La Chasse Sauvage [Maud de Rehen]

Qui aurait cru que Vesa, d’habitude timide et effacée, puisse avoir une partie si dominante en elle ? Car, somme toute, c’était bien cela qui s’était exprimé devant ce lac : une situation de domination. Vesa  avait ordonné à Maud de la faire jouir, et cet orgasme... Cet orgasme lui avait fait du bien, tout simplement ! Elle papillonna des yeux, en voyant ensuite Maud se relever, tout en lui demandant ce qu’elles devaient faire. Vesa ne répondit pas sur le coup, préférant plutôt observer la belle paladine se relever. Avec l’eau ruisselant sur son corps, Maud était vraiment magnifique. Vesa avait une belle vue sur sa lourde poitrine, sur son corps de poupée. Elle en rougit légèrement, mais la jeune femme était désormais soulagée, et Vesa lui sourit donc, avant de se relever à son tour.

« Eh bien... Déjà, on récupère nos affaires, Maud, je ne compte pas me balader nue non plus. Et, même si j’adorerais aussi rester des heures dans tes bras, le devoir nous appelle. »

Ensuite ? Vesa avait quelques coups à vouloir rendre. Le baron, le Professeur... Ce n’était pas les options qui manquaient. Elle savait que leurs ravisseurs étaient partis vers l’un des villages attaqués par la Chasse Sauvage, mais il fallait aussi rendre justice auprès du baron, qui soutenait et appuyait des criminels. Capturer des paladins et les torturer comme le baron l’avait fait était un crime passible de la peine capitale, voire pire encore, d’un internement à la Prison Eternum. Vesa hésitait entre les deux options.

Les deux femmes retournèrent pour l’heure à la cabane dévastée. Le cadavre du basilic était toujours là, tout comme la cabane, à moitié dévastée. À l’intérieur, elles purent se changer, sans croiser, fort heureusement, qui que ce soit. En enfilant sa tenue, puis son armure, Vesa dut quand même admettre qu’elle se sentait mieux... Même si l’orgasme qu’elle venait d’avoir y était pour beaucoup aussi. Détendue et sereine, elle observa ensuite brièvement la carcasse du basilic.

« Je dirais que nous avons deux options, Maud... »

Il y avait une carte dans la cabane, qu’elle étala sur une table, repoussant quelques débris dessus pour pouvoir mieux la lire. Son doigt se pointa sur un village au nord :

« Première option : nous poursuivons le Professeur et ses hommes. Ils se sont rendus visiblement ici, à Locbourg, là où un village a été attaqué par la Chasse Sauvage. »

Son doigt se déplaça ensuite, et s’appuya sur un village au sud de la carte : Blanchefleur. Là où elles avaient affronté un dragon et où Maud avait défié un Spectre de Midi.

« Deuxième option : nous retournons à Blanchefleur rendre justice auprès du baron local pour nous avoir enlevé et séquestré. Ce faisant, nous pourrons aussi obtenir des informations sur l’organisation de ce Professeur, et pouvoir ainsi coordonner son démantèlement... »

À la base, elles étaient surtout venues à Velen pour se renseigner sur la présence de la Chasse Sauvage, mais la justice était l’un des devoirs sacrés que les paladins se devaient de rendre.

« Qu’est-ce que tu en penses, Maud ? »

Si Maud au départ avait commencé par maîtriser les choses, à dominer, et bien, sur la fin, cela avait été l’inverse. On pouvait dire que cette soirée qui avait été plus que mouvementé avait permis aux deux femmes d’en apprendre plus sur elle-même, et c’était une bonne chose. Donc, une mauvaise expérience au départ, qui s’était finalement métamorphosé en bonne expérience. C’est plutôt chouette comme conclusion non ? Mais ce n’était pas une conclusion, les deux femmes avaient encore beaucoup à faire, et elles devaient encore se serrer les coudes, si elles voulaient arriver à faire tout ce qu’elle avait à faire. Cela n’allait pas être facile, mais à elle deux, et bien, il était sur qu’elles allaient y arriver ! Et y arriver magnifiquement, car elles allaient pouvoir maintenant former une super équipe !

« Eh bien... Déjà, on récupère nos affaires, Maud, je ne compte pas me balader nue non plus. Et, même si j’adorerais aussi rester des heures dans tes bras, le devoir nous appelle. »

« Totalement ! »

Elle retournèrent alors toutes les deux dans la cabane. Celle-ci était fortement délabrée, mais leur affaire y étaient encore, heureusement. Maud retrouva ses vêtements, et était bien contente de les avoir de nouveaux. C’était quand même mieux. Elle dénoua alors sa seconde tresse, lui donnant des cheveux long et mauves... Pourquoi cela ? Et bien, car elle commença à se coiffer et se faire une queue de cheval, pour rattraper le fait qu’elle avait perdait une tresse, tombé au combat contre le fameux basilic... Donc, quoiqu’il en soit, maintenant, elles étaient toutes les deux habillées, et cela était quand même mieux. Elles n’allaient pas rester nue, comem l’avait très bien dit Vesa ! Celle-ci d’ailleurs déroula une carte sur la table, que Maud commença à examiner avec son interlocutrice :

« Je dirais que nous avons deux options, Maud...  Première option : nous poursuivons le Professeur et ses hommes. Ils se sont rendus visiblement ici, à Locbourg, là où un village a été attaqué par la Chasse Sauvage. »

La proposition était intéressante. Elle leur permettrait d’avancer... Mais aurait un gros soucis quand même, c’est de se jeter dans la gueule du loup, sans savoir ce qui les attendait. Un plan risqué, mais qui pouvait s’avérer véritablement victorieux si les deux femmes arrivaient ainsi à vaincre leur adversaires. Bon nombre de connaissances, et avoir plus de chance de vaincre aussi la Chasse Sauvage, car c’était quand même pour ça que les deux femmes étaient venus dans la région à l’origine. Cela aurait donc un avantage non négligeable... Et surtout que la fameuse Maud n’était pas du genre à être arrêté par le manque de connaissance. Elle était plus dans l’optique « fonce-dans-le-tas », ce genre de technique qui parfois marchait... Parfois ne marchait pas véritablement, on va bien le dire.

« Deuxième option : nous retournons à Locbourg rendre justice auprès du baron local pour nous avoir enlevé et séquestré. Ce faisant, nous pourrons aussi obtenir des informations sur l’organisation de ce Professeur, et pouvoir ainsi coordonner son démantèlement... »

La seconde option les forçait à retourner sur leur pas, mais présentaient l’avantage non négligeable de leur permettre d’en savoir plus sur ce qui pourrait être un véritable ennemi. C’était fou comment c’était classique que dans des situations de véritables problèmes, et bien, les humains pouvaient quand même se retrouver à se tirer dans les pattes. Après tout, la logique devrait quand même dire que les humains devraient se concentrer sur la Chasse Sauvage... Mais voilà, il fallait comprendre qu’il y avait à gagner dans toutes ses histoires, et parfois, c’était beaucoup à gagner. Donc, en toute logique... Et bien, on se retrouvait avec des affrontements. Bref, Maud pesait le pour et le contre des deux propositions, et elle-même, ce qu’elle en pensait, et finalement, Vesa lui demanda son avis :

« Qu’est-ce que tu en penses, Maud ? »

« Pour moi, il n’y a pas de doutes. »

Elle déclara cela sérieusement, s’asseyant sur la table où Vesa avait posé la carte. Encore une fois, il y avait toujours ce léger décalage entre les deux femmes, avec une Vesa plus sérieuse et plus carré, et une Maud plus libre et « ronde » disons dans sa façon de penser. Maud n’avait en effet pas de doute sur ce qu’elle voulait faire. Cela ne voulait pas dire que c’était ce qu’il fallait faire, mais voilà... Au moins, elle avait quand même réfléchis à cela pendant un moment, avant de simplement dire ce qu’elle estimait vouloir faire, montrant une évolution. Contrairement à bien souvent, elle pouvait argumenter ses propos... Et cela était une force dans ses déclarations, cela ne faisait aucun doute. Quoiqu’il en soit, elle commença à déclarer alors à son interlocutrice, toujours assise sur la table :

« Je vais l’avouer, mes raisons sont bonnes et mauvaises. Je t’explique, je veux vraiment me venger contre ce baron pour ce qu’il nous a fait. Il doit payer... Je sais que la vengeance n’est pas digne d’un paladin, mais voilà. »

Ouille... C’est vrai que ça commençait mal, on va pas se cacher. La vengeance n’était pas justice, cela, au moins, elle le reconnaissait. Cependant, voilà... Si elle savait que ce qu’elle voulait, c’était une vengeance, et bien... Cela n’excusait pas, elle voulait QUAND MÊME faire une vengeance, et ça... Bah, c’est pas bien. On pouvait supposer, elle ne l’avait pas dit clairement, mais ce n’était pas trop difficile à deviner, que c’était donc ça qu’elle voulait dire par « Mauvais raison »... Maintenant, il restait la bonne, et on allait bien le dire... Elle avait intérêt d’être bonne, car là, pour le moment, elle faisait surtout et bien... Se flageller encore en mode « C’est pas bien ce que je fais ». Ainsi, elle continua alors ses déclarations, avec plus de vigueur cette fois :

« Mais j’ai une vraie et noble raison. »

Elle arrêta alors de se pourfendre, s’attaquer elle-même etc. Il faut dire, à ses yeux, elle n’avait fait que reconnaître ses défauts. Oui, elle voulait se venger, et oui, elle avait parfaitement conscience que c’était pas forcément un choix moralement juste. D’ailleurs, si elle avait été toute seule, elle serait immédiatement partie le faire. Là, heureusement, elle était accompagnée de Vesa, qui pouvait éventuellement la convaincre de ne pas faire cela, et de rester dans une posture plus droite, et surtout plus rigoureuses envers elle-même. Bref, Vesa avait une excellente influence avec la fameuse paladine aux cheveux mauves. Quoiqu’il en soit, après une petite pause, elle commença à déclarer :

« Tu te souviens j’ai affronté le Spectre de Midi ? J’étais accompagné d’hommes. C’était des bons gars. Savoir qu’ils sont dirigé par un tel fils de pute me dégoûte. Ils méritent bien mieux. Nettement mieux. »

Voilà... Peut-être que Maud n’était pas une bonne paladine. C’est vrai. Mais s’il y avait un truc où elle pourrait exceller, c’était en temps que générale. Elle avait une ardeur, une pêche pour motiver et diriger des troupes, et surtout, quand elle avait des hommes sous sa juridiction... Et bien, elle voulait qu’ils soient à l’abri. Bien sur, elle restait Maud, et se considérerait comme meilleur que tout les autres hommes ici présent... Mais voilà. L’idée que tout ses hommes vaillant, avec qui elle avait fêté la victoire, travaille et soit obligé de suivre un tel fils de pute... Cela la dégoûtait. Ils méritaient nettement mieux, vu leur courage et ce dont ils étaient capables... Maintenant, il fallait voir ce qu’allait dire la fameuse Vesa. Allait-elle accepter ce que proposait Maud ? Ou bien au contraire, penser que ses raisons étaient mauvaises ? On allait bien voir...

Vesa était sincère. Elle aussi, elle avait envie de réclamer justice pour le baron de Locbourg, mais... Techniquement, ça n’était pas leur mission. D’un autre côté, il était quand même difficile de faire l’impasse sur les manquements et les infractions du baron. Il avait séquestré deux paladins, et participait visiblement à un trafic d’esclavage avec des criminels. Certes, l’esclavage était légal à Nexus, mais la pratique en était encadrée. Il n’était pas possible d’asservir n’importe qui, et sûrement pas des paladins. Ne pas agir contre le baron, c’était donc prendre le risque de voir la réputation des paladins se détériorer, et l’injustice gagner. Maud n’hésita donc pas, et Vesa, après le plaidoyer de sa consœur, esquissa un léger sourire.

« Eh bien, pour être honnête, j’espérais que tu dirais ça. Moi aussi, j’ai envie de lui faire comprendre ce qu’il arrive aux salauds dans son genre, mais... Je ne voulais pas t’influencer ! »

Le Professeur pouvait bien se geler les miches à Locbourg, la justice était l’une des obligations des paladins. Leurs obligations déontologiques étaient claires. Peu importe la mission ou la quête sainte entreprise, dès lors qu’ils constataient une injustice, ils se devaient d’intervenir. Vesa était donc ravie de voir que Maud était sur la même ligne qu’elle. Les deux femmes sortirent donc de la cabane, pour rapidement se confronter à un problème logistique. Tous les chevaux étaient partis. Vesa haussa donc les épaules. Blanchefleur était assez éloignée, mais la route n’était pas loin. Qui sait ? Peut-être trouveront-elles une caravane en route ?

Vesa se mit donc en marche, et rejoignit le sentier au bout de quelques minutes. C’était le petit matin, et il n’y avait personne.

« Allons-y. »

Les deux femmes marchèrent donc, et il fallut bien attendre une dizaine de minutes avant qu’un bruit de chariot ne se fasse entendre. Les deux femmes tournèrent la tête, et aperçurent un charretier qui approchait, portant avec lui une série de tonneaux. Vesa arrêta son attelage, et l’homme les regarda, méfiant.

« Qu’est-ce que vous me voulez ?!
 -  Nous sommes des paladins d’Haven, brave homme, et nous cherchons à rejoindre Blanchefleur. Auriez-vous l’amabilité de nous prendre comme passagères ? »

L’homme les regarda toutes les deux, se demandant probablement ce qui amenait deux jeunes paladines à voyager sans cheval, mais, en même temps, leurs armures parlaient pour elles, et, en ces temps difficiles, il était plus prudent de voyager avec deux femmes en armures. Vesa acheva enfin de le convaincre en indiquant qu’elle voyageait en compagnie de Maud de Rehen, qui avait vaincu le Spectre de Midi, exploit dont le fermier avait entendu parler. Elles grimpèrent donc à l’arrière, et le chariot reprit. L’homme expliqua venir d’une exploitation viticole, et venait chaque matin renflouer le stock des auberges avec lesquelles l’exploitation était en contrat. Vesa l’écoutait silencieusement, sans trop savoir quoi dire, évitant de mentionner à haute voix qu’elles venaient arrêter le seigneur local.

Finalement, le chariot approcha de Blanchefleur. En chemin, leur guide avait naturellement demandé à Maud comment elle avait fait pour terrasser le Spectre de Midi.

« Les exploitations sont attaquées par de plus en plus de monstres... Si vous voulez nettoyer les campagnes, vous êtes la bienvenue, Madame. »

Vesa sourit, et la taquina doucement, en se penchant vers elle :

« Tu as trouvé un plan de reconversion, dis-moi... » glissa-t-elle.

Elle savait que ce n’était pas le genre de sujets avec lequel on pouvait plaisanter... Mais, après tout ce qu’elles avaient vécu, c’était plus l’expression d’une forme de complicité et de profonde camaraderie qu’autre chose.

Parfois, ce n’était pas des raisons nobles et juste qui te poussait à agir. Oui, il fallait bien le dire. Parfois, c’était ouvertement des raisons égoïstes, des raisons vénales, des raisons d’honneurs, des raisons d’envie personnel… Tout plein de raisons qui pouvaient t’amener à faire telle ou telle chose. Etait-ce une mauvaise chose ? Pas du tout ! C’était comme ça, c’était tout. c’était que parfois, les raisons pour une chose n’était pas des nobles raisons. Et dans ce cas présent… Et bien, Maud avait des raisons nobles et moins noble. Elle se demandait ce qu’allait penser son interlocutrice… Sans doute n’allait-elle pas approuver ce qu’elle disait. Encore une fois, elle continuait de prouver qu’elle n’était sans doute pas la meilleure des paladine, et sans doute pas celle qui maîtrisait le mieux le Crédo… Mais heureusement, un peu suprêmement pour la fameuse paladine aux cheveux mauve, et bien… Et bien son interlocutrice était complètement d’accord avec elle !

« Eh bien, pour être honnête, j’espérais que tu dirais ça. Moi aussi, j’ai envie de lui faire comprendre ce qu’il arrive aux salauds dans son genre, mais... Je ne voulais pas t’influencer ! »

« Parfait ! Allons-y ! »

Vesa déclara exactement la même chose, et les deux femmes partirent alors. La marche allait être longue, sans aucun doute. Elle se souvint qu’elles avaient été trainé pas mal de temps, avant de se retrouver là… Quoiqu’il en soit, cela allait faire de la marche, mais ce n’était pas tant une mauvaises choses… Mais heureusement, et bien, au bout de ce qui était environ… Une dizaine de minute environ, et bien, un bruit de chariot pu se faire entendre. Tant mieux ! S’il se dirigeait jusqu’à Blanchefleur, et bien, cela serait parfait. D’ailleurs, c’était plus que probable qu’il se dirige à Blanchefleur, car concrètement dans la direction où ils allaient… Et bien, il n’y avait pas forcément grand-chose à part Blanchefleur. Il y avait après la ville d’autres choses, mais il fallait forcément passer par cette ville. Vesa interpella alors l’homme, tandis que Maud restait un peu en arrière plan…

« Qu’est-ce que vous me voulez ?!
 -  Nous sommes des paladins d’Haven, brave homme, et nous cherchons à rejoindre Blanchefleur. Auriez-vous l’amabilité de nous prendre comme passagères ? »

Il sembla hésiter un moment, ce que, si ça agaçait légèrement Maud, elle ne lui en tint pas grief. Pourquoi cela ? Et bien, car elle suffisamment bien que beaucoup de carriole avait été détroussé ainsi, par des personnes qui se faisaient passer pour de simple voyageurs, et BAM, elle attirait ainsi dans un piège les pauvre marchands. Surtout qu’il était seul, donc, il devait avoir un peu peur des éventuels conséquences d’un braquage, car il ne pourrait absolument pas se défendre… Ce qui serait fort embêtant pour lui s’il se retrouvait confronté à des brigands. Heureusement, il arriva à se faire convaincre, et la route se passa bien, Maud se permettant même de raconter comme toujours ses exploits. Exploits qui visiblement, étaient totalement compris par l’homme, qui devait vivre cela… Et surtout, qui était très content de rencontrer Maud, qui luttait contre ses dits monstres, justement !

« Les exploitations sont attaquées par de plus en plus de monstres... Si vous voulez nettoyer les campagnes, vous êtes la bienvenue, Madame. »
« Tu as trouvé un plan de reconversion, dis-moi... »

« Eh eh, seulement si tu m’aides à tenir ton commerce. »

Elle joua sur l’humour également, en effet, elle pouvait commencer à réfléchir à sa conversion, mais uniquement si elle gardait dans ses bagages Vesa ! Elle rigolait bien, elle se disait que le fameux Ordre du Griffon n’apprécierait pas vraiment qu’une paladine parte dans le privée, et qu’elle emporte dans ses bagages l’une de ses consœurs ! Bref, évidemment, c’était de l’humour, et aussi bien la fameuse Maud que la fameuse Vesa le savait très bien. Pouvoir rigoler un peu, dédramatiser, penser à autre chose… Et bien, cela faisait du bien aussi bien à l’une que l’autre. Elles partaient toutes deux pour quelques choses qui n’allait pas être facile, et il fallait bien qu’elle puisse parfois se dédramatiser, pour être sûre qu’elle puisse à penser à autre chose… Après, il y avait aussi des choses importantes à penser pour leur mission, et cela, Maud ne l’oubliait pas.

« Dîtes moi mon brave…
-Oui ? »

Maud déclara cela gentiment, tranquillement, s’avançant vers son interlocuteur. Comme toujours, son jeune âge, et son air plutôt charmant aidait bien quand elle cherchait à avoir des renseignements… D’ailleurs, même quand ce n’était pas spécialement utile, comme ici ! Je veux dire, c’était complètement inutile là, il allait lui donner les renseignements qu’elle voulait… Mais voilà, c’était dans son caractère. Elle était comme un chat. Quand elle avait une proie, ou quoique ce soit, et bien, elle pouvait pas s’empêcher de quand même faire ses petits jeux. C’était comme ça, c’était dans son caractère… Bref, Maud commença alors à demander :

« Le baron actuel, que savez-vous de lui ?
-Oh, euh… Et bien, c’est un homme que nous le peuple on voit pas beaucoup. On sait qu’il a deux filles, mais elles ont été envoyés je ne sais où pour leur éducation. Sinon, on n’a pas à se plaindre. Des amis à moi se plaindraient des attaques, en l’accusant mais… Bah, à part quand on est douée comme vous deux, on peut pas faire grand-chose... »

Comme elle s’en doutait. Souvent, ce genre d’homme corrompu était quasi inconnu du peuple. Pour eux, leurs souverains, c’était juste une tête sur une pièce de monnaie. Rien de plus. Bref, elle en apprenait un peu plus… Déjà, qu’elle tombait sur un mec sage. Après tout, il avait pas totalement tord. Cela servait à rien de se plaindre sur le baron locale des attaques de la Chasse Sauvage, il n’y pouvait rien dans un sens… Mais Maud savait qu’il pourrait faire quelques choses. Les hommes de ce baron serait capable d’aider, s’ils n’étaient pas dirigé par un tel homme. Et donc, il avait deux filles. Envoyé quelques part pour leur éducation… Cela pouvait être bon signe comme extrêmement mauvais signe. Espérons pensait la fameuse paladine, qu’elle étaient bien envoyé autre part pour leur éducation, et que ce n’était pas pour une autre raison… Bref, Maud se disait qu’elle ne devait pas non plus être trop paranoïaque. Elle déclara alors à son interlocuteur :

« Merci mon brave ! »

Elle se tourna alors vers Vesa, et commença à chuchoter :

« Vesa, je pense qu’il faudra regrouper ses hommes après que nous ayons destitués ce baron pour trahison, et nommer un régent, un envoyé pour tenir la région. Si on attends trop, la région pourrait sombrer bien vite. »

Maud pensait politique. Elle ne connaissait pas vraiment comme Blanchefleur fonctionnait. Etait-ce un noble envoyé par l’état ? Etait-ce l’héritier mâle qui prenait le trone, car on fonctionnait dans un système de primogéniture cognative ? Ou bien, parfois, quand c’était une primogéniture où on s’en fichait du sexe de l’héritier… Bref, quoiqu’il en soit, maintenant qu’elle savait plus, elle commençait à parler avec Vesa de ce point. Peut-être était-ce allé trop loin dans les prorogatives de paladins… Mais concrètement, franchement, Maud s’en foutait. Elle, ce qui l’importait, c’était d’être sûre que les gens de Blanchefleur puisse vivre en paix, et dirigé par quelqu’un qu’ils méritaient. Encore une fois, elle avait guerroyer, rigolé, et combattu avec ses hommes. Et ils méritaient quelqu’un de bien. Franchement.

« Il y a une procédure particulière en matière de destitution, confirma Vesa. Il faudra évidemment en informer les gens. »

Elles allaient rester à Blanchefleur plusieurs jours le temps que la transition se passe. Nexus n’était pas un État démocratique, mais il existait une séparation des pouvoirs. Le pouvoir séculier n’avait pas à prendre place sur le pouvoir temporel. Autrement dit, les paladines d’Haven ne pourraient pas se substituer au baron. Elles pouvaient le destituer et le mettre aux arrêts, dans l’attente d’un procès pour décider de sa culpabilité et sur sa condamnation. De leur côté, Vesa et Maud devraient prévenir un certain nombre de personnes : leur ordre, le supérieur hiérarchique du baron, la Couronne en personne. L’État désignerait un régent en attendant que le procès ait lieu, mais Vesa et Maud allaient devoir rester sur place le temps que des renforts arrivent. Autrement dit, leur traque de la Chasse Sauvage serait mise en parenthèse, mais c’était là ce que leur devoir imposait.

Maud avait obtenu plusieurs renseignements de la part du charretier. Le baron avait deux filles qu’il avait envoyé ailleurs, très probablement à Nexus. Rien de très anormal ici, il était fréquent que les notables de province dépensent une partie de leur fortune pour offrir à leur progéniture une éducation à Nexus... Ou pour s’assurer qu’ils n’engrossent pas des paysannes locales, ou ne soient engrossées par des paysans locaux. Vesa ne s’en faisait donc pas trop pour elles, même s’il y aurait évidemment une enquête les concernant. La priorité actuelle, c’était de s’occuper du baron local, de le mettre derrière les barreaux.

Et, en la matière, peut-être bien que ce brave charretier allait pouvoir les aider... Du moins, c’est ce que Vesa se disait. Elle se pencha vers lui, et se racla doucement la gorge :

« Nous allons appréhender le baron.
 -  Hein ?! »

Vesa lui résuma la situation, et le charretier papillonna des yeux, médusé.

« Mais...
 -  Nous aurions besoin que vous réunissiez tous les gens disponibles sur la grand-place de Blanchefleur.
 -  Mais enfin, arrêter le Baron ?! »

L’homme, un simple serf, avait évidemment du mal à y croire. Dans le servage, on ne se révoltait pas contre son seigneur, mais, à Nexus, le droit seigneurial était strictement encadré. Les paysans l’ignoraient, mais les abus seigneuriaux n’étaient pas, sur le principe, tolérés. Las, ils étaient trop rarement sanctionnés, car les baillis étaient souvent corrompus, ou trop terrorisés pour remonter les éventuelles plaintes aux autorités compétentes.

« Le baron est une crapule qui s’acoquine avec des criminels, et je suis convaincue que, quand nous observerons sa comptabilité, nous verrons que la plupart des impôts prélevés sur ses serfs ne servent pas à leur finalité première. »

De tout temps, les contrôles fiscaux faisaient mal, et c’était encore plus vrai à Nexus, où les différents Ivory successifs avaient adopté des ordonnances fiscales depuis la guerre contre Ashnard pour mieux contrôler l’extraordinaire complexité du système fiscal féodal. En tout cas, le chariot finit par rejoindre Blanchefleur, et, un peu nerveux, le charretier s’acquitta auprès des gardes du droit de passage, puis rejoignit l’auberge.

Avant de se séparer de lui, Vesa posa sa main sur son épaule :

« Vous avez bien compris ce que nous attendons de vous ?
 -  Oui, mais... Euh... La moitié des gardes de Blanchefleur sont des brutes, vous... Vous comptez les neutraliser à vous deux ? »

Vesa observa brièvement Maud, puis sourit malicieusement en croisant les bras :

« Vous avez affaire à des paladines de l’ordre d’Haven, mon brave ! Ces lascars n’ont aucune chance contre nous ! »

Et ils allaient même clairement regretter ce qu’ils leur avaient fait en traître...

Elle bouda très légèrement quand elle eut la réponse de Vesa. Oh, c’était très gentil, hein, je vous rassure. C’est juste qu’elle avait pensé avoir trouvé une bonne remarque à dire, et puis… Bon sang, il fallait absolument que Vesa apprenne à mettre en confiance avec ses hommes. Bref, quoiqu’il en soit, elle était impressionnée, véritablement impressionnée. Vesa connaissait tout, maîtrisait tout, savait tout. Bref, qu’est-ce qu’elle se sentait inutile en comparaison. Elle était un gros bras qui maniait bien la lance, et… Et bah c’est tout. C’était frustrant, mais bon ! Elle savait que Vesa avait raison, et qu’elle connaissait tout mieux qu’elle ! Donc, elle devait écouter, un peu comme ferait une disciple avec une maître. Quoi ? Maud n’a rien écouté et rien compris de tout ce qu’avait dit Vesa sur la camaraderie etc ? Elle était toujours aussi… Aussi… Maud.

Ainsi, quoiqu’il arrive, la fameuse Maud de Rehen décida de ne rien déclarer, et juste écouter la discussion qui suivi. Bien poliment, bien gentiment. Un peu comme quand ta fille est tranquillement assise sur une chaise, et écoute paisiblement la discussion entre deux grandes personnes. Elle ne déclarait rien, et écoutait attentivement. Autant dire qu’elle avait totalement oubliée le fait qu’il y a quelques secondes, et bien, elle disait absolument, mais je dis bien absolument qu’elle boudait. Comme quoi, quand on est concentré sur autre chose, et bien, on oublie facilement ! Ahlala ! Ce sont des choses qui arrivent, comme on dit, faut pas s’en étonner. Bref, quoiqu’il en soit, elle ne remarqua rien de spécial dans les déclarations de son interlocutrice au dit marchant… Sauf une chose, une chose intéressante.

« Le baron est une crapule qui s’acoquine avec des criminels, et je suis convaincue que, quand nous observerons sa comptabilité, nous verrons que la plupart des impôts prélevés sur ses serfs ne servent pas à leur finalité première. »

Oh oui. Elle connaissait bien ça. Car elle savait que son père faisait exactement la même chose… Mmh… C’était le genre de truc qu’elle devait sans doute plutôt garder pour elle… Et ouais, les Rehen de façon… Fiscale… Et bien, sans doute qu’ils n’étaient pas très en règle. Bref, cela n’intéressait personne hein ? Quoiqu’il en soit, les deux femmes finalement arrivèrent à bon port, ou plutôt à Blanchefleur… Oui, car l’abbaye de Bonport, et bien, elle est plutôt en Bretagne. Mais passons. Quoiqu’il en soit, Maud descendit en première, et proposa de suite son aide à Vesa, tranquillement. Elle se demandait ce qui allait se passer, et décida d’un peu s’étirer pour faire craquer ses muscles. Là, elle allait devoir être en forme, car elle allait devoir être utile, elle le savait !

« Vous avez bien compris ce que nous attendons de vous ?
 -  Oui, mais... Euh... La moitié des gardes de Blanchefleur sont des brutes, vous... Vous comptez les neutraliser à vous deux ?
-Vous avez affaire à des paladines de l’ordre d’Haven, mon brave ! Ces lascars n’ont aucune chance contre nous ! »

« Merci bien mon brave, mais n’ayez pas d’inquiétude, on va gérer. »

Elle lui donna un petit coup de poings sur l’épaule, pour lui faire comprendre que tout allait bien se passer. Ouais, Maud pouvait errer dans cette zone de flou entre comportement très « viril » puis très « féminin », suivant la situation, car elle savait bien que plus d’une fois, un comportement devait changer pour mieux fonctionner. Ainsi, avec le fameux marchands, et bien, elle savait, enfin, elle pensait qu’elle devait plutôt avoir une attitude plutôt masculine, cela le mettrait en confiance ? Bref de toute façon, il partait. Elle regardait avec des yeux fascinées Vesa… Comment elle faisait pour tout maîtriser aussi bien que ça ! Elle ne pouvait qu’être admirative devant tant de puissance et de charisme. Elle déclara alors :

« Vesa ? Quel est le plan maintenant ? Veux-tu que je prépare un discours pour les gens du peuple ? Ou bien... »

Elle se proposa immédiatement, car elle savait motivée les troupes. Elle savait comment faire parler et mettre en avant les valeurs des gens pour qu’ils se sentent utile. Cela vous semble ironique ? Une personne aussi vantarde qui sait motiver les troupes ? Et bien malheureusement -ou heureusement dans ce cas- c’était souvent les personnes les plus vantardes qui savaient le mieux motiver des troupes. Car ils savaient comment motiver des gens. A votre avis, pourquoi les Blondezillas, et autres martyriseurs au Lycée arrivent à avoir autant de popularité ? Bref, quoiqu’il en soit, Maud demandait, car elle ne voulait plus faire quelques choses sans demander l’autorisation à Vesa. Trop peur de faire une bêtise. Eh beh ! Elle s’était vraiment assagie… Malheureusement, sans Vesa, elle allait sans doute retomber dans ses travers, il fallait pas croire… Bref elle déclara alors l’autre possibilité :

« On va directement régler notre compte avec le baron ? »

Elle frappa dans son poing. Et ouais… elle était toujours aussi… Maud ! Puis, elle avait compris que… Bah, elle était visiblement pas trop douée pour la réflexion et tout ses trucs du genre. Donc, elle se mettait, ou plutôt, elle mettait à disposition sa force et son talent de combattante. C’était ça qui pouvait être utile, sans aucun doute. Bref, quoiqu’on dise, elle comprenait qu’elle était plus utile à Vesa, et aux paladins si elle se contentait de suivre brillamment les ordres ! Et autant, elle n’aurait pas fait l’effort pour d’autres… Mais après avoir découvert le côté dominant, dominateur même de Vesa, et bien, il fallait l’encourager ! Ainsi, elle déclara en plus de ce qu’elle avait dit précédemment :

« Pas que ça me gênerai de me faire quelques combats, le basilic n’a pas suffit à satisfaire ma colère, je l’avoue ! »

Elle déclara cela avec le sourire, et attendait tranquillement ses ordres, un peu comme le marchand de tout à l’heure… Et… Et bah cela ne la dérangeait pas ! Après tout, si cela serait n’importe qui d’autres que Vesa, cela serait gênant, mais le fait que c’était Vesa, et bien cela ne la dérangeait pas. Elle savait que Vesa pourrait l’aider, et la soutiendrait ! Donc, voilà, elle pouvait lui faire confiance. Maintenant, il fallait voir ce qu’elle pouvait faire. En attendant, et bien… Elle faisait tranquillement tournoyer sa lance, effrayant d’ailleurs un chien qui était pas loin, qui commencé à aboyer fortement mécontent que la fameuse paladine. Celle-ci grogna en direction du canidé, qui préféra alors prendre courageusement la fuite, non sans aboyer une dernière fois sur Maud. Celle-ci, une fois cela fait, se tourna vers Vesa, et fit un sourire gêné. Elle devait avoir eu l’air un peu ridicule, c’est ça ?

Vesa n’avait pas senti le ton boudeur de Maud. Elle avait agi naturellement, sans se douter que sa position aurait pu gêner Maud. Après ce qu’elles avaient fait au lac, elle n’avait d’ailleurs aucune raison de croire que Maud puisse bouder. Comme quoi, chassez le naturel... Quoi qu’il en soit, Vesa avait d’autres projets en tête, à savoir neutraliser le baron. Et, là-dessus, maud était également impatiente d’agir. La paladine réfléchit pendant quelques secondes, alors que Maud se lançait en plein duel avec un chien, et glissa finalement ce qu’elle avait en tête :

« Si je me souviens bien... À onze heures, il y a foule devant le manoir, c’est là que le baron diffuse les annonces légales quotidiennes. »

C’était en effet à cette heure que le crieur public se rendait sur une estrade devant le manoir seigneurial pour annoncer au public toutes les annonces administratives : les hausses d’impôts, les décisions de justice, les acquisitions de propriété, etc... C’était donc l’occasion idéale pour confondre le baron, car il y aurait du monde. Pour elle, c’était le meilleur moyen d’agir. En attendant, il fallait mieux se montrer discrètes, pour éviter d’attirer la garde...


« Oyez, oyez ! »

Il y avait inhabituellement du monde ce matin autour du crieur public. Soit le charretier avait diffusé l’annonce, soit ils venaient ici suite au récent combat contre le Spectre du Midi. La défaite du spectre avait été largement répandue, avec la perspective de pouvoir récupérer la ferme. Les agriculteurs étaient donc là. Ils étaient régulièrement confrontés aux attaques de monstres, d’animaux sauvages, et savaient combien la garde publique était souvent peu apte à les défendre. Ils étaient donc naturellement intrigués de savoir ce qui s’était passé.

Le crieur se racla la gorge, et ouvrit son parchemin, avant de commencer par les évènements exceptionnels :

« Comme vous le savez sûrement déjà, le Spectre de Midi qui avait envahi la ferme de Tom Ollander a finalement été vaincue grâce à un effort exceptionnel de nos soldats. Nous tenons chaleureusement à les remercier pour cet exploit, et précisons qu’un Huissier de Justice a été mandaté pour déterminer précisément l’état de la ferme, afin de pouvoir reprendre la succession de feu Monsieur Ollander... »

Il y eut un certain brouhaha dans la foule. Pas un mot sur la paladine qui était intervenue ? Tous savaient pourtant que c’était elle qui avait vaincu le Spectre de Midi... Mais, entre les rumeurs et les racontars, ce genre de mensonges étaient fréquents. Le crieur se racla la gorge, et tourna la page, comptant passer aux autres annonces... Quand une voix forte résonna soudain à l’intérieur de la foule :

« MENSONGE !
 -  Le baron a contresigné hier l’acte d’acquisition du terrain de Monsieur Josselin au profit de la coopérative agricole locale, pour le prix de...
 -  MENSONGE !! » répéta la voix.

Deux silhouettes encapuchonnées arrivèrent alors devant les marches du manoir. Surpris, le crieur cligna des yeux en levant la tête de ses parchemins. Les gardes devant le manoir se regardèrent brièvement entre eux, observant les deux silhouettes. Elles portaient chacune un long manteau sombre avec une capuche.

« Vous n’avez pas à déranger une annonce publique, voyageurs, et je... »

Les manteaux tombèrent alors, et, sous les yeux surpris de l’assemblée, Maud et Vesa apparurent, dans leurs armures scintillantes.

« Nous agissons au nom de l’Ordre du Griffon et de la Couronne royale de Nexus ! Votre baron est accusé d’être un criminel, une crapule doublée d’un fieffé menteur ! Nous lui ordonnons de se rendre aux autorités sans délai et de répondre de ses actes devant un procès équitable ! »

Les gardes allaient-ils les laisser faire ? Une certaine agitation régnait dans la foule, mais certains reconnaissaient Maud, et murmuraient entre eux.

« C’est elle qui a vaincu le Spectre...
 -  Des paladins... »

Maud avait parfaitement confiance en Vesa. Certes elle était toujours aussi égocentrique, narcissique, et... Bah, c’était Maud quoi, mais elle avait maintenant parfaitement confiance en les capacités de jugements de Vesa, et elle se disait que si celle-ci voulait dire quelques choses, ou quoique ce soit, et bien, elle serait prête à le faire. Maintenant, il fallait qu’elle sache, étant donné qu’elle était pas douée pour tout les plans. Elle gardait sa lance, mais elle se réservait le droit de l’utiliser ou non suivant la situation. Attendant tranquillement ce qu’allait déclarer la fameuse Vesa... Après qu’elle se soit énervée contre un chien, après tout, cela faisait partie de tout ce qui s’était passé ! Donc, Vesa déclara :

« Si je me souviens bien... À onze heures, il y a foule devant le manoir, c’est là que le baron diffuse les annonces légales quotidiennes. »

« On y sera Vesa ! »

Maud donna à son tour un petit coup de poing sur l’épaule de Maud, et lui offrit un grand sourire. Elle devait sans doute se préparer pour ce qui allait suivre. Cela n’allait pas être facile, mais Maud pensait ouvertement qu’avec elle deux aux commandes... Cela allait assurer ! Après tout, on arrêtait pas une aussi bonne équipe qu’elle deux ! Elles étaient inarrêtables ! Mince, je veux dire, elles avaient été enlevés, elles s’étaient libérés, elles avaient battus un basilic, et surtout, le plus important dans l’histoire... Elle s’était lachée dans un lac ! Donc, franchement, maintenant, elle était les meilleures, et de loin ! Ouais, Maud était totalement motivée, et on pouvait dire que cela faisait plaisir à voir...

***

« Oyez, oyez !  Comme vous le savez sûrement déjà, le Spectre de Midi qui avait envahi la ferme de Tom Ollander a finalement été vaincue grâce à un effort exceptionnel de nos soldats. Nous tenons chaleureusement à les remercier pour cet exploit, et précisons qu’un Huissier de Justice a été mandaté pour déterminer précisément l’état de la ferme, afin de pouvoir reprendre la succession de feu Monsieur Ollander... »

Deux silhouettes encapuchonnées s’approchait du crieur public. Les crieurs publiques étaient très important, car ils étaient les prinicpaux moyens de communications entre le peuple et la noblesse. C’était donc un poste à la foi convoité, craint, et surveillé. Bref, le genre de poste qui n’était pas forcément le meilleur du village, bien qu’il avait l’avantage non négligeable... De rapporter pas mal. Et ouais, c’était bien souvent l’appat du gain qui motivait les gens à prendre ce poste, bien qu’ils savaient que cela pouvait être risqué pour eux. Bref, quoiqu’il en soit, il parlait tranquillement, enfin, criait, et expliquait donc la victoire des soldats sur le Spectre de Midi, et ainsi, le fait que bientôt, la ferme allait visiblement être acheté par quelqu’un... Maud, bien cachée dans son capuchon, écouta Vesa déclarer :

« MENSONGE !
 -  Le baron a contresigné hier l’acte d’acquisition du terrain de Monsieur Josselin au profit de la coopérative agricole locale, pour le prix de...
 -  MENSONGE !! »

Ce fut Vesa qui parla en premier. C’était elle qui pouvait couper le fameux crieur public. Maud elle restait pour le moment en retrait. Elle avait gardée sa cape, comme dans un geste absolument théâtrale, faisant attendre le plus possible avant de se révéler. Et ouais, c’était scénarisé à mort mon vieux ! Bref, le crieur public semblait bien destabilisée par ce qui commençait à se passer. Visiblement, il n’arrivait pas du tout à savoir qui étaient ses deux voyageurs qui se cachaient comme ça. Sans doute une menace... Mais de quel ordre ? Des ivrognes qui tentaient de couper son discours, et bien, il en avait eu des tas, mais des tas... Mais il n’était pas complètement stupide, il sentait bien que ses interlocuteurs n’étaient pas des ivrognes, cette fois... Mais jamais il ne se serait attendus à ce qui allait suivre.

« Vous n’avez pas à déranger une annonce publique, voyageurs, et je... 
-Nous agissons au nom de l’Ordre du Griffon et de la Couronne royale de Nexus ! Votre baron est accusé d’être un criminel, une crapule doublée d’un fieffé menteur ! Nous lui ordonnons de se rendre aux autorités sans délai et de répondre de ses actes devant un procès équitable ! 
-C’est elle qui a vaincu le Spectre...
 -  Des paladins... »

« Vesa... Si ça dégénère, je compte sur toi pour protéger le peuple. »

Elle donna un nouveau petit coup sur l’épaule de Vesa, lui offrit son plus beau sourire, et se dirigea vers l’estrade, la hauteur où était placé le crieur. Celui-ci tenta de protester, mais un regard noir de la fameuse Maud lui confirma qu’il valait mieux qu’il se taise, et qu’il laisse la fameuse Maud parler... Qu’allait-il dire ? Tous se demandaient ce qui allait se passer. Cette jeune femme, celle qui avait visiblement vaincu le spectre de midi. Les murmures étaient très important, mais presque personne n’osait quelques peu levé la voix de peur que cela finisse mal. Maud avait peu de temps pour parler, avant que la situation dégénère, car elle doutait fort peu que cela allait se passer aussi bien avec le baron qu’avec le peuple. Mais qu’importe, c’était à elle de parler, elle avait confiance en Vesa, et Vesa avait confiance en elle. Elle déclara donc :

« HABITANT. HABITANTES. »

De suite, les murmures se turent. Visiblement, Maud avait réussi à capter l’attention du public. On pouvait remarquer qu’elle gardait sa longue cape. Bien entendu, c’était fait exprès. Pour parler au peuple, mieux valait lui ressembler, vous comprenez ? Si elle révélait sa tenue, sa lance, elle montrerait ouvertement qu’elle était bien au dessus d’eux ! Et ouais, n’oubliez pas qu’on parle de Maud, et Maud est... Comment dire... Disons qu’elle pête plus haut que son cul plus d’une fois par semaine. Mais là, elle était sérieuse et concentrée. Maintenant que tout le monde était bien concentrée, que les murmures s’étaient tus, bref, que tout était parfait pour la mise en scène, Maud commença à déclarer :

« C’est vous qui avez vaincu le Spectre de Midi. C’est grâce à vous que ce monstre n’existe plus. C’est grâce à VOUS que le monde se porte mieux, et ça sera grâce à VOUS que la Chasse Sauvage sera vaincu. »

Ouah ?! Maud qui est modeste ? Et bien... Disons qu’elle avait parfaitement compris qu’elle était celle qui avait tué le Spectre de Midi... Mais... Il y a un mais. Et ce mais est lié à deux choses. Déjà, elle n’était pas seule, faut pas croire, elle avait quand même été accompagnée par plusieurs personnes qui l’avaient aidé dans cette tache, et... Et bien ils avaient participés, on va pas le caché... Et puis, le fait qu’elle l’avait fait au nom du peuple ! Le peuple qu’elle adorait, par ce qu’elle voulait se faire adorer par le peuple. Quoiqu’il en soit, quelques murmures reprenaient, et la foule était assez joyeuse. Cela faisait toujours plaisir d’entendre cela... Même si le nom de « Chasse Sauvage » les effrayait un peu... Et Maud savait bien cela, étant donné qu’après ce qu’elle avait dit, elle continua :

« Oui, votre Baron, cette immonde crapule qui s’est servi de nous... Il s’en fiche de la Chasse Sauvage ! Qui existe ! Il s’en fiche, et il cherche avant tout à s’enrichir ! Il nous a lâchement attaquée, et comptait bien se débarrasser de nous. Nous étions visiblement une menace pour lui et son petit commerce.... Mais on est revenu. »

Elle raconta alors ce qui s’était passé, et faut bien le dire, sortait des théories qui n’étaient pas forcément totalement vérifiés ! Mais qu’importe ! Maud était lancée, elle était dans le feu des paroles, des déclarations épiques, elle avait même sortie la splendide lance des Rehen qu’elle faisait frapper sur le bois, et qu’elle faisait tournoyer. On sentait qu’elle était totalement dans son élément, et qu’elle en oubliait tout ce qui était autour... Bref, elle adorait ce qui était entrain de se passer, et c’était franchement ce à quoi elle était la meilleure, avec les combats. Presque une idole de J-Pop à ce point. Bref, alors que son discours était enflammé, et bien... Elle se calma tout d’un coup, et déclara...

« Mais ça... On peut pardonner. »

Qu’est-ce qu’elles pardonnaient ? Le peuple se posait la question. Tout ? Le fait d’avoir été attaquée et enlevée ? Et bien, c’était ce deuxième point... Et c’était totalement un mensonge, mis en scène par Maud. Bien entendue que dans les faits, Maud ne pardonnaient ABSOLUMENT pas à ce fils de fumier ce qu’il avait fait à elle et Vesa. Mais encore une fois, il fallait se mettre à la place du peuple. Voir des personnes magnanimes envers leur propre sort, permettrait qu’ils s’attachent plus facilement à elle. Mais il fallait bien comprendre que le calme de ses paroles n’étaient qu’une préparation pour l’explosion qui allait suivre ! Et oui, car bien évidemment, il fallait reprendre après une pause, de plus belle pour justement montrer le côté épique de la discussion. Ainsi, elle déclara soudainement, d’un ton bien plus assurée :

« CE QU’ON NE PEUT PAS PARDONNER, C’EST QUE CE FILS DE FUMIER VOUS IGNORE ! VOUS TRAHIT ! ET S’EN FICHE DE VOUS ! »

Là, le peuple commençait à s’agiter en entendant ça. Le peuple avait l’habitude des seigneurs. Ils l’acceptaient totalement. Ce n’était pas des anarchistes, des gens qui voulaient la liberté... Au contraire, même, ils voulaient un seigneur qui les protégeaient. Et là, Maud semblait montrer que l’actuel seigneur s’en foutait comme de l’an quarante... Bref, le peuple commençait à être mécontent, tandis que Maud regardait d’un air furtifs les côtés. Shit, déjà des gens qui commençaient à approcher, et vu leur gueule, ça serait des gardes, ça l’étonnerait pas. Il y en avait à droite et à gauche, et clairement, elle était visiblement la cible. Le soucis, c’est qu’ils connaissaient ses pouvoirs. Donc, franchement, ils allaient pas aller de main morte. Oserait-il tenter de l’attaquer maintenant pour la faire taire ? Elle ne savait pas...

« Il suffit ! Nous ne saurons tolérer une telle agitation ! Gardes ! Emparez-vous de ces provocateurs ! »

Il fallait bien s’attendre à ce que ça coince. Vesa vit deux hallebardiers se rapprocher, et brandit brusquement son épée, en se mettant en position de combat. Elle fronça les sourcils, et tendit brusquement sa main, envoyant une onde d’Air qui renversa les deux gardes.

« Vous osez vous en prendre à des paladins d’Haven ? Tout le monde a vu Maud de Rehen ! Elle a terrassé le Spectre de Midi ! Vos actes relèvent de la haute trahison ! »

Les murmures s’intensifièrent, un grondement remonta dans la foule. L’Ordre Immaculé était très puissant à Nexus, et les paladins l’étaient tout autant. De plus, tout le monde avait entendu parler des exploits de Maud, et, même si elle essayait de dire que c’était grâce à eux que le Spectre de Midi avait été vaincu, les gens avaient vu la vérité. Les autres gardes hésitaient nerveusement, et le crieur se pinça les lèvres. Il n’était qu’un simple page annonçant les nouvelles. Dans des domaines plus grands, cette responsabilité était confiée à des Huissiers et à leurs clercs, mais, ici, dans un village reculé, le crieur ne devait être qu’un simple sous-fifre. Il serra ses doigts sur les jointures de son pupitre.

Vesa, de son côté, brandit son épée, et sa lame s’illumina brusquement, tout comme son armure, qui se mit à étinceler.

« Nous sommes... Des... PALADINS D’HAVEN ! »

Elle planta sa lame sur le sol, déclenchant une onde de choc qui repoussa les gardes... Il y eut un léger flottement, une légère hésitation... Puis l’un des gardes s’agenouilla brusquement, après un cliquètement métallique en laissant tomber son épée. Surpris, les autres gardes le regardèrent, et s’agenouillèrent ensuite à leur tour, les uns après les autres. Vesa cligna des yeux en les voyant, et les habitants s’agenouillèrent ensuite. Un geste respectueux, naturel. Même le crieur s’était tu, et Vesa les observa silencieusement, impressionnante, menaçante, puis s’avança vers le manoir. Si le seigneur local refusait de venir à elles, Vesa n’allait pas se faire prier.

Elle rejoignit la grande porte du manoir, et l’ouvrit d’un coup magique, suivie par Maud. Vesa s’avança ensuite. Il n’y avait personne dans le hall, mis à part des pages et des gardes, qui se regardèrent nerveusement. Vesa se rapprocha par la suite de l’escalier menant à la chambre du seigneur. Elle le grimpa rapidement, et constata que la porte était fermée.

« C’est fini, Baron ! N’espérez pas pouvoir vous cacher indéfiniment ! »

Vesa força rapidement la porte, qui s’ouvrit dans un grincement... Main sur la poignée de son épée, elle sursauta en voyant... Du sang. Beaucoup de sang. Et un corps décapité, avec une tête qui trônait au milieu de l’épaisse flaque pourpre.

La tête du baron. Arrachée du reste de son corps. Vesa considéra silencieusement le corps pendant quelques secondes, surprise, et se tourna finalement vers Maud, confuse.

« Je crois que... Que nous arrivons trop tard. »

Le discours de Maud avait été inspirant… Mais pas pour tout le monde. Visiblement, et Maud s’y attendait, deux hallebardiers étaient prêt à se battre. Maud pensait que sa lance ne suffirait pas, bien vite, elle serait dépassée. Heureusement… La fameuse Vesa était là, prête à agir dès qu’il faudrait. Elle fit sortir son épée, et surtout, fit une magnifique lame d’air, qui renversa les deux gardes les mettant hors combats. Elle rappelait même à tout le monde que c’était Maud qui avait terrassé le Spectre de Midi, et que là, franchement… Et bien, les gardes faisaient exactement ce qu’avait fait le baron… De la haute trahison. Visiblement, cette déclaration tout à fait vraie, ne suffisait pas à convaincre les gardes… Vesa devait passer à la vitesse supérieure.

« Nous sommes... Des... PALADINS D’HAVEN ! »

Et là, Vesa fit enclencher une onde de choc qui renversèrent tout les gardes, tous. Très vite, ils commencèrent à s’agenouiller, les un après les autres, suivis par les habitants. Maud était impressionnée. Elle était douée, charismatique, elle, mais par les mots et les actes… Vesa s’était naturel. Sans même le remarquer, Maud remarqua qu’elle était à son tour à genoux. Elle s’était mise à genoux naturellement, comme les autres, devant le charisme de Vesa. Celle-ci n’avait pas remarquée visiblement que même Maud avait été impressionnée par ce qui s’était passé. Faut dire, il y avait un autre objectif en tête, et la fameuse paladine semblait concentrée sur autre chose… Autre chose de bien plus important. Ainsi, après avoir regardé le public qui avait fait allégence à elles, Vesa se retira.

Maud se releva bien vite, et suivi Vesa, sans rien dire. Elle avait retirée sa cape, révélant sa tenue, et surtout sa précieuse lance, et courait derrière l’autre paladine pour tout simplement… La rattraper, et oui, c’est tout con ! Mais bon, comme elle s’était inclinée, et qu’elle avait du prendre le temps de se relever, et bien cela faisait qu’elle avait un petit peu de retard par rapport à son interlocutrice. Cependant, heureusement, Maud était rapide, et elle n’était pas du genre à tirer au flanc. Encore heureux, cela ne serait pas très sérieux de la part d’une paladine. Une fois arrivée, les deux femmes entrèrent dans la somptueuse demeure du noble, qui franchement, détonnait par rapport aux demeures qui d’habitude se trouvaient dans ce genre de lieu… Bref, Vesa alors déclara, suivi de très près par Maud :

« C’est fini, Baron ! N’espérez pas pouvoir vous cacher indéfiniment ! 
-Vesa attend moi ! »

Vesa n’attendait pas, Vesa fonçait, et Maud avait presque du mal à suivre le rythme ! Bref, ainsi, son interlocutrice frappa d’un grand coup la porte, qui s’ouvrit dans un grincement. L’intérieur de la salle était sombre, et Maud ne pouvait pas voir Vesa, mais pouvait deviner qu’il y avait quelques choses qui cloche. Vesa s’était arrête très brusquement. Et quand on dit très brusquement, c’était que Maud, prise par son élan, manqua de rentrer littéralement dans Vesa, ce qui aurait été cocasse, mais pas spécialement très « paladesque ». Ouais, j’invente des mots, ça te pose un problème ? Non ? Cela te pose aucun problème ? Ah euh… Bah tant mieux. Bref, quoiqu’il en soit, il y avait visiblement un problème quelques part ! Mais quoi donc ? Et bien… Vesa le déclara, et Maud pu le constater juste après.

« Je crois que... Que nous arrivons trop tard.
-Qu’est-ce que ?! »

Du sang… Mais encore, si ce n’était que le sang qui posait problème. Non, le plus gros soucis, c’était que le baron avait perdu visiblement la tête… Et quand on dit ça, il faut comprendre que ce n’est pas métaphorique ou quoique ce soit du genre. Non, il avait littéralement perdu la tête, il n’avait plus la tête sur les épaules… Franchement, elle ne savait pas ce qui s’était passé, mais c’était clair qu’il y avait eu un soucis quelques parts… Visiblement, on l’avait tué. Et ce n’était pas propre. Elle se pencha pour regarder la tête, et apperçu la grimace du visage. Visiblement, il n’avait pas apprécié l’expérience, et la mort n’avait pas été sans douleur. C’est alors qu’elle regardait la tête, tachant un peu ses chaussures et ses vêtements du sang du Baron, qu’un des gardes entra alors dans la pièce, et déclara :

« -Vous… Vous l’avez…
-MAIS NON CRETIN ! L’épée de Vesa est vierge de son sang. Fouillez le manoir, il a été assassiné par un tiers parti ! Vite ! »

Encore une fois, le charisme et l’autorité de Maud fit effet, et de suite, le garde fit un garde à vous, avant de sortir. Maud n’avait que peu d’espoir que l’assassin soit encore dans le manoir, ou ne serait-ce que dans le coin… Mais Maud avait la conscience professionnelle, et il fallait ordonner de la recherche pour au moins trouver des indices. Encore une fois, Maud montrait qu’elle aurait plus sa place dans la police ou l’armée, plutôt que chez les paladins, vu ses techniques et ses façons de faire, mais passons sur ce point. Elle-même commençait déjà à chercher si des indices pourraient l’aider… Mais elle manquait d’expériences pour faire vraiment des enquêtes, donc, cela n’apportait rien. Au moins, elle avait la présence d’esprit de ne pas toucher à tout. Elle avait déjà un peu manipulé la tête, il valait mieux qu’elle commence à se maîtriser pour pas poser plus de problèmes qu’autre chose.

« Bordel de merde, connard, quel idée de crever avant qu’on te capture ! »

Maud relachait sa frustration, en frappant avec sa lance contre une des lattes de bois, qui fut fendue par l’arme. Encore une fois, ce n’était pas très très intelligent… Mais ça défoulait. Bref, il s’était passé quelques choses, et encore une fois, Maud avait l’impression qu’elles étaient toutes deux en retard sur les événements. Comme si elles étaient prises au pièges par des événements qui les dépassaient. Déjà que la Chasse Sauvage était un soucis de taille… Et bien, elles avaient clairement quelques choses d’encore plus gros au dessus d’elle. C’est pour cela qu’elle devait absolument s’améliorer. Même Maud savait que si elle restait comme ça, avec son caractère, elles n’allaient pas avancée… Maud se tourna alors vers Vesa, tenant toujours solidement sa lance entre ses mains, et déclara :

« Je pense que l’affaire a mal tournée pour lui. Je doute très fort qu’il ait été assassinée pour une autre raison. »

Cela serait possible, il faut bien l’avouer. Une amante qui était mécontente qu’il ait trouvé un autre amour, et bam, il perd la tête à cause de ces histoires. Au sens propre… Bref, quelques choses de possibles que… Ne croyez absolument pas Maud. Elle n’avait pas eu le temps de faire l’enquête, mais pour elle, c’est clair, s’il était mort, c’était clairement à cause de ce qu’il avait fait. Visiblement, quelqu’un avait été mécontent de son travail, et cela avait amené la mort de l’homme. Maintenant, la grande question à un million… Dans quel camp était ce fameux mec ? Etait-il un allié des paladines, qui avait décidé de faire justice lui-même -dans quel cas il devait quand même être arrêté !- ou bien au contraire, un ennemi mécontent du baron… ? Encore une fois, Maud pensait plutôt la seconde possibilité, mais elle ne pouvait pas être sûre. Bref, il y avait encore de nombreuses questions… Et la mort du baron en soulevait plus qu’elle n’en répondait…

Les paladins d’Haven se devaient d’être éclectiques, d’avoir plusieurs cordes à leur arc. Ayant pour but de rendre la justice, ils apprenaient le droit, mais aussi les techniques d’investigation policière. Sur ce point, les Nexusiens avaient des années de retard par rapport à Tekhos, qui avait fait de la police scientifique une avancée très importante. Les Nexusiens s’en étaient inspirés, notamment dans le cadre de la médecine légale. Les autopsies étaient couramment pratiquées. Tandis que Maud s’énervait, et renvoyait un garde, Vesa se rapprocha du corps, et l’examina silencieusement, évitant de le toucher. La coupure était propre et nette, et, vu la projection sanguine sur le sol, le coup avait été porté alors que le baron était agenouillé. Est-ce qu’il priait ? Ou est-ce qu’il implorait le pardon de son bourreau ? Vesa se releva alors.

*Le tueur a dû fuir par la terrasse...*

Vesa sentit alors le contact d’une goutte sur son épaule, et leva les yeux... Puis fronça les sourcils.

« Euh... Maud ? »

L’intéressée n’avait qu’à voir le regard de Vesa pour savoir où lever sa tête... Et voir, sur le plafond, un sinistre spectacle, tracé au sang, avec quelques gouttelettes pourpres qui tombaient. Un œil sanguinolent les observait, avec une inscription des plus sinistres autour :

« Tous s’agenouillent devant le Roi Cramoisi... » commenta Vesa.

Silencieuse, elle observait ce sinistre spectacle, sentant de la magie autour, ce qui avait probablement permis d’écrire au sang ce message de sinistre augure. Sans trop pouvoir se l’expliquer, Vesa eut un léger frisson, et se dirigea machinalement vers le balcon. Celle-ci donnait sur une série de toits. Impossible de voir quoi que ce soit, évidemment. Le tueur devait être un sacré acrobate. Vesa repensa aux sombres alliances du baron avec la Salamandre. La Salamandre restait le principal suspect, mais il était tout à fait possible qu’il y ait quelque chose de plus gros derrière cette simple organisation.

Vesa retourna ensuite dans la chambre. Il allait y avoir une enquête, bien sûr, mais, en l’état, elle commençait à comprendre que le baron s’était allié avec des forces redoutables, et que tout cela avait fini par le dépasser.

« Si tu veux mon avis, Maud, je pense que notre défunt baron s’est associé avec des individus qui le dépassent. La Salamandre reste notre meilleur indice pour comprendre ce qui se trame ici... Et ce que le baron a vraiment fait avec eux. »

Mort ! MORT ! Cet enculé ! Putain, elle était furax. Elle avait envie de se défouler, mais elle n’était pas stupide, elle n’allait pas se lancer dans tout casser dans la pièce... Bien que franchement, ce n’était pas l’envie qui lui manquait. Elle le ferait avec très grand plaisir. Mais malheureusement, elle devait rester concentrer. Elle réfléchissait à deux cent à l’heure, et tentait de savoir, ou plutôt d’imaginer ce qui se serait passer. Dans sa théorie, le baron avait du commencé à faire des magouilles, qui finalement l’avaient rattrapés. Encore une fois, il y avait la possibilité que quelqu’un ait décidé de faire justice soit-même. Cela arrivait, et quand cela arrivait, souvent, c’était pas beau à voir. Alors, certes, cela pouvait se comprendre, mais s’accepter... Et bien, non pas vraiment.

« Euh... Maud ? »

« Quoi... ? Oh putain ! »

Et ouais, c’était le truc à dire, la franchement... Je veux dire, il n’y avait pas de doute, ce qu’elle avait devant les yeux, c’était du « oh putain » en barre. Pourquoi cela me diriez-vous ? Et bien... Une phrase. Un symbole. Du sang. On pouvait dire que le mélange des trois avaient une certaines... Comment dire... Efficacité pour te faire comprendre quand on voulait te faire passer un message, et en général, un message qui n’était pas très positif pour tes fesses. « All hail the crimson king ». Et un oeil... Cela avait tout l’air d’être une secte, visiblement. Maintenant, la grande question … Est-ce que le Baron avait été membre de la dite-secte, ou bien avait-il juste collaborer avec ? Cela pouvait grandement changer la donne, car si elles avaient affaire à une trahison, et bien, cela était grandement différents... Maud écouta en tout cas les déclarations de Vesa, qui commença à dire à propos de ce qu’elles avaient vu.

« Si tu veux mon avis, Maud, je pense que notre défunt baron s’est associé avec des individus qui le dépassent. La Salamandre reste notre meilleur indice pour comprendre ce qui se trame ici... Et ce que le baron a vraiment fait avec eux.»

« En effet. Je pense que tu as entièrement raison et...
-MADAME ! »

C’était le garde de toute à l’heure. Alors que la fameuse Maud allait répondre, et dire quelques choses de plus visiblement, et bien, elle se fut brutalement coupée dans ce qu’elle tenta de déclarer par ce fameux garde. De suite, il sembla gêné d’avoir couper la paladine, ayant un peu peur qu’elle s’énerve... Mais visiblement, la fameuse Maud décida de laisser passer, vu qu’elle ne déclara rien, et laissa le fameux jeune homme reprendre la discussion. De suite, après un soupir de soulagement qu’il ne tenta même pas de cacher -Maud pouvait se demander si elle faisait SI peur que cela, franchement ?- il commença à faire le compte-rendu de ce que la fameuse Maud avait demandé dans le post précédent...

« -Le tout a été entièrement fouillée, mais rien n’a été trouvé.
-Bien. Je veux TOUT les documents possibles sur le Baron. Tous ! Que cela soit les factures, les contrats, tout ce que vous pouvez trouvez, et plus vite que ça ! »

Encore une fois, cela n’étonnait pas Maud que le tueur ait réussi à s’échapper sans passer par la porte. D’ailleurs, visiblement, la fameuse paladine qu’était Vesa avait deviné qu’il était sorti par la fenêtre... Donc, voilà ! Bref, Maud n’allait pas rester sans rien faire. Elle était nulle en magie, et en plein de choses... Mais il y avait trois choses qu’elle savait faire, et qu’elle savait très bien faire. D’abord, combattre, ensuite motiver ses troupes et enfin... Analyser des documents administratifs, notariés, et financiers. Pourquoi cela ? Et bien rappelez-vous qu’en temps que fille unique des Rehen, et bien, elle avait eu des enseignements sur comment gérer sa famille ! Et oui, il fallait bien se dire que c’était comme ça que ça marchait, quand on avait qu’un seul et unique héritier, c’était comme ça ! Donc, ainsi...

« Je doute fort qu’il soit stupide au point d’avoir laissé un document important dans sa paperasse, mais qui sait. Père fait souvent cette erreur d’un trop plein de confiance en lui, et laisse des documents compromettant parfois. »

Elle n’était pas stupide, bien entendue. Elle savait bien qu’elle n’allait pas trouver une magnifique feuille parmi les registres avec écrit : « Moi, Baron, j’envoie une bonne cargaison d’armes au Crimson King en échange de 12 tonnes d’or, gros bisous. » Elle savait bien, mais peut-être qu’une rapide analyser allait pouvoir déceler des erreurs, des chiffres étranges dans la comptabilité. Elle devait penser à ce que faisait son père. Elle avait un bon exemple avec le fameux Rehen, qui était quand même un spécialistes des sales magouilles du genre, à faire en sorte de gagner le plus, et en s’alliant parfois à des gens peu recommandable. Elle n’aurait jamais cru que dans une mission, les techniques sulfureuses de son père pourrait lui venir en aide... Mais bon... Elle était concentrée, en tout cas ! Elle voulait bien faire !

Le Roi Cramoisi... Vesa se rappelait ses cours d’Histoire. Ce vocable désignait un ancien Empereur ashnardien dément, un démon arachnéen si cruel qu’il avait déclenché une guerre civile au sein de l’Empire, entre les loyalistes et les rebelles. Les actes de cruauté du Roi avaient très largement contribué à la réputation sanglante et terrible qui tournait depuis des siècles autour de l’Empire. Cependant, de ce qu’elle en savait, les rebelles avaient remporté ce conflit, et avaient permis l’exil du Roi Cramoisi. Il serait mort lors de cet exil.

*Visiblement, les rumeurs sur sa mort sont quelque peu exagérées...*

Comme Maud le pensait, Vesa doutait en effet d’obtenir des informations sur les activités illégales du baron, ou sur ses accointances avec le Roi Cramoisi, dans des fiches comptables. Et tout cela allait nécessiter une enquête de longue haleine. Vesa et Maud n’en avaient, ni le temps, ni les moyens. Leur priorité était d’enquêter sur la Chasse Sauvage, et sur le Professeur. Vesa se dépêcha donc de rédiger un courrier pour ordonner qu’une enquête soit organisée le plus rapidement possible. Dehors, c’était l’émoi, et les rumeurs allaient bon train. Vesa savait que les gens aimaient la stabilité et l’ordre. C’était normal, et elle-même fonctionnait aussi comme ça. Or, lorsque la rumeur de la mort du baron se propagerait, le soutien qu’elles avaient réussi à amasser auprès de la foule risquait fort de disparaître. Vesa, pour le dire simplement, commençait à prendre conscience que les deux paladines se trouvaient dans une panade sans nom.

« Je crains fort que nous allons devoir rester ici quelques jours, Maud... Au moins le temps d’organiser une régence transitoire. »

Les paladins n’étaient pas supposés faire de la politique, mais il rentrait après tout dans leurs obligations d’assister les pouvoirs publics. L’Ordre du Griffon, auquel les deux femmes appartenaient, était autant un ordre temporel que séculier, puisque, tout en relevant des instances de l’Ordre Immaculé, il avait été fondé par la Couronne de Nexus pour aider les Nexusiens contre les menaces surnaturelles, les monstres, et les Ashnardiens. Leur rôle était donc de garantir l’ordre, de promouvoir la paix et la stabilité. Elles ne pouvaient pas donc juste tourner le dos à un village au bord du chaos. Ce serait irresponsable, et immoral.

Vesa écrivit donc le courrier, et alla ensuite avec Maud dehors. La foule semblait avoir grossi, et elle demanda le silence, avant d’expliquer que le baron local avait été assassiné. Elle garda pour elle-même la mystérieuse trace sanguine repérée sur le plafond, et annonça la suite :

« Nous allons prévenir la Couronne, nos supérieurs, ainsi que le duc local. C’est à lui qu’il reviendra de dépêcher sur place un administrateur provisoire. »

Pour le reste, il y aurait une enquête, menée par les services du duché, mais aussi par des inspecteurs royaux, puisqu’un noble avait été tué. Vesa se retourna ensuite vers Maud, et poursuivit ensuite sur leur planning :

« On va devoir rester là le temps que les agents du duc n’arrivent, je crains... »

Autrement dit, elles allaient perdre plusieurs jours à attendre, mais c’était ce que le devoir exigeait...

Vesa s’était déjà mise au travail. Elle écrivait une lettre pour lancer l’enquête. Loin de vouloir être inutile, Maud elle donnait plusieurs ordres pour que la Maisonnée continue de fonctionner malgré ce qui s’était passé. Les gardes devaient continuer de travailler, comme ça, et les serviteurs devait mettre en ordre la maison, sans entrer dans la pièce où le sang et le cadavre étaient... Une fois cela fait, elle soupira un grand coup, puis retourna voir Vesa, qui semblait prête à envoyer sa lettre. Parfait, elles allaient pouvoir vite se mettre à préparer la suite. Les deux femmes avaient réussi à mettre le doigt dans un engrenage, qui, on va être clair, les dépasser très certainement... Mais elles allaient y arriver, pensa Maud ! Après tout, la paladine aux cheveux mauve était sûre que Vesa était une experte, et qu’elle s’était sortie de plein d’autres situations bien plus complexe ! Après tout, c’est Vesa, et Vesa, on ne l’arrête pas comme ça !

« Je crains fort que nous allons devoir rester ici quelques jours, Maud... Au moins le temps d’organiser une régence transitoire. »

« Oui, c’est notre devoir. »

Les deux femmes ressortirent donc dehors, cette fois pour affronter la foule. La foule était extrêmement compacte, et avait grossi, beaucoup étaient là visiblement, et les questions se posaient grandement. Ce fut Vesa qui prit la suite de la déclaration : Elle prévint alors le peuple de ce qui s’était passé, et celui-ci laissa échapper des cris de surprises, plusieurs retenaient la respiration, et enfin d’autres se regardaient de façon désespérées, se demandant sûrement ce qu’ils allaient devenir. Bref, on sentait la peur dans le regard de beaucoup d’entre eux, se demandant ce qu’ils allaient devenir, s’ils allaient y arriver... Heureusement, Vesa était douée pour les rassurer, et prévenaient alors tout ce qui allaient se passer, avant de finalement se retourner de nouveau vers sa collègue paladine.

« Nous allons prévenir la Couronne, nos supérieurs, ainsi que le duc local. C’est à lui qu’il reviendra de dépêcher sur place un administrateur provisoire. On va devoir rester là le temps que les agents du duc n’arrivent, je crains... »

« Malheureusement, on peut pas faire autrement. On va perdre du temps, mais je pense que les différentes affaires sont liées. »

Maud déclara cela d’un ton désespérée, comme si elle se rendait compte que ce qui semblait être une mission « simple mais dangereuse » comme on dit, se révélait extrêmement « complexe ET dangereuse ». Youpi ! Mais bon, elles n’étaient pas là pour seulement se couvrir de gloire, et tuer des monstres : Cela, même Maud le comprenait. Ce qui montrait qu’elle pouvait être sérieuse parfois... Bref, quoiqu’il en soit, la paladine regarda son interlocutrice, quand elle attendit quelqu’un approcher. Un jeune garçon de... Douze ans ? Tout au plus ? Bref, le garçonnet semblait vouloir leur dire quelques choses, et comme toujours, Maud arriva à s’accroupir pour se mettre à sa hauteur, et lui caresser la tête :

« -Madame ? Tout la paperasse est en salle de travail.
-Merci. T’es adorable ! Allons-y ! Si t’as besoin de moi, je serais en salle de travail, ma Vesa~ ! »

Elle fit un baiser sur la joie de Vesa, puis suivi le jeune garçon aux cheveux roux, sans laisser le temps à son interlocutrice de dire quoique ce soit, et parti alors à ses papiers, en retournant à l’intérieur de la demeure. Encore une fois, Maud n’en faisait qu’à sa tête, et voulait voir si son idée était bonne ou mauvaise... Et puis, pour la paperasse, jamais le temps d’attendre, avant de faire l’enquête. Son père lui disait toujours : « Le jour où on fouillera mes papiers, un incendie débutera malencontreusement »... Elle savait ce genre de magouille ? Oh que oui. Elle connaissait bien. Elle avait tout appris, car son père avait espéré qu’elle reprenne les rennes des Rehen. Et donc, si elle le faisait... Et bien, elle devrait faire les même magouilles. Ainsi, elle regarda la montagne de paperasse qui l’attendait... Le jeune garçon s’était éloigné. Elle était prête à s’y lancer.

Ainsi, elle commença par les Livres de Comptes, rapportant les recettes et les dépenses effectuées et légalisées. Celle-ci étaient les plus simples, vu qu’elles rendaient compte d’ensemble qui étaient régulièrement vérifiés par les systèmes de la Couronne. Là, c’était en gros, ce qui était officiel... Le reste, ça serait ce qui serait intéressant. Elle remarquait alors que la région souffrait depuis quelques mois de rentrée d’argent bien moins importante. Sans doute la Chasse Sauvage ? Oui, sans doute. Les aveux l’aidaient à faire une chronologie relative, chaque année le Baron devait faire un aveu décrivant les ressources de sa région. C’était une obligation nobiliaire. Si la plupart du temps, les aveu étaient des simples copier-collés d’une année sur l’autre, et bien, elle remarqua que ces dernières années, le baron avait prit soin de préciser que les ressources de la région s’étaient grandement amenuie...

Cela faisait combien de temps qu’elle bossait ? Elle n’en savait rien, mais la fatigue la prenait. Elle consultait papier sur papier, vérifiait les comptes, comptaient les entrées et les sorties d’argents... Et sur, c’était louche. Des entrées d’argents secondaires étaient bien trop importantes, et souvent non déclarées. Mais mystérieusement, tout était tenu sur papier. Bien solidement. Elle ne comprenait pas. Ces papiers prouvaient ouvertement qu’il y avait de la fraude. Ok, des versements d’argents, cela s’était toujours fais, et il s’en était mis plein les poches. Elle avait compris. Mais pourquoi devoir mettre cela sur papier... Avait-il un besoin de rendre des comptes à quelqu’un ? Quelqu’un qui n’était donc pas le Duc locale et la couronne, mais quelqu’un d’autres ? Pourquoi ses sommes d’argents étaient-elles retranscrites fidèlement ? Qu’est-ce que cela voulait dire ? Elle continua alors d’éplucher les registres, s’enfonçant dans le monde des finances, et se rendant compte que l’histoire sentait mauvais depuis bien longtemps...

Tandis que Maud épluchait les comptes, Vesa, elle, passa du temps avec la population, et avec les conseillers et les locaux, afin de s’organiser sur la régence le temps que les renforts arrivent. Avec la menace de la Chasse Sauvage, les tensions étaient palpables, et Vesa voulait éviter que les choses ne dégénèrent. Le village étant petit, il n’y avait pas beaucoup d’officiels à part le seigneur local. Il n’existait par exemple pas de prévôt, mais un prêtre. En ces temps confus, la religion avait toujours permis de soulager le peuple, et, d’ailleurs, Vesa demanda au prêtre d’organiser une messe exceptionnelle, tout en s’entretenant avec les autres. Si certains villageois accusaient encore le choc, d’autres n’étaient pas foncièrement surpris. Leur seigneur, Guillaume de Montferrat, passait souvent du temps hors du village. Vesa essaya aussi de se renseigner auprès de ses rencontres, notamment sur un certain Professeur, mais n’obtint aucun élément concret. Montferrat était au moins suffisamment intelligent pour organiser des rencontres à l’extérieur, mais, en revanche, depuis quelques mois, il était fréquent que des étrangers ne se rendent dans l’auberge. Rien de perturbant en soi, si ce n’est que ces étranges appartenaient à une même bande, et avaient le don d’inquiéter les gens.

Vesa parvint à confier la gestion provisoire du village à quelques-uns des paysans les plus influents : l’aubergiste, le tanneur, le meunier... C’était la meilleure chose à faire, et, elle continua ensuite son enquête. Maud épluchait les livres de compte, et elle allait sans doute trouver l’existence d’une double comptabilité. Dans l’écrasante majorité des cas, les aristocrates et les seigneurs étaient jugés pour fraude fiscale. Ils tenaient en effet deux registres fiscaux différents, le premier destiné à la Couronne ou à son suzerain,et comprenant des recettes bien moins élevées que le second. La fraude fiscale était très courante à Nexus. Outre cela, il y avait aussi le mécanisme de double imposition, où les vassaux taxaient leurs serfs par des taxes indues. Plus généralement, le droit fiscal était très compliqué à Nexus, et faisait l’objet de multiples Codes, et autant de jurisprudence. C’était un combat de tous les instants, l’expression financière du pouvoir de la Couronne sur le reste du pays. Elle s’attendait donc à ce que Maud trouve un système de fraude fiscale.

De son côté, la paladine inspecta d’autres éléments. Elle se rendit à la conservation immobilière, un bureau très important et obligatoire. Il y a des générations, la Couronne avait décidé de cartographier très précisément le royaume, en créant le cadastre, un système visant à avoir une cartographie unique et administrative du royaume, permettant une meilleure contribution foncière en listant plus précisément les parcelles. Une vaste organisation qui avait duré des années, et englouti beaucoup d’argent, mais avait permis de moderniser Nexus. Depuis lors, chaque village avait l’obligation de conserver une partie des plans cadastraux de son domaine, avec les titres de propriété y afférent. Pour en assurer la conversation, la Couronne avait ordonné que chaque titre de propriété fasse l’objet d’une copie certifiée conforme, et transmise aux archives royales à Nexus. Les copies étaient réalisées par des moines copistes sous la gouvernance d’Huissiers de justice, qui se chargeaient ensuite d’assurer le transfert de ces copies.

Vesa consulta donc les titres de propriété de Guillaume de Montferrat, et, grâce aux références cadastrales contenues dans les actes, put ainsi identifier une mystérieuse ferme reprise par Montferrat à l’orée de la ville.

*C’est curieux, ça... À quoi peut bien correspondre cette ferme ?*

Elle consulta l’origine de propriété figurant à l’acte. Le bien avait été en déshérence après la mort de son propriétaire. Il avait visiblement un héritier, mais les recherches héréditaires n’avaient pas permis de le retrouver, de sorte que le bien avait été récupéré par le domaine local... Sans être revendu. Vesa voyait mal Montferrat devenir fermier, et elle se déplaça donc sur place.

Grâce à son cheval, la femme rejoignit la ferme abandonnée au bout d’une demie-heure. Celle-ci était à l’orée de la ville, entourée par une palissade en bois, et elle entra à l’intérieur. Il y avait un antique puits au centre, et la femme inspecta les lieux. Elle alla dans la maison principale, vide, ne comprenant plus que quelques meubles détruits et moisis, et se rendit ensuite dans la grange. C’est là que Vesa rencontra des choses plus intéressantes. Le long des poutres, il y avait de multiples chaînes. Elle les inspecta, et réalisa vite qu’elles n’étaient pas rouillées, signe qu’elles étaient plutôt récentes. Il y avait aussi des traces de griffure le long des poutres, comme si des ongles s’étaient enfoncées là.

*Cette grange a été utilisée...*

Vesa ne pouvait s’empêcher de repenser à la scène de crime, à ce tatouage sanguin situé au plafond. Le Roi Cramoisi, la Salamandre... Elle avait l’intime conviction que tout ça n’était pas que de la fraude fiscale, ou du trafic illégal avec des criminels. Il arrivait aussi que les suzerains autorisent des narcotrafiquants, par exemple. Cette ferme aurait été l’exemple parfait pour permettre à des bandits de faire pousser du fisstech, une drogue illégale mais très en vogue dans les rues de Nexus. Las, il n’y avait rien ici.

*Dans quoi Montferrat s’est retrouvé impliqué ?*

Maud ne lui apporterait pas la réponse, mais lui confirmerait en tout cas, grâce aux véritables recettes fiscales, que ce trafic rapportait.

« Je crois que Montferrat se livrait à du trafic d’esclaves, Maud, expliqua Vesa à son retour, et en confrontant ses informations avec celles de sa camarade. De la traite organisée par la Salamandre en utilisant divers biens abandonnés comme points de chute. Mais à quelle fin ? »

Ça, elle n’en savait rien... Tout ce qu’elle savait, c’est que le mystérieux Professeur était devenu davantage une cible de premier choix pour elle.