Cthulhu Wars [PV]

Inazaël sentait que quelque chose avait ébranlé Yennesä. La vision de ce spectacle horrible, assurément, mais le temps jouait contre elles. Ce mucus était corrosif, comme un poison rampant, recouvrant les mondes soumis à la démence et à la haine du Chaos Rampant. Toutefois, alors qu’Inazaël s’apprêtait à fuir, elle sentit soudain un pic d’énergie croître auprès d’elle.

« Yennesä ? »

Sa question n’eut aucune réponse, car une sorte de transe venait de se saisir de Yennesä. Autour d’elle, la magie se mit à crépiter, devenant si intense qu’elle en était palpable, aveuglante. Tout le corps de Yennesä semblait irradier, et Inazaël, muette de stupeur, pouvait voir l’air se déformer autour de la femme.

*Une telle force... Comment est-ce possible ?!*

Le sol se mit à vibrer, le décor se fissura, et des tentacules verdâtres fusèrent vers Yennesä...

Puis l’onde de choc explosa.


Autour de la Pyramide des Prescients, c’était le chaos le plus absolu. Les shantaks et les Horreurs chasseresses déferlaient en masse, se heurtant aux impressionnants système de défense des Prescients. Plusieurs de leurs pyramides technologiques étaient tombées, et la Pyramide Centrale offrait une résistante farouche. Le long de sa surface, d’innombrables tourelles, lance-roquettes, et lasers, mitraillaient dans tous les sens, tandis que, sur bon nombre de terrasses, des méchas s’approchaient, crachant des salves-lasers et des missiles à concussion, soutenues par une ribambelle de robots lourds, entièrement automatisés, disposant de gatlings, de canons surpuissants, s’en prenant autant aux horreurs du Chaos Rampant qu’aux Anges.

Un tir magique s’échappa de la paume de Lucifer, explosant une Horreur, quand un missile à concussion explosa violemment dans son dos. La décharge ne créa que de la poussière, mais il se retourna, furieux, et concentra sa magie entre ses mains, formant une boule d’énergie lumineuse, qui crépitait d’éclairs intenses, et la chargea vers la terrasse. La sphère agit comme une sorte d’aimant magnétique, soulevant les robots, les déstabilisant... Avant d’exploser violemment, dispersant les androïdes. D’autres ciblèrent alors Lucifer, qui abattit sa main. Le ciel se fendit alors de rayons lumineux, qui bombardèrent l’un des vastes perrons menant dans la Pyramide, provoquant une explosion cataclysmique. Aujourd’hui, le Porteur de Lumière était en forme.

*Pourquoi ces humains arrogants nous combattent-ils ? Que cherchent-ils à cacher dans leur pyramide ?*

Lucifer avait compris que ces gens avaient sombré dans l’orgueil, dans l’arrogance la plus complète. Ce monde, avant que les Tyrans n’arrivent, était une écrasante technocratie, où les Prescients, des scientifiques arrogants, avaient organisé ce monde par l’eugénisme et le clonage, divisant leur société en multiples strates, et sanctionnant violemment ceux qui pensaient pouvoir quitter leur programmation originelle, les assimilant à des « bugs informatiques ». Et, plus Lucifer se rapprochait, plus il sentait, derrière cette Pyramide, une source malfaisante.

Tout le long de la Pyramide, des panneaux supplémentaires s’ouvrirent, libérant des flopées de robots volants, fusant vers les Anges, tandis que, depuis les terrasses, des unités lourdes s’approchèrent.

« Ridicule, s’agaça Lucifer, en transformant son corps en une bombe d’énergie, atteignant la vitesse de la lumière pour transpercer une série de cinq robots, ne laissant dans son sillon que des explosions et des carcasses métalliques fumantes. Vos gadgets technologiques ne sont rien comparés à nous... Pourquoi vous entêter en vain ? »

Les unités lourdes le ciblèrent, tirant alors des lasers perforants. Lucifer forma un bouclier magique, mais, à sa grande surprise, ce dernier s’éclata contre le laser, qui frôla sa joue, faisant couler de son sang.

*Saloperie !*

Du revers de la main, il envoya une onde de magie, et, depuis cette onde, des rayons fusèrent, et frappèrent chacun un robot, le transperçant, avant d’exploser violemment. Lucifer se rapprocha alors de la Pyramide... Quand il sentit quelque chosequi le surprit, et tourna la tête, tout comme la plupart des Anges.

*Qu’est-ce que... ?!*

Il venait de percevoir un pic de magie exceptionnel venant de la ville, si forte qu’il pensa alors que le plus puissant de tous les Anges venait d’arriver.

*Metatron ?!*

Lucifer réalisa rapidement son erreur, en voyant cette signature, et en fut d’autant plus surprise. C’était cette nouvelle recrue... Yennesä.

*Comment une telle force est-elle possible ? C’est... C’est inattendu.*

Malheureusement, Lucifer n’était pas la seule à avoir perçu ce pic inattendu.


Remontant le long de l’océan, Il tourna son immense œil, situé sur sa poitrine, vers la silhouette qu’Il avait perçu. Son instinct ne l’avait pas trompé. Nyarlathotep était infini, invincible, d’une puissance défiant l’entendement. Il avait traversé l’océan en quelques minutes, déclenchant un tsunami surpuissant, car, en marchant, ses pas avaient fendillé la surface de la planète, provoquant des crevasses. D’immenses vagues avaient englouti les digues, renversant toutes les flottes maritimes, submergeant les navires de guerre sous des vagues faisant plus de trente mètres de haut. L’eau avait déferlé sur les villes proches, inondant et détruisant tout.

En vain, les humains avaient déployé leurs armes les plus puissantes. Des canons surpuissants avaient tiré sur Lui, des avions, des robots, des hélicoptères crachant tout un arsenal. Puis Il avait envoyé ses séides, tout en continuant à s’avancer. Sa première véritable attaque atteignit l’une des Pyramides. L’immense queue rouge située sur sa tête s’était redressée, avant de se mettre à briller pendant quelques instants, puis avait fouetté l’air, envoyant un tir magique rouge qui avait frappé la Pyramide, pulvérisant toutes ses défenses, et la faisant exploser de l’intérieur. On avait vu la Pyramide trembler sur place, avant que des torrents de sang ne sortent de ses pores, et qu’elle ne se ratatine sur place, explosée de l’intérieur.

Il s’avançait donc, quand Il perçut cette pointe magique...

Et Il n’aima pas ça.


L’onde de choc de Yennesä pulvérisa l’immeuble, mais frappa aussi tous les autres bâtiments alentour, comme si un séisme venait de frapper. Comme dans un jeu de dominos, les épais gratte-ciel vacillèrent sur place, avant de s’effondrer à leur tour. Un véritable choc, une déflagration assourdissante, tandis que, survolant les décombres, Imrian vit Inazaël sortir, aidant Yennesä à s’envoler avec elle.

« Comment as-tu pu faire ça, Yennesä ? Tu es plus puissante que ce que... »

Imrian n’eut pas l’occasion de fournir, car le ciel se nimba de rouge. Ou plutôt, toute la zone autour d’elles. Une aura malsaine la traversa, et elle tourna la tête. Nyarlathotep était encore à plusieurs centaines de kilomètres, mais son oeil était rivé sur eux... Ou, plutôt, sur Yennesä.

« PARTEZ ! VITE !! »

Ce furent là les dernières paroles d’Imrian.

Les rares immeubles encore debout explosèrent sur place, tandis que, depuis l’œil du Chaos Rampant, une décharge de sang fila à toute allure. Imrian généra avec toute la magie dont elle était capable un bouclier. L’attaque du Tyran frappa ce bouclier, puis Imrian... Explosa.

« IMRIAN !!! »

D’elle, il ne restait plus que quelques plumes ensanglantées. Son corps avait été vaporisé sur place, tandis que la trompe de Nyarlathotep, au loin, se relevait, et s’illuminait encore.

« Il... Il va frapper ! »

La trompe se contracta, puis fouetta à nouveau l’air... Et l’attaque frappa la ville de plein fouet, comme si une bombe nucléaire de sang venait de la frapper. L’attaque fut terrible, rayant la ville de la carte, n’en laissant plus qu’un épais trou béant rempli de sang, massacrant tous les impudents qui avaient eu le malheur d’être là.

Même Yennesä n’aurait pas pu résister à cette attaque... Mais, alors que la bombe avait explosé, et que le sang meurtrier avait giclé vers elle, tuant déjà Inazaël en faisant fondre son corps, Lucifer était apparu, avait attrapé la femme. Des gouttes l’avaient atteint dans le dos, le déstabilisant pendant sa fuite, l’amenant à s’envoler à toute allure. L’une de ses ailes avait été carbonisée, ce qui fit que, en quelques secondes, le duo se retrouva autour du Refuge des Prescients, dans la Pyramide Centrale, et défonça plusieurs murs sur son passage. Lucifer relâcha Yennesä dans la précipitation, tandis que lui roula sur le sol sur une bonne quinzaine de mètres, terminant finalement sa course contre un mur, dans un grand hall cybernétique.

Là où était Yennesä, des gouttes de sang flottaient encore dans l’air... Et, à la place de la ville, il n’y avait plus qu’une mer de sang, mer d’où des corps ne tardèrent pas à s’échapper, zombies meurtriers, qui rampaient sur le sol, avant de se relever, et de marcher vers le Refuge, grognant, crachant du sang, semblables aux zombies du mucus vert. Ils hurlaient, gémissaient de douleur, des pustules florissant sur leurs corps, et beaucoup virent des ailes griffues apparaître dans leur dos, leur permettant de s’envoler.

C’était l’horreur absolue, et Yennesä avait échappé de très peu à la mort, étant miraculeusement indemne, là où Lucifer tremblait sur place.

Yenessä était une nouvelle-née et pourtant, elle avait déjà une impression de vécu, à une certaine limite. Le théâtre de cette guerre provoquait en elle d’étranges sensations et images dans son esprit, qui la perturbait au plus haut point. Cela avait eu un tel effet que sa magie s’était quelque peu déchainée pendant l’espace d’un instant, provoquant ainsi une véritable déflagration qui annihila les alentours. Le temple où elle était, le building et les autres, qui s’effondrent tel un château de carte les uns à la suite des autres. Un désordre monstrueux et incontrôlé. Après cette soudaine déferlante de magie, la guerrière se sentit un peu endoloris et elle eut besoin de l’aide précieuse de sa sœur pour s’envoler, afin de s’extirper des décombres.

Elle ne réalisa guère que son geste avait eu des répercussions bien plus graves que prévu. Si cela avait permis de repousser le mucus, un peu, cela attira sérieusement l’attention du principal ennemi présent : Nyarlathotep. Inazaël aida Yenessä à sortir, et les deux furent rapidement en présence de Imrian, qui s’interrogea sérieusement sur comment la nouvelle recrue avait bien pu faire cela. Le ciel se couvrit d’une couleur carmine, alors que Yenessä sentit une lourde présence s’installer soudainement. La corruption. Mais pas que … Le Tyran les observait, en particulier elle. Son manège ne lui avait guère plu visiblement, et elle ressentait ce lourd poids sur ses épaules. Elle grinça des dents, alors qu’elle sentait un danger imminent venir. Cependant en l’état, elle ne put strictement rien faire pour empêcher le sinistre d’arriver.

Une décharge de sang, puis Imrian disparu en fumée, sous les yeux choqués de Yenessä qui, sur le moment, cru sa sœur morte pour de bon. Pas le temps de se ressaisir que le Tyran rappliqua à nouveau, provoquant une attaque d’une ampleur sans précédent, qui rasa la ville entière. Ne laissant derrière que chaos, sang et ruines. L’attaque de sang fut si violente qu’en arrivant près des deux créatures, ce fut Inazaël qui fut tuée. Sa gorge se serra de douleur et de colère en la croyant morte à son tour, mais en voyant un tel sinistre, elle savait qu’elle était la prochaine. Avec toute sa bonne volonté, Yenessä ne pourrait jamais parvenir à vaincre un tel monstre, malgré les quelques petites audaces qu’elle pouvait faire. Cependant son heure n’était pas encore venue, puisqu’au dernier moment ce fut le porteur de la lumière qui vint la sauver, fonçant vers elle pour l’emmener plus loin. Si cela marcha, ce ne fut toutefois guère suffisant pour les tirer définitivement d’affaire.

Du sang gicla sur le corps de l’homme dont une aile vint à bruler, les faisant ainsi s’écraser tous les deux dans la Pyramide. Yenessä sentit la douleur la relancer de plus belle, alors qu’elle gisait là, dans un hall. Difficilement la jeune femme se releva, constant alors avec effroi l’état de la ville, si ce n’était de la planète. Une immense mer de sang, où cadavres réanimés et autres horreurs en sortaient. Des ailes poussaient pour certain, leur permettant ainsi de voler et de les atteindre de là-haut. La recrue secoua sa tête et tenta alors de se reprendre, faisait fi de la douleur comme elle le pouvait. Elle se retourna et vint alors son sauveur plus loin, à quelques mètres, au sol. Yenessä accourra auprès de lui, rassurée de voir qu’il n’était pas mort. Mais, il n’était pas en très bon état non plus. « Relevez-vous mon frère ! Ils arrivent … Nous devons en finir au plus vite avant que tout ne soit perdu. » Dit-elle, posant alors ses mains sur le corps de l’homme pour l’aider à se relever, et à se maintenir s’il en ressentait le besoin.

L’horreur était là, mais Yenessä ne se sentait pas encore vaincue. Il fallait poursuivre. L’objectif était toujours le même à ses yeux ; les savoirs que renfermaient les Pyramides. Elle savait que les Prescients s’étaient retournés contre eux, et s’il fallait se battre sur deux fronts en même temps, alors elle le ferait. Elle était née pour ça, après tout ; se battre. Yenessä ne perdrait donc pas l’objectif de vue. « On peut encore récupérer ce pourquoi nous sommes venus … Non ? » Demanda-t-elle alors. Mais, à peine eut-elle terminé qu'elle sentit une horde de ces précédents monstres s'approcher. Elle s'en retourna, venant alors à ressaisir sa lance d'énergie. Un combat s'imposait ...

« Aaaaah... »

Un soupir s’échappa des lèvres de Lucifer, tandis que Yennesä se précipitait vers lui. Après son sauvetage-éclair, le Porteur de Lumière était blessé au flanc, là où l’attaque de la Langue Sanglante l’avait heurté. Il devait se soigner. Le tir avait aussi atteint l’une de ses ailes, enflammant plusieurs de ses plumes. Lucifer avait été blessé, et, pire, il avait senti la mort d’Imrian et de ses élèves. Certes, son énergie était revenue aux Cieux, et elle se réincarnerait, mais ceci ne changeait rien au fait qu’elle avait été tuée. Une nouvelle perte dans ce combat terrible contre ces monstres cauchemardesques.

Et, dans sa souffrance, Lucifer se convainquit qu’il y avait, effectivement, quelque chose de très important dans la Pyramide Centrale... Car Nyarlathotep n’utilisa pas à nouveau le pouvoir de la Langue Sanglante pour pulvériser la Pyramide, comme s’il craignait de détruire quelque chose se trouvant dedans. Une chose que Lucifer percevait, tandis que, reprenant ses esprits, il demanda à Yennesä de les défendre :

« Les systèmes de sécurité de la Pyramide... Repousse-les, ma sœur, le temps que je me rétablisse... »

On ne s’en rendait pas forcément compte, mais la magie corruptrice et corrosive des Grands Tyrans était une grande nouveauté pour les Anges, qui, auparavant, n’avaient jamais été confrontés à un usage si pernicieux et si malsain de la magie. Dehors, on pouvait voir que l’aura du Tyran influait sur l’atmosphère même. Les nuages étaient rouges, et son mucus vert se répandait partout, surplombant les océans, ne tuant pas que les humains, mais corrompant aussi la faune et la flore. Ce liquide meurtrier était sécrété par le corps du Grand Tyran, comme un corps sécrétait de la sueur.

Yennesä se retrouva donc seule face à des robots de combat, machines qui ne devraient néanmoins poser que peu de difficultés. Sa lance les pulvérisait, et des tourelles de sécurité se déployaient aussi, crachant des lasers ou des arcs électriques. Des alarmes rugissaient à l’intérieur de la Pyramide Centrale, qui se présentait comme une structure extrêmement aseptisée, froide et métallique. La jeune Ange se heurtait aux robots, d’autres unités mechas ne tardant pas à approcher. Véritable tornade de rapidité et d’élégance, Yennesä impressionnait Lucifer... Jusqu’à ce que ce dernier ne serre les dents, puis ne file droit devant lui, explosant un autre robot.

Il avait toujours une plaie courant le long de son flanc et de son dos, mais bon nombre de ses plumes avaient repoussé.

« C’est bon, ça va mieux... Allons-y, ma sœur. Ces Prescients ne devraient pas nous attaquer, il se passe quelque chose de bizarre ici, comme si... Comme s’ils cachaient quelque chose. »

Concentrant sa magie, Lucifer envoya de sa paume une boule magique, qui explosa une énorme porte blindée, la faisant voler en éclats, révélant un couloir où des humains en armure, soutenus par des mechas, leur tirèrent dessus. Des humains qui ‘navaient pas peur, car ils étaient le fruit des opérations de clonage et d’eugénisme des Prescients. Ils étaient conçus pour se battre et pour obéir, et, en ce moment crucial, les Prescients leur avaient injecté des stimulants de combat, les rendant décérébrés. Dès que Lucifer s’avança dans le grand couloir faisant suite à la pièce où ils avaient atterri, une grenade l’atteignit au torse. En retour, il tendit la main, et, depuis ses doigts, des éclairs lumineux crachotèrent, frappant les plus proches ennemis, avant de rebondir pour en atteindre d’autres, les tuant dans des hurlements de douleur.

Dehors, l’armée de monstres créés par la Langue Sanglante rejoignaient les fondations de la Pyramide Centrale, et cette dernière se défendait du mieux qu’elle pouvait, balançant des missiles, des jets de lance-flammes, et des lasers qui ouvraient le sol, explosant les zombies. Pour autant, ces derniers étaient tout simplement trop nombreux. Le ciel, lui, continuait à se recouvrir de shantaks, d’Horreurs chasseresses, et même d’autres monstres, des sortes de sphères monstrueuse hérissées de tentacules. Tous pouvaient maintenant sentir la présence de Nyarlathotep, mais, très curieusement, il n’attaquait pas à nouveau.

Michel, avisant la bête, poussa un hurlement de ralliement, et ordonna à une vingtaine d’Anges de le suivre.

« Haro à la bête ! Évitez son œil !! »

Michel et sa cohorte fusèrent alors vers le Tyran, et balancèrent des attaques magiques sur son torse. Les tirs, puissants, explosèrent contre son corps, tandis que des tentacules émergèrent. Le Grand Tyran se protégeait, mais Michel ne cherchait pas vraiment à le détruire, conscient que cette tâche était vaine. Néanmoins, il avait senti, lui aussi, qu’il y avait quelque chose dans ce temple sinistre, et il voulait laisser le plus de temps possible à Lucifer pour le récupérer.

Lucifer... Un Ange en qui il avait toute sa confiance.

La situation était critique, malgré le fait qu’étrangement, le Grand Tyran ne s’en était pas pris à la Pyramide. Signe qu’elle renfermait quelque chose de si spéciale, de si précieux que même Nyarlathotep n’osait pas détruire. Intéressant et troublant à la fois. Cela donna idée à Yenessä de l’enjeux de toute cette opération. En attendant d’en savoir plus, Yenessä devait défendre et protéger son camarade pendant qu’il régénérait. Saisissant sa lance, elle s’élança corps et âme dans le combat, tranchant et explosant les systèmes de sécurité de la Pyramide. Avec une grâce et une efficacité redoutable, la créature détruisit un par un les robots de combat qui s’opposaient à elle. Presque nativement, le combat et l’art du combat était en elle, dans son sang, dans son âme. Cela donnait idée de ce qu’est un ange naissant pour le combat …

Une véritable guerrière au sens propre du terme. Des méchas approchèrent, tirant à vue-d ’œil. Yenessä concentra sa magie et les foudroya violemment, balançant de nombreux arcs électriques sur eux. Les leurs, d’arc électriques, paraissaient bien ridicules face à ceux que Yenessä produisait. Au bout d’un moment son camarade se releva, il était remis sur pied. Très bonne nouvelle. Ils allaient pouvoir faire leur chemin jusqu’au cœur de la Pyramide désormais, et voir de quoi il en retournait exactement. Lucifer explosa une porte blindée, ne faisant alors que révéler un couloir où les attendaient d’autres bonhommes, armés jusqu’aux dents, prêts à les tuer. Les deux angéliques luttèrent contre eux, l’un balançant des arcs lumineux, l’autre balançant des arcs électriques. Un petit duo de choc, qui espérons-le, parviendra à ses fins.

En attendant, Yenessä ne pouvait s’empêcher d’être impressionnée en retour. Elle était quand même en train de se battre directement aux côtés du porteur de la lumière. L’homme que tout le monde admirait, adulait et respectait. On pouvait dire qu’elle commençait sa carrière / vie de la plus belles des façons, pour une guerrière. Directement plongée dans le plus grand conflit jamais rencontré par les siens, en combattant aux cotés de l’une des plus grands noms … Yenessä était prédestinée à accomplir de grandes choses, cela ne faisait aucun doute.

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Courte réponse, désolé ><

Les systèmes défensifs de la Pyramide n’étaient rien, en comparaison des pouvoirs des Cieux. Les robots de combat, les tourelles de défense, explosaient toutes sur leur passage. Le duo remontait à toute allure le long d’un couloir, Lucifer en tête, laissant derrière eux des traînées lumineuses. Pour les retenir, les systèmes de défense déclenchèrent des rangées de mur-lasers, que les Anges surchargèrent à l’aide de leurs boucliers, faisant exploser les cristaux qui généraient les lasers. De solides herses blindées se refermaient, mais, là encore, les rayons magiques des Anges les transperçaient, les éventrant en quelques secondes. Alors, des tourelles se redressèrent, et crachèrent de puissants arcs électriques qui frappèrent Lucifer, et le firent vaciller sur place... Avant qu’il ne tende sa main, concentrant les éclairs dans sa paume, et n’envoie, avec son autre main, des traits lumineux, qui explosèrent les tourelles.

Ce couloir semblait interminable, s’enfonçant dans les entrailles de la Pyramide, et lui et Yennesä ne cessaient de se battre, affrontant des nuées de robots, de tourelles, ou de simples servants décérébrés. Les humains... Lucifer était sidéré de voir à quel point leur esprit était faible, si aisément malléable, et à quel point il était facile de les briser, pour en faire des pantins.

« Continuons, Yennesä, nous approchons. Je sens... Je sens une force particulièrement malsaine par ici. »

Yennesä devait peut-être aussi le sentir, car c’était comme une sorte de malaise, qu’on ressentait à proximité. Quoi que les Prescients cachent, ils étaient à portée. Lucifer reprit sa route, jusqu’à rejoindre le fond du couloir, avec des mitrailleuses lourdes montées sur trépied, qui se mirent à rugir, et des rangées de batteries de lance-missiles, qui balancèrent des roquettes en rafale. Tout le couloir s’enflamma ensuite, et les soldats des Prescients observèrent l’épaisse fumée, espérant avoir enfin vaincu les deux Anges... Quand Lucifer apparut alors sur eux, le souffle de ses ailes fauchant la moitié des soldats. Ses yeux flamboyaient, luminescents,  tout son corps semblant vibrer de magie, ses cheveux se soulevant même un peu.

« C’est par ici, derrière cette porte... »

Lucifer toucha l’épais mur, en sentant une force particulièrement sombre derrière... Qui lui rappelait un peu l’empreinte de Nyarlathotep. L’Ange soupira alors lentement, puis se concentra. Cette porte était la plus résistante de la Pyramide, et il laissa Yennesä le couvrir entre-temps, car de multiples renforts ennemis approchaient. Lucifer se concentra, et, au bout de quelques secondes, la porte explosa à son tour. Et ce qu’il y avait de l’autre côté... Le surprit.

Jadis, le cœur de la Pyramide avait dû être un centre nerveux, bourdonnant de machines informatiques, de câbles, de générateurs, et de ventilations. Maintenant, on aurait dit... Une sorte de grande cathédrale, avec, à droite et à gauche, de multiples corps attachés le long des murs, qui se vidaient de leurs sangs, des câbles plantés dans leurs corps, et filant vers une sorte de grand autel au centre, où des hommes en robes formaient un cercle. Lucifer fronça les sourcils, et vit que l’autel était un guéridon supportant un livre.

« Mais qu’est-ce que... ?! »

Plus tard, bien des siècles, ou bien des millénaires après, quand les Anges affronteraient les Démons lors du Grand Conflit, ils seraient bien plus familiers avec cette sensation, avec cette force magique... C’était de la magie noire, mais celle que Lucifer et Yennesä ressentaient en ce moment était, si cela est possible, encore plus malveillante que la magie démoniaque. C’était la magie des Grands Tyrans. Une magie corrosive, qui avait corrompu les corps des Prescients, faisant pousser des pustules et des furoncles sur leur corps, avilissant leur peau.

Les Prescients se trouvaient donc là, et Lucifer comprit pourquoi la Lune Sanglante était sur cette planète.

« Ces fous les ont appelé... »

Ils prononçaient une étrange mélopée, dans une langue arcanique que Lucifer n’avait encore jamais attendu, et qui amenait les cadavres cloués aux murs à gémir et à soupirer, leurs muscles se crispant sur place. Ils émirent de longs soupirs, et l’air se mit à vibrer dangereusement. Fronçant les sourcils, Lucifer vit alors un Portail se former, et une silhouette sombre en émerger. Fronçant les sourcils, l’Ange vit des tentacules noirs émerger, puis... Un monstre débarqua, plutôt volumineux, heurtant violemment le sol en émergeant du Portail noirâtre, et poussa un hurlement terrible à leur intention.

La créature était absolument ignominieuse, parcourue d’une multitude de yeux globuleux, de bouches acérées, et de tentacules noirâtres, un amas de choses difformes et grotesques, qui élança vers les deux Anges ses tentacules, crachant depuis ses gueules des jets d’acide.

« Fais attention, Yennesä ! »

Lucifer s’envola, et vit l’un des Prescients tendre ses mains vers lui, envoyant une onde de choc qui heurta l’Ange, le repoussant sur plusieurs mètres.

*Ces fous se sont vendus à ces monstres...*

Mais qu’était donc ce mystérieux livre qu’ils tenaient ? Lucifer était convaincu qu’ils étaient sur quelque chose d’important, quelque chose qui justifiait que Nyarlathotep ne pulvérise pas la Pyramide avec ses attaques surpuissantes. Restait maintenant à le récupérer...

À peine Yenessä était venue à ce monde, à peine était-elle à présent en train de se battre. C’était sa destinée, son but. Le combat était l’une des bases sur laquelle son être avait été construit, c’était d’ailleurs pour cela qu’on disait qu’elle était une guerrière. L’une des premières Ange guerrière ; et cela se voyait. Certainement pas aussi forte et aguerri que son camarade, mais d’ores et déjà téméraire et puissante. Le duo fraya son chemin dans la Pyramide, tentant de rejoindre son centre où visiblement quelque chose se passait. C’était bien le centre de cette structure qui semblait être l’intérêt de tous … Qui sait ce qu’ils trouveront à l’intérieur. Mais avant d’y parvenir, ils durent affronter nombre de défenses.

Des méchas, des soldats, et autres systèmes de défenses élaborées qui ne freinèrent que relativement leur avancée. Leur puissance et la leur étaient incomparables. De ce fait la progression était plutôt rapide malgré tout. Vint un moment où il y avait la dernière porte à franchir, qui était cette fois-ci particulièrement épaisse. Yenessä laissa faire son camarade – car il était mieux placé pour faire cela – et obtempéra. Elle le couvrit pendant qu’il ouvrait l’accès, ce qui se résuma à griller les méchas qui approchaient, et à lacérer de sa lance les autres bonhommes ayant le malheur de se frotter à elle. En véritable furie du combat, la Séraphine couvrit ainsi les arrières de son comparse pendant qu’il terminait son affaire.

Il ne mit pas longtemps avant d’ouvrir la porte, révélant ainsi une scène d’horreur. Même Yenessä sentit ses intestins se contracter en voyant ce que renfermait donc le cœur de la Pyramide. Des cadavres sur les murs, et des hommes en robes au loin, formant un cercle. Ils étaient en train d’accomplir un rituel obscur, dont le but en serait très bientôt révélé. Yenessä sentit cette magie … Une magie puissante et corruptrice, qu’elle ne connaissait pas jusqu’à présent. Mais ce dont elle était sûre, c’était qu’elle était maléfique et ô combien puissante. Visiblement elle émanait des Prescients ou plus précisément, du livre. Mais elle n’eut pas vraiment le temps de cogiter puisqu’un portail finit par se créer, et laissa alors échapper une vile créature difforme et affreuse. Aussi moche que dangereuse, ladite créature cracha en direction des deux Séraphins son venin.

Ils s’envolèrent pour esquiver, mais l’un des Prescients usa de ses capacités octroyées par le Tyran pour envoyer Lucifer contre le mur, le repoussant. Yenessä grinça des dents puis resserra sa lance dans sa main. Elle tendit immédiatement sa main pour riposter contre le monstre, et déferla sur lui sa puissance magique, tentant de le calciner par des multiples arcs électriques. L’Ange s’élança dans un combat contre lui, et espérais que son camarade s’occuperait des Prescients et du livre pendant qu’elle s’occuperait du monstre. Toujours en conservant sa déferlante électrique sur lui, elle fila à vive allure, lance en main, bien déterminée à le pourfendre de part en part !

C’était un shoggoth, l’un des serviteurs des Grands Tyrans. Les Anges avaient déjà pu remarquer que ces monstres servaient aux Tyrans comme autant d’esclaves, construisant leurs immenses cités cyclopéennes, leurs temples horribles, et servant volontiers de chair à canon. Des créatures redoutables, amas gélatineux qui, à leur manière, étaient sans aucun doute les ancêtres des futurs Slimes. Mais ces shoggoths n’avaient rien de sexuel. Ils dévoraient, tuaient, corrompaient, avec une frénésie furieuse. Nombreux, ils étaient une force de frappe puissante, et chaqsue shoggoth était difficile à occire. Celui-là paraissait particulièrement puissant. Yennesä se rua sur lui avec sa lance, et parvint à le pourfendre, s’enfonçant en réalité dans sa masse.

« YENNESÄ ! NOON !! »

Trop tard ! Endiablée, l’Ange avait foncé, en tombant dans l’un des pièges classiques du shoggoth. La masse du monstre était malléable, car il n’était pas un corps solide, mais liquide. Yennesä s’enfonça en lui, comme si elle plongeait dans une sorte d’eau épaisse et boueuse, et, très rapidement, le shoggoth se referma sur elle, et commença à drainer son énergie. Lucifer connaissait ce sort, et savait qu’il fallait agir rapidement. Il concentra alors sa magie, mais les Prescients, conscients qu’ils tenaient là une opportunité de tuer l’un de leurs ennemis, et, mieux encore, de l’offrir en offrande aux Tyrans, envoyèrent des sorts magiques sur Lucifer.

Plus tard, Lucifer parviendrait aisément à repousser la magie noire, mais, pour l’heure, ce type de magie lui était encore relativement inconnu. Il savait combattre la magie élémentaire, mais ignorait totalement que la magie noire puisse être manipulée par autre chose que les Grands Tyrans.

*Les humains peuvent donc avoir l’âme suffisamment noire pour manipuler une magie si sombre...*

L’Ange s’arracha à cette pensée pour l’heure, et généra autour de lui un bouclier magique, blanchâtre et lumineux, repoussant les nuages noirs qui l’assaillaient.

« Il est si fort, si puissant...
 -  Rappelez-vous tout ce que nous avons fait, mes frères ! Tous nos sacrifices !
 -  ASSEEEZZZ !! »

Le bouclier explosa en une violente onde de choc, renversant les Prescients, et Lucifer envoya une boule lumineuse contre le shoggoth, qui explosa sur lui, dans un *SPLOUITCH !* écœurant. Yennesä, sonnée, tituba sur place, et Lucifer se pencha sur elle, l’empêchant de sombrer.

« Yennesä, ma sœur... »

Sa peau était froide, et Lucifer, sans plus attendre, plaqua ses lèvres contre les siennes, optant pour un bouche-à-bouche très particulier, puisqu’il insuffla de son énergie en elle. Une saine chaleur se répandit ensuite dans le corps de l’Ange, tandis que le shoggoth, laborieusement, se reconstituait sur place. Finalement, les paupières de Yennesä se mirent à papillonner, et Lucifer se permit un léger sourire.

« Nous avons perdu assez d’Anges aujourd’hui, Yennesä... Il est vain d’attaquer le shoggoth avec des armes physiques, seule notre magie peut le détruire... »

Les Prescients se concentrèrent à nouveau, et le shoggoth attaqua également, balançant une nuée de tentacules sur les deux Anges. Lucifer forma alors un nouveau bouclier, contre lequel les assauts ennemis se fracassèrent. Le Porteur de Lumière en serra les lèvres, des gouttes de sueur commençant à couler de son front étincelant.

« Charge ta magie, ma sœur... Laisse-là déferler en toi, et, dès que j’abaisserai ce bouclier, répands-là. Notre pureté les broiera sur place ! »

Yenessä avait beau avoir l’air forte et puissante, elle demeurait une recrue assez jeune. Inexpérimentée et sans savoir … C’était ce qui lui couta très cher au moment où elle s’élança vers le monstre. Alors qu’elle pensait pouvoir le pourfendre de sa lance, le shoggoth sembla se liquéfier et piégea alors la Séraphine qui tomba dans le panneau. Elle s’enfonça malgré elle dans le corps du monstre, qui se referma sur elle. Yenessä tenta de se débattre mais elle sentait alors la créature se mettre à drainer ses forces. Tel un vampire assoiffé de sang, le monstre aspirait son énergie, ce qui petit à petit laissa Yenessä sans force, inerte. Elle n’entendit que vaguement ce qui se passait dehors, notamment la riposte de son camarade qui fit tout pour la délivrer de cette mauvaise situation. Il y parvint, après avoir fait un effort considérable pour repousser les Prescients, et atteindre la bête.

Vidée de ses forces, Yenessä était certes libérée mais titubante, et au moment où elle allait sombrer dans l’inconscience, son frère vint à la rattraper. Température froide et yeux à moitié clos, Yenessä était dans de sales draps. Sa vie n’était pas en danger mais, elle n’avait plus aucune force. C’était à cause du précédent shoggoth, où si elle avait un peu tempéré sa hargne, elle aurait pu éviter tout ceci. Elle n’avait plus la force de se battre à présent, mais ça, c’était compter sur son ignorance. Elle était jeune et inexpérimentée, même en ce qui concernait sa propre race. Son camarade fit alors quelque chose qui lui redonna couleur et énergie. Il porta fermement ses lèvres aux siennes, effectuant un bouche-à-bouche durant lequel il transmit une partie de sa propre énergie à Yenessä.

Au bout de quelques instants, ses yeux se rouvrirent en papillonnant et elle put voir le visage de son sauveur de près, qui la gratifia d’un mince sourire. Il venait de la sauver, pour la première fois … On ne mentait donc pas sur son compte. Yenessä le regarda et lui rendit son léger sourire, avant d’acquiescer face à ce qui lui demanda. Elle devait à son tour faire quelque chose. Alors que la créature et les Prescients répliquèrent, le porteur de la lumière généra un bouclier pour se protéger lui et Yenessä. Mais ce n’était que temporaire, le temps pour la nouvelle recrue de faire parler sa magie. Elle devait se préparer, et déferle tout son potentiel, un peu à la manière de ce qu’elle avait fait précédemment dans la ville. Elle se redressa puis ne perdit pas de temps pour se concentrer. Elle serra ses poings et inspira grandement, comptant chaque seconde qui passait.

La vision de ce shoggoth, ces cadavres sur ces murs, ainsi que la mort de toutes ses sœurs et frères en ce jour … Il y avait de quoi déclencher sa colère. Même si leur mort ne signifiait pas grand-chose, puisqu’ils se réincarneraient à nouveau, c’était toujours douloureux. Yenessä ressentait cette douleur, qui la brûlait, qui la consumait. Ses poings se serrèrent alors que des arcs électriques commencèrent à la parcourir de part en part. La colère, voire … La haine de ces créatures qui lui faisaient face monta en elle, jusqu’à lui faire atteindre son paroxysme. Elle voulait qu’ils meurent, tous. Qu’ils souffrent à jamais, et pour cela, elle devait mettre fin à leur vie, définitivement. Si seule la magie pouvait venir à bout d’eux alors … Il n’y avait aucune raison de se retenir. Ses yeux étincelèrent, alors que les arcs s’intensifièrent, jusqu’à ce qu’ils aillent foudroyer les cadavres et les objets environnants d’eux-mêmes. « MOURREZ ! » S’écria-t-elle, alors que Lucifer abaissa sa barrière, lui permettant ainsi de déferler sur les Prescients et le shoggoth.

Yenessä tendis ses bras et laissa sa magie prendre totalement possession d’elle. La foudre jaillit d’elle dans tous les sens, aveuglant tout le monde par leur lumière à faire brûler l’iris. Puis elle frappa sans pitié tout le monde sauf Lucifer …

Un shoggoth n’était pas un ennemi à prendre à la légère, et celui-ci semblait, du reste, particulièrement puissant. Fort heureusement, le bouclier magique généré par Lucifer tenait bon, lui permettant d’insuffler un peu de chaleur en Yennesä... Et ce qui se passa ensuite fut inattendu. Certes, Yennesä fit ce qu’il lui avait demandé, et Lucifer abaissa son bouclier, mais vit une véritable déferlante de magie, qui explosa dans toute la pièce. Un éclair lumineux particulièrement vif s’échappa des mains de l’Ange, et frappa le torse d’un Prescient, l’enflammant sur place dans des hurlements de douleur, et d’autres éclairs frappèrent les corps le long des murs, les incendiant également, le choc les faisant tomber sur le sol en les détachant de leurs clous. Lucifer ferma les yeux pendant quelques secondes, ébloui par la puissance de la jeune Ange, qui laissait parler, non seulement sa puissance, mais aussi... Sa rage.

*Non, Yennesä, pas comme ça !*

Lucifer serra les dents en se reculant encore. Le shoggoth fut transpercé d’éclairs, mais envoya de nouveaux tentacules vers la jeune femme. Lucifer, en soutien, concentra également sa magie, et envoya un rayon lumineux qui perça les éclairs de Yennesä, et transperça le shoggoth, avant de ressortir de l’autre côté, et de défoncer le mur. Le puissant rayon alla en fait jusqu’à ressortir de la Grande Pyramide.

Éventré, le shoggoth commença à se déstabiliser sur place, et Lucifer enchaîna, sachant que la créature comptait se reconstituer, en provoquant d’autres trous. C’était le meilleur moyen de terrasser un shoggoth, en tirant en lui, jusqu’à ce qu’il soit totalement déstabilisé, d’un point de vue moléculaire. Le shoggoth se désintéressa de Yennesä, et bondit vers Lucifer, fonçant vers lui, toutes gueules déployées. Lucifer s’élança alors dans les airs, évitant la charge du monstre, et abattit sa main vers l’ennemi, envoyant une puissante onde de choc qui frappa violemment le shoggoth, et défonça le sol, enfonçant une partie de ce dernier, creusant un cratère et de multiples zébrures. Lucifer envoyait une puissante onde d’Air, et continua encore à l’envoyer, jusqu’à disloquer, petit à petit, le shoggoth.

*Disparais, saloperie !*

Lucifer commençait à sentir des gouttes de sueur perler. Fort heureusement, les Prescients n’étaient plus là pour le gêner... Car Yennesä les avait massacrés. De fait, la jeune Ange vint même le soutenir, apparaissant à côté de lui, et, tout en se concentrant sur sa tâche, Lucifer ne manqua pas de l’observer.

« Il faut en finir, ma sœur ! »

Le shoggoth se tortillait et grognait... Et finit soudain par exploser. Dans un bruit spongieux et, en réalité, peu agréable à entendre, la créature se volatilisa en mille morceaux. Lucifer put alors reprendre son souffle, tout en percevant également l’odeur écœurante de la carcasse du monstre. Il se retourna alors vers la jeune Ange, et fronça les sourcils.

« Nous reparlerons plus tard de ce qui s’est passé, Yennesä. »

Pour l’heure, Lucifer s’intéressait davantage au livre des Prescients, et s’en approcha. Ce dernier était écrit dans une langue inconnue, faite de mots improbables. Lucifer fronça les sourcils, en sentant une terrible force suinter des lignes de l’ouvrage, et s’attarda sur ce qui ressemblait à des vers :

« Ya na kadishtu nilgh'ri stell'bsna Nyogtha,
K'yarnak phlegethor l'ebumna syha'h n'ghft,
Ya hai kadishtu ep r'luh-eeh Nyogtha eeh,
S'uhn-ngh athg li'hee orr'e syha'h. »

Lucifer attarda ses yeux sur un mot, qui revenait à deux reprises dans ce qui, somme toute, s’apparentait à un fort curieux poème :

« Nyogtha... »

Devant le regard interrogateur de Yennesä, Lucifer fit une précision :

« C’est l’un des Tyrans... Une créature qui attaque depuis les profondeurs d’une planète. »

Qu’était donc ce livre ? Lucifer fit tourner les pages, et constata, rapidement, qu’il n’y avait rien d’ordonné ou de structuré dans ce livre. Pas de numérotation, pas de chapitres, et, s’il y avait des poèmes, il y avait aussi, parfois, de la prose. Et, toujours, cette énergie malfaisante qui suintait de ce livre. Inversement, certaines pages comprenaient des schémas montrant les Grands Tyrans. Lucifer sentit alors une migraine s’emparer de son esprit, et ferma les yeux en soupirant.

*Porteur de Lumière...* résonna soudain une voix sombre et caverneuse dans son esprit.

Lucifer soupira à nouveau, et s’écarta alors du livre, semblant comme épuisé, la respiration lourde et haletante.

« Ne... Ne regarde pas ce livre, Yennesä, il... Il est maléfique ! »

Le Porteur de Lumière ferma les yeux en grognant, sentant des images maléfiques dans sa tête.

*Porteur de Lumière, Porteur de Lumière... On est toujours aveuglés par la Lumière, Porteur, ne le sais-tu pas ?!
Sors de ma tête, qui que tu sois !
Sortir de ta tête ? Tu ne peux pas te séparer de moi, Lucifer, et tu le sais...*

Les pages du livre scintillaient dangereusement, les mots flottant sur place, et attiraient inexorablement Yennesä, des voix chuchotant dans son esprit.

*Tu masques ton vrai potentiel, Yennesä... Tu le masques derrière tes idéaux idiots.... Regarde la puissance que tu as déployé contre ces infâmes créatures. Méritaient-elles ta pitié ? Non... Tu as agi en laissant parler ton instinct, et c’était bon, si bon... Tu ne peux pas nier cette sensation que tu as ressenti, pas face à moi... Cette puissance, cette liberté retrouvée... Tu pourrais faire tellement plus que ce que tu fais en ce moment, Yennesä... Venger la mort de tes sœurs tuées au combat... Si seulement tu acceptais de libérer ton potentiel, et de ne plus te laisser restreindre par des idéologies morales absurdes qui n’ont pas lieu d’être...*

Lucifer avait commis une erreur. Il avait cru que ce shoggoth constituait la menace principale de cette pièce... Mais il n’en était rien. Cette menace, c’était ce livre, ce livre infernal, et, pour son malheur, il avait sous-estimé sa puissance, et en payait maintenant le prix. Les mots n’étaient pas neutres, ils n’étaient pas juste que de l’encre couchée sur du papier. Les mots avaient un sens, un pouvoir, une force. Et, tout comme les mots pouvaient éduquer et enseigner, ils pouvaient aussi détruire et briser.

Et les mots des Grands Tyrans étaient les plus terribles qui avaient jamais été écrits.

On pouvait facilement dire que Yenessä avait fait parler plutôt sa rage que sa sagesse à ce moment-là. Etait-ce mauvais pour un Séraphin ? Elle ne le savait pas, mais en tout cas elle ne pouvait se cacher le fait qu’elle avait apprécié déferler sa puissance sur ces moins que rien, qui étaient sans doute partenaires de crime du Grand Tyran responsable de cette situation. Sa magie parla pour elle, et alors qu’une lumière aveuglante partit dans tous les sens, elle calcina sur les places les Prescients et les cadavres accrochés aux murs. Yenessä ne désirait même pas contrôler là où frappait ses éclairs car en toute somme, elle désirait tous les voir mourir. Les Prescients et le shoggoth. Cependant la créature, si elle fut frappée, ne fut pas tuée. Ce fut son compagnon d’arme qui l’aida avec sa propre magie pour le transpercer de toutes parts afin de le déstabiliser, puis pouvoir enfin le tuer.

Tout ceci se termina en une victoire écrasante des deux Anges sur les infâmes. Yenessä aida son compagnon à en finir avec le shoggoth, l’appuyant magiquement pour faire éclater le monstre en mille morceaux, non sans provoquer du dégout face au bruit qu’il émit. La Séraphine n’aimerait ne plus avoir à entendre un bruit pareil, de préférence … Même si au fond, sa longue vie de guerrière qui l’attendait ne lui réservait que ce genre de petites choses. Cependant alors qu’elle pensait que c’était fini pour la Pyramide, le porteur de la lumière se tourna vers elle et fronça ses sourcils. Visiblement il n’avait pas apprécié la façon dont elle avait fait parler sa magie … Et il lui annonça qu’ils allaient devoir reparler de tout ceci en temps convenu. Yenessä était rigoureuse et acquiesça simplement, acceptant la sentence.

Mais, l’attention de l’homme se vit vite saisir par le livre. Un livre dont émanait une terrible aura … Même Yenessä qui n’était pas en train de le lire ressentait cette énergie corrompue. Elle n’aimait pas beaucoup l’idée de voir son camarade s’en approcher et le lire … Et cela ne fut d’autant plus vrai que lorsqu’il se mit à regarder Yenessä en lui expliquant ce qu’était Nyogtha. Mais le plus troublant fut sa soudaine migraine, alors qu’il ferma ses yeux. « Vous allez bien, mon frère ? » Demanda Yenessä suspecte, le voyant soupirer en fermant ses yeux. Il lui indiqua de ne pas s’approcher du livre car il était maléfique … Mais, c’était trop tard. Les mots du livre se mirent à briller et attirèrent Yenessä, comme si elle était … Hypnotisée. Et quand elle fut à portée, la migraine s’empara d’elle à son tour. Une voix s’éleva doucement dans sa tête, et bien qu’elle tenta de la réduire au silence, elle n’y parvint pas.

Une voix pernicieuse et forte, qui lui susurra du poison dans l’esprit destiné à la faire douter, à la faire craindre … À la corrompre. Cette voix, était-elle celle d’un Grand Tyran ? Yenessä s’en doutait mais était trop occupée à luter et à chasser cette voix hors de son esprit pour s’en convaincre. (Vos paroles ne sont d’aucune efficacité contre moi, quoique vous soyez.) Dit-elle à l’intrus, dans son esprit. Elle tenta de se ressaisir, avant d’attraper son camarade par le bras, afin de le tirer de son état de pensée. « Partons d’ici, mon frère ! Et détruisons ce livre avant qu’il nous cause des torts ! » S’exclama-t-elle, parlant de manière sérieuse. À ses yeux, détruire cet artefact maudit résoudrai le problème … Elle était bien naïve.

Une migraine épouvantable lui fracassait l’esprit, et il titubait, à moitié couché sur le sol, en voyant d’étranges visions sinistres...

*Il vit des flammes jaunes, un océan de feu à droite et à gauche d’un pont de terre rouge et de cendres, menant à un sinistre palais aux tours noires, entourées de créatures sinistres qui voletaient avec des ailes noires aux pattes crochues. Il s’envola d’un coup, surplombant le rempart à l’entrée, où des crânes et des têtes de mort étaient accrochées aux créneaux, et rejoignit une terrasse où elles l’attendaient. Trois superbes beautés qui exhalaient un parfum de beauté, de stupre, et de cruauté. La plus âgée des sœurs avait encore les doigts tâchés de sang, et tenait dans la main un cœur chaud, qui bouillonnait.

« Tiens, mon aimé... Le cœur chaud d’une vierge, pure, ramenée par mes soins, en gage de mon amitié et de mon indéfectible amour... »

Il vit alors sa main s’approcher de ce cœur chaud... Une main longue, noire comme l’encre, surmontée de longues griffes, puis attrapa l’organe, et le dévora, avant de s’approcher d’une fontaine au centre, où il put admirer son reflet dans le miroir.... Et ne put supporter cette vision de cauchemar, ces yeux rouges, ces cornes enflammées, cette malveillance incarnée...*

« NON ! »

Sa voix tonna soudain, tombant comme un couperet, interrompant Yennesä. De toute manière, même si elle avait tenté de tirer sur le Necronomicon, il y avait fort à parier qu’elle n’aurait pas pu le détruire. Mais était-ce contre elle que Lucifer avait hurlé ? Ou contre l’insoutenable vision qu’il venait d’avoir ? Il se redressa brusquement, le visage en sueur, et observa encore le livre, luis emblant entendre une voix railleuse rire dans son esprit.

*Porteur de Lumière... Si tu savais quelle est ta destinée, tu irais danser nu sur la plage, Lucifer !*

De la main, il invoqua un sort d’Air, et referma abruptement le livre maudit. Il regarda alors Yennesä, avec un air inhabituellement dur et sec, sans rien dire. Ses yeux, néanmoins, brillaient intensivement... Quand la Pyramide se mit à vibrer dangereusement. Le toit se fracturait, d’épaisses zébrures venant se former, la poussière et des morceaux de plâtre se mettant à tomber sur eux.

« On... On a besoin de ce livre, Yennesä, il... Il faut l’emmener auprès du Conseil des Archanges, afin qu’ils l’étudient. Il contient des informations sur ces ennemis. C’est ça que Nyarlathotep veut récupérer, et... Il nous le faut. »

Et Lucifer devait aussi comprendre... Comprendre ce qu’était cette vision. Pure malice, essayait-il de se convaincre... Mais comment un mensonge aussi grossier pouvait à ce point le heurter ? Il posa sa main sur la couverture du livre, et forma un bouclier doré, émettant une protection dorée... Puis le plafond explosa violemment, et, Lucifer vit la silhouette massive de Nyarlathotep se dresser au-dessus d’eux, son puissant œil rouge les fixant, l’une de ses mains posées sur le rebord de la pyramide, déchiquetant cette dernière.

« J’ai une proposition... » entama alors Lucifer, sur la défensive.

Il regarda brièvement Yennesä, et déploya ses ailes :

« On se replie ! »

Ce fut un refus catégorique et sec que Yenessä se reçut, à peine venait-elle de formuler le désir de détruire le livre. Venait-elle de terminer sa phrase que le porteur de la lumière sortit de sa torpeur, et lui intima de ne pas faire ça. Par un simple non, exprimé de manière ferme et autoritaire. Il se redressa et Yenessä put voir son regard, son visage acéré et dur. Ses propres yeux à elle se froncèrent, ne comprenant pas l’attitude de son frère. Celui-ci fit parler ses pouvoirs pour faire refermer le livre et le protéger, au moyen d’une barrière magique. Comptait-il réellement emporter un tel artefact auprès des Anges ? Avec un tel niveau de corruption, qui savait les dégâts que ça pourrait avoir rien qu’en l’emportant là-bas ? Mais Yenessä était trop jeune pour s’opposer au porteur de la lumière, et ne répondit rien.

Néanmoins, le tout fut brutalement interrompu quand le toit de la Pyramide commença à s’effondrer. Et ce n’était pas à cause d’une quelconque activité sismique ; mais à cause du Tyran, qui venait d’arracher de ses propres mains le toit. Yenessä leva subitement la tête et put ainsi observer l’Œil rouge. C’était impressionnant, voire apeurant … Si on ne possédait pas le caractère sanguin de Yenessä. Cela ne l’empêchait pas d’avoir peur, mais elle aurait bien voulu tenter de le combattre, dans sa grande naïveté. Cependant son camarade la rappela à l’ordre et lui suggéra de partir d’ici au plus vite. Il déploya ses ailes en conséquence, avant que la nouvelle recrue ne l’imite. Elle acquiesça et ne cherche pas à dire quoique ce soit. Elle n’avait pas grand-chose à dire sur le moment, mais nul doute que des choses allaient devoir s’expliquer par la suite.

Ainsi, Yenessä s’envola à la suite de son camarade, mais s’échapper d’un Tyran n’était pas une mince affaire. Voyant l’Œil, elle était tentée de l’attaquer, de faire à nouveau parler sa force et ses pouvoirs pour ne serait-ce que … Quoi faire au juste ? Le retarder ? Le distraire ? Yenessä pouvait faire ce qu’elle voulait à ce stade, rien ne pouvait atteindre cette créature. La meilleure solution restait donc de fuir, effectivement.

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(C'est court, désolé ><)

Leur vitesse leur permit de s’élever rapidement, arrivant dans les airs, mais Nyarlathotep n’eut aucune difficulté à les suivre, son redoutable œil rouge les pistant, tandis que sa longue trompe, la Langue Sanglante, se mit à agir, et se transforma en un terrible puits de gravité. Lucifer et Yennesä s’(étaient envolées le plus loin possible, mais s’arrêtèrent brusquement, en sentant l’attraction de la Langue Sanglante, qui les repoussa en air.

*Sa force d’attraction est incroyable... Il nous ramène vers lui !*

Il ne faisait néanmoins pas que ramener ses proies, mais aussi les éléments environnants, comme la Grande Pyramide éventrée. Elle se disloquait maintenant intégralement, se déchiquetant sur place pour se rapprocher de l’extrémité de son tentacule. Lucifer avait formé un bouclier, et s’était posé sur le sol, s’agrippant à ce dernier, mais son corps se soulevait, se tendant vers l’arrière. Il s’agrippait à un long tuyau métallique niché dans le sol, mais sentit la structure sur laquelle il était appuyé se mettre à gémir, se broyant et se tordant sur place...

« Ce monstre nous attire ! »

Lucifer lâcha soudain prise en partant en arrière, et vit l’Œil Rouge se rapprocher, délivrant un faisceau meurtrier. Là où son regard passait, il y avait un grand halo rouge sanguin, qui pulvérisait les malheureux pris dedans. Le Porteur de Lumière concentra sa magie, et balança un énorme cône lumineux, qui frappa de plein fouet l’Œil. Nyarlathotep poussa un hurlement de rage et de frustration quand l’énorme lance le frappa, éclatant contre son corps, relâchant l’onde magnétique dans une puissante déflagration, qui souffla tous les éléments attirés autour de lui, comme des milliers de projectiles meurtriers, qui s’écrasèrent à des kilomètres à la ronde.

Malmenés comme de simples morceaux de chiffon, Lucifer et Yennesä furent également repoussés. Le corps de Lucifer heurta le sol, rebondit en l’air, et s’arrêta plusieurs centaines de mètres plus loin.

« Il est vraiment trop puissant, Yennesä. Il faut vite faire un Portail, et nous enfuir... Je... »

Lucifer se tut soudain en voyant une immense ombre se profiler à l’horizon, et leva la tête.

« Par tous les Anges... »

Le ciel était en train de se recouvrir d’une masse énorme, un corps si vaste et si immense qu’il en cachait progressivement la lumière du soleil... C’était le satellite naturel de cette planète, sa lune ! La Langue Sanglante avait attiré la Lune ! Cette dernière avait dévié de son axe, et était maintenant attiré par la gravité de cette planète. Incrédule, Lucifer n’arrivait pas à en croire ses yeux. La puissance du Tyran était si forte qu’elle en avait rompu l’attraction gravitationnelle existant entre cette planète et son satellite !

En soi, il était inexact de dire que la lune tombait sur ce monde, car, dans les faits, le satellite naturel d’une planète tombait toujours vers sa planète, mais tournait continuellement, grâce à la vitesse. Nyarlathotep, en utilisant son pouvoir gravitationnel, avait ralenti la vitesse du satellite naturel, et ce dernier était maintenant attiré par la planète. Le seul problème était que, ce faisant, il serait plus difficile de générer des Portails de téléportation, car le rapprochement de la Lune bouleversait les déplacements magiques.

De plus, Nyarlathotep, complètement indifférent à l’astre qui se rapprochait dangereusement, fouetta le sol avec son tentacule, éventrant la planète, créant un terrible séisme. Le sol se déroba sous les pieds de Lucifer, qui s’envola précipitamment, mais vit plusieurs nuées de monstres fondre sur lui et Yennesä, des rakyats affamés qui les firent basculer dans le précipice. Ils s’enfoncèrent dans les abysses d’une faille gigantesque, gargantuesque, et le Porteur les repoussa en faisant exploser sa magie autour de lui, carbonisant les monstres sur place, puis se retourna vers le plafond, cherchant à sortir du ravin...

...Et se reçut un énorme rocher en pleine figure, qui le fit lourdement chuter, l’envoyant heurter une plateforme, surplombant la croûte de la planète, où un énorme banc de lave était en train d’attendre. Le rocher se fracassa donc sur cette plateforme instable, explosant en mille morceaux, laissant sur place un Lucifer sonné, qui reprenait peu à peu ses esprits.

Dans le ciel, les monstres de Nyarlathotep déferlaient sur eux, mais d’autres Anges approchèrent alors, guidés par Michel.

« Venez ! hurla-t-il depuis les hauteurs. Nous allons générer un Portail commun ! Nyarlathotep a perturbé l’intégrité structurelle du noyau de la planète, elle est en train d’imploser ! »

La Langue avait frappé la planète si fortement qu’elle l’avait éclaté, déchirant les plaques tectoniques, qui se fracassaient violemment. De fait, Lucifer pouvait voir que tout s’écroulait autour de lui, faisant monter le niveau de la lave. Le temps qu’il se redresse et reprenne ses esprits, la lave le recouvrit d’ailleurs quand il y eut une épaisse éruption volcanique, faisant craindre le pire pour la survie du Porteur... Mais, fort heureusement, il avait eu le temps de se protéger en générant un bouclier magique, et se dépêcha alors de s’envoler, évitant les décombres, pour rejoindre la surface de la planète.

La lave remontait furieusement, et, alors que Yenensä et Lucifer se battaient contre les éléments, dehors, à l’emplacement des Grandes Pyramides, une montagne se souleva brusquement, une super-éruption volcanique venant déchirer la terre en deux, soulevant un épais nuage de feu... Et faisant pleuvoir autour de la super-éruption une intense pluie de cendres et de nuages sombres.

Le Chaos Rampant était en train de rendre hommage à sa réputation...

Le Chaos Rampant, était un terme bien faible quand on voyait ce qui se passait. Les deux Séraphins piégés dans la Pyramide finirent par s’élever dans les airs, mais tout ne se passa pas comme prévu. Le Tyran usa de sa force colossale pour créer un puissant champ d’attraction, qui broya tout sur son passage. Pierre par pierre la Pyramide se désintégrait pour se voir attirer vers son tentacule. Et tout ce qui se trouvait à des dizaines voire des centaines de kilomètres à la ronde, faisaient pareils. C’était aussi valable pour Yenessä et le Porteur de la Lumière, qui durent s’accrocher à quelque chose de solide pour ne pas se faire aspirer. Mais même avec cela, ce n’était pas suffisant ; l’attache finit par se disloquer à son tour, précipitant les deux guerriers vers le Tyran. Heureusement que le plus fort d’entre eux usa de sa magie pour déstabiliser Nyarlathotep, qui hurla sa douleur quand la lance toucha l’Œil rouge.

Mais ce n’était qu’un court répit. Puisque le soudain arrêt de l’attraction provoqua une gigantesque détonation qui envoya gicler les deux Séraphins, qui finirent leur route plus loin, en se fracassant au sol. Yenessä était certes forte, mais un tel choc ne pouvait faire autre chose que faire très mal. Elle ne put qu’être d’accord avec son supérieur quand il lui dit qu’il fallait créer un portail et vite. Mais comment faire ? Surtout avec la nouvelle catastrophe imminente ; la Lune. Le satellite naturel de cette planète qui se rapprochait dangereusement de la surface, à cause de la déformation gravitationnelle qu’exerçait le Tyran. En faisant cela, la Lune perturbait les déplacements magiques. Ce qui n’arrangeait pas les affaires des angéliques.

La Langue fouetta de toutes ses forces le sol, créant des failles monstrueuses qui laissèrent échapper des monstres. Monstres qui fondirent en partie sur Yenessä et Lucifer, les faisant tomber dans un gouffre béant. En d’autres termes ; c’était l’apocalypse. Le chaos total et complet. Yenessä peinait à lutter contre toutes ces forces qui se déchainaient, mais elle allait devoir le faire. Elle avait atterri, avec son acolyte, sur une plaque frôlant de près une poche magmatique du manteau terrestre. Mais ce ne fut que de courte durée, puisqu’ils parvinrent finalement à remonter à la surface, rejoignant les autres Séraphins, dont Michel. Ce dernier expliqua qu’ils allaient devoir créer un portail commun. C’était la seule issu pour faire sortir tout le monde de cette situation, vu que les courants magiques étaient eux-mêmes perturbés.

Autour d’eux, éruptions volcaniques et autres catastrophes arrivaient, déchirant de plus en plus cette planète dans son intégralité. Yenessä ne désirait pas trainer plus longtemps ici, surtout si la vie de ses camarades était en jeu. Il fallait décamper, et vite. Elle s’approcha alors de Michel. « Que devons-nous faire ? Mettre en commun notre magie ? Qui va nous protéger pendant qu’on créer le portail ? … » Dit-elle. « Je peux retenir les monstres pendant que vous vous chargez du portail, si ma magie n’est pas requise pour celui-ci. » Affirma-t-elle, raffermissant son emprise sur sa lance.

Depuis l’espace, c’était un spectacle très impressionnant à voir. Les attaques de Nyarlathotep avaient fracassé ce monde, et les dégâts qu’il avait causé pouvaient se voir depuis l’atmosphère. Outre la lune de la planète qui se rapprochait dangereusement, les immenses failles provoquées par les attaques de Nyarlathotep laissaient suinter d’immenses geysers, véritables murs de lave en fusion visibles depuis l’espace, où ils formaient de longues cicatrices rouges, fendillant la surface de la planète. Le corps cosmique était en train de mourir, de se désagréger de l’intérieur, mais sa destruction viendrait assurément du choc qu’il y aurait entre lui et son satellite naturel.

Lucifer et Yennesä semblaient bien insignifiants face au chaos engendré par le Tyran. D’immenses éruptions volcaniques avaient déchiqueté la surface, transformant la planète en de vastes zones volcaniques et mortelles, peuplées uniquement par les monstres du Tyran, qui se ruaient vers les Anges, recroquevillés autour d’une ultime île de protection, au milieu d’un paysage apocalyptique terrifiant. Partout, des failles libéraient de la lave, et le feu avait recouvert aussi bien le sol que le ciel, des flopées de cendres tombant dans tous les sens.

C’est ainsi que les deux Anges traversèrent plusieurs milliers de kilomètres en plusieurs minutes, utilisant leur vitesse surnaturelle pour rejoindre Michel. Yennesä s’empressa de demander à Michel comment ils allaient faire.

« Plusieurs Anges vont se charger de générer le Portail. Notre tâche est de les protéger ! »

Michel regarda brièvement Lucifer, qui acquiesça.

« Nous avons récupéré un précieux artefact. Je suis convaincu que c’est ce que le Chaos Rampant veut, et que c’est pour ça qu’il nous poursuit.
 -  Oui, je sens sa signature près de toi… »

Lucifer tendit la main, et fit apparaître l’exemplaire du Necronomicon, entouré par un champ de force qui en bloquait les effets. Michel fronça les sourcils, serrant les dents devant cette aura malsaine qu’il sentait. Le trouble sembla même se dessiner dans ses yeux. Comme tous les Anges, Michel était convaincu que, par définition, la connaissance était forcément bonne. Quand la connaissance devenait malsaine, c’était avant tout parce que les hommes l’utilisaient mal, mais, en soi, il partait du postulat qu’une connaissance ne pouvait qu’être bonne.

Mais ce livre ? Michel ne sentait que de la malfaisance en lui, et ce même malgré le bouclier que Lucifer avait généré autour de lui, bouclier qui servait, tant à protéger le livre en lui-même, qu’à protéger les autres. Confus, il finit par secouer la tête en entendant les hurlements des rakyats.

« Nous… Nous en reparlerons plus tard, Lucifer. Anges ! En formation ! Repoussez-les, mais pas d’excès de zèle ! Dès que le Portail sera généré, fuyez ! »

Lucifer acquiesça, et se tourna vers les nuages sombres qui s’amoncelaient dans le ciel. Depuis ces derniers, des milliers de points noirs apparurent, chacun correspondant aux monstres de Nyarlathotep. La Langue Sanglante continuait à les traquer, et les Anges, dans des hurlements belliqueux, s’élancèrent vers les monstres, silhouettes dorées et brillantes. Leurs rayons lumineux fusèrent, frappant les monstres, les décimant par dizaines.

L’ultime bataille sur cette planète désolée avait lieu, et elle faisait rage. Quand les rayons lumineux perçaient les nuages, on pouvait voir la silhouette massive de la Lune, qui s’approchait de plus en plus.

Sur l’îlot rocheux au milieu de la lave, sept Anges se concentraient, générant autour d’eux un vortex instable, qui remuait de plus en plus, au fur et à mesure qu’ils arrivaient à le stabiliser. Lucifer, de son côté, continuait à se battre avec une rage indiscernable. Il envoya depuis son épée une longue lame lumineuse qui découpa une dizaine de monstres, dont une Horreur chasseresse en deux.

« Allez ! Du nerf ! »

Plusieurs anges tombèrent lors de ce combat, et Lucifer lui-même se retrouva en mauvaise posture. Le vortex se stabilisait enfin, formant un Portail menant droit vers les Cieux, mais une météorite jaillit alors, et atteignit Lucifer dans le dos, le faisant hurler de douleur, tout en l’emportant.

« LUCIFER ! » hurla Michel.

Il vit son fidèle ami tomber comme une pierre, plusieurs plumes de ses ailes en feu, tandis que plusieurs rakyats s’empressèrent de l’attaquer, lacérant son corps. Dans un hurlement de rage, le Porteur concentra une sphère magique dans la paume de sa main, et déclencha une onde de choc incandescente autour de lui, vaporisant sur place les monstres, mais heurta le flanc d’un volcan dans sa chute, et s’étala au milieu des cendres, en toussotant bruyamment.

Lucifer se releva rapidement, voyant les monstres s’agglutiner vers lui…

*Ils veulent récupérer le livre…*

Le Porteur de Lumière serra les dents. Ses ailes étaient calcinées, et, même si ses plumes pouvaient repousser, il allait avoir besoin d’aide pour, non seulement repousser les monstres, mais aussi rejoindre le Portail, que les Anegs commençaient déjà à traverser pour évacuer…