Le Grand Jeu

Bac à sable => One Shot => Discussion démarrée par: Mascotte le mercredi 03 octobre 2018, 23:26:02

Titre: Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le mercredi 03 octobre 2018, 23:26:02
« Alors ? demanda Lionel.
- Et bien, on s’est tous fait capturer et Nox a trouvé notre base, répondit avec un grand sourire Randal.
- Ho, oui, je vois ça, pouffa Lionel. Mais donc ?
- Boom ! Et puis, Ghost assure et puis on a trouvé un super projet secret de la Mortus qui tue ! Pour les détails, demande à Bug. »
Randal se faisait un devoir de pondre les rapports de mission les plus loufoques qui soit. Lionel, mi amusé, mi exaspéré, se tourna vers l’écureuil. Ce dernier déclara avec une mise en scène de vainqueur :
« 14 à…. 9 ! Mouhahaha ! »
Randal mima le scandalisé.
« Hé mais t’es pas sensé dire ça ! Et puis c’est pas vrai ! C’est 13 à 13 ! T’as pas arrêté de te faire capturer en chaîne !
- N’importe quoi, Monsieur je me laisse bloquer dans un couloir comme un bleu ! »
Lionel fit non de la tête, mine de dire : ils sont irrécupérables. Il se tourna cette fois vers John.
« L’opération a été un succès, répondit ce dernier, qui commençait à avoir pitié de ce pauvre chef en mal de rapport convenable. La centrale hydraulique est hors service et nous avons volé les documents. Ghost s’est bien comportée, son pouvoir est vraiment utile. Nous avons également découvert une installation secrète sous la centrale, quelque chose lié à un projet nommé Mortus. Pas plus de renseignement à ce sujet, on a dû s’extraire. Seule bobo à déclarer, une blessure légère pour Ghost, un laser qui l’a frôlée d’un peu trop près.
- Mortus… répéta Lionel, en grattant son bouc. Un nom plein de vilaines promesses.
- Je vais fouiller, assura Bug, redevenu sérieux.
- Très bien les gars. Et bien je suis ravi de vous voir tous de retour avec un bilan si positif. Je ne vous enquiquine pas plus longtemps, vous avez bien mérité un peu de repos. Surtout toi, Ghost, tu as une petite mine. Ho et je te le redis une nouvelle fois, bienvenue dans l’équipe. Survivre a sa première mission, c’est un peu l’examen d’entré ! »
Lionel récupéra sa pipe et s’éloigna. C’était un hybride bouquetin d’un âge déjà avancé. Le terrain, c’était plus pour lui, mais il avait une grande expérience. Il avait été un résistant de la première heure, il avait vu le monde changé. Lors de ces jeunes années, le Docteur Nox n’avait pas encore répandue son ombre sur la région et Metropolis avait encore des dimensions raisonnables.

John et Amanda, les seuls humains de cette cellule, partirent mettre les documents sur le bureau de Lionel. Mr Bug récupéra sa mallette dans la voiture et s’en alla en direction de son atelier. Randal fit face à Leny :
« Tu as eut le temps de t’installer ? »

En vérité, non. Leny connaissait à peine le camp de base. Elle n’était arrivé que tôt ce matin. Juste le temps d’un entretien rapide avec Lionel, puis hop, on l’avait envoyé rejoindre Hector et Randal. Ce n’était donc que maintenant qu’elle allait le découvrir.
Le camp se trouvait en pleine forêt, là où les arbres devenaient énormes et les frondaisons, si épaisses que la lumière du jour peinait à atteindre le sol. On entendait le chant d’une rivière à proximité. Les oiseaux, tout autour, l’accompagnaient de leurs trilles joyeuses. Les bâtiments étaient faits de bois, le camp en comptait une demi-douzaine, avec à peu près autant de véhicules. Il fallait s’attendre à un confort limité mais, pour autant, ce n’était pas un endroit primitif. L’atelier de Mr Bug, construit en hauteur, dans un de ces énormes arbres, l’illustrait bien. Son toit était orné d’une grosse parabole visant le ciel et des panneaux solaires étaient disposées sur les branches. Électricité, eau à peu près chaude, moyen de communication, cela faisait bien longtemps que la résistance hybride ne boudait plus la technologie, elle en avait bien trop besoin. En tout, une dizaine de personnes vivaient ici. Et maintenant, Leny en faisait partie.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le jeudi 04 octobre 2018, 21:23:19
Le trajet fut l'occasion pour Leny de dormir un peu – quittant sans trop de regret les discussions qui allaient bon train entre les autres résistants. Trouver le sommeil ne fut pas difficile, au contraire. Malgré la route accidentée et une blessure qui la lançait toujours un peu, la sieste fut réparatrice. Lorsqu'elle se réveilla, peu avant d'arriver, elle sentit que quelques forces étaient revenues. Ce n'était pas la grande forme, mais c'était suffisant pour lui donner envie de déambuler dans le campement.

– Hin-hin, répondit-elle à Randall, en faisant non de la tête.

Elle regarda tout autour d'elle. L'endroit avait beau ne pas être grand, il l’impressionnait un peu. Il y avait quelque-chose dans la façon dont les bâtiments s'intégraient à la nature qui forçait son respect. Son univers, jusqu'à peu, avait été de fer et de béton. Elle n'avait jamais rien connu de tel, et même l'utilisation du bois dans les constructions lui paraissait avoir quelque-chose de presque magique.

– Tu me ferais visiter ? Ah… en vrai, j'ai jamais vécu dans la forêt. Aujourd'hui… c'est la première fois que j'y entre, même. J'ai assez envie de monter dans tous les arbres. Je me demandais… est-ce qu'il y a des bêtes sauvages qui attaquent, la nuit ? Non, enfin, c'est une question stupide. Oublie. Par contre… est-ce qu'il y a souvent des arbres qui tombent ? Je me disais que ça pouvait être dangereux. Non, tu sais quoi. Laisse tomber celle-là aussi.

La méga affichait une mine plus détendue, maintenant qu'elle avait fait ses preuves. Elle était calme. Les félicitations de Lionel comme celles de John lui avaient réellement fait plaisir. Elles l'avaient rassurée, aussi. Elle avait craint d'échouer, à la fois dans la mission, mais également à s'intégrer. Si les membres de la cellule l'avait rejetée… elle aurait été complètement désemparée. Cette nouvelle famille, elle en avait besoin à titre personnel. C'était sur elle que se fondaient tous ses espoirs de construction future – sur elle, et sur le rejet de sa vie d'avant.

Puis il y avait Randal : le chef de sa première mission. Malgré sa bonhomie, il y avait quelque-chose de paternel dans l'attitude protectrice et bienveillante du chat. Elle aurait rejeté l'idée le matin même. Mais maintenant qu'elle se sentait moins vulnérable, ce n'était pas si désagréable.

– Dis : ça fait longtemps que t'es dans la résistance ? Comment t'es entré ?

Distraitement, elle rendait invisible l'écorce d'un arbre. Elle mit progressivement à nu toutes les couches : des plus superficielles où se lovaient larves et insectes, aux plus profondes dont les nœuds plus ou moins serrés témoignaient du passage de saison à la rudesse variable.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le jeudi 04 octobre 2018, 23:12:27
Randal éclata de rire, puis fit signe à Leny de le suivre. Il allait lui faire visiter.
« Moi, ça doit faire 3 ans que je suis là. Et comme toi, je viens de la ville. Bug, enfin Jimmy, aussi c’est un citadin, mais j’imagine que ça te surprends pas. Lui, il est dans la résistance depuis deux ans, mais ça fait à peine trois mois qu’il s’est expatrié ici. »
Le chat leva la main vers la maison de l’écureuil, perchée à plusieurs dizaines de mètres du sol. On y accédait par un escalier en colimaçon enroulé autour du tronc massif de l’arbre supportant sans mal la construction.
« Bon, puisqu’on parle de l’écureuil, c’est là-haut qu’il crèche. Il a un peu, beaucoup, réaménagé. Maintenant, c’est lui qui gère l’électricité, les com, tout ça. Alors si jamais t’as plus d’eau chaude, tu sais sur qui gueuler. »
Il continua de marcher, longeant un édifice allongé  sur lequel il ne s’attarda pas pour l’instant. Le long de celui-ci, un jardin de belle taille. Hector, l’impressionnant ours qui avait conduit Randal et Leny sur le site de la mission, était là, occupé à creuser des sillons pour une nouvelle semence. Le plantigrade ne leva même pas la tête au passage des deux hybrides. Le félin désigna une cabane quelque peu isolée par rapport au reste des bâtiments. On l’apercevait à peine derrière le rideau végétal.
« Là, c’est chez Hector. T’entre pas, sous aucun prétexte, sinon tu finiras dans la soupe du soir. »
Il ne plaisantait qu’à moitié, l’ours n’était pas la personne la plus sociable qu’on puisse imaginer. Le chat poursuivit, autant son chemin que ses explications.
« Hector est notre jardinier, notre cuisinier, notre charpentier aussi. Il a un fils, David, tu le verras presque jamais, un vrai rôdeur. C’est notre chasseur. Là, les deux maisons côte à côte, celle de gauche, c’est l’infirmerie de Miss Belle, et à droite, c’est chez Lionel. C’est aussi là-bas qu’on se rassemble pour manger et pour les réunions importantes. Et là, à côté de notre pseudo hangar, c’est chez les humains que tu connais déjà, donc. »
Randal s’immobilisa et fixa les profondeurs de la forêt.
« Par là, c’est la rivière. Tu peux t’y rendre, t’y baigner même si t’as envie. On s’en prive pas. Par contre, évite de t’éloigner seule du camp de base. Ce conseil, moi, je l’ai pas suivi et j’ai eu l’air très con après. On se perd vite dans la forêt, vraiment très vite. Hector et David, eux, ils se perdent jamais, mais ils sont nés ici. On aura toujours l’air de citadin maladroit à côté d’eux. »
Randal fixa Ghost et ajouta, d’une voix qu’il aurait pu employer pour une histoire qui fait peur :
« Et puis, oui, il y a de grosses bêtes. Elles viennent pas jusque là, on a mit des répulseurs autour du camp, sans compter notre armée de caméra pour prévenir les intrusions. Mais au-delà du périmètre… c’est la nature sauvage ! »
Il s’était un peu penché, il se redressa, souriant à présent.
« Par contre, des arbres de cette taille qui tombent, ça, y’a aucun risque. Au pire, quand on a une grosse tempête, il peut y avoir des chutes de branches, mais c’est tout. De toute manière, quand y’a une grosse tempête, et qu’on s’appelle pas Hector ou David, on reste tranquille à l’intérieur à se mater un film. On capte la télé, tu sais. Mais la télé, pour la regarder, c’est soit chez Bug, soit chez Lionel. »
Retour au bâtiment allongé qui se situait presque au centre du camp. Cette fois, Randal entra. Il alluma également la lumière, révélant un dortoir. Sol, murs, plafond, meubles, tout était en bois, tout sentait le bois. Les lits étaient faits, il y en avait cinq mais seulement deux semblaient servir puisque des affaires étaient posées à leurs pieds. Sur les murs, des affiches de film avec des hybrides mis à l’honneur.
« Là, c’est mon lit. Là, c’est celui de Suzy. Elle fait partie du groupe d’intervention, elle aurait dû participer à la mission de ce matin. Suzy, c’est notre sniper. Mais elle a morflée lors de la dernière mission. Elle est à l’infirmerie. D’aillerus, ce serait sympa d’aller lui dire bonjour. Toi, t’as le choix entre ces trois derniers lits. Au fond, c’est la salle de bain. »
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le vendredi 05 octobre 2018, 20:15:17
– La télé… va pas me manquer. Pas. Du. Tout. – déclara la méga, que la question concernait visiblement particulièrement.

Leny fit peu d'autres commentaires sur le camp. Elle ne savait pas quoi penser de tous les dangers qui rôdaient dans la forêt, et elle les savaient nourris aussi bien par son imaginaire que par la propagande de la Tech13 qui en véhiculait souvent une mauvaise image. Mais son attitude montrait que la présentation de Randal tendait à lui plaire. Outre ses yeux, qui n'avaient de toute façon jamais cessés de briller, son visage était bien plus expressif qu'au matin. Quant au dortoir, il était plus accueillant qu'elle ne l'avait imaginé. Au même endroit, le chat lui indiqua l'emplacement de la salle de bain. Une pièce qui tombait à pic.

– Je devrais y passer. Je fais peur à tout le monde, suggéra-t-elle avec un discret sourire.

Le sang du garde qu'elle avait tué avait noirci en séchant sur sa fourrure et ses vêtements. Le liquide était devenu collant, aussi désagréable à porter qu'à sentir. Mais en même temps, elle supposait qu'il lui donnait un air de guerrier qu'elle ne rejetait pas. Elle pensa que tout compte fait, c'était peut-être une bonne idée, pour rencontrer ce membre de la résistance en convalescence.

– Mh, finalement, j'irai après. Vais pas te faire attendre.

Elle n'avait pas beaucoup d'affaires personnelles, seulement quelques changes. Ce qu'elle avait amené avec elle au camp avait été déposé, peut-être par Lionel lui-même, dans un coin de la pièce. Elle se chargerait plus tard de faire le tri. Elle croisa les bras, soudain très sérieuse et très droite. Comme Randal l'avait sans doute deviné bien avant la mission, elle trouvait une satisfaction à jouer au soldat aguerri au moindre sujet grave.

– Qu'est-ce qui s'est passé avec Suzy ? On devrait la voir, oui.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le vendredi 05 octobre 2018, 21:30:04
« Ho, Suzy, rien d’extraordinaire. Elle s’est fait tirer dessus. Il faut admettre que c’était un joli tir de la part de ce garde. Il a fait mouche à près de 50 mètre, fusil à la hanche, même pas épaulé. Faut se méfier, y’en a qui sont doués. »
Randal sortit, puis il prit avec Leny la direction de l’infirmerie. Chemin faisant, il dit :
« Ho, j’oubliais… Dans l’espèce de hangar, on a notre armurerie. T’ira te prendre quelque chose et si tu sais pas t’en servir, faudra apprendre. Un opinel, souvent, ça suffira pas, surtout pas si tu te retrouves face à  des types ou des machines capables de te voir. Moi, je te suggère couteau de combat, pour le contact, pistolet, quand ça devient la merde, et grenades, parce que mine de rien, avec ton invisibilité, je pense que tu vas t’éclater à les déposer direct sous les pieds de tes cibles. Voir dans leur slip, qui sait. Faudra tenter. »
Randal, sérieux deux minutes de suite ? Fallait pas trop en demander ! Voilà les deux hybrides dans l’infirmerie. L’intérieur ressemblait, par son omniprésence du bois, au dortoir, mais l’odeur de désinfectant ne trompait pas. La dénommée Miss Belle, assise à une table, détacha son regard d’une sorte de chapelet fait de petits ossements. Avec un nom comme ça, on aurait pu s’attendre à une personne plus avenante. Mais il n’en était rien. Miss Belle était une hybride corneille plutôt sinistre. Pelage noir aux reflets bleu métallique, bec imposant, regard pénétrant, elle était vêtue d’une robe toute simple en grosse toile, mais taillée pour laisser passer ses ailes qui, repliées, lui faisaient comme une cape. La présence de son bizarre chapelet pouvait presque la faire passer pour une chaman. Elle, elle venait de la forêt, c’était certain.
« Ha, Leny… Toute pleine de sang… » fit-elle de sa voix tout de même aimable.
Où elle avait su que Ghost était une fille, ou elle l’avait devinée dieu sait comment. Elle contourna la table et poursuivit :
« Une chance que ce ne soit pas le tien. »
San prévenir, elle saisit le museau du lémurien, le tourna légèrement sur la gauche, puis sur la droite, tout en observant la brûlure. Elle lâcha ensuite Ghost, et ne fit aucun commentaire.
« Suzy est impatiente de vous voir », conclut-elle à l’intention des deux nouveaux venus.
Randal conduisit Leny dans la pièce d’à côté, avant de lui glisser à l’oreille, sourire aux babines :
« Tu aurais vu ta tête ! Et ouais, elle fait flipper notre infermière. »

Les voyant entrer, Suzy se redressa dans son lit. C’était une hybride renarde d’une vingtaine d’années. Pelage roux et blanc, yeux ambrés, elle était… très belle. Torse nu, un bandage lui ceignait la poitrine. Elle ne semblait pas souffrir.
« Alors ? Comment ? demanda Randal.
- Demain, je peux tout retirer. Si les produits de miss Belle me choutaient pas comme ça, j’aurai déjà pu débuter les séances de remise en condition.
- C’est pas un mal que tu dormes. Recharge bien tes batteries, ton sniper me rassure. »
Randal tapa l’épaule de Ghost.
« Voici Leny, alias Ghost. Une méga qui envoie du lourd. Avec elle, notre potentiel d’infiltration vient de doubler. »
Suzy tendit la main.
« Bienvenue dans l’équipe, Ghost. Je suis dégoutée, j’ai ratée ta première. Mais je serai là pour la suivante. »
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le samedi 06 octobre 2018, 19:17:34
Leny jeta un discret regard en arrière alors qu'ils s'éloignaient de l'infirmière. Sûr qu'elle n'était pas vraiment rassurante. Elle ne l'avait jamais rencontrée, et elle semblait pourtant déjà en savoir beaucoup sur elle. C'était probablement la combinaison d'une bonne information et qu'un œil habitué à repérer les blessures… mais ça n'en semblait pas moins surnaturel. Surtout avec les grigris que la corneille transportait. À ce moment, la méga se dit que malgré leur cause commune, il y avait peut-être une vraie frontière culturelle entre les originaires de la forêt, et les anciens citadins…

Troublée, elle mit une bonne seconde à se rendre compte que Suzy lui tendait la main. Trop longtemps pour penser à autre chose qu'à la serrer. Tant pis.

– Salut. Oui. Je peux rendre des choses invisibles. Bug appelle ça invisibilité de contact. Mais en fait je peux un peu le faire à distance aussi.

L'hybride illustra son propos en faisant disparaître son avant-bras, celui même qui tenait la main de la renarde. Mais elle s'arrêta là dans sa démonstration : la fatigue lui avait un peu passé le goût de faire le fanfaron avec son pouvoir – au moins pour l'instant.

– Cool. J'ai hâte de travailler avec toi alors.

Elle se sentait nettement plus à l'aise avec Suzy qu'avec Miss Bell, c'était certain. De plus, avoir le chat comme intermédiaire créait rapidement une familiarité.

– J'ai jamais tiré au sniper. Mais si ça se trouve, ça va arriver… Randal veut que je devienne une experte du couteau, du pistolet, des grenades…

Le ton était léger. L'habileté du résistant en intervention ne permettait pas de douter de ses conseils. Même si pour le moment, l'aspect « bardé d'armes » était un peu étrange pour Leny, qui se voyait difficilement équipée aussi lourdement que lui. Elle se tourna d'ailleurs vers le félin.

– Peut-être que je devrais demander une arbalète à Hector ? C'est moins facile à repérer au bruit.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le samedi 06 octobre 2018, 22:52:07
« Quoi ? Ha, ha non ! Pas ça ! » s’exclama Randal, comme horrifié.
Il recula, les mains positionnées pour se protéger d’un coup imaginaire ou d’une terrible menace.
« Pas une arbalète ! Mais qu’est-ce que vous avez tous avec vos arbalètes ! Pourquoi pas un arc tant qu’on y est ! Et des javelots ! Un lance-pierre aussi, hein ça pourrait être pas mal un lance-pierre ! Mais moins que la pierre toute seule, c’est plus authentique, c’est vrai ! »
Suzy rit sous cape. Bien sûr, le chat plaisantait et il retrouva bientôt le peu de sérieux dont il était capable.
« Ma petite Leny, va falloir que je te montre le merveilleux accessoire qu’on appel un silencieux. Tu verras, c’est magique.
- J’ai eut entre les mains des arbalètes redoutables, fit remarquer, espiègle, Suzy.
- Tu parles de l’arbalète à visée laser avec les carreaux explosifs ? fit le chat, en fausse aparté. Mais tu sais que ces sauvages d’Hector et de Leny te brûleraient vive pour blasphémer sur déesse arbalète en bois naturel fait selon la tradition millénaire ? »
De nouveau, la renarde rit. Randal reposa sa main sur l’épaule de Ghost.
« Bon, on a fait le tour. Je te laisse finir de prendre tes marques à ton rythme. »
Sur ce, il fit un signe à Suzy et tourna les talons.

* * * Deux jours plus tard * * *

« Jimmy… Jimmy… » fit la voix de Randal dans le dos de Bug.
Ce dernier, concentré sur ses écrans, ne détourna pas les yeux et continua de pianoter. Tout juste eut-il un « J’arrive » absent. La dernière fois qu’il avait dit cela, ça remontait à plusieurs heures. Le silence se fit, uniquement dilué par les ventilateurs des unités centrales en plein travail de décryptage. Soudain, l’écureuil sentit quelque chose lui toucher le haut du crâne.
« Randal, c’est bon, je vais décrocher, faut juste que… » commença-t-il, un peu agacé, tout en portant la main à cette chose pour la retirer.
Et la chose s’avéra froide, gluante. Jimmy, surpris, poussa un cri et fit un brusque écart, tout en agitant la main pour chasser la chose affreuse non identifiée.
« Hé mais c’est quoi ce truc ! »
Randal éclata de rire. Il tenait une canne à pèche. Au bout du fil pendait une grosse larve, la fameuse chose froide et gluante.
« Non mais j’y crois pas ! Randal, t’es un vrai gamin ! »
Il n’était pas vraiment énervé. Lui et le chat se taquinaient souvent.
« Bon, alors, tu fais une pause ? Je veille à ta bonne santé, mon bon ami.
- Mais je t’ai dit que je devais juste finir un truc !
- Je te préviens, Jimmy, si tu sors pas de ton atelier dans la minute, la prochaine larve que tu vas trouver, elle sera dans ton lit !
- Alors si tu fais ça, matou de malheur, y’aura des représailles que tu peux même pas imaginer ! »
En guise de réponse, Randal s’en alla en pouffant. L’écureuil hésita, jeta un regard à ses écrans, il en avait pas moins de quatre, il acheva la commande qu’il était en train de taper, pressa entrer puis récupéra sa casquette et sortit. Randal avait raison, il avait un peu le cerveau qui lui coulait par les oreilles à force de réfléchir au projet Mortus. Il lui fallait une pause. Mais quoi ? Là, devant la porte de son atelier, arraché à son univers virtuel, il avait l’air un peu pommé.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le dimanche 07 octobre 2018, 12:33:34
– Salut Jimmy.

La méga se tenait juste à côté de l'écureuil. Elle n'était pas arrivée camouflée, mais elle n'était pas non-plus arrivée par l'escalier. Depuis deux jours, elle avait passé l'essentiel de son temps libre perchée dans les branches des arbres du camp. Quand elle était en ville, elle avait essentiellement eu accès à des salles d'escalade, mais ça n'était pas la même chose. Elle se figurait avoir déjà une connexion avec les cimes. Ses pieds de primate lui permettaient d'évoluer verticalement avec la même aisance qu'horizontalement, sinon davantage.

– Tu vas bien ?

Elle le fixait avec ses grands yeux oranges, sans blanc. Comme si elle attendait une réponse particulière. Mais il n'en était rien. Sa cicatrice avait bien guérit, mais était toujours visible. Une découpe de peau rose, sur trois ou quatre centimètres, qui avait pris la forme d'une flèche pointant vers le haut. Elle était habillée d'un kimono noir – un vêtement simple aussi bien adapté à la pratique des arts martiaux qu'à une journée chaude. La tenue lui donnait un air encore plus androgyne. En fait, elle avait participé aux séances de remise en forme de Suzy. Rien de trop violent sportivement, évidemment, mais ça avait été l'occasion de se connaître un peu.

– Moi j'attendais ici que tu aies terminé.

Leny marqua une pause. Elle ne précisa pas depuis combien de temps elle attendait. Considérant la durée des périodes pendant laquelle de Bug était collé à ses écrans, ça pouvait tout aussi bien être des heures. Sa longue queue ondulait, très lentement. On la sentait légèrement mal à l'aise.

– C'est un peu bizarre comme question, mais eh. Mh. Je me demandais si t'avais fait des recherches sur moi ? Si tu trouves un truc – enfin – t'façon, Lionel est au courant, d'accord ?

Elle croisa les bras. Pendant ces derniers jours, elle n'avait pas trop osé adresser la parole à l'écureuil. C'était le seul vraisemblablement capable de tracer son parcours depuis le camp. La possibilité que ce soit le cas était rapidement devenu une certitude, et la certitude l'avait bloquée. Jusqu'à maintenant.

– T'façon je vais le dire aux autres. Bientôt.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le dimanche 07 octobre 2018, 15:50:37
Bug, de nature nerveuse, sursauta lorsque Leny l’aborda. Il observa cette dernière, se demandant un instant qu’elle attitude aborder. Sa mise du jour était dans le même ton que celle qu’il avait lors de la mission à la centrale hydraulique. Pantalon et veste en jean, t-shirt, baskets et sa casquette jaune portée à l’envers. On sentait qu’il n’accordait pas grande importance à son apparence, la casquette étant en fin de compte la seule chose qui témoignait d’une volonté de s’inscrire dans un certain style. Ses yeux bleus perdirent leur expression absente, il revenait au moment présent.
« Ho, moi, ça va toujours, Leny. Surtout quand j’ai des défis à ma mesure. »
Il sourit, fier de lui, fier de son rôle, avant d’être troublé par les propos de Ghost. Cela ne dura guère, et il ne fit pas de mystère.
« Ho, ne m’en veut pas, je suis curieux et je me suis très vite dit que ton visage me disait quelque chose. Tu ressembles à ton père. Tu savais qu’il n’a toujours pas rendu public ta disparition et qu’il a engagé un détective privé pour te retrouver ? »
Il marqua une petite pause, se détourna et fixa le panorama.
« Tu risques rien à en parler aux autres. Ho, si, Randal et Suzy vont probablement un peu te chambrer. Tu vas devenir notre princesse des médiats, ou un truc du genre, mais sinon, ça changera rien. Les hybrides de la haute sont rares dans la résistance, rares mais pas inexistants. »
Il refit face à Ghost, un sourire en coin sur les babines, les yeux pétillants.
« Tu te souviens du piratage de télé H, il y a deux ans ? Ben, c’était moi. Mon premier gros coup ! »
Télé H, ou Télé Hybride, dépendait du secteur de Diane Valentine et était dirigée par le père de Leny. C’était un des outils de propagande majeur de la Tech-13. Sous ses dehors bienveillants et tolérants, mettant à l’affiche des hybrides de tout horizon dans une myriade de programmes, certains vraiment réussis, la chaîne en profitait pour glisser les messages de soumission de la corporation. Le piratage de Bug avait consisté à diffuser sur la chaîne un écran où on pouvait y lire "Nous sommes les toutous de la Tech-13 !". L’écran était resté en place 17 minutes et 8 secondes, durant la période de forte influence.
« Puisque je sais d’où tu viens, j’imagine que c’est normal que je te dise d’où je viens, moi. C’est pas aussi glorieux. Mon père est mécano dans le quartier est de Metropolis, mais j’aimais bien traîner dans le quartier sud. C’est là-bas que j’ai croisé Randal. Au début, j’aidais la résistance à distance, toujours pépère dans l’appartement familial. Mais ils ont fini par m’identifier, ça devenait trop dangereux. Au fait, j’y pense… »
Il claqua des doigts et fit signe à Leny de le suivre dans son atelier. Elle put constater que c’était le royaume de l’informatique. Des  ordinateurs, des écrans et des engins partout. Sur un plan de travail, à côté de la mallette que l’écureuil avait en mission, se trouvait un drône de Tech-13 à demi démonté. Des rayonnages croulaient sous le poids de pièces détachées à visée robotique. Bug s’approcha d’un clavier et entra dans un programme à coup de lignes de commandes. Leny avait beau ne pas y comprendre grand-chose, elle devina néanmoins qu’il s’apprêtait à interroger la LMD. Vint le moment fatidique où le programme demanda le nom à rechercher. Bug entra "Ghost" et cette fois, une fiche apparût. Le lémurien y vit sa photo, probablement prise de ses papiers d’identité, une description vague de son pouvoir et ses faits d’armes, ainsi que la liste des terroristes associés. On l’avait cataloguée comme appartenant à la cellule Randal. Tout en bas, une somme : 50 000 crédits.
« La Tech-13 est parvenue à t’identifier, toi-aussi. Les caméras ont pris ton image thermique et tu as laissé des empruntes digitales, c’était assez. Le Docteur Nox a fait recenser tous les méga connus de Metropolis. Il doit suffire d’un simple clique pour permuter la fiche du recensement dans la LMD. Pour autant, regarde, ton vrai nom n’est pas renseigné, alors que la Tech-13 le connait forcément. Et regarde là-haut, la fiche est codée S, S pour secret. Il faut un niveau d’accréditation élevé pour voir ce genre de fiche. Uniquement l’élite des Mercenaries et la garde rapprochée de Nox. Ça doit vraiment les faire chier que tu nous ai rejoint. »
Il éteignit et se tourna vers Leny.
« Bon, faut pas que je traîne ici, sinon je vais trouver des larves dans mon lit. »
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le dimanche 07 octobre 2018, 22:52:09
Le visage de Leny s'illumina lorsque l'écureuil évoqua son coup d'éclat.

– Woah, sans rire ? Il était tellement en colère… et alors c'était toi… Hey, mais ça a bien duré DES HEURES !

Le souvenir était un peu déformé. La méga n'avait connu l'événement que par le prisme de son père. À l'époque, elle était encore assez proche de lui. Du moins aussi proche qu'il lui laissait la possibilité de l'être – car c'était un homme très occupé. Ce jour là, il n'était pas rentré à la maison. Mais à dessein, l'incident avait rapidement cessé d'être évoqué.

– On pourrait refaire quelque-chose à TVH, un de ces jours. Du coup, je connais bien. J'ai été pas mal de fois.

Encore un poids qui s'envolait – qu'elle ait été éduquée par ce qui était, par extension, un cadre de Tech13 n'avait pas l'air d'inquiéter Bug du tout. Elle n'aurait pas dû s'en réjouir, mais être intégrée à la liste des méga dangereux lui faisait aussi plaisir, en un sens. Les autres en penseraient ce qu'ils voulaient, c'était comme un accomplissement. Ça voulait aussi dire pas de retour en arrière possible, et ça ne faisait que la renforcer dans ses convictions.

– Ah, c'est qu'ils perdent pas de temps… et 50 000, mh, c'est beaucoup d'argent pas vrai ? Randal et toi êtes aussi dans la base, on m'a dit. À combien ?

Tout en parlant, elle regardait la carcasse du drone avec intérêt. Elle l'examina rapidement avec sa méthode habituelle : tranche par tranche. Malheureusement, tout ces amas de câbles ne lui disaient rien. Elle savait se servir d'un ordinateur aussi bien que n'importe qui, mais n'avait aucun savoir particulier en mécanique.

– C'est un modèle qui peut me voir celui-là ? Tu devrais m'apprendre à les reconnaître.

Elle sourit et attrapa l'informaticien par la main. Plutôt à l'aise, elle le tira dehors.

– Enfin, c'est pour plus tard ! Randal est parti pêcher. Se baigner à côté, ça serait pas sympa. Mais en même temps il fait vraiment beau.

L'hybride avait déjà été à la rivière une fois, le jour précédent. Elle en connaissait le chemin. Elle n'y avait pas encore mis le pied cependant. Ainsi, elle fit traverser le camp à l'écureuil. De toute façon le chat voulait qu'il prenne une pause. Il ne devait pas avoir mieux à faire. Elle marchait vite, visiblement excitée par l'idée. Ils arrivèrent devant le cours d'eau en un rien de temps. Randal ne devait pas être loin, mais elle ne le chercha pas des yeux.

Le ruisseau était glougloutant, pur – pour elle qui n'avait connu que la platitude et le chlore des piscines artificielles, tout ce qu'il y avait de plus accueillant. Elle y trempa un orteil enthousiaste.

– Aah, c'est froid quand même ! s'exclama-t-elle, sincèrement surprise.

Les bassins, eux étaient chauffés… et même si la température extérieure était estivale, une eau rapide à chaleur ambiante était sans commune mesure. Tout n'était cependant qu'une affaire de courage, et le lémurien n'en manquait pas. D'abord, elle se rendit invisible. Puis son kimono réapparut au milieu de rien, jeté sur le côté. Enfin, l'eau se déforma, signe qu'un corps y pénétrait.

Deux bons mètres plus tard, Leny fit apparaître sa tête, qui semblait flotter, et se retourna vers Jimmy :

– Ton tour !
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le lundi 08 octobre 2018, 09:44:49
« Heu, oui, on est dans la base, répondit Bug. Pas la même, mais notre tête est mise à prix. Et d’ailleurs, depuis la dernière fois, on a eut droit à une sacrée revalorisation de notre prime. Randal est à 60 000 crédits, moi, à 50 000, comme toi. Suzy, à 25 000. John et Amanda, à 25 000 aussi. Additionne tout ça et on est la cellule la plus primées. J’ose pas imaginer le nombre de types qui cherchent à localiser notre camp ou à nous intercepter en opération. Du coup, franchement, le détective privé de ton père, c’est qu’une goutte d’eau de plus dans l’océan. Bon, peut-être pas, mais presque. J’ai pas encore recherché qui il était précisément. Mortus mobilise l’essentiel de mon temps. »
Lorsque Leny s’intéressa au drone, il fut un peu ennuyé.
« Oui, lui, il peut te voir. Je pourrai t’apprendre, mais je ne sais pas si ça servira à grand-chose. Quasiment tous les drônes peuvent maintenant te voir. Les vieux modèles sont obsolètes, la Tech-13 les retirent. Je te conseille vraiment de te méfier de tous les drônes. »

Sitôt dehors, il fut assez amusant de constater que Jimmy semblait moins sûr de lui. La nature, c’était pas son truc et même la rivière, pourtant toujours dans le périmètre du camp, lui semblait loin. Il jetait des regards suspicieux aux arbres si haut, si imposants. Aujourd’hui, le soleil brillait, mais sous les frondaisons, il se limitait à des rayons épars. Cela suffisait toutefois pour donner au décor Silvestre de belles couleurs, une sorte de pénombre chaleureuse. Autre chose semblait aussi un peu l’intimider. Privé de son Domène d’expertise, il semblait se souvenir qu’il se trouvait seul en compagnie d’une fille. Au bord de la rivière, il chercha des yeux Randal, son point d’encrage, mais il devait pécher plus loin, il n’était pas visible. Alors, ce fut Ghost qu’il regarda, les mains dans les poches, l’air mi perdu, mi pensif. Elle avait décidément un sacré pouvoir. Mais c’était pas du jeu, elle pouvait se cacher, pas lui !
« Heu, oui, à moi. »
Il finit par se remuer. Il s’approcha d’une grosse racine, s’assit dessus, se déchaussa, se releva, ôta sa casquette, sa veste, son t-shirt. Contrairement à Randal, Suzy, John ou Amanda, il n’avait pas une allure athlétique. Pour autant, il avait beau être le moins sportif, il n’échappait pas aux séances d’entrainement du chat. Quelques peu rondouillard au moment de son aménagement dans la forêt, il avait aujourd’hui perdu quelques kilos et sa gestuelle avait gagné en vivacité. Son pelage gris argent plutôt abondant, sa queue en panache, sa frimousse aimable, l’azur de ses prunelles d’intello, il était pas mal dans son genre. Il retira son pantalon, le déposa sur le reste de ses affaires, et s’approcha de la rivière, vêtu plus que de son caleçon blanc.
« Je te préviens, je suis pas un as de la nage ! »
Mais il se débrouillait bien quand même. Il le disait juste histoire de dire quelque chose. Il entra dans l’eau sans trop de simagrée, ce n’était pas un frileux. Une fois immergé jusqu’au cou, il sembla un rien plus tranquille.
« Il est quand même sacrément cool ton pouvoir ! Je suis content que tu sois là. »
Il était sincère, il trouvait Leny très cool. Et puis, ça faisait un nouveau visage, un visage de son âge. Il commença à faire quelques traversées de rivière. Son style de nage, c’était la brasse. Il se demandait quoi dire, quoi faire ensuite. Avec Randal, ça venait tout seul, mais c’était un pote. Leny… ça pouvait aussi devenir un pote, mais c’était aussi… une fille. Et c’était compliqué avec les filles, surtout avec une fille cool.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le lundi 08 octobre 2018, 20:49:59
Dans l'eau, Leny n'était pas aussi à l'aise que dans les branches. Enfin, elle n'avait pas peur non-plus de se mouiller. C'était plutôt qu'elle n'était pas encore habituée aux courants, même légers. En revanche, sa technique était impeccable (même si Jimmy n'en avait aucune preuve visuelle à cet instant) : elle avait appris avec un professeur, c'était sûr.

– C'est cool, mais bon c'est presque rien à côté de ton super pouvoir à toi ! Même Randal dit que sans toi, rien pourrait se faire… Tu devrais essayer de m'apprendre des trucs. Pas reconnaître les drones, j'ai pigé que ça servait à rien, mais par exemple des trucs de terrain. Je peux voir à l'intérieur des machines alors… ça pourrait être utile… p'têtre. Enfin tu dois pas avoir trop le temps.

Elle s'était mise à flotter sur le dos, assez lentement. La tête à l'horizontal, sa queue comme gouvernail, elle regardait la lumière filtrer à travers le feuillage dense. Suite à la réponse de Bug, elle laissa quelques secondes de silence, contemplative.

– Quand j'ai décidé d'entrer dans la résistance, je voulais juste me venger… Puis, j'ai tué un humain pendant la mission, c'était bien, et aussi je vous ai rencontrés. Maintenant c'est un peu différent. Je sais c'est bête, ça fait juste quelques jours mais. J'sais pas ! C'est vraiment diffé… hey !

L'hybride s'interrompit et se retourna dans l'eau, causant de bruyants remous. Elle venait d'être heurtée par un poisson. Comme presque tout son corps était invisible, ça n'était pas non-plus surprenant. Elle plongea toutefois, à la recherche du coupable. Elle ne le trouva pas, mais elle se mit en tête de pêcher quelque-chose. Au bout de plusieurs minutes de tentatives infructueuses, son pied se referma in-extremis sur la nageoire caudale d'une petite proie aux écailles roses.

– Yeay ! s'exclama-t-elle, ravie de sa prise.

Elle saisit le poisson ainsi immobilisé entre ses mains et redevint entièrement visible. Elle exhiba son trophée tout frétillant devant l'écureuil.

– Bon, il est mini, mais il est joli.

Ce qui était sûr, c'est qu'il n'y avait aucun intérêt à le manger. Alors autant le relâcher. Le visage toujours aussi énigmatique, Leny eut une idée.

Sans prévenir autrement que par un rire, elle plongea alors sur Jimmy. L'objectif de l'attaque : introduire le poisson dans son caleçon. L'objectif secondaire, si le premier se révélait être un échec : s'agripper à la grande queue en panache et s'en servir de flotteur. Au contraire de lui, elle n'était pas timide. Elle était également tout à fait consciente que l'informaticien était un peu embarrassé. Il le serait sans doute encore davantage lorsque les contacts engendrés par l'assaut improvisé lui révéleraient que l'hybride avait, elle, retiré son seul vêtement au moment d'entrer dans l'eau.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le lundi 08 octobre 2018, 23:36:09
« Ho, si, c’est une bonne idée que je t’apprenne des trucs. J’en ai appris aux autres, tous comme les autres m’en ont appris. Lionel et Randal disent qu’on doit tous être un minimum polyvalent, parce qu’on n’est jamais à l’abri d’un imprévu. »
De la part de Randal, Jimmy avait appris à tirer au pistolet de manière à peu près convenable. Le chat lui avait également imposé des exercices sportifs qui commençaient à payer. De la part d’Amanda, l’écureuil avait appris à contrôler son stress. Sur ce point, il avait fait d’énorme progrès. Avant, quand ça se mettait à tirer, il se planquait dans un coin et priait pour que ça se termine bien. En échange, lui, il avait formé à peu près tout le monde à des techniques de piratage basique, ainsi qu’à bien identifier les points faibles des unités robotiques de la Tech-13 qu’il avait pu étudier.
« Faudra que je réfléchisse aux possibilités qu’offre ton pouvoir dans mon domaine. Je suis sûr que ça pourrait pas mal te faciliter la vie dans deux trois truc. Sans compter qu’avec toi, je pourrai examiner des engins sans même avoir besoin de les démonter. »
Voilà de nouveau l’écureuil perdu dans ses pensées. Lorsqu’il cogitait intensément, il avait vite la tête dans les nuages. Ce qui la lui ramena sur terre, ce fut bien sûr l’incident du poisson. Intrigué, il observa Leny exhiber sa prise. Non, en fait, il observa surtout Leny elle-même, notamment son si étrange regard orange.
« Pas mal ! Tain, moi, jamais j’attraperai un… hé ! Mais ! »
Vint l’assaut ! Bug, prit de court, eut tôt fait de se retrouver avec le poisson dans le caleçon. La suite fut assez comique. N’ayant pas tout à fait pied là où il se trouvait, assaillit par le poisson piégé qui gigotait, réalisant aussi confusément que Ghost n’avait rien sur elle, il joua de maladresse en poussant de drôle de cris et en gesticulant dans tous les sens.
« Ha ça ! Ha ça ! Ha ça va se payer, ça ! » parvint-il à articuler tout en revenant vers la berge.
Il resta un instant agenouillé, les jambes dans l’eau, une main dans l’herbe, son autre main fouillant son caleçon rabattu sur ses genoux. C’était un caleçon d’hybride, avec une ouverture à l’arrière pour laisser passer la queue. Sa queue était maintenant à demi-sortie du sous-vêtement, accroissant le ridicule de sa position.
« Bon, il est où ? Plus là, apparemment. »
Il se releva, commença à remettre son caleçon, puis poussa un nouveau cri avant de cette fois retirer purement et simplement son sous-vêtement afin de l’examiner sérieusement.
« Ha, dégueu, je crois que je l’ai écrabouillé. »
Il se tourna vers Leny, laissa tomber le caleçon dans l’herbe, puis demeura immobile. À cet instant précis, il fut possible de se demander s’il allait être vexé, ou si sa timidité allait prendre le dessus car le voilà nu à son tour. Nu en présence d’une fille qui lui faisait de l’effet. Mais Bug n’était pas tant timide que ça. Par contre, il savait cacher son jeu, le sournois. Il fit planer le doute quelques secondes, juste de quoi s’approcher de Leny sans qu’elle redevienne invisible, puis, poussant un cri de guerre, il lui sauta dessus avec l’objectif sans équivoque de la couler.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le mardi 09 octobre 2018, 02:15:34
– Aw, non ! Pauvre poisson ! s'amusa Leny, sans empathie manifeste pour l'écureuil.

Elle le regarda se déshabiller avec un sourire un peu étrange. Il hésita moins qu'elle l'aurait pensé à se montrer nu, et hors de l'eau en plus ! Si elle n'avait pas été couverte de fourrure, elle aurait peut-être rougi. Légèrement. Pour ne rien laisser paraître, elle s'autorisa un petit sifflement, et à commenter sur un ton badin :

–  Eh, pas mal.

Mais Jimmy ne lui laissa pas le temps de profiter de la vue, car une lutte sans merci s'engagea. Avec la surprise, la méga eut vite la tête sous l'eau. Elle mit quelques secondes à réagir, et enfin se défendit avec vigueur. Elle était vive, pugnace, et puis elle avait quatre membres pour se battre. Elle mettait de côté toute technique, mais elle cherchait le contact, la friction, un peu plus qu'il n'aurait été nécessaire. Ça ne l'empêcha pas de renverser la situation en un rien de temps.

Riant, elle se retrouva finalement sur le dos de l'écureuil, un bras passé autour de son cou. L’essoufflement des deux parties entraîna un moment de stabilité.

– Oh, faut que je t'avoue. C'est moi qui t'ai touché la queue, la première fois, quand tout le monde était invisible. Désooo ! Elle était toute belle, toute droite. J'étais jalouse en fait.

Elle agita sa propre queue, soulevant quelques gerbes d'eau. Enfin elle se dit qu'elle était à ce moment dans la position parfaite pour faire plus ample connaissance avec le membre caudal de l'écureuil. Flottant, c'était une cible facile. L'occasion d'un nouveau corps à corps. Leny était aussi assez rusée, et plus la rixe se prolongeait, et moins elle hésitait à toucher Jimmy, et plus elle la faisait ressembler à une étreinte.

Nouvelle période de stabilité, les hybrides cette fois face à face – leurs regards se croisèrent, s'attardèrent. Une seconde de silence, rompue par Leny :

– Ah, je t'ai pas remercié pour le sauvetage. Alors merci, on s'en serait pas sortis sans toi. Tu es génial.

La phrase semblait légèrement déplacée dans le contexte, il était inutile d'être expert en sentiments pour de se rendre compte que c'était juste un prétexte. Un prétexte pour se serrer contre l'écureuil, cette fois sans grief, tout doucement. Entre-eux, il n'y avait plus beaucoup d'eau… voire plus d'eau du tout.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le mardi 09 octobre 2018, 09:48:35
« Et bien, ils ont l’air de s’amuser, tous les deux, déclara Randal.
- Oui, plutôt. Ça fera peut-être une personne de plus qui éloignera Jimmy de ses écrans », répondit Suzy.
Le duo, qu’il fallait pratiquement qualifier de couple, observait la scène, à demi dissimulé plus loin sur la rive. Au bout de quelques instants, il s’éloigna, laissant Bug et Ghost à leurs affaires. L’écureuil, à bout de force, n’était pas bien loin de capituler. Mais c’était un têtu. Dans le feu de l’action, il profita de l’étreinte pour embrasser Leny sur la bouche de manière assez fougueuse, parce qu’il en avait envie, parce qu’il en avait également besoin pour s’offrir une ouverture. Et déjà il profitait de cette dernière. Ses mains descendirent le long du dos de Leny, trouvèrent sa queue, tirèrent de manière assez brusque. Il enchaîna par une balayette puis par une pression sur les épaules. Pouf ! Voilà Leny sous l’eau. Il gloussa.
« Je suis trop fort ! »
Mais il se demandait si, justement, il n’y était pas allé trop fort. Le coup du bisou l’avait lui-même déstabilisé. Il réalisait que c’était la première fois qu’il embrassait une fille.

* * * Quelques minutes plus tard * * *

Jimmy se hissa sur la berge, secoué par une quinte de toux. Il avait bu la tasse.
« J’me rends ! J’me rends ! » haleta-t-il.
Pour un peu, il se serait affalé dans l’herbe, tant il était claqué. Nager, chahuter comme ça, il n’y avait rien de mieux pour se dépenser et là, il avait dépensé sans compter. Son souffle retrouvé, il lorgna du côté de son caleçon abandonné. Il devrait le laver et n’aurait donc d’autre choix que de pour l’instant se rhabiller sans. Mais avant de pouvoir se rhabiller, il fallait se sécher. Il prit à deux mains sa queue en panache et la tordit pour l’essorer. Il dégoulinait de partout. Pas de serviette… dans l’absolu, il devrait un peu courir, mais il n’en avait plus la force. L’action étant achevée, sa timidité refit un peu surface.  Il était nu, allait devoir le rester un petit moment, le tout à côté de Ghost elle-même nue… c’était embarrassant. Histoire de se donner contenance, il alla récupérer son portable, dans la poche de sa veste.
« En tout cas, c’était chouette… commença-t-il, mais voilà qu’à la lecture d’un message, son expression redevint subitement sérieuse. Merde… Ça, c’est pas bon… »
Il refit face à Leny et s’expliqua :
« Rodrigue, l’un de mes contacts à Metropolis, a été coffré. Et le Petit Mage a disparu. Je sais pas si tu connais. C’est pas un résistant, juste un artiste de rue un peu influant du quartier sud. C’est aussi un méga et un ami de Rodrigue. La Tech-13 a dû le supprimer dans la foulée, ha les raclures ! »
Une lueur de colère traversa ses yeux bleus.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le mardi 09 octobre 2018, 15:51:24
Leny sortit de l'eau à son tour. L'écureuil avait été plus combatif qu'elle ne l'avait anticipé ; il n'avait cessé de la surprendre. L'embrasser sans prévenir, elle ne s'y était pas attendue ! Heureusement, l'expérience lui parut être dans le sens normal des choses. Leur activité était si dangereuse – ils pouvaient d'un jour à l'autre être capturés ou abattus – alors le temps était spécialement précieux, quitte à brusquer un peu les choses. Qui savait combien d'heures il leur restait à passer ensemble.

Comme pour appuyer sa pensée, la gaieté de Jimmy disparut en un instant, annihilée par le message qu'il venait de recevoir. La méga perdit également son sourire au profit d'une expression concernée. Un peu étourdie par le revirement brutal, elle glissa :

– Mh. On peut encore y faire quelque-chose ?

Par réflexe, elle se pencha vers l'écran du téléphone, même si elle n'espérait rien y voir en particulier. Le nom du petit mage réveilla chez-elle quelques vagues souvenirs – et c'était d'ailleurs des souvenirs assez récents. Hélas, c'était également des souvenirs liés à son père, et le moins qu'on pouvait dire, c'est qu'elle n'avait pas été très attentive à ce que celui-ci faisait… surtout ces dernières années. Néanmoins, il n'y avait pas tant de mégas que ça dans le monde du spectacle.

– J'ai déjà entendu mon père parler de lui. Je croyais qu'il travaillait avec lui, en fait… ou qu'il voulait que ça arrive ? J'sais pas trop. J'aurais pu mieux écouter. Je savais pas que c'était important.

Des gouttes d'eau tombaient de son front. Elle était tout aussi trempée que l'écureuil, mais sa fourrure était également plus courte – elle sécherait plus vite. D'ailleurs, le poil ainsi collée au corps, elle paraissait plus maigre, et surtout plus féminine. Dans cet état, difficile de s'y tromper : ses hanches étaient finalement suffisamment marquées pour contraster avec sa taille fine. En revanche, elle n'avait pratiquement pas de poitrine, seulement deux tétons noirs qui pointaient un peu et se voyaient assez au milieu de son poitrail blanc. Elle se servait de sa queue pour astucieusement cacher le reste.

– Tu veux qu'on rentre ?

Elle commençait tout juste à intégrer la nouvelle. Le réseau de la résistance, c'était encore frai pour elle.

– Ton ami, Rodrigue, il a des infos importantes ? Il connaît l'emplacement du camp ? On va devoir évacuer, tu crois ?
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le mardi 09 octobre 2018, 19:36:43
« Non, Rodrigue ne connait pas l’emplacement du camp. Lionel a dû te le dire, on ne donne cette information à personne. Il n’y a que nos hauts responsables qui savent où sont les cellules. »
Jimmy déposa son téléphone et se tourna vers la rivière. Il passa une main nerveuse sur sa tête, mettant un peu d’ordre dans ces poils. Sa fourrure colée au corps l’amincissait certes un peu, mais il était loin d’être maigre. Lui-aussi cachait l’essentiel avec sa queue. C’était assez facile.
« Rodrigue me servait d’agent en ville. Enfin, pas qu’à moi, mais souvent quand même. Il était un as du cambriolage. Il subtilisait des infos que je pouvais exploiter. C’est lui, par exemple, qui nous a permis de copier la carte d’accès de l’administrateur de la centrale. D’une certaine manière, c’est grâce à lui qu’on a découvert Mortus. Malheureusement, on peut rien faire pour l’aider. Attaquer un convoi carcéral, ça demande trop de moyen et on risquerait sérieusement d’y perdre des plumes. Et monter une intervention sur la prison, c’est encore pire. »
Il soupira et regarda Leny.
« C’est les risques. Faut plus y penser. Il semble que la Tech-13 soit sur les dents, c’est donc qu’on les emmerde et ça, c’est positif. Tâchons de les emmerder encore plus, que Nox se fasse péter une durite ! »
Il devint silencieux, sembla vouloir ajouter quelque chose, mais n’en fit rien. En dépit de la mauvaise nouvelle, cette pause à la rivière lui avait fait beaucoup de bien.

* * * Trois jours plus tard * * *

« …Tous ses éléments mis en corrélation me conduisent à la quasi certitude qu’un labo secret consacré à Mortus se trouve sous cette installation. »
Jimmy se tut, laissant à tout le monde le temps d’assimiler l’information. La réunion, comme d’habitude, avait lieu chez Daniel. Randal, Leny, Suzy, John et Amanda étaient assis face au projecteur holographique. Un appareil aussi moderne dans une maison aussi rustique, ça faisait un peu bizarre, mais peu importait. Plus personne n’y faisait attention. Pour Ghost, c’était sa première vraie réunion. L’écureuil venait de finir son exposé. Daniel, debout à côté de lui, s’avança d’un pas.
« Il est manifeste que la Tech-13 déploie beaucoup de moyens pour nous cacher ce projet. Comme vous l’a expliqué Bug, les protocoles de sécurité sont comparables à ceux employés dans la Tour 13, le QG du Docteur Nox. Je pense donc capital d’aller fourrer notre museau là-dedans. »
Randal détailla l’image actuellement affichée par l’hologramme. C’était celle d’un bâtiment, vu du ciel, entouré d’une campagne morose. Le bâtiment en question était officiellement une usine de retraitement de déchets. Elle se situait d’ailleurs non loin de la décharge de Metropolis.
« Je suis tout à fait d’accord avec le bouquetin, commença le chat, dont le ton léger aidait à détendre l’atmosphère. Faut qu’on aille voir. Le problème c’est que, la première fois, on est un peu resté bloqué dans le premier couloir.
- Cette fois, on sera prêt, répondit Bug. Nous n’avons pas réussi à nous emparer des codes d’accès avec des accréditations assez élevées, contrairement à la dernière fois, mais peu importe car cette fois, j’infiltrerai le bâtiment avec vous. Je pourrai donc faire sauter toutes les sécurités bien plus facilement.
- Ho, chouette, jubila Randal. Je vais pouvoir rectifier ce 14 à 9 qui m’afflige !
- Ouais ben ça, c’est pas sûr mon pote ! »
Lionel se racla la gorge pour rappeler aux deux amis que la réunion n’était pas terminée. Randal retrouva un peu de sérieux.
« Notre objectif, boss ?
- Dans l’absolu, vol de données, et destruction de l’installation, répondit le vieux bouquetin. Cependant, ne soyons pas présomptueux, détruire totalement l’installation est probablement hors de portée. Vous n’aurez pas à faire à de simples gardes quand l’alerte sera donnée et nous n’avons pas pu localiser un point névralgique où positionner une bombe, faute de cartes des lieux. Le seul et unique objectif prioritaire est le vol de données.
- Je vois, fit Randal.
- Les gars, insista Lionel, vous faites pas les cons. Si vous vous faites bloquer en bas, vous y passez tous.
- Peut-être qu’une fois sur place, on trouvera d’autres moyens d’extraction, compléta Bug, mais jusqu’à preuve du contraire, nous ne connaissons qu’un seul accès, l’ascenseur. »
Lionel parcourut ses troupes d’un regard pénétrant.
« Tout le monde est ok ? » demanda-t-il.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le mardi 09 octobre 2018, 20:29:05
Leny était assise au deuxième rang. Pendant la présentation, elle était restée discrète et impassible. Ses yeux passaient de Lionel à Bug, en s'attardant peut-être un peu plus sur ce dernier. Si elle ne souriait pas, les échanges entre l'écureuil et le chat la mettaient quand même de bonne humeur. Il fallait s'y faire : chez-elle, l'essentiel passait par le regard. On put aussi y lire la surprise, puis un peu d'inquiétude, quand l'informaticien déclara qu'il allait s'infiltrer avec eux. Mais elle ne dit rien du tout à ce sujet.

Elle attendit l'ouverture des questions pour intervenir.

– La dernière fois, y'avait, mh, une dizaine de soldats avec des armures pour protéger. Un robot de combat aussi, assez gros – peut-être ils l'ont démontés pour le faire passer. Du coup, si le sous-sol est du même genre… on risque de les rencontrer dans un seul couloir… Alors, eh ben, porte ouverte ou pas… Même si on est invisibles, ils auront presque qu'à tirer au hasard pour nous avoir. En fait que la porte soit fermée ça nous a plutôt sauvés quand on y était.

L'hybride se racla la gorge, puis se souvint d'un détail supplémentaire :

– Ah et il y a des tourelles laser aux plafonds aussi. Elles peuvent nous détecter je crois. Je sais pas trop comment après. Enfin ça la dernière fois Randal l'a explosée assez facilement en fait. Voilà.

Elle espérait ne pas ressembler à la novice qui angoisse gratuitement. La première mission, après tout, elle s'était jetée dedans sans même savoir de quoi elle en retournait. Elle leur avait fait confiance, et finalement tout s'était plutôt bien passé… mais ça n'était pas une raison. Même si, c'était vrai, la perspective de retourner sous terre ne la rassurait pas plus que ça. Pour ne pas paraître trop dans l'objection, Leny tenta une proposition. Tant pis si c'était idiot, avec un peu de chance ils ne se moqueraient pas trop longtemps d'elle.

– Il nous faudrait quelque-chose pour les obliger à sortir ? Ou pour les neutraliser même ? Si c'est souterrain, doit y'avoir un système de ventilation. On pourrait introduire quelque-chose dedans ? Ou juste le détraquer ?

La mega jeta un regard en coin à Bug. Pour sûr, ça devait être dans ses cordes.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le mercredi 10 octobre 2018, 08:49:44
Personne ne se moqua des interventions de Leny. Ce fut Lionel qui répondit :
« Si Bug doit faire partie de l’infiltration, c’est pour éviter d’être détecté par les systèmes de sécurité. Il sera aux premières loges afin de pirater tout ça efficacement. Avec en plus ton propre pouvoir d’invisibilité, vous serez en théorie capables de ne pas déclencher l’alerte. Pas d’alerte, pas de troupes de choc ou d’autocannon déployés. »
Le bouquetin poursuivit à l’intention de tous :
« Tant que votre extraction n’est pas assurée, je vous conseille vraiment de rester dans l’ombre. Tant pis si vous ne détruisez rien, connaître les intentions de la Tech-13 sera déjà un pas énorme pour nous.
- T’en fais pas, vieux, on fera ça en douceur.
- Saboter la ventilation, ça reste une bonne idée, tint à préciser Bug. Faut juste pas le faire en amont de l’intervention, mais si on a besoin de créer de la pagaille, ça pourrait marcher.
- Parfait, reprit Lionel. On se prépare selon notre formule habituelle. Bug part sur site mettre en place ses drônes espions.
- Je l’accompagne, fit Suzy.
- Très bien, fit Lionel.  Mettez en place les roulements. On observe deux, trois jours, puis intervention. »

* * * Un jour plus tard * * *

L’atmosphère dans le camp avait changée. D’après Randal, c’était comme ça à chaque fois. Durant la période d’observation, l’équipe se relayait par duo ou trio afin de mener à bien l’indispensable observation de terrain. Tout ce qui se passait autour de l’usine de retraitement de déchets était noté. Leny eut droit à sa période de surveillance qu’elle effectua en compagnie du chat. Passé le stress d’aller sur site, ce fut surtout ennuyeux. Rester planquer à regarder les écrans des drônes espions, ça n’avait rien d’excitant. Au camp, difficile d’oublier l’intervention qui s’approchait. Elle pouvait bien sûr être annulée si l’observation se passait mal ou mettait en lumière des difficultés imprévues. Jusque là, le décompte se poursuivait inexorablement.

* * * Deux jours plus tard * * *

C’était très tôt, le matin. Le jour n’était pas encore levé. Randal, Ghost, Bug et Suzy venaient de se réunir dans l’armurerie. Le bruit des armes qu’on préparait, des affaires qu’on mettait avait quelque chose de presque lugubre en dépit des plaisanteries du chat. Suzy, en tenue noire, vérifiait son imposant fusil de précision. Elle le démonta puis s’empara d’une paire de gros pistolets. Randal avait retrouvé sa dégaine de commando. Mr Bug, un peu fébrile, examinait le contenu de sa mallette. À côté de celle-ci, son pistolet petit calibre, ce serait sa seule arme. Il avait gardé l’essentiel de sa tenue civile, mais avait par contre troqué sa  veste en jean pour une veste noire renforcée.
« Hé, oublie pas ça, l’ami », dit Randal en tendant à Bug un silencieux.
L’écureuil le vissa au bout de son pistolet. Le félin se tourna ensuite vers Ghost.
« T’es prête ? » lui demanda-t-il.
D’un instant à l’autre, ils allaient tous embarquer dans la jeep d’Hector pour l’intervention. John et Amanda attendaient, sur site.

Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le mercredi 10 octobre 2018, 13:48:11
Leny était exaltée. Tellement qu'elle clignotait, par moment – son pouvoir la faisait alternativement apparaître et disparaître pendant quelques dixièmes de secondes. On aurait dit une ampoule victime d'un faux contact. Elle se chauffait.

L'hybride rangea sur le côté son pistolet, un petit calibre également muni d'un silencieux. Elle l'avait choisi avec Randal. Avant son intégration à la résistance, elle n'avait jamais eu à faire usage d'une arme à feu, comme le félin l'avait vite découvert. Pendant ces quelques jours, l'équipe l'avait donc formée de manière express. Elle était encore loin d'être tireur d'élite, mais finalement elle apprenait plutôt vite – assez pour être dangereuse, en tout cas. Elle avait aussi troqué son couteau dépliable pour une lame plus grande (mais pas aussi grande que celle voulue initialement par Randal). Ça, elle maîtrisait mieux.

Enfin, elle avait même consentie à prendre sur elle pas moins de cinq unités d'un explosif léger. Les cartouches se présentaient comme des plaquettes de quelques centimètres de côté, dont une des faces était adhésive. Elles détonnaient au bout d'une dizaine de secondes, lorsqu'on les activait. Juste le temps de se mettre à couvert. Pas de quoi défoncer une porte haute sécurité, mais assez pour endommager du matériel ou débloquer une sortie dans des murs normaux. Le chat lui avait assurée qu'elles étaient sûres – que de par leur conception, elles ne risquaient pas d'exploser si elles chauffaient ou étaient perforées. Ça avait mis la méga un peu plus en confiance.

Au final, elle était beaucoup mieux armée que la première fois. Presque un peu trop à son goût, car elle avait peur de ne pas réussir à se concentrer sur son pouvoir, qui était quand même l'essentiel de sa contribution à l'équipe. Mais en cas d'imprévu, c'est sûr qu'elle pourrait se défendre. Leny portait sinon une tenue très semblable à celle de Suzy. Elle avait aussi un bandana noir noué sur la tête, pour ne pas être gênée par la sueur.

– Oui chef, répondit-elle à Randal, d'un ton volontairement trop protocolaire. Beaucoup plus que la première fois, honnêtement, chef.

Elle avait cessé de jouer les vétérans. L'illusion ne tenait pas de toute façon. Alors elle avait finalement plutôt opté pour l'attitude du petit soldat consciencieux.

Leny sourit à Bug, placé de l'autre côté du félin, et lui fit un petit signe enthousiaste de la main, le poing fermé près du menton. Ça signifiait « on va gérer grave » ou quelque-chose comme ça.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le mercredi 10 octobre 2018, 16:16:07
Lorsque les hybrides sortirent de l’armurerie, Lionel leur souhaita bonne chance. Il y eut ensuite le trajet en jeep avec cet Hector colossal et quasi mutique. L’ours conduisit le groupe d’abord à un second véhicule, stationné en lisière de la forêt et dissimulé sous des branchages. C’était un camion d’aspect très banal. Hector se mit à nouveau aux commandes alors que l’équipe se planquait à l’arrière. L’approche du site se faisait en camion car il fallait pénétrer quasiment dans la banlieue de Metropolis. Un véhicule de ce genre n’allait pas attirer l’attention, d’autant moins que les observations de terrain avaient permis de constater que l’usine était souvent alimentée par des poids lourds. Aucun incident ne vint troubler le trajet. Lorsque le groupe retourna à l’air libre, l’aube commençait à poindre à l’horizon, faisant pâlir le ciel. En tournant la tête, il était possible de voir les lumières urbaines et les immeubles démesurés. Un vent vif et humide apportait des effluves peu agréables. Au loin, la rumeur d’une autoroute.

Leny, forcément, connaissait les lieux. Elle n’eut pas besoin qu’on lui dise où aller pour retrouver John et Amanda. Le camion d’Hector repartit et l’équipe d’intervention, maintenant au complet, mena à bien les derniers préparatifs, à l’abri sur le terrain vague encombré d’épaves de voitures. La décharge à proprement parlée n’était pas loin et ça se sentait.
« Du neuf ? demanda Randal.
- Négatif, fit Amanda.
- Alors parfait. On mets les écouteurs et les micros.
- On s’est toujours pas décidé pour la paire de lunettes thermiques, dit Bug qui venait de chausser sa propre paire.
- Je prends », dit John.
Bug et John allaient être en mesure de tout voir, même en étant invisibles. Cela allait faciliter la coordination. Randal aurait dû être le porteur de la seconde paire, mais il ne se sentait pas très à l’aise avec ce genre de matos. L’écureuil, sa casquette jaune sur la tête, ses lunettes sur le front, se tourna vers Ghost.
« Tu t’en sors avec l’oreillette et le micro ? »

* * * 10 minutes plus tard * * *

Les six résistants s’immobilisèrent devant l’ascenseur. Ils étaient invisibles, silencieux. Bug piratait tout avec une facilité déconcertante. Jusque là, pas l’ombre d’une difficulté. Les quelques gardes de l’usine ne se doutaient de rien. Et le personnel, abruti par des heures de travail nocturne, encore moins. Cela semblait encore plus facile que la première fois. Randal attendit que le couloir soit vide avant d’ouvrir la porte de l’ascenseur. Il fit signe aux autres d’entrer et pénétra en dernier dans la cabine. Ils étaient un peu à l’étroit, mais rien d’ingérable.
« Ghost, arrête l’invisibilité, demanda Bug. La caméra au-dessus de nous est neutralisée. »
Sitôt fait, l’écureuil inséra dans l’appareil de contrôle une carte magnétique reliée par un câble à son téléphone spécial, un gros modèle customisé. Il se mit à pianoter sur les touches. L’appareil, qui au début, refusait la carte, se mit à l’accepter et l’étage secret apparût.
« Je suis un as ! fanfaronna l’écureuil.
- Allez, on y go », fit le chat en démarrant l’ascenseur.
Bug continua de pianoter. Il devait préparer l’arrivée dans le labo avant que l’ascenseur ne soit arrivé.
« Ok, mes protocoles fonctionnent. On va arriver dans un couloir, il y a deux gardes. Je neutralise les caméras mais les gardes vont voir l’ascenseur s’ouvrir.
- Je prends celui de gauche, dit Amanda.
- Celui de droite, dit Randal. Ghost, remet l’invisibilité.
- On arrive dans 25 secondes, précisa Bug. L’étage est vraiment profond, comme celui de la central hydraulique. »
25 secondes plus tard, les portes s’ouvrirent. Leny entendit deux balles partir, étouffées par les silencieux, et vit les deux gardes du couloir s’effondrer, morts. Le couloir évoquait un tube sombre, parcourut sur sa longueur par des lignes vertes lumineuses.
« C’est exactement comme la dernière fois, souffla Randal.
- Il me faut un ordinateur, dit Bug. Je dois avoir un point d’accès direct au système du labo pour piller leurs données.
- N’oublie pas de chercher le plan, précisa Suzy. Commence même par ça. »
Le groupe avança, s’empara des deux cadavres, poursuivit jusqu’à une porte et pénétra dans un lieu tout blanc. Des ordinateurs, il y en avait, là, mais il y avait aussi des gens en blouse blanche qui travaillaient dessus. Trop de monde, et des gardes pour surveiller, impossible de faire le ménage. Il fallait trouver un endroit plus discret. Le groupe poursuivit, suivant souvent des gens pour éviter de se faire remarquer par l’ouverture des portes.
« Ça a l’air grand, nota John.
- Un labo de pointe, ajouta Bug. Regardez, certains ont des masques et des gants, c’est pour garantir la non contamination virale ou quelque chose du genre.
- La Tech-13 fait dans la biologie maintenant ? souffla Suzy.
- Regardez, là, la petite salle, fit remarquer Randal. Un seul homme, un ordi, et même un placard pour nos deux cadavres.
- Nos trois cadavres », rectifia Amanda.
L’homme fut supprimé aussi proprement que les deux gardes, puis rangé dans le placard. Bug prit place à l’ordinateur, brancha ses appareils. Les autres attendaient à côté. La porte de la salle ayant été fermée, on se sentait un peu en sécurité. Mais c’était si précaire. Un moindre faut pas et cette opération, qui pour l’instant se passait à la perfection, pouvait virer au cauchemar.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le mercredi 10 octobre 2018, 22:09:51
La mission se déroulait dans un calme étrange. Entourée de toute une équipe, Ghost se découvrit elle-même sereine au-delà de ses attentes. Elle faisait partie du groupe, elle accomplissait sa part, et tout ça paraissait naturel. Six personnes, ce n'était pourtant pas si facile. Heureusement, cette fois, ils avaient prévus de quoi se déplacer de manière plus coordonnée. Ça lui facilitait beaucoup la tâche, même si elle ne pouvait pas non-plus penser à grand-chose d'autre que d'avancer en silence et que de faire en sorte que rien ne dépasse de ses sphères.

Une fois arrivée dans la petite pièce, et le seul scientifique présent abattu, la méga se permit de demander :

– J'peux faire une pause chef ?

Physiquement elle était capable de tenir, mais garder une telle concentration sur la durée avait un coût psychologique. Quelques secondes d'interruption lui permettraient de souffler. Elle demandait quand même – même si les caméras étaient à l'évidence déjà piratées. Elle ne voulait commettre aucune erreur… car, tout simplement, leur vie en dépendait.

Bien sûr, leur vie dépendait encore davantage de la capacité de Bug à infiltrer le système sans déclencher d'alarme. Tout le monde mettait sa vie entre ses mains, et c'était un peu lui qui faisait l'essentiel du travail. Leny se dit que peut-être même qu'à l'occasion, ils pourraient accomplir des missions seulement tous les deux ? Finalement, avec un peu d'expérience, ils seraient presque aussi efficaces comme ça. Vue de l'extérieur, l'idée d'un duo semblait hasardeuse, ils n'étaient que des gamins… mais elle plaisait beaucoup à la méga.

Elle rajusta son bandana, toucha la crosse de son pistolet, pour s'assurer qu'il était bien là. Elle n'osa pas parler à Bug. Même s'il continuait de frimer, il était à l'évidence très concentré. Il avait la pression. Elle n'osa pas parler tout court, en réalité. De toute façon elle n'avait rien d'intelligent à dire.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le mercredi 10 octobre 2018, 23:51:44
« Ouais, vas-y, Ghost, repose-toi, répondit Randal sur un ton posé, avant de poursuivre de manière plus comique. Et puis ne m’appelle pas chef, ça me met la pression ! »
Bug était effectivement très concentré. Devant lui, le moniteur faisait défiler des données assez rapidement. L’écureuil, presque debout sur la chaise pour combler sa petite taille dans cette installation à dimension humaine, tapait sur le clavier avec une dextérité de pro. Ses yeux sautaient d’une ligne à l’autre, ses grosses lunettes de nouveau remontées sur son front. Leny, qui l’observait, nota la perle de sueur qui lui descendait doucement le long du museau et finit par poindre sur sa petite truffe. Il la chassa d’un revers de la main. Les autres, derrière lui, regardaient plutôt son écran. Ce dernier finit par afficher un plan en 3D.
« Ok, déclara Bug, on a le plan du complexe. Bon, ça a pas l’air trop grand, mais quand même, ça va nous aider. »
Amanda se pencha par-dessus Jimmy et désigna des points sur l’écran.
« On dirait que ça communique avec un autre réseau.
- Le métro, suggéra Randal. Je crois que c’est le métro de la ville.
- Je savais pas qu’il allait si loin, remarqua Suzy. On n’est même pas dans la banlieue.
- Ben, il faut croire que si, parce que ça ressemble bien au métro, dit John qui prit une photo de l’écran afin d’avoir le plan sur lui.
- On a donc une autre voie d’extraction, conclut Randal. Bug, conserve le plan dans tes appareils et commence le pillage des données.
- Oui chef !
- Ha non, tu vas pas t’y mettre toi aussi ! »

Le plan disparût et Bug recommença à pianoter. Pendant ce temps, John et Amanda s’étaient mis à étudier plus en détail le plan photographié.
« Le nom des salles donne déjà des indications sur le but de cet endroit, déclara la femme. On dirait un labo en biocibernétique.
- La Tech-13 veut manger des parts de marcher à Biosoft ? intervint Suzy, septique.
- C’est ceux qui font de super anibot ? demanda Randal, qui n’avait pas une grande culture générale à ce niveau.
- Oui, répondit John.
- Alors ça m’étonnerai, reprit Randal. C’es trop caché pour avoir juste un but commercial. Nox cherche probablement à créer une nouvelle arme. »
Un grommellement provenant de Bug ramena l’attention vers lui. Il avait lancé le Transfer, ça se voyait grâce à la barre de progression, mais l’écureuil semblait en proie à des difficultés. Certaines de ses commandes étaient rejetées.
« Bordel, mais… pourquoi… » marmonna-t-il.
Randal lui mit une main sur l’épaule.
« Un souci ? Tu penses qu’ils ont détectés l’intrusion ? »
Ce ne fut pas Jimmy qui donna la réponse, mais l’ordinateur. L’écran devint subitement noir, et de nouvelles ligne de textes apparurent :

"Message de : Docteur Oswald Nox
À : Jimmy alias Mr Bug
Game Over, petit hybride. Pour toi et tes amis, la partie s’arrête là."

Il y eut un silence de stupéfaction générale. Il était tout à fait possible que le Dr Nox lui-même soit à l’origine de ce blocage. L’homme n’avait pas bâtit sa réputation de terreur en restant toujours planqué derrière ses subalternes. Non, il lui arrivait d’agir lorsqu’il le fallait. Il dressait des pièges, manipulait et, très souvent, lorsqu’il était dans la partie, ça se finissait très mal. Parce que c’était un génie doublé d’un monstre ! De tous le groupe, c’était Bug qui semblait le plus accusé le choc.
« Je comprends pas, je comprends pas comment il a fait pour me remonter ! » balbutia-t-il, la panique s’invitant déjà dans ses mots.
Randal débrancha ses appareils et se tourna vers les autres.
« On dégage ! On est grillé ! »
Au même moment, l’alarme se mettait à hurler, les lumières viraient au rouge. John leva son pistolet et détruisit la caméra positionnée juste au-dessus d’eux. Randal, toujours stoïque, secoua l’écureuil vigoureusement.
« Du calme Bug, du calme. Il faut te reprendre. Nox est peut-être loin d’ici, il peut pas t’empêcher de tout faire. On va y aller et tu vas pirater tout ce qui se présente !
- Je..
- Bug !
- Oui, oui, je vais le faire.
- En route tout le monde ! Ghost, au travail ! On va vers le métro ! »
Randal, Ghost, Suzy et Bug sortirent de la petite pièce. John allait suivre, mais Amanda le retint…

Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le jeudi 11 octobre 2018, 22:29:18
Depuis une semaine, tout le monde avait peur.

Philippe – Flip comme l'appelaient ses amis – n'était pourtant pas du genre anxieux. À quarante ans passés, il approchait de l'âge auquel on était normalement plus simple surveillant. On passait coordinateur, on se reconvertissait dans un secteur moins critique. Mais pour Flip, aucune promotion en vue. C'est qu'il n'en voulait pas – il était comme ça, il aimait la routine de ce job. Il n'avait pas de famille à nourrir, et il détestait les responsabilités. Ça lui avait réussi… en presque vingt ans de carrière à la Tech13, il n'avait jamais été blessé. En fait, les fois où il avait eu à sortir son arme étaient si rares qu'il se souvenait précisément de chacune d'entre-elles.

Pourtant, ces derniers jours, la tension était montée en flèche. Il y avait eu une attaque sur une installation du même genre que celle qu'il gardait. Oh ça, tout le monde n'était pas au courant. Être affecté à un étage secret, ce n'était pas si commun – on évitait, pour des raisons évidentes, de trop diffuser l'information. Mais tout le monde sentait que le risque pesait. La garde avait été doublée : deux surveillants partout où il n'y en avait qu'un. Ça n'était pas pour rien.

En plus, Flip, lui, avait un neveu qui faisait le même travail que lui, et qui était en poste à la centrale au moment de l'attaque. Il n'avait rien eu, non : les intrus n'avaient même pas franchis la porte derrière laquelle il se trouvait. Leur système de sécurité demeurait le meilleur au monde. Restait que derrière une bière, il avait quand même prétendu que les attaquants, ce jour là, étaient capables de se rendre invisible. Le garde n'était pas assez stupide pour ne pas voir là le signe évident qu'un méga était impliqué, même si la Tech13 n'en disait rien.

– Tu vois, moi, j'te dis comme je pense. Si la résistance a trouvé un nouveau méga à intégrer dans ses rangs, c'est une putain de mauvaise nouvelle. Avec les mégas, on sait ja-mais à quoi s'en tenir. Faut s'attendre au pire, jt'e le dis petit. Au pire.

Quand l'alarme retentit, Flip était justement en train d'évoquer, sur le ton de la conversation, le sujet avec un collègue. Un qui avait la moitié de son âge – un bon gamin qui irait sûrement beaucoup plus loin que lui.

– Oh putain. Qu'est-ce que j'te disais.

Quelques instants plus tard, ils reçurent dans leurs oreillettes des instructions précises. L'étage était infiltré – un groupe avait piraté un terminal du labo 3. L'indication qui suivit étonna à peine le garde : les intrus étaient invisibles. Bien sûr, ils n'étaient pas équipés pour ça. Les renforts arrivaient, il n'y avait pas à s'en faire pour ça, mais alors quoi ? Ces types de la résistance, c'étaient tous des tueurs froids. Ça allait être un massacre. Comme ça avait été un massacre à la centrale. Flip le savait très bien.

Malheureusement, même si la tentation était grande, il ne pouvait pas juste se contenter de ne rien faire, ou de faire semblant. Ils étaient enregistrés, et ils seraient jugés en conséquence de leurs actions.

– Bon, fais pas le con gamin, conseilla-t-il tout de même à son collègue. La cavalerie arrive. On va sécuriser la sortie B. On sera sous couverture de l'autocanon.

Il s'agissait de ne pas tarder. La sortie B était un des points clés du bâtiment – celle qui permettait d'accéder à la rame souterraine. Ils en étaient les plus proches – une seule pièce, un long couloir semblable à celui de l'autre entrée, les en séparait. Les gardes se positionnèrent dans la salle aussi vite qu'ils le purent. Flip, avait malgré l'entraînement accumulé un peu d'embonpoint. Enfin, c'était bien suffisant.

De chaque côté du corridor, des panneaux spéciaux étaient disposés. Ils les firent pivoter vers l'extérieur. En posant un genou au sol, ils étaient ainsi protégés par deux petits murets blindés. Un interstice était prévu pour poser le canon de leur arme et pour leur permettre de viser tout en restant en relative sécurité. En dehors de ça, le passage n'était toutefois pas bloqué et restait relativement large.

Puis ils attendirent, le regard passant de la porte – qu'ils avaient refermée – à la tourelle automatique au plafond, sortie mais pour l'instant immobile. Une minute. Deux minutes.

Enfin, la porte coulissa… presque sans bruit. Le silence ne dura pas. Les gardes avaient ouvert le feu en rafale sur l'encadrement de la porte. La tourelle, elle, n'avait toujours pas tiré. Les crépitements de leurs lasers couvrirent même le bruit de la petite capsule qui venait de rebondir sur le sol.

– Grenade ! hurla Flip.

C'était trop tard. Le fracas de l'explosion molesta ses tympans, et pour lui tout redevint brutalement silencieux. Le projectile venait de réduire son jeune collègue à l'état de purée rouge. Flip n'en était pas sorti indemne. Il sentit une douleur aiguë remonter de son flanc droit, mais il était toujours vivant. Il ne disposait pas des secondes de réflexion qui lui auraient permis de savoir comment.

L'autocanon s'était enfin activé. Il prit l'événement comme un signe que les assaillants invisibles étaient finalement entrés dans la pièce. Alors, avec un seul bras, Flip se remit lui aussi à tirer. Presque au hasard – le sang obscurcissait la vision, il ne pouvait plus viser, et d'ailleurs à quoi bon. Il n'eut pas très longtemps pour le faire…

Mais il eut le temps d’apercevoir une flaque rouge, sur le sol, à quelques mètres devant lui.

– Putain, touché, grommela-t-il, avant de s'affaisser.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le vendredi 12 octobre 2018, 00:28:13
« Tain merde, je crois que je suis bonne pour revoir Miss Belle…
- Merde ! Tu vas tenir le coup, Suzy ?
- Mais oui, mon chou, comme toujours !
- John et Amanda sont toujours pas là !
- On n’a pas le temps pour se demander où ils sont passés, Bug ! Bon, la tourelle, c’est fait. Bug, la porte !
- Je peux plus rien faire, Randal ! Nox a dût marquer mes algorithme, mes accès sont rejetés et je peux pas recoder un truc en pleine…
- Ghost, tes explosifs, file-les moi !
- On a les troupes de choc qui débarquent par l’arrière !
- Au sol ! Restez pas debout, vous allez vous en prendre une !
- Randal, les troupes de choc vont pouvoir nous voir !
- Je sais Bug, je sais ! Attention, explosion ! Parfait, on se tire ! »

Poussé par l’adrénaline, les quatre hybrides débouchèrent dans un tunnel qui ressemblait fort à ceux du métro. Randal, aussitôt, se plaqua contre le mur, juste à côté de la porte qu’il venait de faire sauter avec l’intégralité des explosifs de Ghost, puis il lança dans l’ouverture fumante deux grenades de suite. Il fallait absolument stopper l’avancée des troupes de chocs. L’alarme, bien qu’un rien atténuée en cet endroit, continuait de hurler aux oreilles. Jimmy, partagé entre peur et concentration, se demandait par quel espèce de miracle il n’avait pas encore encaissé un laser tant il en avait vu dans tous les sens. Il baissa les yeux et vit la traînée rouge que laissait Suzy. Ça semblait sérieux. Il préféra ne rien dire, ils ne pouvaient rien faire.
« Bug, appela Randal. Tu as le plan du métro ?!
- Ça peut se trouver !
- Barrez-vous avec Suzy et…
- Non, Randal, le coupa Suzy. Je reste, je les ralentis et tu te tires.
- Ça, c’est hors de question !
- Randal, je ne vais pas pouvoir partir. Si je peux être encore utile, c’est ici, c’est maintenant. »
Il  y eut un petit silence, silence très relatif vu le vacarme. Lorsque le chat reprit la parole, ce fut d’un ton grave.
« Ok Suzy. Ghost, Bug, avec moi !
- J’ai le plan, mais ces tunnels n’y figurent pas.
- Pas grave, on prend à gauche ! »

Ils n’étaient plus que trois à courir le long d’un étroit rebord de béton brute. À gauche, le mur, à droite, les railles électrifiées en contrebas. Aucune lumière, sauf celles des torches que venaient d’allumer les hybrides. Derrière, tout d’un coup, une explosion bien plus importante que toute les autres. La bombe, bien sûr, la bombe qu’avait emporté Suzy au cas où ils auraient trouvés un endroit où la placer. La gorge du chat se serra. Il avait aimé la renarde… Plus tard pour les larmes.

« Avec un peu de chance, la bombe a obstrué la sortie du labo, se contraint à dire Randal. Si c’est le cas, on est sorti d’affaire !
- Non, Randal, non, je crois pas !
- Pourquoi ?
- Parce que le Docteur Nox a prévu qu’on allait fuir par là !
- Ne dit pas n’importe quoi ! Nox n’est pas un dieu ! Il peut pas tout prévoir !
- Randal ! Il n’y avait que deux sorties dans ce labo, le métro, proche de notre position, et l’ascenseur, nettement moins pratique. Et j’ai téléchargé le plan et Nox sait ce que j’ai téléchargé !
- Bug, on verra bien, mais en attendant, constate qu’on est seul dans ce tunnel ! »

* * * Ailleurs, au même moment * * *

« …Parce que le Docteur Nox a prévu qu’on allait fuir par là !
- Ne dit pas n’importe quoi ! Nox n’est pas un dieu ! Il peut pas tout prévoir !
- Randal ! Il n’y avait que deux sorties dans ce labo, le métro, proche de notre position, et l’ascenseur, nettement moins pratique. Et j’ai téléchargé le plan et Nox sait ce que j’ai téléchargé !
- Bug, on verra bien, mais en attendant, constate qu’on est seul dans ce tunnel ! »
Les voix étaient retransmises par le téléphone piraté de Jimmy, ce pauvre Jimmy qui n’avait pas encore réalisé que depuis sa connexion à l’ordinateur du labo, ses propres appareils étaient devenus des mouchards. Oswald eut un rictus. Le petit écureuil avait été un adversaire intéressant, mais la partie était bel et bien terminée. Le docteur pressa un bouton.
« Agent Volte ? appela-t-il.
- Oui Docteur ?
- Vous les voyez ?
- Affirmatif. Trois cibles hybrides, deux petites, une plus grande.
- Abattez la grande. Je veux les deux autres en vie. »

* * * Dans le métro * * *

L’agent Volte et son groupe étaient positionné au bout du tunnel, un long tunnel en ligne droite, sans aucune couverture. L’agent épaula son fusil de précision. Dans son viseur, comme il l’avait dit, trois silhouettes rendues vertes par le détecteur thermique. Il tira, la grande silhouette tomba.

Leny, qui courait juste derrière Randal, le vit tomber mais ne put freiner et bascula par terre à son tour. Bug, alerté par le tir, alerté par le bruit qui suivit, fit halte.
« Randal, qu’est-ce que je disais ! » lâcha-t-il d’une voix blanche.
Il n’obtint pas de réponse, ou plutôt, elle vint d’ailleurs, d’en face. La voix d’un homme surgit des ténèbres du tunnel, une voix de militaire :
« À genoux, mains sur la tête ! La méga, stoppe ton pouvoir, de toute façon, il te sert plus à rien ! »
Bug abaissa sur ses yeux ses lunettes thermiques et aperçut pas moins de dix formes, droit devant.
« Randal, Ghost, on est fait », murmura-t-il.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Le Messager le vendredi 12 octobre 2018, 01:41:00
Il fallait se rendre à l'évidence : en quelques instants, les résistants avaient perdu tout contrôle sur la mission. Leny suivait le mouvement, mais elle n'était pas dupe. John et Amanda étaient trop loin pour qu'elle puisse les protéger, trop loin pour qu'ils aient la moindre chance de les rejoindre… et Suzy, ça ne faisait aucun doute, s'était sacrifiée pour leur permettre de mettre un peu de distance avec le commando.

C'était beaucoup à encaisser d'un seul coup. Trois pertes sur six agents… même s'ils revenaient avec des informations importantes, à ce stade, ce serait une victoire à la Pyrrhus. Pour la cellule, le prix était simplement trop élevé.

La méga ne disait rien, parce que Randal était encore optimiste – et parce qu'elle avait besoin de le croire. Mais même leur fuite semblait désespérée. Ils ne savaient pas où allaient les tunnels qu'ils empruntaient, et ils s'y déplaçaient à pieds. Si les hommes de la Tech13 avaient le moindre véhicule capable d'y circuler et un moyen de les repérer, ils pourraient les rattraper en un rien de temps… Enfin, elle s'accrochait à l'idée qu'il restait une échappatoire qu'elle ne pouvait voir… comme la dernière fois qu'ils avaient été acculés, et que Bug les avaient sauvés in-extremis.

Cet espoir, il fut mouché par un bref claquement. Un bref claquement et le chat chuta devant elle, la faisant trébucher à son tour. L'hybride se releva en un instant, de l'adrénaline plein les veines, les jambes arquées – prête à bondir. Elle eut un moment de stupeur en réalisant qu'un liquide chaud avait giclé sur elle. Incrédule, elle porta la main à son visage. Du sang, l'odeur ne trompait pas – de nouveau, Ghost était couverte d'un sang qui n'était pas le sien. Mais cette fois-ci ce n'était pas celui d'un ennemi.

Il lui fallut peu de temps pour réaliser.

– Jimmy… je crois… Ils ont eu Randal.

Elle entendit une voix autoritaire lui commander de coopérer ; elle lui sembla lointaine. Un frisson glacé la parcourut. Sans le félin, l'équipe n'avait plus de leadership. Immédiatement, elle se sentit toute seule et complètement perdue. Ils étaient deux gamins abandonnés à eux-mêmes, coincés dans une situation qui les dépassait. Bien sûr, ils avaient perdu, ça, elle l'avait déjà intégré. Sous le choc, elle céda néanmoins à une réaction plus émotionnelle.

– J'les laisserai pas t'avoir, fit-elle, déterminée et tremblante à la fois, en se retournant vers l'écureuil.

Leny se plaqua contre lui, offrant son dos au sniper. Si ce dernier décidait de tirer, ce serait elle qu'il aurait en premier, se disait-elle. Pour une raison qu'elle ne s'expliqua pas, cette idée la rassura. Puis, doucement, ils descendirent sur les genoux, face à face. Enfin, ils apparurent, à la lumière de la dernière lampe-torche allumée. Ils n'étaient que deux minuscules silhouettes aux longues queues figées par l'appréhension.

L'hybride ne put retenir la pensée que, peut-être, c'était la dernière fois qu'elle posait les yeux sur son compagnon. Plus encore que le reste, cette perspective la hantait. Muette, tous les autres mots restèrent coincés dans sa gorge.
Titre: Re : Les Chroniques de Mobius, acte 3
Posté par: Mascotte le vendredi 12 octobre 2018, 10:22:18
Jimmy, ses yeux plongés dans ceux de Leny, avait l’air si triste. Pour autant, demeurait en lui quelque chose de solide. Il était résistant par conviction et avait toujours su que ce moment pouvait arriver. C’était juste que dans ses songes, il s’était imaginé mourir pistolet à la main, de manière bien filmique. Ho, bien sûr, il pouvait se relever, prendre son pistolet et se faire abattre dans la seconde. Il pouvait aussi retourner son arme contre lui. Dans l’absolu, il faudrait qu’il le fasse car il était le cerveau de l’équipe, il savait des choses et ne doutait pas une seconde qu’on allait le faire parler. Mais tout le monde ne s’appelait pas Suzy, foutu ou pas, on ne se donnait pas la mort d’un claquement de doigt. De plus, Bug ne voulait pas laisser seule Leny. Lui-aussi, il voulait la protéger.

D’une main fébrile, il pressa son micro et murmura :
« John, Amanda, je ne sais pas si vous m’entendez. Randal et Suzy, morts. Ghost et moi-même, pris.
- Mains sur la tête ! ordonna de nouveau la voix de Volte.
- Ça va… ça va… » bougonna Bug en obtempérant.
Les pas des soldats s’approchaient. Des lampes torches braquaient maintenant les deux hybrides. L’écureuil jeta malgré lui un regard au corps de Randal dont la tête laissait voir un vilain trou… Il frissonna. On le saisit, ainsi que Ghost. On les remit debout. On les fouilla minutieusement. On leur retira micro, oreillette, armes, appareils. On les menotta, mains dans le dos. Les entraves étaient tout à fait adaptés à des poignets d’enfants hybrides car, contrairement aux enfants humains, ils étaient très tôt indépendants, entreprenants et donc, potentiellement dangereux. Il n’était pas rare d’en arrêter. Enfin, on mit au cou de Ghost un fin collier rouge dont elle sentit l’aiguille s’enfoncer dans sa nuque. On ne les ménageait pas, les gestes étaient brusques, rapides, mais pour autant, pas de brutalité gratuite.
L’agent Volte surveillait la manœuvre à quelques pas de distance. Il finit par contacter le docteur.
« C’est fait. »
Ghost et Bug purent entendre la réponse donnée par une voix grave qu’ils ne purent que reconnaître, l’ayant entendu à la télé, celle de Nox :
« Parfait. Évacuez-les en toute discrétion. Le lémurien, surtout, ne doit être vu de personne. Laissez des hommes sur place, on n’a pas encore eut tout le monde. »

* * * 15 minutes plus tard * * *

John fit halte, le souffle court. Amanda le rejoignit et tous deux se dissimulèrent derrière une des innombrables carcasses jonchant la décharge. L’odeur était affreuse et le coin dangereux, mais c’était infiniment plus sûr que là d’où ils venaient.
L’intuition d’Amanda avait été salvatrice. Ils s’étaient emparés des uniformes des deux premiers gardes abattus. Ils s’étaient ensuite mêlé aux autres gardes, la confusion des premiers instants ayant joué à leur avantage. Puis, l’essentiel de l’attention s’étant porté sur les hybrides en fuite, ils avaient poursuivi la mission. Après avoir subtilisé au hasard quelques disques de donnés, ils étaient ensuite sortis par l’ascenseur. Sans le jeu d’acteur des deux humains, jamais ils n’y seraient arrivés. Au bien sûr, la Tech-13 avait fini par comprendre, il avait fallut courir, tuer une ou deux personnes… Maintenant, ils avaient un peu de répits. Combien de temps ? Les hélicoptères de la corporation sillonnaient le ciel. John sortit un téléphone portable de sa poche, composa un numéro. Il entendit tout d’abord la modulation, démodulation provoqué par l’appel crypté. Enfin, une voix répondit.
« C’est pour quoi ?
- Pour commander un soda.
- Bonjour John, ça faisait un moment. J’imagine que c’et grave.
- Contacte Lionel. Le camp de base est compromis : Randal et Suzy morts, Bug et Ghost pris. Amanda et moi, on est en fuite, ils vont nous traquer jusqu’au bout du monde si on n’a pas un coup de main.
- Ok. Tenez bon, on va vous sortir de là.
- Ho, une dernière chose. On a des données sur Mortus. On va planquer les disques, je te communiquerai où. »