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Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

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Serenos I Aeslingr

Humain(e)

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    Le Roi des Trois Royaumes et le personnage le plus influent d'Ayshanra. Derrière ses allures détendues et son sourire charmeur, Serenos est un homme dangereux et incontrôlable, et une constante menace pour les royaumes continentaux. Son mépris pour le protocole lui ont attiré le titre de "Roi Fou".

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 30 lundi 01 décembre 2014, 09:49:33

[Post de piètre qualité, je m'en excuse, mais je me rattraperai]

Serenos regarda encore un moment les gardes qui s’affairaient à examiner les preuves. Seulement, voilà, il n’était pas complètement insensible à la détresse d’Elena. Il dût reconnaître qu’elle démontrait d’une maturité exemplaire malgré sa frayeur, et qu’elle se contrôlait plus ou moins bien vu ce qu’elle venait de vivre. Il se tourna vers les gardes. Ils tentaient tant bien que mal de récupérer du matériel sur le sol, mais Serenos refusa catégoriquement qu’on lui reprenne son épée. Un garde tenta même de lui forcer la main, avant que son commandant ne lui ordonne de lâcher immédiatement la propriété de la Couronne Royale d’un pays étranger. Le Roi fit un bref geste de la tête pour remercier l’homme de sa maniabilité, mais il savait qu’ils ne trouveraient rien. Jamiel avait fait des miracles avec ses blessures, malgré leur origine magique. Elles lui faisaient terriblement mal. Il pouvait dire ce qu’il voulait du manque d’imagination de Jamiel au niveau de la magie, elle savait comment punir les intrus et comment élever des barrières très solides sans avoir besoin de poster une armée pour la maintenir en place.

« Vous ne trouverez rien… Allez… Allez me chercher un de vos maîtres-espions… et les Assassins Royaux… tous… Sortez d’ici… » Dit-il d’une voix chevrotante.

Les Gardes Royaux avaient une formation spéciale, ils pouvaient pister un assassin jusqu’à son repère dans une histoire de minutes, contrer des sortilèges sans eux-mêmes pratiquer la magie et leur entrainement poussé en faisait de véritables monstres de combat, et tout ça pour leur Reine, mais ils n’étaient pas formés pour retracer des preuves venant des Hommes Sans-Visages. Langley était le meilleur homme pour ça, mais même lui ne pouvait pas comprendre l’esprit tordu des assassins. Et puis, le temps qu’ils seraient absent, il pourrait en profiter pour s’occuper un peu d’Elena. Malgré leur attitude butée et farouchement loyale à la Reine, ils n’étaient pas dupe; Elena était une enfant à leurs yeux, et elle venait d’essuyer une tentative d’Assassinat, et même qu’elle en avait été l’appât. Ce n’est pas pour obéir à Serenos qu’ils prirent leur congé, mais par égard pour leur dirigeante, pour son honneur et sa fierté. Une fois la pièce désertée, le Roi de Meisa rengaina enfin Ehredna, s’assurant cette fois de la verrouiller dans un fourreau. Une fois, pas deux, pensa-t-il, évaluant qu’il était moins à risque de la perdre à nouveau dans le palais. Malgré la douleur, il s’approcha d’Elena et mit un genou en terre pour la regarder dans les yeux, son visage se reformant lentement pour laisser place à un visage lisse et doux, décrivant à nouveau une apparence d’un jeune homme de la vingtaine avancée.

« Ne vous inquiétez pas… Elena… Quoi qu’il m’en coute… je vous protégerai… parce que vous êtes la précieuse fille de Nöly et Liam. »

Bien qu’il ne le prononce pas, il était évident qu’il ne la protégeait pas que pour cette seule raison. Elle n’était pas que leur fille, mais tout ce qui lui restait de ces deux personnes d’exception qu’il avait aimé comme sa propre famille. Et s’en prendre à Elena était une déclaration de guerre contre lui, encore plus que les répercussions de l’acte s’il avait été mené à bien. Il se releva et comme d’habitude, lorsqu’il voulait trouver une solution tout seul, il se mit à faire les cent pas. Beaucoup à Nexus prenaient Serenos pour un fou, un impulsif, et une menace. Il devait y avoir quelque chose dont il pouvait tirer avantage de cette réputation, une manière qui pourrait profiter à cette recherche. S’il était important pour ses ennemis qu’il soit la cible de la haine collective de Nexus, c’était qu’ils pensaient qu’il était plus facile de faire de Meisa un exemple qu’Ashnard, et ils n’avaient pas complètement tort; Nexus possédaient après tout une armada bien plus impressionnante que Meisa, et les pourparlers avec Ashnard n’étaient pas encore terminés, ce qui leur laissait la porte ouverte pour une campagne maritime.

Il allait proposer une idée quand un son puissant, comme le tonnerre, attira son attention vers la porte; Alessa et Scar venaient d’apparaître dans le cadre de la porte. La femme jeta à leur pied l’homme qui avait tenté de tuer la Reine, avant de s’approcher de son monarque, les pieds frappant le sol si fort qu’elle fendait le marbre de ses pieds nus. Visiblement, elle et Scar avaient été arrachés de toute urgence à leur repos, et s’il avait pris la peine d’enfiler quelque chose, la Meisaenne n’avait même pas prit le temps d’enfiler une armure, se présentant dans la chambre de la reine avec une simple chemise et un pantalon de combat. Sans même dire un mot, elle se pencha sur le cadavre, lui arrachant quelque chose de son poignet, avant de lancer sur Serenos comme un villageois lançait une pierre à un lépreux. Elle était visiblement hors d’elle, et avec raison, à ses yeux; si le Roi était de retour, il aurait dû restaurer le lien immédiatement!

Le Roi aurait pu s’excuser, mais elle n’aurait certainement pas voulu l’entendre. Il se contenta donc de hausser des épaules et se pencha sur l’objet qu’elle venait de lui lancer. Une pièce, attachée à une cordelette. Il n’y avait pas de magie particulière, mais le Roi se doutait qu’il devait y avoir quelque chose à voir si elle lui avait fait remarquer son existence, donc, il l’examina attentivement, faisant tourner la monnaie entre ses doigts.

« Rasha… ekristem… rakturnal? C’est du Langage Primaire?  demanda le Roi en se tournant vers Alessa, haussant les sourcils.
-  Nous avons trouvé les mêmes sur les cadavres en Sylvandell. Nos experts ont cru à de la fausse monnaie, mais c’est bien de l’or. On ne fait pas de contrefaçon avec de l’or.
-  Et cet homme?
-  Ronald a fait quelques découvertes…
-  Ronald? »

Alors là, le Roi était abasourdi. Il n’avait jamais entendu Alessa appeler quelqu’un par son petit nom en dehors de son cercle d’amis intimes, qui se résumait à lui-même et ses sœurs d’armes. Bien que sa curiosité, volage telle une girouette, lui réclamait plus d’informations, il jugea que c’était un bien mauvais moment pour questionner la Matriarche. Il tendit la pièce à Jamiel avant de se tourner vers Langley. Plus réservé à son égard parce qu’il ne l’aimait pas, mais alors pas du tout car, hormis Liam, il répugnait la compagnie des paladins, il mit son animosité envers lui et son groupe de côté pour écouter ce qu’il avait à dire. Après tout, s’il avait le poste qu’il occupait, c’était parce qu’il était doué à ce qu’il faisait, autrement, Jamiel aurait probablement eu tôt fait de se débarrasser de lui.

Elena Ivory

Humain(e)

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 31 mercredi 03 décembre 2014, 01:50:29

L’attaque avait ébranlé Elena, et Serenos s’empressa de la consoler, lui assurant qu’il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour la protéger contre ceux lui voulant du mal. Un pâle sourire s’afficha sur ses lèvres. Elle ne trouvait rien de particulier à dire. Serenos voulait la protéger, tant de gens voulaient la protéger… Mais les ennemis étaient suffisamment forts pour déclencher des cyclones, des tempêtes qui avaient massacré l’intégralité de sa famille. De nouvelles personnes arrivèrent ensuite dans ses appartements, et Elena entendit des bruits en contrebas. Regardant par la fenêtre, elle vit que le cadavre avait disparu, et que les gardes royaux regardaient aux alentours, en se demandant où il avait bien pu passer. La réponse ne tarda pas à arriver. Les deux lieutenants de Serenos entrèrent, amenant avec eux le cadavre du Sans-Visage. Elena le contempla, légèrement effrayée, s’attendant presque à ce qu’il se relève, et ne les attaque. Bien évidemment, il ne se passa rien. L’homme resta silencieux, mort, figé dans l’au-delà, dans le trépas. Le groupe se mit à l’analyser, et Elena, elle, observa un peu son visage. Son crâne était fracassé, mais son visage restait partiellement visible… Un visage quelconque, une figure qui ne lui disait rien.

En inspectant ses vêtements, le groupe trouva une curieuse pièce de monnaie, similaire à celle rencontrée à Sylvandell. La Reine tiqua un peu. Sylvandell ? Qu’est-ce que le royaume montagnard venait faire dans cette histoire ? Serenos était-il en train de suggérer que Tywill Korvander, le Roi de Sylvandell, ait recruté ce Sans-Visage afin de la tuer, elle ?

*Non, c’est impossible !*

Les espions nexusiens avaient inspecté le budget de Sylvandell, en ayant accès à leurs archives administratives. Ils n’avaient pas un budget énorme, et n’avaient clairement pas les moyens d’embaucher des Sans-Visages. La Confrérie ne s’arrêterait pas facilement. Allaient-ils envoyer un autre assassin ? Qui était suffisamment riche pour les financer ? La piste la plus probable venait d’un bourgeois, d’une guilde d’esclaves, de riches nobles…  Mais la présence de Sylvandell faussait les données. Les Meisaens parlaient de Ronald, et, au même moment, comme si l’homme avait entendu la conversation, il tapa à la porte, puis entra.

« Majesté ?! »

Elena reconnut la voix bourrue et forte de Ronald Langley, Chambellan du Palais d’Ivoire, Commandant de la Garde Royale. Il arriva, la chemise légèrement mal rangée dans son pantalon, sans son armure, et avec les cheveux débraillés. Une arrivée bien trop tardive pour le paranoïaque Messire Langley, qui amena Jamiël à hausser un sourcil. Elle vit le bref regard furtif entre lui et Alessa, et n’en dit pas plus. Les femmes sentaient ce genre de choses. Elena ne le remarqua pas, car elle était encore sous l’émotion. De fait, elle l’était même tellement qu’elle était même heureuse de revoir Ronald Langley.

« Je vais bien, Sire Langley…
 -  Je suis désolé, Majesté… Mon système de sécurité vous a fait défaut. »

Elena ne trouva rien à ajouter. Elle espérait surtout que Ronald n’allait pas être tenté de restreindre davantage ses déplacements individuels. La Reine était relativement pragmatique. Ronald la protégeait bien, mais, parfois, tous les systèmes de sécurité au monde n’étaient pas suffisants, surtout contre les Sans-Visages. Regardant le corps, Ronald grommelait dans sa barbe.

« Que vaut un système de sécurité s’il n’est pas capable de se montrer efficace contre les véritables menaces ? Votre santé est cruciale pour la pérennité du royaume, et je n’ai pas réussi à le repousser… »

La Reine déglutit silencieusement, et se rapprocha de lui. Voir Ronald dans un tel état d’abattement était une chose rare, troublante, et elle se demandait presque s’il n’allait pas lui remettre sa démission.

« Ronald, reprenez-vous ! s’exclama Elena, surprenant l’assemblée. C’est un Sans-Visage, un assassin professionnel. Vous savez comme moi combien leur Confrérie est réputée. Si vous voulez vous faire pardonner, aidez-nous à savoir qui les a embauchés, et à les supprimer ! »

Le ton autoritaire instaura autour d’elle un léger silence circonspect. Ronald finit par secouer la tête.

« Les Sans-Visages honorent toujours un contrat. Le seul moyen de les neutraliser est de trouver leur cache. Ils se terrent dans les bas-fonds.
 -  Comment remonter jusqu’à eux ? Ils ont forcément des contacts dans la ville !
 -  Les gens ne parlent pas facilement, surtout quand il s’agit de la Confrérie… Mais je ne saurais tolérer qu’ils s’en prennent à vous, Majesté. Je vais personnellement m’assurer de faire parler chacun de nos informateurs dans les bas-fonds, afin de découvrir leur repaire.
 -  Traquer les Sans-Visages ne risque pas de vous rendre populaire auprès de certaines guildes et autres négociants qui font parfois appel à leur service, Majesté…
 -  Si ces gens ont fait appel à des assassins, ce sont des meurtriers ! Qu’ils me craignent, c’est très bien ! Je ne laisserais plus ces gens tenter de me menacer. Retrouvez-les, Ronald, ou vous serez renvoyé de vos fonctions. »

Ronald la regarda, surpris… Puis hocha légèrement la tête. Ce ton catégorique, cette lueur dans les yeux. C’était bien lui qui s’exprimait à travers elle.

La fille du Lion de Nexus.
DC d’Alice Korvander.

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Serenos I Aeslingr

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Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 32 mercredi 03 décembre 2014, 06:41:48

« Si ces gens ont fait appel à des assassins, ce sont des meurtriers ! Qu’ils me craignent, c’est très bien ! Je ne laisserais plus ces gens tenter de me menacer. Retrouvez-les, Ronald, ou vous serez renvoyé de vos fonctions. »

Bien qu’il veuille le cacher, un sourire ravi se dessina sur les lèvres du Roi de Meisa en réponse aux paroles les plus franches qu’il n’eut jamais entendu venant d’une si jeune femme. La voilà qui se comportait comme une vraie Reine. Il ne lui manquait plus que le côté plus implacable de son père, avec son ton d’orage, pour qu’il puisse voir en elle le guerrier que son ami avait été. Il ne sentit plus en lui le besoin de réconforter la jeune demoiselle, qui semblait avoir repris à la fois son aplomb et sa détermination. Peut-être que cette tentative d’assassinat avait éveillé en elle une part de révolte; elle refusait de mourir, elle refusait d’être une cible, et elle exterminerait les menaces qui pèsent depuis trop longtemps sur la famille des Ivory.

« Meisa prendra sur elle la responsabilité de trouver et d’exterminer les cellules des Sans-Visages se trouvant en Nexus en coopération avec le Commandant de la Garde Royale, Ronald Langley. En tant que Roi de Meisa et concerné par cette tentative, je demande vous demande humblement, Elena Ivory, héritière légitime du Trône d’Ivoire, Reine de Nexus, de Carenhal et d’Orghan, votre bénédiction. Moi, Roi Serenos, chef de la Maison du Sombrechant, Roi de Meisa et des Îles Vivantes, héritier des Ashanshas, j’offre à nouveau mon soutien et ma coopération à la famille des Ivory. »

Aussi surprenant que pouvait être Serenos pour la jeune femme, le voir retirer de sa hanche l’épée qui avait presque fauché sa vie, mettre un genou en terre et la lui présenter en signe de soumission avait probablement eu le même effet pour tous ceux qui étaient présent. Alessa eut même un haussement incrédule en regardant alternativement le Roi et la Reine, avant de hausser des épaules, un sourire flottant sur ses lèvres, avant de se placer avec sa collègue derrière son monarque, à sa droite, et de l’imiter, levant pour sa part simplement ses mains, les paumes vers le ciel. Serenos offrait à Elena son allégeance et son amitié inconditionnelle, une alliance qui ne concernerait peut-être jamais leurs royaumes, mais qui à jamais unirait leurs deux vies, tout comme il l’avait fait avec Liam et Nöly. Il reconnaissait officieusement la légitimité d’Elena, et la reconnaissait comme l’héritière de ses deux amis, lui offrant le même lien qui avait uni le trio des années auparavant. Évidemment, cette fois, il ne comptait pas la laisser mourir.

Elena pouvait décider de prendre Ehredna, accepter l’offre de Serenos et lui rendre sa lame, acceptant cette alliance qui ne concernait officiellement qu’elle et le Roi. Ainsi, elle serait assurée que le Roi de Meisa traquerait ses ennemis pour elle, en nom propre, et qu’il serait prêt à prendre les armes pour défendre son honneur et sa lignée, comme il le fit pour ses parents. Elle gagnerait par la même occasion le droit de faire valoir cette alliance en Meisa, de rappeler à Serenos qu’ils étaient liés par le serment de celui-ci. Ce faisant, puisque tout finissait toujours par se savoir en Nexus, elle risquerait néanmoins de s’attirer l’animosité des opposants du Roi parmi les membres du Conseil, ce qui lui ferait perdre quelques supporters parmi la noblesse, et certains lui retiraient définitivement leur appui.

Elle pouvait également décider de refuser l’épée. Ce faisant, Serenos mettrait définitivement fin à ses tentatives de renouer ses liens avec la famille des Ivory, ce qui ne l’empêchera certainement pas de faire un dernier geste pour ses défunts amis pour protéger leur fille de ceux qui lui veulent du mal en traquant et en exterminant les. Perdre le soutien de Serenos aura certes l’avantage de rallier à la cause d’Elena plusieurs familles nobles de Nexus, mais elle devra faire une croix sur les potentielles alliances et accords commerciaux entre Meisa et Nexus, puisque Serenos désavouerait toute connexion ultérieure avec elle. Serenos ne volera pas à son secours, et les cercles de magie fermeraient leur porte aux savants et magiciens Nexusien jusqu’à la prochaine génération royale.

Si elle le désirait, elle pouvait également consulter Jamiel pour peser le pour et le contre d’une telle décision. Elle n’était encore pas très expérimentée, mais Jamiel avait, pour sa part, plusieurs années à son actif à baigner dans les intrigues de la politique et du Jeu de la noblesse. Elle savait plus exactement que Serenos ce qui découlerait d’une alliance ou d’un refus. Elle avait la confiance du Roi, car ils avaient un passé commun et des cicatrices similaires et tout aussi vives depuis la disparition de leurs amis. Elle connaissait le Sombrechant, elle connaissait Meisa et la valeur d’une telle alliance. Ronald avait aussi son propre mot à dire, s’il le désirait, puisqu’il avait depuis longtemps baigné dans le monde Nexusien. Il connaissait la mentalité des nobles, les coutumes et les différents partis impliqués dans la politique, de qui il fallait impérativement se méfier et de ceux dont la loyauté était acquise à la cause de la Reine.

Serenos resta cependant immuable, alors qu’il attendait le verdict de la Reine. Pour sa part, il espérait de tout cœur qu’elle accepte son offre. Il pensait sincèrement pouvoir la protéger des ennemis qu’il lui causerait, et que leur coopération serait bénéfique dans l’avenir. Mais il devait également penser comme un Roi, et s’il se soumettait à elle en tant qu’ami, il ne lui donnait pas encore d’autorité réelle sur Meisa. À l’époque, Liam possédait même un titre officiel en Meisa, et même que le territoire de Vrahilel –Une petite ville de Meisa qui accueillait encore aujourd’hui quelques citoyens Nexusiens et des réfugiés politiques, à la lisière de la Forêt des Mages, juste au sud de la Forêt aux Araignées – attendait encore qu’Elena accepte d’en hériter. Il espérait qu’un jour, elle nourrisse le même émerveillement que sa mère devant les trésors naturels de son royaume, qu’elle visite les lieux que sa mère et son père ont foulés de leur vivant, autre que cet énorme palais.

Elena Ivory

Humain(e)

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 33 vendredi 05 décembre 2014, 02:14:16

Traquer les Sans-Visages ne serait pas une partie de plaisir, mais la Reine avait raison, et Ronald le savait. L’Histoire de Nexus avait toujours été faite avec ces hommes de l’ombre, ces confréries et ces guildes sombres. L’assassinat était toujours une forme de gouvernance politique, un moyen rapide et efficace de se débarrasser de rivaux, de concurrents, ou d’individus inaptes à assurer leur fonction, mais qui, par le droit d’hérédité, étaient à leur poste. C’était un équilibre difficile à maintenir, et d’autant plus délicat que, avec les siècles, Nexus s’était juridiquement construite, en imposant de plus en plus de transparence. Le droit avait été l’arme des Ivory pour soumettre à l’autorité de la Couronne les nobles rebelles, pour rallier toutes les seigneuries appliquant chacune un droit coutumier propre à un droit national unifié. L’unification de la société passait par le droit et par une justice similaire et globale à chaque ville, la justice servant à transmettre des valeurs sociales. Un habile combat politique qui avait duré des siècles, et qui, de fait, continuait encore à durer. Le droit était une chose difficile et confuse, où théorie et pratique s’opposaient très clairement, notamment en temps de crise et de disette, comme c’était actuellement le cas. Les règles tacites régissant les relations entre riches bourgeois et puissants nobles s’appliquaient à l’égard des assassinats, et il avait toujours été admis que le Palais d’Ivoire était un asile inviolable. C’était la logique du crime organisé, conçue comme une sorte d’autorité parallèle à l’autorité légale : si la seconde autorité s’en prenait un peu trop fort à la première, alors le système s’écroulait, car les gens n’auraient plus confiance. Ronald savait que les Sans-Visages n’étaient qu’un symptôme, une émanation de la corruption galopante qui ravageait Nexus depuis des siècles, un phénomène qui s’était amplifié avec la regrettable mort de Liam et de Nöly. En abolissant l’esclavage, ils voulaient mettre fin à ce système qui gangrénait la ville, et le système, s’il avait souffert, avait su se maintenir, et avait su continuer à tisser ses liens le long de la ville, étranglant peu à peu cette dernière, agissant en marge de la loi, en-dehors des normes légales et des ordonnances royales. L’attentat de ce soir était le point d’orgue, la cerise sur le gâteau. Des individus hauts placés soutenaient les Sans-Visages, et des têtes allaient tomber.

Ronald commençait déjà à réfléchir, et à se dire qu’il fallait une ordonnance royale étendant les pouvoirs des hommes placés sous son autorité le temps que l’enquête ait lieu, quand Serenos le surprit, le tirant de ses réflexions en s’agenouillant devant Elena, et en lui tendant son épée magique, Ehredna, tout en demandant d’accepter son aide pour venir à bout des Sans-Visages. Surprise, Elena le regarda pendant plusieurs secondes, sans rien dire. Ce que faisait Serenos, ce cérémonial… Ce n’était pas qu’une simple offre, non. Elle le voyait bien. Le sang des Meisaens avait coulé ce soir, et il voulait montrer à la Reine qu’il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour supprimer la menace. Elena comprenait cette procédure comme un serment judiciaire. Jamiël, elle, se disait juste que les hommes étaient tous les mêmes, et elle était surprise de voir Serenos agenouillé ainsi.

*Ces Meisaens et leurs serments… Ils se noieront avec un jour.*

Les serments n’étaient pourtant pas si fréquents que ça. Serenos venait de s’engager, mais tout engagement avait des contreparties… Et cela, la Reine le comprenait. Les secondes s’écoulèrent, le temps semblant comme suspendu aux délicates lèvres d’Elena, quand sa main finit par se tendre vers la poigne d’Ehredna. C’était une ambiancez assez surréaliste, un serment prêté aux pieds d’un cadavre à la tête défigurée.

« Serenos Sombrechant, Roi de Meisa, nous, Elena Ivory, Reine de Nexus, acceptons votre engagement de rendre justice en arrêtant les activités de la Confrérie des Sans-Visages. Nous acceptons votre serment, et, si vous échouez à l’accomplir, vous serez banni de Nos terres. »

Elena parlait avec un ton officiel, employant le pluriel, car ce n’était pas en son nom propre, mais en celui de la Couronne, de l’État nexusien. Elle tourna sa tête vers les différents témoins, aussi bien meisaens que nexusiens. Les mots avaient été dits, le serment était prononcé. Elena avait appliqué la propre loi de Nexus, la propre coutume. Quiconque s’engageait ne pouvait se dédire. Ehredna tapa les épaules de l’homme.

« Par ce serment, Nous vous nommons Commandeur Honoraire de Nexus, le temps de l’accomplissement de votre serment. Messire Langley !
 -  Votre Grâce…, s’agenouilla l’homme, en même temps que les autres.
 -  Qu’il soit fait note du Serment de Serenos, et que chacun des témoins en atteste la validité par sa signature. Accomplissez votre Serment, Roi de Meisa, et Nous vous offrirons notre gratitude et Notre générosité. »

Ronald connaissait évidemment la procédure, et en était ému. Il releva la tête, fier et droit. Celui qui regardait Elena n’était plus un simple chambellan, mais un paladin. Elena avait nommé Serenos Commandeur, un titre honorifique exceptionnel, que seule la Couronne pouvait délivrer. Le Commandeur était une sorte de super-enquêteur disposant de prérogatives importantes en matière d’investigations judiciaires. Néanmoins, Serenos restait un étranger, ce qui faisait qu’un autre Commandeur devait être nommé.

« Je rédigerai cette nuit un document officiel faisant de vous, Messire Langley, Commandeur de Nexus. Malgré toute la dévotion de Serenos, il est un étranger à Nexus. Vous aurez besoin l’un de l’autre pour retrouver ces assassins. Débusquez-les, arrêtez-les dans la mesure du possible, tuez-les si c’est l’ultime nécessité, mais je souhaite qu’un jugement soit organisé, et que chacun réponde de ses crimes. Jamiël, vous réunirez le Conseil Royal dès la première heure ce matin, afin qu’ils donnent leur aval à l’acte que je vais rédiger cette nuit.
 -  Oui, Majesté » répliqua une Jamiël légèrement troublée, elle aussi.

Le Conseil Royal pouvait toujours refuser d’avaliser l’acte royal, mais c’était peu probable. La Reine avait été attaquée cette nuit, ce qui faisait que la condition de circonstance exceptionnelle posée par la Cour Royale trouvait pleinement à s’appliquer.

Elena rendit à Serenos son épée.

« Vous en aurez plus besoin que moi » finit-elle par dire, sur un ton plus doux.
DC d’Alice Korvander.

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Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 34 mardi 09 décembre 2014, 06:05:15

« Vous en aurez plus besoin que moi, lui avait-elle dit, d’un ton doux, en lui remettant son arme.
- Vous verrez, Elena, que vous avez raison de placer votre foi en moi.

Il récupéra son arme, s’inclina vers la jeune Reine et tourna les talons, son épée à la main. Alessa songea à le suivre, mais il l’en découragea d’un geste de la main en indiquant le cadavre. Il voulait que les espions s’occupent de mener une enquête sur la provenance des potions ou sortilèges de métamorphose que les Sans-Visages employaient. Une fois que son travail en Nexus sera terminé, il les placera sur sa liste de cibles à exterminé.

Le Roi Cramoisi occupait encore une part de son esprit, et son instinct, peut-être même son don de préscience fragmentaire, lui disait que ce sombre personnage devait magouiller quelque chose, et si une alliance entre lui-même et les Gardiens du Crépuscule (le groupe qui avait ramené la Reine Sérénité, devenue la Dame Grise, à la vie) avait été conclue, leur implication dans une tentative de Coup d’État pour causer une guerre génocidaire était tout à fait possible. Mais il ne pouvait pas appuyer sa théorie de preuve; les événements qui avaient failli ravager Sylvandell et ceux qui se produisaient en Nexus n’avaient aucun lien vérifiable, et s’adonner à de telles théories lui ferait perdre du temps.*

Alessa regarda le cadavre à ses pieds, mais avant que son amant ne parte à la suite de Serenos, elle lui posa une main sur le bras, lui demandant discrètement de veiller sur son Seigneur, mais aussi d’être extrêmement prudent. Serenos était peut-être immortel, mais il n’en était pas de même pour Ronald, et elle ne voulait pas perdre son ami parce que son Roi était un homme éperdu d’amour pour une Reine défunte et désirait ardemment faire ses preuves devant la fille de celle-ci. Elle ne se risqua pas à l’embrasser, même si un sombre pressentiment lui saisissait les entrailles alors qu’elle le relâchait, lui murmurant que ce serait peut-être la dernière fois qu’elle reverrait Langley en vie, consciente qu’elle risquait de mettre son amant dans un drôle de position si elle s’autorisait autant de familiarité. Elle s’approcha plutôt de Jamiel et se plaça à son côté, détachant de sa ceinture une fiole de fortifiant; elle n’avait après tout pas eu le luxe de dormir bien longtemps, et l’amour agressif de Ronald lui donnait l’impression d’avoir lutté avec un étalon toute la journée. Ce souvenir la laissa un instant dans ses pensées, un sourire rêveur sur les lèvres alors qu’elle s’envoyait la première rasade du liquide. Le sourire fut aussitôt remplacé par une grimace de dégoût; les solutions magiques avaient le chic pour avoir un goût parfaitement infect.

La nuit était déjà avancée, peut-être vers les premières heures du matin, selon la position de la lune. En misant sur le fait que les Sans-Visages œuvraient seuls et sans superviseur, il évaluait qu’il n’avait quand même qu’une dizaine d’heures avant que les assassins n’aient vent du résultat de leur tentative d’assassinat et du fait que Serenos était sur leur piste, armé de rage, de vengeance et d’un sourire malsain; comme il était bon de se souvenir du bon vieux temps, où il traquait les ennemis de Liam, à son insu, par contre, pour les faire mystérieusement disparaître sans laisser la moindre trace.

Le Roi s’arrêta à l’extérieur du palais. Langley ayant reçu l’ordre de le suivre et potentiellement de le surveiller, il se tourna vers lui et le regarda.

« Elle a bien grandi, Langley. Elle a le courage de Liam et l’esprit de sa mère. Elle ne me fait pas confiance, mais elle n’en est que meilleure juge. »

Serenos ne se faisait pas d’illusion. Aussi affectueux qu’il soit, il n’était plus exactement l’homme qu’il était il y a vingt ans. Les Immortels n’étaient pas immuables, et même le temps finissait par les adoucir, ou au contraire, les endurcir. Il préférait que la jeune femme se méfie de lui plutôt qu’elle lui fasse aveuglément confiance; il n’était plus un homme honnête. Peut-être à l’époque où Nexus n’était pas une menace, et qu’Ashnard se sentait assez intimidé pour laisser Meisa en paix, mais de nouveaux ennemis ressurgissaient sur tous les fronts, et il craignait qu’un jour, ceux qui lui font confiance ne deviennent que des outils pour atteindre ses buts. Ce n’était pas dans cette optique qu’il avait fondé Meisa. Et peut-être qu’un jour...

***Dix Sept Ans Plus Tôt***

« Ton héritière!? As-tu perdu la tête, Serenos!?
- Liam, écoute-moi, je t’en prie! »

Le Roi de Nexus était tout simplement abasourdi. Comment Serenos, son ami, pouvait-il avoir une telle idée de confier à son enfant le devoir de diriger son Royaume, alors que Nexus s’étendait déjà d’une Mer à l’autre et était à la tête d’une des confédérations de Royaumes rivalisant aux forces de l’Empire Ashnardien? Mais l’Immortel ne semblait pas prêt de résorber son offre; il le dévisageait même avec la plus désarmante sincérité. Nöly, confortablement installée sur son trône, caressait son ventre toujours plus rond et plus gros, comme pour rassurer l’enfant que les gros bruits de l’extérieur ne devaient pas l’effrayer, adressant à Serenos et Liam un regard de reproche qui les ramena très vite à l’ordre. Le colosse qu’était Liam passa une main sur son visage, lissant sa barbe blonde de sa main avant la poser sur l’épaule de son ami.

« Pourquoi n’enfanterais-tu pas un héritier de ta propre chair, mon frère? Ma fille en aura déjà beaucoup sur les bras… et peut-être même qu’un jour… si les affinités se développent…
- Je ne veux pas concevoir un autre fils, dit le Roi de Meisa, la gorge serrée par une boule d’émotion. Après Grym et Kaelin…

Le visage de Liam s’affaissa de tristesse. Il avait entendu cette histoire auparavant, un des rares actes de confidence que Serenos n’eut jamais à faire pour démontrer sa confiance envers le Roi de Nexus.

Des années plus tôt, peut-être même avant sa naissance, Serenos comptait dans sa famille trois fils et trois filles. Grymauch était l’ainé de la fratrie et ressemblait tellement à son père, tant physiquement que moralement, qu’il s’était graduellement imposer en tant que futur Roi de Meisa, lorsque Serenos serait prêt à délaisser le pouvoir. Pendant dix longues années, Grymauch avait occupé la place de Roi-Servant de Meisa, avec comme conseiller son frère cadet Kaelin, représentant son père dans les pays étrangers, dirigeant ses troupes en son nom et apprenant les ficelles du rôle de monarque de son père, mais également des autres dirigeants de plus petits royaumes. Le candidat parfait au trône. Mais un sinistre destin s’abattit sur la famille du Sombrechant quand Xeos, le frère benjamin et l’un des responsables dans la résurrection de la Reine Sérénité, se retourna contre sa famille et se ligua avec les Ashnardiens et les Gardiens du Crépuscule. En traître, il massacra ses frères ainés et même une de ses sœurs avant que Serenos ne puisse intervenir. Talentueux magicien et plus sournois encore, le benjamin s’en tira même sans blessure grave, laissant son père dans le plus profond désespoir. On dit que c’est à cette époque que Serenos frappa Mordret dans son orgueuil, quand en représailles pour la corruption de son fils et les attaques Ashnardienne sur son territoire, le Roi de Meisa déclencha un événement tournant dans le conflit entre lui-même et Ashnard, l’Embrasement des Côtes. À l’aide d’une armada de navires chargés en poudre à canon avec des catapultes. le Roi de Meisa avait bombardé les plages du territoire Ashnardien puis les avait enflammées avec son armée de magiciens, massacrant des dizaines de milliers de citoyens Ashnardiens avant même que l’Armée ne puisse répliquer.

Mais tout ça, c’était de la vieille histoire. Liam savait simplement que Serenos prenait beaucoup plus de temps que les autres humains pour passer à autre chose. Cela faisait peut-être des décennies, mais pour un Immortel, cela devait être un épisode bien court dans sa longue existence. Il s’apprêtait à reprendre la parole, mais le petit Roi le devança.

« Je ne te dis pas qu’elle sera forcée de prendre ce rôle, Liam. Je te dis juste qu’un jour, je le lui offrirai. Si je vois en lui l’avenir de nos nations… je lui confierai mon Royaume.
-  Mais pour hériter d’un royaume magique…
- Je suis d’accord, ce serait difficile. C’est pourquoi j’ai pensé à Jamiel.
- Jamiel?
- Elle est brillante, Liam. Avec les années, elle deviendra une magicienne impressionnante. Nöly, dis-lui!

La Reine de Nexus soupira, espérant sincèrement ne pas être mêlée à ce genre de discussion. La magie, un domaine qu’elle aurait souhaité comprendre aussi bien que son amie, sans avoir le moindre don pour celui-ci, était un sujet des plus délicats.

« De quoi parle-t-il, mon amour?
- Serenos pense que Jamiel… est comme lui. Une descendante des Ashnanshi.
- Ah? Rien que ça? dit le Roi incrédule. Encore tes mythes, Serenos…
- Les Ashanshi ont bien existé, Liam, protesta Serenos, les poings serrés.

C’était un conflit de longue date; Serenos parlait des Ashanshi comme un savant parlait de ses découvertes, mais Liam discréditait immédiatement ses paroles. Serenos pouvait bien dire ce qu’il voulait pour essayer de lui faire douter, mais Liam n’était pas quelqu’un facile à persuader. Il n’était pas nécessairement étroit d’esprit, mais il avait ses convictions, et il était très difficile de le faire bouger sur sa position. Les histoires Nexusiennes étaient bien ancrées dans son esprit, et en tant qu’ancien apprenti des Paladins, il avait foi en les Dieux qu’il vénérait, et en aucun cas, les Ashanshi ne figuraient dans les enseignements de son ancien Ordre. Seule Nöly lui prêtait une oreille attentive, mais sans vouloir manquer de respect à son épouse, Liam était sûr qu’elle serait prête à écouter n’importe quelle invention de Serenos pourvu qu’il y ait une belle histoire derrière. Il ne traitait pas son ami de menteur, mais il n’y croyait pas. Les histoires de foi n’affectaient en rien leur amitié, seulement leurs discussions. Avant qu’ils ne se disputent, les deux hommes levèrent les mains en signe de paix.

« Pardon, continue, céda Liam avec douceur.
- Qu’importe ses origines, je crois que Jamiel serait capable de régir sur Meisa. Elle a un don incroyable, et son esprit…  je n’ai que rarement vu de tel –Pardon, Nöly-
- Il n’y a pas de mal, dit la Reine en riant.
- Je crois que la prochaine génération sera un excellent moment pour que Meisa et Nexus atteignent un nouveau niveau de collaboration. Meisa restera officiellement indépendante, avec ses trois conseils, mais ton enfant aura le même rôle que moi; le veto et les décisions urgentes.
- C’est irréel, Serenos…
- C’est pour ça que je t’en parle, Liam. Je ne serai pas toujours là…
- Dis-ça à ceux qui sont morts en attendant ton trépas…
- Liam! s’exclama Nöly, offusquée.
- Il suffit! tonna le Roi de Nexus, autant à l’attention de Nöly que pour achever sa discussion avec son homologue. Serenos, ce n’est pas à toi de décider ce qui adviendra de mon enfant, ni de mon royaume. Si tu veux abandonner tes responsabilités de Roi, sois le bienvenu de t’arranger de ton côté! Je ne laisserai pas mon enfant des responsabilités que je ne saurais moi-même endossé.

Liam se détourna alors de son ami et s’apprêta à partir.

« Tu ne vas quand même pas partir fâché, ce serait trop bête! Allez, on oublie tout, et on finit cette bouteille de vin, tenta de l’amadouer Serenos.
- Pas ce soir, Roi de Meisa… pas ce soir… »

Et il disparut derrière la porte. Serenos regarda sa coupe de vin et la déposa sur la table avant de se laisser tomber sur le fauteuil adjacent à celui de Nöly et se prit la tête entre ses mains, lâchant un soupir de découragement.

« Il l’a mieux prit que je pensais… commenta la Reine en passant ses doigts dans les cheveux ô combien souple de son ami.
- Pas assez à mon goût… mais je m’y attendais. Il n’aime pas laisser le travail aux autres… c’est son caractère.
- Et c’est pour ça que tu l’aimes autant.
- Pas faux, dit le Roi de Meisa en souriant, un peu plus jovial. Liam ne sera jamais comme moi; il est brave, et il affronte son destin avec la tête haute.

Il prit doucement la main de Nöly et, en tout bien tout honneur, y déposa un bref baiser de reconnaissance avant de se relever, l’aidant tout de même à se lever. Il l’escorta jusqu’aux appartements royaux, en parfait gentilhomme, un comportement qu’il n’adoptait qu’avec elle, avant de lui souhaiter la bonne nuit. Elle lui adressa un ultime sourire avant de disparaître derrière la massive porte où, des années plus tard, Serenos viendrait en secours à sa fille.

***

Serenos secoua la tête pour chasser ses souvenirs. Il descendait avec son collègue Commandeur, ou du moins Commandeur à en devenir, la Rue des Rois, le long chemin sinueux qui menait du palais royal à la Première Porte de la Forteresse, qui menait, en fait, à l’extérieur de la ville, passant par les bas-cloîtres, évidemment. Quelque chose d’autre occupait son esprit, surpassant même sa préoccupation pour le combat à venir.

« Alessa vous a appelé par votre prénom, Commandeur Langley. C’est une marque de respect et d’affection rare venant d’un membre de son espèce, un respect qu’elle ne m’accorde pas, moi qui suit son Roi. J’aimerais savoir comment vous l’avez gagné.»

Le ton de Serenos était grave, mais conservait une certaine note hautaine qui démontrait qu’il ne s’agissait pas d’une tentative d’invasion de la vie en coulisse du Paladin, mais d’une demande légitime d’un chef militaire par rapport à ses subordonnées. Il ne savait pas ce qui s’était passé entre Langley et Alessa, il n’en avait honnêtement rien à faire. Néanmoins, en tant que Roi et Alessa étant l’une des principales figures de son royaume, il voulait pouvoir compter sans regret sur elle, et si elle lui faisait des cachotteries, il serait probablement forcé de la démettre de ses fonctions. Il n’était pas le père d’Alessa, et même s’il l’avait été, il n’aurait pas été plus intéressé que cela par ses aventures derrière les portes closes.

Heureusement pour Langley, l’attention de Serenos lui fut ravie par l’apparition d’un nouvel intérêt; les bas-fonds de Nexus. À l’entrée de ceux-ci, de nombreux hommes au visage masqué, armés jusqu’aux dents, droit comme des pics, les attendaient. Serenos regarda les étrangers et leur fit signe d’approcher. Les hommes s’empressèrent de se placer devant lui et s’inclinèrent respectueusement.

« Majesté, mes hommes et moi avons fait le plus vite possible pour nous rassembler lorsque nous avons reçus vos ordres. Allez-vous bien? Nous avons perdu le lien, nous étions…
-  Il n’y a aucune inquiétude à avoir, Meisaen. Maintenant, je veux que tu me dises ce que tu sais sur les Sans-Visages. As-tu réuni des informations sur eux? Sais-tu où ils se trouvent?
-  Non, majesté. Ces hommes, qui qu’ils soient, savent masquer leur trace. Nous savons qu’ils vivent et occupent certaines demeures du bas-fond, mais nos hommes n’ont rien trouvé… ils doivent avoir une autre manière de se loger, un endroit que nous ignorons… des accès secrets… »

Serenos fit taire le Meisaen d’un geste de la main et celui-ci s’exécuta docilement, baissant la tête en signe de soumission. Décidément, Serenos était soit un monarque sévère, respecté ou alors tout simplement craint par ses sujets pour avoir d’eux une telle soumission. Peut-être que les rumeurs sur sa tyrannie avaient un fond de vérité? Serenos se tourna alors vers les bas-fonds, ses yeux commençant à luire d’une lueur dorée. Les yeux des Meisaens se mirent alors à faire de même, avec une intensité presque inquiétante, leur donnant un air très menaçant. Ils firent de même, se tournant vers les bas-fonds avec de sauter avec une incroyable agilité sur les toits et se dispersèrent.

Serenos se tourna alors vers Langley, les yeux toujours luminescents.

« Nous allons devoir faire vite. Je leur ai ordonné de fouiller les sites démilitarisés des bas-fonds. Deux d’entre eux vont retourner au palais pour protéger les accès secrets. J’espère que la vie de Nexus n’a pas nui à leur efficacité…  Je suggère que nous nous établissions quelque part le temps de repérer nos ennemis, pour coordonner notre recherche. Qu’en pensez-vous, Langley? »

Elena Ivory

Humain(e)

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 35 jeudi 11 décembre 2014, 02:23:32

« J’ai failli la tuer. »

Ce fut la seule explication, sibylline, que Ronald donna à Serenos pour expliquer la relation entre lui et Alessa. Ronald n’avait pas spécialement envie d’en parler, ne tenant pas à ce qu’on sache que, au moment où la Reine était attaquée par un Sans-Visage, lui-même batifolait avec la Meisaenne. C’était un comportement indigne d’un Chevalier Royal, et c’était bien pour ça que Ronald acceptait pleinement le dilemme. S’il échouait, c’est qu’il ne méritait pas d’être le Chambellan de Sa Majesté. Auquel cas, il admettait volontiers sa punition, et en profiterait pour faire pénitence. Ronald, aussi pieux et fier soit-il, n’ignorait pas toute la difficulté de sa tâche. Nexus était une ville immense, abritant des millions d’âmes. C’était l’une des plus grandes villes du monde, l’épicentre du commerce mondial. Les autorités traquaient la Confrérie depuis des décennies, sans aucune réussite. Ronald allait devoir faire jouer ses relations et ses contacts. Il était impossible, après tout ce temps, que personne ne connaisse le repaire de la Confrérie. Cette secte d’assassins était bien implantée. Tout ce qu’il fallait, c’était arriver à délier les langues.

En sortant du Palais d’Ivoire, les deux hommes avaient grimpé sur des destriers, et s’en étaient servis pour rejoindre les bas-fonds, filant le long des grandes rues de la cité-État, relativement désertes à cette heure avancée de la nuit. Ronald menait le duo, et ils se rapprochèrent d’une entrée menant aux « bas-fonds ». Ce n’était techniquement pas un terme officiel, et on n’en trouverait aucune trace dans les documents et les actes officiels. C’était un terme offensant, mais, dans la pratique, tout le monde désignait ainsi ces quartiers désoeuvrés. Ils s’arrêtèrent devant le portique menant à l’ancien quartier des Poètes, un agréable quartier constitué d’un ensemble de ruelles, de petites fontaines, et où, jadis, avant la crise économique, des artistes de rue chantaient et dansaient, faisant jouer de la lyre, vantant la beauté des étrangères venant ici. Des troubadours faisaient des spectacles comiques, des danseurs jonglaient, des équilibristes s’amusaient, des cracheurs de feu soufflaient de longues gerbes se terminant en cœur enflammé… C’était un quartier rural très vivant, constitué de marginaux, de bohèmes, d’hommes aimant la vie. Maintenant, ce quartier était triste, sinistre, fui par les touristes. Il était hanté de bordels sinistres, et les artistes de rues qui n’étaient pas partis, ou n’avaient pas été tués pour leurs dettes, étaient devenus des toxicomanes habitant dans des squats sinistres.

Ronald avait senti des individus approcher, et vit alors des espions meisaens débarquer. Pour être honnête, Ronald n’aimait pas trop ça… Les espions n’étaient jamais bien vus, a fortiori entre deux États se prétendant alliés. Néanmoins, il ne dit rien. Pour l’heure, leurs intérêts coïncidaient. Ronald resta en retrait, tandis que Serenos donnait ordre à ses hommes de retrouver les caches de la Confrérie. Un léger sourire goguenard traversa les lèvres de l’homme. Est-ce que cet homme espérait supprimer la Confrérie en une soirée ? Finalement, Serenos finit par le regarder, en lui demandant s’il n’avait pas un lieu où séjourner le temps de leur enquête.

« Oui… Je connais un endroit. »

Il se déplaça rapidement, remontant l’avenue, évitant de s’enfoncer dans les ruelles du Quartier des Poètes.

« Il fut un temps où Nexus était un royaume. Avec le temps, les différentes cités se sont rapprochées pour n’en former plus qu’une, mais il subsiste encore des héritages de cette ancienne époque. »

La cité-État était une énorme ville, et, d’un point de vue administratif, elle comprenait plusieurs mairies, chaque mairie ayant un district, toutes les mairies fonctionnant sous l’autorité centrale du Palais d’Ivoire. Les mairies se trouvaient dans les forts de la ville, chaque fort correspondant à l’une de ces anciennes villes dont Ronald parlait. Ils se dirigeaient justement vers l’un de ces forts, au cœur de la ville. Il était entouré par des douves, et donnait sur un agréable lac, le Lac-Rose, avec des cygnes, des canards, et des tortues. Un endroit assez agréable, proche des remparts du fort. Le nom du fort était donné en référence au lac : Fort-Rose… Pourtant, il n’y avait rien de rose dans ce dernier.

Ronald se rapprocha du corps de garde, et tomba sur les gardes à l’entrée.

« Le fort est fermé la nuit, étrangers ! lâcha la bougonne voix d’un garde.
 -  Je pense que vous ferez une exception pour moi, hallebardier. »

Le soldat sortit de sa petite casemate, à l’entrée du corps de garde, et écarquilla les yeux en reconnaissant la cicatrice de « Scar », un élément distinctif difficile à copier.

« Oh… Me… Messire Langley, je… Hum… C’est un immense honneur !
 -  Ce vieux sac à vin de sénéchal est-il réveillé ?
 -  Me… Messire Beauregard s’est endormi, Messire Langley…
 -  Alors, ouvrez-nous la porte, et mandez quelqu’un pour le réveiller. Nous avons à discuter. »

Troublé, l’hallebardier obtempéra. Ronald Langley était un homme très respecté au sein des garnisons, que ce soit par son haut rang, par le fait qu’il était un camarade de guerre du Lion de Nexus, parce qu’il était un paladin d’Haven, ou parce qu’il arborait sur son visage les cicatrices dues aux batailles. Langley appartenait à l’ancienne noblesse, cette noblesse faite de capes et d’épées, ceux qui, dans la répartition tripartite classique d’une société féodale, étaient appelées « bellatores »… Ceux qui se battent. Le corps de garde s’ouvrit, et le duo pénétra dans la cour du fort, une agréable cour avec plusieurs dépendances abritant des réserves. Un puits se trouvait au centre, et il y avait un mur d’enceinte, séparant la basse cour de la haute.

Autrement dit, Fort-Rose suivait la structure classique de tous les forts médiévaux :


Ronald et Serenos larguèrent leurs chevaux à une écurie, puis passèrent par le corps de garde intérieur, afin de rejoindre les lourdes portes du donjon.

« La Confrérie se cache sous la ville, Serenos. Elle a un repaire souterrain, mais les souterrains de Nexus sont immenses. Entre les égouts, les catacombes, les grottes naturelles, les caveaux, il y a tout un réseau souterrain. Sans des informations précises pour les trouver, nous n’y arriverons jamais. »

Ils entrèrent dans le salon principal du fort, où des bougies étaient allumées dans les angles. Des armures luisantes faisaient office de décor, à droite et à gauche du vestibule, et, dans la salle principale, des blasons et des tableaux ornaient les murs.

« Le Sénéchal Beauregard est le responsable de ce fort. C’est un vieil ami. Nous avons combattu les Ashnardiens ensemble, à l’époque de Liam. Il y a quelques années, Liam l’avait chargé de mettre un terme à l’existence de cette confrérie. »

Ronald donna les informations essentielles, tandis qu’un page les conduisit dans un salon un peu plus intimiste, avec des bibliothèques, des candélabres. Les murs étaient en pierre, et Ronald entendit, au bout de quelques minutes, un peu de bruits.

« Par les Saints-Nichons de la foutue Sainte-Vierge, Langley ! Ah, mon ami ! Es-tu fonc à ce point insomniaque pour venir me voir ?! »

Une voix chaleureuse annonça l’arrivée du Sénéchal Joachim de Beauregard, un homme âgé, mais avec un regard clair, et un franc sourire.

« Paix sur toi, Joachim. Je suis en compagnie de Son Excellence le Roi de Meisa Serenos Sombrechant. Nous sollicitons ton hospitalité le temps d’une enquête capitale demandée par Sa Majesté à l’instant même. »

Beauregard hocha lentement la tête. Sur un ton un peu plus bas, Ronald lui en dévoila un peu plus :

« Un Sans-Visage a attenté à la vie de Sa Majesté… »

Les yeux de Beauregard s’écarquillèrent de surprise.

« Ah les jean-foutre, ah les fils de pute ! s’exclama l’homme en secouant la tête. Je comprends mieux la raison de ta venue, Ronald… Et il va de soi que vous pourrez séjourner dans ce fort.
 -  Nous aurons besoin de ton assistance…
 -  Cela va sans dire, acquiesça l’homme. J’ai enquêté sur cette secte remplie de rats et de serpents visqueux, mais il me faut le temps de retrouver mes notes. Le mieux que vous ayez à faire est de dormir ici, et nous aurons le temps d’en parler demain matin. De toute manière, il n’est pas recommandé de traquer les Sans-Visages de nuit. »

Ronald acquiesça. Il avait presque oublié à quel point le Sénéchal avait tendance à s’exprimer très naturellement, à force dans le monde très policé du Palais
DC d’Alice Korvander.

Consultez ce topic pour une présentation détaillée de mes personnages.

Pour une demande de RP, je vous encourage, soit à poster sur le topic susmentionné, soit à envoyer un MP sur mon compte principal.


Serenos I Aeslingr

Humain(e)

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    Description
    Le Roi des Trois Royaumes et le personnage le plus influent d'Ayshanra. Derrière ses allures détendues et son sourire charmeur, Serenos est un homme dangereux et incontrôlable, et une constante menace pour les royaumes continentaux. Son mépris pour le protocole lui ont attiré le titre de "Roi Fou".

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 36 jeudi 11 décembre 2014, 07:33:05

« J’ai failli la tuer. »

Les paroles de Langley manquèrent presque de lui attirer le poing de Serenos. Cependant, deux Commandeurs nouvellement nommés se bagarrant au beau milieu de la Rue des Rois.

« Remerciez les cieux d’avoir échoué, Langley. Vous n’avez aucune idée de ce qu’il en coûte à ceux qui s’attirent ma colère. »

Le ton sombre et posé de Serenos ne contenait aucune démonstration de haine, particulièrement, mais il était chargé d’avertissement. Si Langley tenait à ne pas se mettre le Roi de Meisa à dos, il aurait intérêt à surveiller ses paroles. L’honnêteté était une vertu, mais les menaces, même honnêtes, n’attiraient rien d’autre que l’animosité. En combat loyal, Langley pourrait tenir tête à Serenos s’ils venaient à s’affronter, mais voilà, Serenos ne se battait jamais à la loyale avec un adversaire qui s’est attiré ses foudres; il se battait pour gagner, et tous les moyens étaient bons, même ceux qui incluaient l’usage de la magie. Le Roi parvint néanmoins à ravaler son mépris pour Langley et le reste de leur descente se passa sans accrocs.

Ce n’est pas pour autant que Serenos cessa de ruminer les paroles de Langley. Qu’est-ce qui a bien pu se passer entre lui et Alessa? La Meisaenne ne semblait pas être particulièrement affligée, et s’il avait réellement tenté de la tuer, il ne serait peut-être même plus là pour en parler. Mais Alessa était plus douée pour retenir ses coups que son Roi, alors, peut-être qu’il aurait plutôt une trentaine d’ecchymoses, et une sérieuse commotion cérébrale. Langley n’était pourtant pas sans lui rappeler Rickard, ou le Sournois, comme se plaisait à l’appeler le monarque des îles. Il se passa une main sur le visage en tentant de conserver son calme, car même son cheval commençait à capter les ondes purement négatives qui émanaient de lui. Colère, rancœur, et encore d’autres sentiments plus violents les uns que les autres lui étreignant le cœur et le nourrissant de leurs effets négatifs sur sa magie. Les êtres normaux, comme Langley, inconnus à la magie, ne ressentaient guère les troubles des autres, mais les animaux, instinctivement reliés à tout ce qui était surnaturel, pouvaient capter ces intentions, comme les chiens qui aboyaient sur les étrangers mal intentionnés approchant de leurs demeures, ou les caméléons qui changeaient leur couleur pour se protéger d’un prédateur. Les mages étaient dangereux pour de multiples raisons, mais ils n’étaient pas qu’un danger pour leurs ennemis; ils l’étaient aussi pour eux-mêmes, et l’immortalité du Roi avait laissé des séquelles dans son contrôle de lui-même, des plaies béantes que Nöly avait fait l’effort de panser pendant le court temps où ils avaient été ensemble.

La réponse à sa colère fut le visage de la défunte Reine. Les premiers regards, sa personnalité lumineuse qui irradiait son monde de beauté, leur seul et unique baiser, ces souvenirs parvinrent à rétablir le fragile équilibre mental de l’étrange magicien. Il se mit alors à respirer plus librement, et un sourire réapparut sur son visage. Langley n’était peut-être pas au courant des maux qui assaillaient l’esprit du Roi étranger, et il n’en avait certainement rien à faire, puisque les rumeurs le disaient comme fou, de toute façon, mais il ne pouvait rater ses changements soudains d’humeur, dont il ne pouvait peut-être discerner la cause. Bipolaire, peut-être. Mais Serenos se qualifierait plutôt de soupe-au-lait, capable de changer d’un état négatif à un autre, plus positif, avec aisance, ne requérant de stimuli qu’en lui-même. Il poussa finalement un soupir et laissa l’eau couler sous le pont; il n’avait que faire de Langley. Il n’avait que faire de quiconque, finalement, puisque tout ce à quoi il tenait n’était plus depuis longtemps, autre que Meisa.

***

Beauregard ne lui adressa qu’à peine un coup d’œil. Et Serenos qui avait causé un remous simplement car il s’était adressé à une amie avant la réponse de la Reine, les Nexusiens avaient vraiment le chic pour l’irriter. Il se contenta donc d’ignorer superbement le Sénéchal et balaya le fort du regard et se demanda combien de temps il aurait besoin pour le faire tomber s’il avait avec lui ses unités d’élite, ses magiciens et ses catapultes. Une heure, peut-être deux, dépendant de la vitesse de réaction du fort, et peut-être même une journée si les renforts arrivaient assez vite. Beauregard leur dit que cela lui prendrait peut-être un bon moment pour fouiner dans ses notes et qu’il serait plus sage et prudent d’aller se reposer. Le monarque de Meisa regarda Langley, attendant sa réponse. Lorsque celui-ci acquiesça, le Roi se détourna de lui, surpris du manque de réaction de celui-ci. Sa Reine était en danger, et ce balourd de Beauregard leur demandait d’attendre le lendemain pour trouver ses notes?

« Je vous prie de m’excuser. »

Le Roi fit volteface et s’éloigna des deux Nexusiens, à grandes enjambées, rabaissant sur sa tête son capuchon pour ne pas laisser voir à ces idiots l’épatement qui s’y trouvait. Lui qui sanctionnait ses hommes pour manque d’organisation, que ferait-il s’ils devaient prendre une demi-douzaine d’heures pour retrouver quelque chose d’importance? Je les bannirais pendant une année complète, c’est évident! Quel genre de soldats ne peut pas retrouver un rapport en cinq minutes, montre en main? Il était un chef militaire sévère, certes, car il voulait que ses subordonnés soient les plus efficaces, car ses armées ne possédaient que très peu d’effectifs, il devait donc tirer le meilleur de chaque soldat pour tenir la mesure contre les ennemis potentiels. Et Langley, avec ça, qui acquiescait. Cet homme s’était mis en tête de le faire tourner en bourrique, il ne voyait que ça!

Il trouva très vite le camp d’entrainement du fort et trouva un stand de tir à l’arc, avec une cible criblée de flèches. Il regarda celle-ci un instant, puis il récupéra un arc sur un support  et quelques flèches avant de se mettre en position. Il n’avait pas tiré à l’arc depuis des années, et il ne se souvenait même plus comment faire, car après tout, pourquoi posséder un arc quand la magie atteignait la cible sans même avoir besoin de viser? Il regarda l’arme, puis testa la corde. C’était un bon arc; il n’aurait crainte de le briser en le tendant. Il agrippa ensuite une flèche, l’encocha puis il visa la cible. Nombre d’archers inexpérimentés se lançaient dans un tir effréné, dans l’espoir d’épater leur supérieur par le nombre qu’ils pouvaient tirer sur une cible, mais Serenos n’était pas inexpérimenté dans l’art de la guerre. Il resta immobile, calme, sur ses deux jambes. Il ferma les yeux et se concentra sur ses sens, ne les ouvrant à nouveau que lorsqu’il aurait pleinement conscience du vent qui souffle, du poids de la gravité sur ses épaules, du sol sous ses pieds. Il pencha légèrement la tête vers la droite, vers l’arc, et appuya ses doigts contre sa joue, essayant de voir où la flèche se dirigera une fois qu’il aura lâché la corde. Il corrigea un peu son tir, puis expira très lentement tout en relâchant sa flèche. Celle-ci décrivit une courbe très légère alors qu’une brise de vent la poussait vers la droite, et elle perdit un brin de hauteur sous l’effet de la gravité, mais elle s’arrêta finalement sur la cible, mais pas seulement; la flèche qui se trouvait à l’endroit exact où il avait tiré se fendit de tous les côtés alors que la nouvelle prenait sa place. Le succès étant très euphorique, le Roi passa une bonne heure à tirer ses cibles très minuscules, avant d’enfin déposer les armes.

Un son de cloche attira son attention, et il leva les yeux vers la petite chapelle, qui faisait l’appel à la prière des croyants du fort. N’étant lui-même pas un homme de foi, il ne jugea cependant pas prudent de quitter le fort sans la compagnie de Langley, et il se dirigea plutôt vers la petite église, grimpant à nouveau au niveau du donjon. Il entra alors dans la chapelle. Il ne s’était jamais vraiment rendu au cours de sa vie. Si, bien sûr, lors de son premier mariage, il a si longtemps, pour faire plaisir à sa belle-famille, mais pour se recueillir, jamais. Mais comme il ne pouvait rien faire avant que cet incapable ne retrouve ses « notes » ou que ses propres agents ne reviennent pour l’informer de leurs trouvailles, puisqu’il n’allait quand même pas explorer seul les souterrains de la ville. Il aurait pu les explorer à l’aide de son esprit, mais avec son expérience du dernier Sans-Visage qu’il avait croisé, il savait qu’il n’était pas facile de les détecter sur le plan astral. Peut-être qu’ils avaient été l’objet d’une ablation magique comme part de leur initiation, ou un truc du genre.

La chapelle était vide. Tranquille, même. Il regarda la porte, et la referma doucement derrière lui avant de s’installer sur un des sièges. Nöly priait souvent… comment faisait-elle, déjà? Ah, oui… elle joignait toujours les mains… Ce qu’il fit, levant ses mains devant lui et croisant les doigts ensemble. Il s’accouda au siège devant lui. J’ai déjà communié avec les morts autrefois… mais les esprits ayant pleinement vécu leur vie ne laissait aucune trace de leur passage dans le monde astral. Ils gagnent immédiatement le monde du repos… Mais Nöly disait que…

« Nöly… j’ignore si tu m’entends… si tu le peux… salue Liam de ma part. Ou cogne-le pour être décédé avant moi. »

Il s’imagina un instant Nöly l’entendre, et faire exactement ce qu’il lui avait demandé, et un sourire lui vint aux lèvres, pour un bref moment, avant qu’il ne recommence.

« J’ai rencontré Elena, aujourd’hui. Nöly… elle te ressemble beaucoup. Ses cheveux, sa posture, même son petit sourire forcé ressemble au tien. Mais elle a le caractère de Liam, ça oui. Tu te rends compte, elle a même menacé Langley de le démettre de ses fonctions! Tu y crois, à ça? Du Liam tout craché. »

Il perdit alors son sourire.

« Tu me manques, Nöly. Tu me manques tellement. Ces seize années… je ne me suis jamais rendu compte à quel point le temps passait aussi vite. Tu as été comme une brise de vent sur mes brûlures… tu m’as apaisé, et peut-être as-tu soulagé quelques douleurs... J’ai peur, tu sais? Peur de redevenir le monstre d’autrefois. Peur de n’avoir plus peur de rien. Depuis la mort de Grym et de Kaelin, je me sens si las, si vide. »

Il continua de parler, seul, comme si Nöly se trouvait juste à côté de lui, qu’elle l’écoutait. Il ne savait pas si les morts pouvaient entendre ce qui se passait dans le monde des vivants, s’ils y portaient simplement attention. Peut-être que les Hommes du Nord ont raison et qu’une fois mort, c’était une fête éternelle avec de la bonne viande et de la bière qui nous attendait, et que les soucis n’étaient plus qu’une chose du passé. Une fois sa petite discussion privée avec la Reine de Nexus terminée, il s’attaqua ensuite à Liam. Là, par contre, il se défoula. Il lui reprocha ses bêtises et son manque de sérieux, lui reprocha de ne pas l’avoir invité sur le bateau le jour du naufrage, et encore des centaines d’autres trucs. Mais plus il s’efforçait de lui trouver des défauts, moins il croyait lui-même à ses paroles, et finalement, il coucha sa tête sur le dossier du siège, marmonnant tel un ivrogne dans son sommeil.

Elena Ivory

Humain(e)

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 37 lundi 15 décembre 2014, 02:05:36

« Qui est ce pourceau ? » s’étonna Beauregard en le voyant partir.

Langley se contenta d’hausser les épaules. La colère de l’homme à l’idée de ce qui avait pu se passer entre lui et Alessa l’avait surpris, et avait été un test. Ronald savait ce qu’on disait sur Serenos. Il savait l’instabilité de son esprit, il savait la dangerosité de ses pensées. Ferait-il un bon allié ? Un soutien efficace dans leur traque des Sans-Visages ? Ronald en doutait. L’homme ne connaissait pas Nexus, et agissait selon ses pensées, en pensant que Nexus était sienne, parce qu’il avait été l’ami de Liam et de Nöly. Ronald avait été plus que ça : il avait été le compagnon de guerre de Liam. Il lui avait sauvé la vie bien des fois, et réciproquement. Ensemble, ils avaient affronté des cohortes de monstres sauvages, des démonistes qui avaient cherché à réveiller des démons, et ils avaient combattu les Ashnardiens. Ils avaient fait partie des cavaleries venant en renfort pour protéger les superforts, plongeant dans une indescriptible mêlée face à un ennemi maint fois supérieur en nombre. Ronald se souvenait des tempêtes magiques dans lesquelles les hommes des deux camps plongeaient quand les mages ashnardiens se réunissaient ensemble pour lancer des sorts colossaux, qui dévastaient la région, créant des éclairs meurtriers et ravageurs qui s’abattaient dans toute la région, engendrant des incendies. Ils lançaient des météorites meurtriers qui provoquaient de violentes déflagrations, faisant ressembler les zones de combat à des champs de guerre infernaux. Ronald et Liam s’étaient retrouvés dans un cratère, Liam blessé à l’épaule, et Ronald, avec son épée, avait pourfendu les Orcs les chargeant. Il s’en rappelait encore…

Les morts s’empilaient autour d’eux, et sa lame avait transpercé le ventre d’un Orc, tandis qu’un autre bondissait sur lui. Sa masse s’était abattue sur son crâne, défonçant le heaume de Ronald, le faisant chanceler. Il était tombé dans la fange, et un carreau d’arbalétrier avait atteint l’Orc, laissant à Ronald suffisamment de temps pour sortir de sa ceinture une dague, et s’en servir. Il l’avait planté dans le genou du monstre, le faisant hurler, et un troisième avait débarqué, offrant son dos à Liam. Blessé à la jambe, le Lion avait eu le temps de lever la main, et d’envoyer des arcs électriques qui avaient frappé le dos de l’Orc, calcinant sa peau, le surprenant suffisamment pour que Ronald attrapa une rapière et l’égorge. Le sang de l’Orc avait éclaboussé son visage, et le deuxième Orc, blessé, mais pas moribond, avait hurlé, et son autre jambe avait frappé Ronald au torse, l’envoyant s’étaler contre les cadavres de soldats morts. Joachim avait surgi alors, et, alors que l’Orc levait en hurlant sa masse dégoulinante de sang, le bout de la hallebarde du soldat avait transpercé la poitrine de l’Orc, à hauteur de son cœur…

Ce souvenir revint le temps d’un clignement de yeux,n et Langley haussa les épaules.

« Un homme qui a fait un serment judiciaire envers la Reine.
 -  Ça explique son empressement…
 -  Et le mien. Elena m’a nommé Commandeur, mais, si j’échoue, je démissionnerais.
 -  Hum… »

Les Sans-Visages… Joachim savait de quoi il s’agissait, mais il connaissait aussi la fierté de son vieux camarade de guerre, et un léger sourire se dessina sur ses lèvres.

« Les paladins et leur sens de l’honneur… Très bien. Mais crois-en mon expérience, il ne sert à rien d’être trop hâtif. Repose-toi, c’est la seule chose qui importe.
 -  J’espère juste que Serenos ne fera rien de stupide.
 -  De stupide… Comme traquer la Confrérie des Sans-Visages ? »

Un léger sourire orna les lèvres de Ronald. Il se rendit ensuite dans l’une des chambres du fort, plus petite, bien moins luxueuse que celle qu’il avait au Palais d’Ivoire. Cette absence de confort ne le dérangeait pas. C’était même l’inverse. Il avait toujours détesté l’abondance de luxe. Ronald restait dans l’âme un paladin, mais il avait fait serment envers Liam… Serment de protéger sa fille si jamais Liam n’était plus là pour le faire. Un serment fait sur le champ de bataille, alors que tout espoir semblait perdu. Et il comptait ne pas faillir à ce serment. Il le devait à Liam. Il le devait à Elena. Il le devait à Nexus… Et il le devait au Griffon.

*
*  *

Un jour grisâtre se leva sur Nexus. Ronald se leva aux aurores, et se rendit sur les remparts, humant l’air frais de la ville. Il était toujours très matinal, et en profitait pour parler avec les gardes, le long des remparts du Palais d’Ivoire. Observer la mer depuis les remparts du donjon était probablement la chose la plus belle qu’il soit disponible de faire au Palais d’Ivoire. Ici, à Fort-Rose, la vue du lac Rose était un peu moins magistrale. Il y avait quelques îles au centre, des promenades, et il put voir des cygnes. Les gardes semblaient ravis et honorés de pouvoir discuter avec le chambellan, et, surtout, avec un ancien paladin.

« Alors, vous avez combattu à Altenberg ? lui demandait-on.
 -  Est-ce vrai que vous avez affronté Coehoorn durant ce siège ?
 -  D’où vient votre cicatrice ? »

Des questions auxquelles il répondait avec plaisir, dans la mesure du possible, avant de retourner vers le donjon.

Ronald revit Joachim quelques heures après.

« Mes hommes ont arrêté cette nuit un certain revendeur, un trafiquant de fisstech, Tilam. Il croupit dans mes geôles, et, d’après ce que je sais, Tilam est en affaire avec les Sans-Visages. Il est l’une de vos meilleures chances de les retrouver. »

C’était ce qu’on appelle un début de piste, mais Ronald ignorait où se trouvait Serenos, et, en attendant son arrivée, il en profitait pour prendre un petit-déjeuner dans le grand salon du donjon, tout en parlant avec Joachim de Beauregard de choses et d’autres concernant leur passé mutuel.
« Modifié: vendredi 23 janvier 2015, 10:27:22 par Elena Ivory »
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Serenos I Aeslingr

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    Le Roi des Trois Royaumes et le personnage le plus influent d'Ayshanra. Derrière ses allures détendues et son sourire charmeur, Serenos est un homme dangereux et incontrôlable, et une constante menace pour les royaumes continentaux. Son mépris pour le protocole lui ont attiré le titre de "Roi Fou".

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 38 mercredi 21 janvier 2015, 03:44:07

Contrairement à ce que pensait Ronald, Serenos n’avait aucunement l’intention de se mettre seul en chasse. D’une part parce que tout bon chasseur ne traquait jamais une proie s’il ne savait pas où la trouver, et d’autre part parce qu’il devait limiter au maximum les incidents diplomatiques, déjà que sa nomination en tant que Commandeur honoraire allait probablement faire couler beaucoup d’encre dans les prochaines semaines. Les Espions Meisaens n’étaient toujours pas de retour, ni n’avaient cherché à lui transmettre une information par la pensée. S’ils n’avaient pas été aussi bien entrainés, ce dernier détail l’aurait même inquiéter, mais comme tout bonne unité d’élite, ses serviteurs savaient qu’il était plus prudent de réduire au strict nécessaire l’usage des divers moyens de communication, de peur d’être interceptés et de révéler des informations qu’ils préféraient ne pas transmettre à des ennemis. Ce n’est pas pour autant que le Roi se permit de rester oisif; les humains comme Ronald avaient besoin de leur sommeil, mais Serenos avait depuis longtemps supprimé chez lui le besoin de sommeil, un choix qu’il regrettait souvent, par la même occasion. Oh, le repos était toujours possible, autrement, sa démence aurait depuis longtemps pris le dessus, mais il n’avait pas ce besoin à satisfaire, ce qui lui permettait de très longues veilles.

Après sa prière, le Roi avait immédiatement pris le chemin du Donjon, sans pour autant passer par l’intérieur de la forteresse, mais plutôt par l’extérieur; à l’aide seule de ses ongles et doigts puissants, il escalada le mur et grimpa jusqu’à atteindre le toit le plus élevé de la fortification, et il s’y installa en lotus. À ses pieds, il pouvait encore distinguer les gardes qui faisaient leur tournée, mais tant qu’ils ne levaient pas les yeux vers lui, il pourrait travailler en paix. Il relaxa alors tous ses muscles et prit une longue et grande inspiration, avant d’expirer tout doucement, et il répéta l’exercice jusqu’à ce que ses pensées soient rivées sur le rythme de sa respiration. Et des pensées, il en avait beaucoup. Des doutes encore plus. Il redressa le dos et enfin, il ouvrit son esprit au monde. Ouvrir sa conscience n’était pas un don aisé à maîtriser, simplement parce que s’ouvrir revenait à se rendre très vulnérable aux assauts mentaux ennemis. Dans le milieu militaire, par exemple, les mages devaient plutôt se concentrer à protéger leur esprit qu’à l’ouvrir. Mais Serenos ne s’inquiétait pas outre mesure; il comptait bien faire aussi vite que possible pour trouver ce qu’il cherchait, avant que ses opposants ne détectent sa présence.

Il étendit de ce fait son esprit à l’entièreté de la Cité-État. On ne disait pas du Roi de Meisa qu’en son royaume il était omniscient sans la moindre raison. Il avait affuté ce don pour pouvoir repérer les esprits dangereux habitant son royaume, un don qui ne s’est pas toujours révélé des plus performants, compte tenu des derniers événements, mais il ne pouvait pas nier son utilité. Le monde lui apparut alors sous un tout nouveau visage, avec des esprits colorés des nuances blanches, grises, bleues et parfois voilées de ténèbres. Autant dire qu’en Nexus, cette dernière catégorie s’était énormément développée depuis le trépas de Liam. Le Roi captait un grand nombre d’esprits corrompus, percevant également leurs pensées. C’est ainsi qu’il put savoir qu’un viol se produisait dans les locaux de la milice civile, qu’un petit groupe de truands s’apprêtaient à s’attaquer à un commerce laissé sans surveillance, qu’une mère était en train d’accoucher dans sa maison avec sa famille, et d’autres petits événements qui étaient somme toute très communs à la ville de Nexus. Mais il devait concentrer sa recherche sur le véritable objet de sa présence dans l’esprit collectif; les assassins qui avaient été payés pour s’en prendre à la fille du Lion, ou même à celui qui les payait, si la chance était de son côté. Soudainement, une pensée volage passa dans son esprit. Elena. Il ne l’avait même pas quittée depuis quelques heures qu’il s’inquiétait déjà pour elle. Refusant de céder à la tentation de l’épier, il redoubla d’efforts dans sa traque aux ennemis. Ce n’est que lorsqu’il passa près du palais que son esprit détecta enfin quelque chose.

« Tiens tiens… mais qui va là? » se demanda-t-il en examinant plus attentivement ce qu’il avait détecté.

Résorbant son esprit pour se concentrer sur un point unique, il perdit par la même occasion sa vue d’ensemble sur Nexus. Son sujet n’était pas quelqu’un qu’il connaissait. Ou du moins, il ne le pensait pas. Mais l’esprit, lui, semblait garder quelques souvenirs de lui, et de l’animosité. Sans surprise, celui qu’il examinait n’avait suivi aucune formation pour se protéger des assauts magiques, et donc, aucune barrière ne gardait son esprit. Il put donc s’inviter sans problème dans la conscience grande ouverte et la fouilla. La complexité de l’esprit humain ne permettant pas de simplement soutirer des informations, il dût se contenter des bribes d’information qui circulaient ici et là. Cet esprit-là avait tellement de préoccupations qu’il processait plusieurs dizaines de pensées. À l’aveuglette, Serenos contraint son propre esprit à s’emparer d’une seule pensée, n’importe laquelle. Et il l’eut; Thénérim. Un nom. C’est tout ce qu’il avait besoin pour travailler. Il retira alors son esprit de celui de sa victime et regagna prestement son corps.

Pour lui, à peine quelques minutes venaient de passer, alors que quatre bonnes heures s’étaient déjà écoulées. La nuit était déjà bien avancée. Il voulut aller réveiller Ronald pour lui poser ses questions, mais en se rappelant ce que celui-ci avait dit au sujet d’Alessa et surtout ce que le Roi considérait comme de la désinvolture pour leur travail, le monarque rabroua cette idée, préférant rester seul jusqu’au matin plutôt que s’entretenir avec cet homme. Liam lui parlait souvent de Ronald Langley, de son vivant, et Serenos avait toujours été un peu envieux envers le meilleur ami de celui qu’il considérait comme le sien. Lui qui se voulait droit et noble nourrissait pourtant des sentiments aussi noirs que le plus simple homme, et il abominait ce côté trop humain de lui-même. Peut-être était-ce pour cela qu’il ne voulait pas lui accorder le moindre succès. Pour être meilleur que lui. Ah, si son père le voyait, il aurait bien honte.

Le Roi planta un crochet à la toiture à ses pieds et agrippa une corde enroulée dans une bobine attachée à sa ceinture et descendit la tour en rappel. C’était Arthuros qui lui avait présenté ce gadget, et il devait admettre qu’il était bien pratique; malgré sa capacité de voler, les gens finissaient toujours par faire un cas de ses apparitions soudaines, et il se résolvait à utiliser plus souvent des méthodes plus « normale ». Une fois au sol, il percut un mouvement dans les fourrés. Un Meisaen.

« Quelles sont les nouvelles?
- Quelque chose de sombre s’est approché de Nexus dans les dernières semaines, mon Roi. Il y a des traces de Corruption dans les bas-fond… Pardonnez mon arrogance, Majesté, mais je vous implore de ne pas vous mêler de cette enquête… Quelque chose de sombre œuvre aux côtés de ces assassins.
- Je note vos préoccupations, mais ce n’est pas la première fois que je suis confronté à la Corruption. Trouvez-en la source et je m’en occuperai une fois que j’aurai réglé le cas des Hommes Sans-Visages.
- Comme vous le voudrez, sire… »

Les Meisaens avaient le droit de parler de leurs inquiétudes au Roi, surtout quand elles étaient justifiés, mais il était de connaissance générale que le Roi n’en faisait toujours qu’à sa tête. D’une manière ou d’une autre, il ne démordrait de cette histoire que si le cœur lui en dit, et l’informateur se volatilisa. Serenos rajusta sa capuche sur sa tête et se dirigea vers le donjon. On tenta bien de lui demander de s’identifier, mais l’emblème Meisaen se trouvant sur le dos de son manteau suffisait à le faire reconnaitre, et il gravit les marches sans trop de problème. Il entra dans la pièce, captant quelques bribes des paroles de Beauregard, et s’approcha d’eux, mais ne poussa pas la familiarité à s’assoir.

« J’ai sondé la Cité-État. Je crois avoir repéré un des commanditaires de l’attentat. C’est une piste très floue, mais j’aimerais qu’on enquête sur une famille Nexusienne… les Thénérim. Aussi… mes agents ont repéré des traces de Corruption. »

Sommairement, il leur relata son implication avec les Thénérim. Du temps de Noah Ivory, l’arrière-arrière-grand-père de Liam, c’était une famille noble, prestigieuse même, pour avoir des liens de sang direct avec la famille des Ivory, leur arbre généalogique remontant plusieurs  générations, du temps d’Hector Ier Ivory, lorsque celui-ci maria sa septième fille au Duc de Thénérim, un petit duché qui avait fortement participé aux efforts de guerre. Or, lors du règne de Noah, les Thénérims étaient de mèches avec les Ashnardiens, coopérant avec leurs agents dans l’espoir de prendre un jour le contrôle du Royaume. Or, ils avaient tenté de faire chanter Serenos à les assister dans leur sabotage en kidnappant le jeune Kaelin, un prince Meisaen étant alors un otage dans la maison Royale Nexusienne et garantie de bonne entente entre les deux contrées, mais Noah avait découvert les magouilles de ses cousins suite aux aveux de la plus jeune fille des Thénérims, et Serenos avait même eu le feu vert pour les traquer et les capturer pour récupérer son fils.

Suite à cela, il expliqua également ce qu’était la Corruption. Il ne parlait bien entendu pas d’un phénomène politique très répandu, mais bien d’un problème d’origine magique. Selon ses théories, la Corruption était lié à l’usage de la magie noire. il y avait toujours eu un ou deux abrutis doué d’un talent magique qui se laissaient gagner par l’appât du gain ou simplement par la perversion qui accompagnait l’usage des plus sombres applications des arts mystiques, mais ils étaient le plus souvent appréhendé par un Paladin ou une troupe de Templiers, un Ordre un peu moins reconnu et surtout moins aimé en raison de la violence extrême et la discrimination qu’ils infligeaient à tous ceux qui développaient un talent magique, même des plus moindres. Ces petites frappes n’avaient que très rarement l’occasion de créer la moindre Corruption. Alors que lorsque celle-ci était provoquée par un magicien expérimenté dans les arts occultes, elle devenait quelque chose de particulièrement inquiétante. Comme un miasme, la Corruption n’avait aucune forme matérielle, tout en étant pourtant bien présente. En sa présence, les gens commençaient à se comporter de façon beaucoup moins civilisée, cédant aux pulsions des plus belliqueuses aux plus bêtes.

La Corruption, s’abstint-il par contre de révéler, risquait de devenir beaucoup plus commune dans l’avenir, si l’Étoile continuait de briller dans les cieux. Pour Serenos, c’était un signe, mais pour ces hommes, ce serait les lubies d’un vieux magicien se prenant pour un prophète. « Ils ne croiraient même pas un véritable prophète s’ils en auraient eu un devant les yeux. » Songea-t-il. Il posa enfin les yeux sur Joachim et baissa humblement sa tête pour le saluer.

« Paix sur vous, Sénéchal Beauregard. Je tiens à vous présenter mes excuses pour ma conduite de la veille. J’étais fourbu et blessé dans mon orgueil suite à la tragédie qui a failli s’abattre sur la jeune Reine par ma négligence. Je crois avoir raté l'occasion de me présenter moi-même, alors, permettez-moi de me présenter. Je suis Serenos Sombrechant, Roi de Meisa, et un collaborateur de la Reine. »

Le ton de Serenos s’était beaucoup adouci. La méditation avait aussi cet effet sur lui; il retrouvait une certaine sérénité à chaque fois qu’il s’ouvrait à ce monde. Il aurait volontiers voulu présenter ces mêmes excuses à Langley, mais il doutait que cela soit nécessaire; le Commandeur le prenait déjà pour un grand malade mental. Ses excuses lui auraient fait le même effet que des mots à un sourd.

« Si Tilam est de mèche avec les assassins, il y a à parier qu’il ne sera pas de ce monde bien longtemps. D’expérience, les assassins professionnels ne voient pas les places fortes comme de véritables obstacles, des geôles encore moins. Nous devrions nous presser. »

Elena Ivory

Humain(e)

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 39 samedi 24 janvier 2015, 02:13:32

ELENA IVORY

« Nommer un souverain étranger Commandeur honoraire sans en référer au Conseil n’était pas...
 -  Je sais tout cela, Arnaud ! »

Le Grand-Duc Arnaud de Maizière ne dit rien pendant quelques secondes, observant la jeune femme assise avec une robe courte et un châle sur son fauteuil. Derrière elle, une grande baie vitrée montrait la baie de Nexus, avec cette côté escarpée et creusée de hautes falaises. Le soleil était en train de se lever, paresseusement, des jets dorés et orangés venant éclairer le Palais d’Ivoire et toute la ville. Elena avait peu dormi cette nuit, et elle n’était pas surprise que son premier rendez-vous matinal, avant même la cellule d’urgence avec le Conseil, soit avec Arnaud de Maizière. Le Grand-Duc était un homme calme, réfléchi, avisé, et, surtout, loyal.

Quand les parents d’Elena étaient morts, et que Jamiël avait pris sur elle-même le choix de laisser la Reine héritière au monastère de Saint-Antoine, Arnaud de Maizière, qui siégeait alors déjà au Conseil Royal, avait agi en sa faveur, soutenant ce point de vue, face à une cohorte de conseillers voyant d’un très mauvais œil l’ingérence d’un monastère mélisain dans les affaires de succession nexusiennes. On avait parlé d’un « acte de trahison », d’une « atteinte à la souveraineté de la cité-État », voire d’un « putsch mélisain ». Depuis cette époque, il restait imprimé dans l’esprit de ces conseillers l’idée qu’Elena n’était pas vraiment une patriote, qu’elle préférait soutenir les intérêts des Mélisains plutôt que les siens... Bref, qu’elle était influençable et faible... Et le fait qu’elle coupe la parole d’Arnaud signifiait qu’elle était préoccupée, sincèrement préoccupée.

« Ils verront cela comme une preuve de votre insuffisance à gouverner, Elena. Je ne dis pas ça pour assombrir votre journée, mais pour que vous prépariez votre défense.
 -  Hum...
 -  Dites-vous bien qu’ils savent ce que nous savons sur Serenos. Ils savent que ce dernier a séjourné à Sylvandell, État qui reste, malgré votre peluche, un État ennemi et belliciste, connu et réputé pour ses multiples atteintes au droit international et au respect de la souveraineté des autres nations. »

La « peluche » d’Arnaud était un cadeau qu’Elena avait reçu quand elle était revenue du monastère de Saint-Antoine. Les souverains du monde entier avaient alors tenu à se rappeler leur présence à celle de la Reine, envoyant des cadeaux ou des consuls. De Sylvandell, elle avait reçu un cadeau et une lettre. Le cadeau était un dragon en peluche, et la lettre était écrite de la plume de la Princesse héritière, Alice Korvander. Une main jeune, innocente, que personne d’autre qu’elle (et Adamante, bien entendu) n’avaient lu. Elena avait toujours cette lettre, entreposée dans un petit coffret, en compagnie d’autres lettres, et le dragon en peluche trônait dans sa chambre. C’était celui de la Princesse de Sylvandell, « son ami le plus précieux » à l’époque où elle avait rédigé la lettre... Une femme qu’Elena n’avait encore jamais eu l’occasion de voir, mais qui lui inspirait espoir dans le but de parvenir, un jour, à mettre fin à la guerre.

« Je ne tiens pas à laisser une tentative d’assassinat sur ma personne impunie, Arnaud...
 -  Et c’est compréhensible. Cette confrérie distille trop longtemps son venin acide dans les rues de la ville, et est soutenue depuis trop longtemps par des nobles qui voient en eux un moyen efficace de réguler les choses... Un père voulant se débarrasser d’un héritier trop présomptueux, une femme voulant récupérer l’héritage en tuant son mari... Les Sans-Visages existent depuis des siècles, mais, depuis quelques années, ils deviennent de plus en plus présomptueux, et de plus en plus influents. Ils sont liés au crime organisé, et ce dernier gangrène la ville. La crise qui nous accable vient en grande partie de là, Elena. L’insécurité, la corruption, les trafics de stupéfiants, les overdoses qui se multiplient, la prostitution illégale qui explose... Mais ils ne vous pardonneront pas d’avoir nommé un Meisaen Commandeur. Il faudra être ferme, Elena.
 -  Je n’ai pas pour habitude de me montrer faible...
 -  Mais vous avez pour habitude de vous montrer avec Adamante... »

Elena se crispa sur place, serrant ses poings.

« Adamante est...
 -  Peu importe ce qu’elle est, vous affrontez des gens de mauvaise foi ! Des gens qui utiliseront n’importe quel prétexte pour vous décrédibiliser ! Adamante est une femme dont je ne remettrais jamais en doute la loyauté et la probité, mais elle est avant tout perçue par vos adversaires politiques comme une Mélisaine... Une étrangère. Il vous faudra venir sans elle, et leur rappeler que vous avez choisi Serenos parce qu’il enquête sur ces gens depuis l’épidémie de peste qui a ravagé Meisa, et qu’il ne dirige pas cette investigation, qui se trouve entre les mains de Sire Langley. Voilà ce qu’il faudra leur dire, une version à laquelle vous cramponnez. »

Arnaud parlait rapidement, d’une voix forte et efficace. Il était un véritable orateur, quelqu’un qui savait comment lire et comment interpréter les signaux qu’une personne émettait quand on lui parlait, afin de savoir si la personne vous écoutait, vous comprenait, et ce qu’elle faisait. Il avait toujours coutume de dire que ce n’était pas parce qu’une personne hochait la tête qu’elle vous écoutait.

« Ne haussez pas vainement le ton, contentez-vous d’adopter un ton ferme. Restez assise pendant que nous serons debout, et interdisez-nous de nous asseoir. Exposez d’entrée de jeu vos choix, prenez-les en faute, et regardez soigneusement chacun de nous. N’oubliez aucun angle mort, montrez-leur que vous gérez la situation, que vous avez été attaquée, et que des têtes sauteront si cette confrérie n’est pas démantelée dans la semaine. »

Elena hocha la tête, puis, après quelques secondes, son visage se fendilla d’un léger sourire.

« Envisageriez-vous de devenir mon oncle, Arnaud ? »

Le Grand-Duc se tut quelque peu... Puis haussa les épaules.

« Je ne fais que vous conseiller, Elena. »



RONALD LANGLEY

Les Thénérim... Ils avaient siégé au Conseil royal jadis. Une famille qui avait profité de l’expansion économique de Nexus pour se lancer dans l’achat compulsif de multiples guildes et titres de bourse, et s’en servir pour s’enrichir. Cette famille avait fait partie des principales familles ayant développé et encouragé le commerce international, envoyant ses hommes pour sécuriser les grandes routes commerciales en multipliant les fortins et les auberges fortifiées. Lorsque Nexus avait vraiment commencé à commercer avec les autres puissances étrangères, et ce avant même qu’Ashnard ne soit autre chose qu’une rumeur lointaine venant de l’Est, il avait fallu affronter de multiples bandits, brigands, et autres forbans venant attaquer les caravanes marchandes. Pour sécuriser les routes, les nobles nexusiens avaient bien dû envoyer des hommes, et c’était ce que les Thénérim avaient fait. Ils avaient construit des fortins, se rémunérant en prenant une commission sur chaque vente, et en élaborant des taxes auprès de chaque fortin et de chaque auberge fortifiée. Ils avaient aussi bénéficié de subventions publiques, sur une instigation de la Reine de l’époque, afin d’encourager le commerce international. Les Thénérim avaient ainsi gagné en influence, et avaient même fondu une fédération commerciale, la Corporation Thénérim, regroupant de multiples guildes et sociétés commerciales.

Leur règne avait tourné cout quand, comme Serenos le leur rappela, Noah Ivory avait appris qu’ils étaient des traîtres. Les Thénérim avaient eu la folie des grandeurs, et un appât du gain toujours plus fort. Ils commerçaient avec Ashnard, dont la menace préoccupante avait conduit Nexus à se lancer sur les voies de la guerre, quand l’Empire avait commencé à attaquer des royaumes alliés. Sous couvert d’envoyer des ressources alimentaires ou médicales, les Thénérim envoyaient des cargaisons d’armes, graissant la patte des fonctionnaires chargés de vérifier l’exactitude entre les bons de commande, détaillant avec précision le contenu des cargaisons, et la cargaison à proprement parler. Une fraude qui avait été éventée. La Corporation Thénérim en avait pâti, et la famille s’était vue condamnée par la Cour Royale, certains membres à des peines d’emprisonnement, la famille entière à une lourde amende.

« Talim est une petite frappe, quelqu’un qui a un lourd casier judiciaire, parsemé de petits délits et d’infractions mineures, expliquait Joachim en descendant les marches menant au cachot du fort. Agressions, rixes, état d’ébriété sur la voie publique, détention et usage de stupéfiants... Il a toujours réussi à échapper à des peines d’emprisonnement lourdes en délivrant des informations... S’il a quelque chose à dire, ce ne devrait pas être trop difficile de le faire parler. »

Ils descendaient un étroit escalier gris, en colimaçon, pour rejoindre les douves. Les prisons de Fort-Rose se trouvaient partiellement sous le lac, dans des grottes naturelles hermétiquement closes. Parfois, les parois étaient suintantes d’eau, justement en raison du lac. Des torches étaient allumées dans les coins, et ils avancèrent dans des couloirs étroits, avec des geôles à gauche et à droite. Beaucoup étaient vides, mais d’autres étaient remplies. Un geôlier les guidait rapidement, jusqu’à une cellule dans un coin.

« V’là le renégat... »

En chemin, Joachim leur avait expliqué que ses hommes avaient arrêté Talim à un entrepôt de marchandises, où il était en train de voler des fournitures, probablement pour le marché noir. Talim était là, sale et puant, comme on pouvait s’y attendre de la part de personnes hébergées dans les geôles. Une barbe sauvage poussait sur son visage.

« Talim !
 -  Votre Grâce ?! Que signifie cet enfermement ? Je...
 -  La ferme ! Mes hommes t’ont surpris en train de rentrer par effraction dans l’un des entrepôts de la guilde des Lombards.
 -  C’est là pure calomnie, je...
 -  Tu auras l’occasion de t’exprimer à l’audience. Je te présente Sire Ronald Langley, et Sa Majesté le Roi Serenos Sombrechant de Meisa. Ils ont été mandatés par Sa Majesté la Reine Ivory en personne pour remonter la piste de la Confrérie des Sans-Visages. »

À ce nom, Talim écarquilla les yeux, et recula précipitamment. Lui qui s’était relevé trébucha en heurtant avec l’un de ses talons une flaque d’eau, et ses fesses heurtèrent le sol.

« Qu-Quoi ?! N-Non... Je... Je ne veux pas de conciliation, cassez-vous ! Foutez-moi la paix !! »

Ronald hocha lentement la tête, la mine sombre.

Il allait visiblement falloir rendre leur ami un peu plus coopératif.
DC d’Alice Korvander.

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    Le Roi des Trois Royaumes et le personnage le plus influent d'Ayshanra. Derrière ses allures détendues et son sourire charmeur, Serenos est un homme dangereux et incontrôlable, et une constante menace pour les royaumes continentaux. Son mépris pour le protocole lui ont attiré le titre de "Roi Fou".

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 40 dimanche 25 janvier 2015, 10:54:40

[Bon, je vais faire une [grosse] entorse à la règle de la cohérence, mais puisqu’il me faut un personnage pour la partie avec Elena, je vais utiliser de mon droit de rôliste et faire apparaître un personnage que je réservais pour plus tard. Je te demande pardon d’avance. J’assume que la Chambre du Conseil de Régence a plusieurs accès, mon personnage arriverait par l’entrée destinée aux diplomates, par exemple]



Andaraniel Sombrechant

« Ma Reine, est-ce que tout va bien?
- Pour l’amour du ciel, Arthuros, vous êtes encore plus envahissant sur ma santé que mon mari!
- Votre condition est très…
- Je suis parfaitement au courant de ma condition, mon ami. Et j’aimerais que vous cessiez de vous inquiéter.

De toutes les personnes qu’Arthuros aurait pu appeler pour représenter le Roi, il n’y avait finalement que la Reine de Meisa elle-même qui avait assez d’influence et de pouvoir pour pouvoir demander à être présente à une réunion du conseil. Sachant pertinemment que la promotion de Serenos au titre de Commandeur allait causer du chaos et faire balancer le pouvoir, il s’était arrangé avec Jamiël pour rétablir temporairement un relais de transport magique entre Meisa et Nexus pour que cette dame unique en son genre puisse se déplacer jusqu’au Royaume sans encombre et surtout très rapidement. Arrivée très tôt dans la journée, la Reine Andaraniel de Meisa, une femme aussi réputée pour son intelligence que sa grâce, avait obtenu de la conseillère d’Elena de représenter son époux et les Meisaens devant le conseil, d’une part pour rassurer le Conseil que Meisa n’avait aucun intérêt ni aucune responsabilité dans la catastrophe s’étant produite la nuit précédant la veille, et aussi pour appuyer la décision de la Reine de nommer le Roi de Meisa en tant que Commandeur.

Malgré son titre de Reine, l’union entre Serenos et Andaraniel n’avait rien de romantique. Contrairement à Liam et Nöly, le couple parfait et harmonieux malgré le caractère politique de leur mariage, Andaraniel était la conscience même de Serenos, et le couple se disputait plus souvent qu’autrement. Même si Serenos respectait Andaraniel pour ses capacités en tant que Reine et régente de Meisa en son absence, leur mariage était teinté d’une tension assez facile à expliquer; ni l’un ni l’autre ne ressentait d’amour dans cette union. Ce n’était pas vraiment de la faute de Serenos, qui avait bien tenté de la courtiser dans les premières années de leur mariage, ni celle d’Andaraniel qui faisait un énorme effort pour tolérer le comportement à la fois extravagant et impulsif de son mari, mais entre eux, rien n’accrochait, à un tel point que leur union n’avait aucune chance de porter fruit; ils ne partageaient même pas la Chambre Royale, que Serenos avait d’ailleurs cédé à la Reine par courtoisie. Malgré leurs comportements complètement différents, ils œuvraient ensemble pour que la paix perdure en Meisa, et sans la Reine, qui sait comment le Royaume aurait tourné.

« Où est mon idiot de mari, d’ailleurs? s’enquit-elle, braquant son regard sur celui de son agent.
- Il pourchasse actuellement les responsables de l’assassinat
- Encore en train de jouer les héros, maugréa la Reine. Quand apprendra-t-il que ce n’est pas son rôle de jouer les détectives?
- Pour sa défense, ma Reine, permettez-moi de vous rappeler que son nom est entaché par l’apparence que l’assassin a prise… »

La Reine remua la main pour faire comprendre à Arthuros qu’elle comprenait cette part de l’histoire, mais qu’elle n’en avait rien à faire. S’accoudant contre la fenêtre de sa diligence, elle regarda la ville lui passer sous le regard. Elle eut un vague sourire, soufflant un peu de brume sur la fenêtre avant d’y faire un bref dessin, l’effaçant immédiatement la seconde d’ensuite. Elle recula ensuite puis se tourna vers Arthuros, qui se jouait nerveusement avec les mains.

« Cessez donc, maître Espion… ce comportement est très agaçant.
- Je n’y peux rien, ma Reine, s’excusa l’homme en arrêtant ses gestes. Et si une guerre se produisait?
- Alors, c’est que j’aurai échoué, et pour une fois, mon abruti de mari servira à autre chose qu’à me faire déplacer d’un hémisphère à l’autre pour ses bêtises! »

Bien qu’elle parla rudement du Roi, il était évident pour l’Espion que la Reine s’inquiétait pour lui. Elle pouvait paraitre dure, mais elle n’ignorait pas ce que vivait Serenos, et elle espérait sincèrement le délester un peu de son fardeau. L’immortalité semblait lui peser terriblement, ainsi que la solitude. Peut-être que s’attirer des ennuis était une manière pour lui de combattre sa mélancolie, de trouver un brin d’excitation dans un monde qui lui semblait terne. Malgré tout, elle ne pouvait se laisser gagner par ses besoins; elle était Reine pour une raison, et elle comptait bien la remplir. Entre ça et retourner vivre dans sa famille, en Autegenterie, elle préférait de loin ramasser les dégâts de Serenos. Au moins, son intelligence servait à autre chose qu’à écrire réciter des poèmes interminables; les Autegentes n’avaient que rarement l’occasion d’exploiter un autre talent que l’art, car dans son pays, c’était les hommes qui occupaient tous les postes d’importance… ou simplement travaillaient.

Emportée dans ses pensées, ce fut l’arrêt soudain du véhicule qui l’arracha à sa contemplation. La Reine ajusta sa robe et se redressa avec l’aide de son compagnon, qui l’aida à descendre du transport en bon gentilhomme. Andaraniel jeta un bref coup d’œil à l’architecture du Palais d’Ivoire et sourit. Le Palais Doré aurait fait un très bon nom, finalement, se dit-elle alors qu’elle gravissait les marches, suivie d’Arthuros et de deux Meisaennes. Il était rare de les voir ainsi habillées, mais les subordonnées d’Alessa avaient enfilé un uniforme noir masculin pour accompagner la Reine, conscientes que leur tenue de combat, peut-être un peu indécente pour l’esprit Nexusien, risquait de porter préjudice à leur souveraine. Une fois à l’intérieur du palais, quelques hommes en uniforme accueillirent la Reine étrangère. L’homme en tête de file avait un énorme sourire, visiblement ravi.

« Votre Majesté!
- Sir Hector! Ma foi, comme vous avez grandi! »

Le Chevalier mit poliment un genou en terre devant la Reine, et lui tendit une main, dans laquelle la Dame glissa la sienne. Posant un bref baiser sur le dos de la main, le Chevalier se redressa, toujours souriant. C’était un brave jeune homme qui, pendant ses jeunes années, agissait en qualité de messager entre Nexus et Meisa, ce qui lui avait permis de rencontrer la royale demoiselle. Elle-même âgée d’une quarantaine d’année, elle n’en paraissait qu’à peine la demi-vingtaine, le Chevalier ressentait quand même un embarras à se faire complimenter sur sa croissance par une dame elle-même si jeune.

« Nous avons été assigné à votre escorte pour vous accompagner jusqu’à Sa Majesté, avant le début de la séance avec le conseil.
- Fort bien, c’est la raison de ma présence. »

Offrant galamment son bras à la Reine, le Chevalier l’invita à le suivre, pendant que ses hommes se joignaient aux Meisaennes pour surveiller le périmètre de l’importante Dame. La Reine posa dignement son bras sur celui du Chevalier et le suivit dans les méandres du Palais d’Ivoire, commentant par moment ce qu’elle en voyait. Elle fut surprise du nombre de serviteurs qui s’affairaient dans tout le palais, demandant même si ce n’était pas un peu excessif, mais le Chevalier la rassura; les serviteurs étaient contraints de travailler aux niveaux inférieurs car toute la garde s’était déplacée pour surveiller les chambres des hôtes de marque et pour assurer la sécurité de la Reine de Nexus.

« Comment va Elena? La pauvre enfant doit avoir eu la peur de sa vie!
-  Notre Reine contrôle la situation de son mieux… sans l’intervention de votre mari, qui sait ce qui lui serait arrivé. Le Roi Serenos semble toujours se pointer aux moments les plus problématiques. »

Quand il n’est pas celui qui les cause, voulut rajouter la Reine, mais elle s’en mordit les lèvres. Rabaisser le Roi n’était pas dans les intérêts de sa cause. Elle n’était pas là pour cela. Et même que le fait que certaines personnes étaient reconnaissantes au Roi était dans leur intérêt. Leur marche ne dura que quelques minutes avant que le jeune chevalier ne l’abandonne, indiquant la position de la Reine Nexusienne de la main. Il lui demanda s’il était nécessaire de la présenter, mais la Reine de Meisa lui fit signe qu’une telle chose n’était pas nécessaire, et l’homme prit son congé. Attendant que les gardes se soient éloignés, Andaraniel s’approcha finalement de son égale Nexusienne.

« Elena… »

Une fois près d’elle, elle fut sincèrement frappée par la beauté de la jeune Reine, couvrant instinctivement ses lèvres d’une main pour masquer la stupeur qui s’y dessinait. Elle n’avait rencontré que deux fois Nöly et Liam, quand elle était bien jeune, une fois pendant la visite de ceux-ci en Autegenterie, la seconde étant le jour de la naissance d’Elena, quelques jours à peine après son mariage avec Serenos, et fut complètement désarmée pour sa ressemblance avec la défunte Reine. Remise de sa surprise, elle s’approcha un peu plus de la demoiselle et l’examina de plus près, se penchant un peu pour pouvoir avoir la tête à son niveau

« Je suppose que vous n’ignorez pas qui je suis, même si la dernière fois que je vous vis, vous n’étiez encore qu’un nouveau-né… je suis Andaraniel, la Reine de Meisa. J’ai entendu beaucoup de nos invités vanter votre beauté et votre ressemblance avec vos parents… mais vous êtes encore plus ravissante que je l’imaginais. »

Plutôt que l’inconfort habituel que pouvait provoquer les louanges d’une étrangère, le sourire bienveillant de la Reine de Meisa inspirait surtout le calme et la paix; elle n’était que des plus sincères. Son air s’assombrit de quelque peu, maintenant qu’elle se rappelait de la raison de sa visite.

« Horrible histoire qui fut la vôtre, ma pauvre enfant… Je remercie la providence d’avoir ramené Serenos, mon mari, en Nexus. Quel chagrin aurait été le nôtre s’il vous était arrivé malheur.  Comment vous portez-vous? »

***

Serenos Sombrechant

« Talim !
 -  Votre Grâce ?! Que signifie cet enfermement ? Je...
 -  La ferme ! Mes hommes t’ont surpris en train de rentrer par effraction dans l’un des entrepôts de la guilde des Lombards.
 -  C’est là pure calomnie, je...
 -  Tu auras l’occasion de t’exprimer à l’audience. Je te présente Sire Ronald Langley, et Sa Majesté le Roi Serenos Sombrechant de Meisa. Ils ont été mandatés par Sa Majesté la Reine Ivory en personne pour remonter la piste de la Confrérie des Sans-Visages.
- Qu-Quoi ?! N-Non... Je... Je ne veux pas de conciliation, cassez-vous ! Foutez-moi la paix !! »

C’était risible. Presque trop pour Serenos, qui ne put réprimer un sourire mêlé à une moue dégoûtée. La lâcheté avait quelque chose qui lui faisait le même effet qu’une bonne blague, surtout chez ceux qui avaient assez de cran pour plonger dans le monde obscur du crime et de l’arnaque. Visiblement, Langley savait qu’il allait devoir cuisiner l’homme avant de pouvoir lui soutirer la moindre information, mais le Roi de Meisa savait qu’il y avait une toute autre méthode pour contourner le problème. Le seul hic, c’était que les interrogatoires magiques n’étaient pas, mais alors pas du tout, populaire chez les Nexusiens, parce qu’entrer dans l’esprit d’un être vivant pouvait avoir des répercussions très graves sur la victime, qui pouvait finalement être disculpé de ses crimes pour ne plus être « la personne qui était supposée être condamnée », et Ronald préfèrerait certainement une méthode plus directe, qui ne risquait pas de foutre en l’air l’esprit de son suspect. Mais rien n’interdisait Serenos de faire démonstration de ses talents d’intimidateur pour assouplir le pauvre bougre. Mais est-ce que Langley était prêt à faire ce qu’il devait pour lui soutirer ce qu’il voulait?  Serenos, par contre, l’était.

« Où sont-ils, Talim? » demanda le Roi d’une voix calme.
- Allez-vous faire voir chez la Reine, connard! AH! »

Serenos leva un index vers l’homme, qui fut plaqué d’un coup brusque contre le mur de sa cellule. Ce n’était encore rien de bien méchant, mais le Roi de Meisa n’hésiterait pas à s’imposer comme un dérangé mental s’il pouvait arracher les informations qu’il voulait de cet homme. Plutôt que de se laisser aller dans les joyeusetés, il posa son regard brillant d’une lueur dorée sur Langley.

« Faites votre travail, Ronald. Je préfère vous laissez tenter votre propre méthode avant d’user de la mienne. Je te conseille d’être très gentil avec le Commandeur Langley, Talim, parce que ce serait dommage que je m’occupe de cet interrogatoire. »

Relâchant son sortilège, le Roi se détourna de sa future victime et s’adossa contre la porte de la cellule, croisant les bras sur sa poitrine en fixant Langley, ses yeux perdant leur couleur jaune pour reprendre leur bleu royal naturel. Serenos avait simplement établit un fait sur leur prisonnier; la magie ferait partie intégrante de son supplice s’il ne répondait pas aux questions de Langley. Le monarque pensait que le paladin n’avait certainement pas gagné sa position sans se salir les mains, et la torture, même s’il était fort probable qu’il n’en tire aucun plaisir, était le genre de saloperie que son métier exigeait. Serenos se tourna alors vers de Beauregard.

« Que sait-on de lui, à part ce qu’il fait? Est-ce qu’il a une famille, des amis? Toutes les munitions sont bonnes à prendre. »

Il ne prononçait pas ces paroles avec sadisme, car lui-même n’était pas très chaud à l’idée de devoir user de méthodes aussi déloyales, mais tout le temps qu’ils perdaient à faire parler ce type ne serait jamais gagné à nouveau, parce que plus le temps passait, plus ils risquaient de mettre de la distance entre eux et leurs proies, et vu la difficulté de cette chasse, ce serait à éviter au possible. Entretemps, il était très curieux de savoir si les Thénérims étaient vraiment responsable de cet attentat. Il n'avait capté que ce nom, avec une intention néfaste très présente, mais il n'y avait rien de sûr. Peut-être que Talim en savait quelque chose, mais vu l'homme qu'il avait sous les yeux, il doutait qu'il ne soit quoi que ce soit de plus qu'une espèce de sous-fifre qui assistait les Sans-Visages en échange d'un peu d'argent pour arrondir ses fins de mois et pour se débarrasser de ses créanciers. Il y avait un nombre croissant de ce genre de personne, décidément.

Elena Ivory

Humain(e)

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 41 mercredi 28 janvier 2015, 02:14:58

ELENA IVORY

«  Il me paraît clair que le système de sécurité mis en place par Langley s’est révélé défaillant, et incapable d’assurer votre sécurité, Majesté.
 -  Si vous entendez aller jusqu’à confier un garde dans mes toilettes, Comte Juvert, j’oppose d’entrée de jeu mon veto. »

Le Comte Juvert ne dit plus rien, replongeant le nez dans ses dossiers. Même si l’heure était très matinale, quand Elena était arrivée dans la Chambre du Conseil, cette dernière était déjà pleine. Ce n’était qu’un tour de chauffe. La réunion de crise serait longue et houleuse, et, pour assurer sa défense, Elena était assistée du Capitaine Luria, l’une des élèves de Sire Langley. Aussi belle que forte, la juvénile femme était un garde avec qui Elena s’entendait plutôt bien, et elle n’était pas surprise que Ronald l’ait délégué à sa défense. Discrète et silencieuse, bras croisés dans le dos, elle écoutait la première conversation entre Elena et son Conseil.

Sans surprise, le baron de Rochefort se révélait le plus incisif. Il se trouvait en ce moment à Nexus. Le maître de Château Caladan, un puissant fort côtier, était quelqu’un avec qui il fallait compter. Son fort se chargeait de réguler le commerce maritime, mais aussi de sécuriser les côtes, notamment en affrontant les pirates et autres menaces aquatiques avec lesquelles Nexus devait composer. Cependant, Elena savait aussi que la loyauté de Rochefort était sujette à caution. Elle ne lui accordait qu’une confiance très modérée, et il insista sur la sécurité, et sur le fait de savoir si Ronald Langley méritait toujours son poste de Connétable du Palais d’Ivoire.

« Nous avions laissé Langley organiser à sa façon la défense et la sécurité du Palais, en lui vouant une grande confiance. Lui seul s’occupait de savoir qui pouvait rejoindre la garde, notre rôle étant secondaire. Nous lui avons fait confiance, et il n’a pas été à la hauteur de cette dernière. Je rappelle qu’il est de la compétence du Conseil de nommer le...
 -  La question n’est pas là, mes chers Conseillers... Ronald Langley a et conserve toujours mon confiance. Cependant, vous avez tort, Baron de Rochefort. Certes, Messire Langley a un rôle central dans la défense et la gestion du palais, mais il n’est pas le seul à s’en occuper. Je m’interroge plutôt sur la capacité d’un Sans-Visage à pouvoir remonter dans l’enceinte du château sans jamais croiser une seule personne susceptible de percer son déguisement, ou aucun garde... »

Ce qu’Elena sous-entendait était que quelqu’un l’avait aidé à rentrer. Le Palais d’Ivoire était connu, non seulement pour son ancienneté, mais aussi pour sa multitude de passages secrets. Si Ronald en avait fermé bon nombre, il en subsistait encore certains, ne figurant sur aucune carte, généralement des couloirs et des corridors dérobés bâtis par des Rois pour leur permettre, en des périodes où l’Ordre Immaculé exerçait une forte influence, de rejoindre leurs maîtresses. Ces couloirs étaient maintenant utilisés pour des fonctions qui prêtaient beaucoup moins au sourire. Ce qu’Elena sous-entendait, en définitif, c’était que quelqu’un, parmi les gens assis à cette table, l’avaient trahi. Rochefort n’était pas dupe, et ne dit donc rien.

Conformément à ce qu’Arnaud avait suggéré, Elena avait ordonné à tous ses conseillers de rester debout pendant plusieurs minutes, avant de, finalement, leur donner l’ordre de s’asseoir. Il y avait plusieurs responsables religieux, des représentants de guildes, et beaucoup de nobles. L’unique sujet à l’ordre du jour était la tentative d’assassinat sur la personne de la Reine, et les réponses à y apporter.

« La Confrérie des Sans-Visages agit sur l’ordre de puissants... Ne peut-on pas soupçonner la main de l’Empire d’Ashnard ?
 -  Quel intérêt les Ashnardiens auraient-ils à plonger Nexus dans le chaos ? La ville s’embraserait, et ils ne récolteraient que les cendres... Ils leur seraient plus utiles de s’attaquer à nos stratèges, à nos chefs de guerre... »

Elena était d’accord avec cette analyse.

« Toute la question, intervint de Meizière, est en effet de trouver le mobile... Qui aurait intérêt à ce que vous mouriez, Majesté ? »

La question donnait la réponse en elle-même. Ceux qui y avaient intérêt se trouvaient autour de cette table. Les Ivory en moins, les grandes familles nobles pouvaient alors espérer conquérir le Palais d’Ivoire, le Trône. Elena les laissa méditer sur cette phrase, déclarant une suspension d’audience, puis sortit dans un salon de repos. Il y avait des fauteuils rembourrés, des petits foutes, des canapés, plusieurs cheminées, des tableaux... Un simple salon où les conseillers royaux se détendaient l’esprit, et discutaient entre eux, ou avec leurs cabinets, de ce qu’il convenait de faire. Chaque Conseiller royal disposait de son propre cabinet, et c’était souvent au sein de ce cabinet qu’on trouvait les décideurs.

Elena, elle, se rendit près d’Adamante, en compagnie de Luria. Impossible de deviner quoi que ce soit dans le regard de Luria, mais Elena n’était pas assez naïve pour ne pas savoir qu’elle et Adamante étaient des amantes. La Mélisaine était une femme pleine de vie, animée par une passion sulfureuse et vibrante. Elle y réfléchissait encore, quand des bruits de pas attirèrent son attention. En tournant la tête, Elena aperçut une femme qu’elle reconnut pas tout de suite... Avant d’y voir la femme de Serenos, la Reine de Meisa... Andanariel Sombrechant. Belle et resplendissante, avec un port altier, la Reine de Meisa venait donc de rejoindre le Palais d’Ivoire. Elena avait reçu un pigeon voyageur annonçant la venue de la Dame.

« Je vous souhaite la bienvenue à Nexus et au Palais d’Ivoire, Reine Andanariel, et ce même si j’aurais aimé que ce soit en de meilleures circonstances. »

Reine Andanariel, oui, car la femme l’avait appelé d’emblée par son prénom. Aussi, plutôt que de l’appeler par son nom de famille, Elena choisissait son prénom. Elle lui offrit un sourire charmant, et Elena comprit qu’Andanariel semblait... Plus posée que son mari. Elle lui demanda comment elle allait, et Elena répondit rapidement :

« Ma foi, après avoir rencontré un Sans-Visage cette nuit... On peut dire que je me porte bien. J’ose espérer que ma prochaine nuit sera plus agréable et plus reposante... »

L’humour était toujours un moyen de désamorcer une situation, peu importe le contexte.

« Je veillerais scrupuleusement sur vous, Majesté, répliqua alors Luria, sur un ton calme et neutre.
 -  Je vous fais pleinement confiance, Capitaine Luria. »

Elena se retourna alors vers Andanariel.

« Et vous-même ? Que nous vaut votre présence matinale ici ? Si vous cherchez votre mari, je crains de devoir vous aiguiller ailleurs. Le Roi de Meisa s’est personnellement engagé à retrouver les Sans-Visages, et à les traîner devant la justice. »

Autant dire qu’il allait être difficile de le voir.



RONALD LANGLEY

Talim était une petite frappe. Ce n’était clairement pas le caïd de quartier. Dès qu’il avait l’occasion d’amaigrir sa peine en dénonçant ses complices, il le faisait. C’était un bon client, car, même si ses avocats promettaient sans cesse qu’il allait se réhabiliter, et tenir compte de ses erreurs, Talim finissait toujours à nouveau à la barre. Le fait qu’il soit à ce point hostile au dialogue signifiait que les Sans-Visages méritaient leur réputation. Devant la question de Serenos, Joachim répondit rapidement :

« Talim n’a jamais connu ses parents. Je suppose que sa mère était une pute, et son père un chevalier, quelqu’un qui n’avait nulle envie d’une telle lignée. Il a été abandonné à un orphelinat, et a toujours été un enfant turbulent. Il était régulièrement puni par ses maîtres à l’orphelinat, et a, depuis lors, développé une peur noire de la prison. Il est claustrophobe, et, paradoxalement, il est toujours dans les ennuis et les trafics jusqu’au cou. »

Talim était l’un des fruits de la crise économique, l’un des cadeaux pourris de Nexus. Ronald acquiesça lentement.

« Talim, la Reine a été attaquée... Si tu ne nous aides pas, tu seras accusé de complicité de tentative de régicide. Les plaidoiries des avocats commis d’office n’y suffiront pas, cette fois. Tu seras incarcéré à Eternum.
 -  Vous... Vous ne pouvez pas faire ça, je n’ai rien à voir là-dedans ! »

La peur des Sans-Visages, ou celle d’Eternum...

« Tes options sont plutôt limitées. Aide-nous, donne-nous un nom. Les Sans-Visages ne le sauront jamais.
 -  Ils savent tout, Messire ! Ils savent tout ! Ils le sauront, et... Ils m’enfermeront avec leurs rats, et... Et...
 -  Nul n’est omniscient, Talim ! La réputation de la Confrérie est forte, mais ils ne sont que des hommes. Leurs représailles sont hypothétiques. Ton incarcération à vie à Eternum, en revanche, est une certitude si tu ne nous aides pas. Tu seras enfermé dans une petite cellule, continuellement plongé dans l’obscurité, une pièce froide, étroite, avec des lasers qui te scanneront, des menottes magnétiques... Tu seras tellement privé de lumière que, les fois où on allumera les lampes, la lumière t’asphyxiera, et brûlera ta cornée desséchée... »

Le portrait était très peu reluisant, mais Ronald eut l’effet escompté. Déglutissant sur place, Talim se redressa, et enroula à nouveau ses doigts décharnés autour des barreaux de la cellule.

« Les Sans-Visages... Okay, okay, ils... Ils ont un repaire dans les profondeurs de Nexus... Mais... Ça, j’le connais pas. En revanche, il y a cette dame... Vous savez... Le bordel aux lampions... »

Joachim hocha la tête.

« J’y étais une fois, pour convoyer du matériel... J’connais les bruits qui y courent. Le bordel est tenu par une matronne, qui enferme ses filles, et ne les laisse pas sortir de son refuge... Mais y a un mec qui vient voir l’une des filles... On dit que c’est un Sans-Visage. Qu’il est amoureux de cette fille, ou qu’il veille sur elle, ou j’sais pas trop quoi... C’est ma seule piste ! »

Ronald le regarda silencieusement. Le « bordel aux lampions » était un bordel des bas-fonds, « La Noble Caresse ». Un bordel réputé, et qui était tenu par une ancienne mère supérieure. Elle avait été bannie de l’Ordre après qu’on ait appris qu’elle utilisait son couvent pour accueillir des toxicomanes et des filles de joie, les faisant côtoyer avec les nonnes et les sœurs. Outré par ce comportement, qu’il voyait comme une tentative de corruption, l’évêque avait banni la mère supérieure, qui avait ensuite fondé « La Noble Caresse ».

« Tu n’as rien de plus à nous dire ?
 -  M’envoyez pas à Eternum...
 -  Ça, ça dépend de toi, et de ce que tu as à nous dire... »

Talim secoua la tête. Ronald était sûr qu’il y avait encore autre chose, mais c’était déjà un début.

Une piste possible.
DC d’Alice Korvander.

Consultez ce topic pour une présentation détaillée de mes personnages.

Pour une demande de RP, je vous encourage, soit à poster sur le topic susmentionné, soit à envoyer un MP sur mon compte principal.


Serenos I Aeslingr

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Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 42 vendredi 06 février 2015, 06:01:39

« Je vous souhaite la bienvenue à Nexus et au Palais d’Ivoire, Reine Andanariel, et ce même si j’aurais aimé que ce soit en de meilleures circonstances. »

Andanariel ne put s’empêcher de sourire davantage devant cette phrase. Elle s’abstint de lui dire que peu importe où Serenos passait, les circonstances n’étaient jamais joyeuses, ce qui nécessitait justement qu’elle se présente elle-même pour couvrir ses arrières. Le Roi de Meisa étant l’élite des aimants à problèmes en tout genre, elle devait souvent comparaitre en son nom pour rassurer les dirigeants et autres politiciens méfiants sur les intentions de l’étrange monarque du Royaume oriental qui, bien qu’il ne le démontre qu’assez étrangement, n’avait jamais en tête de déclencher une guerre. Elle ne savait pas si les doutes s’étaient déjà élevés contre Meisa, mais elle était certaine que le sujet n’allait pas tarder à sortir. Beaucoup de méfiance provenait des Royaumes continentaux par rapport à son époux, dont le caractère changeant, imprévisible, pouvait lui attribuer quelques mauvaises idées, mais elle ne laisserait pas les doutes forger une décision fâcheuse. Au niveau militaire, Meisa était encore une contrée plutôt jeune, qui ne devait encore sa puissance défensive qu’au nombre toujours croissant de magiciens, ainsi qu’aux créatures dangereuses qui avaient prêté serment à Serenos et lui seul.

Elena lui demanda alors comment elle se sentait, ainsi que le motif de sa visite, aussi directement et franchement que possible. Là, c’était bien du Liam qu’il y avait en elle. Serenos lui avait beaucoup parlé du très populaire et tristement défunt Roi de Nexus, pendant leurs quelques soirées qu’ils s’accordaient en tant que couple. Si elle n’était pas réellement intéressée par les histoires du passé de son mari, il les racontait avec une telle passion et tant d’énergie qu’elle n’arrivait quand même pas à l’arrêter ou même à oublier ses paroles, et elle en retenait également l’estime et l’affection que son mari avait pour son semblable. Sans même jamais avoir posé les yeux sur l’ancien Roi, elle parvenait quand même à se le représenter sans mal avec les louanges, et aussi quelques reproches, dont Serenos couvrait le nom de celui-ci. Elena lui apparut rapidement comme une femme à la fois douce, franche et très intelligente, et contrairement à l’Immortel, Andanariel était une très bonne juge de caractère.

« Si vous pouvez me permettre d’être franche, je l’ignore encore, Reine Elena. Je comptais me présenter officiellement en tant que représentante de Meisa, mais je crains d’avoir raté la session du Conseil. »

Ce qui est d’ailleurs très regrettable , songea la Reine Meisaenne, qui aurait bien souhaité savoir ce qui se disait pendant cette assemblée d’urgence. Elle ignorait encore tout ce qui pouvait transpirer de la tentative d’assassinat contre Elena, mais Arthuros étant un expert à recueillir et rassembler des informations, elle n’ignorait pas que l’assassin arborait les traits de son mari pendant sa tentative de meurtre. Selon le Conseiller et Maître-Espion, il y avait là matière à causer un conflit. Serenos était un sorcier, et la magie, en politique, était une arme à double tranchant, car bien qu’elle facilite beaucoup de choses, elle attisait grandement la méfiance, surtout que Serenos conservait jalousement bon nombre de secrets et découvertes d’importances sur le plan magique. Dans les multiples scénarios dressés par Arthuros, celui que les Conseillers aient un traître dans leur groupe qui cherchait à monter sur le trône au travers de la guerre qui aurait résulté de la tentative d’assassinat semblait le plus probable. Et tout bon traître savait comment trouver une échappatoire. Selon Arthuros, le traître cherchera à semer le doute sur Serenos, en mettant l’accent sur les rapports révélant son caractère changeant, ses actes antérieurs révélant une prédisposition à la folie, ainsi que les nombreux usages universellement condamnés de la magie qu’il avait fait au cours de son très long règne pour monter les autres conseillers contre le Roi et causer la guerre qui, finalement, était son but final, la mort de la Reine n’étant qu’un moyen plus facile et plus rapide d’atteindre ce même but.

Soudainement, sa mémoire lui rappela qu’elle avait devant elle une personne qui était aux premières loges lors de cette réunion exceptionnelle du Conseil, et son regard se braqua sur les magnifiques yeux bleus d’Elena. Optant pour l’honnêteté contre les jeux de la politique, elle s’adressa à elle sur un ton à la fois doux et solennel.

« Majesté, j’aimerais savoir ce qui se dit au sujet de mon mari au Conseil. »

Il n’y avait bien sûr aucun intérêt pour Elena de révéler la moindre information à la Reine étrangère. Andaraniel n’avait pour sa part aucun gain à avoir à taire son souci, car si elle ne posait pas la question, elle n’aurait probablement jamais la réponse à moins que le Conseil n’accepte de la recevoir dans leurs discussions et que l’un d’entre eux échappe des paroles qui lui permettraient d’identifier le possible responsable de l’attentat. En plus d’être Reine, elle était une très fine auditrice et savait, la plus grande part du temps, tenir sa langue lorsqu’elle se savait dans une situation précaire. Elle osait espérer que Serenos s’était fait une alliée d’Elena par son sauvetage, ou du moins que la Reine de Nexus avait suffisamment d’estime en Serenos pour lui fournir les informations dont elle aurait peut-être besoin plus tard pour conserver la paix relative entre les deux contrées.

***
Serenos Sombrechant

 « J’y étais une fois, pour convoyer du matériel... J’connais les bruits qui y courent. Le bordel est tenu par une matronne, qui enferme ses filles, et ne les laisse pas sortir de son refuge... Mais y a un mec qui vient voir l’une des filles... On dit que c’est un Sans-Visage. Qu’il est amoureux de cette fille, ou qu’il veille sur elle, ou j’sais pas trop quoi... C’est ma seule piste ! »

Les oreilles de Serenos le chatouillèrent étrangement sous la mention d’un évident cas de séquestration et de prostitution forcée dans les bas-fonds. Malgré les nombreuses failles dans le système judiciaire de Nexus, un tel établissement aurait déjà dû  être démantelé et la matrone sous les verrous, ou même exécutée. Mais c’était certainement simplement sa hargne envers les esclavagistes qui lui murmuraient de tels propos; il n’y avait que Meisa, en fait, qui condamnait sérieusement l’esclavage. Il sentit monter en lui une bouffée de colère grimper en lui, jusqu’à ce qu’il entente la suite; le Sans-Visage. Un sans-visage amoureux. Le truc pas banal, déjà. Les Sans-Visages étaient entrainés pour oublier les attaches pour ne jamais être compromis dans leurs missions, et un parent vivant, une amourette ou n’importe quel genre de lien avec d’autres personnes étaient fortement découragés, mais il y avait toujours quelques têtes de mules, des sentimentaux, qui ne pouvait complètement se détacher de toute forme de lien, que ce soit matériel ou sentimental. Dans l’esprit du roi, la suite était claire; il allait trouver cette fille, la capturer et s’en servir pour attirer sa proie le plus près possible. Prenant soudainement conscience de ce qui venait de se former dans son esprit comme plan, le Roi leva une main et la posa contre son front, où quelques gouttes de sueur d’excitation avait commencé à naître. Mais ça ne va pas, la tête? À quoi pensais-je donc? Se remontra-t-il. Il avait certes beaucoup de défauts, mais s’en prendre à des femmes, ou du moins à des femmes sans défense, n’était pas dans ses nombreux défauts. Il marmonna quelque chose d’incompréhensible dans son langage natif qui, traduit, était une série de jurons qu’on adressait normalement à une personne n’ayant que très peu de sens moral et commun.

Donc, pour résumer dans sa tête, le bordel « La Noble Caresse » avait une petite chance de compter dans ses rangs une fille qui, par un procédé que le Roi ne parvenait à s’imaginer, a réussi à gagner l’affection d’un Sans-Visage et ce malgré son entrainement. Celui-ci passe régulièrement au bordel, rôdant dans les environs pour s’assurer que rien de fâcheux n’arrive à sa protégée. S’il parvenait à trouver cette fille et à faire venir le sans-visage à lui, il pourrait le capturer et lui faire avouer la position de ses semblables sans devoir retourner chaque coin de terre du territoire Nexusien, et une fois qu’il aura trouvé les Sans-Visages, que ferait-t-il? Les emprisonner n’aurait absolument aucune conséquence pour eux, puisqu’ils peuvent aisément s’évader des prisons les plus hautement sécurisées de ce monde. Non, la seule fin qui les attendait, après l’interrogatoire qu’il leur ferait subir, ce serait la mort, mais pas la mort libératrice; il n’avait pas beaucoup de notion dans la nécromancie, mais il s’y connaissait suffisamment pour torturer des âmes pendant toute l’éternité. Parce qu’ils étaient mauvais? Non, fit une voix dans sa tête. Il redressa soudainement celle-ci, ses sens aux aguets, à la recherche de la source. Ils ne font qu’obéir aux ordres. C’est simplement toi qui te plaît à faire souffrir les gens, des serviteurs aux maître. Tu n’as que faire des gens, Serenos. Tu es comme moi. Cette voix s’estompa aussi rapidement qu’elle était venue, laissant le Roi dans la plus grande confusion. Lorsqu’il put enfin se concentrer sur son entourage immédiat, il se rendit compte que Langley ne posait plus de questions. Laissant de côté les fantômes de son imagination, il avait de lui-même quelque chose à dire à Talim. Du coup, il s’approcha, passant à côté de Langley, avant de s’agenouiller près du misérable petit être.

« Sais-tu ce que je suis, Talim? »

Il ne s’attendait pas à une réponse immédiate, et il enchaina donc immédiatement.

«  Je suis un de ceux qui manipulent la magie aussi librement que d’autres respirent. Un sorcier. Et l’avantage d’être un sorcier, c’est que mon domaine est celui de l’esprit, de la conscience, et j’ai l’impression que tu tentes de m’envoyer sur une fausse piste, pour sauver ta peau, et gagner du temps. Mes menaces te sembleraient creuses si j’en prononçais, donc, laisse-moi te faire expérimenter ce que tu vas subir si tu nous as menti. »

Il posa alors un doigt sur le front de Talim, et une étincelle de magie éclata entre la peau du Roi de Meisa et celui de sa victime. L’espace d’un instant, tout sembla calme, jusqu’à ce que les yeux de Talim virent complètement au noir, incluant tout son globe oculaire. Ses yeux restèrent ainsi pendant dix bonne secondes, et sa respiration se fit sifflante, avant de reprendre leur normalité. Serenos venait de lui faire vivre, pendant ces dix secondes, l’expérience la plus traumatisante qu’il put penser pour cette genre de vermine; l’obscurité totale, l’impression d’être coincé et de ne pouvoir respirer qu’avec difficulté. Dix secondes, certes, mais il tenait à lui faire comprendre que ces dix secondes, il pouvait les reproduire sur une bien plus longue durée. Eternum serait une bénédiction comparativement à ce que lui infligerait Serenos; être prisonnier dans son esprit, condamné à ressentir le stress de la séquestration dans un endroit clos, sombre et étroit.

« As-tu autre chose à me dire, Talim? Et surveille ta langue; je ne suis pas Langley. Je n’hésiterais pas. »

Lorsque Serenos était dans ce genre d’état, il était préférable que personne ne se mette dans son chemin, mais Langley et de Beauregard ignoraient beaucoup de choses à son sujet, il ne serait pas étonnant qu’ils tentent de l’arrêter; la magie pouvait-elle réellement permettre une telle sauvagerie? Serenos était-il vraiment capable de faire une telle chose à un autre être vivant? Oui, certainement. Et personne, pas même une racaille, ne méritait un tel sort. S’ils ne tentaient pas de l’arrêter, il risquait de briser définitivement le jeune homme, mais s’ils intervenaient sans prendre garde à leurs gestes, qui sait comment ce Roi réagirait?

Elena Ivory

Humain(e)

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 43 lundi 09 février 2015, 01:14:20

ELENA IVORY

Même une session extraordinaire du Conseil nécessitait des moments de pause. Des moments requis pour s’entretenir avec les membres de son cabinet, discuter avec eux de ce qui avait été dit, de la nouvelle stratégie à adopter... Les réunions du Conseil étaient des moments sportifs et difficiles, où chaque participant exposait son point de vue, et venait pour défendre ses propres intérêts. C’était officiellement une manière de s’assurer que tous les intérêts soient respectés dans la mesure du possible, chacun d’entre eux s’appréciant au regard d’un intérêt supérieur, l’intérêt public, celui de la Nation. Chacun cherchait à protéger son bout de terre, tout en sachant qu’il faudrait parfois faire des concessions.

Ici, la conversation tournait autour des Sans-Visages, et tous les conseillers devaient chercher le meilleur moyen d’éviter de se retrouver incriminés là-dedans. La Reine était déterminée à user de son pouvoir et de sa notoriété pour supprimer du paysage nexusien cette confrérie sinistre qui se croyait tout permis depuis longtemps.. En un sens, il était dommage qu’il ait fallu une tentative d’assassinat sur sa personne pour qu’Elena obtienne la légitimité nécessaire auprès du Conseil de Régence pour venir à bout des Sans-Visages. Elle voulait se débarrasser de cette secte depuis des années, et elle avait enfin trouvé une occasion de le faire... Ce serait une goutte d’eau dans l’océan de la misère nexusienne, mais toujours ça de pris.

Andanariel Sombrechant ne tarda pas à lui expliquer qu’elle ignorait totalement ce qui se passait, ce qui amena Elena à se demander ce qu’elle pouvait bien faire d’elle. Son mari ne l’avait visiblement pas informé de ce qui venait de lui arriver, ce qui amenait à se poser des questions sur leur couple. Pour le coup, la Reine s’avouait vaincue sur ce sujet. De fait, elle ignorait jusqu’à ce matin que Serenos était marié... Difficile, partant de là, d’estimer leur relation, et elle soupçonnait plutôt un mariage politique, qu’un mariage reposant sur l’amour... Surtout si on prêtait attention aux rumeurs concernant les idylles lointaines entre Serenos et sa propre mère.

Elena revint au moment présent, et s’adressa donc à la Reine de Meisa.

« Votre mari s’est engagé à traquer une dangereuse confrérie d’assassins qui a tenté de mettre fin à mes jours hier, dans la nuit... La Confrérie des Sans-Visages, des assassins professionnels.
 -  Nous soupçonnons qu’ils ont été envoyés par quelqu’un cherchant à provoquer un incident diplomatique majeur entre Meisa et Nexus, et que la mort de plusieurs ressortissants meisaens survenue également hier soir est liée à cette sinistre affaire. »

Pour la Reine de Meisa, tout cela devait être assez lourd à avaler... Difficile de savoir qui en voulait autant à Nexus, mais Elena avait bien sa petite idée... Une idée qu’elle voulait encore conserver pour elle-même, faute de preuves suffisantes pour pouvoir l’exposer à quelqu’un d’autre qu’Adamante.

« Nous espérons pouvoir obtenir l’idée des commanditaires de la confrérie en les traquant... Le Roi Serenos les poursuit avec l’aide de Messire Ronald Langley, qui est chargé de ma protection depuis des années, et en qui j’ai la plus grande confiance. »



RONALD LANGLEY

« La Grande Caresse », un harem cadenassé par une matronne, un Sans-Visage venant voir en douce une fille... Ronald ne croyait pas du tout à l’hypothèse de l’amoureux en cachette. Il avait du mal à s’imaginer un Sans-Visage tomber amoureux de quelqu’un, mais... Et bien, même si Ronald n’y croyait pas, ça restait une théorie malgré tout. Un Sans-Visage restait un être humain malgré tout, quelqu’un avec un passif, un vécu, des émotions... Nul être n’était parfait en ce monde, nul être n’était totalement insensible. Il y avait des failles chez cette confrérie secrète, des ouvertures, fines, étroites, cachées... Mais elles étaient là, et il fallait les trouver... Talim leur avait donné quelque chose à manger, et Ronald était convaincu que cette fille était un début. Toute la difficulté, maintenant, était de pénétrer dans l’établissement en question.

Serenos n’en avait cependant pas encore fini avec leur source, et il était bien décidé à le faire parler. Ronald tourna la tête vers lui, et le vit poser sa main sur le front de Talim, à travers les barreaux... Et les pupilles de Talim se dilatèrent, devenant toutes noires pendant quelques secondes. Difficile de se méprendre... C’était de la magie noire, et Ronald eut un frisson, et posa sa main sur le pommeau de son épée. Le sort ne dura que quelques secondes, et, quand il se rompit, Talim tomba sur le sol, et se mit à fuir en hurlant, paniqué, filant vers le fond de la cellule.

« Putain, vous êtes tarés ?! Tirez-vous, foutez-moi la paix ! J’vous ai dit tout ce que je savais, lâchez-moi, tirez-vous ! »

Ronald serra les dents, et posa sa main sur l’épaule de Serenos, le poussant. En fait, il envoya l’homme heurter le mur, et planta son regard dans le sien, conservant sa main sur son épaule.

« Hey ! Vous allez vous calmer, mon vieux ! Nous ne sommes pas à Ashnard, le droit existe ici ! Vous vous calmez ! Si je vous revois encore user de magie noire sur un prisonnier, vous allez le sentir passer ! Elena ne nous a pas confiés une telle autorité pour abuser de notre pouvoir ! »

Ronald parlait sur un ton ferme, tandis que le sénéchal, en retrait, restait plus méfiant. Il s’était toujours méfié de Meisa, et encore plus du Roi, qu’il voyait, de loin, comme un tyran absolu... Quelque chose qui n’était très acceptable dans la philosophie des Nexusiens. Quant à Ronald, il se disait qu’Elena avait peut-être fait une erreur en confiant à Serenos le titre de Commandeur... Mais c’était encore Ronald qui était responsable de l’opération.

Inutile d’espérer obtenir quoi que ce soit de Talim maintenant, le petit numéro de magie noire de Serenos l’avait paniqué, et il était prostré dans un coin, gémissant et couinant. Si Serenos avait voulu saboter l’enquête, il n’aurait pas pu s’y prendre mieux !
DC d’Alice Korvander.

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Serenos I Aeslingr

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    Description
    Le Roi des Trois Royaumes et le personnage le plus influent d'Ayshanra. Derrière ses allures détendues et son sourire charmeur, Serenos est un homme dangereux et incontrôlable, et une constante menace pour les royaumes continentaux. Son mépris pour le protocole lui ont attiré le titre de "Roi Fou".

Re : Un temps pour guérir [Partie 3] [PV]

Réponse 44 mardi 17 février 2015, 17:22:24

« Votre mari s’est engagé à traquer une dangereuse confrérie d’assassins qui a tenté de mettre fin à mes jours hier, dans la nuit... La Confrérie des Sans-Visages, des assassins professionnels.
 -  Nous soupçonnons qu’ils ont été envoyés par quelqu’un cherchant à provoquer un incident diplomatique majeur entre Meisa et Nexus, et que la mort de plusieurs ressortissants meisaens survenue également hier soir est liée à cette sinistre affaire. »

Assez étonnamment pour ses interlocutrices, la Reine ne sembla pas plus choquée par la nouvelle que cela. Certes, la mort des Meisaens l’affligeait, car en tant que femme aimant profondément ses sujets, elle s’attristait que ceux-ci puissent avoir une fin aussi violente qu’abrupte, mais c’était le risque que ces hommes et femmes prenait à quitter le giron sécuritaire du Royaume, et c’était de plus leur propre décision. Elle savait que ce n’était pas la faute du gouvernement de Nexus, du coup, elle n’avait aucune raison de s’en prendre à Elena.

« Nous espérons pouvoir obtenir l’idée des commanditaires de la confrérie en les traquant... Le Roi Serenos les poursuit avec l’aide de Messire Ronald Langley, qui est chargé de ma protection depuis des années, et en qui j’ai la plus grande confiance.
- Et les seuls à pouvoir réellement bénéficier de votre disparition et d’un conflit entre deux contrées sont les membres de la noblesse ou les conseillers, songea Andanariel.

Les Meisaennes derrière Elena se lancèrent des regards entre elles. Visiblement, elles-mêmes commençaient à s’inquiéter sur ce qui résulterait si Nexus se déchainerait sur Meisa, et leurs visages s’assombrirent. Elles savaient que si une guerre était inévitable, alors, Meisa ne se défilerait pas, car il en allait de la fierté des Meisaens, qui avaient fui Nexus, Ashnard, Sylvandell et encore bien d’autres royaumes pour vivre en paix, loin des préjudices et des oppresseurs. Les Meisaens étaient un peuple de réprouvés, d’anciens militaires, des magiciens, des descendants d’esclaves, des familles entières qui, sans l’arrivée de Serenos et l’avènement de Meisa, seraient aujourd’hui encore oppressés par la pauvreté, la discrimination et le système des classes implacables de ces sociétés, et ils ne laisseraient jamais un pays étranger venir faire sa loi chez eux.

Il était de connaissance générale que Nexus et Ashnard étaient incontestablement les plus grandes puissances du continent, autant par leur superficie et leurs économies que pour leurs armées, qui représentaient, séparément, déjà plusieurs dizaines de fois l’effectif militaire de la plupart des petits royaumes qui parvenaient encore à résister à l’assimilation et/ou la fédération de ces grands pouvoirs. Si Nexus décidait d’entrer en guerre, il lui faudrait certainement pas plus de deux bonnes journées pour raser le pays, s’il n’y avait pas déjà une énorme tension entre le Royaume et l’Empire qui contraignait le premier à affecter ses troupes à un large nombre d’avant-postes. Il y avait également un nombre croissants de petits royaumes qui se réunissaient sous la bannière d’une superpuissance pour conserver une certaine autonomie, bien que leur souveraineté était remise entre les mains de ces mêmes superpuissances, ce qui pouvait aisément augmenter les effectifs de ces gens. En contrepartie, Serenos avait depuis des siècles développé les points forts de Meisa, à savoir sa magie et sa diversité ethnique, et Andaraniel s’était même assurée d’ouvrir les portes de Meisa aux jeunes esprits sensible à la magie ainsi qu’aux érudits.

La belle Reine resta silencieuse un moment. Il était clair que les conseillers cherchaient tous à couvrir leurs arrières, pour éviter que la Reine ne trouve quoi que ce soit les reliant aux crimes, qu’ils soient effectivement coupables de cet acte ou non, que ce soit directement ou indirectement.

« Tous les nobles ont quelque chose de semblables; ils sont très fortunés, mais seulement certains ont un trésor assez conséquent pour que leurs finances, même les plus extravagantes, passent inaperçues. Les Sans-Visages, à ce qu’on m’a dit, demandent un financement si abominable que la trésorerie d’un petit royaume ne suffirait même pas à leur accorder un service de basse qualité. Parmi vos conseillers… lesquels sont assez fortunés pour se permettre leurs services? »

Les Sans-Visages n’acceptaient aucune promesse de paiement, tout se faisait d’avance, sans la moindre garantie de succès, puisque leurs tentatives ne s’arrêteraient pas tant que leur cible ne sera pas six pieds sous terre, quitte à sacrifier tous leurs membres dans ces mêmes tentatives.

Consciente que la prochaine session du Conseil n’allait pas tarder, la Reine de Meisa s’excusa pour avoir trop parlé et ainsi importuner la Reine. De toute façon, au teint de la Reine, il était clair qu'elle n'était pas en très grande forme, elle avait besoin de se reposer au plus vite.

« J’espère qu’après vos réunions, nous aurons le temps de parler plus cordialement, Reine Elena. J’espère que mon mari mènera son combat aussi bien que vous menez le vôtre… »

Avec une révérence des plus courtoises comme il convenait de faire lorsqu'on demandait son congé, la Reine s'éloigna alors avec ses Meisaennes. Des femmes qui se tenaient devant Elena, seule resta Alessa, la Meisaenne présente depuis le début de cette histoire, qui s'était jointe à ses sœurs dans la plus grande discrétion. Elle regarda Andaraniel partir avec un brin d'inquiétude, concernée par la santé de la femme de son Roi, mais elle devait absolument parler à Elena, et donc, elle reporta son regard sur le sien.

 « Mon Roi m'a fait parvenir un message pour vous, Majesté. Apparemment, le Seigneur Langley serait bientôt capable d'appréhender un Sans-Visage. Si l'opération se passe bien, ils devraient pouvoir vous fournir des informations sur vos agresseurs très bientôt. Je n'en sais pas plus, mais mon Roi pense qu'il y a encore des Sans-Visages au Palais. S'il vous plait, Majesté, ne relâchez pas votre vigilance; l'ennemi peut être n'importe qui, même un visage amical. »

 La dernière partie de ce message s'adressait visiblement aux protectrices de la Reine, mais également à celui qui se tenait près de celle-ci, le Grand-Duc de Maizière. Il était de la nature de ces sauvageonnes de se méfier de tout le monde lorsqu'elles pressentaient un danger, mais elle ne possédait ni le droit ni l'autorité suffisante pour prononcer ses propres méfiances, mais si elle avait pu, elle lui aurait certainement fait une fouille digne des moins scrupuleux Contre-Espions. Le regard d'Alessa se reporta brièvement sur la jeune Luria, qu'elle jaugea en tentant de se faire une idée d'elle, ignorant évidemment qu'elle avait été entrainée par Langley lui-même et formée pour être capable de protéger la Reine en son absence, et donc, bien qu'elle salua sa forme physique, elle s'inquiéta à savoir si elle était réellement capable de remplir son rôle. Elle aurait bien voulu qu'Elena lui confiasse sa sécurité plutôt qu'à cette jeune personne, mais non seulement n'avait-elle aucune raison de lui faire confiance, mais se présenter avec une étrangère au Conseil aurait probablement causé d'autres distractions qui aurait fait trainé les discussions en longueur. Plutôt que de prononcer des paroles qu'elle aurait certainement regretté, elle se contenta de saluer la Reine d'un coup bref au niveau du cœur ainsi que d'une courbette, faisant deux pas à reculons pour ne pas lui tourner trop rapidement le dos, se redressa et s'éloigna.

 

***


« Hey ! Vous allez vous calmer, mon vieux ! Nous ne sommes pas à Ashnard, le droit existe ici ! Vous vous calmez ! Si je vous revois encore user de magie noire sur un prisonnier, vous allez le sentir passer ! Elena ne nous a pas confiés une telle autorité pour abuser de notre pouvoir !

- De la magie noire? Ce n’était qu’une manipultion de l’esprit, Langley, une illusion si vous préférez. Vous croyez vraiment que je m’aventurerais à souiller le peu qui reste de bon en moi pour une sous-merde comme Talim? Non, Langley, je n’userai pas des plus sombres facettes des arcanes. Pas ici, pas devant vous, et certainement pas sans nécessité. Droits ou pas, Talim est une nuisance, une faille, et un danger potentiel, mais pas assez pour que je trempe dans le domaine de l’Ennemi. Par contre, si pour m’assurer qu’il vide complètement son sac, je dois devenir l’incarnation même de sa peur, je n’hésiterai pas un seul instant. Si je laisse la moindre pierre derrière sans la retourner, qui sait ce que nous risquons? Contrairement à ce que vous semblez croire, je ne suis pas votre ennemi, Langley. Vous allez donc me relâcher. Maintenant.

Le regard de Serenos était calme, et aussi pénétrant que celui de Langley, quoi qu’il n’était pas impossible d’y déceler un certain détachement; il ne craignait pas Ronald, parce qu’il ne s’était pas attaché à lui. Son ton de voix était calme, toutefois, il était facile d’y noter une pointe de menace qui promettait des conséquences s’il n’obtempérait pas. Sans chercher à lui faire le moindre mal, il repoussa lentement celui qui le plaquait ainsi contre le mur, usant de la force nécessaire pour lui faire lâcher prise, mais sans se laisser aller à des excès de violence. Il sentait bien peser sur lui le regard des geôliers, de De Beauregard, qui partageaient le mépris et la peur visible de Langley par rapport à la magie et à ce qu’il pouvait en faire. Il ne détourna pas le regard, bravant ces yeux accusateurs avec la même prestance que devant n’importe quel obstacle.

Il savait ce que Langley percevait de ce qu’il venait de faire. La magie noire était un art à part, une application de cette force incommensurable et mystérieuse pour causer des souffrances à autrui. Mais sans être bénéfique, ce qu’il venait d’infliger à Talim n’avait, en soi, rien de maléfique. Il lui avait simplement fait comprendre ce qui lui arriverait s’il s’avisait de trahir. Et là, ce ne serait même pas lui qui s’occuperait de son châtiment; Langley serait probablement assez en colère pour lui trouver la plus petite cellule d’Eternum,

« J’ai failli à mes amis une fois, Langley, et ces dernières décennies, j’en ai souffert à un point que vous ne sauriez imaginer, enfant que vous êtes. Vous n’avez aucune idée de ce qu’ils représentaient pour moi. Elle m’a redonné mon cœur, et il m’a redonné ma fierté. Et je les ai perdus. Si j’avais été aussi rigoureux dans le passé, peut-être aurais-je pu les sauver. Peut-être qu’ils seraient encore là, et Elena aurait encore ses parents pour l’aimer, Jamiel aurait encore sa meilleure amie, Nexus aurait encore ses puissants souverains, et la paix aurait peut-être été possible. »

Dans le regard de Serenos, Langley put voir à quel point il regrettait. Ce qu’il avait fait à Talim semblait mauvais, certes, mais Serenos ne l’aurait pas brisé. Il ne l’aurait pas non plus torturé gratuitement, alors que d’autres « tyrans », comme se plaisait si bien à le considérer Ronald, lui aurait infligé les pires supplices connus. Mais tous les jours qui passaient, il se blâmait de ce qui était advenu du couple royal qui avait régné sur Nexus, car il croyait, au fond de lui-même, qu’il aurait pu y faire quelque chose, que ce soit vrai ou faux. Se détournant du Commandeur, se penchant pour agripper la garde d’Ehredna, qui lui avait glissé de la ceinture sous l’assaut abrupte de l’homme, il se réarma, mais ne démontra aucun signe d’hostilité qui aurait pu laisser présager qu’il aurait cherché à s’en prendre à Ronald.

« Je vais à la Noble Caresse. Je vous laisse le soin de gérer la méthode de vous emparer de ce sans-visage, puisque mes méthodes ne vous plaisent pas. Mes hommes et moi encercleront le périmètre, et nous nous tiendrons prêt à intervenir. Soyez prévenus, Langley, que si vous décidez d’endosser la responsabilité de cette mission, il vous faudra composer avec ma présence, ou me tuer. Comme le second est impossible - et croyez-moi, j’ai essayé- je vous conseille de vous faire une raison. »

Il posa l’espace d’un instant le pied sur la première marche de l’escalier, s’apprêtant à partir, mais il s’immobilisa un instant. Un silence lourd s’installa pour une bonne minute, alors que le Roi cherchait les mots justes qu’il voulait formuler. Ses lèvres remuèrent discrètement pendant un instant alors qu’il marmonnait une prière, avant de relâcher un long soupir, relâchant la tension de ses muscles. Sans se retourner, il ajouta :

« Vous avez raison, cependant, Commandeur. Ce pouvoir, ce droit que m’a accordé Elena… m’en servir ainsi, cela ne se reproduira plus. Mais comprenez bien que ce n’est pas par crainte de vos représailles. Mais je ne souillerai pas le nom de la Reine si je peux l’éviter. Je vous prie de m’excuser. »

 Sur ces mots, il gravit les escaliers menant vers la sortie, veillant bien à ne plus croiser personne. Après les quatre premières marches, il se volatilisa sous les yeux de Langley et De Beauregard, probablement suite à l’usage de sa magie, bien que les bruits de ses pas et la poussière déplacée par ceux-ci continuent de se faire entendre et voir pendant son ascension. Serenos ne pensait pas être dans le tort, il avait agi au meilleur de sa connaissance en s’attaquant brièvement à un esprit vulnérable qu’imprimer dans le corps et la chair de Talim les rudes traitements d’un interrogatoire tel qu’il les avait subis pendant les trois longues années où Mordred et ses hommes l’avaient retenus dans ses cachots. Difficile d’ailleurs d’oublier les coups de l’Agiel de Denna sur son corps, Agiel qu’il portait d’ailleurs à sa ceinture dans un étui en cuir après l’avoir volé à la Mord-Sith pour l’empêcher de s’en servir contre lui et l’empêcher de fuir le joug de Mordred. Encore une chose qu’il se refusait à utiliser contre un autre être vivant, mais qui avait son avantage de posséder, même seulement en guise de trophée.

 Une fois dehors, il s’informa mentalement auprès de ses hommes pour obtenir d’eux la position de la Noble Caresse. Grâce au Lien, un sortilège aussi ancien que puissant qui unissaient les Meisaens à leur Roi actif, ou à la Reine lors de son absence, il était beaucoup plus facile pour lui d’organiser une battue, des recherches ou même une guerre que cela aurait pu l’être pour des gens avec des moyens plus conventionnels. À l’image de l’internet Tekhan, il lui permettait de transmettre des pensées, des images et des événements issus de sa mémoire, mais aussi d’en recevoir, et donc, ses hommes, qui habitaient Nexus depuis des années, parvinrent sans trop de mal à lui fournir la position exacte de ce bordel. Sans demander quoi que ce soit à personne, et surtout sans se laisser percevoir, il s’envola dans les cieux et se déplaça à grande vitesse pour atteindre les environs du bordel, où il prit position. En quelques minutes, ses hommes l’avaient déjà rejoint.

« Que devons-nous faire, votre Altesse?
- Pour le moment, rien. Langley croit pouvoir gérer la situation tout seul, je vais donc le laisser agir à sa guise. Pendant ce temps, je veux que vous surveillez les environs. Mêlez-vous à la foule, évitez au maximum les contacts visuels avec les civils et vous-mêmes pour ne pas éveiller les soupçons. Je veux que vous soyez prêt à intervenir si les choses devaient mal tourner.
- Après tout ce que vous avez fait pour Nexus, ces ingrats ne vous font toujours pas confiance, mon Roi! Pourquoi vous donner la peine?
- Je ne le fais pas pour Nexus, figure-toi. Je le fais pour Elena, pour honorer une promesse. Vous comme moi savez quelle valeur nous devons accorder à une parole donnée.
- Un serment brisé envers un est un serment brisé envers tous. récitèrent les Meisaens en même temps. »

 Un sourire nostalgique naquit sur les lèvres de Serenos devant cette petite marque de patriotisme qu’était la récitation du Code. Meisa n’avait pas beaucoup de lois, comparativement aux autres royaumes, mais le Code avait une importance capitale au sein de la communauté. Les Meisaens juraient uniquement sur le Code lorsqu’ils se promettaient des choses entre eux ou à un bienfaiteur. Il passa une main affectueuse sur la tête de l’homme qui avait pris sa défense avec une affection sincère, avant de le relâcher. Revenant à ses propos, il leur expliqua que Ronald ne devra pas être retenu de quelque façon que ce soit. Il leur précisa néanmoins que leur fonction n’était pas de se mêler directement des affaires nexusiennes, que seulement Serenos pouvait agir en tant que représentant de la Reine, car déjà la présence de Meisaens formés au combat était une raison suffisante pour causer une dispute diplomatique, il ne fallait pas que son peuple ne se retrouve dans les méandres de la justice.

« Votre tâche sera de surveiller le Sans-Visage s’il venait à s’échapper, et de le Marquer si jamais il tente de se volatiliser sous une autre apparence, pour qu’on ne le perde pas. Ce sera à Langley de procéder à son arrestation.

- Et vous, Majesté?
- Que croyez-vous que je vais faire? Rester là et attendre. C’est ce que Ronald veut, après tout. Je ne lui prêterai main forte que lorsque la situation le forcera à admettre que mon aide lui est avantageuse. Allez, partez, maintenant.»

Le Roi leva la main pour congédier ses hommes, qui se redressèrent pour ensuite se disperser dans toutes les directions, certains sautant de toits en toits comme des voleurs, une vue très commune dans les bas-fonds, et d'autres se mêlèrent à la populace, voyageant au sol, dans les rues et ruelles de ces quartiers mal famés. Une fois seul, le Roi fit parvenir son message à Alessa, à travers le Lien, un message qu'elle déballerait plus tard à la Reine de Nexus avant de se diriger à son tour vers la Noble Caresse, passant pour sa part par les rues. Tout comme les Sans-Visages, Serenos possédait également quelques capacités d’altération physiques, et il décida d’en faire usage car, le temps de passer dans une ruelle déserte, il modifia son apparence pour arborer un tout autre visage. La Dame de Lorient, son alter-ego féminin. Il ne l’empruntait pas souvent, et généralement lorsqu’il passait dans les villes Ashnardiennes où son visage était non seulement connu mais surtout recherché, mais aussi lorsqu’il ne voulait pas être identifié. Sous cette apparence, il lui était non seulement plus facile de passer inaperçu, mais en plus, cette apparence lui apportait un nouvel angle d’approche des situations.

Une fois son visage et son corps modifié, il était clair pour elle qu’elle ne pouvait pas simplement entrer dans ce bordel vêtu des riches vêtements qui appartenaient au Roi de Meisa, aussi fit-elle disparaître son manteau et sa tenue de combat. Nue comme un ver, elle ne perdit pas un instant pour fermer les yeux et former dans son esprit une image. Elle se représenta elle-même habillée d’un pantalon noir et d’une belle paire de bottes de marin, avec une ceinture représentant un oiseau noir. Elle fit ensuite apparaître un soutien-gorge qui vint soutenir sa poitrine puis un chemisier blanc aux manches souples, au bout desquelles apparaissaient deux gants de cuir noir, comme il convenait à une duelliste. Pour couronner le tout, elle altéra la forme d’Ehredna pour lui donner l’apparence d’un sabre de cavalerie, au grand déplaisir de l’esprit Ashansha qui y résidait, démontré une étincelle électrique qui lui pinça le doigt. Retirant prestement sa main et la secouant pour chasser la douleur qui la prenait d’un coup, la jeune femme tenta de réconforter sa compagne de toujours.

« Aie! Mais enfin, c’est pour la bonne cause, hanmyh. Ce ne sera que temporaire, je te le promets. »

Hanmyh était un mot d’amour en Ashansha qui se traduisait simplement par « mon/ma bien-aimé(e) », et on le réservait surtout à la famille et les amis les plus proches, ou par défaut à l’être aimé. La Dame de Lorient caressa affectueusement le pommeau de son arme, malgré le caractère ronchon de celle-ci, puis fit apparaître un autre vêtement, une grande cape de voyage, pour masquer son corps. Rabattant sa capuche sur sa tête, elle sortit finalement de la ruelle, pivota sur la droite pour ensuite marcher en direction de la Noble Caresse d’un pas décidé. Pendant qu’elle marchait, elle se demandait comment elle allait aborder l’établissement; elle pouvait aussi bien se faire passer pour une cliente. Malgré ses habitudes d’accepter surtout des hommes, elle doutait que la matrone cracherait sur une bonne petite bourse d’or. Il ne lui fut pas très difficile de retrouver la Caresse; imaginez un établissement modérément correct dans un bas-quartier. Avoir des esclaves avait cet avantage; inutile de les payer, ils s’occupaient de récurer les murs et le toit de l’établissement. Comme toute bonne matrone, la directrice de cet établissement avait horreur de la saleté, et pour s’éviter les foudres de leur maîtresse. La Dame de Lorient se souvint très vite pour quelle raison elle abominait autant les esclavagistes et les propriétaires d’esclaves; tant de boulot, des conditions de vie misérables et des demandes toujours plus exigeantes tous les jours. L’esclavagisme ne datait pas d’hier, mais la condition des esclaves n’avait jamais été sérieusement prise en compte par les gouvernements, puisqu’officiellement, les esclaves sont des biens échangeables, de la marchandise, et non pas des êtres conscients et sensibles à part entière.

Mais elle n’était pas là pour ça. Elle poussa simplement la porte du bordel, et entra. Alors qu’à l’extérieur, c’était plutôt tranquille, l’intérieur était autrement moins chaleureux. Il y régnait une chaleur presque oppressante et une odeur nauséabonde. L’odeur de la décadence et de la luxure. C’était bien un bordel. Le Roi de Meisa contint son mépris pour se trouver une place. Quelques femmes, presque nues, les pieds portant des chaines à la mode Ashnardienne pour signaler qu’elles étaient bien des esclaves, se promenaient entre les clients. Elle nota la présence d’escaliers, menant probablement aux chambres, ainsi que de quelques hommes armés. Des gardes. Enfin, de gardes, ils n’avaient que le nom, puisqu’ils semblaient bien profiter de leur fonction en s’entourant de jeunes mignonnettes. La Dame de Lorient trouva simplement un siège tranquille dans un coin, et fit venir à elle une des esclaves, l’asseyant sur ses cuisses, rabattant doucement sa capuche pour dévoiler deux pupilles aux iris dorées.

« Dis-moi… connais-tu la Fille à l’Ange Gardien? »

Elle avait évidemment monté ce nom d’elle-même. La fonction d’un ange gardien étant de protéger une personne à qui il a été affecté, peut-être qu’une de ces jolies dames avait déjà entendu parler d’accidents ou de disparitions qui semblaient frapper ceux qui manquaient de respect à une des filles du bordel. La Dame de Lorient en profita pour également analyser l’endroit. Hormis les gardes, il n’y avait rien de particulièrement intéressant au niveau de la sécurité. Ces bougres n’intervenaient probablement pas si les filles se faisaient brutaliser, mais s’attaqueraient certainement aux mauvais payeurs, ce qui fit germer une idée dans sa tête au cas où Langley aurait besoin d’une diversion.


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