Une petite invitation [PV Dylan]

Trois semaines, peut-être un mois... Le souvenir du temps passé avec la psychologue dans son bureau hantait le jeune professeur. C'était comme s'il revivait la scène, étape par étape, en accéléré, comme un film passé en avance rapide. L'image de son corps, si beau, si agréablement doux. Ses caresses. Ses baisers. La saveur de sa poitrine. La chaleur de son...

« Professeur ? Vous allez bien ? »

Jad se réveilla soudainement : les élèves le regardaient, depuis son bureau où il était assis. Il avait sans doute fermé les yeux quelques instants, rêvant de ce moment d'intimité avec Dylan. Il était un peu embarrassé, mais il se ressaisit en se raclant la gorge, en déclarant :

« Oui oui, tout va bien. Vous avez finis de lire cette partie ? Bien, nous allons le commenter...

Bien que le reste du cours se passa plutôt normalement, l'esprit de Jad restait dirigé vers Dylan. Ils ne s'étaient qu'entre-aperçues depuis l'entretien, au détour d'un couloir. Il lui avait fais quelques signes, avant de se diriger à la hâte dans sa salle de cours, le coeur battant la chamade. Ca ne lui ressemblait absolument pas. Il était presque obnubilé par cette femme. Il rêvait d'elle en plein cours, quand il sortait avec ses amis, chez lui. Il avait dû faire deux ou trois pulsions nocturnes durant ces dernières semaines. C'était insoutenable.

Mais le pire était qu'ils ne s'étaient pas adressés la parole depuis la dernière fois. C'était vraiment déprimant. D'ailleurs, Jad sentait une légère dépression vis-à-vis de cette situation. Il devait réagir. C'est ainsi qu'il se décida à rejoindre le bureau de la psychologue. Il toqua doucement à la porte en déglutissant doucement. Lorsqu'elle le pria d'entrer, il ouvrit doucement la porte.

Elle était vraiment radieuse : son visage, son sourire, ses cheveux. Il était sous le charme, c'était clair. Il allait sans doute avoir du mal à aligner les mots qu'il fallait, mais il devait se jeter à l'eau. Vérifiant qu'il n'y ait personne d'autre dans la salle, il referma la porte derrière lui, et prit un grand inspiration :

« Désolé de vous déranger pendant votre travail, Mademoiselle Ellison, mais je devais parler d'urgence d'un... problème d'ordre médicale, dans le cadre de vos compétences.

Qu'avait-il sortis donc comme bêtise ? C'était un début encore pire que ce qu'il avait dis durant le premier entretien. Il était idiot de se lancer là-dessus. Comment rattraper cela ?

« Voyez-vous, depuis quelques temps... trois semaines environs, j'ai régulièrement des coups de blues, un peu le moral dans les chaussettes... bref, je suis pas au mieux de ma forme. J'oserai même dire que je déprime. »

Bon, il savait que face à cette femme, il se tournait facilement en ridicule, mais tout de même, là, c'était assez gravissime. Bref, au point où il en était, il n'avait rien à perdre. Quitte à passer pour un plouc avec un mauvais humour. Il continua donc :

« Mais je ne viens pas pour un diagnostique, car je connais la nature du mal, et... je suis justement venu pour remédier à ce problème. »

Il s'approcha tranquillement du bureau de la psychologue. Ses jambes tremblaient un peu, mais il allait clairement faire ce qu'il devait faire, ce qu'il était venu faire. Il s'appuya sur le bureau, en regardant la psychologue dans les yeux. Les lunettes qu'elle portait lui donnait un air séduisant :

« Mademoiselle Ellison, j'aimerai prendre un café avec vous, demain soir. Juste vous et moi, en ville, pour discuter, se promener peut-être... Bref, sortir ensemble. »

Voilà, c'était dis : il voulait sortir avec cette femme, pouvoir la fréquenter, en somme. Même si ici, cela pouvait être pris autrement, le principale était qu'il avait finalement réussis à accorder ses pensées avec ses mots. Il ne restait plus qu'à la psychologue à décider s'ils allaient se retrouver.

Ça allait faire deux, non... Trois semaines qu'elle n'avait pas revu Jad. Plus précisément, depuis leur petite aventure dans son bureau... Dès qu'elle passait la porte de ce fameux bureau, tout lui revenait comme par magie, pouvant encore sentir les empreintes de ses caresses sur son corps, la manière qu'il embrassait ses lèvres, sa poitrine, son intimité... De jour en jour, c'était de plus en plus frustrant, beaucoup plus lorsqu'ils se croisaient dans un couloir, sans que le professeur de Métaphysique ne prenne le temps de venir lui parler, ou la laisser s'approcher de lui. Elle le troublait à ce point ? Pourtant, elle avait connu un Jad plus entreprenant, lors de leur rapport. Mais il fallait croire que ce dernier s'était volatilisé.

Elle commençait à croire que c'était de sa faute, cet éloignement. Après tout, c'est elle qui est allé vers lui, qui la, en quelque sorte, poussé. Peut-être qu'il regrettait...

Ça la rendait dingue de ne pas savoir et songeait à un moyen de le coincé d'une manière ou d'une autre et qu'il s'explique. Mais quelque chose la bloquait, n'ayant pas envie de le faire fuir d'avantage, si jamais c'était réellement de sa faute. De toute manière, ça doit être le cas. Dylan commençait à y croire.

Mais c'est alors qu'on toqua à la porte.

« Entrez. »

Elle prit une profonde inspiration, pour évacuer le stress qu’avaient emmené ces pensées, mais elle figea en voyant qui venait de pénétrer dans son bureau. Jad. Ses mires bleus étaient encore plus magnifique que dans ses souvenirs et elle avait peine à s'en détacher.

« Bonjour ! Oh… Quelque chose ne va pas ? »

Comme quoi... Songea Dylan, qui écoutait attentivement son amant d'une séance, mais dont les dires faisait fondre ses espérances. Il tournait autour du pot, mais comme à son habitude, elle ne le pressa pas, se démontrant calme et posé, même si de l’intérieur, elle angoissait. Elle avait peur de ce qui s’en venait. Il venait lui avouer qu’ils avaient eut tord… Enfin, qu’ELLE avait eut tord d’avoir forcé les choses. Mais quand il termina enfin, c'est le déclic : il était là pour l'invité à sortir ! Dylan dut user de toutes ses forces pour ne pas sourire jusqu'aux oreilles, se régalant de cette invitation, pour le moins surprenante. Mais au fond d'elle, la psy n'en aurait espérer pas moins...

Elle soupira, de soulagement en essuyant les infimes sueurs froides de son front.

« Ah, enfin... Je commençais à désespérer. »

Son sourire s'allongea, en s’accoudant sur son bureau. Elle le savait timide, sûrement plus auprès d'elle, mais Dylan restait elle-même, se contenant assez, sans voiler son contentement.

« On se retrouve où alors ? »

Jad était légèrement anxieux, se demanda si la psychiatre voulait seulement le revoir hors du cadre professionnel. Il était vraiment nerveux, cela devait se sentir, même s'il essayait de ne pas le paraître. Terre à terre, il ne pouvait s'empêcher de vouloir raisonner selon la logique commune, alors donner des raisons à cette demande semblait essentiel. Mais c'était vraiment bête, comme raisons.

Après un temps de flottement, Dylan réarrangea ses cheveux en souriant :

« Ah, enfin... Je commençais à désespérer. On se retrouve où alors ? »

Elle avait ce sourire. Ce magnifique sourire de bonheur, lisible uniquement sur les visages sincères. Jad en rougissait, ignorant même ce qu'elle venait de lui dire dans un premier temps. Puis, quand finalement il prit conscience de ce qu'elle venait de dire, il ouvrit des yeux ronds, surpris mais loin d'être interloqué.

« Vo... vous acceptez ? Vraiment, je... »

Jad ne savait plus où se mettre. Il se mit à sourire, naturellement, heureux d'entendre cela. C'était vraiment un soulagement pour lui de savoir qu'elle avait finalement accepté. Il se redressa et hésita quelques instants. C'est après tout la première fois qu'il était aussi direct sur ses intentions, il ne savait donc pas vraiment quoi faire à présent. Il prit son courage à deux mains et tenta finalement :

« Et bien... Que diriez-vous de vendredi soir, après le travail ? Au centre commercial ? Il y a un café, "La théière". Nous pourrions nous retrouver là-bas, si vous le désirez. Disons... Sept heure ? »

Jad écouta sa réponse et ses propositions : il était déjà ravis de pouvoir sortir avec elle, il aurait accepter à peu près toute sortie. Lorsqu'elle eut fini, il acquiesça doucement, aux anges, et se dirigea vers la porte en reculant.

« Bon... Je vous dis à vendredi, alors. Au revoir, mademoiselle Ellison. »

Il passa la porte en la regardant une dernière fois. Une fois la porte close il se retourna et s'appuya contre le mur en soupirant. La nervosité du moment était passé. Il allait devoir se préparer à être tout aussi nerveux vendredi... voir plus, sans doute.

*****

Il avait attendu toute la semaine, impatient comme un garçon la veille de son anniversaire. Vendredi soir, enfin. Il était vite rentré se changer : a la place de sa tenue de travail, il avait mis quelque chose de plus décontracté : une chemise à manche courte blanche, un jean légèrement délavé et des sandales ouvertes. Le jean le faisait se sentir à l'étroit, mais il préférait avoir quelque chose de ferme sur le corps, éviter les kimono qu'il utilisait normalement en dehors du travail. Il s'était même mis un peu de parfum pour homme, et avait arrangé sa chevelure pour qu'elle soit impeccable.

Sur le lieu du rendez-vous, il était assis, tripotant son collier en jade. Il était arrivé quelques minutes en avance... une demi-heure, même. Il était nerveux, c'était clair, mais il avait hâte de revoir Dylan. C'était son désir le plus cher, à ce moment-là. Il ferma les yeux quelques instants, repensant à ce sourire qu'elle avait eu lorsqu'il l'invita à sortir ensemble. Ce sourire doux, chaleureux, agréable. Jamais il n'aurait pensé voir plus beau sourire, et plus belle femme pour le porter. Il ouvrit à nouveau les yeux, le serveur lui apportant son café, avec un nuage de lait et deux sucres. Il continua de jouer avec son pendentif, jusqu'à apercevoir le fruit de ses espoirs.

La psychologue avait acceptée l'invitation sans aucune hésitation, simplement parce qu'elle avait envie tout autant de le fréquenter en dehors du cadre de travail. Ce qui devait être qu'une petite aventure d'une séance s'est avéré être plus, où l’intérêt mutuel n'était pas que physique. Du moins, pour Dylan qui désirait en savoir plus sur lui. L'adorable professeur avait sut piquer sa curiosité... Et un certain appétit. Les images de leurs ébats lui filaient en tête comme un film.

Donc, il suggérait le centre-commerciale, la Théière, un nom qui lui disait quelque chose. Elle devait avoir déjà passé par là, une fois. Elle acquiesça, retenant l'heure de leur rendez-vous, déjà impatiente d'y être.

« Vendredi ? C’est parfait.»

Elle lui fit part d'un dernier sourire, jusqu'à qu'il referme la porte derrière lui. 

« À vendredi Jad ! »

***

Vendredi est enfin arrivé ! Dylan était légèrement nerveuse, mais impatiente. Elle avait prit le temps de se préparer, un long bain aux huiles essentiels, ainsi elle avait la peau douce et légèrement parfumé d’orchidée. Et comme toilette, c’était assez simple, rien de différent de ce qu’elle portait en générale : une robe chemisier blanc et ses converses. Une fois dans le centre commercial, elle constata qu’elle était en avance. Malgré tout, elle se dirigea vers la Théière, ayant assez hâte de revoir Jad.

Elle le vit, assis à une table, les yeux rivés vers les siens. Un sourire arqua ses lèvres, avançant doucement vers lui. Mais étrangement, elle était intimidée de sentir le regard azur pesée sur elle, ce qui était assez anormal pour elle… Dylan avait sûrement oubliée de faire quelque chose. Mais alors qu’elle y réfléchissait, elle se posa sur une chaise… Une table trop loin de celui du professeur. Quand, elle leva les yeux, elle constata avec gêne qu’elle s’était trompé de table. Le rouge monta à ses joues, en se relevant, riant bêtement en allant s’effondrer sur la chaise, devant Jad.

« Purée… Bonsoir ! Je suis contente de vous revoir… »

Malgré cela, elle était heureuse d’être là. Mais en posant le regard sur la tasse devant lui, la raison de son trouble s’illumina. Elle n’avait pas prit de café aujourd’hui ! Sa dose hebdomadaire de caféine n’était pas assouvie et l’énervement joint à l’impatience et l’excitation lui ont servit de substitut…

« Euh… Ça vous gêne si je… »

Mais d’une façon ou d’une autre, le manque était présent, alors que, sans attendre la réponse de Jad, elle s’approprie de sa tasse pour en prendre une gorgée. Avec seulement le goût, elle pouvait déjà sentir une différence (ou c’était uniquement psychologique), mais se dit rapidement qu’elle aurait put attendre en se commandant un café…

« Désolée… J’espère que vous n’êtes pas nareux, sinon, je vous en commande une autre… »

Imbécile... Un sourire timide en se tapant le front.

Elle était là... oh mon dieu, elle était là. Jad était encore tout rêveur et n'y croyait pas encore réellement. Mais la voir, là, en face, se dirigeant vers lui, en robe chemisier blanc, avancer vers lui, cela le rendait... Eh mais... pourquoi allait-elle à la table d'à côté ? Elle ne l'avait pas vu ? Pourtant si : leur regard s'était croisé, et elle lui avait souris. Aussitôt qu'elle s'était assise, elle s'était assise, elle se leva, son visage empourpré par la gêne, sans doute. Elle ria bêtement, un peu incertaine, alors que Jad la regardé, à la fois surpris par cette attitude loin de la psychologue qu'il avait connu dans le petit cabinet et émerveillé par sa beauté et son charme.

« Bonsoir. Je suis aussi content de vous revoir. »

Il avait lâché son collier en jade qui pendouillait en dehors de sa chemise. Il l'observa quelques instants, alors qu'elle regardait sa tasse. Elle lui demanda si ce qu'elle comptait faire le gênait, mais Jad ne savait pas vraiment de quoi elle parlait. Il fronça les sourcils, puis écarquilla les yeux lorsqu'elle prit sa tasse et en bu son contenu. C'était... inattendu. Jad ignorait vraiment quoi faire dans cette situation. Elle s'excusa alors, et le professeur ne peut retenir un ricanement bref. Il n'était pas choqué, ni outré, mais amusé : Dylan était vraiment une femme exceptionnelle, chose qu'il appréciait par dessus tout.

« Je vous l'offre, pas de problème. Vous devez vraiment aimer le café, c'est surprenant. »

Jad avait dis cela avec un léger sourire, bien que son visage semblait toujours assez neutre. Au fond de lui, il était heureux, mais il n'osait pas montrer ses sentiments. La peur sans doute. Quelle peur ? Aller savoir, il avait peur de pleins de choses. La mort ou l'étrange ne l'effrayait pas, loin de là, mais en contrepartie, la vie et ses surprises pouvaient l'effrayer un peu. Et surtout, gâcher ce moment en abusant, ou en faisant peur à la demoiselle, c'était aussi une chose dont il avait peur. Il ne voulait pas gâcher ce moment, se disant que ça ne durerait qu'un temps, et qu'après, il ne se passerait plus rien... même s'il espérait le contraire.

Le serveur arriva à leur table, et Jad commanda un autre café, le même que celui d'avant. Il redirigea son regard vers Dylan. Elle dégageait un parfum doux, sucré et en même temps pas très fort, subtil. Elle n'en apparaissait que plus belle pour le professeur. Il restait neutre, pour sa part, bien qu'il réarrangeait ses cheveux par moment. A un moment, il se rendit compte qu'ils n'avaient pas échangé de mots depuis plusieurs minutes. Quel étourderie : il l'avait invité, et ne faisait que la regarder dans le blanc des yeux. Il se racla la gorge et dit :

« Cela faisait longtemps que... nous n'avions pas eu de tête à tête. J'espère que vous n'êtes pas trop embarrassée par mon invitation. Je souhaitais vraiment vous revoir, et discuter un peu avec vous. En tout amitié, bien entendu... »

* En toute amitié ? Mais bien sûr, tu veux faire croire ça à qui ? *

« Ah, si vous saviez… »

Son ton n’était pas soutenu, un peu hésitante, mais ce n’était pas le fait de lui avouer sa dépendance à la caféine qui la gênait, mais qu’elle ait remarquée qu’ils se vouvoyaient, comme si rien ne s’était passée… Dylan avait réfléchit longuement à ce sujet, devait-elle donner le temps à Jad ? C’est-à-dire, recommencer du début, là où ils auraient dû commencer avant de coucher ensemble…  Jad était un peu plus distant, dans ses gestes, même si ses paroles trahissaient un peu cette image, mais peut-être désirait-il prendre son temps cette fois.  La psychologue ne savait pas trop où se mettre et le mieux était d’attendre ce qui adviendra, ne voulant pas le faire fuir en étant trop brusque…

Jad se commanda un autre café, celui que Dylan avait ‘’volé’’ était presque terminé… Il faudra qu’elle pense également à s’en prendre une autre.  Tandis que son esprit se réveillait un peu mieux, elle se mit à fixer le professeur en souriant. Jad semblait perdue dans ses pensées, ou plutôt dans les yeux de la psychologue. Il ne disait pas un mot. Dylan se contenta de s’accouder sur la table, en terminant de boire son café, mais tout en se laissant charmer par ces mires bleus… Quand Jad prit la parole, le visage de la psy s’illumina en signe d’attention, redressant la tête, écoutant les raisons de cette invitation. Il voulait la revoir, discuter avec elle… Mais la fin lui fit un coup, ne s’attendant pas à ça. En toute amitié ? C’était tout ce qui l’intéressait ? Dylan laissa voir sa déception, en riant faiblement puis en se calant sur sa chaise, un soupire qui en disait long. Mais sa profession l’aida à se ressaisir, réfléchissant quoi dire, quoi répondre. Elle allait partir sur un mensonge, dire que c’était super ainsi, mais elle préférait être honnête et se lancer, en choisissant bien ses mots. À son tour, elle se racla la gorge en s’ajustant sur son siège.

« En toute amitié… ? Bien sûre… Mais je croyais qu’après ce qui s’est passée entre nous… Bref, vous le regrettez j’imagine. »

Le serveur revient en déposant la tasse de café entre elle et Jad, mais machinalement, l’esprit visiblement pas totalement réveillée, Dylan la saisit et prit une longue gorgée… Après quoi, elle le redéposa lentement sur la table en fixant le professeur, venant de se rendre compte de ce qu’elle venait de faire, un sourire gênée aux lèvres.

« Désolée… »

Alors qu'il avait parlé, elle semblait avoir une sorte de déception dans le regard, dans l'attitude même. Jad sembla surpris, soudainement, alors qu'il n'avait pas vraiment montré quelque chose avant. Il la regarda à nouveau droit dans les yeux, se rendant compte de ce que la demoiselle avait compris à ses paroles. Il n'était vraiment pas doué pour ce genre de chose, décidément. Alors qu'il souhaitait répondre, le serveur arriva et posa la tasse de café sur la table, entre eux deux. Il n'avait pas réellement prêté attention, et Dylan l'avait devancé en prenant la tasse, la portant à ses lèvres pour en boire une longue gorgée. Elle s'en excusa l'instant d'après, mais Jad, malgré sa surprise, ne put s'empêcher de rire à nouveau. Il ne s'était pas rendu compte à quel point cette femme, qu'il ne connaissait pourtant pas autant qu'il l'aurait voulu, avait de quoi lui plaire, dans son attitude, dans son naturel. Elle avait de quoi lui offrir un sourire, lui qui avait toujours caché ses émotions, dissimulé dans son coeur, révélé par l'alcool ou l'endorphine.

Il se pencha en avant en souriant, frôla doucement la main de la demoiselle, prenant la tasse dans sa main et en buvant une petite gorgée doucement, reposant le café entre eux, à égale distance.

« C'est à moi de m'excuser : je ne voulais pas vous faire croire que ce qu'il s'est passé n'avait pas eu d'importance pour moi... loin de là, même. Le regretter ? Absolument pas. À vrai dire... je n'aurai jamais songé un jour connaître une femme comme vous... Mais ce que je voulais dire... »

Il hésita : il devait trouver les bons mots, à présent, ne pas se louper. Comment lui dire cela ? Comment lui faire comprendre son désir profond ? Il avait tellement envie d'autre chose. De quelque chose de plus profond, de plus intense, et pas juste quelque chose de charnels. Il prit une grande inspiration, et dit :

« C'est vous connaître davantage... sur tous les plans... Je ne sais pas si je suis clair dans mes propos, je m'en excuse. »

Il n'était pas habitué à ce genre de déclaration. En réalité, il en avait fait, par le passé, mais il n'avait jamais trouvé les mots justes, les bons mots, qui allaient dans ce genre de situation. Il aurait aimé que ceux-ci ne se perdent pas dans sa propre voix, et qu'elles arrivent jusqu'au coeur de la demoiselle. Il osa approcher sa main d'elle, et cette fois-ci, au lieu de la frôler, il posa sa paume sur le dos de la main de la demoiselle. La chance sourit aux audacieux, alors il souhaitait tenter sa chance.

« Je souhaite réellement que nous nous fréquentions, vous et moi. Je veux savoir tout ce qu'il y a à savoir sur vous. J'ignore si c'est raisonnable, malgré ce qu'il s'est passé entre nous, mais j'avoue que votre présence est... comment dire... réconfortante... agréable plutôt. En réalité, j'ai juste envie de rester à vos côtés. »

Quand Dylan ne savait pas où se mettre, elle se maitrisait en se contentant de rire doucement, en baisant le regard le temps que son embarra passe. Ses joues s’empourprent malgré elle et la psychologue prit une grande inspiration avant de revenir sur Jad, qui s’excusait de lui avoir fait croire qu’il regrettait leur petite aventure dans leur bureau. Les mots qui suivirent orientaient toute la concentration de la jeune femme sur lui, alors que le professeur s’engageait vers ce qui semblait être des aveux. Il déclarait sans détour qu’il désirait la connaître d’avantage.

Dylan restait bouche-bée mais attentive aux moindres mots qu’il prononçait. Elle fut étonnée de sentir un contact chaud effleurer le dos de sa main avant que ce dernier n’en soit totalement enveloppé. Elle devina facilement que c’était la main de Jad sur la sienne, mais son regard n’avait pas quitté ses yeux bleus, tandis qu’il continuait… Cet aveu avait un effet plus intense qu’un café, elle se sentait étrangement revigorée. Touchée et rassurée, ses doigts vinrent replacer inutilement ses lunettes, nerveusement en détournant les yeux.

« Ok… On a déjà ça en commun ! »

Sourire amusé aux lèvres, elle plonge son regard dans le sien, en plaçant son pouce, de sorte de caresser tendrement sa main. Elle espérait avoir été assez explicite dans ses dires -malgré que ça manque toutefois un peu de romantisme- qu’ils comprennent déjà qu’elle avait souhaité en gros la même chose. Mais elle ajouta finalement, sans gêne…

« Enfin, à l'exception du souvenir de notre ‘’séance’’ dans mon bureau… »

Dylan n’avait pas penser qu’elle pourrait gêner en disant ça.

Après qu'il eut déclaré qu'il voulait passer plus de temps avec elle, il prit nerveusement son café pour le porter à ses lèvres. Le fait est qu'il était nerveux à l'idée de passer du temps avec elle, bien qu'il aimait cela par dessus tout. Elle reprit alors, en replaçant ses lunettes qui étaient déjà parfaitement bien placés :

« Ok… On a déjà ça en commun ! »

Il sentit alors son pouce caresser sa main, le faisant frissonner. Il avala un peu de café de travers et toussota en reposant la tasse sur sa coupole. Il n'avait pas vraiment entendu cette dernière remarque de la part de la demoiselle, alors qu'il tapotait un bout de tissu sur ses lèvres. Il s'excusa brièvement avant de la regarder dans les yeux. Ils allaient sans doute parler de tout et de rien pour quelque temps.

* Une demi-heure plus tard *

Après avoir finis leurs café, Dylan et Jad avaient commencé à se promener dans le centre commercial. Les magasins n'étaient pas vraiment bondés, ce qui leur laissait l'occasion de discuter dans une ou deux échoppes. Ils avaient visité un petit magasin de bibelots ancien, que Jad aimait particulièrement, comme des services à thé chinois ou des caches-enchens égyptiens, puis s'étaient dirigés vers un magasin d'animaux. Jad se disait qu'il aimerait tellement un petit animal, comme une souris ou un furet, mais les deux demandaient beaucoup d'entretien. Bref, lorsqu'ils furent près de la fontaine du centre commercial, il invita la demoiselle à s'installer. Ils avaient pas vraiment discuté d'eux, mais cela importait peu à Jad, il aimait bien passer du temps avec elle.

Il sourit doucement en direction de Dylan, avant lui dire :

« Je voulais vous remercier d'avoir accepter mon invitation, Dylan. C'est vraiment agréable d'avoir quelqu'un avec qui partager un moment, après autant de temps... »

Il se frotta les mains, il ne savait pas quoi dire d'autre, alors qu'il l'avait invité. Il était tellement timide, surtout face à Dylan. Dans la fontaine se trouvait de dizaines et des dizaines de pièces, c'était sans doute une fontaine à voeux. Il observa un peu la fontaine avant de se tourner vers Dylan. Ses magnifiques yeux envoûtait le professeur qui déglutit avant de dire :

« Je me demandai... avec votre nom, vous devez venir d'un autre pays, non ? Vous avez voyager ? »

Oups… Elle avait sans doute dit ou fait quelque chose qui l’a fait boire de travers. Elle pose une main contre sa bouche, se retenant de rire.

« Ça va… ? »

Elle sourit, tendrement, tout en le fixant. La conversation reprit sur des sujets diverses et la psychologue devint plus détendu, plus à l’aise.

***

Après leur café, ils décidèrent de se balader un peu dans le centre-commerciale, tout en continuant à discuter, de tout et de rien. Dylan s’arrêtait parfois, quand elle voyait des choses intéressantes. Devant les vitrines aux petits kiosques, elle attirait Jad par moment pour lui faire essayer des chapeaux, lunettes de soleil, le tout pour s’amuser et le taquiner. En même temps, elle découvrait les goûts du professeur, voyant qu’il aimait bien les choses simples et douces… Comme lui l’était d’ailleurs. Mais lorsqu’ils entrèrent dans l’animalerie, elle remarqua que Jad s’attardait sur les petits animaux de compagnie. Dylan adorait les animaux… Sauf peut-être les reptiles, elle en avait une peur bleu.

Ils prirent une pause près de la fontaine où la psy s’assied en croisant les jambes, tout en écoutant Jad qui la remerciait d’avoir accepté son invitation.

« Le plaisir est pour moi. »

Elle lui sourit, en retirant ses lunettes, les nettoyants avec un tissus en microfibre qu’elle venait de sortir de sa bourse. Ses yeux fixaient Jad, mais elle plissait du regard pour mieux le voir. Elle s’était toujours demandé pourquoi sa faculté à se régénérer ne guérissait pas sa myopie… Peut-être était-ce là un défaut. Aussi, elle se mit à réfléchir, se demandant s’il allait un jour le dire à Jad… La voix suave du professeur la tira de ses pensées, alors qu’elle remettait ses lunettes, le sourire toujours collés aux lèvres.

« Pas encore non… Mais j’aimerais beaucoup. Mon père est américain. Il était militaire et a rencontré ma mère, qui est japonaise, à la base de Tokyo. Ils ont préférés me donner un nom américain. »

Elle soupira, en songeant au prénom de sa mère qui n’aurait pas collé avec son prénom…

« On a tendance à me prendre pour un garçon quand on voit mon prénom… » Fit-elle en riant doucement. « Et vous… Vous avez voyagé ? »

Son regard se plonge dans le sien, craquant presque à voir ses mires bleus magnifiques.

La sortie se déroulait bien et Jad trouvait avec Dylan des points communs, tout en la regardant détendue, avec d'agréables moments où le professeur souriant en rougissant lorsque la demoiselle le taquinait en lui faisant essayer chapeaux et lunettes de soleil, se prétends tout de même au jeu en prenant des poses comiques. Elle avait aussi ce regard intrigué lorsqu'il montrait ses goûts et ses petits plaisirs. Jad était vraiment bien avec elle. Ça lui était rarement arrivé de passer un moment simple avec quelqu'un sans que cela ne dégénère, que ses habitudes fantasques ne prennent le pas. C'était une bonne journée en perspective.

Lorsqu'ils s'installèrent, Dylan retira ses lunettes pour les essuyer. Il avait l'impression d'avoir une femme différente en face de lui, sans ses lunettes, avec tout autant de charme. Cette redécouverte lui fit sursauter le coeur, bien qu'il ne laissait rien voir réellement. Elle lui expliqua d'où venait son nom : elle était une métisse, Américaine et Japonaise à la fois. C'était sans doute cela, son charme naturel qui intriguait Jad : un visage occidental avec des yeux amandes asiatiques. Elle était adorablement belle.

Elle lui demanda s'il avait voyagé, ce qui fit sourire Jad davantage :

« Après mes études, oui. Je n'avais pas eu suffisamment de réponse aux questions que je me posai durant mes cours et mon père me disait tout le temps que "les voyages forment la jeunesse". Alors une fois que j'avais compris que l'université ne m'apporterait rien de plus, je pris la route. J'ai fait ainsi le tour du monde pendant une année. »

Il sortit un petit paquet de bonbons au lychee, sorte de draguée molle fondant dans la bouche. Il en sortit deux et proposa le second à Dylan, tout en continuant son récit :

« J'ai commencé par aller en Inde, puis direction l'Égypte, où j'ai passé quelque temps à étudier la mythologie et les croyances de l'Égypte antique. J'ai continué avec le sud de l'Afrique, pour rencontrer des shamans et des sorciers de la brousse, comprendre la vision animiste. Après, je suis resté dans l'hémisphère sud, en Amazonie, puis je suis remonté découvrir les temples mayas, et j'ai tout de suite été rencontrer les tribus amérindiennes. Je me suis d'ailleurs lié d'amitié avec certaines d'entres-elles. »

Il porta le bonbon à sa bouche et le laissa fondre quelques secondes, profitant du goût de lychee, avant de terminer :

« Finalement, je suis retourné sur le vieux continent, en Europe, mais je n'ai rien trouvé de passionnant, à part quelques mythes celtes en Irlande et en Écosse. Lassé du voyage et de ne pas pouvoir partager tout, je suis rentré au Japon. J'ai pris une année pour devenir professeur et après... je suis atterris à Seikusu. »

Il se tourna vers Dylan en souriant. Parlé lui avait fait un bien fou, l'avait clairement détendu. Il avait bien résumé son histoire... peut-être trop même ? Il s'installa plus confortablement en la regardant attentivement. Ses magnifiques yeux bruns laissèrent songeur le professeur quelques secondes, avant qu'il ne dise :

« Mais aussi intéressant que cela puisse paraître, j'ai découvert quelque chose de plus intriguant dans cette ville... »

Charmeur ? Détendu, dirons-nous. Jad avait rarement tendance à complimenter avec un sourire. Cela lui allait pourtant bien, surtout que ses yeux ne trahissaient aucun mensonge, aucune disproportion. On sentait l'honnêteté de ses paroles, aussi mystérieuses fussent-elles.

Il remarqua un certain espace entre eux et décida de la réduire : il s'approcha d'elle et lui dit, avec un léger sourire :

« Tiens, les shamans africains m'ont appris à lire les lignes de la main. Vous avez envie de voir les résultats de mon apprentissage ? »

Dylan écoutait Jad lui raconter ses voyages avec fascination. Il avait pratiquement fait le tour du monde. Elle se rendait compte qu'elle y avait toujours rêvé. Partir à la découverte d'un autre pays, avec seulement un sac à dos et appareil photo... Mais elle n'avait jamais pris le temps de bien y réfléchir, planifié cela, étant donné que ses études lui avaient demandé beaucoup de temps qu'elle avait fini par oublier. Jad éveillait visiblement son côté aventureux...

Un sourire arqua ses lèvres quand il lui tendit une dragée de bonbons qu'elle glissa entre ses lèvres. C'était doux, au lychee. Pendant qu'elle le dégustait lentement, Jad poursuivit son histoire. Au fil de sa voix, un bien-être envahissait peu à peu son corps, alors qu'elle le fixait, presque tendrement. Il fallut peu de temps pour que Jad croise son regard, alors qu'il terminait sur le fait qu'il avait découvert quelque chose de plus intriguant ici, dans cette ville...

« À bon ? Quoi donc... ? »

Quelle idiote ! C'est d'elle qu'il parlait. Un nouveau sourire illumina son visage, avec un léger rose sur ses joues. Elle dut détourner le regard un instant avant de revenir sur lui, lui signalant qu'elle avait saisi le sens de sa phrase. Elle en était agréablement charmée et flattée. Un frisson se mit à troubler son visage, son corps, alors qu'il diminuait l'espace entre eux. Elle qui avait l'habitude de se maîtriser, le professeur réussissait à la mettre dans cet état. Cependant, elle ne resta pas immobile, lui tendant tranquillement sa main, à sa demande.

« À condition que tu arrêtes de me vouvoyer... »

Tout sourire, elle ouvrit sa main devant lui, sans cesser de le regarder.

Son sourire affiché lorsqu'il lui conta ses aventures de voyage rassurait le professeur qui espérait ne pas l'embêter à raconter sa vie ainsi. Elle semblait être intéressée par son parcours, il en venait à penser qu'elle aurait aimé vivre un voyage similaire, sans aucun doute. Il pourrait peut-être lui proposer une aventure similaire, un jour, si jamais leur relation devenait assez sérieuse pour songer à un tel voyage.

Lorsqu'il parla d'une chose plus intéressante, elle détourna les yeux en rougissant après avoir demandé ce qu'il avait trouvé ainsi. Elle avait apparemment compris qu'il parlait de la demoiselle. En effet, il n'avait jamais eu de telles sensations auparavant. Elle était quelqu'un d'intrigant principalement pour cela, mais aussi parce qu'il la trouvait attirante et qu'il prenait plaisir à la flatter, alors qu'en général, il était du genre réservé. Il souriait en sa compagnie, lui qui ne montrait que rarement un sourire. Elle était particulière, c'était certain.

Lorsqu'il s'approcha, il remarqua un léger frisson de sa part. Elle ne recula pourtant pas et lui tendit sa main, en lui demandant de la tutoyer. C'est vrai qu'il avait pris l'habitude de la vouvoyer, alors qu'il lui avait demandé de sortir avec elle. Il fallait bien qu'il passe le pas, mais à cette idée, il rougissait légèrement. Son regard troubla un peu le professeur qui détacha le sien pour observer les lignes de la main. Il prit quelques secondes, puis commença :

« Je vois une ligne de vie impressionnante, droite et très longue. Cela signifie une vie sans maladies, sans accidents. Il y a juste une petite accroche au début... mais rien après. La ligne de bonheur varie quelque peu... encore là, il y a un début fragile, étrangement cisaillé, mais après, c'est plus clair, plus rectiligne. C'est un signe de vie épanouie. »

Il releva les yeux vers elle en lui souriant, avant de replonger ses yeux dans la main de la demoiselle, avant de regarder certaines autres lignes. Le contact des aborigènes africains avait amené le professeur à en savoir beaucoup sur les lignes :

« Tiens ! La ligne de rencontre montre un bon nombre de croisements. Quand cela arrive, c'est que la personne fera des rencontres importantes dans sa vie. Lorsqu'elle croise la ligne de vie, comme ça, c'est qu'une rencontre va bouleverser vo... ta vie. »

Une nouvelle fois, il observa Dylan pour voir ses impressions sur ce qu'il disait. Même si cela ne se révélait pas vrai, le but était de donner une sensation à la personne de pouvoir prévoir sa vie et la contrôler. Il replongea une nouvelle fois et observa les lignes sur le côté.

« Hum... la ligne d'instant semble dire qu'il faut que tu fasses attention... il risque d'arriver quelque chose prochaine... »

Juste à ce moment-là, un enfant tenant un chocolat chaud dans les mains fonça dans sa direction en riant, poursuivit par son frère, et trébucha en renversant le contenu de son petit gobelet sur la chemise et le pantalon du professeur qui sursauta de surprise tomba à la réserve dans la fontaine, lâchant Dylan pour ne pas l'emporter avec lui. Il sortit de l'eau avec le corps complètement trempé de la tête au pied. Ses longs cheveux et ses vêtements étaient complètement imbibés, son visage montrait clairement que l'eau était très froide.

La mère de l'enfant arriva en s'excusant platement, alors que Jad sortait de la fontaine en faisant signe que cela allait. Il était complètement trempé, laissant des flaques sur le sol une fois sorti de l'eau. Heureusement qu'il était en chemise et en jeans, parce qu'un kimono blanc serait devenu transparent. Certes, sa chemise laissait voir son torse derrière certains de ses cheveux trempés collant à son corps, mais au moins, son jeans, même s'il était lourd, restait opaque, évitant de voir un boxer. Tout ce qu'il trouva à dire en levant le visage vers la psychologue était :

« Je... suis trempé... »

Dylan, attentive, observait Jad lui lire dans la main. Sa paume dans sa main, elle éprouvait un léger chatouillement, mais qui s’adoucit à mesure que le temps passait. De nature curieuse, elle était ravie d’entendre ce qu’il avait à dire sur son avenir, essayant d’imager ce qu’il prédisait. Son cœur se mit à battre très vite, quand il estima qu’une longue vie l’attendait, sans maladie. Alors là, elle pouvait assurer qu’il voyait juste… Ce qui donnait l’envie de présumer que ce qu’il lisait était précis. D’ailleurs, ce qu’il avait à dire sur sa présumée rencontre bouleversante lui fit sourire, plongeant son regard dans le sien. Elle ignorait s’il était sérieux ou s’il cherchait à soutenir son charme. Car en effet, la rencontre de Jad bouleversait en quelque sorte sa vie.

Le professeur s’arrêta un moment là-dessus pour la regarder. Dylan avait le sourire scotché aux lèvres, les yeux brillants.

« Ça m’amuse… Continue ! »

Il s’exécute, replongeant dans sa recherche. Tous deux concentrés sur sa main, ils ne virent pas l’enfant qui courut vers eux, armé d’un chocolat chaud. Tout le contenu se déversa sur le pantalon de Jad qui tomba à la renverse sous la surprise. Dylan n’eut pas assez de temps pour attraper son compagnon lorsqu’il tomba dans la fontaine… Tous les gens se tournèrent vers eux. Dylan s’était levé d’un bond, les moins jointes contre sa bouche, visiblement choquée. L’enfant semblait plus surpris qu’elle, de même que la mère qui vint s’excuser auprès du couple. La psychologue tendit sa main vers Jad, pour qu’il sorte de la fontaine.

« Est-ce que ça va ? »

L’adrénaline tomba, Dylan éclata de rire en entendant Jad lui dire qu’il était trempé. Elle cacha ses lèvres avec sa paume, comme si elle s’en voulait de rire ainsi.

« Oh non… Je suis désolée… Tu veux peut-être rentrer te changer, ou bien… »

Elle entrevit une boutique plus loin où elle avait l’habitude de chercher des vieux vêtements qui revenait à la mode et à de bon prix. Un regard vers son compagnon, de haut en bas… Elle s’en voulait d’avoir ri et la journée débutait à peine pour la laisser se terminé ainsi…

« J’ai une idée… Viens avec moi. »

Sa main attrapa la sienne pour l’attirer vers la fameuse boutique. Plusieurs aller s’offrait à eux, ainsi que toute sorte de vêtement. Dylan se précipita avec Jad à sa suite, vers les jeans, chemise et pas loin d’eux se trouvait des ensembles, costard, habit de sport,… Elle ramassa deux trois morceaux en tenant compte de la taille du professeur, mais avec un style différent…

« Tiens, essaye ça… Si ça te plaît, je te l’offre. »

C’était un pantalon style tailleur noir, plutôt élégant avec une chemise blanche.

Trempé de la tête aux pieds, Jad avait tout de même un petit sourire gêné sur les lèvres, principalement à cause du rire soulagé de Dylan qui, une fois qu'elle fut rassurée, ne put se retenir de rire de la situation. Le professeur constata l'étendue des dégâts : ses longs cheveux collaient à son visage et à son corps, sa tenue était en ruine et ses sandales étaient bien trempées. Il essuya un peu son visage trempé par les cheveux dont il écarta les mèches. Il avait la même tête que ces jeunes fantômes de films d'horreur japonais, avec cependant des cheveux blancs plutôt qu'ébène.

Dylan s'excusa alors qu'il prit dans ses mains un tas de mèches de cheveux qu'il essora, créant une grande flaque sur le sol. Elle proposa d'abord de rentrer chez lui pour qu'il se change, mais vu qu'il habitait tout de même assez loin, ce n'était pas la meilleure idée. Il aurait une trotte avant d'y arriver et risquait de prendre froid. Elle se tourna vers une boutique à quelques pas et lui attrapa la main avant de l'emmener avec elle jusqu'à l'endroit. Arrivées à l'intérieur, les vendeuses accueillirent Dylan comme si elle la connaissait bien. Elle devait être habituée à venir ici. N'ayant pas le temps de demander de quoi s'essuyer, Jad se laissa emmener dans les rayons, s'excusant pour les petites flaques qu'il faisait, jusqu'à arriver dans une zone avec pas mal d'ensembles de vêtements différents. Il n'y connaissait rien à la mode, mais ce que tandis Dylan était différent de ce qu'il portait normalement : un pantalon type tailleur, lui qui prenait généralement des jeans ou ne portait rien sous son kimono suffisamment grand pour dissimuler ses jambes. Le pantalon était accompagné d'une belle chemise blanche tout aussi légère.

Elle lui demanda d'essayer. Le professeur prit l'ensemble. La chemise ne le dérangea pas, mais il observa quelques secondes le pantalon, incrédule, presque interrogatif. Loin d'être gêné, il n'avait jamais porté cela, donc ne savait pas quoi penser de ce type de pantalon. Il releva les yeux vers Dylan et déclara doucement :

« Je n'ai jamais porté un pantalon comme celui-là avant. Promets-moi de ne pas te moquer si j'ai l'air ridicule avec. »

Il se dirigea doucement vers les cabines, croisant sur le chemin une des vendeuses à qui il demanda une serviette. Elle acquiesça et s'en alla en chercher une, alors qu'il entrait dans la petite cabine. C'était des cabines se fermant par un rideau, sans sécurité, avec un miroir, un petit banc et de quoi accrocher les vêtements. Il ferma le rideau et se déshabillant, retirant le jeans avec quelques difficultés, puis sa chemise. La vendeuse lui apporta une serviette en toquant sur le pan de la cabine et tendant la main à l'intérieur, sans regarder. Jad la remaria et s'essuya tranquillement, passant un coup rapide dans ses cheveux et son corps.

Il se tourna vers le pantalon et le prit délicatement. Il l'observa quelques secondes, haussant les épaules et l'enfilant. Il se sentait plutôt bien dans ce pantalon : c'était léger, aéré et un peu plus habillé qu'un bas de kimono. Il ferma celui-ci et s'observa sous toutes les coutures, avant de prendre la chemise et de la mettre à son tour. Il se regarda dans le miroir : il était plutôt beau gosse avec un pantalon comme celui que lui avait proposé la psychologue.

« C'est plutôt pas mal, ce que tu m'as choisi. Mais tu es sûre de vouloir me l'offrir ? Ça me gêne un peu de ne pas t'offrir quelque chose en échange, tu sais ? »

Ils avaient regardé plusieurs boutiques, avaient flâné devant les vitrines, mais il n'avait rien pris pour la demoiselle. Et le fait qu'elle lui offre un ensemble aussi agréable à porter, comme cela, c'était injuste, pour lui. Il parla au travers du rideau, pour la psychologue, sans regarder dans sa direction, ni le miroir juste en face.

« Il y a peut-être quelque chose que tu aimerais, Dylan ? »