Le Grand Jeu - Forum RPG Hentai

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Les Chroniques de Mobius, acte 5

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Les Chroniques de Mobius, acte 5

mardi 23 octobre 2018, 20:25:30

– Je peux gérer ça. Est-ce que je t'ai déjà déçue ?… Non, cette fois là, ça compte pas. Professionnellement, je veux dire ! Ça m'affecte pas. Sérieusement. Je suis une machine, tu le sais. Zéro sentiment. Voilà. On fait ça. Salut.

Dany éloigna le téléphone de son oreille pour raccrocher. Mais ce fut inutile, car Diane Valentine l'avait fait avant lui. Depuis le temps qu'ils travaillaient ensemble, et malgré les agissements de sa fille, il bénéficiait encore d'une marge de manœuvre importante. Sans faire preuve de trop de naïveté, telle était sa certitude. Même si le show-biz était un monde de requins, et que l'administratrice avait les dents particulièrement longues, elle avait besoin d'hommes de confiance ; une nécessité renforcée par une certaine affinité personnelle. Bref, pour l'instant, le présentateur s'estimait couvert.

Le lémurien rangea son téléphone dans la poche de son veston. Puis il appuya sur le bouton d'un petit dispositif placé sur son bureau. Il y eut un petit clic d'interphone.

– C'est bon, tu me fais entrer le raton prodige. Oui, son assistant aussi, pourquoi pas.

Il relâcha la pression sur l'interrupteur, tapota vigoureusement le rebord de la table. C'était le matin, tôt – mais Dany était déjà levé depuis un bon moment, et ne paraissait pas du tout engourdi par l'heure. Son lieu de travail seulement deux étages en dessous de celui de sa patronne, mais y ressemblait peu. Le revêtement bois des murs et la moquette rouge donnaient une ambiance cabaret, à la fois chaleureuse et ancienne, pour ne pas dire démodée. Les larges vitres teintées ne laissaient passer qu'une lumière tamisée, chaude. Tout était néanmoins impeccable.

Une humaine ouvrit la porte, et laissa pénétrer dans la pièce le chat et le souriceau. Aussitôt, Dany se leva, et contourna son bureau pour les accueillir. Un costume pourpre simple sur les épaules, il avait un grand sourire aux lèvres.

– Bonjour ! Bonjour ! Timothée, quel plaisir de vous rencontrer ! Oh je sais, on s'est déjà vus, à la réception pour l'ouverture du Magic Kingdom. Mais c'était de loin ! Maintenant, on peut passer aux choses sérieuses.

Le lémurien serra la main de l'hybride – ou plutôt l'attrapa avant même que celui-ci puisse la tendre. On vit qu'il eut un instant d'hésitation pour Marty, et puis il le salua de la même manière, avec un regard vaguement interrogateur. Il n'était pas au courant de tout.

– Asseyez-vous, mettez-vous à l'aise.

Il leur montra les deux confortables petits fauteuil en forme d’œuf devant le bureau, et s'installa derrière. Par rapport aux autres son siège était très surélevé, et le faisait paraître plus grand qu'il ne l'était. Il sortit d'un tiroir un boîtier noir qui, une fois ouvert, révéla quelques très beaux cigares à la bague dorée. Lui-même ne consommait pas régulièrement, ce n'était que pour les invités.

– Vous fumez ? Vous devriez essayez ceux-là, ce sont les meilleurs. Un café ? Autre chose ?

Il claqua des doigts pour commander un café pour lui-même, et éventuellement pour ses invités ; son assistante sortit.

– Ah, on ne va pas faire semblant, cher Timothée ! Pas de ça avec moi. Je sais que la Tech-13, et Canal H… t'inspirent des sentiments partagés. Allez, pas d'euphémisme, même : tu ne travailles pas ici de gaîté de cœur. Je le sais, on m'a dit.

Son ton était sérieux, mais il gardait un aspect démonstratif – assez théâtral – qui le rendait un peu curieux. Il parlait quand même très bien. Il hocha la tête d'un air grave et écarta les bras. Il évitait soigneusement de braquer son regard orange sur Marty.

– Hey, sache que je n'ai pas décidé de te forcer la main. Si ça n'avait tenu qu'à moi, on t'aurait laissé faire ce que tu voulais. Mais maintenant qu'on en est là, mon job c'est que tout se passe bien entre Canal H et toi. Si tu as besoin de quoi que ce soit pour te sentir à l'aise, tu m'en parles, compris ? Ah, tu verras, y'a quelques avantages à être une super star.

Dany décocha un clin d’œil, et se remit à sourire. L'assistante revint pour servir le café.

Mascotte

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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 1 mardi 23 octobre 2018, 23:18:16

« Tu veux quelque chose, Marty ? »
Timothée avait parlé d’une voix douce à son ami. Le chat le fixa et n’eut pas vraiment de réaction. Assez vite, ses prunelles jaunes redevinrent fuyantes. Le félin semblait ailleurs, inaccessible. Clairement, il n’avait pas une attitude ordinaire et, de ce fait, pouvait mettre mal à l’aise. En représentation, comme avaient pu le constater quelques milliers de spectateurs, ça donnait bien. Marty était un parfait assistant, à la fois effacé et intriguant. Mais, au quotidien, son calme anormal, son silence pesant, c’était une toute autre histoire.
« Un jus de fruits ? Un soda ? Une bière ? T’aime ça la bière, non ? … De l’eau ? »
Marty hocha la tête. Depuis leur rencontre avec Monsieur Frevo et Samba, il n’avait plus dit un mot. En lui, quelque chose s’était brisé.
« Marty va prendre de l’eau, heu, et moi, ben, un café », déclara le Petit Mage à l’assistante.

Refaisant face à Dany Fortune, Timothée réalisa qu’il tenait un cigare. Le lémurien le lui en avait proposé un, il avait dit oui, sans trop réfléchir, sans trop y faire attention. Il disait un peu oui à tout, en ce moment. La tête dans les nuages ? Indéniablement. Mais pas assez pour ignorer ce qui se passait. Il avait juste l’impression de ne plus être aux commandes, ce qui était vrai. Il loucha sur le cigare, le tourna entre ses doigts. Quel drôle d’objet, il n’appartenait pas à son univers. Un cigare, c’était un truc de riche, non ? Surtout des comme ça ? Il n’avait jamais fumé de sa vie, que ce soit du tabac ou autre chose. Mais bon, puisqu’il l’avait dans les mains, il aurait l’air un peu idiot s’il le reposait. Il pointa du doigt l’extrémité du cigare et une gerbe de flammes jaillit. Surpris par la vague de chaleur qui lui percuta le visage, il se recula un peu. Rodrigue et le Marty d’avant se seraient alarmés en voyant cela. Eux savaient que la nature des pouvoirs du souriceau dépendait de son état d’esprit. Qu’il puisse si facilement invoquer du feu en disait long. Dany, lui, ne verrait qu’un joli tour de magie. N’était-il pas charmant ce Timothée maladroit qui s’initiait à l’art de fumer ? Le résultat logique arriva. Quinte de toux, yeux embués de larmes… Le petit mage eut un sourire piteux et en resta là.

L’assistante revint, avec deux cafés et un verre d’eau. Tim donna à Marty son verre d’eau, puis il prit sa tasse.
« Monsieur Fortune, je sais pas trop quoi dire. J’ai pas trop l’impression d’être une super star, pour être franc. Je fais ce que Diane Valentine veut et puis voilà. Elle m’a dit que c’était vous qui alliez vous charger de la suite. C’est quoi, cette suite ? »
Timothée semblait certes un peu perdu, mais il n’était pas timide. Ses yeux noirs détaillaient la pièce ainsi que le lémurien avec curiosité.

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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 2 jeudi 25 octobre 2018, 19:43:35

Le présentateur ne percevait rien de la colère refoulée du méga. Il le trouva même plus sympathique qu'il ne l'avait espéré.

– Bah ! Je t'en prie, appelle moi Dany ! Dans deux ans, tu es plus connu que moi… et c'est moi qui viendrai te demander des services.

Nouveau clin d’œil. Pendant qu'il parlait, le lémurien avait attrapé le cigare laissé par Timothée. Ses doigts fins et agiles firent tourner le bâtonnet, alors qu'il le faisait passer par un petit trou de la boîte, prévu à cet effet. Une petite lame tomba, emportant un morceau.

– C'est mieux de couper la tête, expliqua-t-il. Ça évite qu'il se déforme. Ne cherche pas à aspirer la fumée, ce n'est pas une simple cigarette. Garde la dans la bouche, savoure.

Il tendit le cigare au souriceau avec un sourire. Il se doutait que c'était la première fois qu'il en fumait – dans son ancienne vie, l'argent d'un seul de ces cigares lui aurait peut-être donné à vivre pour un mois.

– On commence simple : aujourd'hui je t'emmène avec moi préparer le prochain Système D. Le sujet, c'est principalement toi, mais on va essayer d'y caser une réflexion plus poussée sur les mégas en général. Ce n'est pas à toi que je l'apprendrais, les mégas ça fait peur à certains. Parfois, il y a de bonnes raisons à ça, car certains sont dangereux, mais souvent ce n'est pas justifié. On pense que si on participe à donner une bonne image des mégas, ils s'intégreront mieux à la société – il faut qu'ils trouvent leur place, tu vois – ça les incitera eux-mêmes à mieux se tenir. En tout cas c'est ce que j'ai réussi à faire passer dans le dernier meeting, ahah.

Malgré son détachement, on le sentait intéressé par le sujet, et probablement sincère. Il se baissa et sortit de sous son bureau une petite tablette numérique, attachée à un clavier.

– Ça va être une édition spéciale. J'ai fait en sorte de boucler mes autres tournages, donc on a pas mal de temps. Ce que j'aimerais, c'est qu'on établisse ensemble une liste de personnes à interroger. Des personnes de ton entourage, qui pourront témoigner de ce que tu apportes à la vie de ton quartier. On évite celles avec une opinion politique trop marquée, OK ? Ensuite on ira sur place, toi et moi, pour les interviewer, comme ça, en mode on se balade – enfin avec une équipe de tournage quand même, évidemment. On verra pour la mise en scène, on arrangera ce qui rend pas bien. Si c'est un peu léger, on prendra quelques comédiens. Mais on va essayer de faire authentique.

Il joignit les mains et embraya sur un autre sujet, sans laisser à Timothée le temps de répondre. Son regard orange se perdit un peu.

– Si tout se passe bien, j'aurais autre chose pour toi. Je travaille depuis un moment sur la production d'une quotidienne. Un jeu où les candidats devront passer une série d'épreuves amusantes, dans une tour. À chaque épreuve remportée, ils montent d'un étage. À chaque étage, un méga différent. Le temps à chaque étage est limité, ils doivent retourner dans l'ascenseur avant qu'il se referme. Je vais être honnête, je pense que tu aurais le potentiel pour présenter ça, et aussi être l'épreuve finale. Qu'est-ce que tu en penses mh ? Mais enfin, on verra plus tard.

Mascotte

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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 3 jeudi 25 octobre 2018, 22:59:49

« C’est sympa cette idée de tour. J’aime bien. En tout cas, présenter un jeu, c’est sans doute l’un des trucs qui pourrait le plus me plaire. »
Lui ? Présentateur d’un jeu télévisé ? L’idée lui semblait proprement ubuesque, mais pas plus que tout ce qui lui arrivait en ce moment. Et puis, présenter un jeu, c’était toujours mieux que d’animer une émission intellectuelle ou un autre truc barbant. Tout à ses réflexions, Timothée récupéra le cigare, l’observa de nouveau, puis fit un second essai en respectant religieusement les conseils de Dany. Ce fut un peu moins lamentable, quand bien même sa grimasse exprima de manière éloquente qu’il trouvait le goût affreux. Sa gorge commença à le démanger. Il cracha un nuage de fumée et se tourna vers Marty.
« Regarde, Marty, j’ai pas la classe, comme ça ? »
Il tira encore un peu sur le cigare pour se mettre en scène en se donnant un air digne de grande personne. Juste après avoir craché un second nuage de fumée, il toussa. Le chat pencha la tête de côté, comme pour voir son compagnon sous un autre angle. Il n’avait pas l’air convaincu. Tim trouva son expression comique et il rit. Son rire, certes bref, fut cristallin, beau aux oreilles. Le souriceau, non content d’être un très puissant méga et d’avoir le sens du spectacle, il avait en plus du charme. En somme, il avait tout. Quelle ironie qu’il se sente en cet instant si vide. Il avançait sur un chemin, son âme pleine de braise, il fixait la lumière qu’on lui désignait de peur de tourner la tête, de s’arrêter, de s’effondrer et, peut-être, de se consumer lui-même.
« Voyez Dany, mon ami n’est plus très bavard, reprit Timothée, soudain sérieux. Mon autre meilleur ami est en prison pour terrorisme. »
Il posa le cigare sur la table, prit sa tasse de café, but une gorgée, le trouva trop amère. Alors il se rajouta un sucre, non, deux. Ses yeux noirs s’étaient posés sur le lémurien, ne le quittaient plus.
« Revenir dans le quartier sud me paraît risqué, si vous voulez mon avis. Mon entourage immédiat n’existe plus et La moitié de mes autres connaissances, maintenant, me jetterait des pierres au visage. Prenez la liste des personnes du quartier sud qui se sont rendues à l’inauguration du Magic Kingdom, elles feront l’affaire. Et elles seront toutes ravies de prétendre me connaître personnellement. Mais limitez-vous à ça. »
Avant, le Petit Mage aurait été outré d’entendre les nombreuses allusions de Dany Fortune qui, pour arriver à ses fins, était près à arranger la réalité, à la travestir. L’était-il moins maintenant ? Peut-être, il devait faire avec. Il savait où il était, il avait une idée de comment ça se passait. Il se demanda brièvement combien de temps Dany mettrait à mourir s’il tendait la main vers lui et l’arrosait de flammes. Il chassa cette amusante pensée, il n’était pas pressée de se retrouver avec un collier rouge autour du cou.
« Sinon, votre programme me va. » conclut Tim en vidant sa tasse.
Quand bien même ce n’aurait pas été le cas que ça n’aurait pas changé grand-chose. Mais il était toujours plus simple d’aller dans le sens du courant. Tim était volontaire, intéressé, pouvait même se payer le luxe d’une ou deux remarques pertinentes, que demander de plus ? Dany ferait peut-être bien de se pincer, tout cela n’était peut-être qu’un rêve.
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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 4 dimanche 28 octobre 2018, 13:15:17

Dany leva la tâche blanche qui lui servait de sourcil gauche au moment où Timothée évoqua la résistance. Pensif, il porta son propre café à ses lèvres, mais il n'en dit finalement rien.

– Je te pensais plus entouré. C'est pas grave, on va se débrouiller comme tu as dit.

La réunion ne dura pas beaucoup plus longtemps. Le lémurien passa quelques minutes à lui expliquer le programme de la journée qui allait suivre : une réunion de production à laquelle il était convié, une séance d'écriture, des essais maquillage et caméra. Puis tout se déroula presque exactement selon ses prédictions, à une vitesse déstabilisante pour un novice.

Timothée croisa trop de personnes pour qu'il lui soit possible de retenir tous les noms. Il put constater que, même à TVH, la plupart des postes réellement importants étaient tenus par des humains – mais on sentait quand même qu'un effort avait été fait. Le régisseur du plateau de Système D était un lama jovial nommé Jean-Jacques qui prit manifestement beaucoup de plaisir à expliquer au souriceau les coulisses d'un tournage télévisé. Ensemble ils préparèrent également le spectacle qui aurait lieu une semaine plus tard. Contrairement à l'ambiance de la soirée d'ouverture du Magic Kingdom où il avait été très contrôlé, on lui faisait ici confiance, et on lui laissait une liberté à peu près totale.

Du côté des rencontres moins plaisantes, le directeur créatif de la chaîne, qu'il vit brièvement lors de la première réunion, était un quarantenaire au teint gris que tout le monde appelait Monsieur Charlie. Bien loin de ce que son titre de « créatif » pouvait laisser penser, il ne participait pas à la réalisation du projet. Son travail à lui, c'était s'assurer que celui-ci ne brouille pas l'image de TVH et se conforte à sa charte. Il lui sembla sec voire méprisant, exprimant des réserves sur à peu près chaque point où Timothée était directement impliqué. Dany prétendit qu'il était comme ça avec tous les nouveaux et qu'il ne fallait pas s'en soucier. Au final, il ne posait presque jamais son veto.

Le lémurien était quant à lui d'une amabilité constante, et ce avec tout le monde ; toujours poli, jamais cynique ou excessivement autoritaire. Il ne levait le ton que pour s'essayer, de temps à temps, à des plaisanteries plus ou moins réussies. Il cherchait à ne vexer personne, et n'avait en apparence aucun ennemi. Il était, en somme, assez en accord avec l'image que la plupart des téléspectateurs avaient de lui : celle d'un homme à la fois consensuel et sémillant.

S'il veillait à se faire apprécier de tous, il était tout particulièrement agréable avec Timothée. Attentionné, pédagogue, il prévenait les coups dont le milieu pouvait menacer avant même qu'ils ne soient portés. Entre deux séances de travail, il l'accompagna plusieurs fois déjeuner dans le centre-ville, à des restaurants dont il n'aurait pu que rêver jadis. Il voulait bien faire, quoique l'on sentait qu'il tâtonnait parfois, n'étant pas du tout issu du même monde que le souriceau.

Enfin, la veille de l'émission, Timothée reçu un message sur le téléphone dernier cri qui lui avait été fourni par la chaîne. Dany Fortune lui écrivait :

« Cher Tim,

J'espère que tu n'es pas trop stressé pour demain. Tu as encore des répétitions le matin, ça va le faire. Tu as été exceptionnel pendant toute cette semaine, bien meilleur encore que je ne m'y étais attendu. Je crois en toi.

Je sais que ce n'est pas la meilleure façon de décompresser, mais j'aurais voulu t'inviter aux obsèques de mon ami Pierre Sagal. C'est lui qui le premier m'a fait confiance, et qui m'a lancé dans le métier. Il n'était pas très connu du grand public, mais c'était un homme qui, je pense, devrait inspirer les nouvelles générations. Ce sont des producteurs comme lui dont il te faudra, un jour peut-être, prendre la relève.

Elles se déroulent ce soir même à partir de 19H. Si tu le veux bien, j'envoie un chauffeur te chercher vingt minutes avant. C'est une cérémonie privée, j'aimerais que tu viennes seul.

J'aurais une surprise pour toi en fin de soirée.

Bien amicalement, »

Mascotte

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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 5 lundi 29 octobre 2018, 11:29:49

Combien de jours s’était-il écoulés depuis que Timothée avait débuté sa nouvelle vie ? Mais déjà, pouvait-on seulement qualifier cela de vie ? L’impression de demeurer dans un songe persistait. En apparence, il semblait avoir retrouvé sa spontanéité, s’être remis de ses émotions. Il faisait preuve d’adaptabilité et d’initiative, malléable et volontaire, l’enfant des rues était déjà en train de s’effacer au profit du personnage public qu’était en train de construire Tv H. Son discours ne souffrait plus d’accroc. Il ne parlait plus de résistance hybride, mais de terrorisme. Il rejetait toujours la violence, était partisan du compromis, de l’intégration, du politiquement correct… Son image se ciselait au gré des séances de maquillages et d’essayages. Pelage brossé, lustré, terminé la mise usée, son costume de scène empruntait au magicien mondain. Chapeau haut de forme noir, veste longue à ample manche bleu nuit, aux gros boutons d’argent, gants blancs, chemise blanche, nœud de cravate, pantalon et bottines noires… tel semblait être le choix arrêté. Devant l’objectif des caméras, il faisait merveille, en privé aussi. C’était un plaisir de travailler avec lui. Son potentiel se concrétisait, le rêve de Dany Fortune se poursuivait. Tout indiquait que s’il poursuivait ainsi, le lémurien pourrait rendre Diane Valentine heureuse en fournissant à son secteur une superbe arme médiatique, tout autant qu’une mirifique pompe à fric !

En vérité, si le Petit Mage faisait tant illusion, c’était parce qu’il ne cessait plus de jouer la comédie. Il était en quelque sorte sur scène en permanence car il était plus simple pour lui de s’enfermer dans le mensonge. Le jour, il se dopait aux boissons énergétiques. De toute manière, sans cela, il n’aurait probablement jamais pu tenir un rythme aussi soutenu. La nuit, il tournait aux somnifères. Sans ça, il ne dormait plus. Son sommeil n’était que hantise, son âme était en flammes. Frevo et Samba avaient allumés le feu, certes, mais ce n’était pas eux qui avaient accumulé le combustible. Le quotidien s’en était chargé, ainsi que les discours de Rodrigue. Oui, Rodrigue, qui était probablement mort ou en miette, Rodrigue qui avait toujours eu raison. Timothée s’en voulait de s’être à ce point trompé. Au-delà de ses sourires, une douleur de fond lui vrillait l’esprit. Comment oublier ? Comment assumer ? Marty, silencieux et triste, le suivait telle une ombre, lui rappelait par sa seule présence le poids de ses erreurs.

Timothée releva la tête de son téléphone portable. Il venait de lire l’invitation et rédigeait machinalement sa réponse.
"Je suis touché, Dany, que tu me convie à un événement aussi personnel. J’en profite pour t’adresser mes plus sincères condoléances. Je serai prêt, j’attends le chauffeur."
Maintenant, il tutoyait Dany Fortune. Il donnait l’impression de s’être attaché à lui alors qu’il rêvait régulièrement de le tuer, mais toujours d’une manière différente, toujours d’une manière plus horrible à mesure que sa rancœur faisandait dans ses entrailles de souriceau. Et dire qu’avant, il aurait été incapable de dissimuler quoi que ce soit.
« Marty, je vais sortir ce soir. »
Le chat, debout devant la fenêtre, hocha la tête. Marty aimait regarder les voitures qui défilaient, loin, loin en bas, dans l’avenue voilée de gaz d’échappement.
Quand le chauffeur vint, Timothée était en effet prêt. Il avait enfilé une tenue noire de circonstance, mais très chic cependant. Un air grave peint sur sa figure, il monta dans la voiture et se laissa conduire. Il se montrerait compatissant, offrant un peu de ce que Dany lui avait offert. Il continuerait de mentir en se demandant comment fuir ce qui lui bouffait les tripes.
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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 6 mardi 30 octobre 2018, 20:36:25

Le lieu de recueillement n'était pas très excentré ; seule la circulation – encore intense à cette heure – justifiait les vingt minutes d’avance. Le chauffeur connaissait bien la route, et ils ne furent pas bloqués longtemps. En temps et en heure, la voiture s'arrêta devant un édifice en pierre très blanche. C'était un des rares bâtiments à ne pas être un immeuble, et dans un quartier aussi dense, l'exception était riche de sens. Des donateurs aisés avaient fait survivre ce lieu à la pourtant terrible pression immobilière. Même s'il n'était pas très grand, avec son toit en dôme et ses deux colonnes symétriques qui encadraient sa large porte, le temple se détachait à la fois de l'espace et du temps.

Le chauffeur descendit pour ouvrir la portière de Timothée et le salua poliment alors qu'il sortait. L'entrée était gardée par pas moins de quatre vigiles qui se décalèrent pour laisser entrer le souriceau aussitôt qu'ils le virent. Son arrivée était manifestement notée quelque-part. Après le passage par un petit vestibule décoré, l'hybride comprit pourquoi : dans l'immense salle centrale, il n'y avait que quelques dizaines d'invités… et visiblement, ils n'en attendaient pas beaucoup d'autres. Dany n'avait pas menti lorsqu'il avait annoncé qu'il s'agissait d'une cérémonie privée.

En réalité, la scène ressemblait étrangement à une banale réception. La plupart les visiteurs tenaient des verres d'alcool à la main, et on avait disposé des petites tables rondes couvertes de toasts divers. Entre-elles slalomaient, plateaux à la main, des serveurs – tous très élégants quoique vêtus de noir.  

Le lémurien était en train de discuter avec un petit groupe. Il repéra aussitôt Timothée et prit congé pour s'avancer vers lui et lui serrer la main.

– Bonsoir Tim. Je suis touché que tu aies pu venir. J'en profite tant que tu n'es pas encore trop demandé.

Il sourit et reprit, balayant d'un geste l'ensemble de la salle :

– C'est moi qui ai organisé. Pierre était un bon vivant, il n'aurait pas aimé que son enterrement ressemble… eh bien, à un enterrement. À vrai dire, la plupart des personnes que tu vois ne seraient pas venues, si la soirée n'avait pas eu un minimum d'attrait. Pendant ces prochaines heures, tu auras l'occasion de parler à plus de célébrités que 99 % des gens durant toute leur vie.

Dany n'exagérait rien. Il y avait bien sûr dans la salle des visages inconnus, mais au moins une personne sur trois était connue – ne serait-ce que de vaguement – du souriceau. Il y avait là des réalisateurs et des acteurs de cinéma, des présentateurs de télévision, et même quelques participants de télé-réalité à la gloire moins éphémère que les autres. Ceux que Timothée ne connaissaient pas n'étaient généralement pas moins importants : producteurs, auteurs à succès, patrons de presse, décideurs. Le lémurien n'avait invité que la crème de la crème.

– Oh, je suis sûr que tu n'as pas besoin de moi pour les charmer, mais enfin, laisse moi le plaisir de te présenter à quelques uns ! On a trente minutes avant que la cérémonie commence vraiment. Prends une coupe et suis-moi !

Il conduit le petit mage vers le groupe qu'il avait quitté une minute avant. Il y avait deux hommes et une femme.

– Michael ! Je te présente mon nouveau protégé, Timothée. Il pourrait mettre ton département effets spéciaux au chômage à lui tout seul ! Timothée, tu connais sûrement déjà Michael Ray !

En effet, Michael Ray était un réalisateur qui n'était plus à présenter – son nom était connu aussi bien dans les milieux populaires que plus aisés. Le quarantenaire était une étoile montante, il avait réalisé parmi les block-busters d'action les plus rentables de la décennie passée.

– Et son couple d'acteurs stars à l'écran, Mélodie et William.

Deux jeunes gens – le garçon, genre sportif un peu plus vieux que la fille, très belle blonde. Ils étaient à eux-deux un cliché de ce type de cinéma. Ils commençaient à être connus, eux-aussi. Mélodie offrit un sourire particulièrement large à Timothée, un sourire d'une blancheur surnaturelle.

– Tim' va présenter un jeu sur TVH dès le mois prochain. Mais franchement, tu ne devrais pas t'interdire de le caster pour ton prochain film.

Le réalisateur s'en amusa :

– C'est vrai, j'adore les acteurs hybrides, ils sont si… instinctifs.
– Ils ont quelque-chose de sauvage, ajouta l'acteur d'un ton sûr. Concurrence déloyale !

Dany hocha la tête et sourit poliment. Il y avait tant de personnes à présenter, et si peu de temps ! Timothée se rendrait vite compte que le regretté Pierre Sagal n'était pas du tout le centre des conversations. L'ambiance n'était pas au regret, et personne ne pleurait. Il ne semblait, d'ailleurs, pas avoir de famille.
« Modifié: mardi 30 octobre 2018, 20:46:16 par Le Messager »

Mascotte

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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 7 mardi 30 octobre 2018, 23:28:09

Timothée, une fois encore, s’adapta. Il ne le faisait même pas de manière vraiment consciente. Le tapis roulant de son étrange existence le menait là, alors autant en profiter, si profiter était le bon terme. Autant, plutôt, continuer de cultiver le grand mensonge. S’être éloigné de Marty le soulageait un peu, le sourire venait un peu plus facilement.
Une coupe en main, il avait suivi Dany et se trouvait maintenant devant ce Mickael Ray dont le nom réussit l’exploit de lui évoquer autre chose que du dégout.
« Ho, ça alors… J’étais loin de me douter que je rencontrerais mon réalisateur préféré dans une cérémonie funèbre. J’adore vos films, vraiment. On se pause devant, on arrête de cogiter et zou, que des sensations fortes ! Il me faut bien avouer que ça me ferait pas mal délirer de me retrouver dans l’une de vos réalisations. »
Pour le coup, il était sincère. Tourner dans un film de Mickael Ray lui plairait vraiment, alors qu’il se mettait instinctivement à exécrer tout ce qui se rapprochait de Dany Fortune. Le lémurien resterait toujours à ses yeux le sbire de Diane Valentine. Le Petit Mage serra les mains, rendit les sourires.
« Sauvage ? Je ne sais pas si je suis très sauvage, déclara-t-il en réponse à William. En tout cas, la souris, c’est pas très crocs et griffes. En même temps, certains savent à merveille unir les contraires. Enchanté de rencontrer le Colonel White en chair et en os. »
Le colonel White avait été un des rôles récents de l’acteur, héros du film "La Fureur de White".
« Et vous, Lady Gun ! » poursuivit Tim à l’intention de Mélodie.
Lady Gun était son rôle dans la Fureur de White, d’abord antagoniste, puis compagne thorine pour préparer un final sous adrénaline.
Peu après, le souriceau prit congé. Il suivit Dany qui le présenta à tout le monde. Poignée de mains, sourires, mots aimables pour tout le monde. Une fois de plus, il était parfait. Il se prêta même à quelques traits d’humour, ainsi qu’à de discrète petites démonstrations de son pouvoir lorsque cela s’avérait judicieux. Il savait se mettre en valeur, le bougre. Et tellement volontaire. Assoiffé de nouveautés et de distractions, tout était bon pour apaiser son mal-être.
Une fois présenté à tout le monde, il évolua sans Dany, allant vers les gens qui ‘l’intéressait le plus. Mickael Ray et ses acteurs en faisaient bien sûr partie.
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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 8 dimanche 04 novembre 2018, 10:31:15

Ici, tout le monde semblait avoir une bonne opinion de Dany Fortune. Quel que soit le groupe auquel il se joignait, il était systématiquement accueilli par des sourires qui paraissaient toujours sincères. Bien sûr, dans un milieu aussi mondain, où les relations étaient primordiales, tout le monde savait un minimum feindre l'amitié… sans compter qu'en tant qu'organisateur, il avait choisi lui-même une grande partie des invités. Mais tout de même, il semblait jouir d'une grande popularité, dont il sut faire bénéficier Timothée. Le souriceau se faisait remarquer en bien. C'est qu'ils étaient, ici aussi, finalement très peu d'hybrides.

Peu avant le début formel de la cérémonie, Dany revint vers Timothée, qu'il trouva de nouveau en compagnie de Mélodie. La jeune femme – qui paradoxalement était un peu réservée au premier abord – se détendait vite et pouvait parler de ses rôles avec passion. Elle dégageait beaucoup plus d'intelligence que son emploi n'aurait pu le laisser penser, même si visiblement charmée par le souriceau, elle pouffait un peu automatiquement à chacune de ses plaisanteries.

– Bon, alors, je vais me préparer pour la crémation… fit le lémurien avec son sourire habituel. Ce n'est pas la partie la plus amusante, bien sûr, mais, je compte sur vous pour rester sages. Après la cérémonie, il y aura une veillée, mais vous n'êtes pas obligés de rester tout du long.

On le sentait un peu gêné d'avoir à imposer un moment qui s'annonçait assez ennuyeux – lui qui était tellement habitué au distrayant. Il repartit vers le fond de la salle, mais s'abstint cette fois d'engager la conversation avec qui que ce soit.

Quelques minutes plus tard, tous les invités étaient assis sur des bancs en bois blanc qu'on avait disposés dans l'avant de la pièce, face à l'autel. Timothée était au troisième rang, à gauche – soit tout derrière – Mélodie s'étaient assise juste à côté de lui. Devant lui, il y avait un gros homme qui nuisait considérablement à son champ de vision.

Les lumières s'éteignirent et un silence pesant s'installa. Puis, suivie par un spot de lumière chaude, le cortège mortuaire entra par la porte principale. En tête, une petite vieillarde enveloppée dans une tenue orange, la maîtresse de cérémonie. À sa suite, un cercueil tubulaire en verre, abritant le défunt. Ce fut la première – et assurément la dernière – fois qu'en tournant la tête, Timothée put voir Pierre Sagal. C'était un homme qui ne paraissait pas spécialement vieux, la cinquantaine peut-être, mais au visage très émacié. Il avait encore des cheveux blonds mi-longs, et sa barbe avait été rasée. Il reposait, en costume blanc, sur un flocage également immaculé.

Le sarcophage transparent était porté par quatre personnes, au moyen de très longs brancards qui dépassaient devant et derrière. Il y avait parmi ceux-là Dany lui-même (qui portait la barre sur l'épaule) et le réalisateur Ray (qui, comme les autres humains, tenait la barre le coude légèrement plié). Les haut-parleurs du temple entamèrent une musique de circonstance.

Enfin, la suite de la cérémonie, Timothée la connaissait car elle était assez commune. C'était une métaphore du soleil couchant. Au moment exact où l'astre solaire atteindrait la ligne d'horizon (même si personne, avec la densité de la ville, ne s'en rendrait compte) on mettrait feu au revêtement intérieur du cercueil. La lumière projetée serait assez belle, surtout dans le noir. De manière générale, on sentait une mise en scène pensée. Il y avait une ouverture à la fois dans le sarcophage et dans le temple pour évacuer la fumée. Pendant que la dépouille brûlerait, il y aurait des prières et des mots des proches. À la fin, il ne resterait plus que de très fines cendres blanches, qu'on transférerait dans un vase également en verre.

– Ça va être interminable, chuchota Mélodie à Timothée. Perso j'vais pas me taper ça. Hey, j'ai un truc extra à te montrer si tu veux. Rejoins-moi dans les toilettes dans deux minutes.

Dans la pénombre, le souriceau vit le visage parfait de l'actrice lui sourire. Discrètement, elle se leva (c'était facile, car l'espacement était plutôt important et qu'elle avait pris soin de se placer en bout de rangée) et se dirigea vers le panneau faiblement lumineux qui indiquait les toilettes. Personne, à part l'hybride, ne semblait avoir remarqué son départ.
« Modifié: mardi 06 novembre 2018, 17:21:42 par Le Messager »

Mascotte

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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 9 dimanche 04 novembre 2018, 21:33:08

Avant, sans doute, Timothée aurait-il perçu dans cette cérémonie quelque chose de sacré. Une crémation, ce n’était pas rien tout de même. Cependant, il n’était plus du genre à s’épancher pour si peu. La vue du corps de Pierre Sagal dans son cercueil de verre le laissa de marbre. La vie n’avait plus tant de valeur à ses yeux et pour cause, ses rêves n’étaient peuplés que de morts. Impossible cependant de deviner à son attitude si grand détachement. Il avait la mine de circonstance, l’air grave depuis que les lumières s’étaient éteintes. Qu’un gros bonhomme lui bloque la vue lui importait peu. Il ne s’en laissa que plus envahir par la musique. Elle suscita en son esprit abyssal un spectacle dont il était bien sûr l’hauteur. Il se vit, sur scène, dans sa chic tenue. Le blanc de ses gants et le brillant de ses boutons d’argent ressortaient sous les projecteurs. Il se vit, plein d’assurance, sourire étincelant, mais regard mauvais et joie malsaine  sur son visage dépouillé d’innocence. Il eut la diffuse impression d’avoir déjà eu ce genre de songe par le passé, avant de croiser le chemin de Frevo et Samba. Avertissement d’une gloire pernicieuse, se disait-il alors. Mais plus maintenant. Non, maintenant, ce songe lui arracha un sourire similaire et le songe se poursuivait. Un fouet de feu dans son poing, l’horreur dans les yeux orages de Dany Fortune, la douleur sur les traits ridés de Diane Valentine, la mort sur la face de Frevo, la ruine dans le corps mécaniques de Samba… Fichtre, cela devenait de l’obsession, mais il s’en foutait. C’était distrayant de se vautrer dans la haine et la rancœur.

La remarque de Mélodie le fit sortir de ce songe malsain. Il regarda la belle actrice et se contenta d’un hochement de tête. Hésiter ? Pourquoi ? Lui-aussi allait sous peu s’emmerder. La cérémonie, il la connaissait. Il avait mieux à faire. Surtout, sortir du programme, ça l’amusait. Qu’est-ce que voulait lui montrer Mélodie dans les toilettes ? Il compta deux minutes puis, silencieux, partit vers les WC. Ses semelles crissaient légèrement sur le sol, son largement étouffé par la musique. Arrivé à la porte, il actionna la poignée, entra, referma. Il ne savait pas si on l’avait vu mais il s’en fichait. Il souhaitait juste que la surprise allait lui plaire.
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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 10 lundi 05 novembre 2018, 14:33:05

Les toilettes étaient une pièce étonnamment large, et dans un style complètement différent du reste du bâtiment. L’émail blanc des éviers et les murs parcourus d’impeccables lignes bleues témoignaient d’une construction toute récente. La lumière était neutre et vive, légèrement aveuglante quand on avait passé plusieurs minutes dans le noir. Personne n’avait suivi Timothée, et Mélodie était seule dans la salle. Assise, jambes sur le côté, sur une plate-forme qui devait servir à changer les enfants, elle adressa un petit signe de main au souriceau pour l’inviter à s’approcher.

— Cool, t’es venu.

En avait-elle douté ? En tout cas, elle en paraissait contente. Elle portait un tailleur bien décolleté et une jupe, gris sombre, avec une large ceinture noire. Sa tenue la mettait en valeur, comme son maquillage léger qui rougissait ses joues.

— J’te préviens, c’est un peu chaud ce que je vais te montrer. J’espère que t’as pas froid aux yeux.

Elle avait au visage le même air de défi dont elle avait usé et abusé dans ses films. Même si son charisme provenait surtout, disait-on, de ses attributs féminins, ce demi-sourire et ce sourcil relevé faisaient toujours leur effet. L’actrice fouilla dans son sac à main.

— J’ai amené du shampoing, t’en veux ? Il est pur.

Elle ouvrit le creux de sa main, dans lequel il y avait une petite pastille rouge. Il ne s’agissait pas, bien sûr, de lotion capillaire, mais bien d’une drogue populaire tout milieu confondu. Si les variétés les plus populaires étaient coupées avec des substances encore moins recommandables, il s’agissait ici de la version la plus pure et de la plus onéreuse qui soit… même si ça n’avait rien d’évident au premier abord.

Le stupéfiant tenait son nom de la façon la plus commune de le consommer. Mélodie en fit aussitôt une démonstration. Elle ouvrit un robinet — les mains jointes en cuvette, pastille au milieu, elle recueillit le jet d’eau entre ses paumes, puis les retira dès qu’il y eut un petit centimètre d’eau. La pastille, effervescente, commença alors à mousser entre ses doigts. Les bulles formées étaient grosses et denses, blanches comme celles d’un shampoing. Enfin, elle aspira toute l’eau d’une gorgée, qu’elle laissa pétiller quelques instants dans sa bouche avant d’avaler.

Le shampoing, du moins dans sa forme raffinée, assurait des trips sûrs et bien définis dans le temps. Très vite assimilé par l’organisme, il n’avait aucune propriété hallucinogène, mais c’était en revanche un puissant euphorisant. L’espace de quelques minutes — le pic était atteint après environ dix minutes, après quoi les effets s’estompaient sur l’heure qui suivait — on se sentait à la fois heureux et tout puissant. Les zones du cerveau liées à l’angoisse et à l’inhibition s’éteignaient. Passé, présent et avenir paraissaient soudain radieux, et les pires ennemis devenaient presque des frères.

Les effets, bien sûr, différaient d’une personne à l’autre. Mais une des variantes les plus notoires se manifestait chez les mégas. De façon toujours très temporaire, le shampoing altérait l’expression de leurs pouvoirs. Souvent, il en résultait une faculté plus brutale, plus difficile à contrôler (voire même incontrôlable). Mais parfois, c’était plus subtil, ou c’était même un pouvoir complètement différent qui était découvert. Les mégas étaient assez rares pour que la chose ne soit pas forcément connue de tous, le dernier fait divers lié au shampoing remontant à déjà loin.

Déjà, de petits points rouges éclataient dans les iris de Mélodie, signe que le shampoing commençait à faire effet. On se référait généralement au phénomène comme étant des « étoiles filantes ». Selon la dose ingérée, une part significative de l’iris pouvait tourner au cramoisi — ce qui n’arrivait que pendant les premières minutes, après quoi il était plus facile de dissimuler une consommation.

— Par contre n’en parle pas à n’importe qui, hein. C’est un peu les jeux pour l’élite de l’élite. Toutes les rétines ne méritent pas.

Elle éclata de rire sans trop de raison et sortit son téléphone portable. C’était un grand modèle, avec un excellent écran. Elle tapota sur une application, et entra un code. Pendant qu’un écran de annonçait un chargement, elle posa l’appareil sur l’évier, entre le souriceau et elle. Puis elle tira sur son décolleté, qui visiblement commençait à la gêner un peu.

Mascotte

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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 11 lundi 05 novembre 2018, 16:08:52

« Du champoing ? » commença Timothée, songeant en premier lieu au produit capillaire.
Mais l’instant d’après, il comprit et cela se vit à son air. L’étonnement s’en fut, remplacé par de la curiosité. Encore une fois, il n’eut pas l’ombre d’une hésitation.
« Ho oui, je veux bien. »
Réponse calme, ferme. Cette drogue, il ne la connaissait que de nom. Elle était l’un des symboles de la décadence des riches. On en parlait avec mépris, mais on en rêvait sans l’avouer. Et si l’occasion se présentait, on y goûtait volontiers, pour se croire riche, pour se croire puissant, quand bien même ne s’agirait-il que d’une variante impure et toxique bien loin des promesses fantasmées par l’aura du produit.
« Il me faut te confesser, Mélodie, que ça va être ma première fois. Alors si je pars un peu trop en vrille, je compte sur toi pour me ramener dans le droit chemin. Ce serait bête que je gâche la cérémonie funèbre, Dany m’en voudrait, au moins un peu. »
Il eut un sourire plein de malice. L’actrice l’ignorait, mais elle était la première à entrevoir ce qui se cachait derrière le masque de l’aimable Petit Mage. Le souriceau qui se tenait devant elle n’était assurément pas un gamin naïf dépassé par son récent succès. Il semblait au contraire avoir parfaitement les pieds sur terre, d’être très conscient de ce qu’il faisait en cet instant, de ce que cela impliquait et… d’en avoir très envie. Lorsqu’il eut entre les doigts l’une de ses fameuses pastilles rouges, il l’observa, la manipula quelque peu. Combien coûtait ce machin ? Probablement plus que tout ce que lui avaient rapporté ses spectacles de rue. Maintenant, en revanche, s’était dans ses moyens. Il n’était pas sous tutelle, la Tech-13 avait géré pour lui tout le volet financier et juridique, mettant à sa disposition un compte bancaire qu’il œuvrait déjà à remplir. Un type aux cheveux grisonnants, qu’il n’avait rencontré qu’une seule fois, gérait les placements. Il n’avait pas tout compris à ce niveau, mais ce qui comptait, c’était que le nombre grimpe et qu’il puisse s’éclater avec.
Détachant son regard de la pastille rouge, il observa Mélodie procéder pour consommer correctement le stupéfiant. Les éviers étant un peu haut pour lui, il n’hésita pas à se hisser sur le bord, à s’y maintenir agenouillé. Il ouvrit le robinet, mit ses mains en bol, la mousse blanche envahie ses paumes. Il avala tout, se lava les mains, sauta au sol.
« Quelque chose d’un peu chaud, tu disais ? Tu sais, Mélodie, je viens du quartier sud. C’est un coin de sauvage. »
Son sourire malicieux s’élargit. À son tour, des petits points rouges éclatèrent dans ses pupilles.
« Croiser des types avec des cutters dans les ruelles, ça me manque presque. Quoi qu’il en soit, ne t’en fais pas. De tout ça, j’en parlerai pas. »
Il dévisageait l’actrice, la trouvait très belle. Était-ce un ange venu lui apporter la clef de sa cage d’ennui ? Son expression se modifiait subtilement. Il s’assit, proche de Mélodie, fixa le portable un instant, n’ayant pas la moindre idée de ce qu’il allait découvrir. Mais l’entrée en matière, déjà, lui plaisait. La drogue débloquait en lui des vannes, brisait des barrières. Il était un petit gabarie, il avait pris une sacrée dose. Une bonne partie de ses iris virait au rouge et son sourire ne semblait plus vouloir cesser de s’étirer. Il se demanda, amusé, à quoi pouvait ressembler un Tim sauvage dans un film de Ray.
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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 12 mardi 06 novembre 2018, 17:21:18

— C’est sûr que le shampoing c’est pas trop dans l’ambiance enterrement, gloussa la jeune femme. C’est bon, d’ici à ce qu’ils finissent, on sera redescendus.

Confiante, elle n’en était certainement pas à sa première dose. Elle n’avait pas l’habitude de consommer avec des hybrides cependant, et ne s’était pas spécialement posée la question de la dose. Une fois le psychotrope actif, de toute façon, on ne s’inquiétait pas de ce genre de détails.

Le chargement de son téléphone était terminé. Un splash screen se lança. En grosses lettres blanches sur fond noir, stylisées pour ressembler à un matricule de prison, apparaissaient le nom de l’émission : « NO LIMIT ».

— Comme tu vas présenter un jeu, j’me disais que ça pouvait t’intéresser. Y’a des épreuves comme ça, regarde.

Elle sélectionna un des nombreux contenus du replay — dans sa catégorie favoris personnels. C’était une vidéo qui avait plusieurs mois. Il n’y avait pas de voix off, mais des instructions écrites une nouvelles fois blanc sur noir. C’était le choix artistique de la saison. Les écrans se succédaient assez lentement, dans le silence, laissant planer une tension efficace. Ils indiquaient tour à tour :

« NO LIMIT.
Saison 7. Jour 59.
Dernier jeu avant la finale de saison.
Les détenus doivent infiltrer la banque de NO LIMIT, et en ressortir avec le contenu du coffre-fort.
Ils ont eu trois jours pour se préparer à cette épreuve.
Tous ceux qui se feront capturés ou qui échoueront à rapporter leur part du butin seront perdants. »

On voyait les participants s’organiser. En plus du plan de la banque, ils avaient eu accès à une armurerie et étaient tous lourdement équipés. À ce stade du jeu, ils n’étaient plus que quatre participants — l’épreuve était collaborative. Leurs portraits, dos à un mur, tenant entre les mains une plaquette de détenu, défilèrent rapidement. Tous étaient des hybrides : il y avait un cerf, un renard, un rat et un ours.

Mélodie passa un peu brutalement la phase d’introduction pour se retrouver au milieu du jeu. Les candidats rampaient dans un réseau d’aération. Il était plongé dans la pénombre — des caméras qu’ils portaient au front retransmettaient une image désaturée mais assez nette. Le montage passait alternativement de l’une à l’autre. Le cerf, qui était en tête, fit halte pour desceller une grille.

L’ouverture ainsi dégagée était à peine assez grande pour laisser passer ses bois. Il jeta un regard en contrebas, mais la lumière était éteinte.

— T’es sûr que c’est la salle de contrôle ? demanda-t-il au renard derrière lui.
— Ouais. T’as bien compté sept, pas vrai ?
— OK, je descends.

Il fit tomber une corde car le plafond était haut et glissa le long de celle-ci. À la seconde où son pied toucha le sol, une lumière vive emplit toute la salle, et une alarme stridente retentit. Le renard, qui avait commencé à descendre lui aussi, força sur ses muscles pour remonter précipitamment. Le cerf paniqué tenta de le suivre, mais deux tourelles sortirent du sol et commencèrent à le mitrailler de dards électriques.

Touché, il chuta de presque deux mètres, sur le dos. Gros plan, vu d’une caméra du plafond, sur son corps qui convulsait, le couple de canons ne s’arrêtant de tirer qu’après une dizaine de douloureuses secondes. Il resta recroquevillé, inconscient, sur le sol, alors qu’une flaque d’urine s’étendait autour de lui. Puis les lumières tombèrent de nouveau, et on entendit les tourelles se replier. L’épreuve continuait. On avait informé les prisonniers que ce n’était pas une infiltration réaliste : la défense était entièrement automatisée.

— Je vous l’avait dit. Ce symbole là signifiait capteur de pression au sol, fit le rat, pas sentimental. On va devoir se balancer. Filez-moi la corde.

Le rat était un prisonnier bien connu du public. Il avait remporté la saison précédente. Mélodie passa encore des morceaux de la vidéo pour arriver à un moment qui l’intéressait davantage.

Depuis la salle de contrôle, ils avaient réussi à ouvrir la porte du coffre fort. Dans celui-ci, il y avait un lingo par personne. Après un moment d’hésitation, les prisonniers (il en restait toujours trois) s’en saisirent. De nouveau, il y eut alors l’alarme.

Mais cette fois, une sortie à l’arrière de la pièce se débloqua, leur laissant l’accès à un long couloir. Au-dessus, un compteur s’illumina : ils avaient trois minutes. Il leur fallut alors courir, leur lingo dans les mains, vers une zone délimitée de l’autre côté. Sur leur chemin, des obstacles variés et brutaux. Cette partie n’était pas cartographiée : il fallait y aller à l’instinct. Le renard fut surpris par un jet d’eau brûlant qui surgit comme un geyser, mais se releva et recommença à foncer.

Mélodie avait arrêté de regarder depuis un moment. La suite, elle la connaissait. Le rat, qui était un méga doué de télékinésie, se servait de l’ours comme bouclier humain. Ils ne seraient que deux à atteindre la sortie lingo en main. L’actrice était redescendue de l’évier où Timothée s’était hissé. À genoux, sans faire de manière, elle avait commencé à déboutonner le pantalon de l’hybride.

Mascotte

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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 13 mardi 06 novembre 2018, 20:03:03

« No limit », lut Timothée, intrigué.
Mais au début, il eut bien du mal à faire vraiment attention à ce que le téléphone portable lui montrait. Il était en proie à des sensations nouvelles, la drogue le troublait profondément. Ce qu’il affichait, via son expression, via sa gestuelle, n’était que la face visible de l’iceberg. Il semblait plus décontracté, plus relax, mais il avait toujours à peu près eu ce genre de façade. En son fort intérieur, par contre, le champoing le décrispait pour la première fois depuis que sa vie avait basculé. Il respirait, enfin ! Il se sentait léger, c’était tellement grisant !
Devant lui, des images de violence. Elles lui arrachèrent un gloussement amusé.
« Mais c’est vachement fun ce jeu ! No limit, je connaissais pas… »
Non, le produit stupéfiant ne lui rendait pas son caractère d’avant. Il lui ôtait la culpabilité d’apprécier ce que naguère il rejetait avec force. Le fun, la violence l’éclatait. Pourquoi se prendre la tête ? Sa vie n’était pas un drame. Combien seraient prêt à tuer pour être à sa place ? Il devrait presque remercier Diane Valentine et Dany Fortune pour… Non non non, il n’irait pas jusque là, ou alors après les avoir massacrés, massacrés avec le sourire ! En cet instant, la personne qu’il avait envie de remercier, c’était Mélodie.
Il reprit conscience de sa présence, la découvrit en train de lui défaire son pantalon. Il ne sembla pas spécialement dérangé, au contraire.
« Ho, ma belle, je crois qu’on est partis sur de bonnes bases ! Au fait, je peux t’appeler ma belle, comme le colonel White ? »
Le rouge, dans ses prunelles, s’estompait. Mais sa voix tremblait, ses doigts aussi. Il avait un sourire un peu dingue et le regard pétillant. Derrière lui, sa queue dansait une drôle de gigue. Ces toilettes, c’était son petit nuage ! Mélodie l’avait hissé dans les cieux !
Il prit le téléphone, fébrile, captivé par la vidéo, n’en perdit plus une miette. Pour autant, il n’oubliait pas l’actrice, allait être pleinement coopératif, voulait continuer de monter, monter, monter toujours plus haut dans le ciel de ce trip bel et bien débuté. Ses moustaches vibraient, ses oreilles étaient en position haute, le beau fixe !
« Ho, c’est fini », dit-il avec une pointe de regret, vite effacée.
Il manipula le téléphone, revint sur la liste des vidéos, lut les titres, des titres évocateurs.
« Par les fées, mais y’a vraiment des humiliations et des mises à mort ? C’est… trop… fort ! »
Timothée venait de mourir. Gloire au nouveau Timothée ! Il tendit l’appareil à Mélodie, quasiment extatique.
« Vas-y, ma belle, montre-moi la plus jolie mise à mort ! »
Monter toujours plus haut ! No limit, pas seulement dans cette émission sensationnelle.
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Re : Les Chroniques de Mobius, acte 5

Réponse 14 mardi 06 novembre 2018, 22:46:34

– Woah, t'y prends vite goût ! T'es un petit pervers en fait ! s'amusa-t-elle, provocatrice.

Mélodie finit de retirer le bas de Timothée, avant de se relever pour appuyer rapidement sur un des contenus. L'application n'avait pas de secret pour elle.

– C'est la fin du gars que t'as vu tout à l'heure. Dommage pour lui il était bien parti. Mais le public l'aimait pas, et c'est ça le plus important à la fin.

La vidéo commençait par le même titre que pour le jeu – mais on avait ajouté une trace de sang frais sur le fond sombre. Elle masquait légèrement les lettres. L'image fondit au noir, avant qu'un spot blanc ne vienne brusquement former un V de lumière au milieu de l'écran. Elle éclairait le cerf qui avait été le premier à perdre dans l'épreuve précédente. L'hybride était nu, les mains attachées en arrière à un poteau. Puis des diodes plus diffuses constituèrent autour de lui, sur le sol, un cercle plus large. Les autres candidats se tenaient debout à l'extérieur du rond, à demi-éclairés, libres de leurs mouvements.

La caméra filma par terre, sur lequel un texte lumineux apparut dans la police habituelle. Il était visible aussi bien des spectateurs que des prisonniers (même si ceux libres devaient le lire à l'envers).

« Détenu. Vous avez échoué.
Vous êtes le neuvième perdant de la saison 7.
Dans la défaite, vous n'êtes plus qu'un animal.
C'est à vos bienfaiteurs de disposer de vous.
L'abattoir ou la souillure.
L'humiliation ou la mort. »

Dans No Limit, on ne sortait jamais indemne d'une défaite. Les candidats pouvaient revenir dans le jeu s'ils n’écopaient que de l'humiliation. Certains, cependant, ressortaient trop marqués par l'expérience pour avoir une chance de briller par la suite. Ils perdaient alors de nouveau et on leur faisait rarement la faveur de les épargner une seconde fois.

Le jeu laissa un long moment de suspense, filmant le visage des participants en gros plan. Le cerf semblait déjà un peu résigné. Peut-être en avait-il assez de cet enfer. Sourire sur le visage du rat, inconfort sur celui du renard. Enfin, les lumières passèrent en un instant au rouge vif, alors que s'inscrivait sur le sol :

« LA MORT.
Le boucher a été désigné.
Il est le tueur aux mains d'acier.
L'araignée tragique. Le médecin fou.
L'artiste de la douleur. L'ange de l'agonie.
Entre… »

Mélodie avait commencé à masturber Timothée. Le shampoing n'incitant pas à la patience, elle avait entreprit presque immédiatement de prendre son pénis en bouche. Une de ses mains tenait fermement la base de son sexe, pendant que les ongles de son autre main s'enfonçait dans la chair d'une de ses fesses.

« SAMBA. »

Contre-plongée sur le robot dont le souriceau ne pouvait que se souvenir. Mis en scène, il était encore plus effrayant. Ses deux yeux superposés, les détails de la lumière rouge qui se reflétait sur ses articulations de métal étaient macabres. Pour l'occasion, une de ses pinces avait été remplacée par une scie circulaire. Il l'enclencha, juste pour le terrible son qu'elle produisait.

Ce n'était pas la première fois que Samba apparaissait dans le show. Les spectateurs le connaissaient, et les candidats aussi. D'ailleurs, le cerf perdit aussitôt l'indifférence qui ne l'avait pourtant même pas quittée au moment de l'annonce de la sentence. Ses yeux s'emplirent de terreur alors qu'il lâchait « merde, non » paniqué. Le robot n'était en effet pas réputé pour prodiguer les exécutions les plus brèves du jeu… ce qui expliquait son succès. Quand il était proposé par la production (ce qui n'arrivait heureusement que de temps en temps), il était choisi presque systématiquement par les votants.

Timothée allait le voir – il pouvait presque s'estimer heureux du traitement qui lui avait été réservé. Samba prenait soin de découper ses victimes morceau par morceau. Si nécessaire, il posait un garrot pour éviter une perte de sang. Quand le prisonnier menaçait de perdre conscience, il lui injectait une dose d'adrénaline. Pour le cerf, il commença par scier les bois. Puis, avec une précision chirurgicale, il découpa les paupières de l'hybride, lui interdisant à jamais de fermer les yeux. Oreilles, langue, sexe, testicules, membres, et enfin yeux – presque tout serait démonté sur le candidat encore vivant. C'était son numéro classique.

– Tu me baises ? demanda Mélodie, moins captivée que Timothée par une vidéo qu'elle avait déjà vue. Je peux aussi appeler Will s'tuv. Il adore les plans à trois.


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