » si près l’un de l’autre qu’il pouvait détailler toute la frayeur que cet endroit lui inspirait simplement en percevant son regard, il fut tenté. En tant qu’homme, certainement, mais également parce qu’il était comme ces âmes damnées; à la recherche d’une chaleur que l’innocente pourrait lui apporter. Fort heureusement, il parvint à se contenir, au prix d’un intense effort. Serenos était passé maître dans l’art de contrôler les pulsions, même si certaines lui échappaient encore. Sa morale l’empêchait de profiter d’une telle situation pour obtenir quelque chose qu’il désirait ardemment, et autant il pouvait damner cette petite voix qui le prévenait constamment du danger à chaque pas qu’il faisait, il devait admettre que parfois, il en avait bien besoin. Il serra un moment les doigts de la jeune femme et la regarda droit dans les yeux, avant de lever les yeux vers les âmes maudites qui s’accumulaient à leur suite.

« C’est donc ça qu’elle planifiait? Réveiller ce qui se cache sous Kor’Tarath en usant des âmes des Meisaens corrompues par la peste magique? Ingénieux. Mais seulement si les âmes ne voient aucune lumière. Elle aurait dû créer une liche. Elle se serait évité bien des tracas. »

Il regarda alors la jeune femme et lui adressa un sourire rassurant, la main dans la sienne.

« Vous venez? Nous allons vous sortir d’ici. Ce ne sera pas sans peine, mais je serai à vos côtés. »

Le Roi se dirigea avec confiance vers le centre du Glyphe. Pourquoi? Pas parce qu’il savait qu’il ne causerait pas de ravages, mais il s’assurerait de corrompre l’œuvre de son ennemie. Si je ne peux pas avoir la victoire, se dit-il avec un sourire détendu. Je m’assurerai au moins de ne pas te laisser la joie d’une victoire totale, Kayla.. Aucun expert en magie ne pourrait user d’une innocente pour guider des âmes noires destinés à alimenter un sortilège. Quoi que cachait Kor-Tarath, c’était forcément quelque chose de purement maléfique, et la lumière qu’irradiait l’âme d’une Innocente pouvait aisément gâter le travail. Mais alors, sa présence dans ce sortilège pourrait non seulement protéger l’esprit de la jeune femme, mais aussi provoquer un dérèglement dans le sortilège qui l’affaiblirait, privant ainsi celui-ci d’une partie de son efficacité.

***

ALESSA

« Quelle force… c’est abominable! »

Alessa se tenait seule devant cette elfe. Les Golems et les Trolls avaient été en partie décimés grâce aux efforts combinés des mages et des guerriers, les premiers dérèglant magiquement les géants de pierre pour leur faire perdre leur densité, ce qui avait facilité la tâche aux seconds. À peine eurent-ils achevés les derniers trolls que les sorciers se retrouvèrent incapables de faire le moindre sort à cause de l’épuisement, et c’est à ce moment-là que cette femme est apparue de nulle part. En un clin d’œil, les sorciers furent décimés et les guerriers mis hors d’état de nuire. Les pauvres sorciers ne purent même pas réduire l’impact en raison de leur épuisement, les laissant très simples à éjecter de l’échiquier. Les Meisaennes avaient tenté de s’opposer à cette femme, mais elles avaient été balayées d’un revers de la main. Des quatorze combattants envoyés en renfort au Roi de Meisa, il ne restait maintenant plus que la Matriarche qui arrivait à tenir debout. Elle n’avait pas peur, loin de là; elle tremblait même d’une excitation qu’elle ne s’expliquait pas. Peut-être était-ce ses sens de guerrière qui lui permettaient de combattre sa frayeur par une joie inégalée de combattre contre un tel monstre. Elle resta là, debout, à attendre que son ennemie face les premiers mouvements.

Les techniques traditionnelles Meisaennes impliquaient une grande concentration et une maîtrise parfaite de l’énergie vitale en soi qui habitait chaque être vivant, de la même façon que la magie nécessitait la maîtrise parfaite du mana. Grâce à ces manipulations, les Meisaennes étaient de parfaites chasseuses de sorciers et de monstres en tout genre, car tout en restant capable de repousser la magie, elles étaient également capables, pour un bref moment, de surpasser les limites imposées par leur cerveau pour développer les trésors du corps et de l’esprit, en échange d’un prix relativement lourd à payer, et irréversible si un guérisseur ne prenait pas le relais pour compenser ce prix. Mais dans l’urgence, ce dernier détail ne passa même pas dans l’esprit de la Meisaenne. Alessa leva alors sa monstrueuse épée devant elle d’une seule main avant de prendre une grande inspiration. Elle lâcha alors un cri alors qu’elle forçait son énergie vitale à se répartir équitablement dans tout son corps. Immédiatement, elle sentit une grande chaleur, qui n’avait rien à voir avec la lave qui reposait en contrebas, se glisser dans tous ses membres et articulations. Elle dévisagea un long moment son opposante. Dans cet état, elle voyait ses chances augmenter. Pas de beaucoup, car elle ne pouvait dire exactement contre quoi elle se battait, mais elle se sentait beaucoup plus confiante qu’elle aurait au moins la chance d’offrir un beau combat.

« Je suis Alessa, Matriarche de Meisa et protectrice du Roi Serenos. Je vous demande de vous écarter et me laisser rejoindre mon maître. Si vous vous opposez, je n’aurai aucun scrupule à me servir de la force contre vous. Écartez-vous, et vous aurez la vie sauve, Elfe. »

Un troll s’approcha alors avec l’intention de faire taire cette petite chose très bruyante, mais il ne put poser un seul de ses énormes doigts sur elle, car à l’instant même où il fut à portée de coup, elle sauta et abattit sur lui sa puissante épée. La chair si résistante du monstre céda sans attendre sous le coup rapide de l’arme, qui passa outre les muscles et les os pour le trancher de l’épaule à la hanche. Passant entre les deux parties nouvellement séparées du corps du monstre, la Meisaenne se retrouva en un éclair devant la jeune femme.

« Votre réponse? »

Elle se préparait déjà à lui décocher un coup de poing en plein abdomen; Alessa ne plaisantait pas.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le jeudi 27 février 2014, 01:41:45
SHIZUKA SHUNYA

*...Souffrance… Damnation… Mirages…
...Guide-nous…
...Trompé... Jeté... Oublié...
...Larmes... Désespoir...Souffrance...
...Guide-nous...
*

Les voix et les images dansaient dans son esprit, formes indistinctes, souvenirs, rêveries, rémanences. La présence du Roi échappa totalement à Shizuka. Elle était comme une torchère blanche dans l’abîme noirâtre, dans un environnement en-dehors de l’espace et du temps. Les plateformes qui s’étalaient progressivement formaient le glyphe dans lequel leurs corps étaient emprisonnés, et elle, elle sentait la douleur de toutes ces âmes en peine. Son esprit était traversé d’images sinistres, où elle les voyait pleurer, hurler en vain. Le passé revenait la hantait, et elle titubait à moitié, ailleurs. Tant de souffrance, tant de douleur... Les paroles des morts étaient terribles, cruelles, et, plus Shizuka errait dans cet abîme, et plus elle commençait à les comprendre.

*...Ma femme était une garce qui m’a trompé... Est-ce un crime de tuer quelqu’un qui a brisé votre âme ?...
...Je n’ai jamais voulu ça, pourquoi, pourquoi, pourquoi, pourquoi...
*

Tout n’était que souffrance, larmes, lamentations. La vie leur avait été arrachée, et ils étaient tristes... Leur colère n’était que la conséquence d’une souffrance terrible, celle de la mort. Des âmes en peine, des âmes qu’il fallait guider, qu’il fallait soigner. Ils s’orientaient autour de Shizuka, n’osant pas s’approcher d’elle. Shizuka tendait ses mains vers eux, et c’est à peu près à ce moment qu’elle prit conscience qu’il y avait quelqu’un d’autre avec elle.

Lentement, ses yeux se portèrent sur la silhouette devant elle. Elle lui était reconnaissable, mais elle n’aurait pas su dire d’où il venait... Oui, ce visage lui était familier. Shizuka était intégralement nue, ne cachant nullement son corps, magnifié par les lignes de magie violette qui le traversaient, et par cette aura lumineuse qui la traversait, englobant tout son être. Elle observait le ciel, discernant les voiles noirs.

*...Pas ici... Notre place n’est...
...Pas ici... Ici... Ici...
...Des âmes en peine... Des âmes errant dans la souffrance pour l’éternité...
*

Le Roi de Meisa, car elle se rappelait maintenant de son titre, la tirait, mais sa prise se relâcha... Comme si la main de Shizuka était devenue transparente, éthérée. Elle se mit alors à flotter.

« Leur peine... Leur peine est indescriptible... »

Les âmes tourbillonnaient dans le ciel, formant comme des arabesques qui enveloppaient la flamme blanche que représentait Shizuka. À ses pieds, on pouvait parfois, à travers l’éclairage des flammes, des formes humaines apparaître, des hommes recroquevillés, au dos courbé, qui contemplaient silencieusement cette beauté. Des êtres laids, aux ongles sales, aux dents mal formés, sales et puantes, qui disparaissaient ensuite en s’écartant prudemment de la femme, comme s’ils avaient peur de la salir par leur présence.

*Chaud...Si chaud...
...Le froid...
*

Les âmes fondirent alors sur Serenos, l’interprétant comme un rempart, une menace. Elles le traversèrent de part en part. Ici, toute sa magie semblait inutile pour repousser une telle force, et il fallut l’intervention de Shizuka pour les retenir... Avant qu’elle ne comprenne que c’était elle-même qui avait attaqué l’homme. Elle regardait autour d’elle, commençant, peu à peu, à comprendre.

« Les guider... Il faut les guider... »

Les âmes noires continuaient à tourbillonner autour de la flamme blanche, attirées par la pureté de l’âme qui se tenait là. Ils y voyaient l’incarnation de ce qu’on leur avait arraché : la vie, dans sa forme la plus pure, la plus éclatante, débarrassée de la haine, de la jalousie, de la convoitise, des vices. Un être qui n’aspirait simplement qu’à vivre, qu’à construire, qu’à s’insérer, qu’à évoluer. Au milieu de l’enfer noir, elle était leur phare.

*...Nous serons jugés...
...Faibles...
*

La guérisseuse d’Edoras se sentait emportée, alors que son âme se consumait, comme si les esprits étaient en train de la dévorer. La pression qui s’exerçait sur le Roi diminuait, et, peu à peu, les âmes filaient vers le portail, emportant avec eux la flamme blanche, qui était en train de s’absorber dans un tourbillon noirâtre. En cherchant à se rapprocher du glyphe, du cœur du sortilège, Serenos avait déclenché la colère des âmes. Elles ne pouvaient pas rester ici, et il s’était surtout heurté à l’inconscient de Shizuka, qui se refusait à héberger une telle noirceur. Malheureusement, les âmes emportaient avec elles celles de Shizuka. Cette dernière se retrouva devant le portail, se rapprochant inexorablement de ce dernier.



DAME GRISE

Tout serait bientôt terminé, ça ne faisait maintenant plus l’ombre d’un doute. La Dame Grise était penchée au-dessus de Shizuka, et voyait cette dernière remuer lentement, nerveusement, des gouttes de sueur glissant le long de son front. Elle lui caressait tendrement la joue.

« Calme-toi, Shizuka, calme-toi... »

Lui parler était idiot, la Dame Grise le savait, car Shizuka ne pouvait pas l’entendre. Elle reporta son attention sur Serenos, guère idiote. Elle savait qu’il avait utilisé le glyphe pour remonter le long de ce dernier, afin de chercher à l’annuler. La Dame Grise avait tout calculé. Elle aurait pu bloquer davantage l’esprit de Serenos, et empêcher ce dernier de rejoindre Shizuka. Cependant, si elle l’avait fait, Shizuka aurait été condamnée. Son âme aurait été consumée, et la Dame Grise ne le voulait pas. Elle ne pouvait pas protéger en personne la guérisseuse, car elle devait veiller à l’écoulement normal du sort. Elle devait s’assurer que les importantes forces magiques contenues dans le glyphe ne se dérèglent pas, et elle ne pouvait tout simplement pas être en deux endroits à la fois. Elle se refusait à sacrifier Shizuka, contredisant ainsi les ordres de son Maître. Lui se moquait bien de sacrifier une petite sotte, mais, pour elle, c’était différent. Elle avait lu dans l’âme de Shizuka, et elle y avait une sorte de pureté incroyable. Ce n’était pas que cette simple innocence qu’on confondait avec la naïveté et la stupidité, il y avait aussi chez Shizuka un air bon, une atmosphère de sainteté. Dès que cette dernière avait choisi de rejoindre Meisa, la Dame Grise savait, par le biais du Maître, que ce serait elle qui serait utilisée comme vecteur, comme point de concentration. Dans le monde des esprits, sa bonté était telle que tout le monde la suivrait, et elle-même se laisserait portée par les âmes.

« Tu as enfin l’occasion de te rendre utile, Serenos... Rien d’autre n’importe. »

Le château était en train de trembler. Sous Kor-Tarath, un rayon noirâtre venait de se former, et s’enfonçait dans la lave. Le sortilège avait commencé, et tout le volcan en tremblait. De la brume s’envola, mais c’était une brume spéciale, magique, multicolore.

« La fission a commencé ! Les âmes se scindent. »

Elles traversaient les murs, traversaient la matière, sans être atteintes par rien, formes indistinctes qui s’envolaient vers le ciel. Pendant ce temps, le rayon noir provoquait d’intenses vibrations, faisant remuer la lave, menaçant de déclencher une éruption volcanique.



ELKANTAR

La Drow esquissa un léger sourire amusé en voyant la femme, Alessa, venir à bout d’un troll. Ses Meisaens se débrouillaient plutôt bien, et avaient réussi à repousser le comité d’accueil, transformant le hall en une succession de cadavres, de projections de sang, et de tas de pierre disloqués. Les deux femmes se faisaient face, alors qu’Alessa lui avait intimé de se rendre.

« Ma réponse ? Elle est simple... Va te faire foutre, dh’oine. »

Alessa lui fonça ensuite dessus. Elle était particulièrement rapide, sans doute un usage des sorts magiques utilisés par les Meisaens, mais, aussi rapide soit-il, se ruer vers un ennemi doté de magie n’était vraiment pas malin. Son coup de poing se heurta à une sorte de barrière magique qui heurta son attaque, creusant un sillon autour de son bras, le retenant, avant de la repousser. Le choc repoussa Alessa, et, alors qu’elle voltigeait dans les airs, Elkantar en profita pour tendre sa main, envoyant de violents éclairs qui frappèrent la femme de plein fouet, l’envoyant accompagner sa course contre un mur, contre lequel elle s’écrasa.

L’adversaire retomba ensuite sur le sol.

« Les dh’oines gesticulent beaucoup trop. Tes singeries sont ridicules. »

Le sol se mit alors à trembler, et Elkantar releva la tête, comprenant que le transfert commençait. Elle ne pouvait plus se permettre d’attendre. Autour des autres adversaires, des sorciers et des sorcières apparurent, les encerclant, sans compter les autres golems et monstres qui se rapprochaient. Ils étaient dans une infériorité numérique certaine, mais Elkantar avait reçu des ordres précis. Il ne fallait pas les tuer... Dans l’absolu, du moins. Sa Maîtresse les voulait en vie pour aviser de leurs sorts. Et Elkantar ne comptait pas discuter. Contrairement aux dh’oines, elle s’estimait disciplinée. Ce n’était pas son genre de contrevenir à des ordres directs.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le samedi 01 mars 2014, 16:36:25
Serenos

« Shizuka! Shizuka, écoutez-moi! Vous ne devez pas y entrer! Ne les laissez pas vous emporter! »

Serenos ne craignait pas pour les âmes maléfiques. Il n’hésiterait pas à toutes les sacrifier si cela signifiait le salut de la jeune femme, mais si celle-ci traverait le portail, elle ne pourrait pas en sortir. Y entrer signerait sa propre mort, car une fois entrée dans le flux, il lui serait impossible d’en ressortir. Mais elle ne s’arrêtait pas. Elle ne l’écoutait pas. Après l’assaut des âmes noires, Serenos était davantage affaibli, pouvant à peine conserver sa prise sur ce monde. Il savait maintenant que la femme n’avait plus toute sa tête, qu’elle ne contrôlait qu’une part de ses gestes. Il avait encore une chance de l’arrêter. Il allait la rejoindre, mais à nouveau, les âmes s’élevèrent en hurlant leur désespoir pour la « protéger » de lui, quoi que de son point de vue, elles étaient bien plus en train de la condamner que de la sauver. Il regarda un instant ce mur de haine, de frayeur et de colère. Il se demanda alors s’il deviendrait comme elles; aveugle à la douleur qu’elles causaient, effrayé par la lumière, misérable jusqu’à la moëlle. Peut-être était-il fait du même bois qu’elles. Mais comme son père le disait si souvent, ce n’était pas du bois qu’on était fait qui décidait ce que nous deviendrons. Aucun bois n’était fait que de défauts. Il tendit alors la main vers le mur de malveillance et s’il rencontra une résistance au départ, elle laissa rapidement place à une vive douleur, mais sa main passa au travers du mur. Il prit une grande inspiration et pénétra dans la masse noire en rugissant, comme s’il espérait amoindrir la douleur par la force de son hurlement mental.

La traversée ne fut pas aisée. Le mur n’était pas qu’un petit obstacle; les âmes refusaient qu’il ne touche à Shizuka, et pour la peine, elles se déplaçaient au rythme qu’il s’approchait de la jeune femme, le mur restant donc en place sur son corps. La douleur, intense, était également accompagnées de milliers d’images où il voyait meurtres, viols, vols, pillages, guerres, massacres, tortures, suicides, et encore bien d’autres atrocités qui teintait l’âme des morts. Il voyait également la douleur des malheureux qui avaient été touchés par la peste noire en Meisa. Il captait leur reproche, leur tristesse, leur peur et leur incompréhension à son égard; pourquoi ne les avait-il pas sauvé? N’était-il pas leur protecteur? Était-ce sa faute s’ils avaient péris? De toutes les âmes, celles des Meisaens étaient certes les moins maléfiques, mais les plus lourdes, car Meisa était supposé être un havre où de telles atrocités ne se produisaient pas. Pour un Roi qui aimait tant son peuple, être confronté à une telle peine était encore plus douloureux que tout ce qu’il avait bien pu imaginer. Son cœur lui hurlait maintenant de laisser tomber, de rentrer à Meisa et se préparer à la crise qui se préparait. Mais il tint bon. Il était conscient du prix à payer. Il n’avait pas peur de ce qui l’attendait. Il percevait enfin la lueur qui était Shizuka Shunya. Lorsqu’il échappa aux griffes des âmes noires, il la regarda une nouvelle fois. Comme elle était belle. Une étoile tombée du ciel, qui ne voulait que donner de sa chaleur au reste du monde.

Il ne sut comment il parvint à atteindre cet état, mais il y a peu, il s’était démontré capable de la toucher que brièvement. Lorsqu’il posa une main sur la sienne, la serrant avec force mais tendresse, il constata qu’elle était maintenant beaucoup plus solide et aisée à agrippée. Il la ramena vers lui, et alors que les ombres se jetaient comme des monstres affamés sur la porte du glyphe, il leur offra son dos en serrant la jeune femme contre son torse. Les ombres lui brûlèrent l’esprit, mais elles s’avérèrent incapable de s’attaquer à Shunya, à l’attirer avec elles vers leur triste destin. Cette fois, il ne lâcherait pas prise; hors de question qu’elle les suive dans le glyphe. La sortir de ce monde était réalisable, même si difficile, mais sortir une âme précise d’un glyphe magique servant à canaliser ses âmes dans un sortilège, même pour lui, cela relevait du miracle, et ses Dieux n’étaient pas friands de ceux-ci. Il devait absolument la garder loin de ce portail, qu’importe ce qu’il lui en couterait.

« Reste avec moi, Shunya. Tu dois rester en vie. »

Alors qu’il disait cela, les dernières âmes pénétraient dans le portail, qui se referma finalement lorsque toute corruption fut dévorée, laissant le Roi partiellement affaibli, mais il ne semblait pas plus inquiet pour sa propre condition que pour celle de l’Innocente. Son âme semblait intacte, à première vue, mais il n’était pas shaman, il ne pouvait affirmer ce qu’il ne connaissait pas complètement. Au moins, elle serait hors de danger. Aucun dégât irréparable ne semblait avoir été fait à la jeune femme, et maintenant que le portail était refermé, il n’avait plus à s’inquiéter pour la demoiselle. Il posa un bref baiser sur son front, lui caressant la joue l’espace d’un instant avant d’ouvrir dans ce monde une porte de sortie vers leur plan d’origine.

« Tu as rempli ta tâche. Maintenant, c’est à moi de jouer. »

Il s’apprêta à entrer dans la porte, mais il s’arrêta l’instant précédant sa sortie pour se tourner vers Shunya. Il la détailla un long moment puis il lui adressa un sourire.

« Lorsque tout ça sera fini, Shunya… j’aimerais apprendre à vous connaître un peu mieux. Tant de choses ont besoin d’être dites, mais nous n’avons pas de temps. »

Il aurait voulu lui dire encore quelque chose, mais le monde artificiel commençait à s’ébranler. La sorcière commençait à perdre sa concentration. Quelque chose à l’extérieur interférait avec ce monde, et s’ils ne sortaient pas maintenant, ce serait leur fin. Serenos agrippa donc la guérisseuse et la tira dans la porte. À peine eurent-ils quitté leur prison que leurs esprits regagnèrent leurs corps en l’espace d’un bref instant. Serenos prit une soudaine inspiration et tendit les muscles avec une force nouvelle. Grâce aux âmes corrompus et sa proximité avec le monde des morts, il avait pu récupérer une part d’énergie, qu’il avait transformé en force physique. Ce bref moment de puissance n’avait pu être empêché par les cristaux, qui n’avaient pas été conçu pour analyser et contrôler de soudains regains d’énergie noire. Le Roi tomba donc sur le sol, nu comme un ver, mais il ne perdit pas de temps. Il sauta en l’air, puis fit venir à lui ses vêtements qui s’enfilèrent sans problème sur son corps, avant de tendre la main vers Ehredna. À cause des sceaux, elle ne put pas le rejoindre. Un des hommes de Kayla s’approcha de lui avec son arme levée, prêt à frapper, mais le Roi lui agrippa le bras, le tordit et s’empara de son arme avec aisance. Ce n’était pas une arme de Meisa, mais quand même, elle était bien équilibrée et sa poignée épousait sa main comme Ehredna. Cependant, il s’agissait plus d’une rapière que d’une épée. La pointe était plus lourde, pour une meilleur perforation, et la lame était flexible, tout en restant robuste. Elle ne riperait pas contre un os.

Le Roi passa par-dessus le corps de Shunya, et repoussa deux gardes qui la surveillaient, avant de décocher un trait magique et son épée en direction de deux gardes, qui les évitèrent prestement, les laissant simplement passer en direction de Kynarth. Le trait magique frappa alors les liens qui le maintenaient en place, et l’épée se ficha à côté de sa tête, brisant un des cristaux neutralisant.. Le Roi de Meisa l’appelait maintenant aux armes.

Alessa

Les sorciers les encerclaient, et la victoire semblait être entre leurs mains. Les Meisaens se regardèrent mutuellement, cherchant dans le regard d’un autre une étincelle d’une idée de génie, mais ils restaient tous là, incapable de penser à quelque chose de particulièrement ingénieux. Sauf Alessa. Alessa était une experte de ce genre de situation. En tant que chef des opérations spéciales, elle était habituée aux conditions défavorables. Et elle était toujours préparée aux pires éventualités. En un instant, elle tira d’une de ses bourses de ceinture une petite bille grise et la lança avec force sur le sol en hurlant l’assaut. Dès que la bille explosa à l’impact, un épais écran de fumée gris-bleu envahi l’espace. Les sorciers connaissaient les propriétés de ce gaz, aussi ne jetèrent-ils aucun sort, alors que les soldats Meisaens se jetaient sur leurs adversaires, jaillissant de l’écran de fumée comme une bande de prédateurs sortant d’un buisson sur leurs proies. Les épées des Meisaens s’abattirent sur leurs ennemis, et certains tombèrent sous leur coup, mais Alessa savait que celle qu’elle visait ne serait pas impressionnée par ce stratagème. Elle fonça alors vers son adversaire et l’agrippa par le col avant de la balancer de toutes ses forces vers le pont, loin de ses camarades. Elle avait confiance en ces gens.

Elle ne perdit pas un instant; elle se lança à la suite de son adversaire, qui parvint à exécuter une manœuvre aérienne pour se poser sur ses pieds et réceptionner le coup d’épée que lui adressait son adversaire. Leurs armes s’entrechoquèrent avec fracas. L’apprentie de la sorcière noire leva la main et lâcha sur la Meisaenne une salve de missiles magiques noirs. En exécutant une habile acrobatie, la Matriarche parvint à éviter les projectiles magiques, et répondit elle-même par une série de coup d’épées que l’Elfe eut bien du mal à parer. Elle haussa même un sourcil étonné; comment une humaine pouvait-elle réaliser une telle vitesse? Mais les Meisaennes n’étaient pas humaines. Comme les elfes, elles étaient des humanoïdes dont l’apparence s’apparentait énormément à celles des humains, ce qui leur permettait de se fondre aisément dans la masse, mais les Meisaennes étaient nées et avaient évolués dans un monde très hostile, autant en force magique que physique. De ce fait, leurs muscles étaient naturellement plus forts, leurs os étaient plus résistants et leurs mouvements beaucoup plus vifs que ceux de leurs homologues humains. Pire encore, elles étaient douées pour une forme de magie qui leur était aussi naturelle que respirer, la manipulation d’énergie interne. Grâce à cette magie, leurs poings devenaient encore plus lourds, leurs pieds adhéraient mieux au sol, et même leurs organes fonctionnaient à plein régime. Et Alessa allait démontrer à cette misérable petite elfe l’étendue de son grand pouvoir.

Elle et l’elfe exécutèrent plusieurs passes grâce à leur épée, qui s’entrechoquèrent plusieurs fois. Alessa tenait une position très offensive, usant davantage de ses réflexes pour éviter les coups de son adversaire, ou usait de sa vitesse pour dévier les coups, faute de pouvoir les parer convenablement avec sa large épée. Pour sa part, l’elfe associait merveilleusement bien les assauts physiques et magiques, mais conservait une attitude plus défensive et économique d’énergie face à sa rivale. Elle était néanmoins bien moins bâtie que la Meisaenne, ce qui rendait sa tâche plus compliquée qu’elle ne l’avait d’abord cru. Alessa ne bougeait maintenant presque plus, conservant ses déplacements le plus possible, au point d’allier une esquive à une contre-attaque aussi brutale qu’agressive, qu’elle ne parvenait que par moment à bloquer, essayant le plus possible d’éviter de croiser le fer avec ce monstre. L’elfe avait visiblement abandonné l’idée d’user de la magie pour économiser ses forces. Elle se concentrait maintenant davantage sur ses propres capacités de combat elfique, privilégiant sa vitesse naturelle et sa précision raciale. Alessa étira donc un sourire et se mit à augmenter le rythme de ses attaques. Jusqu’où pourrait se rendre son adversaire avant de capituler? Elle jubilait elle-même de cette possibilité.

« On dirait que la victoire de ta maîtresse te rend aveugle à ta propre situation, Elfe. Mais une Meisaenne n’abandonne jamais. Pas même dans la défaite! »

Avec cet ultime mot, Alessa concentra toute sa force dans ses bras et son arme frappa celle de son adversaire, qui se brisa sous l’impact impitoyable de l’arme. Au moment où elle allait lui porter un nouveau coup, pour la mettre hors jeu, une explosion, probablement une conséquence de la magie déballée par la cabale, fit sauter la partie du pont où les deux femmes se confrontaient. Le sol se déroba sous leurs pieds, mais Alessa eut tout juste le temps d’attraper une pierre solide du pont et d’agripper l’Elfe par son col. Les pieds dans le vide, les deux femmes ne purent s’empêcher de regarder la lave en contrebas. Alessa se sentit même pâlir.

« Et si on reportait la fin de notre duel à un autre moment? Je n’ai aucune envie d’aller faire trempette là-dedans. Et toi? »

Selon la réponse, il y avait un risque qu'Alessa juge plus approprié de la laisser tomber.

« D'ailleurs, je tenais à te dire; quand tout ça sera fini et que le Roi aura gagné, tout ça, tu devrais venir en Meisa. Je cherchais justement une partenaire de combat digne de ce nom. Peu de mes soeurs t'arrivent à la cheville, ma belle! »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le dimanche 02 mars 2014, 01:40:59
CIRILLIA

Rien de plus qu’une échelle. Une foutue échelle qui lui donnait l’impression de plonger tout droit dans les abysses de l’Enfer. Ciri’ devait faire attention à ne pas glisser. Or, vu qu’elle était en sueur, l’exercice était un peu plus périlleux qu’il n’y paraissait de prime abord. Elle descendait lentement, atteignant une sorte de zone intermédiaire. Elle était sous Kor-Tarath, et voyait une sorte de pyramide qui flottait sous le château, relié par des espèces de piliers qui maintenaient la pyramide. Un rayon noir jaillissait du sommet de la pyramide, et avait creusé un trou dans la lave, comme une espèce de foreuse. Ciri’, agrippée aux barreaux, observa cette scène, médusée. Elle ignorait ce qui se trafiquait là-dedans, mais son intuition avait vu juste : il fallait bien se rendre dans cette pyramide. Quoiqu’il se passe là-dedans, ça ne lui disait rien de bon.

Ciri’ reprit lentement son souffle, et recommença à descendre... Lorsque des espèces de vagues bleuâtres et verdâtres se mirent à jaillir du rayon noir, remontant le long du cratère. Le souffle frappa Ciri’ dans le dos, la déstabilisant. Dans un cri, elle lâcha prise, et tomba vers la lave, avant que ses jambes ne s’accrochent, plus par une sorte de réflexe ultime qu’autre chose, à un barreau. Le barreau se coinça à hauteur de ses chevilles, et la tête de Ciri’ heurta l’échelle. Elle voyait comme des spectres, qui remontaient rapidement, passant sur elle, filant en hauteur, longeant les murs. Parfois, brièvement, elle reconnaissait des visages, des figures, des apparences.

*Là, c’est clair, j’y comprends plus rien...*

Se reprenant, la chasseuse s’appuya sur ses jambes, et redressa son corps, s’agrippant à nouveau aux barreaux de l’échelle, afin de descendre. Elle était proche de son objectif, et, en baissant la tête, pouvait voir une sorte d’escalier qui faisait le tour de la pyramide, conduisant vraisemblablement à une porte. De plus, et ce n’était pas négligeable, le passage des spectres ajoutait de l’air frais.

La lave, quant à elle, continuait à bouillonner dangereusement. Ce rayon noir était en train de créer une éruption volcanique. Si Ciri’ avait été volcanologue, elle aurait pu estimer que l’impact de cette magie noire était en train de dégazer le magma, entraînant une baisse de densité, ce qui, concrètement, allait se traduire par la propulsion du magma vers le haut, entraînant donc une éruption. En réaction, le cratère commençait à vibrer dangereusement, des morceaux de roches se mettant à dégringoler de la structure centrale pour tomber dans la lave. L’échelle vibra dangereusement, et un rocher tomba sur le haut de cette dernière. Les ancestrales vis retenant le sommet de l’échelle se rompirent, et Ciri’ tomba définitivement. Elle n’eut guère le temps de hurler, car son dos heurta le sommet de la pyramide, et elle se mit à glisser. Ciri’ chercha un appui, mais la surface était lisse, et le bord se rapprochait dangereusement.

« Bordel, bordel, bordeeeell !! »

Elle bascule dans le vide, et aperçut le magma, qui se rapprochait furieusement... Lorsqu’une étrange force la retint, comme si une main invisible venait de l’agripper.



DAME GRISE

La Dame Grise le sentait : la fin approchait. L’antique Kor-Tarath avait toujours survécu aux éruptions volcaniques grâce à un bouclier de magie noire, très efficace. Cependant, cet antique bouclier était épuisé, et ne survivrait pas à une nouvelle éruption. La sorcière l’avait senti en prenant possession de ces lieux inhabités, et elle ne s’était pas amusée à les refaire. Kor-Tarath allait tomber, mais elle, elle ne serait alors plus là. Les murs commençaient à trembler, et elle sentit alors le cœur de Shizuka battre rapidement. Son esprit et celui de Serenos étaient ensemble.

« Tout sera bientôt terminé... » glissa-t-elle silencieusement.

Le Roi de Meisa se réveilla ensuite, et ce ne fut guère discret. Il s’empara de l’épée d’un des gardes, et réussit à briser le sceau retenant Kynarth. S’il espérait un soutien de la part du jeune Commandeur, il allait devoir déchanter, car l’homme était épuisé, éreinté. Tout au plus réussit-il à ouvrir les yeux et à relever de la tête.

« Allons, que signifie cette agitation ? » soupira la sorcière.

Tendant la main, elle envoya une onde de choc qui frappa Serenos, l’envoya contre le mur... Où un cristal de pure magie le perfora alors, le plantant contre le mur.

« Je crois qu’il est temps de mettre un terme à notre association, mon cher... »

La Dame Grise concentra un autre cristal magique. Ils étaient de couleur violet, fluorescents, et elle visait la gorge de l’homme. Immortel ou pas, avec la tête en moins, elle estimait qu’il serait beaucoup moins agaçant. Elle le lança alors, et le cristal fonça tout droit vers sa cible... Avant d’exploser en plein vol.

« C’en est assez ! »

La voix qui venait de parler était une voix forte et sûre, qui se tenait en hauteur. La Dame Grise leva la tête, et vit alorsla silhouette sauter depuis les hauteurs, atterrissant devant elle. C’était l’Omniprêtre (http://img68.xooimage.com/files/8/a/8/commandeur-3210897.jpg) de Sylvandell.

« Il n’y a plus rien à libérer en-dessous, sorcière. Ta tentative est vaine. »

La Dame Grise considéra silencieusement l’étranger. Elle avait entendu parler de l’Omniprêtre. Visiblement, l’elfe avait pris le taureau par les cornes, et avait décidé de rejoindre seul Kor-Tarath. Comment avait-il fait pour échapper aux siens, ça, c’était une question à laquelle elle n’avait pas la réponse.

« Le dragon noir qui sommeillait sous ce volcan est parti depuis plusieurs siècles, déjà.
 -  Le dragon noir ? répéta-t-elle.
 -  Ton glyphe, je le reconnais... C’est celui qui avait été utilisé par les précédents mages noirs pour libérer le dragon. »

La Dame Grise se mit alors à sourire, et éclata de rire.

« Oh, mais croyais-tu donc que je l’ignorais ? Pauvre elfe... Croyais-tu donc que j’ai fait tout cela pour libérer un misérable dragon ? Mes intentions sont beaucoup moins grandiloquentes... »

Surpris, l’Omniprêtre cligna son œil unique.

« Mais... Mais alors... »

Pour toute réponse, la Dame Grise envoya des arcs électriques vers l’elfe, qui forma un bouclier de protection. Les éclairs rebondirent devant lui, mais il dut ployer le genou. Les lignes violettes du glyphe s’illuminèrent alors plus violemment, et il y eut comme une violente décharge magique qui le frappa. Son bouclier explosa, et les éclairs le frappèrent de plein fouet, l’envoyant s’étaler contre le mur. La Dame Grise nota alors que Serenos était toujours vivant, ce qui était étonnant... Et elle remarqua alors rapidement qu’il était soigné à distance. Elle tourna la tête vers l’autel où était reposé Shizuka, et put voir que cette dernière avant tendu une main vers lui, utilisant sa magie blanche pour le soigner.

« Décidément, il semblerait que la mort ne veuille pas de toi, mon cher Serenos... »

La Dame Grise tendit sa main vers Shizuka. Elle voulait toujours l’épargner, mais ça n’empêchait pas de la molester un peu. Elle allait envoyer une onde de choc quand elle entendit les rugissements tonitruants, si forts qu’ils résonnèrent dans tout le cratère.



ELKANTAR

Les Drow vivaient dans des conditions naturelles extrêmement difficiles. Ils grandissaient dans des cités souterraines, parquées dans de mauvaises terres, où il n’y avait pas d’agriculture. En surface, les elfes les chassaient, et ils chassaient les autres. Ils pillaient les villages des « dh’oines » sans scrupule, et chassaient les créatures abominables des immenses grottes-mondes souterraines. Ils avaient appris à dompter les redoutables araignées géantes des profondeurs, ainsi que d’autres créatures sinistres, comme les Hydres. Ces conditions de vie difficiles en faisaient d’excellents guerriers.

Mais Elkantar, elle, avait grandi dans les Malterres de la Discorde. Même pour un Drow, les cités souterraines étaient un paradis par rapport aux Malterres, un endroit fait de pure malveillance, abritant les créatures les plus hostiles de Terra, les plus malfaisantes. Les Malterres se situaient à proximité de l’Olympe, mais aucun des aventuriers voulant voir les Dieux en rejoignant le Mont Olympe ne se risquaient à passer par les Malterres. On les voyait de loin, entourés par des pics montagneux particulièrement élevés et escarpés, formant comme des rangées de griffes noirâtres. Elkantar avait grandi ici, comme tous les élèves de l’École Discordia.

Suspendue dans le vide, elle n’avait pas dit un mot pendant son combat. Les « dh’oines » avaient la singulière manie de parler. Elle, elle tuait. Elle discutait après. Suspendue dans le vide, elle voyait, en contrebas, la lave, et réagit assez rapidement. Cette mutante était une idiote, si elle pensait qu’elle avait peur. Elkantar se laissa tomber, et il n’y avait plus aucune poudre, aucun gaz antimagie, pour la retenir. Elle se téléporta ensuite et finit au-dessus de la Meisaenne.

Les adversaires avaient réussi à tuer quelques sorciers, mais ils étaient tous vaincus. Elkantar tendit alors sa main, s’apprêtant à envoyer un rayon magique mortel vers la Meisaenne. Un sourire victorieux éclaira son visage, tandis que des étincelles bleutées se formaient dans le creux de sa main... Quand elle entendit un hurlement venant au-dessus de sa tête.

« HOOOOOOOOODOOOOOOOOOOOOOOOORRR !!! »

Une espèce de masse indiscernable arriva à côté d’elle, et elle sentit une main écraser sa gorge, ayant alors l’impression de sentir une machine lui broyer la gorge. Elle fut soulevée comme un fétu de paille, et fut balancée violemment sur le sol. Elle roula de côté, évitant de justesse le pied massif de l’homme qui venait de l’attaquer, et se releva. Une masse énorme se dressait devant elle, un demi-géant. Elkantar y reconnut là le demi-géant de Sylvandell, l’énorme monstre qui était connu pour veiller en permanence sur la Princesse de Sylvandell. Elkantar réalisa alors qu’une sorte de liquide poisseux s’échappait de ses lèvres, et elle y porta ses doigts, reconnaissant du sang... Son sang !

« Ça, saloperie, tu vas me le... »

Elkantar entendit alors, tout comme sa maîtresse, d’horribles rugissements, et leva la tête. Elle crut s’étrangler en voyant une dizaine de silhouettes arriver, déployant des ailes interminables. Un dragon doré atterrit alors juste devant elle, et poussa un rugissement assourdissant, tandis que les autres balançaient des jets de feu sur Kor-Tarath.

La cavalerie sylvandine venait d’arriver.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le samedi 08 mars 2014, 21:24:53
[Pardonne-moi cette réponse bizarrement écrite, mes vacances ne me réussissent pas du tout -_-]

« Décidément, il semblerait que la mort ne veuille pas de toi, mon cher Serenos...
-  Peut-être. Mais je crois qu’elle te trouvera à son goût une fois que j’en aurai fini avec toi, Sérénité. Je m'occuperai de ton cas après avoir réglé celui de ces deux braves hommes. »

Le rugissement d’un dragon se fit alors entendre dans toute la pièce, mais contrairement à ses opposants, le Roi ne semblait pas s’en formaliser. Il reconnaissait sans trop de difficulté ce son si particulier qui lui évoquait bizarrement celui d’un Lion souffrant d’une laryngite.

Le Roi semblait visiblement las. Toute cette aventure trainait en longueur, et il n’y avait plus rien à faire qu’attendre. Visiblement, Kynarth et Nyoron ne pourraient rien faire de plus pour le moment, mais lui reprenait toutes ses forces en puisant dans la puissance réveillée dans Kor-Tarath, puisant dans les ressources presque infinie de magie que relâchait le glyphe de Kayla, grâce à une brèche qu’il avait ouvert au moment d’en sortir. Il dévisagea un long moment toutes les personnes présentes dans la pièce, incluant son fils et celui qui contenait la deuxième partie de son âme, une autre faille dans l’imperméabilité de son pouvoir. Grâce à Shizuka, son corps avait maintenant récupéré toute sa vitalité, et il se tenait là, devant ses ennemis, près au combat.

« Finissons-en. Xeos. Kyrian. »

Il se dématérialisa sous la forme d’une nuée d’ombre, se retrouvant l’instant suivant devant son fils et lui assénant un puissant coup de poing dans l’abdomen, l’envoyant voler contre un mur de la salle du trône. À la suite de quoi, le Chevalier abattit en sa direction son énorme épée, qu’il para d’une main, à sa propre surprise. Il agrippa ensuite l’homme par la plaque de son armure et le souleva d’une main avant de l’écraser brutalement au sol. Le chevalier lâcha un grondement sourd à l’impact, mais quelle ne fut pas l’horreur qui passa sur son visage lorsqu’il vit les symboles qui apparaissaient maintenant sur le bras du Roi. Un sortilège de bannissement. C’était un sortilège normalement adressé aux démons, les renvoyant d’où ils venaient, mais il était aussi efficace pour aider les esprits troublés à gagner le repos éternel. Dans le cas d’un homme comme lui, il le renverrait directement dans le royaume d’Althenos, où il resterait enfermé pour une nouvelle éternité.

« Tu ne peux pas! Tu n’as pas le droit! Pas le droit!
-  On se reverra de l’autre côté, mon frère. Quand tout sera fini, je viendrai pour toi. Et nous en finirons une bonne fois pour toute. »

Sur ces mots, il lui asséna un coup dans le plastron. Sous eux se forma alors un cercle de magie complètement noir, avec de nombreuses écritures de couleur sang dans la marge. Malgré l’homme qui se débattait en hurlant de rage et de frayeur, le cercle le vidait complètement de sa force physique et spirituelle, le Roi resta parfaitement inébranlable, alors que trois énormes mains d’ombre s’emparaient de lui pour le trainer lentement à l’intérieur du sol, comme dans de la mélasse épaisse. Kyrian se débattit jusqu’à la fin, son courage ne manquant pas d’impressionner l’immortel alors qu’il se montrait parfaitement non-coopératif, malgré la douleur incroyable que cette résistance devait lui infliger. Le Roi ne perdit néanmoins pas de temps à savourer sa victoire, car entretemps, Xeos avait récupéré Ehredna des mains de ses acolytes et la dirigea vers son père. Tout comme lui, l’ancien prince de Meisa possédait dans ses veines le sang des Ashansha, ce qui faisait de lui l’une des rares personnes à pouvoir la manier en toute sécurité. Serenos regarda un instant son fils prodigue, celui qu’il aurait tant souhaité pouvoir sauver, et sentit un profond regret l’envahir. Pourquoi, mon garçon? se demanda-t-il alors que son fils s’approchait avec sa propre arme. Pourquoi dois-tu me forcer à faire ce que je redoute de faire?

Peut-être était-ce l’éducation basée sur l’importance du pouvoir, de l’indépendance et de la supériorité prodiguée par Mélisende qui avait guidé ainsi son fils à la suivre dans les arts les plus sombres de la magie, et qui avait, lentement mais très certainement, corrompu son esprit alors qu’il n’était qu’un jeune adolescent. Peut-être était-ce parce qu’il n’avait jamais vraiment été présent pour l’encadrer, et sans lui pour le guider, l’esprit du jeune garçon qu’il fut avait suivi la route que son instinct lui dictait. Mais tant de facteurs pouvaient faire d’un enfant l’homme qu’il deviendrait plus tard, et pour chacun, le parent se sentait toujours responsable, car une petite voix dans leur tête leur disait qu’ils auraient probablement pu y faire quelque chose, alors que dans le cas de Xeos, la cruauté, le sadisme, la soif de pouvoir et tous ses autres facettes étaient probablement déjà là lorsqu’il l’avait repris à Melisende. Sa jumelle, Holly, ne partageait pourtant pas son comportement destructeur, peut-être parce que la sorcière voulait faire de Xeos un « homme » selon ses perspectives et de Holy, une « femme » selon les perspectives du Roi. L’esprit de la sorcière était tortueux, et parfois, peut-être qu’elle-même se surprenait de l’incohérence de certaines de ses décisions.

Le père et le fils s’engagèrent alors dans un combat féroce, sans même tenter d’user du moindre sortilège, tous deux sachant très bien qu’un combat entre possesseurs du Sang des Ashanshas ne reviendrait qu’à une vaine perte de temps. La jeunesse et l’habileté de Xeos en faisait un opposant redoutable, mais le Roi possédait une expérience du combat bien plus grande que son rejeton. Même sans Ehredna entre ses mains, le monarque de Meisa se démontra être aussi rapide, efficace et puissant sans son arme qu’avec, ses poings s’abattant à le plat de la lame d’Ehredna, et parfois même contre le visage du jeune homme, qui hurlait de colère à chaque impact. Pourquoi est-ce que le Roi s’en sortait toujours, peu importe la situation? Pourquoi lui était-il aussi supérieur? Pourquoi est-ce qu’il n’abandonnait jamais? L’ancien prince avait vu suffisamment de gens abandonner devant une tâche bien trop grande pour eux pour savoir que simplement avoir la capacité de relever un défi était un exploit en lui-même, mais cet homme, celui qui l’avait engendré, son géniteur, il semblait toujours prêt à se battre, comme s’il défiait le monde lui-même de l’arrêter. Sa volonté inébranlable et son acharnement se manifestaient dans chaque coup que le Roi parvenait à lui asséner. Ses coups étaient si puissants, si lourds qu’ils en étaient démoralisants.

Le Roi agrippa finalement son fils par le cou et le souleva de terre. En réflexe, celui-ci lui agrippa le poignet et serra de toute ses forces dans l’espoir de contraindre son géniteur à relâcher sa prise. Le Roi tira alors une dague de sa ceinture. La décision de mettre fin aux jours de son enfant était finalement prise. Il n’y avait plus rien à faire pour le sauver, car il était corrompu jusqu’à la moelle. Le père dévisagea un bref moment son rejeton, et dans le regard rempli de haine du jeune homme, il vit le visage de Kaelin et Grymauch. Ses deux fils. Tués par ses mains.

« Ca, c’est pour tes frères. Pour le meurtre de deux pères de famille, pour deux époux, pour deux princes. Pour le meurtre de mes enfants. Meurs, Xeos! Meurs! »

Sur ces mots, le Roi replia le bras pour prendre de l’élan, visant le cœur de son fils. Dans un ultime geste de désespoir, le Prince leva Ehredna. Le Roi ressentit alors une vive douleur dans tout son bras, alors que la lame passait sous son aisselle gauche, se fichant sous son épaule avant de passer outre la résistance de ses muscles, ligaments et os pour trancher son membre. Libéré de la prise de son père, le jeune homme terrifié lâcha l’épée de son père et recula prestement hors de sa portée avant de se dématérialiser. Le Roi cria un « Non » protestataire alors que son fils disparaissait, abandonnant alliés et ennemis pour sauver sa propre peau. Tel était Xeos; maître ou pas, il ne pensait qu’à lui-même.

Son membre désormais sectionné tomba sur le sol, impuissant, et le Roi posa une main contre son moignon sanglant. Il tourna la tête vers sa défunte épouse et s’approcha d’elle, implacable, un mur infranchissable d’énergie pure se formant graduellement autour de lui, démontrant qu’il ne craignait aucun assaut de la part de son ex-femme.

« Ca ne fait rien, Serenité. Un bras en moins ou pas, tes projets sont à l’eau. J’ai compris ce que tu recherches ici. C’est Malrünn, n’est-ce pas? »

Le Roi ne pouvait clairement dire pourquoi il savait cela. Quelque chose dans le glyphe avait imprimé cette connaissance en lui, et l’avait rempli d’une certitude inébranlable que Malrünn était le véritable objectif derrière ce sacrifice, derrière cette mascarade, bien qu’il n’eut qu’une vague idée de ce que ce nom signifie, sachant simplement que cela cachait quelque chose de très mauvais. Il passa à côté de la sorcière et s’approcha de Shunya, qu’il attira dans la protection de son bouclier, avant de se diriger vers l’Omniprêtre et de s’incliner devant lui avec politesse.

« Prenez la fille, Nyoron et Kynarth, Omniprêtre, je vous en prie. Il n’est plus de raison pour vous de rester en ces lieux. Dites-moi seulement s’il y a un moyen de mettre fin à ce sortilège avant qu’il n’accomplisse complètement son but. Avec l’aide des Dragon d’Or, détruire Kor-Tarath par la magie serait-il envisageable? »

La question ne devrait en temps normal pas se poser, compte tenu de la nature ancienne et magique de cet endroit, mais Kor-Tarath était une structure bâtie à l’intérieur d’un volcan. En détruisant ses supports, en théorie, il devrait être possible de l’envoyer prendre un bain de lave dans le fond du cratère. Probablement qu’Erwan Korvander y avait pensé, mais soit pour un plan ultérieur ou par négligence, il n’était jamais passé à l’acte. Sceller le pouvoir de cette forteresse n’était plus une possibilité, car la forteresse en elle-même se vidait de sa puissance dans le transfert qu’elle effectuait, comme un  réservoir dont on venait d’ouvrir les valves bien grand. Il avait déjà entamé de drainer une partie de la puissance du sortilège pour se renforcer, mais il ne pouvait pas en tirer davantage sans risquer de subir de très violents effets secondaires, mais s’il parvenait à canaliser la magie pour la retourner contre la forteresse…

Il y avait encore un espoir!


***

« Un dragon? C’est la meilleure de la journée! »

Alessa parvint à se hisser à nouveau sur le pont avec l’aide d’Alexei. Le jeune homme la dévisagea un moment et prit son visage entre ses mains pour inspecter les pupilles anormales de la jeune femme. Sans plus de façon, il glissa une main dans ses cheveux et les remonta, dévoilant les oreilles de la Meisaenne, où coulait maintenant une petite quantité de sang.

« Tu pousses trop loin, Alessa. Si tu continues, tu vas te tuer. »

La Matriarche regarda le sorcier avec une moue. Alexei soutint néanmoins son air boudeur avant de se retourner vers Elkantar, qui se retrouvait maintenant devant un Dragon. La jeune matriarche se releva immédiatement et se mit à marcher en direction de l’Elfe, les poings serrés. Certes, elle n’avait plus son arme, qui était plantée quelque part dans un des piliers de soutien du pont, mais elle refusait de laisser ce lézard géant lui piquer son coup de cœur de la soirée. Elle se plaça donc devant Hodor et le Dragon, protégeant l’elfe de leur assaut.

« Hé, les gars, il y en a beaucoup plus à l’intérieur de la forteresse. Celle-là est à moi. »

Et elle se retourna vers Elkantar.

« J’en déduis que tu préfères mourir ici. Ca me brise le cœur de voir un tel potentiel gâché, mais enfin, c’est ton corps et ta vie. »

Levant les mains devant elle, fléchissant légèrement les genoux, Alessa se mit en position de combat. Bien que préférant les combats armés, l’entrainement militaire Meisaen faisait des Meisaennes d’excellentes combattantes à mains nues, même contre un ennemi armé. Elkantar s’était déjà vu proposé de rebrousser chemin, d’ouvrir les yeux à d’autres possibilités, mais elle avait rejeté ces offres du revers de la main sans même y accorder une petite minute de réflexion, et Alessa avait une règle pour ce genre de situation; offre une chance à ton ennemi de rendre les armes, mais ne fais jamais l’erreur de le proposer une seconde fois. La Meisaenne n’avait qu’une seule autre option lorsqu’elle n’avait plus celle d’épargner son adversaire; le tuer. Le tuer et s’assurer de mettre le cadavre dans un tel état que même un nécromancien repenserait à deux fois avant de le ramener à la vie.

Les troupes Meisaennes, épuisées, se replièrent derrière les lignes Sylvandines après avoir achevé les derniers golems et trolls qui restaient encore actifs entre les murs de la forteresse. Ils ne vinrent pas prêter main forte à la matriarche, sachant que celle-ci aurait tôt fait de la leur arracher avec les dents plutôt que d’accepter l’aide de qui que ce soit.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le dimanche 09 mars 2014, 13:57:12
TYWILL KORVANDER

Le plus long, indéniablement, fut d’habiller le Roi. En temps normal, Tywill était déjà une masse de la nature, si volumineux à la naissance, disait-on, qu’il manqua envoyer sa mère ad patres. Cette dernière, fort heureusement, était aussi une force de la nature. Tywill avait enfilé une armure noire avec des pointes sur les épaules et les jambières, une armure noire intégrale faite à partir d’écailles de dragons, comme les armures des Commandeurs. Faute de porter une épée, il arborait avec lui l’arme la plus puissante de tout Sylvandell : le Marteau de Guerre. Un immense marteau doré dont le pouvoir magique ne fonctionnait qu’en présence d’un héritier d’Erwan Korvander. Tywill était sorti du palais, et Léviathan était venu le voir. C’était le plus puissant dragon doré allié aux Sylvandins, l’un des meneurs de cette colonie de dragons. Léviathan avait hurlé, et les dragonniers s’étaient élancés, menés par Tywill Korvander et par Loden, le Grand Maître de l’Ordre des Dragonniers de Sylvandell, et un fidèle camarade de guerre.

Une vingtaine de dragons venaient de débarquer dans le cratère, constituant un soutien difficile à ne pas remarquer. Tous avaient vu, en s’approchant, le volcan en train de gronder. On appelait cette montagne Kor-Tarath, en référence au fort infernal qui s’y trouvait. Tywill connaissait l’histoire de ce fort, un fort infernal, un fort démoniaque, qui existait depuis la grande guerre entre les démons et les anges. Les démons l’avaient construit ici, et l’avaient abandonné en partant. Ils comptaient utiliser ce fort pour réveiller le Dragon Primordial qui sommeillait là-dessous, à l’aide d’un puissant sortilège en magie noire. Ils avaient échoué, et le Dragon Primordial avait été réveillé bien plus tard. Kor-Tarath n’était plus habité depuis des siècles, et, pour Tywill, il était temps d’en finir avec les vieilles reliques du passé. Alors qu’ils approchaient, une vapeur noire était en train de monter, et, à l’intérieur, l’air était irrespirable, viciant vos poumons. Ils avaient également vu l’envol des âmes, un spectacle multicolore de spectres disparaissant dans le ciel, en modifiant la couleur des nuages, comme si l’Apocalypse en personne était en train de se déclencher.

« Loden, mène tes hommes par l’arrière ! Attaquez les points faibles ! »

Tywill allait se charger en personne de secourir l’Omniprêtre. Il savait qu’il se trouverait tout en bas. Les dragons fondirent en hurlant dans le cratère, contraignant les adversaires, des sorciers et des trolls, à se replier dans le château. Ceux qui restaient dehors se firent carboniser par des jets de feu incandescents, les trolls étant ensuite chargés par la masse épaisse des dragons. Loden et son escadrille descendaient en spirale, balançant des jets de feu sur les piliers de soutènement de Kor-Tarath, ainsi que sur les antiques runes magiques, qui avaient permis, pendant tant de temps, à Kor-Tarath de se maintenir. Ils explosaient dans des éruptions magiques, et les dragons se défendaient contre les assiégés. Les trolls leur balançaient des cailloux, et les sorciers, depuis des meurtrières, des flèches magiques et des sorts magiques. En réponse, les dragons balançaient leur feu. Émanant de dragons dorés, ce jet était meurtrier, terrible, comme si le soleil lui-même vous crachait à la figure ses flammes. Le temps jouait cependant contre eux. Le volcan entrait en éruption, et la lave était lentement en train de monter, tandis que les parois du cratère tremblaient. Les dragons devaient aussi esquiver les morceaux de pierre qui tombaient. L’un d’eux heurta la queue d’un dragon, qui poussa un hurlement en tombant en piqué. Son dragonnier sut cependant rétablir la situation, et le dragon fila à la surface de la lave, avant de remonter en flèche, en rugissant à nouveau.

Quant au Roi, il descendit en flèche vers la pointe pyramidale. Filant sous le château, il se prépara, et, sans plus attendre, bondit dans les airs, filant vers le toit, brandissant vers l’arrière de sa tête son Marteau, avant de le balancer. L’arme infernale tournoya à toute allure, et rencontra le plafond, provoquant une belle explosion, fragilisant le toit. Tywill la transperça alors, récupérant son marteau, et s’écrasa lourdement en contrebas.



DAME GRISE

Que Shizuka ait choisi de la trahir n’était pas surprenant. La pauvre enfant était innocente, et c’était bien pour ça que la Dame Grise ne l’avait pas tué, ni offerte à son maître. Elle disposait encore de son libre arbitre, et, si elle comprenait la nécessité de cette cause, elle ne tenait pas non plus à sacrifier n’importe qui. Elle vit le Roi de Meisa attaquer son propre fils, Xeos. Ce dernier réussit à affaiblir son père, avant de partir. Il avait un rapport à faire, et la Dame Grise devait rester en arrière. Elle vit Serenos la dévisager. Elle était restée inactive pendant tout ce combat, laissant l’homme se défaire de son emprise. On entendait Kor-Tarath gronder. Le volcan se déchaînait, et elle n’avait pas encore prévu de mourir ici. Elle vit Serenos s’avancer vers elle, essayant de protéger Shizuka, tout en lui parlant.

« Ca ne fait rien, Sérénité. Un bras en moins ou pas, tes projets sont à l’eau. J’ai compris ce que tu recherches ici. C’est Malrünn, n’est-ce pas ? »

La Dame Grise ne dit rien, avant de sourire, lentement.

« Ce glyphe que tu vois a été inventé par des démons, et a été amélioré par des mages noirs. Cris-tu donc qu’on peut s’en servir ainsi ? Tu vois des évidences là où il y a des suppositions. N’as-tu donc pas compris que je t’ai laissé entrer dans le glyphe ? Je ne suis plus ton élève, Serenos, j’ai été formée aux arcanes magiques, à bonne enseigne. Mon nouveau mentor dispose de sorts qui dépassent l’entendement. Nous ne sommes que des enfants devant son art. »

Serenos devait commencer à les ressentir, ces fameux effets secondaires. La Dame Grise leva la main, et la tendit, écartant chacun de ses doigts. Des ondes magiques en filèrent alors, frappant les protagonistes. L’Omniprêtre, qui avait tenté de se relever, fut à nouveau repoussé au sol, et Serenos fut repoussé, tandis que Shizuka, hagarde, tomba à genoux, épuisée.

« Mälrunn et Kor-Tarath ne sont que des maillons, de simples cellules. Nous n’avons pas fait tout ça pour réveiller un nécromancien d’un petit château isolé. Les Desseins de la Grande Toile sont en marche, et ce n’est pas toi qui les stoppera. Tu as absorbé l’énergie de ce glyphe ! Très bien, mais, ce faisant, tu t’es lié à ce dernier. Tu m’as ainsi libéré, me permettant de sortir d’ici, et de vous laisser mourir ici. »

Pour réveiller Kor-Tarath, il fallait fusionner avec ce dernier. Comme à Mälrunn, l’esprit du seigneur des lieux était lié aux murs du fort, et ne pouvait en sortir. La Dame Grise avait laissé Serenos sauver Shizuka, et l’avait laissé se ressourcer auprès du glyphe, choses qu’elle aurait pu empêcher, puisqu’elle avait supervisé la conception de ce glyphe. Elle avait juste eu besoin d’un pigeon pour mourir à sa place. Shizuka était encore trop sonnée pour oser se débattre, et, quand la Dame Grise l’attrapa, elle se releva.

« Je te ramène chez toi, Shizuka. Ton acte permettra peut-être, sur le long terme, de sauver ta chère patrie, et de protéger ta Princesse du funeste destin qui nous attend tous. »

L’Omniprêtre crut bon d’intervenir :

« Sor... Sorcière ! Ne mentez pas... Ne mentez pas à cet enfant. Tout ça, vous l’avez fait... Dans quel but ? »

La Dame Grise l’observa silencieusement, plantée devant lui.

« Pour nous sauver tous, Omniprêtre. En tant que serviteur de Batrok, vous devriez être sensibles à ce genre de notions. Les anges, les démons, le Chaos, l’Ordre... Ces vieilles guerres ne nous concernent plus. Vous êtes une relique du passé, comme cet endroit... Comme vous tous. Vous regardez les vieilles frontières sans voir qu’un nouvel ennemi se profile à l’horizon. Le monde ancien n’est plus. Les civilisations sont un concept creux. Nous sommes les architectes d’un monde nouveau et libre. »

Elle termina sa tirade en créant un portail, qui allait lui permettre de s’enfuir. Elle avait finalement réussi à survivre, et c’est avec cette idée en tête qu’elle se dirigea vers ce dernier... Quand un carreau d’arbalète la transperça à hauteur de l’épaule.



CIRILLIA

Après son vol plané improvisé, Ciri’ était sonnée. Elle avait mal au dos, avait chaud, et ses doigts l’élançaient, et elle prit donc le temps de boire une nouvelle Hirondelle. Sa tête commençait à lui tourner, un effet secondaire de la toxicité de son sang. Elle en pourrait pas se permettre de boire d’autres élixirs, et se redressa lentement. En contrebas, il y avait une espèce de festival magique folklorique, avec des couleurs dans tous les sens. C’était beau, et indescriptible. Cirillia voyait la Dame Grise, qui récupéra une espèce de femme aux cheveux violets, toute nue, tandis qu’un glyphe vibrait sous leurs pieds. La chasseresse s’avança lentement, voyant la situation évoluer. Visiblement, ses alliés semblaient avoir du mal à s’en sortir avec la magie, et elle affûta son arbalète. La femme à la longue chevelure grise reprit dans le creux de sa main la femme aux cheveux violets, avant de se diriger vers une sorte de portail.

Ciri’ réagit alors. Elle se redressa subitement, et décocha son carreau. L’arme traversa la pièce, tandis qu’elle sauta par-dessus la balustrade. Elle entendit la femme pousser un hurlement de douleur, et Cirillia roula sur le sol. Elle avait dégainé son épée, et se rua vers la femme, décidée à porter l’estocade finale. Rien ne valait une bonne vieille épée tranchante. Dans les yeux de la belle femme, elle lut une sorte de haine sans nom. Elle avait porté sa main vers sa blessure, au-dessus de son cœur, puis la tendit vers Ciri’, la repoussant à l’aide d’une puissante onde de choc.

« Ha ! »

Poussant un hurlement de surprise, Ciri’ fut repoussée, et roula sur le sol. Des arcs électriques fondirent alors vers elle. Mettant son épée en biais, pointe vers le haut, elle accueillit les éclairs, qui rebondirent contre le tranchant de la lame, filant dans tous les sens, puis roula sur le côté, cherchant à déborder la femme. Elle s’élança à nouveau vers elle, mais cette dernière envoya une autre onde de choc. Néanmoins, Cirillia était, cette fois-ci, préparée, et bondit sur le côté. Elle glissa sur le sol, et reprit sa course. La Dame Grise utilisa à nouveau la télékinésie, soulevant la jeune femme comme une plume. Ciri’ s’envola au-dessus d’elle, et s’écrasa contre le mur, la tête en bas, maintenue en l’air.

« Ça, petite pute, tu vas me le payer. »

Le sang s‘échappait de la plaie de la femme, et Ciri’ était immobilisée. Si elle avait eu plus de temps, elle aurait pu imbiber son carreau d’un poison. Devant la Dame Grise, un cristal magique vint se former, s’allongeant, formant une longue pointe, qu’elle aligna vers elle. Tout le corps de la jeune femme était bloqué, comme si n étau lui enserrait chacun de ses muscles. La pression était si forte que la jeune femme ne pouvait même pas remuer la langue ! Elle essayait de se débattre, mais était écrasée par le pouvoir de cette femme. Cette dernière lança alors son cristal, dans le but de le planter dans le crâne de Ciri’... Mais quelqu’un se le prit en cours de route, sautant sur la trajectoire.

C’était Kynarth. Le jeune Commandeur sentit le cristal transpercer sa chair, sur son flanc, et s’écroula sur le sol. La Dame Grise grogna de dépit.

« Puisque vous désirez tous mourir, je vais vous satisfaire ! »

Elle allait lancer un nouveau sort quand le plafond se mit à trembler. Surprise, la femme leva la tête.

« Qu... ? »

Ce fut tout ce qu’elle put dire avant que des morceaux du plafond ne lui tombent dessus, accompagnés par plusieurs centaines de kilos de chair et d’armure. Ciri’ sentit la pression se relâcher, et tomba sur le sol. Le Roi de Sylvandell venait d’arriver, et regarda autour de lui, visiblement surpris.

« C’est quoi, ce bordel ?! »

L’Omniprêtre, blessé, entreprit de se relever.

« Ton Marteau ! Plante-le sur le sol ! »

Tywill, surpris, obtempéra malgré tout. Ciri’, elle, s’élança vers Kynarth, qui vomissait du sang. Entre-temps, l’Omniprêtre s’agenouilla sur le sol, et se mit à prier. Le glyphe violet se mit à blanchir.

« On a pas le temps pour ces conneries, le fort va s’écrouler d’une minute à l’autre ! Léviathan nous attend dehors, mais il faut grimper l’escalier pour le rejoindre ! »

L’Omniprêtre ne dit rien, n’interrompant pas sa prière. Il invoquait le même sort que celui qu’il avait jadis fait à Mälrunn, afin d’enfermer le glyphe, et ainsi permettre à Serenos de sortir de ce piège. Entre-temps, le sol se lézardait.

« ...Oblivion sempiternum deamonis... » termina ainsi l’Omniprêtre.

Le glyphe sembla pousser un ultime hurlement. Sous ses pieds, Tywill vit une masse de sang en train de s’épaissir, mais ne se posa pas plus de questions. Il attrapa Kynarth, le portant comme un sac de patates, faisant pour ça pivoter ses pointes vers l’arrière, et s’élança le long de l’escalier.

Il était temps de fuir à toutes jambes.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le lundi 10 mars 2014, 23:53:50
[Petite tentative bizarre :D]

Journal du Roi Seenos Sombrechant

« Je ne me souviens pas de grand-chose à partir du moment où la Sorcière Grise a utilisé ma connexion au glyphe pour outrepasser les mesures de sécurité et me transférer le poids de son fonctionnement, bridant ainsi ma perception du monde extérieur et me rendant incapable d’interagir avec celui-ci. Expliquer ici le fonctionnement de cette magie ne m’est pas possible, mais d’une manière ou d’une autre, elle était parvenue à plonger mon corps astral dans une forme de stase, plongeant également mon corps dans l’immobilisation complète. Je me souviens de la douleur. Être connecté au glyphe me donnait l’impression d’être tiré vers lui par chaque parcelle de peau qui couvre mon corps, en sachant pertinemment que si je m’y abandonnais, je ne reverrai probablement pas le soleil se lever avant un bon moment. J’étais immobilisé, incapable d’entendre ou de voir mon ennemi. Cependant, je savais que dans les ténèbres du glyphe, je n’étais pas seul. Quelque chose s’accrochait à moi, aux pans de mon manteau, et ne lâchait pas prise. Lorsque j’arrivai à tourner, lentement, la tête en sa direction, je fus frappé de stupeur; c’était un homme frêle, osseux, dont le simple effort de s’agripper à moi provoquait de terribles tremblements. Son visage était si émacié que ses yeux semblaient prêts à rouler hors de leurs orbites au moindre changement de direction du regard. Il me hurlait de le laisser sortir, qu’il ne pouvait plus rester enfermer en ces murs. Il me demandait de lui « laisser une place », probablement dans le but de parasiter mon esprit et mon corps, mais je l’ai repoussé. Avec un mouvement lent et lourd, je parvins à le repousser, et il lâcha sa prise sur moi avant de retourner là d’où il venait. Je me souviens qu’il a lutté, qu’il s’est débattu contre le glyphe qui l’avalait à nouveau, alors qu’enfin, une partie du poids du sort se soulageait de mon propre esprit, mais au moment même où la pression se relâchait, je pus l’espace d’un instant percevoir au travers du voile du glyphe; la Sorcière Grise essayait d’emmener Shizuka avec elle, mais cette fois, j’étais prêt à l’en empêcher. Je lui ai hurlé qu’elle ne pourrait s’emparer de l’Innocente qu’après m’être passé sur le corps, et j’ai ouvert mon esprit à la magie.

Comme l’avait dit Kynarth, la téléportation en Sylvandell était un art très compliqué qui demandait énormément de concentration, et je le savais. Mais Kayla, dans l’urgence, n’utilisait pas les techniques que je lui ai enseignées à l’époque où elle avait été ma femme pour se sauver; elle avait simplement ouvert une porte entre deux endroits. Les portes de téléportation fonctionnaient un peu comme des détecteurs d’hérédité; si une autorisation n’avait pas été inclue dans le sortilège, il était impossible pour une personne de suivre une autre, à moins d’avoir ouvert une porte à tous. J’ai donc écrasé l’autorisation qui aurait permis à Shizuka de suivre la Sorcière Grise et la gardait donc hors de sa portée. Je n’eus le temps que d’exécuter cette tâche, car l’instant suivant, le glyphe me ramena à lui.

Pendant que j’étais enfermé, j’eus le temps de réfléchir. La vitesse du monde des esprits étant dramatiquement différente de celle du monde des vivants, j’eus amplement le temps de penser à Sérénité. La culpabilité d’avoir échoué était certainement moindre que celle de ne pas avoir pu lui donner les armes de résister à la tentation du mal. Sérénité, comme Shizuka, avait été une des rares Innocentes qui avaient sillonné le monde. Une âme pure, vierge et claire comme la lumière elle-même, dénuée du mal et de sa souillure. Mais qu’est-ce qu’une chose pure, sinon une cible de choix pour la corruption? Les Innocents étaient précieux, comme des diamants, car ils étaient si puissants dans la magie que leur niveau surpassait de loin celui des guérisseurs de Premier Rang, s’ils étaient correctement formés. Mais qui d’autre qu’un Innocent pouvait en former un autre? Les autres, consciemment ou pas, sont incités à brider le talent d’un Innocent, car si le but d’un professeur est de voir son élève le surpasser, dans le cas des Innocents, leur croissance incroyable et leur profonde et instinctive compréhension de la magie blanche peuvent susciter un sentiment de crainte et d’infériorité à ceux qui tentent de leur inculquer quelque chose. Je ne pouvais moi-même former un Innocent à sa juste valeur, comme Sérénité le prouvait ce jour-là; incapable d’imperméabiliser son âme aux ténèbres, elle avait été corrompue, et elle était maintenant un serviteur d’un être qui avait à cœur de plonger le monde dans un nouveau chaos, sous la bannière du Renouveau de ce monde.

Je ne sais pas si j’aurais réussi à m’échapper de ce glyphe sans l’intervention du Roi de Sylvandell et de son Omniprêtre. Je sais simplement que leur aide me sauva une énorme perte de temps, car je brisai alors mes liens avec aisance, coupai ma connexion au glyphe et récupéra finalement le contrôle de mon corps et de mes gestes. Je me souviens d’avoir passé Nyoron sur mes épaules dès l’instant où j’émergeai de ma prison spirituelle et de m’être élancé vers les couloirs. Par les fenêtres, je voyais mes troupes se replier en gravissant le volcan à l’aide de leurs grappins et équipement d’escalade.
»

Le Roi arriva enfin à la hauteur du Dragon, qui attendait visiblement Tywill. Ses blessures avaient enfin cessé de saigner, mais régénérer un membre était autrement plus compliqué à réaliser qu’à simplement refermer une blessure. Il aurait probablement besoin de faire un détour par Meisa pour se débarrasser d’une telle blessure. Il laissa doucement Nyoron s’allonger sur le sol avant de regarder les autres. Il allait dire quelque chose quand un son assourdissant se fit entendre dans tout le volcan; un des piliers supportant Kor-Tarath venait de rendre l’âme, et la forteresse commença à s’incliner. Le Roi grommela et plaqua ses mains sur le sol en invoquant la magie. Au prix d’un effort incalculable, le Roi réussit à immobiliser la structure. En proie à une vive douleur, il adressa un regard à ses compagnons et leur ordonna de grimper sur le Dragon. Malgré les capacités de celui-ci, il aurait besoin d’une surface solide pour se lancer dans un vol stable et ascendant, alors qu’une chute reviendrait à leur mort à tous. Serenos n’avait rien à craindre lui-même, il pourrait se téléporter dès qu’il le faudrait, mais les autres, n’ayant pas cette capacité et lui-même n’ayant pas la force suffisante de tous les emmener avec lui, ne pouvaient que compter sur le Dragon pour les sortir de ce mauvais pas.

Kor-Tarath allait s’effondrer, c’était inévitable. Supportée massivement par la magie qui l’habitait, elle ne pouvait survivre sans elle, et les Deux Rois, Tywill grâce à son Marteau et Serenos grâce à son drainage d’urgence, avait réduit celle-ci à néant par leurs efforts, ce qui ne laissait que les supports physiques pour garder la forteresse de la destruction. Pour réduire la charge à soutenir, le Roi avait dû sacrifier une bonne partie de la structure au lac de lave qui se trouvait en dessous. Quand le Donjon sombra, il se surprit à espérer que les Sylvandins avaient au moins pris la peine de vider la salle du coffre, car avec tous les trésors qui se trouvaient dans cette foutue forteresse et après tout le mal qu’ils s’étaient donnés pour gagner cet endroit, il serait parfaitement idiot que tous ses secrets soient définitivement perdu. Serenos était même très intéressé à comprendre comment les anciens mages avaient réussi à investir cet endroit avec suffisamment de magie pour pouvoir la maintenir en place pendant des siècles. Mais il était maintenant un peu trop tard pour espérer l’inespérable.

« Dépêchez-vous! »

Un son de craquement se fit subitement entendre, provenant de sous Serenos. Une énorme lézarde venait de fendre la plateforme et les pierres commençaient à se déloger; la magie du Roi ne suffisait plus à maintenir la solidité du sol.

« Eh merde… Ca fout le camp…! »

Le Roi sût que le Dragon s’apprêtait à prendre son envol. Il tira alors de sa ceinture un fouet de cuir et l’envoya s’enrouler autour de la patte arrière de la créature, conscient qu’elle refuserait de le porter autrement; les Dragons Noirs et les Dragons d’Or avaient une très mauvaise relation, et le Roi en faisait régulièrement les frais. En fait, les Dragons noirs étaient détesté un peu partout sur la planète…
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le mercredi 12 mars 2014, 02:06:10
L’une des tours de Kor-Tarath se détacha du pilier central, et heurta violemment la paroi du cratère, afin de se désagréger lentement, d’énormes morceaux tombant en contrebas. Toute la structure était en train de trembler dangereusement, et d’énormes morceaux de rochers tombèrent à côté de Leviathan. Levant la tête, la bête cracha un jet de flammes incandescentes, qui firent fondre plusieurs pierres, empêchant ainsi le dragon d’être blessé par les débris. Le long pilier qui retenait la pyramide lâchait de plus en plus, et cette dernière était en train de tomber en morceaux. Tenant la mystérieuse femme nue par la main, Cirillia grimpait les longues marches en hauteur. L’escalier était en train de s’écrouler. Tywill fut le premier à rejoindre Leviathan, sautant dessus, emportant Kynarth avec lui. La lave montait et explosait. L’éruption volcanique avait commencé, et le volcan hurlait sa fureur. Ciri’ ignorait qui était cette femme, mais elle savait qu’elle n’avait pas l’air dangereuse... Elle le sentait.

« Mais... Qu’est-ce qui se passe ? demanda cette dernière.
 -  Remuez-vous le fion ! » rétorqua Ciri’ en hurlant.

Un rocher tomba devant elles, et fragilisa l’escalier. Ce dernier se coupa en deux, et Cirillia bondit en avant, évitant ainsi de tomber avec l’escalier. Malheureusement, la mystérieuse femme nue glissa, et bascula en arrière. Ciri’ la vit descendre, ses doigts lâchant les seins, et elle bondit, réussissant in extremis à l’agripper. La tête de Ciri’ était dans le vide, et la femme était sous son nez, tandis que le sol de la pyramide disparaissait, montrant une lave terrifiante, hypnotique. La femme cligna lentement des yeux, en baissant la tête.

« Mais où suis-je ? Que se passe-t-il ici ?!
 -  Accrochez-vous à moi, bordel, ou on va cuire comme des saucisses ! »

La femme semblait ébahie, comme si elle se réveillait d’un long rêve, mais la chaleur de la lave, le grondement du volcan, l’aidèrent à se réveiller. Les mains de Cirillia étaient moites, et la femme glissait lentement... Lentement, mais sûrement. Elle finit alors par lever son autre main, et raffermit sa prise sur Ciri’, qui força alors, afin de la hisser. Elles se retrouvèrent ainsi sur l’escalier, mais les piliers qui soutenaient ce dernier, et qui étaient plantés contre les parois de la pyramide, étaient en train de s’effondrer également. Ciri’ courut donc à nouveau avec la femme, rejoignant finalement le balcon.

Elle laissa la femme passer par devant, et cette dernière se retrouva derrière Tywill. Serenos s’agrippa à la patte de Leviathan, alors que leur plateforme d’appui s’écroulait. Au même moment, des cendres volcaniques jaillirent, remontant le long du volcan pour s’envoler dans les airs. Une épaisse fumée était en train de remonter, et, alors que Ciri’ allait rejoindre Leviathan, une rafale de cendres pulvérisèrent la pyramide, la criblant d’impacts, et frappant également Cirillia. Sonnée, elle fut repoussée dans le vide, et tomba droit vers Serenos. Elle réussit à s’agripper à la ceinture de ses vêtements, lâcha prise, et s’agrippa, en désespoir de cause, à sa chaussure.

Leviathan s’envola alors, montant en flèche, au milieu d’une fumée asphyxiante. Ciri’ planait à moitié, tandis qu’elle entendait le dragon rugir. La lave montait à toute allure, et plusieurs cendres frappèrent le corps de Leviathan, qui devait également éviter les débris de Kor-Tarath. L’antique château s’écroulait sur lui-même, envoyant couler par le fond trolls et golems. La lave montait à toute allure...

...Dehors, un impressionnant jet de lave fusa au milieu de la fumée, noircissant toute la région. Leviathan apparut alors, au milieu de la fumée. Le poids de tous les passagers était trop lourd, même pour lui, et, après avoir réussi un tel envol, au milieu des autres dragons, il se mit à piquer. Les flammes ne dérangeaient pas un dragon doré, mais il bascula vers le sol, le long d’une plaine, et rejoignit en réalité, à travers sa descente, le village que Kynarth et les autres avaient vu en filant vers la montagne. Le dragon se posa sur la neige, relâchant ses passagers, d’autres dragons approchant pour les prendre. Kynarth avait besoin de soins urgents, et Ciri’, quant à elle, avait la moitié du corps recouvert de cendres. Elle avait sombré dans l’inconscience.

En hauteur, Kor-Tarath était en train d’entrer en éruption pour la dernière fois de son histoire, et les cendres durent tomber jusque dans la ville de Sylvandell.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le mercredi 12 mars 2014, 16:36:31
Le Dragon prit son envol, et le Roi sentit alors ses pieds quitter le sol alors qu’il prenait de l’altitude. Au même moment, la Tour finissait de s’écrouler, ainsi que la plateforme qu’il avait réussi à créer avec la magie. Les pieds dans le vide, un fouet enroulé autour du bras pour plus de solidité, le Roi faisait désormais office de léger bagage. Il tourna alors la tête et vit Cirillia effectuer un bond en sa direction. Le Roi tendit sa main libre pour l’attraper, mais une autre explosion dévia la jeune femme de la trajectoire de sa main, les envoyant corps contre corps, une proximité dont tous deux se seraient certainement passés lorsque la douleur leur passa au travers des muscles. Il sentit alors que sa main s’agrippait à sa ceinture, menaçant de faire tomber son pantalon, puis enfin à sa botte. La tension causée par ces  deux tractions contraires successives disloqua douloureusement l’épaule de Serenos, qui aboya un cri de douleur, serrant les dents pour ravaler la suite de ce même cri, ainsi qu’une vague de jurons plus imaginatifs les uns que les autres. 

« Bon sang, femme! gronda-t-il comme seul reproche pour la douleur qu’elle lui avait infligée. Tiens bon! »

La jeune femme tenait à peine sa prise, accrochée au pied du Roi, et avec les débris qui chutaient de tous les côtés et une cendre opaque qui leur piquait les yeux. Le Roi regarda un instant son bras, roula des yeux à la simple pensée de la douleur qu’il s’apprêtait à s’infliger, et il regarda Cirillia et la supplia en silence de ne pas lâcher prise. Il ferma un instant les yeux et profita de l’activité volcanique pour faire le plein d’énergie naturelle. La chaleur intense du volcan était généralement suffisante pour générer une bonne portion, mais contrairement à l’énergie pure de la lumière ou des ténèbres, le Roi n’avait qu’un contrôle partiel sur cette forme de magie.

La régénération des membres nécessitait beaucoup d’énergie d’un coup lorsqu’il devait être fait très rapidement, et le résultat dépendait toujours de la force actuelle du jeteur de sort et sa connaissance de l’anatomie, deux conditions que le Roi possédaient, mais à de niveaux passablement acceptables. Tout en étant conscient de ses propres tares et du risque qu’il encourrait de dépenser aussi soudainement une bonne part des restants d’énergie volés à Kor-Tarath, et l’entièreté de magie naturelle récupérée au volcan, il marmonna quelques mots dans la langue des anciens et très rapidement, son bras se reconstitua, à commencer par les os, les muscles, les nerfs et la chair, le tout semblait être un processus particulièrement détestable et douloureux. Il ne fut pas long pour lui de comprendre que ce bras manquait drastiquement de force, faute d’entrainement, mais il décida qu’il serait plus adapté de s’en soucier une fois en sécurité; il pourrait le renforcer à un autre moment. Le suppléant d’un peu de magie pour générer un brin de force musculaire, il lança son opération. Il se mit alors à contracter les abdominaux et les muscles de ses jambes, se pliant lentement au niveau des hanches et fléchissant les genoux, pour soulever la jeune femme le plus haut possible pour. Il lui agrippa alors une main avec celle de son nouveau bras et la souleva, avant de l’attirer à lui et de la serrer contre son corps.

Avec une telle fumée et le manque d’oxygène, elle ne tarderait pas à perdre connaissance, et des dommages irréversibles pouvaient être causés à son cerveau si le roi ne pensait pas à quelque chose très vite. Il roula des yeux lorsqu’une solution des moins originales se proposa à son esprit. Il soupira et plaqua alors ses lèvres sur celles de la jeune femme, alors qu’elle perdait conscience, et il se servit de la magie pour purifier l’air de ses propres poumons et entreprit de souffler celui-ci dans la bouche de sa camarade. Heureusement, elle n’aurait jamais besoin de savoir ce qu’il avait fait, Kynarth non plus, et c’était bien comme ça.

Alors qu’ils immergeaient des cendres, le Roi se découvrit un visage noir de suie et son manteau tout aussi sale que s’il avait volontairement pris la décision de faire plongeon dans les restes d’un feu de camp. Une fois à l’air libre et non viciée par la centre, il brisa la respiration artificielle qu’il entretenait avec la charmante tueuse de monstres et se contenta de la maintenir contre lui, jetant des coups d’œil en contrebas et manqua de blêmit en se rendant compte de l’altitude à laquelle il se trouvait. Une explosion provenant du volcan attira heureusement son attention, le forçant à détacher le regard pour jeter un coup d’œil derrière lui, juste à temps pour remarquer un énorme bloc de pierre, probablement appartenant à la forteresse, s’envoler plusieurs mètres dans les airs avant de retomber sur le flanc du volcan et de foncer droit vers les forêts à son pied. Il ne put s’empêcher de penser que les animaux, s’ils avaient le don de la voix, manifesteraient probablement leur colère de toujours faire les frais des disputes des humanoïdes. Heureusement, ils n’avaient pas l’esprit de la vengeance. Cette pensée farfelue parvint à arracher un sourire au Roi, malgré la sombre couleur que cette journée semblait avoir pris.

Le Dragon s’apprêta à atterrir dans le village, mais le Roi préférait éviter de percuter une maison en chemin. Il lâcha prise sur son fouet, qui se déroula autour de son bras, et il se laissa tomber avec la jeune femme dans les bras. Heureusement, ils étaient dans le flanc d’une montagne couverte de neige, et leur chute fut adoucie par un moelleux coussin de poudre blanche, mais les deux compagnons n’arrêtèrent pas leur chute aussi aisément; une fois au sol, la gravité les envoya faire une série de tonneaux jusqu’au pied de la montagne. Serenos remercia le ciel d’avoir réussi à retenir son haut le cœur, puis il regarda la jeune Cirillia, s’assurant qu’elle était indemne. Elle était clairement sonnée, mais toujours vivante. Le Roi passa alors un bras sous les genoux de la dame, un autre sous son dos, et il la souleva de la manière la plus confortable possible avant de regagner l’intérieur du village. Serenos s’approcha alors du Dragon d’Or et du Roi de Sylvandell, son regard s’immobilisant sur lui. Il voulut alors lui rappeler que s’il s’était montré plus souple, il aurait pu éviter ce qui vient de se produire. L’ennemi avait maintenant gagné des points dans la réalisation de leurs objectifs, et le reste, pour leur part, ne récoltaient que des blessures et des pertes déplorables. Fort heureusement, il n’y eu aucun mort dans leur camp… ou presque. Les Meisaens n’avaient rien perdu, mais il n’avait pas encore entendu le rapport d’un Commandeur Sylvandin. Le Roi leva une main vers les maisons en ruines et en tira des morceaux de bois et des couvertures, montant des brancards de fortune et les unissant grâce à une à de solides cordages. Il y déposa Cirillia puis il demanda au dragon de lui faire glisser Kynarth et Nyoron, qu’il installa à leur tour sur les petits traineaux. Il avait adapté ces moyens de transport au vol des dragons, ce qui leur permettrait de rester au repos le temps du voyage, sans gêner leurs porteurs reptiliens.

Il se tourna finalement vers la jeune Shizuka et posa une main sur son pied nu, comme il lui aurait normalement pris la main, et il la regarda dans les yeux, un bref moment, comme pour lui dire qu’ils parleraient bientôt, tous les deux. Elle devait avoir beaucoup de questions à lui poser au sujet de ce qui lui était arrivé et de ce qui attendait Edoras, ce qu’il comptait faire d’elle et autres, mais il ne pouvait pas répondre à ses questions pour le moment; il devait parler à Tywill. Il baissa doucement la tête devant la jeune femme, frôlant son genou de son front, avant de se tourner vers Tywill et son Omniprêtre.

« Je quitterai Sylvandell dans les prochains jours, Roi Tywill. Accorde-moi simplement de pouvoir veiller sur eux, le temps qu’ils ouvrent à nouveau les yeux. Je voudrais leur faire des adieux et les remercier à leur dû. »

Ce n’était pas l’honneur qui le maintenait en place, ni les scrupules. Simplement, il ne pouvait quitter Sylvandell sans s’être assuré que ces gens, qu’il avait mis en danger par sa simple présence, se remettraient de leurs peines. Il dévisagea alors l’Omniprêtre et le salua d’un signe de tête.

« Omniprêtre. Le temps ne se prête pas vraiment à la discussion, mais j’ai beaucoup de questions à te poser. Je te prie de prendre le temps de m’entendre et de m’éclairer, dès qu’il sera possible. »

Les Dragons se posèrent finalement au sol, et le Roi s’approcha d’eux pour demander aux puissantes créatures l’autorisation de fixer les brancards à leur poitrail pour les transporter en lieu sûr. Les bêtes semblaient hésitantes, mais lorsqu’il répéta sa demande dans la langue ancienne, ils obtempérèrent à contrecœur. Les Sylvandins étaient peut-être leurs alliés, mais le Roi de Meisa les répugnait hautement. Il attacha donc les trois civières au cou et aux selles des dragons. Après avoir fini sa besogne, le roi recula un peu et porta une main à sa bouche et se mit à tousser violemment. Au début, ce ne fut qu’une simple toux, mais le Roi ne cessa pas et se retrouva bien vite à genoux en train de se tenir la poitrine, toujours en train de tousser, un étrange liquide noir jaillissant de sa bouche se mit alors à passer les interstices entre ses doigts, coulant ensuite dans la neige. Le Roi se plia alors en deux, retirant sa main de sa bouche, et il vomit une généreux quantité de cet étrange substance dans la neige. Il regarda l’espace d’un instant le liquide et d’un geste, il l’enflamma et laissa les flammes consumer cette trace. Il savait que ce n’était pas la seule fois qu’il vomirait, ce jour-là. Tant que la magie noire corromprait son sang, son corps tentera de se purger. Il n’y avait rien à faire d’autre que ravaler sa fierté et évaluer s’il avait pris une bonne décision ou pas.

[Je te suggère de faire une ellipse pour l’arrivée à Sylvandell. On verra ensuite comment on finit le topic ^^]
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le samedi 15 mars 2014, 03:01:01
Les cendres tombèrent dans Sylvandell. Elles enflammèrent une grange dans les plaines, détruisirent quelques chariots dans la partie basse de la ville, et, sans doute plus grave encore, brisèrent l’une des poutres de l’un des monte-charges permettant de rejoindre la capitale depuis Motte-la-vallée. On ne dut déplorer que quelques incendies mineurs, et les ouvriers sylvandins s’affairèrent à réparer le monte-charges, prioritaire pour permettre le transfert des blessés. Ces derniers s’accumulèrent dans l’auberge de Motte-la-vallée, le plus grand bâtiment de ce petit village, et, après plusieurs heures, le monte-charges fut réparé. On transporta alors les blessés. Les autres purent assister à une scène apocalyptique, d’épais nuages noirs s’étalant à l’horizon. Au loin, on voyait le volcan réagir, crachant des jets de lave qui s’envolèrent sur des centaines de mètres. Ce fut l’une des plus belles éruptions du volcan, la lave se déversant sur la vallée environnante, provoquant plusieurs incendies de forêts. Dans les airs, les dragons dorés tournoyaient, et crachaient leur souffle pour essayer de dévier l’écoulement de la lave, de la conduire vers des canyons où elle pourrait être stoppée. Tous rugissaient de concert, provoquant un barouf assourdissant, alors qu’ils célébraient la chute du fort maudit. Kor-Tarath, enfin, était détruite !



Quand Kynarth ouvrit les yeux, les cendres volcaniques étaient passées, et l’homme se sentait... Fatigué. Son abdomen lui faisait encore mal, mais il constata rapidement qu’il se trouvait dans l’enceinte du Château royal, dans l’infirmerie. Il observa le plafond brièvement, avant de lentement grogner, en tentant de se relever. Son dos gémit, émettant quelques craquements, mais qui lui firent surtout du bien. Le Commandeur se rappelait ce qui s’était passé. Kor-Tarath, cette sorcière à la chevelure grise, le glyphe... Tout était encore assez flou, mais, s’il était là, et non mort, c’était probablement qu’ils avaient réussi... L’enfer ne pouvait pas ressembler à une infirmerie, non ? Alors qu’il regardait autour de lui, il aperçut une silhouette qu’il reconnaissait bien. Adossée contre le mur, bras croisés, Cirillia était là, avec plusieurs pansements et bandages le long du corps.

Elle avait été grièvement brûlée, mais son corps disposait d’une régénération cellulaire accélérée depuis qu’elle avait mangé l’âme d’un dragon. Les élixirs des Sylvandins avaient été, sur ce point, plutôt efficaces.

« C’est... C’est bien terminé, alors ? »

Ciri’ hocha lentement la tête, en se rapprochant, lui expliquant brièvement que Kor-Tarath avait péri dans une éruption volcanique. Beaucoup des sorciers et des sorcières qui étaient là avaient réussi à s’enfuir, et leur chef était vraisemblablement morte, vu qu’elle avait été écrasée par le Roi, et ensevelie dans la lave.

« Quant à vous, je dois dire que votre comportement était très immature.
 -  Pa... Pardon ?
 -  Votre réaction n’était pas celle d’un guerrier. Quand cette femme avait le regard rivé sur moi, plutôt que de vous interposer, vous auriez du vous emparer de mon épée, qui était proche, et l’occire. Prendre le coup à ma place... C’était totalement ridicule.
 -  Ah... Je... »

Kynarth ne savait pas quoi dire. Quand il avait vu cette femme avec son cristal, il avait bondi sur la trajectoire sans se poser de questions, afin d’épargner Ciri’. Cependant, elle avait raison. Sa réaction n’avait pas été celle d’un soldat accompli et entraîné, d’un soldat apte à saisir la moindre faille chez son adversaire pour l’exploiter, elle avait été celle d’un... Le mot remuait dans son esprit, et Ciri’, toujours amusée de voir que les femmes suffisaient à faire perdre les repères de Kynarth, esquissa un léger sourire :

« Néanmoins, c’était plutôt chevaleresque. »

Elle attendit qu’il relève la tête pour l’embrasser, furtivement, et sortit ensuite, Kynarth ne se privant pas pour observer ses fesses, avant de soupirer.



« Nous n’avons aucun suspect, aucun prisonnier... Soit ils sont morts lors de l’éruption, soit ils ont réussi à s’échapper.
 -  Bordel de pute, tout ça n’a aucun sens ! »

Le Roi de Sylvandell s’entretenait avec son calme habituel devant Loden, l’Omniprêtre, et d’autres Commandeurs, dans la salle de banquet, puisqu’elle faisait aussi office de salle de réunion et de salle de trône. Loden lui expliquait qu’ils n’avaient réussi à capturer personne.

« La seule piste que nous avons est cet œil qui a été dressé dans le village...
 -  Le Roi Cramoisi ? Mais c’est impossible, il est mort ! Ce ne peut être que l’œuvre de quelques fanatiques qui...
 -  De simples fanatiques n’auraient jamais pu réveiller ce glyphe, ni prendre possession de Kor-Tarath, nuança l’Omniprêtre. Et d’où vous vient cette idée que l’Aballah serait mort ? Parce qu’on ne l’a plus jamais vu sortir des Malterres ? Tout ce qui en sort, ce sont des rumeurs sinistres.
 -  Le despote a été chassé il y a des siècles ! Il est retourné dans sa tour la queue entre les jambes, et est mort ! Les Malterres sont un lieu de rumeurs, car, avec la mort de l’Aballah, et la défection des Ashnardiens, des créatures terrifiantes la hantent. Ce n’est pas plus compliqué que ça ! »

Devant l’assertion de Tywill, l’Omniprêtre ne dit rien. Il n’avait pas besoin de le dire pour le contredire. Il n’y avait pas d’autres explications possibles.
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le dimanche 16 mars 2014, 18:05:37
« Le despote a été chassé il y a des siècles ! Il est retourné dans sa tour la queue entre les jambes, et est mort ! Les Malterres sont un lieu de rumeurs, car, avec la mort de l’Aballah, et la défection des Ashnardiens, des créatures terrifiantes la hantent. Ce n’est pas plus compliqué que ça !
-  Si les créatures qui habitent les Malterres y restent, c’est bien parce qu’il y a une raison, non? Qu’est-ce qui nous assure que le Rouge  ne possède pas un pouvoir sur sa mortalité? »

Plus qu’une question, Serenos soulevait la possibilité qu’une autre créature immortelle sillonnait actuellement le monde et cherchait a le plonger dans un chaos qu’il n’avait pas vu depuis des siècles. Le Roi de Meisa se tenait debout, adossé à une poutre. Son bras gauche, brisé par l’effort qu’il lui avait imposé pour tirer Cirillia malgré sa faiblesse, était enfermé dans une attelle et ses yeux, suite à une irritation provoquée par la cendre, étaient maintenant recouverts par un pansement qui lui voilait la vue. Le Roi comprenait l’entêtement de son homologue; si un Grand Mal restait inerte pendant des siècles, il était tout à fait normal d’en déduire que c’était parce qu’il avait été vaincu, mais la réalité était autrement plus désagréable quand il constatait sa propre situation; Immortel, il ne craignait ni le temps, ni la mort, et la patience était devenue une de ses principales caractéristiques, et il pouvait en déduire que le cas était le même pour le Roi Cramoisi. Les cultistes de cet être ne se donneraient pas autant de mal s’il n’y avait pas une preuve de son retour, ne serait-ce qu’une toute petite, et aussi fine soit cette preuve,  ils y croyaient suffisamment pour quitter leur cachette et reprendre le combat.

Il n’attendait aucune explication venant de ces gens, par exemple qui était l’Aballah, qu’est-ce qui s’est passé dans les Malterres, et cetera. Il avait déjà tiré ses propres conclusions de cette situation

« Je crois, Roi Tywill, que ce l’est, malheureusement. J’ai déployé quelques-unes de mes unités de reconnaissance en Ashnard dans une investigation des Malterres. Selon les rapports, outre les créatures habituelles, il y avait de nombreux déplacements d’hommes en cagoule correspondant aux acolytes de la Sorcière. J’ai des raisons de croire qu’il s’agit de patrouilles. Un fort, sans nom, identifié par mes hommes comme étant plutôt ancien, reprenait des activités, comme la réparation des murs, l’installation d’armes de défense en cas de siège et autres mesures pré-militaires.. Le mage meisaen Gérard m’informe également que bien que cet endroit ne soit pas encore complètement opérationnel, des kidnappings dans les environs des Malterres jusqu’au cœur du Royaume Impérial d’Eitheran se produisent régulièrement. Je suspecte le commandant ennemi d’agir un peu sur tous les fronts pour nous forcer à rester dans nos frontières, à combattre les menaces qu’il provoque pendant qu’il accumule des forces. »

Le Roi se donna un petit élan pour récupérer son équilibre sans le support de la poutre et dévisagea le Roi de Sylvandell un long moment. Il ne lui faisait pas davantage confiance, parce que cet homme s’obstinait à refuser la possibilité du retour d’une menace ancestrale malgré le fait qu’une bande de fanatiques suivant ses ordres venaient de se servir de la forteresse de Kor-Tarath pour exécuter Althenos seul sait quel étape d’un objectif qui n’était pour plaire à personne.

« Je ne vous demanderai pas d’agir sans preuve, et je demanderai à ce qu’on vous fournisse de nouvelles informations si la situation se présente. Mais si le Roi Cramoisi est bien vivant, il a eu des siècles pour préparer son coup, et je ne pense pas qu’il se soit autorisé une grande marge d’erreurs. Kor-Tarath, aussi impressionnant que soit ce que j’ai vu, ne doit représenter pour lui qu’un dommage collatéral devant son projet final. Sur ce, je prends congé. »

Et il s’inclina poliment devant le Roi de Sylvandell, et il s’approcha de l’Omniprêtre et déposa devant lui le message que Wallin le mercenaire avait écrit, avant de le saluer respectueusement et de tourner les talons en se dirigeant vers la porte. Il n’avait pas besoin de savoir ce que le message signifiait. Et s’il s’agissait d’une information importante, il croyait le prêtre assez intelligent pour lui faire parvenir une explication plutôt que de le tenir dans les suppositions. Il ouvrit la porte et se dirigea alors vers l’infirmerie, où reposait encore ses compagnons. Les couloirs du château de Sylvandell le mettaient rudement mal à l’aise, probablement parce qu’il était habitué aux couloirs riches de lumière naturelle de Meisa. En toute honnêteté, il avait même l’impression de marcher dans un donjon secret. Alors qu’il gagnait enfin l’infirmerie, il croisa la belle Cirillia, qui devait tout juste en sortir. Elle semblait être bien amochée, mais les guérisseurs Sylvandin avaient fait du bon travail; bientôt, il n’y paraîtra que quelques cicatrices qu’elle pourra vanter à sa guise.

En premier temps, il pensa à l’aborder et à lui demander des nouvelles de son état, mais il finit par simplement s’abstenir et incliner la tête devant la jeune demoiselle. Pourquoi? Simplement parce qu’il savait qu’il était moins difficile de se séparer d’une personne que l’on respectait si on ne s’attachait pas à eux, et se préoccuper de son état était une preuve d’attachement aux yeux du Roi. Il lui adressa un bref sourire, et lui souhaita la bonne journée avant d’entrer dans l’infirmerie. Il fit rapidement un tour des blessés et remarqua que la plupart se rétabliraient sans trop de mal. Néanmoins, il fit signe à tous les Meisaens de se lever et de se préparer à partir. Ses hommes, obéissants, se redressèrent, certains avec des béquilles, d’autre dans des attelles, comme lui. Il s’immobilisa alors devant Kynarth et tourna les yeux vers lui. Il laissa un long moment le silence planer entre eux, puis il se remit à marcher, détournant les yeux. Il aurait pu le mettre en garde face aux risques d’une relation entre deux soldats, que se montrer tendre ou intéressé envers Cirillia pourrait les mettre en danger, mais il pensait que cet homme savait déjà les conséquences de sa propre faiblesse sur sa vie sentimentale. Le Roi avait payé très cher pour comprendre que ses ennemis n’hésiteront pas à exploiter n’importe quel faille dans ses défenses pour le mettre hors d’état de nuire. Kynarth était Commandeur. Un jeune Commandeur, certes, mais Commandeur tout de même, donc une personne jugée apte à poser problème aux ennemis de son Roi. Par sa simple position, tous ceux qui l’entouraient devenaient des cibles potentielles pour l’atteindre et, à travers lui, atteindre son Roi.

Une fois dans les couloirs, un des sorciers attira l’attention du Roi en posant une main sur son épaule.

« Que faisons-nous pour Shizuka Shunya, Majesté? demanda Alexei.
-  Si elle désire me suivre, elle le fera d’elle-même. Mais elle a vécu beaucoup de choses ces derniers jours, je doute qu’elle n’ait envie de se relancer dedans. Faites simplement préparer un voyage sûr pour elle jusqu’à Edoras; son pays doit lui manquer, après tout ce temps. Et envoyez autre message vers Nexus.
-  Adressé à qui, mon Roi?
-  Jamiël.
-  La servante de la défunte Reine de Nexus?
-  Oui. Il est plus que temps pour moi de rencontrer Elena. »

Secrètement, le Roi appréhendait cette rencontre et faisait presque tout pour être occupé ou loin de son trône au moment où Jamiel lui demandait de se déplacer rencontrer Elena. La douleur de la mort de Nöly n’était plus aussi forte qu’à l’époque, mais il avait peur. Il avait profondément peur de voir en Elena une raison d’ouvrir à nouveau ses plaies. Mais rien ne pouvait justifier une telle lâcheté de sa part, et il savait que tôt ou tard, il devrait affronter cette peur. Elena était innocente dans la mort de sa mère, il n’y avait aucune raison pour lui de continuer de l’éviter, et la situation actuelle réclamait qu’il encourage les pays alliés à plus de prudence face à une menace imminente. Le Roi ne s’attendait pas à grand-chose de cette rencontre, mais simplement voir le visage de la princesse serait un pas dans la bonne direction.

« Nous partons ce soir même. »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le lundi 17 mars 2014, 01:41:20
« Il continue à me parler comme si j’étais son subordonné... Connards de magiciens, grommela Tywill, secouant la tête, avant de dévisager l’Omniprêtre. Qui est ce Wallin ? »

L’Omniprêtre ne dit rien, semblant perdu dans ses pensées. Wallin... C’était, en réalité, un nom qui semblait surgir d’outre-tombe. Le message de Wallin, ces mystérieuses lettres qu’il avait tracé avant de mourir... Ce n’était rien de plus que son nom. « OMNIPRÊTRE ». Il avait vainement essayé de les tracer, mais, dans sa douleur, n’avait pu tracer que quelques syllabes incohérentes. Wallin... Était-il possible que ce soit donc ça ?

« Wallin est un guerrier, plutôt âgé, que j’ai eu de la chance il y a croiser quelques années, alors qu’il était venu à Sylvandell, afin de se renseigner sur le passé de ce dernier... Il pensait que Sylvandell était lié à un ancien royaume, Gilead. »

Tywill connaissait Gilead. C’était le royaume maudit, hanté par un immense dragon noir depuis un peu plus d’un millénaire. Un royaume minier, qui, jadis, avait été l’un des plus puissants États de ce monde, en raison de ses riches mines. Ce mystérieux dragon noir, probablement l’une des plus récentes manifestations des anciens Dragons primordiaux, s’était niché dans les profondeurs de la principale mine, et, peu à peu, le royaume avait périclité, jusqu’à ce que, il y a des années, une peste noire ne vienne le ravager en profondeur, massacrant les ultimes habitants. Une triste histoire, et, continuellement, des aventuriers chevronnés remontaient le long fleuve menant à Gilead, dans l’espoir de trouver ses fortunes dans les mines, et dans le trésor du royaume. Malheureusement, quand la peste avait achevé Gilead, le royaume était ruiné, et il n’y avait rien dans le trésor royal. Il aurait fallu rejoindre les anciennes mines, mais elles avaient été scellées par d’antiques runes, et, sans le mot de passe et les bonnes runes, les ouvrir était impossible. De plus, le Dragon Primordial devait toujours sommeiller à l’intérieur, et il valait mieux ne pas hâter son réveil. Personne n’avait réussi à entrer dans les mines, et, de manière générale, peu d’aventuriers étaient retournés de Gilead. On disait que l’endroit était hanté par des monstres terribles, ainsi que par une présence sinistre et malveillante... Le royaume tout entier étant un tombeau, on pouvait le comprendre.

« Comment ça ? s’étonnait Tywill.
 -  Erwan Korvander, votre ancêtre, était originaire de Gilead. Et Sylvandell a beaucoup grandi grâce aux nombreux réfugiés qui sont partis de Gilead pour rejoindre Sylvandell, en quête d’un nouvel avenir. Sa théorie m’intriguait. Il pensait que les deux royaumes étaient liés par une sorte d’ancien serment... Et il pensait notamment que le Dragon Primordial qui a ravagé Gilead était celui ensommeillé sous Kor-Tarath...
 -  Mais alors, dans ce cas... »

L’Omniprêtre n’acheva pas. Dans ce cas, ce que cette sorcière avait fait là-dedans... Envisageait-elle de réveiller le Dragon Primordial ?

« On dit que le souffle des Primordiaux faisait fondre l’océan... Toute cette machination avait-elle pour but de réveiller cette bête ?
 -  Je ne le pense pas. Le Roi Cramoisi lui-même ne pourrait pas contrôler un Primordial, surtout s’il est noir. Il n’en fera qu’à sa tête.
 -  Alors, à quoi rime ce délire ? Pourquoi essayer de réveiller un dragon qui n’est plus là ?! »

L’Omniprêtre ne dit rien.

« Peut-être cherche-t-il simplement à le réveiller pour engendrer le plus de chaos possible... »

Lui-même ne croyait pas à cette théorie. Indéniablement, il leur manquait plusieurs pièces du puzzle.

« Quoiqu’il en soit, je ne cautionnerais pas un raid contre les Malterres. Notre armée n’y aurait pas la moindre chance, si l’Araignée est toujours en vie. »

C’était une analyse avec laquelle l’Omniprêtre ne pouvait qu’être d’accord. Pour contrer une telle menace, il leur faudrait des alliés.



Dans un autre coin du Château, alors que Serenos était résolu à partir le plus vite possible, une femme se décida à aller le voir. Une femme pour laquelle il avait été de Meisa à Sylvandell.

C’était Shizuka.

Elle n’était plus nue, et portait des vêtements amples, et semblait remise, même si on pouvait encore lire une certaine fatigue sur ses traits. Si elle avait été en stase tout ce temps, elle n’en était pas moins épuisée, et ses souvenirs étaient très flous. Elle se rappelait juste vaguement d’un volcan, d’un fort, d’une espèce de furie qui lui hurlait de se dépêcher. Elle revenait peu à peu à elle, dans un monde nouveau, et tenait quand même à remercier Serenos.

« Roi de Meisa... » l’appela-t-elle, d’une petite voix.

Elle s’éclaircit lentement la gorge, craignant de le déranger dans ses préparatifs.

« Je... Je tenais à... À vous remercier pour... Ce que vous avez fait pour moi. C’était... Et bien, c’était vraiment très valeureux de votre part. »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Serenos I Aeslingr le lundi 17 mars 2014, 21:13:54
« Je... Je tenais à... À vous remercier pour... Ce que vous avez fait pour moi. C’était... Et bien, c’était vraiment très valeureux de votre part. »

Le Roi leva doucement la main pour lui signaler qu’il n’était pas nécessaire de le remercier, avant de s’approcher d’elle et de s’incliner galamment devant elle. Il se releva au bout d’une brève seconde et planta son regard aveugle dans sa direction.

« Shizuka, vos mots ne sont pas nécessaire. Je vous ai promis que je viendrais vous chercher, lui rappela-t-il d’un ton posé et amical. Le Roi de Meisa tient toujours parole. Mais votre gratitude me va droit au cœur, je vous assure. »

C’était la vérité. Beaucoup de gens ne prenaient même pas la peine d’être reconnaissants, surtout lorsque leur sauveteur était un magicien, car le commun du peuple s’imaginait que les magiciens se devaient de mettre leurs grands pouvoirs au service de la communauté. La sincère considération de la jeune femme réchauffait le cœur du vieux monarque. Il leva alors une main devant lui et, prudemment pour ne pas lui crever un œil, il posa une main contre la joue de la jeune guérisseuse. Il s’approcha alors d’elle et posa son front contre le sien. À voix basse, il murmura une prière de voyage pour la jeune femme en lui souhaitant un retour parmi les siens des plus paisibles et agréables. Après cette brève prière, il recula et lui adressa un sourire réconfortant.

« Je me doute que nos chemins se séparent aujourd’hui, mon amie. J’ai fait préparer pour vous un bateau, à Theron, pour vous emmener à Maëthil. De là, un ami pourra vous escorter jusqu’à Edoras. Encore trois jours et vous serez chez vous. D’ailleurs, pourriez-vous faire passer ce message à votre dirigeante? »

Il ouvrit sa besace et fouilla à l’intérieur pendant quelques secondes, ne prenant pas vraiment la peine de chercher avec ses yeux puisque ceux-ci ne lui servaient plus à rien pour quelques jours encore. Ses sens magiques l’aidaient à se repérer malgré l’absence de lumière. Il trouva enfin l’objet de ses recherches et le tendit à la jeune femme. Il s’agissait d’une lettre adressée à la présente dirigeante d’Edoras. Le Roi avait rédigé des lettres pour la plupart des dirigeants des royaumes qui font ou qui ont fait partie du dernier Sommet des Rois, il y a vingt ans. Évidemment, il n’y en avait pas une qui était la copie d’une autre; dans celle-ci, le Roi saluait la jeune Reine et lui faisait part des informations recueillies sur la condition particulière de Shizuka. Il déclarait que Meisa payerait les coûts pour la recherche d’un autre Innocent et les études de la jeune femme dans la mesure où celle-ci accepte cet entrainement. Les innocents, bien que rares, étaient normalement de très grands guérisseurs, ce qui était déjà une bonne étape où commencer, ou alors des ermites réputés pour leurs secrets curatifs. Il spécifia également que trouver un véritable serviteur des Dieux pouvait être une option pour l’entrainement magique de la magie sacrée. Il garda néanmoins secret les troubles qui se sont produits à Kar-Tarath, préférant ne pas laisser sous-entendre que la jeune femme avait été impliquée, même contre son gré, dans l’usage d’une magie noire hautement dangereuse.

S’assurant que la jeune femme prenne la lettre, le Roi lui prit les mains avec une douceur nouvelle et les serra doucement entre les siennes. Lui demander de se rendre en Meisa, une contrée où son talent pourrait s’épanouir sans les limites que la société imposait aux talentueux magiciens, était certainement impossible, même si l’idée ne manquerait pas d’intérêt. Il savait qu’elle n’accepterait pas de telles conditions; elle était d’Edoras, sa maison était là, ses amis, ses mentors. Même pour son propre talent, il était probablement hors de question pour elle de s’attarder plus longtemps sur le territoire Terran.

« Nous nous reverrons bientôt, je vous l’assure. Vous êtes une femme exceptionnelle, une rareté, Shizuka. Avec un tel don, vous serez capable de faire de grandes choses dans l’avenir. Et je tiens à être là lorsque vous le ferez. D’ici là, prenez bien soin de vous, mon amie, et n’oubliez jamais ce que vous avez vécu; l’expérience est mère de l’apprentissage. »

Le Roi s’inclina poliment devant la jeune femme puis il se remit à marcher dans les couloirs.


***

Entretemps, Alexei avait déjà quitté leur compagnie pour sortir du château. Le magicien était le plus habile lorsqu’il s’agissait des communications magiques, aussi n’eut-il aucun problème à étendre son esprit jusqu’à la capitale de Nexus. Il savait que Jamiel ne le laisserait pas pénétrer son esprit pour établir une communication à deux sens, aussi se contenta-t-il de simplement transformer l’air entourant ses oreilles d’un son nouveau. Il l’informa de l’arrivée imminente du Roi de Meisa dans une visite de courtoisie et également à but diplomatique. Il ne prit pas la peine d’entrer dans les détails, se contentant de lui faire comprendre qu’un problème grave était survenu et qu’il devait être apporté à l’attention de la Reine de Nexus. Le magicien retira finalement son esprit de Nexus et regagna son enveloppe charnelle. Pour lui, à peine une minute s’était écoulé, mais lorsqu’il ouvrit à nouveaux les yeux, son corps se trouvait maintenant dans une charrette. Les troupes Meisaennes quittaient maintenant le territoire Ashnardien pour marcher sur le territoire. L’armée de près de quatre cent cinquante hommes étaient déjà à la frontière Nexusienne. Le diplômé de l’Académie de Magie se prit la tête dans les mains, combattant la migraine qui lui saisissait maintenant le crâne. La douleur était intense, mais supportable. C’était les conséquences d’un sort jeté à aussi grande distance. Le magicien s’extirpa tant bien que mal de sa couche et se plaça aux côtés du chauffeur de la charrette. Il lui fit signe d’avancer à l’avant, où se trouvait le Roi, monté son destrier.

Le monarque semblait préoccupé par des pensées sombres, mais lorsque le magicien arriva à son côté, le Roi tourna la tête vers lui et releva légèrement son bandeau, dévoilant ses yeux rougis par l’irritation, dont les contours avaient été carbonisés par la chaleur intense. Visiblement, Cirillia avait encaissé la plupart de la chaleur, alors que lui s’en était tiré avec une brûlure aux yeux. Le Roi rebaissa le pansement.

« Tu es parti longtemps, mon garçon, signala le Roi avec une voix qui se voulait douce.
-  Pardonnez-moi, votre Majesté. Mais soyez assuré; Dame Jamiel est au courant de votre venue. Mon message a du la réveiller, néanmoins…
-  Ne t’inquiète pas. Je n’ai pas l’habitude de la déranger si je ne jugeais pas nécessaire. Repose-toi, mon ami. Nous avons encore une bonne route à faire, et tu pourras profiter d’un peu de sommeil.
-  Oui, sire.

Alexei frappa sa poitrine au niveau de son cœur avant de regagner l’intérieur de sa charrette. Le Roi poussa un soupir d’épuisement, mais aussi, un sourire se dessina sur son visage, alors qu’au loin, il voyait les Grands Murs,  l’énorme muraille coupées par plusieurs forts qui formaient les avant-postes de Nexus. Cet endroit était présentement occupé par l’armée de Nexus, mais au cours des années, la muraille avait été occupée successivement par le Royaume le plus fort d’une période, pour être reprise au cours de la période suivant par un essor militaire de son rival. Après tout, Ashnard et Nexus étaient incessamment en guerre pour conserver l’équilibre entre leurs forces et ne pas laisser l’ennemi prendre le dessus, en espérant pouvoir, à un moment ou à un autre, prendre le dessus définitivement et mettre fin au règne de l’autre. Le Roi devait admettre que le titre de Roi d’un continent au complet pouvait avoir un certain attrait. La seule porte d’accès se prenait par la porte centrale, accessible par la route principale. Autrement, il fallait passer par les forêts environnantes, mais si cela ne représentait aucun problème pour les troupes à pieds, les chariots et les bêtes auraient du mal à traverser, si cela était tout simplement possible.

Une fois arrivée devant la porte, celle-ci se révéla être fermée. Au-dessus de celle-ci, plusieurs archers et ingénieurs de la défense se mirent en position. Le Roi s’attendait tout de même à ce genre de résistance, il leva donc un bras pour faire arrêter la progression de ses hommes, qui s’immobilisèrent. Le Roi descendit de selle et s’approcha à pied de la porte fortifiée. Au même moment, le commandant Nexien sortit d’une porte de la muraille, portant un drapeau blanc de trève. Les deux hommes se rejoignirent à mi-chemin. Le Roi se tint droit et attendit que l’homme prenne la parole.

« La porte est fermée, étranger. Vos hommes et vous devrez retourner d’où vous venez.
-  Je suis le Roi Serenos de Meisa. En respect des accords de passage signé par moi-même et leur Majestés Liam Ivory le Lion et Nöly Ivory, mes hommes et moi avons l’autorisation d'entrer en territoire Nexien.
-  Pardonnez-moi, Majesté, mais j’ai eu des consignes et…
-  Commandant, je n’ai pas de temps à perdre. Dame Jamiel et la Reine Elena attendent ma venue.
-  Eh bien, si la Reine le désire…
-  Ouvrez cette porte et cet incident sera oublié. Mais faites vite. J’aimerais atteindre la capitale avant le lever du soleil, au possible.
-  Oui, majesté. »

L’homme leva le bras et aussitôt, six soldats brisèrent leurs formations pour s’engager sur les mécanismes d’ouverture de la porte. Un puissant son de grincement se fit entendre alors que la porte se laissait lentement ouvrir. Le Roi fit signe à son cheval de le rejoindre. Une fois en selle, il se tourna vers ses troupes et leur cria de se remettre en marche. Les hommes et Serenos passèrent sous la grande porte.

« Nexus… me revoilà… »
Titre: Re : Le Fléau [Partie 2] [PV]
Posté par: Cirillia le mercredi 19 mars 2014, 01:39:35
L’offre de Serenos était généreuse pour Shizuka, mais cette dernière était épuisée, etpréférait rester encore quelques jours à Sylvandell, le temps de se remettre. Les Sylvandins n’avaient vu aucun problème à l’héberger, et à veiller à ce qu’elle soit parfaitement remise. Shizuka revenait de loin, et, pour elle, une simple petite guérisseuse, une telle aventure était bien au-delà de ce qu’elle pouvait supporter. Pendant plusieurs jours, les Sylvandins essayèrent de l’interroger pour obtenir des informations, mais Shizuka avait passé la plupart de son temps dans un coma magique, et, de toute manière, semblait avoir tout simplement gommé de son esprit ce qui lui était arrivé. Impossible de retrouver des traces de la Dame Grise, et de ses commanditaires. Un autre État ? Une autre puissance ? Le mystère restait entier, et les Sylvandins n’avaient aucune trace, aucune piste. Kor-Tarath avait rugi, détruisant totalement le château et les grottes environnantes. Il ne restait plus aucune piste.

Sylvandell avait tenu à s’assurer de rapatrier Shizuka en personne vers Edoras. C’était un choix tactique : ainsi, Sylvandell renforcerait ses liens avec Edoras, ces derniers étant déjà plutôt bons, depuis la dernière visite diplomatique de la Princesse à Edoras. Shizuka, quant à elle, en profitait pour se renseigner sur Sylvandell, son histoire, notamment auprès d’Alice, qui était fort heureuse de croiser une érudite, ce qui leur permettait de discuter pendant de longues heures. Entre-temps, le village ravagé par les forces de la Dame Grise fut complètement détruit par le volcan, la lave se répandant sur la plaine. Cependant, les clans tribaux ne s’en offusquèrent pas. Ainsi, ils purent reconstruire une nouvelle ville, sans avoir l’impression d’être dans un mausolée. Pour eux, Kor-Tarath avait grondé, et la volonté du Dragon d’Or s’était abattue, purifiant cette région sinistrée. Le fort maudit était détruit, et ceux qui avaient commis ces crimes étaient morts.

Les Meisaens partirent assez rapidement, et la vie reprit lentement son déroulement. Entre-temps, l’Omniprêtre envoya des corbeaux auprès d’énigmatiques personnes afin de se renseigner sur Gilead, tandis que Tywill Korvander, quant à lui, envoya des corbeaux auprès du Conseil Impérial, afin de les informer de ce qui s’était passé, et de la probable résurgence d’un vieil ennemi. Il aurait pu se rendre en personne à la capitale, mais il ne voulait pas rentrer dans les intrigues politiques et les complots de basse-cour. Il ordonna toutefois d’améliorer son armée, et de durcir les entraînements, comme s’il avait un quelconque mauvais pressentiment. Ce pressentiment se confirma quelques semaines plus tard, quand des éclaireurs leur apportèrent que des bandes de sauvages et de brigands se regroupaient à Mälrunn.

Shizuka finit par partir au bout d’une à deux semaines. Elle découvrit avec joie qu’Alice était aussi une grande fan des aventures d’Alexia Novae, et la Princesse de Sylvandell promit d’aller à Edoras dès que possible. Un Commandeur en personne se chargea de sa sécurité, et, conformément aux instructions de Serenos, se rendit vers Theron. Alice se sentit un peu triste après le départ de Shizuka, comme si elle venait de perdre une bonne amie. Elle la regarda traverser le pont de Sylvandell, se tenant dans la tour, et se sentit un peu triste après

Le Grand Maître de l’Ordre des Dragonniers, Loden, fit plusieurs vols de reconnaissance autour de Kor-Tarath, afin de s’assurer qu’il ne subsistait plus aucune trace des runes infernales. Il ne retrouva rien. Le monde, quant à lui, continuait à tourner.



L’homme observa lentement les dragons dorés repartir vers Sylvandell. Vu de loin, on avait l’impression qu’il portait une robe noire, une sorte de long manteau qui le recouvrait intégralement, mais, si on se rapprochait, on pourrait voir que la couleur de sa robe changeait fréquemment. Dans la main, il portait un bâton qui lui servait à s’appuyer. Pendant de longues minutes, il observa Kor-Tarath, et ce qu’il en restait. Le volcan n’avait pas énormément changé, son cratère s’était juste élargi. Sans rien dire, l’homme se retourna ensuite, marchant dans la neige, les empreintes de ses pas étant rapidement recouvertes, et il rejoignit un refuge isolé, une sorte de petite cabane, et y pénétra. La pièce sentait le moisi, une odeur agressive de renfermé, mais il n’y prêta pas attention, et s’avança vers la table du séjour, au milieu de la pièce, abritant une sorte de grosse boule de cristal.

Lentement, les bougies dans les coins s’éteignirent comme par enchantement, et l’individu posa sa main sur la boule de cristal. Une sorte de brouillard rouge émergea à l’intérieur, et, quand il retira sa main, une vive lueur rouge sanguinolente se mit à éclairer l’intérieur de la pièce.

« Le transfert a été accompli, lâcha une voix sinistre à l’intérieur de la boule.
 -  Tout à fait. Il semblerait bien que, en définitive, la Dame Grise se soit finalement révélée utile.
 -  Je vous accorde ce point. »

Une légère pause s’installa entre les deux interlocuteurs, avant que l’homme ne poursuive :

« Je pense que mon séjour à Sylvandell n’a plus de raison d’être. Nous n’avons pas pu mettre la main sur l’Edorrassienne...
 -  Un contretemps regrettable, mais qui n’altère en rien le déroulement du calendrier.
 -  Ne croyez pas que j’étais alarmiste, rétorqua l’homme en souriant légèrement.
 -  Par ailleurs, votre présence à Sylvandell n’est plus nécessaire. Avez-vous pu réveiller Mälrunn ?
 -  Naturellement. Pendant que ce prêtre était occupé à poursuivre les chimères de Kor-Tarath, il n’était pas bien difficile d’entrer dans l’ancien fort, et de briser les runes.[/color]
 -  J’ai bien fait de ne pas mésestimer vos compétences.
 -  En douteriez-vous ? Kor-Tarath a accompli sa mission : le transfert des âmes a été accompli. En revanche, je m’interroge...La visite de Serenos auprès de la Reine ne risque-t-elle pas de compromettre le calendrier ?
 -  Le Dessein de la Grande Toile est tissé, vous le savez aussi bien que moi, rétorqua la créature. Ne vous préoccupez pas de ce mage de pacotille, et laissez-moi me charger de la petite Reine de Nexus. Quant à vous, votre prochaine destination est maintenant Gilead. Vous allez vous assurer que le transfert a bien eu lieu.
 -  Auriez-vous des doutes ? »

Un léger silence plana. Dans la boule de cristal, des reflets lumineux dansaient furtivement.

« Disons qu’un fœtus se doit d’être bien nourri. »